Le défenseur latéral, ex-grand espoir de l’AJ Auxerre, est rentré sur ses terres bigourdanes en 2023 en même temps que son frère Damien, pour aider à structurer son club formateur et épauler une nouvelle équipe dirigeante. Il se partage entre le poste de manager général et entraîneur, avec déjà une certaine réussite : le TPF, remonté en National 3, est bien parti pour s’y installer.

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos : Philippe LE BRECH

Le rendez-vous à Tarbes était (presque) fixé. L’entrevue avec Marc Fachan programmée. Mais le calendrier, notre calendrier, en a décidé autrement. Quel regret ! Moi qui aime le sud-ouest, la convivialité, j’aurais été servi !

Du coup, c’est en visio que le manager/entraîneur du « TPF » (Tarbes Pyrénées Football) a répondu à nos questions, en direct de… chez lui, avec le ciel bleu au-dessus de la tête – « Il n’y a pas que chez toi, à Nice, qu’il fait beau ! » – et le Pic du midi de Bigorre et ses 2 876 mètres à sa droite, qui orne le blason du club, « Je le vois en tournant la tête ! ». Merci pour l’accueil virtuel ! Et mea culpa !

Une nouvelle dynamique

Photo Philippe LE BRECH

En tout cas, Marc Fachan n’a pas forcé son accent chantant de la région, qui vous donne la banane, et n’a pas joué un rôle pendant l’heure qu’il a passée avec nous, faisant preuve d’une grande convivialité. Pour un peu, on se serait cru dans les montagnes. Les Pyrénées forcément. Elles sont si imposantes. Si importantes. Elles surplombent et longent Tarbes, sa ville (45 000 habitants), dont il est originaire et qu’il défend becs et ongles. « Non, Tarbes ce n’est pas du tout une ville-dortoir, même si, bien sûr, on ne va pas venir s’y installer sur un coup de tête ! C’est une ville identitaire, où il y a un esprit montagnard, où les gens sont là de génération en génération. »

Tarbes, on y a déjà mis les pieds. Rapidement. Le temps d’un match de foot, en CFA (National 2). C’était un Tarbes-Cannes, en mars 2014, juste avant un 1/4 de finale de coupe de France entre Cannes et Guingamp. À vrai dire, cela ne nous avait pas semblé folichon. Et puis il n’y avait pas grand monde au stade Maurice-Trélut, situé juste derrière celui du rugby, que l’on voit en travers depuis la tribune.

Mais c’était il y a 11 ans, et depuis, le foot s’est refait une belle santé dans la préfecture des Hautes-Pyrénées. Le soir des matchs, il y a de nouveau beaucoup de monde au stade. Parce que les arrivées des nouveaux dirigeants (Carlos Amorim et Patrick Desai, coprésidents) et de Marc Fachan, en 2023, ont coïncidé avec le retour d’une équipe identitaire, dans laquelle se reconnaissent à nouveau les Bigourdans. Les prémices d’un renouveau s’étaient déjà fait ressentir sous l’ancienne présidence, avec Régis Vidal.

International U19

Photo Philippe LE BRECH

Titulaire depuis cette années du DES, un diplôme qui lui permet d’entraîner jusqu’en N2, Marc Fachan, 36 ans, est un peu l’enfant du club. Celui qui y a grandi dans les catégories de jeunes avant de partir au pole espoirs de Castelmaurou puis au centre de formation de l’AJ Auxerre, où il a passé 5 ans. Il est revenu à l’été 2023, en Régional 1, en même temps que son frère Damien, 35 ans, avec qui il a évolué en National à Dunkerque, un club qui l’a vraiment marqué, également à Carquefou (National) et à Bergerac en N2. Marc Fachan a aussi vécu des expériences en Division 2 espagnole (Alavès, Tarragone), au RC Strasbourg, en National, avant de « finir » en N3 à Anglet. Depuis, le TPF est monté en juin dernier en National 3, à l’issue d’un barrage.

Mais ce que l’on ne savait pas, c’est que l’ancien international U19, grand espoir auxerrois à la fin des années 2000, avait signé à l’âge de 19 ans au Dynamo Kiev. Une expérience malheureuse, qu’il raconte sans tabou. Mais avec quelques regrets, parce que, s’il est fier de sa carrière et de son parcours, il sait que partir en Ukraine, seul, à ce moment-là, ne fut pas un choix opportun. Mais comme il y a toujours des choses à prendre dans chaque expérience, bonnes ou mauvaises, celle-ci lui a aussi donné des billes.

Marc Fachan : « Refaire de Tarbes un super club de N3 ! »

Photo Philippe LE BRECH

Tu as la double casquette entraîneur / manager : pas trop difficile à gérer ?
Je n’ai pas le choix ! J’aimerais avoir plus de temps pour ma fonction d’entraîneur mais je me suis organisé pour ça, j’arrive à allier les deux. Tarbes, c’est mon club, c’est ma ville, c’est ma passion. Le plus dur est passé au niveau structurel. On a des partenaires privés et publics qui nous suivent, donc c’est plus facile à gérer, on ne ne sent pas seul. J’ai des appuis derrière moi, qu’on a réussi à fédérer pour nous permettre d’avancer. On part de zéro. Il faut bien se mettre à l’esprit que l’on est un club amateur et ça c’est le plus dur : je n’ai pas d’analyste vidéo, je n’ai pas de préparateur physique, je suis coach, je suis manager, je suis analyste, je suis prépa… Je touche à tout, ça me passionne, j’essaie de bien caler mon agenda pour respecter mon organisation, afin de ne pas m’éparpiller.

Y a-t-il une volonté d’étoffer le staff ?
On a un entraîneur des gardiens, on s’organise au niveau médical, on a trouvé un kiné, ça tourne, les joueurs savent comment cela fonctionne. J’ai juste à m’occuper des rendez-vous avec le médecin, et là c’est plus compliqué parce que notre territoire est un désert médical. Heureusement, on a des liens avec quelques-uns pour nous faciliter la tâche. En fait, tout s’organise. Le but aussi, c’est de se dire que, si un jour je pars, le club continuera de tourner, parce qu’on aura tout mis en place.

« Entraîner, j’ai toujours eu ça dans un coin de la tête »

Photo Philippe LE BRECH

Quand as-tu su que tu voulais entraîner ?
En vrai, je me le suis toujours dit. Je l’avais dans un coin de ma tête. J’ai toujours eu de bonnes relations avec mes coachs quand j’étais joueur, je les ai toujours respectés, et je pense que c’était réciproque. Moi, j’avais le respect aussi pour cette fonction d’entraîneur qui n’est pas simple, parce que gérer 25 mecs quand tu en as 10 qui ne jouent pas le week-end… Bon, ce côté-là, aventure humaine, passion, ça m’a toujours fait envie. Quand je suis allé à Anglet, où j’avais prévu de vivre, parce j’adore le Pays Basque et l’océan aussi, j’ai passé mes premiers diplômes en continuant à jouer pendant deux ans en National 3, avant de venir à Tarbes.

Justement, comment as-tu atterri à Tarbes, chez toi, dans « ton » club ?
C’est venu tout seul. Il y a eu un changement de président au TPF. Carlos, c’est un ami (Carlos Amorim, le coprésident avec Patrick Desai) . On a fait ce projet ensemble. Il m’a convaincu de venir. Et puis feu ! On a décidé de foncer dans cette aventure. Voilà comment j’ai « enquillé » à Tarbes. J’avais déjà le BEF, qui me permettait d’entraîner en Régional 1, le niveau de l’équipe fanion à mon arrivée, mais j’ai failli ne jamais aller à Tarbes.

Ah bon ?
Oui, le club s’est sauvé de justesse en Régional 1 en 2023, à l’avant-dernière journée, sur un miracle. Je les voyais aller en Régional 2 et là, jamais je ne me serais engagé. Tant mieux que l’histoire se soit passée comme ça. Je n’avais pas encore pris ma décision à ce moment-là mais vu que mon frère, Damien, rentrait lui aussi à Tarbes, je me suis dit que c’était un signe : le club se maintient, mon frère revient et Carlos (Amorim) veut que l’on fasse le truc ensemble… Cela n’a pas été une évidence mais une réflexion, parce que je quittais beaucoup de choses sur le Pays Basque, mais en tout cas on a foncé dans le projet. J’avais de toute façon prévu d’arrêter à Anglet. Tout s’est parfaitement coordonner.

« Une saison, c’est long »

Photo Philippe LE BRECH

Pas trop dur de faire la transition joueur / coach ?
Non, l’adaptation a été naturelle. J’ai toujours fait partie des cadres dans les équipes quand je jouais, j’avais ce côté « gestion des mecs ». Je n’ai pas senti que c’était un truc où je devais lire 20 bouquins pour gérer un vestiaire. J’ai lu beaucoup de choses, bien sûr, pour apprendre, pour avoir d’autres billes que celles que j’avais, j’ai appris, mais j’avais ce côté-là je pense en moi. Pour le moment, je pense que je m’en sors bien par rapport à ça.

Le rythme des séances ?
On en fait trois le soir en semaine, plus le match du week-end. Le mercredi, je passe voir les équipes du club, je regarde comment ça entraîne, etc.. Oui, trois séances, c’est juste, c’est un équilibre à trouver avec les mecs qui bossent, qui ont des vies de famille. On fait une quatrième séance avec les jeunes qui ont le temps de la faire, qui sont demandeurs, mais c’est important aussi de garder de la fraîcheur mentale. Une saison, c’est long.

Tu disais que le coprésident était un ami…
Carlos a été mon entraîneur chez les jeunes. C’est quelqu’un qui a toujours cru en moi. Il coache encore aujourd’hui au club : il a les 17 ans. L’an passé, il avait les 18 ans. Petit à petit, du fait de sa fonction de président, il lâche un peu celle d’entraîneur pour s’y consacrer, mais il a cette passion du football, il a toujours entraîné, il adore les gamins, et puis quand je vois tout ce qu’il fait pour le club. En fait, lui, il est plus axé sur l’administratif, et Patrick Desai, l’autre président, s’occupe plus du sportif. Évidemment, je connais mieux Carlos, avec j’ai une relation privilégiée depuis gamin : il était persuadé que je ferais une carrière, et on a gardé ce lien au fil des années, et là, on se retrouve, l’histoire est belle. Les deux coprésidents ont des caractères qui matchent, ils sont complémentaires.

« Mon frère ne sera jamais sur le banc ! »

Damien Fachan, le frère de Marc (ici avec son coéquipier Maxime Dannfald). Photo Philippe LE BRECH

À Tarbes, tu es « rentré » en même temps que ton frère Damien, que tu entraînes du coup…
Mon frère bosse dans un cabinet de prothésiste-dentaire. Il aurait pu continuer à jouer, et même plus haut qu’en National 2. Il est rentré aussi pour des raisons familiales. Cela faisait quand même quelques années qu’il était parti pour le foot, et du coup, au moins, je me suis dit, on le fait ensemble ce projet aussi.

Mais devoir « gérer » son frère, ce n’est pas trop difficile ? Imaginons que tu le mettes sur le banc…
Il ne me fera jamais la gueule (rires), et en même temps, il ne sera jamais sur le banc (rires) comme ça c’est dit ! C’est mon frère, c’est mon capitaine, c’est notre pilier. On a construit l’équipe autour de lui. Il est exemplaire. C’est une chance incroyable de l’avoir, surtout pour les jeunes, de par l’exemplarité qu’il met à notre niveau. Il ne faut pas oublier que la N3, on n’y est que depuis deux mois. Mais déjà, l’exemplarité qu’il a mis en Régional 1, l’humilité qu’il a eue, et qu’ont eu certains joueurs de retomber à ce niveau, je pense aussi à « Manu » Delgado, qui est Tarbais, et que l’on a fait revenir (ex-Toulon, Annecy, Fréjus/Saint-Raphaël et Hyères). Tout ça fait que, forcément, derrière, les autres suivent; ça entraîne tout le monde.

Qui a parlé le premier à l’autre du « projet Tarbes » ?
C’est Dada (Damien). Il m’avait dit qu’il rentrait. Il savait que je voulais rester sur le Pays Basque, où j’étais installé depuis deux ans avec ma compagne. Mais il ne m’a pas dit « Viens absolument à Tarbes », non, c’est moi qui ai pris la décision de venir, et je ne le regrette pas parce que je vis une aventure exceptionnelle.

« Il fallait remettre des valeurs de territoire à Tarbes »

Photo Philippe LE BRECH

Pas trop difficile de passer du Pays Basque à la Bigorre ?
(Rires) Tu m’as demandé si j’avais du temps pour assouvir d’autres passions (lire plus loin le « tac au tac »), je peux te garantir que le temps est rare mais dès que l’on peut, on part au Pays Basque, on a des amis là-bas, j’y suis souvent. Quand j’ai besoin d’océan, de me faire plaisir, j’y vais ! En 1 heure 15 de route, j’y suis, mais je suis vraiment très heureux à Tarbes, je m’y sens très bien.

Tarbes, ville de rugby, ville industrielle, où le rugby a toujours eu une place importante : le foot trouve t-il la sienne ?
Avec les coprésidents, quand on a fait le brainstorming de début de saison, on s’est demandé comment on allait développer le projet, ce qu’on allait mettre en place. Il y a un contexte, or le contexte n’était plus du tout respecté chez nous : quand on faisait l’analyse, on voyait qu’il n’y avait plus de joueurs de chez nous, du 65 (du département des Hautes-Pyrénées), ou même du grand sud-ouest. Donc à partir de là, difficile pour les gens de se reconnaître dans cette équipe. Et si on a du monde aujourd’hui qui vient au stade, il y a une raison. Mais pour faire revenir les gens, il fallait qu’ils arrivent à se reconnaître dans cette équipe, et pour ça, il fallait remettre des valeurs du territoire, et à Tarbes, c’est très important.

Tarbes n’est pas du tout une ville-dortoir : certes demain tu ne vas pas te dire « je vais m’installer à Tarbes », mais c’est une ville où les gens sont d’ici, de génération en génération, ancrés dans le territoire, qui connaissent la Bigorre, qui ont ce côté montagnard, qui aiment les randos, avec un aspect familial. Le football a exactement les mêmes valeurs que le rugby chez nous. Si tu ne te déchires pas pour le copain, si tu ne mouilles pas le maillot, si tu n’as pas ce côté familial, ce côté « amis », alors tu n’es pas fait pour jouer ici. C’est ça qui est passionnant, parce que lorsqu’on est arrivé au club, on s’est demandé ce qu’il fallait faire pour que les gens reviennent au stade, pour que les entreprises et les élus nous suivent, et quels joueurs on allait prendre. On a vraiment remis un projet identitaire au sein du club, une vraie identité bigourdane, de chez nous, avec des vraies valeurs sur le terrain, afin que les gens prennent du plaisir en tribune, et ça a pris. Et puis forcément, quand tu fais une montée de Régional 1 en National 3, ça valide le projet.

« Aujourd’hui, le club n’est pas prêt pour aller National 2 »

Le public revient de plus en plus nombreux au stade Marcel-Trélut. Photo TPF

Le club a quitté le National 2 en 2018 : peut-il retrouver cet échelon un jour ?
J’ai une lucidité et une humilité qui d’abord m’ont permis de vite m’adapter à ce contexte amateur, et ce n’est pas simple, parce que j’ai connu aussi un niveau plus haut, et qui me font dire que… La vérité, c’est qu’un club, pour aller en National 2, il doit avoir aujourd’hui un budget minium d’ 1,2 million d’euros. Si tu ne les as pas, tu mets ton club en danger au niveau structurel. En National 2, les joueurs sont quasiment des professionnels, entre guillemets, des professionnels smicards du foot, et très peu d’équipes s’entraînent le soir. En fait, les joueurs vivent du foot en N2, on appelle cela du professionnalisme, toutes proportions gardées, et ça, il ne faut pas l’oublier. Il faut que ton club soit prêt et à l’heure actuel, le Tarbes Pyrénées Football n’est pas prêt. J’estime que ce serait presque dangereux d’y aller.

Après, ce qu’il faut, c’est mettre en place un projet pour se dire, « Bon, on a envie de redevenir un club de N3 », et forcément, le budget reste le nerf de la guerre, tu as besoin de staff, de joueurs qui peuvent se dire « le foot est presque mon métier mais pas totalement », et pour passer ce cap-là, il faut des moyens. Ici, tout le monde travaille et ce n’est pas négociable. C’est un équilibre qui correspond à la structure de notre club. Bien sûr que j’aimerais avoir demain les joueurs à disposition tout le temps, mais ça ne correspond pas à notre club, on se tromperait d’objectif. Refaire de Tarbes un super club de N3 et continuer à faire ce que l’on fait chez les jeunes, où toutes nos équipes sont quasiment en Régional 1, il est là notre axe de progression, sur les jeunes, pour garder ce projet d’identité et alimenter les seniors. On a le Pau FC à côté, mais avec un budget incomparable au notre, on n’est pas invité à la table, donc, restons tranquille sur nos objectifs, stabilisons le club en N3 et développons nos jeunes. Ce qui ne veut pas dire que l’on n’a pas d’ambition.

Le maintien en N3 est donc l’objectif; quid de l’équipe réserve de R3 ?
Elle a raté la montée en R2 l’an passé à la dernière journée à la maison. C’est l’objectif prioritaire de la ramener plus proche de la National 3. Et pour la N3, l’objectif est d’exister dans ce championnat : je suis lucide sur notre effectif, on a de supers jeunes, avec quelques anciens qui les entourent, avec de supers axes de progression, donc si on fait bien notre taf… On n’a pas de limite en fait. Si tu me demandes quel est l’objectif avec la N3, je te réponds « le maintien rapidement » et ensuite, c’est justement de ne pas avoir de limite.

« Il y a un plafond de verre »

L’équipe réserve de Régional 3 visera l’accession en R2 cette saison. Photo TPF

C’est comment, le National 3, dans ta poule ?
Je l’ai connu et découvert à Anglet pendant mes deux dernières années, ça joue quand même. Il y a des supers joueurs. C’est une poule ultra-homogène, avec des grosses équipes comme Arcachon, Agde ou Anglet qui ont des budgets colossaux par rapport au nôtre.

Et dans le département, quelle est la 2e meilleure équipe ?
C’est Lourdes, qui vient de remonter en Régional 1.

L’avenir du football à Tarbes passe-t-il par un rapprochement avec un club voisin ? On se souvient qu’au rugby, Tarbes et Lannemezan avaient fusionné avant de retrouver leur indépendance ?
Non (catégorique). Il n’y a aucun autre gros club susceptible de faire naître cette réflexion, de se dire « si on matche les deux, ça permettrait de passer un cap », comme Bergerac et Trélissac l’avaient envisagé à un moment donné, pour un projet qui aurait eu de la gueule. Il y a un plafond de verre, il faut être lucide. Je l’ai dit, c’est le N 3.

« Je suis obsédé par la victoire »

On connaît l’importance du rugby à Tarbes : y a-t-il une synergie avec le « Stado » (Stado Tarbes Pyrénées Rugby) ?
Tout le monde suit le rugby chez nous ! Ils jouent en championnat le vendredi soir, mais pendant ce temps-là, nous, on fait nos veilles de match sur le terrain à côté. Mais j’ai toujours suivi les résultats du « Stado ». Le sport à Tarbes a été très compliqué ces dernières années. On était sur une décennie de descente. Le club de foot a failli ne plus exister. Franchement, si on était descendu en Régional 2, les subventions auraient baissé, et là, c’était « finito ». Il faut que demain, si on n’est plus là, le TPF continue de tourner.

Les deux coprésidents, Patrick Desai (à droite) et Carlos Amorim. Photo TPF

Sur un plan personnel, le fait d’être Tarbais, de revenir dans le club où tu as commencé, est-ce que cela te met une pression supplémentaire ?
La légitimité, il faut la gagner. C’est rare d’arriver quelque part en terrain conquis. Pour moi, c’est en gagnant des matchs, en ayant des résultats au niveau du club, que … Peut-être que les gens ont pensé, quand je suis arrivé, « OK, Marc, il a joué en pro, mais il n’a jamais entraîné », mais peut-être que d’autres ont pensé « C’est top, avec son vécu, il va apporter au club ». On peut le voir de plusieurs manières différentes. Je suis né et j’ai grandi dans la compétitivité, avec cette pression du résultat. Je me suis mis une grosse pression en arrivant au club, pour avoir les meilleurs résultats possibles. On a eu ce barrage d’accession en National 3 en juin dernier, qui s’est bien terminé (victoire 1 à 0 à Carcassonne face à Atlas Paillade Montpellier, sur un but de Manuel Delgado), tant mieux. On a eu la chance de monter, les feux sont au vert, tout roule, je suis super content pour le club ! Maintenant, voilà, je me dis toujours que personne n’est indispensable. Mon but, c’est que demain, si je ne suis plus là, le club continuera de tourner.

Après, le fait d’être Tarbais, bien sûr, ça me met une petite pression complémentaire, complètement. Quant tu es chez toi, que tu connais tout le monde, que tout le monde te parle du club en ville, au resto, tu as envie que les gens te disent « Put… c’est trop bien ce que vous faites au club… » Tu as envie que les gens soient fiers du club qu’ils vont voir le week-end, et c’est ce que l’on a réussi à créer autour de Tarbes. C’est pour ça que les gens viennent. La pression du résultat, de toute façon, moi, je suis obsédé par la victoire. Mais pour gagner, il faut construire. Pour l’instant, je pense qu’on le fait bien mais je sais qu’on aura des jours compliqués dans l’année, comme on en a eu aussi la saison passée, mais ça fait partie du taf.

Marc Fachan du tac au tac

« Je suis un coach à l’inverse du joueur que j’étais ! »

Photo Philippe LE BRECH

Ton meilleur souvenir sportif ?
Ma première sélection en équipe de France U19, en en Italie, je l’attendais avec impatience.

Pire souvenir ?
J’en ai quelques-uns (rires) ! Je dirais le match nul 2-2 chez nous avec Dunkerque contre Boulogne lors du dernier match de National (saison 2016-2017). Une victoire nous aurait permis de finir 3e et barragiste, et on serait monté (finalement, c’est le Paris FC qui a fini 3e et qui est monté de National en L2, malgré sa défaite en barrages aller-retour contre Orléans). Notre coach était corse (Didier Santini) et il savait que le Sporting-club de Bastia allait couler et que ça libérerait une place…

Combien de buts marqués dans ta carrière ?
Très bonne question ! Pas beaucoup mais j’ai toujours marqué ! Sur ma dernière saison avec Anglet, en N3, j’en ai mis 8 ou 9 je crois.

Ton plus beau but ?
Avec le Racing-club de Strasbourg, en National, contre le CA Bastia, à La Meinau, un intérieur du pied à la Thierry Henry. Un bon souvenir car ce but avait permis de gagner.

Photo Philippe LE BRECH

Pourquoi as-tu choisi d’être défenseur ?
Je n’ai pas choisi ! C’était une opportunité entre guillemets. J’alternais les postes au centre de formation d’Auxerre, sur les côtés, devant, en 9 et demi ou en 10, et un jour, en coupe Gambardella, il y a eu une opportunité de jouer latéral droit. C’était le début de l’ère moderne, avec des latéraux. Guy Roux m’a fait descendre à ce poste.

J’ai pensé aussi à ce moment-là qu’il y aurait peut-être un moyen pour moi de « monter » plus vite, plus haut, en jouant à ce poste, donc j’ai essayé de m’y adapter le plus vite possible et j’ai bien fait. Après, j’ai toujours eu cet état d’esprit de vouloir attaquer, parce que j’aimais ça, mais j’aimais défendre, donc le poste me convenait parfaitement.

Ta première fois dans un grand stade ?
C’était au « Tèfe » (Téfécé, Toulouse), avec le centre de préformation de Castelmaurou, on était allé voir un match, je ne sais plus lequel. Mais le premier vrai choc, c’est quand je suis arrivé au stade Abbé-Deschamps.

Photo Philippe LE BRECH

Ton geste technique préféré ?
Crochet intérieur, feinte de frappe ! Il marche encore celui-là, il n’a jamais été démodé (rires) ! C’est un geste simple à réaliser et très efficace.

Qualités et défauts sur un terrain selon toi ?
Mes qualités : j’étais régulier, je n’étais jamais vraiment mauvais, j’étais un bon contre-attaquant et un bon défenseur. Mes défauts : parfois trop caractériel, trop hargneux.

Tu as beaucoup joué en National : que t a-t-il manqué pour jouer en Ligue 2 en France ?
J’estime qu’il ne m’a rien manqué. Il y a un facteur chance qui n’a jamais trop tourné en ta faveur, et au bout d’un moment tu penses que c’est de ta faute, qu’il manque « le truc en plus ». Et il y a aussi un facteur « profil »: peut-être que je ne rentrais pas dans les cases, dans les fameux critères. Enfin, il y a eu aussi les blessures, et ça m’a coûté cher à des moments clés. J’ai eu de graves blessures (hernie discale) et à chaque fois, au lieu de te relancer, tu dois te re-relancer, ce n’est jamais simple. Mais je n’ai aucun regret sur ma carrière, elle a été belle, même si j’aurais peut-être pu faire mieux.

Le club où la saison où tu as pris le plus de plaisir ?
À l’USL Dunkerque. Sans aucune hésitation. Je n’avais plus trop goût au football quand je suis arrivé là-bas et j’ai trouvé à Dunkerque une ville qui me correspond, des gens qui me correspondent, un club avec des valeurs. J’ai aimé cette ville et ce club. j’ai encore des amis au club. J’y retourne dès que je peux. J’ai vu le nouveau stade, mais il n’était pas encore fini. Dunkerque méritait cet équipement.

« J’ai été opéré cinq fois du dos »

Lilian Roume. Photo Philippe LE BRECH

Un match où tu t’es dit après, « J’arrête le foot » ?
Non, je ne me suis jamais dit ça après un match. Ce sont surtout les blessures qui sont dures à encaisser. Quand tu arrives 27 ou 28 ans, que tu ne t’en sors pas, que ça pète à chaque fois… J’ai eu de graves blessures, j’ai été opéré cinq fois du dos, avec de grosses séquelles. Je suis revenu à chaque fois. Tu dois faire de la rééducation, tout seul, tu te prends en charge, tu te démerdes seul pour te soigner, et ensuite, soit tu reviens, soit c’est fini. C’est comme ça. Et là, tu te poses des questions, forcément.

Une erreur de casting dans ta carrière ?
Même si j’ai arrêté de jouer il n’y a pas longtemps, c’est sûr que ma carrière, j’ai eu le temps de l’analyser (rires) ! Après, me considérer vraiment comme joueur professionnel… J’estime que cela faisait déjà quelques années que je ne l’étais plus car à partir du moment où tu touches le National 2, tu ne l’es plus vraiment.

Pourtant, en National 2, il y a certains clubs qui fonctionnent comme des clubs de National voire de Ligue 2, même parfois en N3…
Oui et non, parce qu’il y a beaucoup de stades où tu vas au charbon tous les week-ends et ça, ça n’arrive pas en pro. Quand tu es à Cannes, par exemple, et que tu dois aller jouer en hiver sur des terrains où il y a plus de terre que d’herbe, devant quelques centaines de spectateurs, ce n’est pas simple. Tout le monde sait que le National 2 est un championnat amateur mélangé avec des pros.

Les seniors N3. Photo Philippe LE BRECH

Revenons à la question : une erreur de casting ?
Le Dynamo Kiev. C’était le pire choix de ma carrière. Je l’ai regretté et je le regrette encore. Avec le recul, et si j’avais été mieux entouré à ce moment-là, ce n’est pas le choix que j’aurais dû faire. Cela m’a coûté cher. Je sortais d’Auxerre et j’ai signé 5 ans là-bas ! Je suis reparti en Espagne au bout de cinq mois. Un mauvais épisode, un mauvais casting…

Comment t’es-tu retrouvé à Kiev ?
À Auxerre, j’étais un espoir du centre de formation, avec la génération 89, avec Willy Maeyens (ex-Sedan) on était avec le groupe pro, que j’avais intégré à l’âge de 17 ans et demi. C’était très tôt. On était en équipe de France jeunes, et forcément, la lumière s’allume vite à cet âge-là… J’avais beaucoup de clubs qui s’intéressaient à moi, et j’en ai sélectionné trois : Dynamo Kiev, Villareal qui me proposait d’intégrer le groupe pro et de jouer avec la réserve qui était en D2 au début, et Lille, où je devais partir… Mais j’ai bifurqué vers Kiev parce qu’avec Jean Fernandez, l’entraîneur d’Auxerre, on n’était pas sur la même longueur d’ondes quant à mon évolution de carrière, j’avais un bon de sortie, et voilà… Au dernier moment, j’ai choisi Kiev, un choix dicté par l’aspect financier. Kiev a écrasé la concurrence à ce niveau-là et aussi au niveau sportif, le club jouait la Ligue des Champions. Simplement, je ne me rendais pas compte de ce que c’était que de partir à l’étranger, dans un club comme ça, et quand je suis arrivé là-bas, je suis tombé dans un micmac d’agents très compliqué à gérer, le coach a changé, j’ai préféré partir, et ça m’a coûté cher.

Haoufou Guira. Photo Philippe LE BRECH

Tu en retiens quoi de cette expérience, de cette leçon ?
Aujourd’hui, les joueurs sont très entourés. Moi je ne l’étais pas assez. Je n’étais pas prêt pour un club de ce standing. C’était trop d’un coup. A cette époque-là, j’avais un agent, Jean Gérard Czajka, mais si tu n’es pas patient, si tu ne veux pas brûler les étapes… J’avais 19 ans, c’était tentant d’aller à Kiev, sauf qu’il y a eu un changement d’entraîneur au moment où j’y suis allé, et avec les licences intercommunautaires, il n’y en avait que trois, j’ai été switché, le nouveau coach ne me voulait pas; ça a été dur psychologiquement.

En plus, il y a eu l’histoire des 5 années de contrat que le club ne voulait pas payer… Je suis arrivé dans un club, je sortais de l’Abbé-Deschamps où on était couvé, protégé, et là, quand je suis arrivé, je me suis dit « Waouh », le centre d’entraînement du Dynamo Kiev, il faut le voir pour le croire ! C’était dingue ! Mais on ne t’accueillait pas à bras ouvert dans ce club, c’était chacun pour sa gueule, donc moi, Français, j’arrive, ils ne parlent pas ma langue, ils ne parlent pas anglais, pour l’intégration, c’était très dur, ils ne parlaient que le russe, l’ukrainien, le serbe, le croate… En fait, je compare ça à un choix universitaire, quand tu as tout bien fait, et que tu te plantes au moment de l’orientation après ta « draft ». Je n’ai pas su me relever comme je le souhaitais. Alors qu’en France, j’aurais pu me développer sereinement. Je n’avais aucun intérêt de partir à l’étranger à cet âge-là. Aucun. J’avais choisi Lille, j’aurais pu choisir même un autre club de Ligue 1… J’ai eu du mal à me remettre de ce choix.

Beaucoup de joueurs « rouge » à la récupération ! Photo Philippe LE BRECH

Un club où tu rêvais de jouer gamin ?
J’ai toujours été fan du Real Madrid mais je n’ai jamais rêvé d’y jouer, je n’étais pas dans ce truc-là. Par contre, il y a un joueur qui m’a fait rêver, c’est Thierry Henry, à Arsenal.

Pourtant tu as le maillot du Real Madrid là, non ?
Non, c’est celui du TPF (Tarbes Pyrénées Football), j’ai fait en sorte que cela ressemble à celui du Real ! On joue en Rouge et Blanc à Tarbes mais la tenue de sortie est différente, c’est blanc !

Un stade mythique ?
C’est Highbury, avec les invincibles d’Arsenal. J’étais fan absolument à cette époque-là. Après, quand tu as goûté une fois au Vélodrome, forcément, plus aucun stade ne lui arrive à la cheville après ça !

Photo Philippe LE BRECH

Un coéquipier avec lequel tu t’entendais bien dans le jeu ?
J’ai adoré joué avec un top attaquant, qui s’appelle José Mari, à Tarragone. Il avait joué au Betis Seville, à l’Atlético Madrid, au Milan AC, à Villareal… Il était en fin de carrière mais j’ai eu un super feeling avec lui, et franchement, quel joueur ! Même si on voyait qu’il était en mode tranquille, au bord de la mer, à Tarragone, et qu’il finissait sa carrière. J’ai joué 2 ans avec lui, un régal.

Un joueur perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?
J’ai des nouvelles de toute notre bande quasiment à Auxerre mais j’aimerais bien revoir Alain Traoré ! Je ne l’ai pas vu depuis les années d’Auxerre. Cela me ferait plaisir de le revoir.

Un attaquant adverse que tu n’aimais pas affronter ?
Khalid Boutaïb ! Il était chiant ! Il scorait à chaque fois ! Très malin, très chiant à prendre.

Photo Philippe LE BRECH

Un coach qui t’a marqué ?
Je pense à ceux que j’ai eu au centre de formation, qui m’ont permis de grandir. C’était strict, mais ils voulaient te faire avancer. Je pense à Gérald Baticle et Christian Henna. Gérald m’a fait passer un cap. Après, j’ai eu des tops coachs plus tard, comme Fabien (Mercadal) et Didier (Santini), des bons managers et des bons coachs.

Un coach perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?
Jacky Duguépéroux, à Strabourg. J’ai eu une relation particulière avec lui. J’aimerais bien le revoir.

Un coach que tu n’as pas forcément envie de revoir ?
Oui, mais je ne me souviens plus de son nom de famille, celui du Dynamo Kiev (rires) ! Il n’y avait même pas l’ombre du respect de la personne, j’étais un pion.

Le stade Maurice-Trélut de Tarbes. Photo Philippe LE BRECH

Un président marquant ?
Sans aucune hésitation, Marc Keller, à Strasbourg. Mais si tu vas en Alsace, beaucoup de gens te répondront la même chose !

Un président à oublier ?
Je ne vais pas en citer un, je n’aime pas trop ça, parce que je suis devenu manager d’un club, donc je vois les choses différemment. Bien sûr qu’il y a eu des choses électriques avec des présidents, mais quand tu passes de l’autre côté, tu comprends mieux.

Une causerie marquante ?
Celle de Cesar Ferrando, pour ma première en Espagne, avec Tarragone, on affrontait la Real Sociedad à domicile, je ne comprenais pas tout, même si j’avais le traducteur à côté, et je me disais « Waouh, je suis sur une autre planète », j’ai adoré, on avait gagné. Un super souvenir.

Photo Philippe LE BRECH

Une anecdote de vestiaire ?
Ce n’est pas une anecdote, mais plutôt des moments avec Dunkerque, pendant le carnaval, on était surmotivé, on faisait tout pour gagner le vendredi soir pour avoir la chance d’y aller le samedi, parce qu’on savait que si on perdait, on allait se faire allumer (rires) !

Le joueur le plus connu de ton répertoire téléphonique ?
(J’en ai quelques-uns) rires ! C’est un coach ! Luis de la Fuente ! D’ailleurs, j’ai oublié de le citer tout à l’heure !!! Comment je peux l’oublier ?! (Luis de la Fuente, actuel sélectionneur de l’équipe d’Espagne, fut son coach à Alavès, en D2 espagnole).

Combien de cartons rouges dans ta carrière ?
Pas beaucoup. J’ai dû en prendre 4.

Et depuis que tu entraînes, tu en as pris ?
Oui. J’ai eu un peu de mal à m’adapter… J’en ai pris deux je crois.

Une devise ?
Je répète souvent à mes joueurs de ne jamais oublier d’où ils viennent.

Combien d’amis dans le foot ?
Une quinzaine. C’est long 20 ans de foot (rires) !

Tu étais un joueur plutôt…
Avec la grinta.

Tu es un coach plutôt ?
Compréhensif, exigeant et ambitieux.

Le club de Tarbes ?
Il est identitaire, stable. Du moins il est devenu stable. Et lucide.

Des rituels, des manies avant un match ?
Alors ça, si tu as un joueur qui te dit qu’il n’en a pas, c’est un menteur, même un petit geste anodin ! Je suis croyant, donc je prie. Sinon, les mêmes vêtements, des trucs comme ça, mais je ne m’attachait pas trop à ça.

Le public lors de la venue d’Anglet, le mois dernier, à Trélut. Photo TPF

Et en tant que coach, tu as des manies d’avant-match ?
Je suis très calme avant un match. Je ne sors pas sur le terrain, je reste dans ma bulle, j’ai besoin de déconnecter. Mon tempérament de coach est totalement différent de mon tempérament de joueur. En fait, je suis tout l’inverse du joueur que j’étais. C’est un travail que j’ai dû faire sur moi-même, notamment dans la compréhension et la gestion de mes émotions. Je peux être électrique, mais c’est rare. Je lis beaucoup de livres sur le comportement personnel, mais je n’ai pas fait de formation spécifique. J’ai discuté avec des personnes spécialisées dans le domaine. Forcément, ça aide.

Tu as un style de jeu ?
J’aime dominer l’adversaire. J’aime le côté tactique. Après, possession, pas possession, moi, ce que je veux, c’est poser des problèmes à l’adversaire via un projet de jeu ou en t’adaptant à celui de l’adversaire, parce que parfois, il faut accepter de se dire que tu n’es pas au-dessus de lui et que donc, tu ne pourras peut-être pas mettre ton jeu en place. En fait, l’apprentissage du foot, c’est un monde sans fin. C’est passionnant. C’est pour ça que je me suis mis là-dedans.

As-tu le temps pour des passions en dehors du foot ?
Des passions, tu as plus le temps d’en avoir quand tu joues que quand tu es coach (rires) ! J’en ai deux : je suis passionné de mer et de montagne. J’ai la chance d’avoir l’océan pas loin et la montagne juste à côté ! Donc j’aime aller en rando, au ski ou surfer. Mes passions, c’est la nature ! Et ici, avec ce que m’offre la Bigorre, ma région, je me régale !

  • Texte : Anthony BOYER / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : Philippe LE BRECH (sauf mentions spéciales)
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L’ex-attaquant des années 90, reconverti entraîneur depuis plus de 20 ans, mais sans club depuis l’hiver dernier, retrace sa riche carrière, parle des ses expériences et évoque sans filtre sa personnalité, un peu méfiante, mais pas si réservée que cela !

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos 13HF et DR

« Nono » Cabezas, sur le port de Golfe-Juan Vallauris, la semaine dernière, à côté de Cannes.

Jean-Noël Cabezas donne rendez-vous au café L’Escale près du port à Golfe-Juan, entre Cannes et Antibes. « Viens on se met en face, de l’autre côté de la route, contre la mer et des bateaux de pêche ! » lance-t-il. À force de voir la mer et les bateaux, nous, on n’y prête même plus attention ! Mais pas celui que ses amis appellent « Nono ». La mer, les bateaux, il adore ça. « Je fais un peu de plongée en apnée, ça permet de travailler le mental, et j’aime bien partir en pêche ».

En même temps, l’ancien attaquant des années 90 est né à Martigues et a grandi à Marseille, sous le soleil – « Il brille toujours ! » – et au bord d’une grande bleue qu’il a retrouvée en 2017, quand il a quitté le centre de la France et le Clermont Foot après 17 saisons , dont 15 dans l’encadrement, pour s’asseoir sur le banc de Fréjus/Saint-Raphaël en National 2. Pour se rapprocher de ses parents aussi.

Depuis, il n’a quasiment plus bougé de la Côte d’Azur, hormis une escapade à Andrézieux, en banlieue de Saint-Etienne, en 2018/19, avec à la clé la fameuse élimination de l’Olympique de Marseille, le 6 janvier 2019 (2-0), en 32e de finale de la coupe de France, au stade Geoffroy-Guichard ! Malheureusement, l’épopée s’était arrêtée en 16e (élimination face à Lyon-Duchère 1-2, club de National).

Quinze saisons dans l’encadrement à Clermont

Photo « collector », sous le maillot du Havre, il y a 35 ans déjà !

Cette qualification face à l’OM, c’est sans doute à ce jour son fait d’armes le plus marquant comme coach, du moins celui qui a eu le plus de retentissement médiatique. Cela aurait pu lui ouvrir les portes du BEPF, le diplôme d’entraîneur professionnel, il n’en fut rien. Cela lui a au moins ouvert les portes du club de son coeur : l’AS Cannes. Limogé d’Andrézieux après seulement 8 matchs la saison suivante, il rebondit, certes à l’étage en dessous, en National 3, chez les Dragons azuréens, mais le projet est tellement ambitieux et l’institution si prestigieuse…

Et puis Cannes, comme le raconte Jean-Noël dans cet entretien ensoleillé, c’est l’équipe qu’il allait voir et supporter quand il n’était encore qu’un jeune avant-centre de 18 ans, qui évoluait en Division d’Honneur à Vallauris, sur les hauteurs de … Golfe-Juan. À cette époque, il s’entraîne la journée avec le centre de formation des Rouge et Blanc – l’un des meilleurs de l’Hexagone – et rejoint son club le soir. Deux saisons et deux accessions plus tard – Vallauris accède en Division 4 puis en Division 3 -, c’est le grand saut dans le monde pro pour le grand attaquant, qui portera ensuite les couleurs du Havre (D2), d’Annecy (D2), d’Alès (D2), de Vallauris à nouveau (D3, titre de meilleur buteur aux côtés de Hervé Renard et Zoran Vujovic notamment), de Toulon (deux passages, en National d’abord avec accession en D2 puis en D2 un an plus tard), de Cannes donc, en Division 1, de Troyes (D2, accession en D1), d’Amiens (D2) et enfin de Clermont (National et accession en D2), où il boucle sa carrière de joueur. Un très joli CV enrichi par la suite de quinze saisons passées dans l’encadrement du club auvergnat, à la formation, avec les U19 nationaux, avec la réserve et avec les pros comme adjoint. De quoi, là encore, emmagasiner beaucoup d’expérience.

Un vrai Marseillais qui se respecte !

Entraîner, « Nono » a su très vite qu’il se dirigerait vers ce métier une fois les crampons raccrochés : très tôt, déjà, à Marseille, dans des associations de quartier, il encadrait des plus grands que lui, le mercredi.
Sans club depuis son dernier « limogeage » à Fréjus, à l’hiver dernier, dans un club où il travaillait pour la seconde fois, Jean-Noël Cabezas, qui en profite pour s’entretenir et aller voir des matchs – « Ce soir je retourne au Vélodrome pour OM-PSG, j’y suis allé hier mais le match a été reporté à cause des intempéries ! » – s’est mis en quête d’un nouveau projet.

Pendant 45 minutes, il s’est confié, au point de parfois briser la carapace. Méfiant de prime abord, réservé, introverti, sensible, hésitant parfois à terminer ses phrases, « Jeannot » comme d’autres l’appellent aussi, ou « Cabezou », s’il intériorise beaucoup, a souvent montré une image à l’opposé de celle qui dégage, au point de parfois passer pour un grand bavard. Un vrai Marseillais qui se respecte, en quelque sorte. Qui aime parler … mais surtout de foot !

Interview : « Le foot rend méfiant »

Quand on retrace ton CV de joueur, on se dit… quel parcours, tout de même ! Partir de DH pour finir en D2 et en D1, c’est rare !
À Vallauris, j’étais surclassé, j’avais 18 ans, on a fait les montées de DH jusqu’en D3 mais je n’ai pas joué tout de suite en D3, je suis parti au Havre, avant d’être prêté à Annecy en D2, entraîné par Guy Stephan, que j’ai revu cet été au Mondial de Footvolley à Juan-les-Pins, c’était sympa, on a pu échanger. J’avais gardé un bon souvenir de lui. Après Annecy, je suis revenu à Vallauris, en D3, puis après c’est parti, Alès, Toulon, Troyes, Cannes, Amiens avant de finir à Clermont. J’ai eu de la chance dans ma carrière de joueur car j’ai fait beaucoup de montées, de la DH jusqu’à la Ligue 1, avec Troyes (accession en 1999).

À Clermont, où tu as fini ta carrière de joueur sur une nouvelle montée en Ligue 2 (en 2002), tu as passé quinze ans dans l’encadrement : pourquoi être parti en 2017 ?
C’est la venue de Corinne Diacre qui m’a fait partir. C’était un peu compliqué avec elle. Quand elle est arrivée, au bout d’une semaine, Olivier Chavanon, le directeur sportif de l’époque, m’avait dit « ça va être compliqué avec elle », et moi, je lui ai répondu « Dès le premier jour, j’ai su que ça allait être compliqué avec elle ! », donc là, j’ai décidé de partir.

« Je me suis présenté huit fois au BEPF… »

Photo AS Cannes

Quand as-tu su que tu deviendrais entraîneur ?
Quand j’habitais Marseille, j’entraînais les plus grands que moi, dans une association de quartier, La Millière, au milieu des HLM, c’était le mercredi, je faisais ça pour rendre service et gagner un peu d’argent aussi. J’aimais ça. J’avais entraîné des plus petits dans les quartiers aussi, avec une autre association, Les Escourtines (il a commencé au quartier de La Barasse, à côté du quartier de Saint-Marcel, puis à l’US Rouet). Quand j’étais joueur à Troyes, j’avais des discussions avec Alain Perrin, qui me voyait bien devenir entraîneur. Mais ce qui a tout déclenché, c’est à la fin de ma carrière de joueur à Clermont, quand j’ai monté une école de football pour les attaquants, en 2001; ça avait bien fonctionné, à tel point que des gros clubs, comme Marseille ou Lyon, venaient piller nos joueurs. C’est comme ça que je me suis retrouvé dans l’équipe pro de Clermont, en Ligue 2 : l’équipe ne marquait pas beaucoup de but et Alain Dalan, le président de l’époque, m’a demandé de devenir adjoint et de m’occuper spécifiquement des attaquants; ça a bien fonctionné et tout est parti de là ! Ensuite j’ai passé mes diplômes. Aujourd’hui, je peux entraîner jusqu’en National 2.

Tu ne songes pas à te représenter au BEPF ?
Je me suis présenté huit fois déjà… Je n’ai pas eu la chance d’être pris et j’ai craqué ! Quand j’étais à Frejus, à Andrezieux, je me suis présenté, et une fois, j’ai même été le premier « repêchable » en cas de désistement d’un des candidats. Là, je me suis dit que, forcément, j’allais être pris l’année d’après, surtout qu’on venait d’éliminer l’OM en coupe de France avec Andrézieux, mais je n’ai pas été retenu et je dois dire que, mentalement, ça m’a « tué ». Aujourd’hui, ce n’est pas que je ne veux plus candidater, mais j’ai pris un peu d’age (58 ans), même si je m’entretiens, je cours, je fais attention à mon alimentation, mais je ne sais pas, je trouve que… Mais depuis quelques années, quand même, j’ai l’impression que pour l’admission au BEPF, ça s’est plus « ouvert ».

« Partir à l’étranger m’aurait plu »

Mais entraîner en National, ou dans la future Ligue 3, n’est-ce pas un objectif ? Ou être de nouveau adjoint en pro ?
Si j’avais eu mon BEPF, j’aurais eu des opportunités pour aller en Belgique, par rapport à certaines connaissances que j’avais. Partir à l’étranger m’aurait plu, pour changer, pour ne pas rester dans le confort. Comme jouer en Espagne aussi, ça m’aurait plu à l’époque, j’ai des origines espagnoles, du côté de l’Andalousie. Après, retrouver un staff pro, oui, mais il faut que ça matche avec le coach; ça dépend de l’entraîneur en place. Par exemple, je m’entendais bien avec Michel Der Zakarian à Clermont, donc travailler pour et avec quelqu’un que l’on apprécie, comme Michel par exemple, oui. Je pense qu’il faut une connexion entre le numéro 1 et son adjoint, qu’on soit comme une équipe. Je le vois bien, car j’ai été numéro 1 aussi, et je n’ai pas eu que des bonnes expériences avec mes adjoints. Parfois, les choses négatives font grandir et permettent de rebondir. Je suis toujours dans cette optique-là. Ce n’est ni facile d’être adjoint, ni facile d’être numéro 1. Mais je préfère ne retenir que le positif de mes expériences.

« Je n’ai pas vu mes enfants grandir »

On sent un grand regret tout de même…
(Hésitation) Au Clermont Foot, j’ai fait de la formation, j’ai sorti Romain Saïss, le capitaine de l’équipe du Maroc, je me suis occupé de lui, il y avait aussi « Yacou » Sylla (Aston Villa, Rennes, Montpellier), que j’ai fait venir, l’attaquant « Momo » Bayod, Mathias Pereira-Lage, Julien Laborde, plein de joueurs comme ça, j’étais connu quand même aussi grâce à mon travail là-bas. J’avais une double casquette, entre la formation et les seniors, le matin et l’après-midi avec les pros, le soir avec la réserve… Et je ne n’ai pas vu mes enfants grandir… Si c’était à refaire, je ne le referais pas. C’est ma passion, bien sûr, mais bon…

Tu dis que tu n’as pas vu grandir tes enfants…
Ma fille, Mathilde, a 30 ans, elle chante (sous le pseudo « Mathilda »). Mon fils, Noë, a 25 ans, il joue à Alès en N3. Je ne les pas vu grandir, non, parce que j’ai tellement donné à Clermont que c’était au détriment de ma famille. Je m’en suis aperçu quand Corinne Diacre est arrivée. Je ne lui en veux même pas, cela fait partie du foot mais, surtout, cela m’a fait réaliser que la famille était plus importante, même si Claude Michy, le président de Clermont Foot, m’avait dit « Les entraîneurs passent, mais toi tu restes », parce qu’il voulait que je reste.

Le clip de Mathila (« Est-ce que les autres s’aiment ? ») : cliquez ici

Noë, son fils de 25 ans, a signé à Alès, où Jean-Noël a évolué en D2 dans les années 90. Photo OAC

À Fréjus/Saint-Raphaël, tu as été limogé une première fois puis tu n’as pas été conservé en fin de saison une seconde fois… À Cannes, tu n’as pas non plus été conservé : c’est digéré ?
Il y a eu Andrézieux aussi ! Mais à Andrézieux, la deuxième année, je savais que le club cherchait un entraîneur de la région stéphanoise, donc je n’ai pas été surpris quand j’ai été limogé, parce qu’on m’avait prévenu. Ils ont mis Romain Revelli à ma place.

Quand je suis allé la première fois à Fréjus/Saint-Raphaël, c’était pour être adjoint de Charly Paquillé. Et puis je voulais aussi revenir dans le sud pour des raisons familiales. Charly a été limogé et j’ai pris la suite mais en juin, je n’ai pas été gardé. J’ai été surpris parce qu’on avait vraiment fait une belle saison (5e). C’est dommage, parce qu’on n’a pas eu le temps de se structurer, c’est un peu le problème d’ailleurs du foot amateur, et aussi du foot pro, sauf que dans le foot pro, il y a plus de moyens pour mettre des choses en place, comme une cellule de recrutement par exemple, un meilleur suivi des joueurs, etc. C’est ce que j’ai essayé de faire à Fréjus et aussi à Cannes.

« J’ai toujours adoré l’AS Cannes ! »

Tu es « marseillais » mais tu as supporté Cannes, c’est étrange tout de même…
Quand j’étais jeune, j’allais voir tous les matchs de l’OM, et parfois j’allais aussi voir les entraînements à Saint-Menet, sur un terrain à côté de chez moi, je ratais parfois l’école pour y aller ! Je regardais les attaquants, je me souviens de ce joueur, Marc Berdoll… Je regardais aussi leur comportement, l’exigence, mais c’était une autre époque, le club était en Division 2. Quant à Cannes, j’ai toujours adoré ce club, alors que je n’y étais pas ! Mais j’aimais ce côté « petit poucet », quand le club était en première division.

Mais d’où vient cette « amour » pour l’AS Cannes ?
Quand je jouais à Vallauris, j’allais voir tous les matchs de Cannes. J’étais supporter. Puis j’ai eu la chance d’être joueur au club et ensuite entraîneur. Il y a eu des grands noms, des grands entraîneurs comme Jean Fernandez ou Arsène Wenger, qui est une référence pour moi. Wenger, c’est quelqu’un qui construit, qui outrepasse sa fonction d’entraîneur. J’essaie, à mon niveau, de le prendre en exemple. Quand on est entraîneur, on regarde les meilleurs pour s’en inspirer et voir ce qu’ils font. Quand j’étais joueur, je faisais pareil. Quand je suis venu travailler à l’AS Cannes, je me suis installé à Vallauris, parce que là-bas, j’y garde de bons souvenirs, c’est le club qui m’a mis le pied à l’étrier et j’y ai des amis.

« Il y a des choses beaucoup plus graves que le foot »

Photo AS Cannes

Que gardes-tu de ton passage à Cannes sur le banc, où tu es resté cinq ans ?
D’abord, on a eu deux années « covid » puis la troisième année, on est monté de National 3 en National 2 avec Anny Courtade et Xavier Bru aux commandes. Anny, elle nous faisait confiance, et quand le club a été vendu à la famille Friedkin, ils ont voulu mettre un entraîneur « à eux », c’est comme ça… Mais bon, je ne suis pas allé à Cannes pour l’argent, mais pour faire remonter le club, parce que j’étais attaché à ce club.

Ensuite, la saison passée, tu es retourné à Fréjus/St-Raphaël (N2), dans un club qui ne t’avait pas conservé cinq ans plus tôt : étrange, non ?
(Sourire) Oui, c’est vrai ! On était dans les trois premiers jusqu’en novembre/décembre et puis on a eu un problème… (il marque un silence). Un joueur est tombé malade (il marque à nouveau un silence), un très-très bon joueur, qui tenait la baraque derrière (le défenseur central Julien Mouillon). Il a eu une grosse maladie et ça m’a rappelé les mauvais souvenirs de janvier 2009, quand on a perdu Clément Pinault. La maladie de Julien, je l’ai mal vécue. Tu sais, le foot c’est dur, OK, mais quand on vit ça… Je crois qu’il n’y a rien de pire. J’ai mis deux ans pour me remettre du décès de Clément (Pinault), on était très proches. Donc ce limogeage à Fréjus, je le relativise, parce qu’il y a des choses beaucoup plus graves. La maladie de Julien (Mouillon) m’a ramené à tout ça, et sans doute que je n’ai pas été bon, que je n’ai pas su gérer mes émotions.

« Je suis peut-être un peu plus sensible que d’autres »

Rabat, Bonadei, Moses… Le temps des copains, au Sporting-club de Toulon (document Le musée du Sporting)

En ce moment, beaucoup d’entraîneurs nous parlent de la gestion de leurs émotions : tu aurais donc toi aussi des choses à régler de ce côté là ?
En général, j’arrive à les gérer sur le terrain, par exemple, je me contrôle, je ne me suis jamais fait expulser, mais un décès, une maladie, là, ce n’est pas pareil, on n’est pas préparé à ça. Je suis un peu plus sensible que d’autres, peut-être. J’ai du mal à gérer ces situations. Mon frère a eu une grosse maladie : il est resté à l’hôpital pendant deux ans à Hyères à Pomponiana (Institut de rééducation fonctionnelle), ça m’a vraiment touché, tout est lié à l’enfance aussi… C’est dur de gérer des choses comme ça. Je suis proche aussi de l’association Adrien et de René Molines, son président, à Pégomas, près de Cannes, parce que ce sont des choses qui me touchent. Et parce qu’il n’y a pas que le foot. Je pense être proche des joueurs : « Yacou » Sylla m’a appelé quand il a eu son diplôme d’entraîneur, Romain Saïss aussi, on garde le contact, j’ai de bons souvenirs avec eux. Le côté humain est important.

Tu dis que tu es un entraîneur exigeant : mais qui sont les coachs qui t’ont marqué ?
J’aimais bien Alain Perrin, au niveau du jeu, il nous faisait bien jouer; au niveau relationnel, c’était dur, même si avec moi ça se passait bien. Il faut dire que quand je l’ai eu, j’avais la trentaine, j’avais déjà de la bouteille et il savait que je pouvais tenir le vestiaire. Je n’étais pas un leader par la parole mais par les actes, je pense que c’est pour ça qu’il m’appréciait aussi. J’ai eu un autre entraîneur qui m’a marqué : Léonce Lavagne, à Alès. Il faisait jouer des amateurs s’il le fallait, à la place des pros, parce qu’avec lui, c’était au mérite, peu importe le statut. Il était dur mais écouté et honnête. C’est quelqu’un qui allait au bout de ses idée. C’est ce qu’on attend d’un entraîneur.

« Beaucoup de clubs amateurs travaillent bien »

Aux côtés de l’ex-international Jean-Marc Ferreri, à Toulon.

Puisque l’on parle d’Alès, pourquoi ce club (N3) n’y arrive-t-il pas ? Et pourquoi Toulon (N2), où tu as évolué deux fois, n’y arrive pas non plus ?
À Alès, il y a toujours eu des problèmes financiers et à Toulon, c’était un peu pareil à mon époque. Cela veut dire que cela a mal été géré de l’intérieur. Et puis il y a autre chose : aujourd’hui, il y a beaucoup de clubs amateurs de National 2 et de National 3 qui travaillent très bien, qui sont très bien structurés, avec des personnes qui s’investissent beaucoup dans leur travail. C’est pratiquement devenu du semi-professionnel. C’est pour ça qu’en N2 et en N3, c’est très dur de monter, il faut bien s’entourer et bien connaître le niveau.

Par exemple, en National 2, ce n’est pas parce qu’un club va prendre six ou sept joueurs du niveau au-dessus qu’il va monter, parce qu’il faut un état d’esprit, il faut que les joueurs soient complémentaires, sans compter que c’est la bagarre chaque week-end. Les clubs ont progressé, et peut-être que Toulon et Alès, qui ont été des clubs phares, ont moins progressé que les autres… Cette saison, Alès, où joue mon fils Noë, a une équipe très jeune, c’est très intéressant ce qu’ils font, ils ont quand même perdu leurs attaquants à l’intersaison alors qu’ils marquaient beaucoup de buts l’an passé, mais ça a l’air de bien prendre. Il faudra voir si l’effectif est suffisant sur la durée.

Il y a autre chose : il faut connaître les régions aussi. À Alès, il y a les mines à côté, il faut connaître la population locale, leurs valeurs, savoir où on est. Par exemple, quand j’étais entraîneur à Andrézieux, je suis allé voir le musée de la mine à Saint-Etienne, c’était incroyable, ce sont des choses qui marquent. On aurait pu ajouter Andrézieux dans la question précédente, un club qui évolue depuis longtemps en N2, qui a de superbes infrastructures, mais qui n’arrive pas à monter… Parce qu’il faut laisser du temps, et j’espère que Roland (Vieira), qui est un bon coach, en aura. Au Puy, il en a eu, il est resté 10 ans, mais dès fois, au foot, on n’a pas le temps de construire. Pourtant, c’est le secret, mais…

« Le foot, ce n’est pas que l’argent »

Tu connais bien le championnat de National 2 : tu le trouves comment aujourd’hui ?
Il évolue. Il est de plus en plus dur, parce que beaucoup d’équipes, comme je le disais avant, travaillent bien. Elles se donnent les moyens de bien travailler, même si elles n’ont justement pas trop de « moyens » financiers, parce qu’on voit bien que le foot, ce n’est pas que l’argent, sinon ce serait trop facile.

Tu penses à Cannes en disant cela…
Non mais quand j’étais à Cannes, il y a quelque chose qui m’a frappé : en fait, je regardais toujours mes adversaires en vidéo avant de les affronter, et quand ils jouaient contre nous, ce n’était pas du tout la même chose, cela ne ressemblait plus à l’équipe que j’avais vu en vidéo. J’avais bien prévenu mes joueurs par rapport à ça. En fait, l’explication est simple : nos adversaires avaient une envie décuplée de nous « taper », un peu comme ceux qui jouent contre Bordeaux aujourd’hui en N2, et ils étaient donc parfois en sur-régime. Ce qui fait que nos matchs ressemblaient plus à des matchs de coupe. Voilà, c’est ça, en fait, chaque semaine, on faisais des matchs de coupe de France, et même parfois des matchs de coupe d’Europe, parce que les mecs, en face, jouaient leur vie !

« Je vais au bout de mes idées »

Tu as l’air d’une personne très méfiante, limite « parano » comme pas mal de coachs d’ailleurs…
Oui, « parano », je me mets dedans aussi ! Méfiant, ce n’est pas que dans le foot, c’est dans la vie de tous les jours, même si évidemment le foot veut ça. Le foot rend méfiant. Peut-être que si j’avais fait un autre travail, j’aurais été pareil, parce que les gens sont…

Fourbes ?
Fourbes. Ce n’est pas que je me méfie, mais… Déjà, au foot, avec les joueurs, on arrive à cerner leurs mentalités, par rapport à ce qu’ils font sur le terrain, et on retrouve ces traits de caractère, la combativité, la créativité par exemple, après leur carrière de joueur.

Anny Courtade, l’ex-présidente de l’AS Cannes, nous a dit que tu avais pris des cours de communication, mais en plaisantant, elle a rajouté que tu n’en avais sans doute pas pris assez !
(Rires) J’ai lu un de tes articles l’an passé sur Hervé Della Maggiore, l’entraîneur d’Orléans, qui avait des problèmes de communication, et je me suis retrouvé en lui, ça m’a marqué. J’ai pris des cours quand j’étais à Clermont parce que je pensais que je devais progresser dans ce domaine, mais ce n’est pas évident, entre savoir les choses et les transmettre, c’est dur. Mais je trouve que j’ai beaucoup progressé par rapport à avant, je m’en aperçois quand je vois des joueurs que j’ai formés et que j’ai retrouvés plus tard, ils me le disent.

Anny Courtade dit aussi que tu es … têtu !
Disons que je vais au bout de mes idées mais je sais reconnaître mes torts. Dans le foot, il y a des choix à faire, je sais où je vais. Par exemple, quand j’étais à Cannes, j’étais critiqué, les supporters ont même demandé mon départ, mais ça me fait rire, parce que quand j’allais manger à La Bocca, ce quartier de Cannes que j’aime, juste à côté du stade Coubertin, les gens venaient me voir en me félicitant… Les supporters n’étaient pas contents après un match nul ou une défaite, c’est normal, mais je n’ai pas perdu beaucoup de matchs avec Cannes (sourire). Il faut accepter ça, je l’accepte, le foot est un sport populaire. J’ai été moi-même supporter, donc je peux comprendre que l’on ne soit pas content après un match, mais cela reste du foot. Et puis les supporters n’ont pas tous les éléments, ils ne savent pas, par exemple, que si je ne fais pas jouer tel joueur, c’est qu’il y a une raison… une blessure par exemple.

Créativité, intelligence de jeu…

C’est quoi, tes inspirations, tes modèles, tes références en matière de jeu ?
J’aime le foot espagnol (il a des origines espagnols, du côté de l’Andalousie). Je trouve qu’il est plus structuré, on y parle de « carré » par exemple. Comme je n’ai pas été pris au BEPF, j’ai suivi sur internet des cours de formation de foot espagnol pour « compléter », pour voir le jeu de position. Là bas, ils utilisent des mots différents. Nous, aujourd’hui, on parle de transition, mais les transitions, ça a toujours existé !

À mon époque, Jean Fernandez nous disait qu’il ne fallait pas faire cinq passes, il faisait déjà de la récupération du ballon, on n’invente rien aujourd’hui ! Moi, ce que j’aime, c’est que les joueurs trouvent des solutions; par exemple, quand je mets des situations de jeu à l’entraînement, c’est pour développer l’intelligence de jeu, parce que c’est important. On parle aussi de ce « foot robot », qui manque un peu de créativité aujourd’hui, mais pour moi, tout part du football chez les jeunes. Il faut laisser de la créativité dans les trente derniers mètres et accepter, si le joueur tente quelque chose, qu’il perde un ballon mais derrière, il faut que le mec chasse, qu’il fasse du « un contre un », ce qui se fait de plus en plus maintenant, où c’est pratiquement du marquage individuel. Il faut des joueurs rapides derrière si on joue haut, si on fait le pressing haut, sinon on prend des vagues. J’aime bien le système en 4-3-3 avec des centres, j’aime aussi quand on « rentre » à l’intérieur pour mettre le surnombre. Il faut mettre de la variété dans le jeu. Le 4-4-2 aussi, c’est bien structuré, mais si j’ai l’équipe pour jouer avec des pistons, je vais changer le style, parce qu’il faut gagner des matches ! C’est pour ça que la formation est importante, que le travail est important, afin que les jeunes connaissent les systèmes et s’adaptent quand il le faut.

  • Texte : Anthony BOYER / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
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Échaudé par le dossier Bobigny et une deuxième saison de suite à 17 clubs au lieu de 18, le président de la FFF donne sa vision de la future Ligue 3 professionnelle, prévue le 1er juillet 2026. Il évoque la fameuse date butoir du 17 juillet ainsi que les contrats des joueurs. L’assemblée fédérale du 13 décembre devrait apporter un éclairage, une fois les recommandations, attendues pour mi-octobre, établies.

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos 13HF

Territoire. Le mot revient souvent quand on parle de foot amateur. Il est même galvaudé. L’on entend parler de plus en plus, par exemple, de « football de territoire ». Le président de la Fédération Française de football, en visite le week-end dernier à Mandelieu, à côté de Cannes, à l’occasion du congrès des présidents de district, l’a souvent employé dans un entretien qu’il a donné à l’issue de l’assemblée générale de l’ANDPF (Association nationale des présidents de district).
Venu à la rencontre des présidents de districts – « nos élus de proximité, ceux-là même qui sont au plus près de nos 12 000 clubs » – pour les écouter et présenter les orientations majeures que la FFF propose pour le foot amateur, Philippe Diallo s’est ensuite confié pendant un gros quart-d’heure aux médias présents et a rappelé « le soutien économique d’aide au football amateur. Cette saison, la FFF a battu un record d’aide : nous avons distribué de diverses manières près de 106 millions d’euros et une loi de programmation financière vise à faire passer ces aides à 150 millions d’euros ».
Accompagné notamment du directeur général de la FFF, Jean-François Vilotte, et entouré de Marc Touchet, président de l’ANDPF, et d’Alain Broche, président du district de Côte d’Azur, Philippe Diallo est, sans entrer de manière spécifique dans les détails, revenu sur la création de la Ligue 3 professionnelle (en remplacement du National), qui suscite toujours autant de commentaires et, légitimement, d’interrogations. En mai dernier, nous avions consacré un large dossier sur le sujet, à relire ici : « La Ligue 3 tiendra-t-elle toutes ses promesses ? »

Philippe Diallo : « On ne va pas refaire le dossier Bobigny »

Président, la Ligue 3 pro est dans les cartons : mais où en est-on de sa mise en place ?
La Ligue 3, c’est un engagement. Elle sera lancée, je l’espère, en 2026-2027, parce que, mécaniquement, le National accueille de plus en plus en de clubs professionnels. Au début, ils étaient au nombre de 3 ou 4, maintenant, il y en a une majorité, ils sont beaucoup plus nombreux. On a tiré des conséquences de cela. Le championnat National se professionnalise et les clubs qui sont sous statut fédéral fonctionne plus ou moins comme des clubs professionnels. On a donc décidé de réparer ça avec un groupe de travail mené par Marc Keller (président de Strasbourg) et Baptiste Malherbe (président et directeur général de l’AJ Auxerre), qui sont membres du ComEx (Comité Exécutif de la FFF), et qui travaillent sur ce projet. Une première étape a été franchie avec le format de cette compétition. Là, on est dans la deuxième phase, celle de régulation.

Dans ce championnat professionnel placé sous l’égide de la FFF, on ne veut pas qu’il y ait des clubs au tapis en raisons de dérives (financières). C’est pour cela que je souhaite un championnat très encadré, avec des règles que je partage avec les présidents de clubs, les joueurs, les entraîneurs, sur un certain nombre de pistes comme l’encadrement de la masse salariale, la limitation des effectifs, l’obligation d’avoir des joueurs formés localement… autant de dispositifs destinés à mieux réguler le championnat, afin de le rendre professionnel et pérenne.

J’attends dans les deux prochains mois les recommandations pour que, à l’assemblée fédérale du 13 décembre 2025, nous puissions présenter un certain nombre d’orientations et être en capacité de lancer ce championnat de Ligue 3 en 2026. La FFF, elle, travaille sur la diffusion et le « namer », un mot que je n’aime pas beaucoup, du championnat, que nous accompagnerons financièrement.

Vous parlez souvent de « maillage », de territoire…
Dans cette future L3, on a beaucoup de villes françaises de catégories moyennes mais suffisamment importantes en termes de démographie, de bassin économique, pour faire un football de qualité, partout en France, parce que c’est une richesse du foot français. Quand je parle de 12 000 clubs sur le territoire, je parle de ce maillage territorial, qui est la force du football. Tous les Français ont accès à quelques kilomètres de chez eux à des matches de football. Cette Ligue 3, c’est un élément supplémentaire de proximité pour les fans de foot, avec du foot de très haut niveau.

Pour les joueurs en formation, cela peut aussi être un moyen de s’aguerrir…
Pour les clubs pros de L1 et de L2 c’est aussi, au travers d’un système de prêt par exemple, un moyen de faire jouer des jeunes joueurs qu’ils ont commencé à former, dans des équipes de haut niveau, afin qu’ils s’aguerrissent avant de pouvoir revenir dans leur club. Cette Ligue 3 sera pour la première fois un championnat professionnel directement géré par la FFF (la Ligue 1 et la Ligue 2 sont gérés par la LFP, Ndlr). C’est un élément qui contribue au rayonnement des territoires et qui favorise l’émergence de futurs talents; ceux-ci trouveront d’abord en Ligue 3 l’occasion de s’exprimer. Tout cela est bon pour le foot français.

On connaît son format, mais quid de son exposition médiatique ?
Il faut pouvoir exposer ce championnat. C’est un des sujet sur lequel on planche, pour trouver le bon diffuseur, afin que la Ligue 3 puisse être accessible, dans les meilleures conditions, à tout le monde. Je rappelle qu’il est à l’heure actuelle directement pris en charge par la FFF qui assure la diffusion des matchs de National (via la plateforme FFFTV et la chaîne Youtube du National), mais on voudrait aller plus loin et trouver, si le marché répond, un partenaire qui accompagne ce championnat de L3.

« Définir le statut du joueur pro de Ligue 3 »

L’un des sujets majeurs, ce sont les contrats des joueurs, qui sont différents selon que l’on soit amateur ou professionnel : se dirige-t-on vers un contrat unique ?
Nous sommes aujourd’hui dans un championnat mixte, avec des clubs à statuts professionnels d’un côté et des clubs à statut amateurs amateurs de l’autre. Avec la Ligue 3 pro, cela veut dire que tout le monde aura un statut pro : une des missions que devront mener à bien dans les semaines qui viennent Baptiste Malherbe et Marc Keller sera de définir le statut du joueur pro de ligue 3. Cela nécessite un dialogue entre les représentants des clubs et les représentants des joueurs, et certainement aussi des entraîneurs, afin de définir les contrats de travail, les minimas salariaux, en s’ inspirant de la charte du foot professionnel, qui existe déjà, mais qui est sous l’égide la Ligue de football professionnel. Je pense qu’il serait intéressant de la dupliquer en partie pour l’adapter au niveau de la Ligue 3 pro, afin qu’il y ait un statut et un contrat professionnel adapté à cette division, qui pour le coup sera unique pour les joueurs.

Ces deux dernières saisons, le National se joue à 17 au lieu de 18 : pour son image, et pour celle de la FFF, ce n’est vraiment pas bon…
Ce que nous devons faire dans les mois qui viennent, c’est vraiment de mettre des règles de régulation en place fin d’avoir un championnat pérenne. Je ne veux pas de catastrophes économiques, humaines et sportives comme on en a connues avec des clubs qui déposent le bilan. On l’a encore vu récemment, cet été, à l’AC Ajaccio, auparavant c’était Bordeaux, cela s’est produit aussi à Sedan, etc. En terme de lien social, ce n’est pas bon pour les territoires dans certaines villes qui connaissent des difficultés. C’est pour cela que l’on doit être extrêmement vigilant sur la pérennité de ce championnat.

Oui mais ce National à 17 est aussi la conséquence de décisions administratives tardives et de la fameuse date butoir du 17 juillet, qui empêche tout repêchage…
Je partage votre avis. Vous ne croyez pas que la Fédération Française de Football préférerait avoir un championnat National qui se joue à 18 plutôt qu’à 17 ? Mais vous savez bien que l’on est dans un pays de droit. Chaque club a donc la possibilité de faire valoir ses droits… C’est vrai que les procédures sont longues, mais la FFF ne peut pas, entre guillemets, raccourcir ces délais de recours ni empêcher les clubs de faire valoir leurs droits. Donc nous sommes aussi tributaires de règles qui, je pense, ne sont pas totalement adaptées à la période de l’intersaison, on l’a directement vécu cet été avec la liquidation de l’AC Ajaccio et la frustration du FC 93 Bobigny, qui aurait aimé être repêché, mais qui s’est heurté aux règles que nous avons fixées. C’est pour cela que la FFF travaille, à travers sa secrétaire générale, aux recommandations qui doivent être soumises, dans un délai court – J’ai proposé à la mi-octobre -, pour voir comment éviter ces effets pervers de cette fameuses date du 17 juillet.

Lors de l’AG de l’ANDPF, à Mandelieu.

Je veux quand même rappeler que cette date est avant tout une règle de protection des clubs. On en voit parfois durant l’été les effets pervers, mais la première réalité de cette date, c’est de dire qu’à partir d’un moment, il faut bien constituer les groupes, il faut bien aussi que les clubs puissent constituer leurs effectifs et qu’ils sachent dans quel championnat ils vont jouer. Voilà pourquoi il y a cette date du 17 juillet. Aujourd’hui, on va essayer de gommer ces effets pervers. Une des pistes, je ne sais pas si elle sera retenue, au sujet de cette règle qui n’est pas appliquée en Ligue 1 et en Ligue 2, c’est de savoir si la future Ligue 3 devra avoir une date aussi fixe qui conduirait à peut-être perpétuer ces effets pervers. C’est une interrogation. On verra si elle est tranchée à la mi-octobre, avec les recommandations. Mais cela pourrait être une évolution de dire que, l’an prochain, en Ligue 3, il n’y ait plus de date butoir pour les clubs « repêchables ». En tout cas c’est sur la table. Nous déciderons à la mi-octobre.

Mais pourquoi, au moment de l’établissement de la poule le 17 juillet, ne pas inscrire des « ou » : par exemple, cet été, pourquoi ne pas avoir inscrit « Ajaccio ou Bobigny », sachant qu’il y avait ces fameux recours ?
Je ne veux pas rentrer dans le fond du dossier. Il a été traité. Une solution a été trouvée. J’ai eu une heure par jour les gens du club du FC 93 Bobigny tout l’été, je les ai encore par message… Nous avons identifié la difficulté, c’est pour cela que l’on essaie d’y répondre. On ne va pas refaire le dossier.

Lire aussi : La Ligue 3 tiendra-t-elle toutes ses promesses

  • Texte : Anthony BOYER / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
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Après avoir failli associer son nom avec celui des Chamois Niortais, l’institution rayée de la carte, le désormais premier club des Deux-Sèvres, promu de N3, poursuit seul son développement, écrit sa propre histoire et entend se stabiliser tant sportivement que financièrement.

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos : Philippe LE BRECH, 13HF, Jules SAUVAGET et Michel DUBUS

Photo de couverture : FC Chauray / Jules SAUVAGET

Reportage réalisé avant la défaite concédée 2 à 0 à Bayonne lors de la J6, vendredi 19 septembre 2025.

Et si c’était ça, le charme du football ? Passer d’un stade de National 2 qui a connu la Ligue 1 ou la Ligue 2 (Cannes, Bordeaux, Istres, Nîmes, Beauvais, Créteil, Toulon, par exemple) à un autre qui a connu… enfin, qui n’a pas connu grand chose pour le moment, et qui ressemble plus à un stade de « Régional » !

Car en arrivant au stade municipal de Chauray, il faut un peu se pincer le nez pour croire que c’est du semi-pro, du foot de haut niveau. Et pourtant, ici, on joue bien en National 2 ! Même le nom de l’adversaire du jour en championnat, le FC Montlouis, ne confère pas à cette rencontre une connotation « N2 ». Chauray-Montlouis, bienvenue dans l’autre football !

L’ombre des Chamois

Le stade municipal de Chauray. Photo 13HF

Voir Chauray, Montlouis ou quelques autres à ce niveau-là a pourtant quelque chose de fantastique. C’est la preuve qu’il y a encore de la place pour ce football champêtre, ce football de village, ce football de clocher bien ancré localement. C’est la preuve qu’il y a encore la place pour de belles histoires. Et ça tombe bien, le FC Chauray est en train d’en écrire une nouvelle, après celle tristement refermée en avril dernier, quand le tribunal de commerce de Niort a liquidé ce qu’il restait de l’association des Chamois, l’institution locale.

Parce que Chauray, ville mutualiste sans centre-ville mais avec une impressionnante zone artisanale et commerciale (La zone Mendès France, qui compte 600 entreprises et 7500 emplois, est le principal financier de la CAN, la communauté d’agglomération niortaise), a toujours vécu dans l’ombre du voisin, du « géant », Niort, situé à seulement… 10 km !

Photo 13HF

Forcément, avec sa disparition au printemps, et l’accession inattendue du « petit » de National 3 en National 2, deux ans seulement après avoir quitté le Régional 1, s’est posée la question de « récupérer » l’appellation « Chamois Niortais », de pouvoir se « substituer » au club qui a passé 31 saisons en D2/L2 même connu la D1 en 1987/1988.

Le sujet a été lancé, mais la raison a prévalu : l’on ne remplace pas comme ça, d’un coup de crayon, une telle marque, une telle entité, au simple prétexte de vouloir rester dans le coeur des gens et de faire perdurer l’image.
Le FC Chauray a son histoire à écrire et, surtout, a sa propre identité, comme l’explique plus loin son président, David Rullier (rien à voir avec Cédric Rullier, l’entraîneur du GFA Rumilly en N2 !).

« Le National 2, ça n’a rien à voir ! »

Le 11 de départ à Dinan-Léhon. Photo Philippe Le Brech

Il est 17 heures. Les portes du stade municipal de Chauray ouvrent. Sur la pelouse dont la qualité saute aux yeux – quel billard ! -, les deux équipes s’échauffent. Le long de la main courante et tout autour du terrain, les dirigeants et bénévoles s’activent, notamment le président, qui est partout : claquements de bises, grands sourires, pas de course, il est partout et a un oeil sur tout : « Le N2, ça n’a rien à voir avec le N3 » lance-t-il quand il pose pour la photo !

Cet été, le stade de Chauray, où la main courante permet une grande proximité avec la pelouse, où quelques rangées de gradins devant la buvette – l’incontournable lieu de vie – sont très vite remplies, s’est doté de deux petites tribunes démontables mais couvertes de 100 places chacune. C’est simple, on dirait un kit. Entre les deux nouveaux espaces, trône la vieille tribune, d’environ 100 places également. Capacité du stade en places couvertes : 300. Capacité du stade : 1500 ! Le club s’est déjà approché de cette jauge lorsque, en National 3, la saison passée, 1300 personnes avaient assisté au match face à la réserve professionnelle d’Angers.

Un départ plutôt correct

L’entrée des joueurs à Dinan-Léhon. Photo Philippe Le Brech

Ce soir, contre Montlouis, 600 personnes sont présentes, dont un certain Pascal Gastien, venu en voisin et en ami, et de Cherif Djema, le directeur sportif de Bayonne, prochain adversaire. 600, c’est pas mal, mais c’est un peu moins bien qu’au match précédent (900) remporté dans le temps additionnel face à Lorient (1-0, but de Balamine Cissé à la 90’+2), mais cela fait tout de même du monde compte tenu de la configuration des lieux.

Comme partout, il y aura forcément un peu plus de monde si les résultats, plus que corrects pour l’instant (2 victoires, 1 nul à Granville et 2 défaites à Dinan-Léhon et Locminé), sont au rendez-vous et si le jeu prôné par le coach Fabrice Fontaine, plutôt technique et de position, est toujours au rendez-vous.

L’entraîneur Fabrice Fontaine. Photo Philippe Le Brech

Fabrice Fontaine, c’est 19 mois au FC Chauray (il est arrivé fin février 2024 en remplacement de Jérémie Delenne) et 20 ans aux Chamois Niortais ! Quand l’histoire vous rattrape… Depuis son intronisation sur le banc, qui avait à l’époque fait couler de l’encre, notamment dans son ancien club, l’OL Saint-Liguaire Niort (R2), lequel, par la voix de sa présidente, Katia Poncelet, avait déploré certaines « méthodes » – « Mais tout est rentré dans l’ordre », assure David Rullier -, le Réunionais (il est né à Saint-Denis) de 49 ans a bien redressé la barre.

Fontaine a tout d’abord assuré le maintien en N3 qui était loin d’être gagné à son arrivée, avant de finir en tête de sa poule la saison passée, 2 points devant la réserve de Nantes. C’est simple, depuis qu’il est là, l’ancien formateur, préparateur physique et adjoint en pro des Chamois affiche un bilan de 44 % de victoires en championnat (18 en 41 matchs) et signerait volontiers pour une telle « stat » en National 2 cette saison !

À l’issue de l’important succès des coéquipiers de l’ex-portier des Chamois Niortais en Ligue 2, qui a connu la Ligue 1 à Dijon, l’international béninois Saturnin Allagbé, face à Montlouis, concurrent direct pour le maintien (2-1, buts de Pierre-Bertrand Arné et de l’ex-guingampais Tieri Godame, sur deux passes de  Jérémy Grain), le président David  Rullier (45 ans) et l’entraîneur Fabrice Fontaine ont répondu à quelques questions, histoire de faire le tour du propriétaire, de comprendre encore mieux la philosophie du club et d’évoquer les ambitions et les axes de progression.

Fabrice Fontaine :

« On doit toujours apprendre de l’autre »

Photo 13HF

Né à Saint-Denis de la Réunion, Fabrice Fontaine (49 ans) arrive en métropole à l’âge de 15 ans, pour intégrer le centre de formation des Chamois, où il va finalement tout connaître ! Il devient ensuite le préparateur physique du Centre (de 2004 à 2009) avant d’enchaîner avec les pros (de 2009 à 2019). Dans la même période, il est aussi parfois adjoint, comme avec Patrice Lair en 2018/2019, qu’il suivra la saison d’après à Guingamp. En 2021, pour la première fois, il entraîne une équipe seniors, à La Rochelle, en Régional 1, pendant deux saisons. Puis on le retrouve sur le banc de Saint-Liguaire (R2) à Niort, pendant 6 mois jusqu’à ce que le club de Chauray ne vienne le débaucher, fin février 2024.

Photo 13HF

Fabrice, vous découvriez le N3 l’an passée et cette saison le N2 : peut-on dire que vous êtes encore un entraîneur en apprentissage ?
Je pars du principe que je suis en apprentissage depuis 20 ans ! Et je le serai toujours, avec l’envie de mettre des projets en place, avec des axes de réflexion, quelques certitudes, des idées. À Niort, j’ai souvent été dans l’ombre de quelqu’un, et dans ces cas-là, on travaille par rapport à lui et pour lui, pour la bonne conduite de son projet, en essayant de lui apporter ses idées, ses compétences, ses connaissances. Vous savez, en côtoyant des coachs, et j’en ai côtoyé quelques-uns, on apprend beaucoup humainement, techniquement, professionnellement, donc il y a des relations qui se nouent. J’ai croisé six coachs en pro à Niort, certains de manière très courte. Quand j’étais à la formation avec Pascal (Gastien), Philippe Hinschberger, avec qui je n’ai pas travaillé, était une personne qui m’inspirait, dans la philosophie notamment. On essaie toujours de tirer le maximum de ce que l’on apprend des autres, de s’en inspirer. Comme on s’inspire des plus grands, Arteta, Guardiola. Et aussi des formateurs que je croise à Clairefontaine. On échange beaucoup. Je pense que dans le foot, on doit apprendre de l’autre.

Le FC Chauray ne fait pas partie des grosses écuries en N2 : ce serait donc une déception de ne pas se maintenir ?
Ce serait un échec. Mais ce n’est que du football. On va tout faire pour être en N2 l’an prochain. Mon discours avec les joueurs, ce n’est pas du tout de dire que c’est une anomalie d’être là et qu’il faut se contenter de ça, non, mon discours, c’est de gagner tous les matchs. Après, c’est une culture à insuffler. Les joueurs ont compris le message. J’essaie d’instaurer une exigence, une ambition. On construit dans ce sens. Bien sûr que dans notre poule, il y a des clubs avec plus de moyens, mieux structurés, avec de meilleurs joueurs, mais s’il suffisait d’avoir plus d’argent pour gagner des matchs, hormis le PSG, cela se saurait.

Photo Philippe Le Brech

Votre équipe a la chance de s’entraîner la semaine à René-Gaillard : ce n’est pas rien tout de même…
C’est une chance, oui, cela montre aussi que l’on se donne les moyens de bien travailler. On s’entraîne six fois par semaine, le matin, et le mardi, on double les séances. On a trouvé le site de René-Gaillard par incidence, après la fin de l’histoire des Chamois Niortais, sinon on ne l’aurait pas eu. C’est fonctionnel, il y a plus de place, on a un vestiaire entier pour 25 joueurs quand on en avait deux de 15 places avant, le terrain est tondu et tracé, et dédié à l’entraînement de la N2.

C’est un luxe mais cela va dans le sens de notre projet : d’un côté, on est plus exigeant avec les joueurs, de l’autre, il faut être en capacité de les mettre dans les meilleures conditions afin qu’ils s’expriment du mieux possible. On améliore les conditions d’entraînement comme on a améliore les conditions de match, de déplacement.

Au stade, à Chauray, on a aussi mis en place un réceptif cette saison, deux nouvelles petites tribunes de 100 places. Et puis la qualité du terrain est top, c’est l’un des meilleurs de N2. Après, il reste le travail et ce qu’on y met. Et ça, c’est moi qui maîtrise les ingrédients. C’est important de créer un spectacle chez nous, que les gens soient bien. On n’est vraiment pas loin d’un fonctionnement semi-pro, avec de l’accompagnement médical, un médecin, un kiné référent… On travaille aussi avec des ostéopathes, des podologues. En fait, je m’appuie sur ce qui a été fait aux Chamois.

Samedi dernier, avant le coup d’envoi face à Montlouis, le club a reçu le trophée de champion de N3. Photo 13HF

C’est quoi, votre philosophie à vous ?
Partager avec les joueurs cette rigueur et cette expérience du haut niveau, en l’adaptant à leur niveau et leurs caractéristiques, et prôner quelque chose qui m’a beaucoup séduit en côtoyant Pascal Gastien, je veux parler de cette notion de possession, de maîtrise du jeu et des éléments, le jeu court, être acteur techniquement, avec un gros impact, du caractère. Il faut être athlétique, imposer notre jeu court, construit, où on doit déstabiliser, déséquilibrer l’adversaire, en cherchant le joueur libre.

Je suis inspiré de ce football de position, le jeu d’intensité athlétique, le jeu collectif, tout en responsabilisant le joueur, qui est au centre de tout ça, sa nature, comment il est, comment il agit. Je ne peux pas demander autant de choses à un joueur si ce n’est pas une bonne personne. C’est ce que j’aimais chez Pascal (Gastien). Aujourd’hui, on surfe sur ce qui a été mis en place l’an passé, il y a les prémices de quelque chose. Pour l’instant, je suis satisfait de l’écoute, de l’application qui est mise. Mais j’ai un handicap : j’ai été préparateur physique, donc avec moi, les joueurs ne peuvent pas se cacher sur ce plan-là (rires) ! En plus, on a les GPS, la data, la vidéo, tout ça amène beaucoup d’éléments. Dès que le joueur a une excuse, on a les solutions.

Le coach célébré et porté en triomphe après l’accession en N2, sur le terrain du TA Rennes, la saison passée. Photo Michel Dubus / FC Chauray

Pascal Gastien était présent au match contre Montlouis…
Avec Pascal, on communique. Le lendemain du match, il m’a envoyé un texto. Bien sûr, je suis à son écoute, c’est normal, il a un gros vécu, c’est une belle personne qui prône le jeu et l’humain, qui met le joueur et le club en avant. Avoir rencontré des gens comme lui, comme Franck Azzopardi, Laurent Cadu, Jean-Philippe Faure, des gens du cru, ça me permet de rester les pieds sur terre. Avoir rencontré des joueurs comme Djiman Koukou, qui est revenu à Saint-Liguaire, Quentin Bernard ou Jimmy Roye, qui est dans le staff à Laval, et tant d’autres, aussi… Je suis attaché à cette identité, ces valeurs. Je pense qu’on a ce devoir de générer ça, de fidéliser les joueurs dans cette optique, mais c’est dur, parce que la société avance plus vite que nous. Pour en revenir à Pascal Gastien, il est inspirant pour les joueurs. Je profite de l’article pour le remercier de tout ce qu’il m a apporté. Il aime le foot. Il mérite le respect. Il a été entraîneur joueur en R1 à Saint-Liguaire, il a entraîné en Ligue 1 ! Il a tout connu sauf la Ligue des champions ! Son parcours est exceptionnel.

Avant le coup d’envoi face à Montlouis. Photo 13HF

La disparition des Chamois, où vous avez passé tant d’années, ça vous a fait quoi ?
J’ai passé plus de 20 ans entre les murs de René-Gaillard, j’y ai vécu des bons moments, j’y ai connu ma femme, mes enfants sont « Chamois » mais en 2014, un nouveau projet a été mis en place après le départ de Pascal Gastien, malheureusement, le virage pris n’a pas été maîtrisé. C’était une bombe à retardement qui s’est accélérée à partir de 2017 (avec l’arrivée de Mikaël Hanouna) avec un déclin, et ça fait mal, car beaucoup de personnes ont travaillé, cadres techniques, bénévoles, pour faire remonter ce club de CFA en 2009 à Ligue 2, et même aux portes de la Ligue 1. Et tout ça a été balayé par la faute de quelques personnes. Pourtant, on avait prévenu, mais il n’ont pas écouté… L’appât du gain, la méconnaissance du milieu et la bêtise impunie… Je reste mesuré dans mes mots, mais je suis fâché et énervé. On a éteint un club, on a rayé de la carte un club.

La Réunion, cela ne vous manque pas ?
Il faut y retourner de temps en temps… Là, cela fait déjà deux ou trois ans que je n’y suis pas retourné.

David Rullier :

« Il faut que le Niortais réécrive son histoire »

David Rullier. Photo 13HF

Quand et comment êtes-vous arrivé à la tête du club ?
J’occupe ce poste de président depuis 2022, et je suis au club depuis 2018. Je suis Mellois d’origine (habitant de Melle, à 30km de Niort), mais j’habite à Fressines, à 10km de Chauray. Avant d’arriver, j’ai passé deux ans au club de Saint-Florent. Dans ma jeunesse, j’ai joué au niveau régional et départemental, et j’ai été jeune arbitre de Ligue.
Je suis arrivé au FC Chauray par l’intermédiaire de mon fils, que j’ai inscrit au foot, et je me suis lié d’amitié avec la secrétaire générale, Ginette Morisson, malheureusement celle-ci est tombée gravement malade, avant de décéder. C’est elle qui m’a fait rentrer au secrétariat puis je suis entré au comité directeur. Ensuite, il y eu des problèmes avec l’ancien président. Il n’y avait plus un sou dans la trésorerie. Là, il a fallu rebâtir une équipe, c’est comme ça que je suis devenu président.

Avant le match, le « prez » court partout ! Photo 13HF

C’est difficile d’être président d’un club ?
Non, mais être un président de club de National 2 oui (rires) ! Il y a un monde d’écart quand même avec le N3, c’est beaucoup plus protocolaire en N2, et c’est plus poussé au niveau financier, pour l’établissement des budgets, par exemple. Il faut avoir beaucoup plus de connaissances. Je ne le cache pas, je ne suis qu’un simple salarié d’une pharmacie (il est responsable d’achat), ça va très vite… J’avais dit que j’arrêterais quand on monterait en N2 ! Là, on fait la passation de pouvoir, on réfléchit à un nouvel organigramme et à une nouvelle organisation pour les années futures, voire l’année prochaine. Il ne faut pas se voiler la face, un président doit avoir des compétences que je n’ai pas, cela ne sert à rien de s’obstiner, il faut d’abord penser au club, le pérenniser, avec les bonnes personnes à sa tête. Le club ne m’appartient pas, je ne suis que de passage.

Vous n’êtes donc pas ce président mécène comme on le voit souvent…
Non. On a un pouvoir social OK, mais il faut aussi avoir un pouvoir financier. En N2, cela n’a pas plus rien à voir. Je prends souvent exemple sur l’Aviron Bayonnais qui se structure, qui a créé une SAS pour gérer son équipe fanion, avec une asso à côté, on doit tendre vers ça. Bayonne, c’est un club que je suis, j’y vais chaque été, j’y suis encore allé et je suis allé voir leur terrain, qui est catastrophique en ce moment, et pour l’attache niortaise, il y a Karim Fradin là-bas.

La buvette du stade, lieu incontournable le soir des matchs ! Photo 13HF

Quel est le budget de fonctionnement du club ?
On va arriver à 800 000 euros (300 000 pour l’équipe première) contre 650 000 l’an passé. On a un des plus petits budgets de la poule de N2 avec Locminé. Le club a sa masse salariale encadrée, donc on fait attention à ce que l’on fait.

On n’a que deux salariés à plein temps, en dehors des joueurs sous contrat : on va à la DNCG en novembre, nos comptes vont être épiés, on ne peut pas faire n’importe quoi. On a entre 35 et 40 équipes, la plupart des équipes jeunes sont en R1 ou R2. La réserve seniors est en R2. La mairie de Chauray a refait les terrains cet été, elle met beaucoup la main à la patte, mais il manque un terrain en synthétique. Contrairement au nord deux-sèvres, il n’y en a pas dans le sud deux-Sèvres, hormis à Celles-sur-Belle et Saint-Liguaire. On a quand même 4 terrains.

C’est quoi, l’objectif ?
C’est de pérenniser, stabiliser et structurer le club en N2 en seniors et avoir des jeunes à un niveau très intéressant afin de fournir des joueurs. Mais pour avoir des bonnes équipes en jeunes, il faut aussi avoir de bons éducateurs, comme Johan Agnel, titulaire du DES, que j’ai récupéré d’Angers (passé aussi par … les Chamois !), et pour avoir de bons éducateurs diplômés, il faut pouvoir les payer. Un mécène est arrivé, Olivier Bodin (Burger King), qui nous a aidés.

Deux petites tribunes couvertes comme celle-ci ont été installées cet été. Photo 13HF

Comment avez-vous vécu la disparition des Chamois Niortais ?
Quand les Chamois ont disparu, il y a eu une réflexion au sein du club. On s’est posé beaucoup de questions. La mairie est venue nous chercher, elle voulait savoir si on voulait faire une association « chamois niortais », si on voulait récupérer le nom prestigieux, cela aurait pu être intéressant mais on savait qu’en interne, cela ne passerait pas. On a des gens au club qui n’y étaient pas favorables. En fait, pour des questions d’identité, nous, comme d’autres clubs (Niort Saint-Liguaire par exemple), on n’arrivait pas à se projeter, on a perdu du temps et de l’énergie là-dessus. Finalement, on a bien fait de ne pas y aller. Ce qui est malheureux, c’est que l’identité « Chamois niortais » a disparu, on est Chauray, on n’est pas loin, il y a aussi Saint-Florent à côté. Il faut que le Niortais réécrive son histoire. Mais les Chamois Niortais, c’est fini.

La joie des joueurs après le but dans le temps additionnel contre Lorient, fin août ! Photo Michel Dubus / FC Chauray

En fin de compte, dans cette histoire, on voit bien qu’il y a le sportif d’un côté, et la politique de l’autre, qui a voulu imposer ce titre « Chamois niortais ». Mais comme la mairie n’a rien fait pour sauver les Chamois Niortais, je pense, c’est mon avis, qu’ils ont proposé cela pour redorer leur blason, leur image. Ils voulaient juste que le nom apparaisse. Mais on sait aujourd’hui que l’on ne peut plus utiliser le nom « Chamois Niortais », d’ailleurs le club de Saint-Florent a dû revoir sa nouvelle appellation à cause de cela, parce que c’était une marque déposée, brevetée. Sur le site de la Ligue, c’est écrit Saint-Florent, et non pas Chamois Niortais Saint-Florent.

Aujourd’hui, on a conclu un pacte avec Saint-Flo. On arrête de s’agresser. Je connais beaucoup de gens dans ce club, mais quand il y a la politique au milieu… En bonne intelligence, on a trouvé des accords de principe pour l’utilisation du stade René-Gaillard, où s’entraîne notre équipe de N2 la semaine, pour le prêt de matériel aussi. Chacun doit avancer de son côté. On a signé des conventions. On ne doit pas être là pour s’envoyer des injures sur les réseaux.

La joie après le succès face à Montlouis. Photo Jules Sauvaget.

Avez-vous récupéré des joueurs issus des Chamois ?
On a récupéré une trentaine de jeunes entre U10 et U12, on a récupéré des U17 nationaux pour jouer en U18 R1 chez nous, alors pourquoi pas accéder en U19 Nationaux, ça serait intéressant. D’un point de vue politique, le lycée de la Venise Verte a été attribuée au club de Saint-Florent pour les sections sportives, ce qui est logique, et beaucoup sont allés à Saint-Flo, mais il y a de la place pour tout le monde. La section sportive du lycée est gérée par les éducateurs de Saint-Flo, le collège par le District. À nous de montrer que l’on travaille aussi bien, sinon mieux.

Chauray est désormais le premier club en Deux Sèvres : vous sentez-vous investi d’une mission ?
La mission est déjà d’avoir une vraie valeur sportive et financière. On ne veut pas faire comme les Chamois Niortais, liquidés, parce qu’on aura vu trop grand, trop fort et trop haut. On est le plus gros club du département, oui, on se sent investi d’une mission, oui, mais on ne doit pas faire n’importe quoi. Cela ne doit pas être au détriment du financier. On ne veut pas se prendre une deuxième étiquette Hanouna dans la figure !

Photo 13HF

La montée en N2, sincèrement, vous y pensiez l’an passé ?
Non ! On est monté à la dernière journée, à TA Rennes. Mais ce n’était pas l’ambition du club. Juste après le match, on a profité de l’instant présent avec mon trésorier, Florian Rodriguez, et on s’est dit « on fait quoi maintenant » ? Bon, déjà il faut préparer la transition. Si on ne pérennise pas le club en N2, on le pérennisera en N3.

Le niveau du N2, vous le trouvez comment ?
Je trouve qu’il n’y a pas un club au-dessus des autres. Hormis Lorient qui m’a impressionné, pour l’instant, je ne vois pas trop de différences entre nous et les autres équipes.

Vous allez bientôt disputer un match à René- Gaillard…
Oui, on va accueillir Bordeaux (le 1er novembre) sur le stade des Chamois, afin d’accueillir les supporters, pour des questions de sécurité.

Photo 13HF

À Chauray, on a vu un public plutôt… spectateur !
Oui ! Le Niortais n’est pas animateur, c’est un consommateur. Ici, les gens viennent au foot comme ils vont au théâtre ou au cinéma.

Vous diriez que vous êtes un président plutôt comment ?
Je suis convivial et dans l’arrondi, j’aime faire plaisir à tout le monde, c’est peut-être un défaut parce que parfois il faut savoir trancher.

C’est quoi, la particularité du club ?
C’est un club qui a toujours eu une connotation bling-bling, un peu le « richou », alors que ce n’est pas du tout ça. J’essaie depuis 4 ans de fédérer ou de re-fédérer autour du club, de l’ouvrir sur les autres. Je ne souhaite pas qu’il soit refermé sur lui-même.

Un mot sur le coach, Fabrice Fontaine, que vous êtes allé chercher il y a 19 mois…
On était sur 7 défaites en 8 matchs en janvier/février 2024. On a remplacé Jérémy Delenne par Fabrice Fontaine, qui était l’un des cinq titulaires d’un DES dans le coin, avec notamment Jean-Philippe Faure, Karl Tourenne ou encore Gérard Nicol. Fabrice, on a bien fait de le prendre ! Il sort des Chamois Niortais aussi. Et puis regardez les résultats, ils parlent d’eux-mêmes.

Photo Philippe Le Brech
Photo Philippe Le Brech
Photo Philippe Le Brech
Photo Philippe Le Brech
Jérémy Grain, à l’origine des deux buts de son équipe face à Montlouis. Photo 13HF
Et voilà, ça se passe comme ça, au FC Chauray ! Photo 13HF
  • Texte : Anthony Boyer / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : Philippe Le Brech, 13HF, Michel Dubus et Jules Sauvaget.
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Il y a toujours deux clubs de National cette saison dans l’agglomération de Rouen ! Et la situation est partie pour durer, à moins que le sportif ou l’extra-sportif ne viennent changer la donne. Le président de QRM, qui croit toujours au projet d’un club unique, évoque les 10 ans du sien, fondé en 2015 et parle aussi de l’avenir, qu’il voit… en pointillé.

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos : QRM

 

  • Article paru avant la défaite de QRM à Diochon face à Aubagne (1-2), laquelle a précipité la chute de l’entraîneur David Carré et de son adjoint Grégory Scaffa. Un nouveau coach a été nommé : Fabien Valeri (ex-FC Chambly, Paris 13, Virton et Paris FC).

Bien sûr, le match de ce soir face à Aubagne, pour le compte de la 5e journée de National, revêt une grande importance si l’on se réfère simplement au classement. Mais depuis sa création, en 2015, Quevilly Rouen Métropole, lanterne rouge après quatre journées (un nul et trois défaites) a livré tellement d’autres matchs tout aussi importants…

Que l’équipe de David Carré ferme la marche du championnat n’est évidemment pas en adéquation avec l’objectif du club d’obtenir un maintien « facile », même si cela n’existe pas vraiment en National, du moins de faire partie de la première moitié de tableau. Rien n’est figé et l’on se souvient que QRM, qui a bouclé son recrutement tardivement, avait déjà occupé cette place quasiment au même moment la saison passée, mais un peu plus tard, fin septembre.

Non, le match le plus important de l’existence du club, c’est celui qu’il livre depuis dix ans avec son voisin, le FC Rouen, au travers du projet QRM qui, à défaut d’avoir été mené à deux, a trouvé une place mais sans doute pas celle escomptée. Un projet que nous avions largement relaté dans un de nos précédents articles (à lire : https://13heuresfoot.fr/actualites/national-fc-rouen-qrm-je-taime-moi-non-plus/).

À trois jours d’un déplacement à Concarneau (défaite 3-1 le 5 septembre dernier) et à dix de la réception d’Aubagne, le discret Michel Mallet, bientôt 25 ans de présidence et 60 de présence dans le foot, a accepté de répondre à nos questions sur le thème des 10 ans de QRM (2015-2025). Dix ans qui n’ont pas été célébrés… Comme si rien ne justifiait de souffler les bougies. Comme si l’on voulait passer sous silence dix ans durant lesquels il s’est pourtant passé beaucoup de choses.

Dans cet entretien en deux parties, le chef d’entreprise à la retraite mais toujours très actif revient sur la genèse de son projet qui a bien failli aboutir en 2024, avant que la Métropole rouennaise n’opte pour une autre voie. S’il n’est pas résigné, il sait cependant qu’il n’a pas toutes les cartes en mains et sous-entend que la gestion financière et les résultats sportifs pourraient, à terme, décider de l’avenir du football professionnel dans la 11e agglomération de France.

Partie 1. Interview
« J’ai remis le club en mode National »

Quand vous évoquez le projet QRM, vous dîtes « C’était un projet de territoire » au passé : cela signifie-t-il que vous n’y croyez plus ?
Je parle au passé parce qu’aujourd’hui, les conditions pour remettre ce projet-là en perspective ne sont plus aussi simples qu’avant. S’il y avait eu la bonne volonté de tous, je dis bien « de tous », politiques, supporters, dirigeants des deux côtés (FC Rouen et US Quevilly), et si les planètes s’étaient bien alignées, on aurait pu mener à bien ce projet qui est un projet de bon sens. Mais à un moment donné, les querelles de clochers, que je peux comprendre, m’ont amené à évoluer dans ma manière de penser depuis 10 ans. Je me suis rendu compte que j’avais commis des erreurs de vision, de langage.

Malgré tout, la sagesse me fait dire que c’est un projet qui aurait été top pour notre territoire. Ce n’était pas du tout un projet Quevilly qui voulait manger le FC Rouen. Pas du tout. Faire disparaître un club au profit d’un autre n’a jamais été d’actualité, cela n’a jamais été mon engagement. Aujourd’hui, l’on se sait pas dire comment cela va s’écrire demain. On a eu l’opportunité de le faire et on aurait pu tous réussir ce projet-là (à l’été 2024).

Hormis Paris et par le passé Ajaccio, deux clubs dans la même ville à ce niveau, c’est unique : on a du mal à voir les scénarios futurs et on se demande combien de temps la situation va durer, parce qu’à un moment donné, cela ne sera plus possible…
Personne n’est en capacité de dire combien de temps cela va durer, sauf à ce qu’il y ait des investisseurs qui arrivent chez l’un ou chez l’autre, avec un peu plus de moyens. J’en reviens toujours au même point : allier la ferveur du FC Rouen à la rigueur et l’expérience de Quevilly Rouen Métropole, c’était la bonne recette. Après, peut-être que l’histoire s’écrira. Mais, que cela soit moi ou mes actionnaires autour de moi, nous n’avons pas la volonté d’investir lourdement et n’importe comment. On respecte trop l’argent, ce n’est pas pour aller le dilapider dans le milieu du foot.

Ce qui nous intéresse, c’est la construction d’un projet : si on peut y arriver, c’est bien, mais ce n’est pas une fin en soi. Il n’y a pas que l’équipe fanion qui compte. J’ai un engagement moral vis à vis des gens qui nous suivent et nous ont suivi depuis 10 ans, et même plus encore, sur ce projet-là, et je tiens à le mener de la meilleure des manières. Après, si à un moment donné, il y a l’opportunité de construire quelque chose ensemble avec le FC Rouen, je serai forcément autour de la table.

« Je ne sais pas écrire la suite de l’histoire »

De l’extérieur, le projet QRM donne l’impression de stagner, voire de régresser… Et comme tous les scénarios sont possibles, avez-vous déjà imaginé celui d’une descente, un jour, en National 2 ?
On envisage tous les scénarios, bien sûr. C’est pour ça qu’à la question de savoir où on sera dans 10 ans, je suis incapable de répondre. La parole est d’abord et avant tout aux résultats sportifs. C’est ça aussi qui fait que le projet QRM est là depuis 10 ans : c’est parce qu’on a eu des résultats sportifs assez exceptionnels.

Après, il y a aussi la bonne gestion des clubs qui entre en ligne de compte, on l’a vu il y a un an et demi, souvenez-vous, quand le FC Rouen était en grande difficulté, avant que des investisseurs n’arrivent et ne sauvent le club d’un nouveau dépôt de bilan. Cela passe aussi et surtout par la bonne volonté des composantes. Je me répète, mais si on arrive à aligner une bonne politique entre supporters, chefs d’entreprises dirigeants, on arrivera à faire un seul club et ce sera au bénéfice de tout le monde. Pour l’heure, je ne sais pas écrire la suite de l’histoire.

Aujourd’hui, QRM n’aurait-il pas mieux sa place en Ligue 3 plutôt qu’en Ligue 2 ?
Je dirais spontanément oui, déjà parce que la Ligue 3 est en train de devenir une petite ligue 2 : il n’y a qu’à regarder le National d’aujourd’hui, avec un nombre de clubs très élevé qui, sur les dix dernières années, ont fréquenté la Ligue 1 et la Ligue 2. Ce qui fait qu’il ne reste plus beaucoup de places, entre guillemets, pour les clubs à l’esprit amateur.

Un mot sur la future Ligue 3 : comment ça se passe entre vous, présidents ? Vous en parlez ?
Bien sûr. J’ai fait partie du ComEx de la Fédération et sur le dernier mandat (de Noël Le Graët), on a beaucoup parlé et beaucoup travaillé sur le sujet avec Jacques Piriou (président de l’US Concarneau), le regretté Gilbert Guérin (président de l’US Avranches, décédé en octobre 2023), Antoine Emmanuelli (président du FC Bastia-Borgo) et d’autres bien sûr. Le flambeau a été repris maintenant par Thierry Gomez, le président du Mans. Il y a eu des réunions, je serai d’ailleurs demain (entretien réalisé mardi 2 août) dans une des commissions de la Ligue 3. Il y a vraiment quelque chose à construire. Le National, à quelques exceptions près, va dans le sens d’un championnat professionnel.

« Pour la Ligue 3, aucune marche arrière n’est possible »

Où en est-on au juste de la Ligue 3 ? On entend parler d’une AG en décembre qui définirait les grandes lignes…
Les choses se sont dessinées déjà, le président (Philippe Diallo) s’est engagé sur cette Ligue 3 dans le cadre de sa campagne post-élection. Le modèle, on le sait, c’est celui qui a été mis en place dans le football féminin. Cela prendra sa forme à l’assemblée générale du mois de décembre, ou à celle de juin prochain, mais les commissions travaillent sur les bases, sur les fondations. On sait bien qu’il y a plein de choses à faire évoluer, que c’est le seul championnat où les règlements ne sont pas les mêmes selon que l’on est un club qui descend de Ligue 2 avec un statut pro et qui est bien soutenu la première année, un peu moins la deuxième année, un club qui se maintient en National avec un statut pro (un club peut garder ce statut pendant 5 ans), un club amateur, avec des contrats à des niveaux de salaires différents alors que l’on joue dans le même championnat, etc. Il faut mettre tout ça à plat, écrire ces règlements. Cela va se faire. Aucune marche arrière n’est possible.

Revenons à QRM : où en est le projet de centre d’entraînement ?
Pour le moment, le calendrier est gelé, pour reprendre une expression du président de la Métropole Rouen Normandie (Nicolas Mayer-Rossignol), il y a des élections l’an prochain, donc tout sera remis sur la table ensuite. On a identifié un site avec la Métropole.

Dans le contrat de territoire, nous avons également un engagement avec la Région et le Département pour valider le principe d’un projet de 4 à 8 millions d’euros en fonction du niveau où l’on joue. Comme on est descendu de Ligue 2 en National (en 2024), on est pour le moment dans un projet de centre d’entraînement, parce que nos conditions d’entraînement actuelles ne sont pas requises pour une Ligue 3. Si on avait le bonheur de remonter un jour en Ligue 2, l’idée serait d’avoir le foncier nécessaire pour créer l’outil de travail dont disposent tous les clubs de Ligue 2 ou presque.

Publiquement, je me refuse à donner un site, parce que nous en sommes déjà au troisième depuis le début de la réflexion, il y a 5 ou 6 ans. Un premier site n’a pas été retenu, je pense à tort, parce que a priori trop petit, alors que c’était un beau projet collectif dans lequel étaient impliqués le foot, le rugby, le hockey et le basket, qui avait du sens, proche de Diochon, bien desservi, avec un parc sportif à côté. Puis il y a eu un projet sur Canteleu mais pour des raisons de transformation de terres agricoles en terrain sportif, cela n’a pas pu se faire. Donc je reste prudent et le jour où ce sera validé, que l’on entrera dans la phase active, je communiquerai.

« Pas besoin de nouveau stade à l’heure actuelle »

Le vendredi soir, quand le National joue, vous regardez en premier les résultats du FC Rouen ?
Je vous mentirais si je vous disais le contraire. Vous savez, on est une ville, donc je regarde aussi les résultats du hockey quand ils jouent, du basket… Mais je pense qu’au FC Rouen, eux aussi regardent nos résultats, c’est normal. Il faut se nourrir de cette ambiance qu’il y a autour de tout ça : je n’en retire que du positif. Si on mettait tout ça en commun, rendez-vous compte de ce que l’on serait en capacité de faire ? Quand on additionne la rigueur de QRM et la ferveur du FC Rouen… On a un stade aujourd’hui qui peut accueillir 8000 personnes assises, il y a 5000 personnes environ quand le FC Rouen joue à domicile : je pense qu’un projet commun ferait que ce stade-là pourrait être plein chaque week-end.

Avec l’attaquant prêté par Lens, Kembo Diliwidi.

À propos de stade, êtes-vous favorable à une nouvelle enceinte ou à un stade Diochon rénové ?
À l’heure actuelle, nous n’avons pas besoin de nouveau stade. On ne créé pas un stade s’il n’y a pas de projet sportif, s’il n’y a pas une équipe en place. Si demain il y a du foot au FCR, ou à QRM, ou avec les deux réunis, quand il y aura une réussite sportive durable, les élus pourront mettre en place le projet d’un stade. J’ai entendu la saison passée l’ancien président du FC Rouen, Ivan Postel, parler de la construction d’un stade de 45 000 places… Mais même de 25 000, c’est mettre la charrue avant les boeufs. Il suffit de regarder ce qui se fait à côté, au Havre par exemple : 25 ans de Ligue 2, un stade de 25 000 place et ils faisaient 50 % de taux de remplissage en moyenne. Donc à quoi ça sert ?

Si l’on revient à la genèse du projet QRM, il n’y avait plus de foot à Rouen au moment de sa création en 2015 : nous, Quevilly, on était en National 2, on ne cassait pas trois pattes à un canard, on n’avait même pas 1000 personnes au stade alors qu’on avait de bons résultats, et le FC Rouen était en DH (Régional 1) parce qu’il venait de déposer le bilan (en 2013). Le projet QRM mené avec les deux clubs a permis aussi de relancer une dynamique autour du stade Robert-Diochon, qui appartenait à la Ville de Rouen, mais qui n’avait plus la capacité à l’entretenir correctement. Du coup, le stade est passé « métropolitain ».

Avec la réussite du projet QRM les premières années, le stade Diochon a vécu sa première mue en 2017, quand on est monté en Ligue 2 : il y a eu 5 mois de travaux, c’est pour ça qu’on est allé jouer au Mans jusqu’en octobre. Depuis, il y a eu deux autres étapes de travaux. Le stade a beaucoup évolué, même s’il reste vieux, qu’il prend l’air de partout, qu’il est toujours difficile à sécuriser, mais il a des LED, un beau tableau d’affichage et des nouvelles loges en plus des anciennes. Il peut effectivement y avoir encore une étape de travaux, par exemple pour le fermer, un peu comme un fer à cheval, du côté sud. Ce qui permettrait d’avoir 10 000 places assises sans avoir à engager une centaine de millions dans un projet qui se déplacerait. Pour moi, c’est le bon sens, et c’est aussi respecter l’argent public. Trois équipes dans le même stade, et 3e ou 4e meilleure pelouse de Ligue 2 il y a 2 ans. La Métropole a pris la bonne décision de faire gérer la pelouse (hybride chauffé) par un prestataire qui fait un super boulot. Il y a parfois deux matchs à Diochon le même week-end, comme c’est le cas ce week-end (le week-end dernier, en rugby, Rouen recevait Marcq-en-Baroeul le vendredi soir et le FC Rouen affrontait Châteauroux le samedi).

« Avec Rouen, on s’est toujours respecté »

David Carré, l’actuel coach de QRM.

Votre plus grand rêve, finalement, ne serait-il pas de voir le projet initial QRM imaginé en 2015 aller au bout, avec Régis Brouard sur le banc ? Ceci dit sans faire offense à l’actuel coach de QRM, David Carré.
Sans faire offense à personne… Le mot rêve est un grand mot, je ne veux pas le galvauder mais oui, ce qu’on aurait aimé, c’est arriver au bout de ce projet-là, bien sûr. Après, avec Régis Brouard ou un autre… On a beaucoup discuté la saison passée avec Régis Brouard et cela ne s’est pas fait. L’histoire a fait qu’au mois d’octobre suivant, il est arrivé sur le banc du FC Rouen (à la place de Maxime d’Ornano). Personne n’a attendu après Michel Mallet pour dire que Régis Brouard était un bon entraîneur. On a su se faire la gueule pendant 10 ans et puis on a su se retrouver, en personnes intelligentes, on sait ce que l’un a apporté à l’autre, et réciproquement.

Mais vous ne me ferez pas dire un mot sur notre mésentente de l’époque : cela appartient au passé, et puis ça nous appartient à tous les deux. La plus belle des choses, c’est que l’on ait su se reparler, quand on a fait les 10 ans de la coupe de France (en… 2023), avec 2000 personnes dans le Kindarena, avec un joli plateau de joueurs, dirigeants, entraîneurs, on s’est fait un bon kiffe !

Aujourd’hui, avec Régis, on se voit, on se croise, on parle. La relation avec les entraîneurs et les joueurs du FC Rouen a toujours été très bonne, elle a juste été exécrable à un certain moment, quand Fabrice Tardy nous a tournés le dos (en 2017) et quand l’entraîneur de l’époque (David Giguel, aujourd’hui entraîneur en N2 à Angoulême) mettait de l’huile sur le feu dès qu’il voyait un micro tendu, mais après ça, on n’a jamais eu de problème. On s’est toujours respecté. Il n’y a pas eu de pugilat quand on s’est affronté deux fois l’an passé en championnat, même s’il y a eu deux cartons rouges, mais c’était sur des faits de jeu.

Quid aujourd’hui du poste de directeur sportif à QRM ? Et aussi du poste de Directeur général ?
On n’a pas de directeur sportif à l’heure actuelle (l’ex-directeur sportif, Julien Converso, a signé au Puy-en-Velay). J’ai remis le club en mode National. Quand on passe trois années en Ligue 3, on prend des risques positivement dans l’organisation mais là, même si c’est difficile à faire parce qu’il y a de l’humain, on a remis le club en « mode National ».

Quand Arnaud (Saint-André, l’ex-directeur général) est parti aux Girondins de Bordeaux en cours de saison passée, on avait un accord tripartite avec la direction de Bordeaux pour qu’il nous donne un coup de main jusqu’à la fin de l’exercice 2024-25. Aujourd’hui, il n’est plus opérationnel au club. Je me suis impliqué à nouveau activement au club, mais vous savez, on a une organisation qui tourne avec les cinq actionnaires, Vincent Dumont qui chapeaute la communication, Philippe Blot qui s’occupe plus du sportif, Philppe Lansoy qui gère la partie financière et Laurent Duarte qui pilote l’association. Chacun a son pôle en fonction de ses compétences. Je suis bien épaulé, avec Stéphanie (Barré) à la comptabilité et Bérengère (Grattepanche, assistante de direction). Et on a des alternants que l’on forme, parce qu’aujourd’hui, on doit faire avec les moyens que l’on a.

C’est dur de passer de Ligue 2 en National. La deuxième année après la descente est plus compliquée, parce qu’on perd gros en terme de droits TV. Et puis, il n’y a pas que du football à Rouen, donc on ne regroupe pas non plus tout le monde de l’entreprise, c’est normal, quand il faut aller chercher les entreprises, c’est partagé, ce qui amène plus de difficultés à embarquer les gens, d’autant plus que le projet foot est un peu voilé.

Partie 2

L’interview « anniversaire des 10 ans de QRM »

Michel Mallet : « La discrétion, c’est une force ! »

QRM a fêté ses 10 ans d’existence cet été, pourtant, il n’y a pas eu de festivités…
Non. On s’incrit dans la durée, toujours avec notre envie de rester en National et de tenter la remontée en Ligue 2. On avait fêté le centenaire de Quevilly (1902-2002) et aussi les 10 ans de la finale de la coupe de France de 2012, mais il n’y avait pas lieu de fêter les 10 ans de QRM.

« Un bilan mitigé »

Si vous deviez dresser un bilan de ces 10 ans de QRM, vous diriez quoi ?
Il est mitigé parce que l’objectif de départ, qui était d’arriver à créer un club unique sur la métropole rouennaise, ne s’est pas réalisé pour diverses raisons. Sur le plan sportif, c’est plutôt une très belle réussite même si on s’est pris les pieds dans le tapis lors de la saison 2023-2024 en Ligue 2 et que l’on est descendu en National. On a fait une année de CFA (N2, la première à la création de QRM, en 2015-2016), quatre années de Ligue 2 (2017-18 puis 2021 à 2024) et cinq années de National (avec celle en cours). On a eu de superbes affiches à Diochon. On a remis le football métropolitain rouennais sur la scène hexagonale et pour moi, cela reste une belle réussite.

QRM dans 10 ans, vous voyez ça comment ?
Je ne saurais pas le dire, le foot va tellement vite… Il ne vous a pas échappé qu’en ce moment, il traverse un séisme… Il y a eu la problématique du contrat Médiapro. Je pense qu’on est dans les prémices de la reconstruction mais l’on ne sait pas dire les dommages ni combien de clubs aujourd’hui présents seront encore là demain. Il faut avoir un regard positif et se dire que QRM a sa place dans le top 54 du football français, il l’a prouvé. On a su surfer sur le sérieux du club, sur notre dynamique positive et d’un point de vue sportif, on a acquis un savoir faire. J’y crois.

« On avait braqué le National »

Plus grand souvenir de président depuis 2015 ?
Toutes les montées, forcément, parce que ça marque. La première fois qu’on est monté en Ligue 2 (en 2017), on est redescendu assez logiquement, on était allé très vite après deux montées successives. Mais la montée la plus marquante fut celle avec Bruno Irlès (en 2021), et pour reprendre ses mots, cette saison-là, on avait braqué le National ! Parce que personne ne nous attendait.

Votre plus grande émotion en 10 ans de QRM ?
Sûrement la première saison avec Olivier Echouafni (2023-24). Parce que c’était une saison sereine, durant laquelle on n’a pratiquement jamais regardé en bas de tableau. On n’a quasiment jamais été dans la difficulté, on a même toujours regardé vers le haut, on a terminé 10e parce qu’on n’a mal maîtrisé les trois derniers matchs alors que l’on avait la 6e place à portée de main.

Pire souvenir de président en 10 ans de QRM ?
La descente en National en 2024. Autant en 2017/18, ce n’était pas surprenant de descendre, on avait joué pendant 2 mois au Mans en attendant que le stade Diochon ne soit aux normes, autant celle-là… On finit la saison 2023-24 de Ligue 2 avec 38, dont 25 points pris contre les équipes de la première partie de tableau ! On a battu Saint-Etienne, Auxerre, on a mené 3 à 0 contre Bordeaux (3-3)… Cette équipe avait de la qualité mais elle a peut-être un peu trop choisi ses matchs. Seul Angers nous a pris 6 points dans les équipes de haut de tableau.

« Je ne commente jamais un choix de coach »

Le mythique stade Diochon accueille les matchs de rugby du RNR, et ceux de football du FC Rouen et de QRM. Photo Alan Aubry / Métropole Rouen Normandie

Plus gros regret en 10 ans de QRM ?
On n’a pas réussi ce pourquoi on avait crée QRM, c’est à dire faire ce projet de territoire. Il y a la place pour un football d’élite, de Ligue 2, dans le territoire métropolitain rouennais. C’est une déception de ne pas avoir réussi à embarquer tout le monde dans le projet QRM, parce qu’il y avait matière à faire de belles choses tous ensemble.

Le joueur le plus emblématique ?
Beaucoup ont marqué le club ! Mais de là à dire emblématiques… Certains ont marqué l’histoire de QRM. J’ai parlé de réussite du club, mais cette réussite a été possible grâce à un collectif. C’est la recette du succès, avec la bonne alchimie. C’est pour ça que c’est difficile de sortir un seul joueur.

Alors, le meilleur joueur de QRM ?
Là encore, c’est difficile… Il y a eu, à des moments différents, à chaque saison, des bons joueurs. J’ai beaucoup aimé sur les premières années Medhy Guezoui, pour ses qualités de joueur et « d’homme du vestiaire ». Kalidou Sidibé nous a beaucoup apportés aussi, Lamine Ndao, Sambou Soumano, et Balthazar Pierret, parti jouer à Lecce en Italie, mais je n’ai pas envie de faire une liste à la Prévert.

Une tactique de coach que vous n’avez pas comprise en 10 ans de QRM ?
Oui … et non ! Cela ne fait pas partie des choses sur lesquelles je m’arrête. Je suis très respectueux des coachs, j’ai ce recul qui me fait dire « Si le coach a pris cette décision-là, c’est parce que la semaine d’entraînement lui a apporté des éléments qui l’ont amené à la prendre », or moi, je ne suis jamais là aux entraînements, donc je ne me permets pas commenter un choix, ce qui ne m’empêche pas d’en discuter avec le coach. Il faut laisser travailler le staff sereinement. C’est dans la sérénité que l’on obtient de meilleurs résultats, pas quand on est sous pression.

Vous n’êtes pas ce type de président à vouloir s’immiscer dans les choix de coachs…
Jamais. De la même manière que je ne prends pas la parole avant un match dans le vestiaire ou à la mi-temps. J’ai très rarement pris la parole à chaud après un match dans le vestiaire, et quand je l’ai fait, c’était en phase avec le coach en place. D’abord, il faut se méfier des réactions à chaud. Je préfère avoir une force tranquille et m’exprimer 48 heures après s’il le faut, pour recadrer ce qu’il y a à recadrer, pour remettre les objectifs en perspective. Tapie avait sa manière de faire, j’ai la mienne et je m’y tiens.

« La gestion saine, une marque de fabrique »

Le pire match de QRM en 10 ans ?
Je n’en ai pas un qui me vient spontanément à l’esprit mais en termes de non-maîtrise et de conséquences sportives, il y a eu des matchs que l’on a perdu comme contre Dunkerque à domicile ou à Valenciennes, et qui nous ont amenés vers la descente en fin de saison, en 2023-2024.

Inversement, un match référence ?
Cette même saison 2023-2024, le match contre Auxerre à Diochon (4-3 le 13 avril 2024) et aussi contre Bordeaux (3-2 après avoir mené 3 à 0, le 5 décembre 2023), et s’il doit y avoir une mi-temps référence, à quelques minutes près aussi, c’est celle, très aboutie, à Auxerre, où jusqu’à la 43e minute, on mène 2 à 0. Si on ne prend pas ce but à ce moment-là, avant la pause… Parce qu’à 2-1 à la mi-temps, ce n’est plus pareil, et on perd finalement 3 à 2 (le 2 décembre 2023).

Plus grosse fierté de président en 10 ans de QRM ?
C’est à la fois d’avoir mené ce projet et d’en tirer ce bilan, avec des finances saines. On n’a jamais été sous le coup d’une décision problématique de la DNCG. On n’a jamais été en difficulté, ni sur le plan financier, ni sur celui de la trésorerie : le joueur qui signe à QRM sait qu’avant la fin du mois, son salaire tombera toujours, et ça, c’est une vraie satisfaction, parce qu’on a connu des hauts mais aussi des bas, avec des périodes difficiles pendant la Covid notamment. Là, on vient de subir une descente, mais on passe toutes les étapes. C’est une marque de fabrique chez nous. Et puis on voit ce qui se passe à côté…

C’est ce que nous allions dire : les finances saines, c’est votre marque de fabrique à QRM. Et puis vous savez ce que l’on dit sur vous : « Michel Mallet, quand il a un euro en poche, il dépense 90 centimes »…
Oui, même si ça m’est arrivé d’en dépenser un petit peu plus quand même (rires) mais toujours d’une manière qui ne soit pas irréversible. Quand je vois certains clubs qui sont montés en Ligue 2 et qui sont redescendus parce que ça a été mal géré, je me dis que, à un moment donné, il manque peut-être quelque chose dans les décisions, quelque chose pour accompagner une équipe… Cela doit être fait avec plein d’exigences pour ne pas créer des incidents forts dont les clubs ont énormément de mal à se relever. Quand je dis ça, je pense à Martigues, qui avait fait de belles choses et se retrouve tout en bas de la hiérarchie : les organes décisionnaires fédéraux ou de la Ligue doivent mieux anticiper cela.

« Notre bilan plaide pour nous »

Ce côté « économe », « bonne gestion », il vient d’où ?
C’est mon éducation, et aussi mon côté « chef d’entreprise ». Et puis je me suis nourri d’expériences de clubs qui ont été en grandes difficultés ou qui n’ont pas été raisonnables. Notre bilan plaide pour nous. On n’a jamais fait n’importe quoi financièrement pendant ces 10 ans et je peux vous dire que l’on n’a pas non plus mis des millions sur la table. Aujourd’hui, on est là pour évoquer les 10 ans de QRM mais à l’époque de l’US Quevilly, déjà, la gestion était menée de la même manière. Je me souviens d’une saison en CFA quand les joueurs avaient 40 euros de prime de match ! Cela ne nous a pas empêchés d’aller au stade de France en finale de la coupe, avec des moyens très limités. La raison, par rapport à la passion, évite les gros accidents. Si l’on n’avait pas été raisonnable, notamment après la finale de la Coupe de France, sans doute que Quevilly serait en Régional 1 aujourd’hui. Idem pour QRM, on ne serait pas là aujourd’hui en train d’évoquer les 10 ans.

Plus grosse erreur de président en 10 ans de QRM ?
Peut-être des erreurs de casting sur des joueurs, mais cela arrive à tous les clubs, même si je reste attentif à ça, parce que derrière, on touche à l’humain, et forcément, laisser un joueur sur le bord du chemin, ce n’est jamais bien.

Le jour où vous avez eu envie d’arrêter durant ces 10 ans ?
Il y a toujours des moments où on se pose la question. Effectivement, après la descente, l’an passé, je me suis demandé si c’était le moment d’arrêter…. 25 ans de présidence, depuis l’âge de 13 ans dans le foot… Mais j’ai jugé que ce n’était pas encore le moment et j’ai bien fait parce qu’on prend encore du plaisir. Le jour où je ne prendrai plus de plaisir, je n’aurai aucun mal à arrêter.

« L’inclusion, la RSE, l’autre marque de fabrique »

Le stade Lozai, fief de l’association QRM.

Mais ce plaisir, vous le prenez comment ? Parce qu’on dit qu’être président, c’est 95 % d’emmerdements…
Oui mais ce ne sont pas les soucis qui enlèvent l’envie, ou alors il ne faut pas faire président ou chef d’entreprise, on sait très bien qu’il n’y a pas que du bon. Je ne regarde pas que les résultats de l’équipe première, il y a l’humain autour. Je suis très attentif à ce qui se passe dans les bureaux, au personnel qui se dépouille et qui n’a pas forcément le retour des joueurs. On a une association qui fonctionne très bien : on n’a pas enlevé un euro à son budget malgré la descente en 2024 et encore cette année. Et on est récompensé : les filles sont en D3 et les U19 filles sont montées cette année. Sur l’agglo rouennaise, on propose ce qu’il y a de mieux chez les jeunes avec des U17 et des U19 Nationaux.

On a tissé des liens avec quelques clubs pros. Et je ne parle pas du travail de Laurent Duarte, le président, et de son équipe, en matière de RSE et d’inclusion, là encore une de nos marques de fabrique. D’ailleurs, quand j’ai pris la présidence de l’US Quevilly il y a près de 25 ans (en 2001), le projet initial, c’était un projet « jeunes ». À l’époque, on n’a jamais dit « On va monter en National » ou « On va monter en Ligue 2 ». la montée en National de 2011 fut un dégât collatéral positif entre une mayonnaise qui prend bien et un entraîneur, Régis Brouard, qui arrive en Normandie parce qu’il n’a pas de travail ailleurs. Et chez nous, il (Brouard) a fait un travail extraordinaire, et tout ça ont amené des années exceptionnelles.

Un modèle de président ?
J’ai toujours été marqué par le mode de gouvernance de l’AJ Auxerre et son président très sage, Jean-Claude Hamel (président de l’AJ Auxerre de 1963 à 2009, décédé en 2020 à l’âge de 90 ans). Bien qu’Auxerre était sur le toit de l’Europe, on l’entendait peu et on ne le voyait quasiment jamais. Derrière, il y avait un club qui tournait du feu de Dieu. Le sportif était mis en avant et à travers lui, la formation; ça, c’est quelque chose qui m’intéressait parce que dans ma vie de chef d’entreprise, j’ai toujours accordé beaucoup d’importance à l’humain et à la formation. C’était ma manière de voir les choses. J’ai pris ça avec moi dans le projet US Quevilly puis dans le projet QRM. La discrétion, c’est une force. Par exemple, je me suis toujours attaché à ne parler à la presse que deux ou trois fois dans l’année, généralement en début de saison, à l’intersaison et en fin de saison pour le bilan. Là, je fais une exception. Mais ce n’est pas Michel Mallet qu pousse le ballon ! Tout le reste appartient au sportif.

« Rodez, c’était le calque »

Un club auquel vous aimeriez ressembler à l’avenir ?
Quand on est monté en Ligue 2, Rodez, c’était le calque. On se connaît avec le président (Pierre-Olivier Murat), on a déjà échangé, mais ce qu’ils ont fait, leur manière de travailler, c’est un modèle à suivre. J’aime bien aussi ce que font Pau et Annecy, parce que ça s’inscrit durablement. Mais pour nous, il y a la difficulté d’avoir deux clubs dans la même ville. Parce que la possibilité de construire avec le monde de l’entreprise et les politiques, et de l’entraîner avec soi, est forcément plus facile dans des villes moyennes comme Rodez, alors que dans notre métropole rouennaise, la 11e de France, cet effet est plus complexe, et il y a la présence de nombreuses disciplines aussi, rugby, hockey, basket, et aussi des deux clubs de foot.

Plus grosse prime de match en 10 ans de QRM ?
Il y a eu quelques primes doublées quand c’était le bon moment mais je suis de moins en moins fervent de ce genre de choses. Je pense que c’est mieux de récompenser les joueurs sur la saison plutôt qu’à un moment donné, même s’il y a sans doute l’exception qui confirme la règle. C’est sans doute la sagesse…

Votre plus grosse colère en 10 ans ?
Je me suis mis en colère, mais c’était plutôt une colère froide. Je ne me suis jamais mis en colère à chaud. Mais il m’est arrivé d’aller à l’entraînement en début de semaine pour secouer un peu le cocotier, avec des propos qui doivent mettre les joueurs face à leurs responsabilités. J’aime bien quand on peut regarder le staff et les joueurs dans les yeux, et leur dire quand les choses ne vont pas, pour provoquer une réaction.

Votre rêve de président ?
C’est difficile de dire si c’est un rêve… J’ai 71 ans, mais mon premier objectif, c’est d’avoir des finances qui restent saines, d’avoir une association qui tourne, de poursuivre notre politique en matière de RSE et d’inclusion, de faire comprendre aux jeunes qu’il n’y a pas que le football dans la vie.

Vendredi 12 septembre, à 19h30 : QRM – Aubagne, à suivre sur la chaîne Youtube du National :

Lienhttps://www.youtube.com/watch?v=jqpkVEqKDEw

  • Texte : Anthony Boyer / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr

    • Photos : QRM
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Le nouveau président du FC Sochaux-Montbéliard (National) veut fédérer autour du club, dont il détaille ici les trois volets du projet : sportif, économique et social. Il raconte aussi son parcours, notamment ses expériences au RC Strasbourg et au Havre AC, et évoque les ambitions à court, moyen et long terme des Jaune et Bleu.

  • Par Augustin THIEFAINE / Photos Philippe LE BRECH
  • Reportage à Sochaux, quelques heures avant le match FCSM – US Orléans (5-0, J2 de National, le 15 août).
Clément Calvez. Photo FCSM

Intronisé à la tête du club franc-comtois en septembre 2024, le président du FCSM (44 ans) n’a pas vécu la saison qu’il souhaitait l’an passé. Les Doubistes ont souffert d’une crise interne, d’une défiance de leurs supporters envers le jeu et les choix affichés par les entraîneurs (Karim Mokkedem de juin 2024 à février 2025), puis de Frédéric Bompard pour le restant de la saison.

Un chantier XXL s’est alors amoncelé pour Julien Cordonnier (directeur sportif) et lui, à commencer par le choix d’un nouveau tacticien sur le banc : Vincent Hognon. Une quinzaine de départs ont suivi, dont quatre après le lancement de la saison 2025-2026 : Alex Daho et Samy Benchamma (partis pour Dunkerque et Rodez en Ligue 2), Boris Moltenis en D3 espagnole et Armand Gnanduillet (qui a signé libre à Caen après la résiliation de son contrat).

Entre-temps, une dizaine de renforts sont venus gonfler les rangs des Lionceaux à tous les postes (Mehdi Jeannin, Dylan Tavares, Bendjaloud Youssouf, Julien Masson, Jonathan Mexique, Boubacar Camara, Benjamin Gomel, Aymen Boutoutaou, Koffi Djoko, Prince Mendy et Julien Vetro ainsi que plusieurs jeunes issus du centre, passés professionnels (Aboubacar Sidibé, Honoré Bayanginisa, Victor Joseph, Edson Mendes). En somme : un FC Sochaux new look !

Identité retrouvée et ancrage local affirmé

Le peuple sochalien. Photo Philippe Le Brech

C’est un président souriant, dynamique et détendu que l’on a donc retrouvé quelques heures avant le retentissant succès des jaunes et bleus dans leur antre de Bonal, face à l’US Orléans (5-0) lors de la deuxième journée de National.
Aujourd’hui, les Sochaliens comptent 9 points après quatre rencontres (trois victoires et un revers), ont inscrit neuf buts et en ont encaissé seulement trois. Le FCSM n’avait pas aussi bien entamé un début de championnat depuis la saison 2000-2001. Un succès sportif que les dirigeants souhaitent voir perdurer le plus longtemps possible pour mener à bien la quête de montée en Ligue 2.

Mais cette promotion, si elle doit arriver, ne doit pas être « forcée » pour Clément Calvez. Elle doit surtout être « méritée ». Le quarantenaire s’est engagé devant les actionnaires du club à porter un projet aux multiples facettes, sportif, financier et social, dont il éclaircit les contours au cours de cette interview.
On retrouve en fait un Sochalien de la première-heure à la tête d’un club à l’identité retrouvée et l’ancrage local affirmé comme socle de départ. Un président qui a appris de chacune de ses aventures du côté du Havre ou de Strasbourg. Son parcours, son attachement au FCSM, Clément Calvez s’est confié sans filtre, sans détour, avec une ambition affichée, en toute humilité.

Interview

Clément Calvez : « La place de Sochaux n’est pas en National »

Alors qu’il a rejoint le FCSM pour des petits boulots (à la boutique du club notamment) à côté de ses études au début des années 2000, Clément Calvez a construit son histoire avec le club doubiste lorsque le foot a commencé a muté, Sochaux avec lui, et qu’une approche plus commerciale a commencé à se développer. « Lorsque je termine mon DUT technique de commercialisation, le club était en train de créer une régie intégrée (commerciale) et ils avaient besoin de jeunes commerciaux pour aller battre le terrain et c’est ainsi que je débarque véritablement. »

Les prémices d’une histoire sochalienne

Clément Calvez. Photo FCSM

« Avoir Jean-Claude Plessis (ex-président emblématique du club) comme beau-père, c’était aussi une pression supplémentaire. Il fallait prouver que je n’étais pas là seulement parce-que je suis le « beau-fils de ». Il faut beaucoup travailler. Peut-être plus que les autres, être consciencieux afin que le travail soit reconnu pour ce que tu fais et pas pour qui tu es. Sportivement, le club remontait en Ligue 1, il y avait une dynamique incroyable, tout le monde bossait extrêmement dur pour faire partie de cette histoire. En tout, j’ai passé 6 ans au FCSM à cette époque. En 2008, Jean-Claude s’en va, mes collègues partent et Alexandre Lacombe me nomme responsable de la cellule BtoB (ndlr : business to business, soit le commerce d’entreprises à entreprises), donc j’évolue. »

Promu au sein de son « club de coeur », celui dans lequel il a commencé à travailler, il reste finalement six années supplémentaires, jusqu’en 2014, année de la descente en Ligue 2 et de la vente par Peugeot. « À ce moment-là, je sens que je ne vais plus m’y retrouver. Ce qui était super excitant au FC Sochaux, c’était de vendre de grands projets, une identité, une marque. Tout est lié à Peugeot quand on parle des valeurs du club ou de la région. Sochaux, c’est le travail, l’humilité, des valeurs familiales. Et tu te dis mince, ce que j’ai toujours vendu et mis en avant, je n’aurai plus les arguments pour le faire. Ce que j’aime, c’est l’ancrage local et l’identité du club, et ils disparaissaient. »

De nouvelles opportunités s’offrent alors à lui, surtout une, au Racing Club de Strasbourg, alors pensionnaire de National : « Et je me lance avec eux, à cette époque on était 10. C’était une toute petite structure ».

« À Strasbourg, Keller voulait qu’on se compare au Bayern Munich »

Le FC Sochaux version 2025-26, ici avant le match à Rouen, le mois dernier. Photo Philippe Le Brech

« Comme Sochaux en Franche-Comté, le Racing c’est un emblème. C’est le totem de l’Alsace. Lorsque j’ai rencontré le président Marc Keller et les actionnaires locaux, leur projet était de refaire du Racing ce qu’il était avant et oublier les années sous pavillon américain. Ils voulaient un club alsacien avec à sa tête des dirigeants alsaciens et j’ai senti que ça collait même si je ne suis pas d’Alsace. Dans les valeurs, on disait « on met en avant le club qui est l’emblème de ma région et on va jouer sur l’ancrage et l’identité locale pour attirer et fédérer autour de nous ». Je retrouvais ce que j’avais connu à Sochaux. Je fais donc 4 ans au Racing Club de Strasbourg et j’avais récupéré toute l’activité commerciale (sponsoring, billetterie et boutique). »

Dans le Bas-Rhin, l’actuel président sochalien reconnaît avoir eu la chance de rencontrer Marc Keller, l’iconique président du Racing. Une figure qui lui sert, sans le dire, de modèle, d’inspiration aujourd’hui dans ses fonctions sochaliennes.

Photo Philippe Le Brech

« J’ai eu cette chance de pouvoir travailler avec lui. C’était dur car c’est quelqu’un d’extrêmement exigeant, parfois rude. Mais c’est aussi quelqu’un de très paternaliste, qui rend aussi beaucoup. Quand on a la chance d’être dans ses proches collaborateurs, tu reçois même de l’amour de sa part. C’est quelqu’un d’extrêmement compétent et c’est un ancien sportif de haut niveau (6 sélections en équipe de France), donc il sait ce que c’est. Sur les aspects sportifs il sait de quoi il parle, pareil pour le commercial, il a fait des études et connaît le fonctionnement d’un club. Il a une sensibilité pour le football allemand et s’en inspire beaucoup. C’est un exemple, je trouve, en Europe. Et avec lui, tous les curseurs sont poussés au maximum. On était en National, on était 10 et il voulait qu’on se compare au Bayern Munich ! J’ai aussi un souvenir de lui sur la prise en charge des buvettes, à 10 heures, la veille d’un match. Il voulait tester le temps de cuisson des merguez et des saucisses blanches, thermomètre à la main, pour savoir combien de temps il fallait les chauffer pour être à la bonne cuisson pour les supporters (rires) ! Sur tous les sujets, c’était comme ça. Chaque lundi matin, c’était débrief du match et il n’y a pas eu une fois où il disait « Super les gars, tout roule ». J’ai beaucoup appris avec lui. Je suis parti en 2020 au Havre et j’ai gardé de très bonnes relations avec lui. »

Au Havre, « des vraies valeurs de travail »

Photo Philippe Le Brech

Recruté en qualité de directeur du développement par le HAC avant de devenir directeur général adjoint, Clément Calvez récupère tous les porte-feuilles non-sportifs du club normand (commerce, organisation des matchs, communication). Une expérience « très intéressante sur un territoire à forte identité. C’était un très beau club, avec des vraies valeurs de travail, dirigé par Vincent Volpe, qui n’est pas un footeux à la base mais qui a construit sa fortune sur le territoire normand. Il a voulu rendre au territoire ce qu’il lui avait donné. Il s’est mis au foot car il sait ce que représente le HAC pour les Havrais. C’est le plus vieux club français et l’un des meilleurs centres de formation de l’Hexagone ». Un club où il a vécu la montée en Ligue 1, le remplissage d’un stade Océane qui était un peu déserté et l’ancrage des couleurs du HAC au coeur de la ville. C’est ainsi que Clément Calvez vivra quatre saisons « magnifiques » sous pavillon ciel et marine avant de revenir là où tout a commencé pour lui : au FCSM, mais dans le costume de président, un rôle tout à fait différent.

Avec Julien Cordonnier, le directeur sportif. Photo Philippe Le Brech

Alors que le FC Sochaux évolue pour la troisième saison consécutive en National (le club est tombé en 2023), les attentes sont fortes quant à un retour dans le monde professionnel en Ligue 2. Si Clément Calvez a pris, en 2024, la suite de Jean-Claude Plessis et tient la barre du FCSM, il doit faire face, comme tout le monde au sein de l’organisation franc-comtoise, à une forte pression. Mais attention, pour lui, la remontée doit être le fruit d’un mérite sportif comme extra-sprortif. « C’est un environnement stimulant. Le club est un historique du football français. Localement, il y a encore un engouement incroyable et il reste le porte-drapeau d’une région, tout du moins du Nord Franche-Comté. C’est aussi pas mal de pression. Quelque part, on a peur de l’échec. La place de Sochaux n’est pas en National et un jour il faudra remonter au moins en Ligue 2 mais la moitié des équipes du championnat postulent à une remontée à court ou moyen terme et en National, tout le monde peut battre tout le monde, peu importe ta masse salariale. Il faut aussi se rendre compte qu’avec le passage à 18 en Ligue 1 et Ligue 2, des gros clubs, historiques eux aussi, se sont retrouvés en National, Sochaux, Dijon, Valenciennes, Caen, Nancy… Le Mans était encore là l’an dernier. C’est donc un championnat difficile où il faut se battre. Nous, on sait où on veut aller, on veut remonter, mais il faut que la montée soit inéluctable, qu’elle soit un aboutissement, la conséquence du travail qui a été mené en amont. Quand on parle du projet du club, il est capital de rappeler que le projet du club est à trois facettes : sportif, financier et social. »

Un projet sportif ambitieux, réaliste et local

Vincent Hognon, l’entraîneur arrivé de Valenciennes cet été. Photo Philippe Le Brech

Le projet sportif comporte plusieurs phases. Si bien-sûr, dans un premier temps, les Doubistes souhaitent monter en Ligue 2 le plus rapidement possible, l’idée n’est pas de faire l’ascenseur la saison suivante.

« Il faudra s’asseoir dans ce championnat de Ligue 2 et essayer de se stabiliser dans le premier tiers de cette division, puis, de temps en temps, une année où tout se passe bien, réussir à grimper en Ligue 1, y vivre le plus longtemps possible, et si on en descend cela ne doit pas être une catastrophe. Si on réussit tout ça, alors on aura accompli de belles choses. Quand on regarde les clubs qui évoluent en Ligue 1 par le prisme de la taille de leur ville, de leurs infrastructures ou la composition de leur actionnariat, c’est extrêmement compliqué pour nous de pouvoir dire « on est un club de Ligue 1. C’est David contre Goliath. Nous, on a un stade des années 2000 qui est super (Bonal), mais qui, en 2025, est un très beau stade de Ligue 2. En Ligue 1, ils ont tous un stade capable de générer plus de chiffres. Donc, il y a ce premier point quant au potentiel économique des villes ou des régions. Le Nord Franche-Comté avec Montbéliard et Belfort, c’est 300 000 habitants. On peut essayer d’aller chercher le Haut-Doubs, Besançon, un peu la Suisse, un peu le Sud-Alsace, le Jura ou la Haute-Saône mais malgré tout, on n’a pas le potentiel économique de Strasbourg, de Montpellier, de Nice ou même du Havre. Il faut s’en rendre compte. Par contre, on a la chance d’avoir des actionnaires locaux qui permettent de réaffirmer un projet local. Un club détenu par les Francs-Comtois, pour les Francs-Comtois. Ça représente des avantages en retrouvant notre identité locale, en redevenant un club populaire et familial. Un club qui promeut des valeurs d’humilité et de travail et c’est super. J’ai la certitude que notre développement et ceux de clubs de notre taille passera par cette capacité à être ancré sur son territoire et à fédérer les habitants autour. Évidemment, notre projet sportif se base sur la formation. On a le plus vieux centre de formation de France, on a besoin de s’appuyer sur lui pour atteindre nos objectifs sportifs mais aussi économiques et sociaux. De ce fait, on a signé huit jeunes professionnels. Pour prendre un exemple, il y a le voisin, le FC Metz. C’est un club qui fait souvent l’ascenseur, qui est capable de descendre sereinement lorsqu’il est relégué. Enfin, c’est l’impression qu’il donne de l’extérieur. Il y a une stabilité et une pérennité sans va-tout sportif. »

Le projet économique : « Attirer du public par autre chose que du résultat sportif et de la performance »

Le Sochalion, mascotte du club. Photo Philippe Le Brech

« Le projet économique est capital. Aujourd’hui, on ne peut plus se permettre d’avoir un déficit structurel comme celui que l’on a connu sous pavillon chinois avec plusieurs dizaines de millions d’euros en Ligue 2, plus que les 22 millions annoncés. Un déficit compensé par l’actionnaire tant qu’il était capable de le faire. On ne peut plus se le permettre sur la durée. Intellectuellement, ça ne colle pas avec l’environnement du club. Comment on explique aux supporters à qui on vend des billets, qu’on a besoin de ces recettes ? Comment on va démarcher des sponsors pour qu’ils nous soutiennent en disant « on a besoin de cet argent-là » alors qu’à côté il y a un trou de 22 millions ? Notre objectif est donc de revenir à une réalité économique avec des collectivités locales et des actionnaires locaux qui ne seront pas capables de venir à notre secours tous les ans et même s’ils le refaisaient, à un moment, ils en seront lassés, peu importe ce que représente le club. Ils ont une entreprise qu’ils ne pourront pas mettre en danger, des familles, des enfants. Nos actionnaires sont nombreux, solides et impliqués. Ils sont capables de venir en soutien si on est en difficulté, mais notre devoir avec Julien (Cordonnier, directeur sportif) est d’éviter cela et de ne pas aller toquer à la porte chaque année. On a donc eu deux solutions : dans un premier temps il a fallu réduire les charges en baissant notamment les masses salariales sportives et administratives, en baissant le train de vie du club. Cela ne s’est pas fait sans mal mais c’était obligatoire. Ensuite, il y a le développement des recettes : c’est extrêmement important et ça passe par un changement de discours. On doit faire en sorte d’attirer plus de monde au stade. On doit arrêter de s’adresser à des fans de foot, de ne vendre que des résultats. Le sportif c’est notre raison d’être, mais si la performance nous anime au quotidien, on veut attirer ceux qui ne sont pas fans de foot, ceux pour qui le FC Sochaux représente quelque chose sur l’aspect familial. Je le répète, il faut fédérer autour du club. C’est ce qui permettra de développer nos recettes et d’éviter d’être confrontés aux mêmes problèmes. Le stade Bonal doit être le plus gros équipement de loisirs de Franche-Comté, voire de Bourgogne Franche-Comté avec l’Abbé-Deschamps à Auxerre. On a donc un outil extraordinaire pour faire en sorte que les habitants viennent passer un bon moment de détente. On doit garantir des résultats pour nos fans, mais aussi autre chose pour les non-fans, je pense à tous les franc-comtois. C’est quelque-chose qui a été un peu oublié précédemment. Pendant dix ans, le club n’a investi que dans la performance sportive pour finalement ne jamais atteindre les objectifs visés. On doit attirer du public par autre chose que du résultat sportif et de la performance. »

Le projet social : une présence sur tous les terrains

Photo Philippe Le Brech

C’est le troisième aspect du projet sochalien : le social. Le FCSM est un acteur de sa région, une entreprise locale. « On reçoit beaucoup. On doit rendre au territoire ce que le Nord Franche-Comté nous donne. On travaille beaucoup sur l’insertion, notamment au sein de notre centre de formation. On planche aussi sur la féminisation du sport avec le développement de notre section féminine, c’est important de le faire même si notre objectif n’est pas de monter à court terme en D1 ou D2. Aujourd’hui le football féminin est hautement déficitaire et on n’a pas les moyens pour ces accessions-là. Les équipes féminines sont financées par les masculines, et clairement, nous, on ne peut pas le faire. Par contre, on veut faire en sorte que les jeunes filles du secteur puissent pratiquer sous les couleurs du FC Sochaux-Montbéliard et qu’elles puissent continuer en seniors à un bon niveau régional. Enfin, le dernier point est l’aide aux personnes en difficulté. On soutient plusieurs associations locales comme la Ligue contre le cancer, on met à disposition nos infrastructures pour leurs événements, on participe aux collectes de dons. On a développé avec eux la section « sport santé » pour que les personnes malades ou en rémission puissent venir faire du sport avec nos éducateurs au centre de formation. Ça nous tient à coeur. Pour le reste, c’est une présence sur le territoire avec notamment des entraînements délocalisés, des séances dédicaces. Il faut être un acteur local. »

« Voilà les trois volets de notre projet, de ce qu’on est. Le FC Sochaux c’est tout ça. On ne met pas tous nos oeufs dans le même panier parce qu’on a une histoire, une identité et que c’est important que tout s’aligne pour qu’on atteigne nos objectifs sportifs. On veut tous que Sochaux remonte, mais tout ce qu’on fait, c’est pour faire en sorte que le sportif avance et aille mieux. Le sportif est le coeur du réacteur, mais le reste permet d’alimenter le réacteur. Tout miser sur le sportif c’est aussi mettre toute la pression sur 25 joueurs et le staff. Nous, on veut impliquer tout le monde, tout ceux qui travaillent au club. Et si le sportif va mal, alors je demanderai encore plus d’efforts aux autres pour continuer à alimenter le réacteur et protéger les joueurs. »

« L’année dernière, on n’a pas tout bien fait… »

Si cette année le début de saison est quasi-excellent pour les Lionceaux, l’an dernier fut une désillusion pour toute la maison jaune et bleue. Sur le papier, le FCSM avait l’un des meilleurs effectifs du championnat et devait jouer les premiers rôles. Finalement, la qualité sur le terrain a laissé à désirer, les supporters se sont irrités, les critiques et la défiance sont arrivées et un vent de crise a soufflé dans le Doubs.
Pour autant, la direction a tiré des leçons de ses revers. « On ne peut pas nier que la saison passée a été compliquée. Il y a eu une multitude d’éléments qui ont conduit à cette situation. En début de saison, il y a eu un défaut de communication de notre part sur les objectifs à atteindre et sur le caractère impératif de ces objectifs. On avait dit aux supporters « On a deux ans pour remonter en Ligue 2 ». Quand ils ont vu qu’on n’allait pas « rouler » sur le championnat, il y a eu une grosse tension. On a créé beaucoup d’attentes et on a subi des pressions et des critiques. »

« On aurait dû plus protéger Karim Mokeddem »

Clément Calvez. Photo FCSM

« Aujourd’hui, on a construit une équipe pour jouer les premiers rôles, on veut être en haut mais on fera le bilan en fin de saison. L’an dernier, on n’a pas su créer un collectif fort, on avait de supers individualités et on n’a pas su trouver cet entrain dans le vestiaire entre les joueurs de la première année et ceux qui les ont rejoints ensuite. Il y a aussi le cas du coach, Karim Mokeddem, où, en étant 6e du championnat, on avait rehaussé les objectifs, et puis viens cette série de onze matchs nuls, on avançait petitement et le soir du match au Mans, où on n’arrivait toujours pas à marquer, on fait le choix avec Julien et les actionnaires de se séparer de Karim Mokeddem en espérant créer un déclic offensif, mais ça n’a pas été un choix heureux. Karim a été très vite remis en question, trop vite. On aurait dû plus le protéger. On ne pouvait pas s’attendre à avoir le jeu chatoyant des années 2000, mais j’ai un regret car il n’a pas été dans de bonnes conditions pour travailler sereinement. Karim n’a pas tout bien fait et est, en partie, responsable du manque de cohésion, mais, nous non plus, nous n’avons pas tout bien fait. On a tous une part de responsabilité dans l’échec de la saison dernière. Lorsqu’on se sépare de Karim, on n’a pas 50 options, on fait le choix de Frédéric Bompard car il voulait vraiment venir, il avait une vraie expérience, mais pour lui aussi les choses se sont mal emmanchées. Il est venu pour une mission, qui, après deux matchs, a été grandement compromise. »

« La Ligue 3 permettra d’homogénéiser le championnat »

Le gardien du FCSM, Alexandre Pierre. Photo Philippe Le Brech

La troisième division est-elle un environnement viable pour l’entité sochalienne ? Un championnat à deux vitesses entre les grosses cylindrées qui jouent la montée et les autres. Le championnat est compliqué avec aucun droits TV et des déplacements types Ligue 1, Ligue 2 aux quatre coins de la France. C’est, un peu, un gouffre financier pour des clubs aux capacités limitées. « Le National, c’est un championnat hybride. Nos recettes se limitent à ce que nous, on est capables de générer seul (sponsoring, billetterie, hospitalité et vente de joueurs grâce au centre de formation). On cherche à optimiser notre organisation tout en l’allégeant pour supporter les obstacles. Assumer notre projet a un coup et nos capacités de recettes ne suffisent pas. Les droits TV sont un enjeu et nous n’en avons pas, et la valeur des joueurs est beaucoup plus faible qu’en Ligue 2. Annuellement, on prévoit des ventes à hauteur de 500 000 euros voire 1 million d’euros là où en Ligue 2, on pourrait tabler sur 3 millions en plus des droits TV. »

Mais à partir de la saison 2026-2027, le championnat se professionnalise et devient la Ligue 3. Un point extrêmement positif aux yeux du président. « Cela permettra d’homogénéiser le championnat. La moitié des clubs sont professionnels, l’autre est amateure. On ne part pas sur un pied d’égalité et les disparités administratives sont marquées entre les formations. On peut, niveau infrastructures, passer d’un Bonal ou d’un Hainaut (Valenciennes) au synthétique du stade Pelé (Paris 13 Atlético) : il y a de grosses disparités. C’est parfois déroutant. Pour revenir aux droits TV, il y a quand même des difficultés pour la Ligue 1 et la Ligue 2… On risque d’avoir des difficultés avec la Ligue 3 aussi. Le National est passionnant, tout le monde peut battre tout le monde avec de belles équipes qui la compose, attractives et suivies, mais… »

« On veut redonner de l’envie à nos supporters »

Photo Philippe Le Brech

Et si Sochaux ne monte pas, le club pourrait-il supporter une quatrième saison en National ? « On devra et on le fera. Ce qui est important, c’est de mettre en places les conditions pour monter. On doit faire en sorte d’aligner toutes les planètes pour atteindre nos objectifs. On fera en sorte avec les actionnaires de trouver les solutions nécessaires, peut-être que cela passera par de nouvelles adaptations de la masse salariale, de notre mode de fonctionnement. En tout cas, il est hors de question, déjà pour cette année, de reproduire les mêmes erreurs. La cohésion est un sujet sur lequel on s’est rapidement dit qu’il ne faudrait pas se rater pour cette saison. On veut faire une belle saison après le raté de l’an dernier. On veut redonner de l’envie à nos supporters, les faire vibrer. Sur notre recrutement on s’est attaché à faire venir des joueurs qui étaient motivés à porter ces couleurs, qui ont l’expérience du National et qui ont connu des stades exigeants avec ce type d’ambiance. On avait les mêmes critères pour le choix du coach Vincent Hognon, un choix unanime entre le directoire et les actionnaires. On travaillait depuis un moment sur la constitution de l’équipe de cette saison lorsque les dés étaient jetés pour l’an dernier. »

Des choix payants après quatre journées de championnat et une place de co-leader avec Versailles (qui compte un match de retard), mais la saison sera longue et les Sochaliens devront tenir la cadence et seule, elle, permettra de dire dans huit mois si la stratégie portée par Clément Calvez était la bonne.

Freddy Vandekherkhove, l’emblématique intendant. Photo Philippe Le Brech
  • Texte : Augustin THIEFAINE
  • Photos : Philippe LE BRECH (sauf mentions spéciales)
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Suite à la publication de l’article « FC Martigues, anatomie d’une chute » (le 29 août 2025), l’ex-président du FC Martigues, Pierre Wantiez, a réagi. Il est notamment revenu sur le chiffre de 3 millions d’euros avancé pour expliquer le déficit du club.

« La dissolution de la SAS FC Martigues a été (enfin) déclenchée ce lundi (1er septembre 2025) par Madame Galeb-Roskopp. Elle était la seule à pouvoir le faire. Ceci va entraîner la fermeture de la SAS, et permettre à l’association FC Martigues de poursuivre seule son activité.

Pour comprendre la situation actuelle, il faut savoir que la SAS était parvenue au quasi-équilibre au terme de la saison 2024/2025. Les quelques dettes restantes à ce jour sont la conséquence de droits TV encore inférieurs à ceux indiqués, notamment du fait du différé du contrat entre la LFP (LFP Media précisément) et Qatar Tourism Authority. Le non-paiement des sommes prévues pénalise tous les clubs qui évoluaient la saison dernière en Ligue 1 ou Ligue 2. Le FCM n’y échappe pas. La poursuite de l’activité de la SAS cet été, sans perspective ni recette, aura par ailleurs créé des dettes spécifiques, portant sur la saison 2025/2026.

Le chiffre de 3M€ repris par certains correspond au financement qui aurait été nécessaire pour évoluer en 2025/2026 en National ou Ligue 2. Ce n’est pas une dette, mais un apport pour le futur, et cette confusion porte préjudice à l’Association. La disparition de la SAS et de l’équipe 1ere du Club supprime ce besoin. Il est techniquement inexact, ou malhonnête, d’invoquer une prétendue dette de la SAS ou de l’Association qui l’empêcherait de continuer à défendre les couleurs du FCM. »

Lire aussi : https://13heuresfoot.fr/actualites/fc-martigues-autopsie-dun-fiasco-monumental/

Photo : FC Martigues

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Un an après avoir retrouvé la Ligue 2 et le monde professionnel, le club de la Venise provençale, épinglé par la DNCG, doit repartir en Départemental 1, sept étages en dessous ! Une chute vertigineuse, résultat d’une saison dantesque, marquée par des mauvais choix, des luttes d’ego et de pouvoir, des erreurs de casting, l’appât du gain, une gestion désastreuse et un certain amateurisme. Récit d’une saga et d’un fiasco monumental.

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos : @facebook / FC Martigues (sauf mentions spéciales)

Le stade Francis-Turcan, à Martigues.

Sur le réseau social X, il s’appelle « Le Marchito ». Dans la vie de tous les jours, c’est Jean-Marc, 32 ans, Martégal, et son truc à lui, c’est autant les fruits et légumes, dont il a fait son métier (il est distributeur) que le ballon rond, surtout dans sa ville (il est supporter depuis toujours du FC Martigues).

Sur son profil, une grande photo de la tribune Paradis – la bien mal nommée pour le coup ! – du stade Turcan, bien garnie, et un selfie aux côtés de l’une des (anciennes) icônes du club, Foued Kadir, artisan de la double-accession de National 2 en Ligue 2 entre 2021 et 2024.

Aujourd’hui, Foued Kadir évolue chez le tout proche voisin istréen (N2), et, à bientôt 41 ans, il est encore fringant, comme l’attestent les deux passes décisives délivrées samedi dernier à Parsemain contre Rousset (succès 4-1). Fringant et en bien meilleure forme que le FCM, son club de coeur, où il a été formé et qu’il avait quitté à l’âge de 17 ans, pour rejoindre Gignac (le club, pas le joueur !).

Parce que le Football-club de Martigues est malade. Très malade. Et presque mort. En l’espace de quelques semaines, il est passé, accrochez-vous bien, de la Ligue 2 au niveau Départemental 1. Soit une chute de 7 divisions ! Et ce n’est même pas sûr à l’heure où nous écrivons ces lignes. Cela pourrait même être en Départemental 2 ou en Départemental 3… Le résultat d’une gestion calamiteuse : on parle d’un trou d’environ 3 millions d’euros laissé par la SAS FC Martigues (Société par actions simplifiées), qui n’a, à l’heure où nous écrivions ces lignes, toujours pas été dissoute.

Il y a huit mois encore, la Ville de Martigues avait une équipe professionnelle en Ligue 2 mais pas de stade (le club, faute de stade aux normes de la L2, a délocalisé ses matchs, d’abord au Vélodrome à Marseille, puis au stade Jean-Laville à Gueugnon). Aujourd’hui, elle a un joli stade homologué pour accueillir les matchs de Ligue 2 (elle n’y a au final disputé que 7 matchs sur 17 possibles) après des travaux d’un coût de 3,6 millions d’euros (au lieu des 1,3 million d’euros annoncés au départ), supporté par la Ville, mais elle n’a plus d’équipe, ou à tout le moins une équipe, au mieux, de 9e division…

Une première dans les annales

18 mai 2024, au stade Turcan, soir de montée en Ligue 2… Photo 13HF

Qu’il semble loin le temps où les joueurs de « Greg » Poirier battaient Nîmes 1 à 0 et s’offraient le droit de jouer en Ligue 2 ! Qu’il semble loin ce 18 mai 2024 quand Turcan et ses 7000 supporters célébraient le coup de tête rageur de Milan Robin et envahissaient la pelouse pour célébrer les héros martégaux ! Qu’il semble loin le temps où tout le monde était hilare et s’embrassait, où tout le monde était heureux, libéré, radieux, excité à l’idée de changer de dimension et de renouer avec le passé professionnel (la dernière apparition du FCM en Ligue 2 remontait à 2002) ! Quel contraste…

De mémoire de « suiveur » de l’actualité du football hexagonal, c’est du jamais vu dans les annales. Jamais un club n’avait vécu une telle dégringolade. En 2023, le CS Sedan Ardennes était bien tombé de National en Régional 3, mais la chute déjà vertigineuse n’avait été « que » de 5 divisions (les « Sangliers » viennent de remonter en Régional 1 en deux saisons).

Dans un passé récent, d’autres clubs ont également connu de telles mésaventures, on pense au RC Strasbourg (de National en CFA2 en 2011), au Mans FC (de Ligue 2 à Division d’Honneur, l’ex-R1, en 2015) ou encore au Sporting-club de Bastia (de Ligue 1 à National 3 en 2017). Mais tous se sont relevés. Il y a eu Istres aussi, tombé de National en DHR, qui a mis 9 ans avant de monter en N2.

Le FC Martigues, lui, n’est pas prêt de se redresser, ou alors, il mettra beaucoup de temps (10 ans ?) avant de retrouver, au moins le N2 ou le National. Il aurait pu « limiter » la casse en repartant en Régional 1, au niveau de sa réserve, après que la DNCG l’a exclu des championnats nationaux (dans un premier temps, l’organe de contrôle et de gestion lui avait juste retiré le statut pro). Mais dans un second temps, la semaine dernière, la commission régionale de contrôle des clubs de la Ligue Méditerranée n’a pas autorisé le club de la Venise provençale à évoluer en Régional 1, et l’a même rétrogradé de trois nouvelles divisions pour l’inscrire en … Départemental 1, l’équivalent de la Promotion d’Honneur A jadis ! Une décision confirmée en appel hier.

Une saga digne de Dallas !

Tout au long de l’été, ce fut un véritable feuilleton. Une saga. Digne de la série Dallas pour ceux qui ont la ref’. Ou du film « Règlement de comptes à OK Corral », tant les acteurs n’ont pas manqué de « s’allumer » une fois le sort du club scellé, par presse interposée.

C’est simple, tout ce qui s’est passé au FC Martigues lors des quinze derniers mois relève du surnaturel et s’apparente à une pièce de théâtre où chaque acteur a joué sa partition, de manière plus ou moins juste.

Pour décrypter ce gâchis monumental et expliquer comment le FC Martigues en est arrivé là, nous avons opté pour la neutralité en interrogeant Le Marchito, un garçon qui partage ses infos – largement reprises – sur son compte X, à mi-chemin entre supporter et investigateur. Un garçon qui ne cherche absolument pas la lumière. Un garçon dégoûté par la situation. Un garçon qui aime son club, tout simplement.

Les propos qui suivent ne sont donc que de la responsabilité de son auteur !

Jean-Marc, alias « Le Marchito » :

« Un immense gâchis »

Jean-Marc, alias « Le Marchito », arbore une veste « vintage » du FC Martigues ! Photo 13HF

Ton sentiment général sur la situation ?
Un immense gâchis. Parce que tout le travail réalisé auparavant par Grégory Poirier (l’ex-entraîneur parti au Red Star en Ligue 2 en juin 2024) et Alain Nersessian (l’ex-président, démis de ses fonctions en avril 2024) pour remettre le club à flots après l’épisode Baptiste Giabiconi, qui fut un scandale aussi, a été réduit à néant.

Avec Poirier et Nersessian, l’équipe avait retrouvé une stabilité sportive avec une équipe compétitive sur le terrain, ce qui n’était pas évident car juste avant les belles saisons, il y a eu les deux années de Covid-19. Ils avaient aussi réussi à accéder au monde professionnel et à faire revenir le monde au stade Turcan, et ça ce n’était pas une mince affaire parce qu’on sait aussi que cela a toujours été difficile d’avoir du public ici. Je me souviens de matchs de N2 devant 300 ou 400 spectateurs à peine. Et tout ça s’est envolé.

Comment en est-on arrivé là ?
Tout simplement parce que les rênes du club ont été confiées à une personne qui est totalement amatrice, la propriétaire Lepa Galeb-Roskopp. On s’en est rendu compte tout au long de la saison. Déjà, elle ne maîtrisait pas les règles du travail en France : en décembre dernier, elles voulaient virer des employés du club qui étaient en arrêt maladie ! Alors aux États-Unis, c’est possible, mais pas chez nous. Elle avait été choqué par ça. Elle ne comprenait pas non plus les règles de la DNCG (Direction nationale de contrôle et gestion des clubs) : pour elle, ce n’était pas concevable de bloquer de l’argent sur un compte.

Petit à petit, on a vu que tous ses choix, en fait, étaient des choix d’amateur. On s’est posé la question de savoir si c’était vraiment elle qui dirigeait. La propriétaire mettait l’argent, mais elle n’est pas venue souvent. Elle habitait sur la Côte Bleue, vers Carry-le-Rouet ou Sausset, mais tout le début de saison, elle l’a passé au Montenegro…

Si ce n’était pas la propriétaire qui prenait les décisions, c’était qui alors ?
Pour moi, c’était Jean-Pierre Bernès, le conseiller de Lepa.

Jean-Pierre Bernès avec Lepa Galeb-Roskopp. Photo @Instagram

Comment Jean-Pierre Bernès est-il arrivé au club ?
Ce qu’il faut savoir c’est que, à la base, en début de saison, Lepa était juste actionnaire. Elle n’était pas encore présidente. C’est Colombus Morfaw qui est président quand le club monte en L2, mais il s’est fait virer rapidement (fin juin 2024, seulement deux mois après qu’il a remplacé Alain Nersessian). Le couple Roskopp possède une académie de football en Californie, les « Breakers », où Niša Saveljića, l’ancien joueur des Girondins (champion de France en 1999, passé aussi par Sochaux, Bastia, Guingamp et Istres), a un gros poste là-bas, Directeur du football ou quelque chose comme ça (il est actionnaire d’EU Futbol LLC, propriétaire des « Breakers » et donc du FC Martigues).

Niša, quand il jouait aux Girondins de Bordeaux, son agent, c’était Jean-Pierre Bernès. C’est comme ça que Bernès est venu à Martigues, dans un rôle de conseiller. Et comme Lepa n’a aucune connaissance du football français, comme elle ne connaît pas Jean-Pierre Bernès, elle s’est fiée au CV. D’ailleurs, c’est pareil pour le coach Thierry Laurey, il a été engagé sur CV, et Pierre Wantiez aussi. Donc quand elle a vu Bernès, elle a dû voir « Olympique de Marseille » sur le CV, mais elle n’a pas dû voir la manière dont l’histoire avec l’OM s’est terminée. Elle a fait une confiance aveugle à Niša Saveljić et n’a sans doute même pas pris la peine d’aller se renseigner sur Internet.

Quand les Américains ont racheté le club (en juin 2023), leur idée, c’était de faire du trading de joueurs. Le meilleur exemple que l’on a eu cette saison, c’est Luan Gautier, le jeune défenseur : ils se sont entêtés à le faire jouer en début de saison parce qu’ils voulaient faire une plus-value avec lui. Mais ils ont totalement cramé le minot, qu’ils ont propulsé titulaire en Ligue 2 à 19 ans, alors qu’il n’avait aucune expérience. C’est pour ça que, lorsque Hakim Malek est arrivé à la place de Laurey (en janvier 2025), on n’a plus entendu parler de lui, il est retourné en équipe réserve.

Qui dit « trading » dit forcément « argent » : encore une fois, tout ne serait donc qu’une histoire d’argent ?
En fait, Niša Saveljić et sans doute Jean-Pierre Bernès ont dit à Lepa « Tu vas te faire des sous avec le FC Martigues parce que c’est un club tremplin », « parce qu’il y a un projet à mettre en place », « parce que des joueurs vont venir », ce qui était possible, parce qu’on en a vu des joueurs déjà qui étaient partis comme Hemia, Fdaouch, et qui ont explosé. L’idée, c’était ça. Il y avait aussi l’idée de faire une plus-value sur la vente du club. Parce que le FC Martigues, réellement, Lepa l’a acheté 800 000 euros en National. Et on lui a fait miroiter des sommes à la vente autour de 10 millions d’euros… Elle n’a pensé qu’à ça, qu’à faire un « fois 10 », c’est pour ça qu’elle a refusé toutes les offres de rachat à 3 ou 4 millions à mi-saison. Parce que Niša Saveljić lui a mis dans la tête que le club valait beaucoup plus.

Lepa Galeb-Roskopp, ici aux côtés du conseiller Niša Saveljić. Photo Hugo Bisson.

Quid de Robb Roskopp, le mari de Lepa ?
Au départ, c’est le couple Roskopp qui achète le club (en juin 2023), et après elle reste pour d’autres raisons que tout le monde connaît à Martigues, parce que les gens parlent… Pendant ce temps, son mari, lui, retourne aux États-Unis. Elle a été aveuglée. Dans la saison, Robb a compris certaines choses, c’est pour ça qu’il n’a pas mis sa part et qu’il a manqué 3 millions ou un truc comme ça lors du passage devant la DNCG en décembre. Il n’a pas voulu remettre de l’argent. Il est revenu des États-Unis à Martigues en fin de saison pour remettre de l’ordre. Mais c’était trop tard.

Les gens en surface ne voient que les résultats sportifs qui ont été très médiocres en première partie de saison mais maintenant ils découvrent qu’il y a eu des problèmes d’argent, mais tout ce qui s’est passé derrière en coulisses, c’est une blague ! Elle s’est fait plumer à l’américaine, et puis il y a eu des histoires qui dépassent le cadre du foot… A l’arrivée, tout le monde a pris son pognon et elle, elle a perdu 8 millions dans l’affaire, à force de renflouer. C’est pour ça qu’elle n’a pas remis d’argent à l’inter-saison. Elle a compris qu’elle s’était fait prendre pour une c… Elle est retournée aux États-Unis.

Alain Nersessian, président démis de ses fonctions par les propriétaires (qu’il avait choisis) en avril 2024.

Au tout départ de l’histoire, c’est qui le fautif, c’est Alain Nersessian, qui a trouvé Colombus Morfaw, et qui avait déjà fait venir Giabiconi ?
Non. Il a fait appel à une société française d’apporteurs d’affaires qui met en relation des personnes désireuses d’acheter des clubs avec des clubs qui sont à vendre. Il a juste été séduit par leur projet. C’est trop facile de taper sur Alain Nersessian après. Si les repreneurs avaient respecté leur parole, si tout avait été carré, on aurait pu faire quelque chose.

Mais c’est aussi Nersessian qui avait fait venir le mannequin Giabiconi en 2016, avec le résultat que l’on sait (un trou de 600 000 euros à son départ en 2018) …

Giabiconi, c’est Alain Nersessian qui le fait venir parce que, à la base, le projet est sympa. Il a des garanties. Giabiconi est connu, derrière c’est Karl Lagarfeld, tu te dis « C’est solide », mais tu ne peux pas savoir au moment où tu signes avec lui ce qui va se passer après… Et pareil avec le couple Roskopp. Donc oui, c’est Alain Nersessian qui les a choisis, mais c’est trop facile de juger après, de lui jeter la pierre.

Des rumeurs lui prêtaient l’intention de vouloir revenir au club…
Non, il ne reviendra pas. Il s’est écarté de tout ça. Là, on l’a revu sur les réseaux sociaux, il a fait des vidéos, mais c’était parce qu’il se faisait attaquer, notamment par Romain Molina, et parce que Lepa disait qu’elle avait trouvé des cadavres dans les placards, qu’il y avait du passif, donc il l’a pris pour lui et s’est défendu. Je pense très sincèrement que lorsque tu achètes un club, tu fais ton audit avant et tu sais où tu mets les pieds : en milieu de saison, ils ont découvert qu’il y avait des dettes, ça aussi c’est de l’amateurisme. Ils auraient donc acheté le club à l’aveugle ? C’est quand même Lepa qui a commandé l’audit, ils avaient même fait venir quelqu’un de l’AC Ajaccio, Alain Caldarella, exprès pour vérifier les comptes.

Arnaud Berberian, le directeur général du club. Photo David Robbe

Quand tu as parlé des arrêts maladies que Lepa voulait virer, il devait être question d’Arnaud Berberian, le directeur du club ?
Absolument. Arnaud, c’est quelqu’un de bien. Juriste, ex-coordinateur sportif à l’OM, mais il a fait un burn out. C’est Pierre Wantiez (président à partir de juillet 2024) qui lui aurait fait la misère.

Pierre Wantiez, justement : on a vu les passes d’armes interposées avec Bernès cet été …
C’est Jean-Pierre Bernès qui a recruté Pierre Wantiez (sourire)… Wantiez a signé une saison pour mettre le club sur les rails du professionnalisme. Le problème, c’est qu’en début de saison, début septembre, il était au Canada. Difficile déjà de démarrer un projet si tu n’es pas là. Il était venu pour sa présentation puis ensuite il est parti. Il déléguait à Arnaud (Berberian) et il l’a fait crouler sous le travail. Après, il est revenu mi-septembre.

Le règlement de comptes Bernès-Wantiez, tu en penses quoi ?
Bernès a dit dans les médias que sa pire erreur était d’avoir fait venir Wantiez. Donc il le critique, mais c’est lui qui l’a fait venir… Pfff… Franchement, c’est une saga.

Pierre Wantiez

Et Pierre Wantiez, tu en penses quoi ?
Je ne le connais pas. Je ne doute pas qu’il soit sympa et compétent. J’ai apprécié sa dernière sortie médiatique, quand il a dit ce qu’il pensait. Il a un CV, c’est pour ça qu’on l’a fait venir à Martigues. Il a dû voir très tôt qu’il était tombé dans un bourbier. En décembre, cela s’est senti avec l’histoire de la DNCG (le club a été interdit de recrutement jusqu’en fin de saison, décision confirmée en appel). Il ne faut pas oublier que c’est lui qui a fait venir Thierry Laurey, il s’est peut-être senti coupable. Mais en début de saison, ça n’allait pas. Il y avait des tensions. Et puis il n’a pas toujours été présent comme je l’ai dit.

Mais en fin de saison, après le passage devant la DNCG, il a quand même dit qu’il laissait le club en bonne santé financière parce que les dettes avaient été réglées. Or aujourd’hui, la SAS n’a toujours pas été dissoute, et comme l’association est toujours liée à elle, de par son numéro d’affiliation, cela pose un énorme problème pour la DNCG fédérale qui a constaté une dette de 3 millions d’euros. D’où l’interdiction de jouer en Régional 1. Aujourd’hui, le FCM n’est même pas certain de pouvoir jouer en Départemental 1.

Colombus Morfaw, l’éphémère président d’avril à juin 2024. Photo @LinkdIn. / C. Izzo

Bernès dit que Wantiez ne voulait pas de Hakim Malek comme coach pour remplacer Laurey…
Parce que c’est tout sur CV ! Laurey, il a un CV. Hakim Malek, il avait quoi comme CV en France ? Il entraînait en National 3 à Alès et avant ça en National 2. Sur le papier, ce n’était pas sexy. Mais nous, à Martigues, on s’en fout que cela ne soit pas sexy. On n’a pas besoin de ça. À Martigues, il faut de la stabilité, des gens qui connaissent la région, le club, et Malek connaît la région, Alain Nersessian connaissait la région, le club, et je pense que Colombus Morfaw aurait pu apporter cette petite dimension internationale, avec cette vision américaine. On n’avait pas besoin de plus.

On a quand même l’impression d’un sacré bordel …
La réalité, c’est que tout le monde s’est servi au FC Martigues. Bernès ne voulait pas apparaître dans l’organigramme et se faisait payer sur facture. On parle de 150 000 euros par an, c’est énorme pour un petit club comme Martigues. Et quasiment pareil pour Thierry Lauray, le coach (15 000 euros par mois). Et Bernès disait qu’il était là bénévolement.

Et Thierry Laurey ?
Catastrophique. (Il répète) Catastrophique. Il a gagné la coupe de la Ligue avec Strasbourg, il a entraîné des gros clubs… C’est fou ! Je vais te dire ce que m’a confié un joueur martégal : il m’a dit que les joueurs de l’équipe espéraient ne pas être convoqués dans le groupe et aller en réserve plutôt que de monter à Gueugnon avec lui… Tu te rends compte ? C’est pour dire à quel point ils ne voulaient plus se battre pour lui. T’es joueur pro en Ligue 2 et tu préfères aller jouer le dimanche en réserve en Régional 1, c’est chaud quand même ! Il était imbuvable. Même avec les salariés du club. Je ne sais pas pourquoi. Je pense, mais c’est mon avis, qu’il a des méthodes de management qui sont dépassées, et ça ne passait pas du tout humainement avec les joueurs. Jérémy Aymes, le gardien, est parti (à Cannes) à cause de ça. Les joueurs ont même fait une grève de l’entraînement et dans la foulée, Aymes, Tlili aussi je crois, et d’autres cadres aussi, ont été sanctionnés.

Thierry Laurey, le coach, ne sera resté que six mois.

C’est quand même très compliqué le foot à Martigues…
Le FC Martigues, c’est particulier. Depuis toujours c’est compliqué ici. Tu as vu son historique ? C’est un club qui vit dans l’ombre de l’OM, où c’est dur d’avoir des supporters parce que l’OM est un aspirateur. Francis-Turcan, c’est un stade difficile à remplir. Quand tu dis dans la rue « Je suis supporter de Martigues », bah presque on va te rire au nez, alors qu’en vrai, il faut supporter son club local, celui de sa ville. T’es de Martigues et tu ne vas pas au stade ? Même quand les places étaient gratuites ? Tout ça, il faut le savoir. Alors faire venir des gens de l’extérieur, qui ne connaissent pas le contexte, ça ne marche pas.

Quand Laurey met sur le banc des joueurs comme Samir Belloumou ou Oualid Orinel, qui étaient la base du projet de jeu de Grégory Poirier, qui ont fait la double montée, qui en plus sont des gars d’ici, même si c’est le choix du coach, c’est une erreur : l’esprit d’équipe, les valeurs du club, tu perds tout ça, et les gens ne se reconnaissent pas dans l’équipe. Laurey n’a fait jouer que ses recrues. On avait l’impression que c’était des recrues d’agent, qui jouaient parce qu’il fallait les placer. Quand Hakim Malek est arrivé en janvier, il a remis plus ou moins l’équipe type de la saison passée, avec deux ou trois recrues, et ça a marché. C’est comme si, en début de saison dernière, on avait tout de suite voulu faire un grand club, avec des noms, des « stars », des gens qui étaient reconnus. Mais on a tout foiré parce que ce n’est pas comme ça que ça marche.

Le stade de Gueugnon, théâtre de plusieurs matchs du FC Martigues, à 500 kilomètres de Turcan !

On n’a pas parlé du Vélodrome : une ineptie d’avoir joué là-bas…
L’erreur, c’est ça, c’est aussi d’avoir joué à Marseille : comment a-t-on pu imaginer que c’était une bonne idée ? Là encore, il y aurait des choses à dire. Le coût déjà, près de 175 000 euros de location par match ! Même si c’est négocié, avec jauge basse, genre 10 000 spectateurs, à quel moment Lepa a pu croire qu’elle avait faire 10 000 personnes au stade et que cela allait couvrir les frais ? À quel moment elle a cru que cela allait faire parler du club, qu’il y aurait des retombées ?

La solution du stade de Gueugnon avait été trouvée avant que n’apparaisse l’idée de jouer au Vélodrome, et à un coût bien moindre. Il y avait aussi Nîmes, qui a refusé, puis l’idée de Béziers. Mais tu comprends, Gueugnon, ce n’est pas sexy… Alors que le Vélodrome, si. Ce n’est que du « show off » (frime) en fait ! Lepa a cru qu’elle allait vendre des maillots, faire des recettes, qu’on entendrait parler du FC Martigues partout dans les médias, c’est pour dire à quel point elle n’avait aucune connaissance du tissu local.

À l’arrivée, il y a eu combien de spectateurs au Vélodrome ?
Je crois que c’est lors du premier match contre Lorient qu’il y a eu le plus de monde. Il devait y avoir 3 ou 4 000 (2655 spectateurs en réalité). On aurait dit la période Covid. Elle s’est bouffée les c…. De toute façon, elle l’a dit, « à chaque fois que l’on jouait au Vélodrome, je pouvais m’acheter une Ferrari ! ». Ils ont fait 4 ou 5 matchs, et bouffé un demi-million sur un budget de 6 millions… C’est énorme. Et tout ça pour finalement aller jouer à Gueugnon après !

Retrouver le stade Turcan en janvier a changé beaucoup de choses…
Oui, pour les joueurs, revenir à Turcan, ça a été quelque chose de très bénéfique. La saison a vraiment démarré à ce moment-là. Mais c’était beaucoup trop tard. Je pense que quelques matchs de début de saison qu’on a perdus, si tu les joues à Turcan, tu prends des points, et on se maintient. A un moment donné, on a même quitté les deux dernières places synonymes de descente directe et on s’est retrouvé barragiste. On avait un vrai potentiel.

On n’a pas encore parlé de Hakim Malek, dont l’arrivée sur le banc en janvier a tout changé…
Je pense qu’il a été écoeuré de voir la manière dont la saison s’est terminée. Il aurait refusé des clubs de Ligue 2 pour pouvoir continuer l’aventure avec le FC Martigues en National, une fois la sanction sportive tombée en fin de saison avec malheureusement cette avant-dernière place. Ensuite, il y a eu le passage devant la DNCG le 4 juillet, et l’exclusion des championnats nationaux, c’était tard pour lui, il a perdu du temps, il a perdu des opportunités, peut-être qu’il l’a mauvaise par rapport à la direction du club. Il a voulu s’éloigner de ça.

Hakim Malek, le coach qui a tout changé sportivement à son arrivée en janvier.

Quid de l’affaire Vartan Sirmakes ?
En gros, après l’épisode Giabiconi, le club avait beaucoup de dettes, notamment des créances de l’URSSAF, et Vartan Sirmakes, propriétaire de la marque Franck Muller, est venu sauver le club. Il a mis des sous en tant que mécène. Il met de l’argent sur un compte, 700 000 euros, bloqué, pour passer la DNCG et rassurer tout le monde. Et en fait, le club a dû piocher dedans. Au moment de rendre le pognon, il n’y a plus l’argent, et Sirmakes demande le pognon, et de là, ça part en bataille juridique, que Sirmakes a logiquement gagné. Mais cet argent était sur le compte de l’association. C’est pour ça que quand Lepa dit « Il y avait des cadavres »…

Il y avait des vases communicants entre la SAS et l’association, il y a eu des transactions, et sur l’extrait de l’audit, il est dit que, globalement, il faut « améliorer l’organisation administrative, comptable et financière » du club. Il est juste question alors de réorganisation. Lepa veut mettre la faute sur le passé, mais elle, elle a écouté n’importe qui. Et en fin de saison dernière, Lepa est allée voir Vartan Sirmakes en Suisse pour lui demander de l’aide !! Tu te rends compte ? Elle n’a pas d’honneur. Le pire, c’est que Sirmakes a accepté de la voir mais il a dit non pour l’argent (rires). Il n’allait quand même pas remettre un euro !

Mais si c’était vraiment de la faute de Sirmakes, qu’elle a tout le temps critiqué, et contre lequel tu as perdu un procès, jamais de la vie tu vas le voir pour lui demander de l’argent, non ? On n’avait pas de sponsor maillot toute la saison, elle avait sa marque, mais alors pourquoi n’a-t-elle pas mis sa marque sur les maillots ? Au moins, elle aurait eu de la visibilité… Et bien non. Que des mauvaises décisions, je te dis.

Djamal Mohamed (à gauche), le soir de la montée en L2 (ici avec Souleymane Diawara). Photo 13HF

Quid de Djamal Mohamed, le directeur sportif ?
Il n’est plus au club. Il était là depuis un moment. Il fait venir Steve Solvet et Yannick Etilé, deux supers joueurs, parce qu’il a toujours su trouver des joueurs comme ça, il a du flair, il est bon, et derrière, c’est Bernès qui a pris les rênes, il n’avait plus la main. C’est pour ça, des gens sont arrivés, mais pourquoi, puisqu’on avait Djamal. Il n’a plus rien géré et il a repris la main sur la fin. De toute façon, on a été interdit de recrutement en décembre, donc son rôle est devenu limité. Les saisons précédentes, en N2 et en National, il avait trouvé des supers joueurs, c’était top.

L’annonce du départ en juin 2024 de Grégory Poirier, l’artisan des deux montées de N2 en L2, est-ce que, finalement, cela n’a pas été ça le début de la fin, comme un très mauvais signal ?
Je ne sais pas… Avec tout ce que Greg a mis en place, de voir le résultat… Je ne sais pas ce qu’il pense, si ça lui fait de la peine ou pas. Mais je pense qu’il est parti parce qu’il a senti venir la douille. Le FC Martigues lui a permis d’obtenir son diplôme d’entraîneur professionnel. Et, lui, par rapport à ça, se sentait redevable d’un an. Mais il a dû sentir voir le truc arriver…

Grégory Poirier, l’artisan de la double montée (en 3 ans) de N2 à Ligue 2. Il entraîne le Red Star, en Ligue 2. Photo 13HF

Que sont devenus les joueurs ?
Il n’y a plus aucun joueur de la saison passée. Oualid Orinel est à Nîmes (N2), Romain Montiel à Créteil avec le gardien Yann Marillat (N2), Yannick Etilé, qui était approché par une D1 portugaise, est parti à Paris 13, et quand j’ai vu ça, j’ai mis ce post sur X, « il aurait mérité mieux ».

Karim Tlili avait des touches avec Cannes mais il a signé à Versailles (National), Samir Belloumou à Valenciennes (National), c’est beau, avec Alain Ipiélé, Steve Shamal est à Bordeaux (N2), Bevic Moussiti-Oko s’entraîne avec l’UNFP, Luan Gautier a fait des tests à Brest, Steve Solvet est en Azerbaïdjan au Sabah FC, Leandro Morante à Caen (National), Saintini est retourné à Sion et Mahamé Iby à Malmö, en Suède, c’était des prêts, Simon Falette est libre, Yanis Hadjem est en Belgique (en D2, aux Francs Borains), Milan Robin est en Ligue 2 au Mans, Ayoub Amraoui, prêté par l’OGC Nice, est retourné là-bas avant d’être transféré à Al-Ahli Sports. Voilà en gros.

Le stade Turcan va sonner creux…
L’OM s’est positionné pour accueillir quelques matchs de la Division 1 féminine (5 matchs), et quelques matchs aussi de son équipe de Youth League (3), et l’équipe fanion veut jouer à Turcan. Mais il y a eu une grosse erreur : une ville comme Martigues doit avoir ses équipements sportifs aux normes, et nous, il a fallu des mois de travaux pour que Turcan soit homologué pour la Ligue 2, alors que cela aurait dû être anticipé. Le FC Martigues avait déjà failli monter en Ligue 2 un an plus tôt, cela aurait dû déboucher sur une première phase de travaux. Rien n’avait été fait depuis des dizaines d’années. C’est une grosse erreur, parce que du tout, il a fallu tout faire d’un seul coup.

Du coup, les supporters ont été privés de match pendant une demi-saison, les joueurs ont effectué des allers-retours constamment, sans compter que cela a coûté un pognon dingue. Je trouve ça honteux. A l’arrivée, cela a coûté plus de 3 millions d’euros aux contribuables pour avoir un stade aux normes et là on a une équipe qui va jouer en « Départemental » ? Je te le dis, ça va gueuler au prochain conseil municipal.

Premier match à Turcan en Ligue 2 fin janvier 2025 et première victoire 3 à 0 ! Le début d’une jolie remontada…

Par le passé, des clubs comme Strasbourg, Bastia, Reims aussi, Le Mans, ou récemment Sedan, sont descendus bas…
Oui mais nous, on n’a pas une grosse fans base comme à Sedan, Strasbourg, ou Bastia et Le Mans, des clubs qui, dans un passé récent, se sont retrouvés en N3 ou même en Régional 1 voire R3 pour Sedan. On a des spectateurs à Martigues, pas des supporters. Je connais des supporters qui m’ont dit, quand Martigues a été rétrogradé en Régional 1 en juillet, qu’ils n’allaient plus suivre le club… Mais c’est quoi ça ? C’est ça supporter le club de sa ville ?

Bien sûr que cela va me faire mal au coeur quand je vais aller voir un match de Départemental. On verra bien… Il y a tout à reconstruire, l’équipe est très jeune, avec une moyenne d’âge située entre 18 et 20 ans, et un nouveau coach qui a joué au club, et donc connaît la région, le contexte, Salim MRamboini.

Les vidéos de Romain Molina sur le FC Martigues ?
Sa vidéo sur le FCM, ce qu’il dit, c’est réel. Il expose des faits que la plupart des supporters ignore. Et quand ceux-ci découvrent les dessous, ils se disent « Waouh, c’est pas possible ! ». Personnellement, je ne suis pas surpris. Ils vérifient ses sources. Il a été contacté par une association anti-corruption des Bouches-du-Rhône, qui a dénoncé tout ce qui se passait à Martigues, mais c’était déjà avant l’arrivée de Lepa. Mais c’est sûr que dans le club, il y a une taupe. Je pense que c’est quelqu’un qui était dans le board avant, mais qui est parti. Mais je ne suis pas la taupe !

Le mot de conclusion ?
Quel dommage !

 

Réaction de Pierre Wantiez

Suite à la publication de cet article, l’ex-président du FC Martigues, Pierre Wantiez, a réagi. Il est notamment revenu sur le chiffre de 3 millions d’euros avancé pour expliquer le déficit du club.

« La dissolution de la SAS FC Martigues a été (enfin) déclenchée ce lundi (1er septembre 2025) par Madame Galeb-Roskopp. Elle était la seule à pouvoir le faire. Ceci va entraîner la fermeture de la SAS, et permettre à l’association FC Martigues de poursuivre seule son activité. Pour comprendre la situation actuelle, il faut savoir que la SAS était parvenue au quasi-équilibre au terme de la saison 2024/2025. Les quelques dettes restantes à ce jour sont la conséquence de droits TV encore inférieurs à ceux indiqués, notamment du fait du différé du contrat entre la LFP (LFP Media précisément) et Qatar Tourism Authority. Le non-paiement des sommes prévues pénalise tous les clubs qui évoluaient la saison dernière en Ligue 1 ou Ligue 2. Le FCM n’y échappe pas. La poursuite de l’activité de la SAS cet été, sans perspective ni recette, aura par ailleurs créé des dettes spécifiques, portant sur la saison 2025/2026. Le chiffre de 3M€ repris par certains correspond au financement qui aurait été nécessaire pour évoluer en 2025/2026 en National ou Ligue 2. Ce n’est pas une dette, mais un apport pour le futur, et cette confusion porte préjudice à l’Association. La disparition de la SAS et de l’équipe 1ere du Club supprime ce besoin. Il est techniquement inexact, ou malhonnête, d’invoquer une prétendue dette de la SAS ou de l’Association qui l’empêcherait de continuer à défendre les couleurs du FCM. »

 

  • Texte : Anthony Boyer / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
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Le coach des Thoniers est une personnalité à part, qui jouit d’une belle image. Naturel, pudique et pas carriériste, il ne réseaute pas, fonctionne sans agent et a quasiment conservé les mêmes recettes qu’il utilisait sur les terrains des championnats régionaux en Corse. Entretien avec un homme hors système, qui a brisé un mythe en s’exilant loin de son île natale.

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos : Philippe LE BRECH (sauf mentions spéciales)

Photo Philippe Le Brech

Stéphane Rossi l’apprendra en lisant l’article : pour préparer notre entretien en visio, nous avons pris quelques informations auprès d’une personne qui le connaît bien ! Pour en savoir plus sur le Bastiais d’une grande discrétion, à la fois dans la vie de tous les jours et dans les médias, nous aurions pu interroger Antoine Emmanuelli, son ancien président au CA Bastia, avec qui il a tout connu.

Finalement, nous avons opté pour Nicolas Gennarielli, qui fut son adjoint chez les Cabistes et aussi au Sporting-club de Bastia, qu’il avait dû quitter prématurément pour raisons familiales ! Et tout ce que nous a dit l’actuel directeur technique du Cavigal Nice, passé sur les bancs de l’Ile-Rousse (CFA2, devenu le FC Balagne) et de Porto-Vecchio (DH) au début des années 2010, s’est vérifié.

L’image d’un Rossi sympa, agréable, simple, et aussi pudique, a très vite été confirmée : « Sté, il est toujours resté le même. Il est lui-même, témoigne Gennarielli. Humainement, c’est un top mec ! Il est très cool. C’est aussi un épicurien. Il kiffe la vie, qu’il prend du bon côté. Dans le foot, il est très passionné. Il peut passer des heures à parler ballon, mais il sait aussi switcher. C’est un entraîneur qui y est arrivé par sa compétence. Il est très ouvert et fonctionne à la confiance. Il n’a pas peur de déléguer. Dans ce milieu, il dénote un peu, parce qu’il n’a jamais eu d’agent, qu’il fonctionne tout seul et qu’il n’a pas de réseau. Il est en dehors du système. Il n’est pas carriériste. Il ne se vend pas et puis il a longtemps été catalogué comme l’entraîneur corse qui ne peut pas exercer ailleurs qu’en Corse… »

Il vient de soigner un cancer de la thyroïde…

Lors d’un match amical cet été contre le SM Caen de Maxime d’Ornano. Photo Philippe Le Brech

Tous ces sujets, nous les avons évoqués avec celui qui s’est assis sur le banc de l’US Concarneau le 1er juillet 2024, dans un club professionnel fraîchement relégué de Ligue 2 en National, à… 1600 kilomètres de Bastia, sa terre !

Mais il est un autre sujet que nous n’avons pas abordé, celui de la maladie et de son cancer de la thyroïde, détecté en décembre 2024, qu’il a combattu pendant sept mois, et qu’il a vaincu.

Lundi, dans les colonnes du quotidien Ouest-France, il s’est longuement confié au journaliste Dylan Le Mée. Morceaux choisis : « En décembre, on m’a décelé une anomalie au niveau de la thyroïde (…) dès janvier, j’ai su que j’allais me faire opérer en juin. L’opération s’est mal passée. Je suis resté quelques jours en réanimation. Je n’arrivais pas à parler. Au club, seuls le médecin, le président, le directeur général et les joueurs étaient au courant (…) Après la saison, cela a été très compliqué, j’ai eu le soutien de ma famille et des gens du club. Quand je me suis réveillé, que je ne pouvais plus parler, ça m’a mis un coup car j’ai cru que je ne pourrais plus travailler (…) Dans notre métier, sans voix, l’entraîneur ne sert pas à grand-chose. Moralement, j’étais atteint (…) La chose qui m’a manqué, c’est de pouvoir parler aux joueurs qu’on avait ciblés et qu’on avait réussi à convaincre pour leur dire ce que je fais d’habitude, ma manière de voir les choses (…), maintenant, sur le terrain, je vis les moments plus intensément. Je me dis que ce n’est que du football et du jeu. Il faut que je vive différemment. J’ai toujours fonctionné pour moi. Je le dis ouvertement, j’étais égoïste. Le foot sera toujours mon métier, mais ce n’est pas ce qui fait l’essence de ma vie. »

Vendredi dernier, avant un match amical disputé (et remporté) face à Pontivy (N3), histoire de garder le rythme – l’US Concarneau était exempte lors de la 2e journée de championnat en raison de la rétrogradation de l’AC Ajaccio, qui a déposé le bilan, et du nombre impair (17) de participants en National -, Stéphane Rossi a pris 45 minutes de son précieux temps pour répondre, avec sa courtoisie habituelle, à nos questions, axées sur sa personnalité, son histoire, son parcours. Parfois surpris, comme lorsque nous l’avons interrogé sur son papa, parfois rieur, le coach le plus âgé de National (61 ans) et aussi le plus expérimenté à cet échelon (237 matchs avant celui de ce vendredi à Bourg-en-Bresse) devant le coach d’Orléans Hervé Della Maggiore (221) et le coach du FC Rouen Régis Brouard (174 matchs en National) – ces deux derniers ont cependant plus d’expérience à l’étage supérieur, en Ligue 2 – est resté fidèle à sa réputation. Celle d’un homme tranquille, sincère, cool, pudique mais pas trop non plus.

Interview

« Je n’ai jamais eu besoin d’un agent pour trouver un club »

Photo Philippe Le Brech

On commence par une date. Si je te dis 23 octobre 2019 ?
Le jour où je me suis fait virer du Sporting !

23 mars 1964 ?
(Rires) c’est ma date de naissance !

À quoi cela te fait penser ?
À Mon âge (rires) ! Mon âge avancé ! 61 ans ! Ça passe très vite, trop vite !

Et sur ses 61 ans, combien de temps passés sur les terrains de foot ?
Depuis minot, plus de 45 ans, j’ai commencé le foot en compétition à 15 ans, en cadets !

Et ta date de naissance, ça ne te fait penser à rien d’autre ?
(Surpris, il ne sait pas quoi répondre)

Tes parents… Ton père.. Tu as une relation forte avec ton père…
Oui, oui… (gêné)

Photo US Concarneau

Tu es pudique, tu n’aimes pas trop en parler…
Mon père c’est… Il a 86 ans aujourd’hui, il a toujours compté pour moi, mais c’est normal, il m’a élevé, quand ma mère est parti très jeune. C’est quelqu’un qui a été très dur avec moi au départ, mais aujourd’hui, je retire tous les bénéfices de cette éducation, des valeurs qu’il a pu me transmettre. C’est quelqu’un qui a pris aussi la relève et a élevé aussi mes enfants, puisque moi, j’étais divorcé, j’étais pas trop disponible… Mon père c’est le patriarche. Mes deux filles sont grandes aujourd’hui, elles ont 35 et 32 ans, je suis grand-père, j’ai deux petit-fils.

« Je n’aime pas me mettre en avant »

En recherchant des articles sur toi, on en trouve bien sûr axés sur le foot, les matchs, la compet’, mais en réalité très peu sur toi, l’homme, ton caractère, ta personnalité… Tu es discret…
Oui, c’est plus de la pudeur, je n’aime pas trop me mettre en avant. Moi, je fais mon boulot, et c’est largement suffisant. Et mon boulot, les gens qui sont avec moi le voient. Je ne cherche pas la lumière, ce n’est pas la peine.

Depuis maintenant 12 ans, tu ne vis que du football…
Oui. Pendant des années, j’ai cumulé deux fonctions : celle d’entraîneur de foot et celle de chef du service des sports du département de Haute-Corse. Quand on est monté en Ligue 2 avec le CA Bastia en 2013, j’ai dû faire un choix parce que je ne pouvais plus cumuler les deux. C’est là que je me suis mis en disponibilité afin de me consacrer au foot. La dispo de 10 ans s’est terminée en 2023, et j’ai fait le choix à nouveau à ce moment-là de ne pas retourner dans l’administration.

Tu es un peu à part, dans le milieu, la com, les médias, les réseaux, ce n’est pas trop ton « truc ». On sent aussi que le Stéphane Rossi que j’ai en face de moi, il ne joue pas un rôle. Tu es toi-même…
En fait, pour le foot professionnel, j’ai gardé le même fonctionnement que j’avais dans le foot amateur, quand j’entraînais en DH (Régional 1) ou même en Division 4 à l’époque. J’ai toujours eu un certain mode de fonctionnement que j’ai conservé, parce que j’ai été élevé comme ça. Pourquoi changer ? Il faut continuer à vivre comme on a l’habitude de vivre, sinon, tu peux perdre des amis, tu ne consolides pas les liens forts que tu as pu créer avec des amis au collège par exemple et que j’ai toujours aujourd’hui, ou avec des joueurs dans mes jeunes années au Sporting-club de Bastia, quand j’ai commencé à faire de la compétition.

« Il faut donner de l’importance à la personne que tu as en face de toi »

Photo Philippe Le Brech

Tu dis que tu as conservé le même fonctionnement que quand tu entraînais en DH mais pourtant, ce n’est pas possible, il y a forcément de l’adaptation…
Je me suis adapté, bien sûr, mais ce que je veux dire, c’est que je fonctionne quand même d’une certaine manière. Je t’explique : quand j’arrive dans un club avec la responsabilité d’une équipe, ma priorité c’est de fédérer autour de moi. Et pour ça, il y a des leviers à activer, il faut aller vers les gens, il faut donner de l’importance à la personne que tu as en face de toi, faire sentir à des joueurs, par exemple, qu’ils sont importants, mais il faut une confiance mutuelle. Cette confiance-là, elle est majeure, parce que si on l’obtient, derrière, on arrive à faire passer tous les messages que l’on veut, peu importe que le joueur ait fait un bon ou un mauvais match. Et à partir de là, on peut avancer. Les footballeurs professionnels, ce sont d’abord des humains, avec tout ce que cela comporte. Ils ont leurs failles, leurs qualités, et je prends ça en compte. Après, c’est sûr que dans le travail, je suis exigeant, rigoureux, parfois je m’énerve aussi, mais toujours avec le respect de la personne que j’ai en face de moi.

Sur le banc, tu as l’air aussi de bien maîtriser tes émotions, de ne pas te laisser envahir…
Parfois il m’arrive de m’énerver mais j’ai appris une chose avec le temps, c’est que quand tu es serein, plutôt calme sur un banc de touche, tu as plus de facilités pour analyser les choses. Et quand tu t’emportes, quand tu t’énerves, tu transmets ce stress à tes joueurs, à ton banc, et ce n’est jamais bon. Parce que tu indisposes beaucoup de gens, et cela peut se retourner contre toi. Je ne dis pas que je ne le fais jamais, mais il faut vraiment que cela soit quelque chose de grossier pour que je puisse sortir de mes gongs. Je ne tolère pas, non pas l’injustice, c’est un mot trop fort, mais les mauvais comportements. Il y a des personnes dans le football qui m’ont déçu par leur comportement. C’est vrai que tout le monde veut gagner, que notre métier est soumis à l’obligation de résultats, on le sait, c’est comme ça. Gagner, OK, mais pas par n’importe quel moyen. Il faut respecter le travail des autres, se respecter les uns les autres. Il faut de l’humilité, et sur ce plan-là, quelques personnes, coachs, présidents, directeurs sportifs, m’ont déçu. Moi aussi j’ai la pression du résultat. Ce n’est pas que cela peut me rendre différent, mais cela peut engendrer chez moi un comportement différent sur le moment. Là, je peux sortir de mes gongs. C’est un peu un regret que j’ai par rapport au milieu du foot.

Un souvenir d’un match où tu as pété un plomb ?
Je n’ai pas forcément pété les plombs mais juste dit les choses comme je le ressentais, et pas forcément de manière courtoise, c’était la saison dernière, contre Sochaux, à l’aller et au retour. Il y a eu une altercation parce que, en face de nous, je pense que les personnes n’ont pas pris le bon chemin pour gagner ce match, voilà, donc à un moment donné, il faut respecter les personnes que l’on a en face, quelque soit le statut, quelques soient les obligations de résultats que l’on peut avoir.

‘J’ai signé à Concarneau sans agent »

Photo Philippe Le Brech

Tu fonctionnes toujours sans agent ?
Oui, c’est vrai. J’ai signé à Concarneau sans agent. Je n’ai jamais eu besoin d’un agent pour trouver un club. Je n’ai toujours pas le réseau. Il y a des gens qui me connaissent et puis, ce qu’il faut dire aussi, c’est que j’ai quand même passé une trentaine d’années en Corse en tant qu’entraîneur. Forcément, là-bas, je n’avais pas besoin de grand-monde, mais après, quand je suis parti, oui, peut-être que j’aurais eu besoin d’un agent, mais cela s’est fait comme ça, par le bouche à oreille quand j’ai signé à Cholet par l’intermédiaire d’Anthony Martin, qui est de là-bas, qui était le gardien que j’avais au Sporting-club de Bastia à l’époque : il m’a appelé et m’a dit, « Ecoute, Cholet cherche un entraîneur, je vous mets en relation ». Pour Bourges, en National 2, pareil, je reçois un appel de quelqu’un que j’avais croisé sur les terrains, qui me dit que le club change d’entraîneur, il me demande si je veux aller là-bas, je me dis « pourquoi pas ? », le niveau m’importe peu, N2, National, ça ne me dérange pas. Et voilà. À Concarneau aussi, Philippe Leclerc (responsable du recrutement, ex-Caen, Angers), m’a appelé, il avait pris des informations sur moi par la bande, sur mon travail, ma manière de fonctionner, et ça s’est fait comme ça.

« J’aurais dû partir de Corse plus tôt »

Qu’est-ce qu’il t’a manqué pour entraîner plus souvent en Ligue 2 par exemple (une seule saison, en 2013-2014, avec le CA Bastia) ?
J’aurais dû partir de Corse plus tôt. C’est un des freins parce qu’on m’a catalogué comme un entraîneur ne pouvant entraîner qu’en Corse, n’ayant des résultats qu’en Corse, et ça, c’est un facteur limitant. Je pense que c’est juste ça. Après, sa notoriété, sa crédibilité, on la fait, non pas en changeant de clubs tous les jours, mais au travers des résultats que tu peux avoir dans tes clubs respectifs. À chaque fois que l’on m’a demandé d’atteindre un objectif, je l’ai atteint, même au Sporting quand je me suis fait virer.

« Il a toujours fallu que j’aille chercher les choses »

Photo Philippe Le Brech

Tu as aussi souvent pris en mains des équipes où il fallait reconstruire…
Oui. Au Sporting, quand le club est tombé de Ligue 1 en National 3, on m’a demandé de reconstruire parce qu’il n’y avait plus rien, j’ai construit, avec mon petit réseau, j’ai fait venir des joueurs, on a monté une équipe, la première année, on a fini 2e en National 3 (derrière Endoume), on est parti trois ou quatre matchs après les autres, c’était trop difficile, mais la deuxième année, on est monté en N2, et quand je me fais virer la troisième année, on avait disputé 9 matchs de championnat, on en avait gagné 7. Mais je pense que ce n’est pas sur les résultats sportifs que je me suis fait virer, il y a d’autres choses, d’autres raisons, mais je ne les connais pas.

À Cholet, quand je suis arrivé la première fois en décembre, il fallait maintenir le club, il y a eu la Covid, mais on était dans les clous. La deuxième année, on a tout reconstruit, en changeant 80 % de l’effectif, à la trêve, on n’était pas mal, dans les trois premiers, après, il y a eu des paramètres, comment dire, non maîtrisables… mais on a toujours été dans la première partie de championnat. À Bourges, quand je suis arrivé, la situation était délicate, on m’a demandé de maintenir le club en N2, on s’en est sorti. Et à Concarneau, dans un club qui descendait de Ligue 2, on m’a demandé de rebâtir, de reconstruire, avec des moyens limités pour le niveau National, et on a fini 8es. Et cette année, c’est pareil, il faut continuer à bâtir et surtout se maintenir pour aller dans la nouvelle Ligue 3 professionnelle. J’espère qu’un jour, de dépasserai les objectifs que l’on m’a demandés. En fait, j’ai été catalogué comme ça aussi. On ne m’a jamais donné une équipe déjà bâtie, déjà construite, en me disant « Voilà, avec cette équipe-là, tu vas entraîner en Ligue 2 ou en National ». Non. Moi, il a toujours fallu que j’aille chercher les choses tout le temps.

Photo US Concarneau

As-tu souffert de cette étiquette ?
Je n’en ai pas trop souffert parce que pendant longtemps je n’ai pas ressenti le besoin de partir (de Corse), j’étais bien chez moi, j’entraînais chez moi, à un bon niveau, voire à un très bon niveau. Ce que l’on a réalisé avec Antoine (Emmanuelli) et d’autres au CA Bastia, ce n’était pas banal, c’est quand même un exploit mémorable, un miracle même, d’arriver à monter en Ligue 2 avec un club de Bastia intra-muros, à côté du Sporting qui accapare toute l’attention des médias, des supporters, et de manière légitime, c’est bien normal. Les gens n’ont pas pris conscience de ce qui s’est passé à cette époque là.

Des regrets par rapport à l’époque CAB en Ligue 2 ?
Le CA Bastia en Ligue 2, ou même en National, c’était une opportunité monumentale pour les jeunes corses et pour le football sur l’île de développer le centre de formation du Sporting et de mettre en place des passerelles entre les deux clubs, en travaillant en bonne intelligence, main dans la main, et pas les uns contre les autres. Pour le CA Bastia, ce n’était pas seulement le fait de rester en Ligue 2, parce que même en National, avec un Sporting qui était en Ligue 1 à ce moment-là, cela aurait été viable. Cela aurait permis aux deux clubs de bénéficier de pas mal de compétences. C’est ça le regret. On n’a pas su convaincre les gens que c’était comme ça qu’il fallait avancer pour le bien du football corse.

Tu avais déjà eu des propositions pour entraîner sur le continent avant d’aller à Cholet en 2019 ?
Quelques-unes, mais comme je n’ai pas d’agent, tout était informel. Il n’y a pas eu de discussion. Je me souviens avoir vu mon nom dans la presse parisienne pour Créteil à l’époque, qui était en National.

« Il fallait que je parte, j’en avais besoin… »

Photo Philippe Le Brech

Cholet, c’était quand même le grand saut ! Qu’est-ce qui t’a pris d’aller aussi loin ? On t’aurait plutôt imaginé dans la partie « sud » de la France …
C’était un moment où j’en avais besoin. J’étais content de partir de chez moi, parce que j’ai souffert pendant quelque temps après mon éviction du Sporting-club de Bastia, en octobre 2019. Cette éviction, je pensais que c’était injuste. J’avais ce sentiment-là. Je voulais oublier tout ça, passer à autre chose. Je voulais partir pour montrer aussi que j’étais capable d’entraîner à un niveau supérieur, parce que quand je suis viré de Bastia, le club est en National 2. Là, à Cholet, je pars en National. J’avais eu d’autres contacts, tout de suite, après Bastia : j’avais discuté avec Béziers aussi, qui était en National, et Cannes, en National 3, m’avait sollicité, mais à ce moment-là, je voulais prendre un peu de recul. J’en ai profité pour partir avec mon épouse, voir des matchs en Italie, pendant un mois, et après j’ai rebondi en décembre.

L’US Concarneau 2025/26. Photo Philippe Le Brech

J’ai vu que dans ta carrière de coach, tu avais entraîné (au CAB Gallia Lucciana) un certain… Benoît Tavenot. C’est drôle non ? Il est aujourd’hui à la tête du Sporting-club de Bastia, en Ligue 2…
C’est vrai. C’était au CABGL (Bastia Gallia Lucciania) Et je vais te raconter une anecdote, Benoît s’en souvient. On va jouer en CFA2 à Cagnes-sur-Mer, à côté de Nice. Benoît, qui est originaire de Solaro, en Corse, arrivait de Strasbourg, je crois qu’il était encore étudiant. À Cagnes, il y avait du lourd, je me souviens qu’il y avait Di Costanzo (ex-Rennes, Nice, Reggiana), ils avaient une équipe largement plus forte que la nôtre. Je mets en place un système de jeu un peu particulier avec Benoît au marquage individuel de Di Constanzo. C’était l’une des premières fois où j’étais arrivé à avoir des images de l’adversaire ! On m’avait donné une cassette et j’avais regardé au magnétoscope le match précédent de Cagnes. Et très vite, je vois que Benoît n’est pas dans le coup, il perd un ballon, le mec marque… Bref, il est à côté de ses pompes. Je le sors au bout de 20 minutes. Et finalement on a gagné 2 à 1. J’ai ce souvenir-là (rires).

Tu es toujours en contact avec lui ?
Je l’ai de temps en temps, mais là ça fait un moment que je ne l’ai pas eu. Après, si j’ai besoin de quelque chose, je peux l’appeler, et l’inverse aussi bien entendu, il sait très bien qu’il peut m’appeler. J’ai passé le recyclage du BEPF il y a deux ans quand il était dans sa session BEPF.

Ça ne te fait pas « bizarre » de le voir à la tête du Sporting ?
Non, parce qu’il s’est engagé dans cette voie-là (de coach) très tôt aussi, il a eu des équipes de jeunes au club, il a eu la réserve, il est parti avec Frédéric Antonetti comme adjoint (à Metz et Strasbourg), il était déjà adjoint au Sporting avant (de Frédéric Hantz et de François Ciccolini), mais c’est vrai que c’est particulier de l’avoir eu comme joueur.

Penses-tu être un meilleur entraîneur aujourd’hui qu’il y a 25 ans ?
Je pense que oui, j’ai beaucoup plus de recul, d’analyse, et je dirais même de compétences. On progresse tout le temps, on apprend. Il faut toujours s’ouvrir, ne pas s’enfermer, re pas rester sur ses acquis, afin d’évoluer.

« Je ne suis pas un entraîneur défensif »

Photo Philippe Le Brech

Joueur, tu étais un plutôt créatif, un numéro 10, technique, mais coach, tu aimes bien que tes équipes soient plutôt bonnes défensivement…
Eeeeeeh…. Je dirais … oui et non ! Oui, parce que le socle, la base d’une équipe, c’est la solidité, afin qu’elle puisse exprimer ensuite ses qualités et ses forces offensives. Mais j’aime bien qu’elles soient organisées, qu’on puisse aussi avoir parfois la maîtrise : quand je bâtis un projet de jeu, j’appelle ça un projet de jeu réaliste. Je m’inscris dans cette philosophie-là, et non pas dans une philosophie de possession, de transition ou d’équipe ultra-défensive. Un projet de jeu réaliste, cela veut dire être capable de travailler sur des blocs médians ou bas quand il faut et être capable d’avoir la maîtrise du jeu et la possession par un jeu de position quand l’adversaire vous laisse la possibilité d’avoir le ballon.
Après, en fonction des individualités que l’on peut avoir, ça peut changer : la saison passée, par exemple, même si on a terminé 8e et que l’on a souffert à une certaine période, on a fini avec la 2e meilleure attaque du championnat (48 buts marqués, comme Le Mans, derrière Nancy et ses 54 buts) et quasiment l’une des plus mauvaises défenses. Il faut être équilibré, et ça, c’est difficile à trouver. Quand on est équilibré, souvent, c’est au détriment de l’aspect offensif. Quand on marque des buts aussi, c’est au détriment de l’aspect offensif, etc. etc. Si tu trouves cet équilibre, tu peux faire en sorte de terminer dans le haut du tableau. Mais je ne suis pas un entraîneur défensif !

« Le respect, l’humilité, et j’ai l’impression que ça se perd un peu »

Photo Philippe Le Brech

Est-ce que tu as l’impression d’être un coach à part, différent, dans ce milieu du foot ?
(Rires) Je vais te dire ce que je t’ai déjà dit : en fonction des personnes que j’ai en face de moi, peut-être. Il y a des entraîneurs aujourd’hui avec qui j’aime bien échanger, discuter, voilà. Mais c’est vrai qu’il y en a de moins en moins. Dernièrement, j’ai joué contre Villefranche en championnat (0-0, journée 1), j’avais déjà eu l’occasion de croiser leur coach, Fabien Pujo, en 2014, quand, justement, il y a eu cette accession avec le CA Bastia, j’étais parti au recyclage à Clairefontaine, et Fabien était là-bas à ce moment-là, on avait sympathisé à cette époque, mais c’est très vieux comme souvenir. Là, on a pu échanger avant le match. Après, il y a des coachs qui ne parlent pas, d’autres qui n’ont pas envie de parler, ou qui ont peut-être la pression avant le match, après, je respecte tout le monde. Mais par rapport à cette nouvelle génération d’entraîneurs qui arrivent, il y a un autre état d’esprit qui s’installe. Il y a des jeunes entraîneurs qui… je vais faire attention à ce que je vais dire parce que je ne veux froisser personne… qui ont les dents longues, et c’est ça la différence avec les entraîneurs de ma génération. C’est un constat. Nous, on était là, on était content d’être là, on était ouvert. Voilà. On était en National par miracle, parce que qui aurait dit que le CA Bastia monterait en National, puis en Ligue 2 ? Aujourd’hui, ce sont de jeunes entraîneurs à qui on donne les clés d’une équipe professionnelle parce que la majorité des clubs sont pros en National, et ils sont propulsés sur le devant de la scène comme ça, et ils veulent aller encore plus loin. Ils sont très ambitieux. C’est bien. Mais l’ambition, c’est une chose, mais après, il y a d’autres choses, comme la relation que l’on peut avoir avec les confrères, le respect, l’humilité, et j’ai l’impression que ça se perd un peu.

La Ligue 3, les coachs sont concertés ou pas du tout ?
(Il hoche la tête en signe de non) J’en parle avec mon président (Jacques Piriou), d’ailleurs il m’a donné comme objectif d’être en Ligue 3, mais à part ça, non, parce que c’est toujours un peu flou. On n’a pas trop d’informations. Moi, je sais juste deux choses sur la Ligue 3 : c’est qu’il y aura des play-off, et le statut professionnel.

« Le National s’est bonifié et professionnalisé »

Stéphane Rossi, au début des années 2000, à la tête du CA Bastia Gallia Lucciana. Photo DR

Tu le trouves comment le National aujourd’hui par rapport à celui que tu as connu avec le CA Bastia en 2012/2013 par exemple ?
Les clubs sont beaucoup plus structurés et les installations, hormis deux ou trois clubs, sont celles de clubs qui ont connu la Ligue 1 ou la Ligue 2, dignes du niveau supérieur. Les joueurs ont aussi pour certains joué à des niveaux au-dessus. Je trouve qu’au fil des saisons, le championnat se bonifie. Avec des entraîneurs, comme je l’ai dit, qui ont envie d’aller encore plus haut, et donc forcément, qui amènent autre chose, notamment dans leur vision du football. Forcément, parfois ça marche, parfois non, mais c’est totalement différent de ce que j’ai connu en 2012. En fait, ça s’est professionnalisé.

Un mot sur la situation du foot de haut niveau en Corse aujourd’hui ?
Déjà, de voir l’AC Ajaccio disparaître des compétitions nationales, ça me fait mal. Parce que c’est le football corse dans sa globalité qui est touché. L’ACA, ce n’est pas simplement l’équipe première, c’est un centre de formation reconnu, qui travaille bien, c’est la possibilité pour des jeunes joueurs de continuer leur cursus de formation, et susciter chez eux des vocations et pas seulement celles de devenir un joueur professionnel, cela peut être aussi de devenir éducateur, entraîneur, et tout ça, cela va manquer à un moment donné. Aujourd’hui, on résonne dans l’instant présent : oui c’est une catastrophe économique, c’est l’ACA qui disparaît, mais il faut regarder sur le long terme. Peut-être qu’il y a des garçons qui auraient dû être professionnels et qui vont travailler dans un autre secteur, d’autres qui auraient pu être éducateur ou entraîneur et qui feront eux aussi autre chose.

En fait, ça dérègle tout, pas seulement l’économie autour de l’ACA. C’est ça qui me fait mal. Des gens se retrouvent au chômage (180 salariés, ndlr). Il y a des familles touchées. Pour rebondir, c’est compliqué. J’ai connu ça au Sporting en 2017, quand je suis arrivé, le club était dans la même situation que l’ACA aujourd’hui, il y avait des garçons qui avaient signé des contrats pros de 3 ans, qui se sont retrouvés sans rien, certains ne jouent plus au football aujourd’hui. Tout ça, ce sont des choses qui ne sont pas palpables, mais qui vont arriver. L’impact sera négatif, ça c’est sûr. Cela a été le cas au Gazelec Ajaccio aussi. C’est sûr que cela fait mal au football ajaccien aussi, il y avait à un moment donné deux clubs en Ligue 1 et en Ligue 2, des derbys, aujourd’hui, il ne reste que le Gazelec en National 3. C’est dommage.

Photo Philippe Le Brech

Tu as regardé la vidéo de Romain Molina sur Johan Cavalli (directeur sportif de l’AC Ajaccio) ?
Oui.

Si un truc comme ça t’arrivait, si on dévoilait tes contrats au grand jour, tu réagirais comment ?
Franchement, à la place de Johan, je n’aurais même pas répondu. De toute façon, tous ces renseignements, son contrat, parce qu’il (Molina) a sorti son contrat, avec ses clauses, tout ça, ça vient de l’intérieur. Peut-être que moi, j’aurais cherché à régler mes comptes à l’intérieur.

Je ne suis pas là pour défendre Johan, mais qu’est-ce qu’il a fait de mal ? Il a un contrat, il ne l’a pas volé. Quand il a été signé, tout le monde était d’accord. Après, ce n’est pas ça qui a tué l’ACA.

« On a investi la Bretagne ! »

La vie à Concarneau, c’est comment ?
C’est top ! Il y a la mer, déjà, même si elle est un peu froide, mais quel plaisir de la voir tous les jours, surtout quand on est habitué comme moi à la voir depuis toujours. Après, les paysages ressemblent beaucoup à la Corse, avec une végétation ici, en bord de mer, que l’on retrouve en Corse mais à 300 ou 400 mètres. La ville est tranquille, aux alentours il y a Quimper, Lorient, et pour le foot, on peut aller voir des matchs pas loin, à Brest où il y a Greg Lorenzi, à Lorient où il y a Olivier Pantaloni et Yannick Cahuzac, en fait, il y a beaucoup de Corses, on a investi la Bretagne (rires) ! Je suis allé à Lorient dernièrement contre Osasuna en amical, Greg Lorenzi m’a invité contre Paris en 8e de finale de Ligue des Champions l’an passé. Quand je peux, j’essaie d’aller voir des matchs, le haut niveau, c’est toujours intéressant, mais on a tous nos obligations.

Tu fumes toujours un petit cigare le soir ?
Oui (rires) Oui, ça c’est mon plaisir. J’ai ma cave à cigares que j’ai transportée ici !

Avec un petit verre de whisky ?
Oui, mais pas tous les soirs le whisky (rires) !

Championnat National 2025/26 (journée 3) – vendredi 22 août : FBBP 01 – US Concarneau, à 19h30. Match télévisé et commenter sur la chaîne Youtube du #NationalFFF :  https://www.youtube.com/Championnat_National_Officiel

  • Texte : Anthony Boyer / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : Philippe Le Brech
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Le National 2 reprend avec, pour la deuxième année consécutive, sa nouvelle formule de 3 groupes et 48 équipes. Un resserrement par le haut qui  fait dire aux spécialistes que jamais cette compétition, qui se rapproche de plus en plus de son grand frère, le National, n’avait été aussi relevée. C’est certain, la saison 2025-2026 s’annonce… passionnante !

Par la rédaction / contact@13heuresfoot.fr – Photos de couverture US Créteil

La saison de National 2 s’ouvre dès ce vendredi par trois matches : Chantilly – Epinal dans le groupe B, Saint Priest – Hyères et Créteil – Rumilly Vallières dans le groupe C. Depuis la saison dernière, le quatrième niveau a été ramené à 48 clubs (trois groupes de 16) par la grande réforme des compétitions nationales.

Le resserrement de l’élite a pour effet d’élever manifestement la compétitivité, au point que de nombreux témoins ou techniciens estiment que le National 2 d’aujourd’hui n’a plus grand chose à envier au National d’il y a dix ans…
Aujourd’hui, 80% des joueurs de N2 font du football leur métier et 95% des clubs s’entraînent désormais le matin et non plus le soir.

Une preuve que le niveau du championnat a grimpé ? Au terme du National 2024-2025, trois des quatre promus de N2 ont terminé 3e (Boulogne), 5e (Bourg en Bresse) et 6e (Aubagne). Et Boulogne, barragiste malheureux pour la montée en L2 face à Clermont, a finalement enchaîné une deuxième montée de suite (le club nordiste a été repêché après la rétrogradation administrative de l’AC Ajaccio) et joue aujourd’hui en deuxième division !

Le N2 est tellement exigeant qu’il n’accueille plus qu’une seule réserve professionnelle, celle du FC Lorient, là où il y en avait une bonne demi douzaine il y a peu : le FC Lorient est donc la seule exception, et encore parce qu’il a retrouvé sa place après avoir été relégué en N3 il y a un an.

Groupe par groupe, voici les forces en présence, les favoris et les outsiders, et quelques clubs au passé prestigieux, dont les Girondins de Bordeaux et Cannes…

  • La formule

Trois groupes de 16 équipes. Le premier de chaque groupe est promu en Ligue 3 (le FC Lorient ne peut pas monter). Les 15e et 16e sont rétrogradés en N3 ainsi que les deux moins bons 14e.

  • La participation

– Un relégué de National : Nîmes (le deuxième relégué, Châteauroux, a été repêché).
– Quatre repêchés parmi les neuf relégués sportivement en N3 : Wasquehal, Granville, Goal FC et Saumur. En revanche, Balagne, Marignane-Gignac et Bergerac, maintenus sur le terrain, ont été sanctionnés et envoyés en N3 (Balagne) ou en championnats de Ligue (Marignane-Gignac, Bergerac) par la DNCG.
– Dix promus de N3 : Aviron Bayonnais, FC Chauray, FC Lorient B, FC Montlouis (groupe A), FC Borgo, FC Dieppe, Colmar SR (groupe B), Lusitanos Saint Maur, FC Limonest DSD et FC Rousset (groupe C).
– Les trois champions de N2 à l’issue de la saison 2024-2025 ont accédé en National : le Stade Briochin, Le Puy Foot 43 et le FC Fleury 91. Cinq clubs ont été relégués en N3 : Villers-Houlgate, Aubervilliers, Vendée Le Poiré, Jura Sud et Anglet.

Groupe A

Les Girondins de Bordeaux sous forte pression

La saison passée, les Malouins avaient dominé la première partie de saison. Photo Facebook USSM

Aux Girondins de Bordeaux, personne ne se voile la face : une troisième saison en N2 serait inconcevable pour un club six fois champion de France mais passé tout près de l’extinction l’été dernier pour ses dettes abyssales.
Les Girondins sont encore en vie, mais ils attaquent la saison avec une énorme pression, sans joker, sans droit à l’échec. Une non montée en mai prochain pourrait même être cette fois vraiment fatale. Un club comme Bordeaux ne peut pas vivre éternellement à ce niveau.

La découverte du N2 a été semée d’embûches. Les buts de la star anglaise Andy Carroll ont un moment masqué les lacunes d’un groupe construit dans l’urgence, et seulement 4e à l’heure du verdict. Cette fois, le recrutement n’a pas été improvisé mais le turnover est massif : 14 départs (dont Andy Carroll) pour 15 arrivées dont quelques jolies pointures pour le N2 : Steve Shamal (Martigues), Nadjib Cissé (QRM), Matthieu Villette (16 buts avec La Roche sur Yon la saison dernière), Éric Vandenabeele (Rodez) où l’ex-concarnois Faissal Manai.

Laurent David, le coach des Herbiers. Photo Facebook Vendee Les Herbiers Football

Suffisant pour être tranquille ? Évidemment pas. Bruno Irles a appris à connaître les pièges du N2 et la qualité de plusieurs équipes. Qui peut challenger Bordeaux ? Les Herbiers d’abord, 2es du groupe la saison passée derrière le Stade Briochin, et qui cherchent à retrouver enfin le National 7 ans après sa finale de Coupe de France (0-2 contre le PSG) … et sa relégation concomitante en N2 !

Mais le coach vendéen est obligé de reconstruire après la perte de plusieurs cadres recrutés en National : Nathan Yavorski et Shelton Guillaume par Versailles, Sambaly Keita par Villefranche, Anderson Goncalves et Brahima Magassa par Châteauroux…

Saint Malo a aussi vu partir des éléments majeurs au dessus : Bilal Cissé à Versailles, et le buteur Raphaël Gerbaud au FC Rouen. Guillaume Heinry, le boss du milieu, figure également au niveau départs..

Mais le recrutement malouin a de l’allure avec Lucas Capoue (Blois), Tom Lebeau (Le Puy), Nathanael Bai (Bordeaux), Augustin Pascaud (Chateaubriant), Bissouma Touré (Marignane Gignac). L’attaquant Junior Burban (Progrès Niederkorn, Luxembourg) fera-t-il oublier Raphaël Gerbaud ?

Dominateurs jusqu’à Noël, les Corsaires ont longtemps cru que 2024-2025 serait enfin leur saison. Encore raté… 5e en 2023, 2e en 2024, 3e en 2025, l’US Saint Malo y arrivera forcément un jour.

Quelques sérieux outsiders peuvent troubler le jeu : Avranches qui veut renouer avec son passé en National avec Cédric Hengbart sur le banc; le Vendée Foot Club de Frédéric Reculeau (nouvelle appellation de l’ex-Vendée La Roche sur Yon) qui a fini très fort l’exercice précédent; et pourquoi pas Angoulême, 6e du groupe sud la saison passée et ravi de retrouver « sa » poule ?

Enfin, les promus pourraient troubler les cartes, notamment l’Aviron Bayonnais d’Alain Pochat, voire le FC Chauray, désormais seul représentant de l’agglomération niortaise au niveau national, très performant dans ses matches de préparation.

Groupe A – journée 1

Samedi 16 août, 18h :

  • Girondins de Bordeaux – US Avranches MSM
  • Voltigeurs Châteaubriant – Les Herbiers VF
  • Saumur OFC – Bayonne Aviron
  • US Saint Malo – FC Montlouis
  • Angoulême CFC – Dinan Lehon FC
  • Stade Poitevin – FC Lorient 2
  • VFC La Roche-sur-Yon – SC Locminé
  • US Granvillaise – FC Chauray

Groupe B

Pas de favoris mais un trio de costauds

Nicolas Rabuel, le coach du SAS Epinal. Photo Facebook SAS Epinal.

Les trois clubs d’Ile de France étrangement versés dans le groupe sud (Creteil, FC 93-Bobigny, Saint Maur Lusitanos), ce groupe Est-Nord-Corse semble extrêmement indécis. Puisque le champion (Fleury) et son dauphin (FC 93) ne sont plus là, il faut regarder vers la suite du classement de la saison passée, donc vers le FC Chambly-Oise (3e) et l’US Thionville Lusitanos (4e).

Dans l’Oise, où Stéphane Masala entame une troisième année, on est souvent placé depuis le retour en N2 : deux fois 3e (2023, 2025), une fois 4e (2024). Avec son stade Walter-Luzi, l’un des plus beaux de N2 (4200 places assises), le FCCO espère retrouver au plus vite le niveau qui fut le sien pendant une décennie (7 saisons en National, 2 en Ligue 2).
Trois de ses cadres sont partis en National (Paul Bellon à Dijon, Bilal Mehadji à Paris 13 Atletico, Djibril Diarra à Châteauroux) mais le club a engagé une dizaine de joueurs références en N2 comme le buteur Anthony Petrilli (Paris 13 Atletico), Andrea Marques, le capitaine du voisin Beauvais, Kemo Kenneh (Creteil), Johan Rotsen (FC 93), William Vouama (Marignane Gignac), mais aussi avec une belle expérience en Ligue 2 comme Antoine Valerio, passé par Nîmes et Rodez… Sans parler bien sûr du retour de Thibault Jaques, le capitaine des grandes années National/Ligue 2.

Le manager de Beauvais, Sébastien Piocelle, avec au premier plan Romain Elie, l’un des deux coachs de N2 (avec Jérôme Brocard). Photo Facebook ASBO

Les arguments de Thionville sont du même ordre : certes les Lorrains ont dû lâcher leur meneur de jeu Amine Groune (Sarrebruck, D3 allemande), révélation du dernier exercice, mais ils se sont renforcés notoirement en attaque avec Bryan Labissière (Bourg en Bresse, National), Alexis Gouletquer (12 buts avec Haguenau la saison passée) et Chafik Gourichy, de retour dans le club où il avait marqué 23 buts en N3 lors de la saison 2023-2024.

Encore en Régional 2 en 2021, l’US Thionville Lusitanos surfe en outre sur une impressionnante dynamique.
Le troisième candidat arrive du groupe Ouest : boosté par le soutien de la star Sadio Mané, le Bourges FC ne cache pas ses ambitions malgré une décevante 8e place lors du dernier exercice. Certes, le buteur Gwen Foulon et le milieu Samba Dembele sont partis chez le voisin Châteauroux, mais le coach Romain Revelli peut se satisfaire d’un recrutement ambitieux, avec notamment le gardien Leopold Maître (Blois), Allan Ramos (La Roche Vendée), Enzo Couto (Monaco U23), Adélaïde Hitouss (Mâcon), Paul Mbelek (Creteil) ou Rosario Latouchent (FC 93).

Dans ce groupe, on rentrera tout de suite dans le vif du sujet avec un Chambly-Thionville pour commencer dès samedi puis un Bourges-Chambly une semaine plus tard…

Saint Pryvé Saint Hilaire aura aussi un rôle à jouer s’il renouvelle son très bon début de saison passée, comme Biesheim et Furiani Agliani, valeurs sûres du groupe, à la condition de se montrer plus réguliers.

Ancien pensionnaire de National, le SAS Epinal sort d’une saison ratée (12e) au contraire de l’AS Beauvais-Oise, 6e, mais ensuite reléguée en N3 par la DNCG puis réinstallée en appel, et qui aura sans doute l’équipe la plus jeune du championnat. Le maintien suffira cette saison au club de Sebastien Piocelle, et ce sera aussi le cas pour Haguenau et les trois promus (Borgo, Colmar, Dieppe) même si deux d’entre eux jouaient en National il n’y a pas si longtemps (Borgo, Colmar).

Enfin, Blois continuera de faire avec des moyens limités (et sans Cédric Hengbart, parti sur le banc d’Avranches), tandis que Chantilly, Feignies Aulnoye et Wasquehal semblent mieux armés que la saison dernière. Mais l’exercice du pronostic est aléatoire dans ce groupe vraiment ouvert…

Groupe B : journée 1

Vendredi 15 août, 17h :

  • US Chantilly – SA Épinal

Samedi 16 août, 17h :

  • FCSR Haguenau – Feignies Aulnoye EFC

Samedi 16 août, 18h :

  • FC Borgo – Bourges FC
  • FC Chambly Oise – Thionville Lusitanos
  • Wasquehal Football – Colmar SR
  • Blois Foot 41 – FC Dieppe
  • Biesheim ASC – AS Beauvais Oise
  • Saint Pryvé Saint Hilaire – AS Furiani Agliani

Poule C

Créteil favori, vraiment ?

Le Sporting-club de Toulon, 3e la saison passée, fera-t-il mieux cette saison ? Photo Facebook SC Toulon

D’aucuns diront que c’est la poule la plus relevée de National 2. La plus relevée, même, de l’histoire du championnat. Mais ça, ce sont des idées reçues. Sur le papier, en effet, il y a du beau monde. Des beaux clubs. Mais ce sont toujours un peu les mêmes dans cette poule amputée de son plus fidèle participant en N2, Jura Sud, qui, après 22 ans d’affilée en CFA/N2, a chuté en National 3.

Non, la différence, vraiment, on la trouve dans les compositions des effectifs, avec, il est vrai, beaucoup de noms, beaucoup d’individualités. Et c’est sans doute là où se situe toute la différence avec les deux autres poules : plus de meilleurs joueurs, capables de faire des différences, moins de jeu collectif peut-être. On caricature, bien sûr, mais c’est souvent ce que les techniciens disent. La qualité de jeu (et aussi celle des pelouses) n’est peut-être pas aussi léchée que dans l’ouest, pour ne parler que de cette région, mais les particularités sont nombreuses, comme ce fameux « contexte du sud », mais la légende a dépassé la réputation : plus de duels, plus d’engagement, plus de paroles, plus d’hostilité, plus de rivalité, moins d’accueil, moins de chaleur, c’est vrai, mais ce n’est tout de même plus ce que c’était avant.

L’autre particularité, et pas des moindres, c’est qu’il y a beaucoup de derbys régionaux. Et les derbys, dans le sud, sont « disputés » et engagés, rivalité oblige, et accouchent souvent de matchs nuls. Et à force de faire des matchs nuls, c’est mathématique, vous n’avancez pas.

C’est pour cela que nous avons fait de l’US Créteil le favori du championnat, quand bien même le club phare du Val-de-Marne, qui a pesté contre son déménagement dans la poule sud (un courrier signé avec les deux autres clubs franciliens, Saint-Maur et Bobigny, a été envoyé à la FFF), n’a pas forcément convaincu lors de ses matchs de préparation et devra se coltiner des longs déplacements dignes d’un club de Ligue 2 qu’il était encore il y a 9 ans (Créteil a quitté l’antichambre de la L1 à l’issue de la saison 2015-16).

Il y a 9 ans, Karim Mokeddem, lui, n’était pas encore un coach professionnel (il a depuis passé et obtenu son BEPF en 2019) mais figurait dans cette poule sud de N2 (CFA à l’époque), qui a quand même un peu changé depuis.
Il y a 9 ans, il fut aussi celui qui propulsa Lyon-Duchère en National, au nez et à la barbe du géant grenoblois, avant de jouer, trois années durant, la montée en Ligue 2 (7e, 6e et 5e) sans toucher au Graal. Mokeddem, qui jouit d’une belle réputation en National, mais qui n’a pas encore goûté à la Ligue 2, n’a pas hésité à prendre un nouveau virage et redescendre d’un niveau cet été pour embrasser le projet cristolien, tout comme le manager général Olivier Miannay après 7 ans au Puy, et déjà passé par Créteil. Un projet qui rappelle, à un degré moindre, celui du Paris FC, avec l’arrivée d’un nouvel actionnaire majoritaire, l’une des plus grosses fortunes de France, Xavier Niel (groupe Free).

Voilà pourquoi nous faisons de Créteil le favori… sur le papier. C’est solide défensivement, et sur le plan offensif, avec des noms comme Ben Fredj, Montiel et Benkaïd, il y a du potentiel. Mais pour l’heure, ce ne sont que des noms… qui devront vite se mettre au rythme et au diapason du National 2. Un seul but marqué en match amical, c’est peu. Et la bagarre le week-end dernier en amical contre la N3 d’Aubervilliers (0-2), témoigne peut-être d’une certaine tension, à moins que cela ne soit la pression. Elément de réponse dès vendredi, contre un bon poil à gratter de N2, Rumilly.

Les Haut-Savoyards, emmenés par un jeune coach prometteur, Cédric Rullier, sont dans la continuité de leurs deux dernières saisons en N3 et N2 et présenteront un nouveau tandem en attaque, où Raga et Doumbouya ont été remplacés par Hattab (ex-Besançon, N3) et Mendy (ex-Vire en N3), auteurs de 17 buts chacun en 25 matchs la saison passée. Le stade Duvauchelle de Créteil sera en « free access » (entrée libre), pour reprendre la campagne de communication du club, clin d’oeil évidemment à son propriétaire !

Le GFA Rumilly, poil à gratter de la poule ? Photo Facebook GFA Rumilly74

Et derrière Créteil ? Pfffiou… Pas facile ! Les « spécialistes » avancent le nom de Toulon, voire celui d’Istres. Et disent que Saint-Priest a vraiment bien recruté, et que Fréjus/Saint-Raphaël pourrait faire très mal avec son duo d’attaque Le Bihan (Sedan, Le Havre, Nîmes, Nice, Auxerre, Dijon, Caen, L2 et L1) – Abdeljelil (16 buts en 30 matchs l’an passé en National à Nîmes) et le retour du « taulier » en défense, Dumas, leader sur et en dehors du terrain, revenu de Saint-Priest après huit saisons déjà sous le maillot étoiliste (2015 à 2023). A eux trois, on approche le siècle d’existence mais on gagne surtout en expérience !

Bizarrement, l’AS Cannes, ogre de la poule la saison passée eu égard à son budget XXL (certains ont avancé les chiffres de 5 ou 6 millions d’euros, c’est à dire un budget de première partie de tableau de National), demi-finaliste de la coupe de France en mai, a moins fait parler de lui, même s’il a disputé un match amical bling-bling à Rome, contre… l’AS Roma, club partenaire du fait de son propriétaire commun, Dan Friedkin (défaite 3-0).

L’AS Cannes a pris son temps, inquiété ses supporters (ils étaient près de 8000 à Coubertin contre Reims) et, compte tenu des nombreuses incertitudes administratives des clubs à l’inter-saison, sans doute secrètement un peu espéré être promue en National au titre de 2e meilleur de N2 (derrière Bobigny). Du coup, le club part un peu plus loin sur la ligne de départ cette saison. Ce n’est peut-être pas plus mal. Mais la coupe de France, sil elle a mis en lumière ce club lui aussi historique, a aussi dévoilé quelques talents, on pense évidemment au goaleador Dominguez parti à Dijon (et déjà buteur vendredi dernier), au latéral Fischer parti à Versailles (et déjà passeur vendredi dernier), ou encore à Trinker (titulaire à Châteauroux vendredi dernier en National) et Vinci (Toulon). Mais dans l’ensemble, l’équipe de Damien Ott, l’entraîneur le plus expérimenté de la poule, qui accueille Grégory Coupet dans un staff renforcé au poste d’entraîneur des gardiens en remplacement de l’historique François Lemasson, et aussi Morgan Amalfitano, a conservé son ossature. Doumbouya (Rumilly), le revenant Boussaïd (Le Mans, Avranches) et Corchia, que l’on ne présente pas, sont les principales recrues des Dragons dont l’ambition reste la même : monter dans la future Ligue 3.

A Toulon, « Momo » Sadani disposera d’un arsenal – un pléonasme dans cette ville militaire ! – impressionnant. Des recrues sont arrivées, Soilihi (QRM, Martigues), Vinci (Cannes), Nouri (ex-Châteauroux, Béziers, Saint-Brieuc en National et Ligue 2), Fall (Sparta Prague B), Bouameur (Istres), et récemment Bennedine, un latéral gauche qui pourrait composer n’importe quel effectif de National. En attaque, où Bennekrouf arrive pour épauler Diallo, le meilleur buteur 2024-25, seulement revenu cette semaine du Sénégal (23 buts l’an passé, 50 buts en 108 matchs sous le maillot azur et or), on attendra mieux de Vialla et de Diarra, d’autant que Khaled et le jeune Marius Reymond frappe à la porte. Si la mayonnaise prend… Le problème, c’est que le Sporting, qui rêve de retrouver son lustre d’antant, risque de ne pas disputer son premier match à Bobigny, le club du 93 ayant demandé à la FFF de reporter le match après l’imbroglio Ajaccio.

l’US Saint-Maur Lusitanos, promue en N2. Photo Facebook US St-Maur

Bobigny justement. Le « dindon » de la farce, à l’instar de GOAL FC la saison passée, a menacé de ne pas disputer la saison de N2 s’il n’était pas repêché en National à la place des Corses, exclus mercredi des championnats nationaux. Bobigny, qui clame son droit à un repêchage en National au titre de meilleur 2e de N2, a déposé un référé-suspension devant le Tribunal administratif. Mais il y a des règlements, qui sont ce qu’ils sont : et à la FFF, on ne touche plus au calendrier et à sa compo une fois la date du 17 juillet passée… Mais on imagine que si les Franciliens ont enrôlé un goaleador comme Durbant (Sochaux, Châteauroux, Laval, Sedan), dont le CV siérait à n’importe quel club de l’étage supérieur, ce n’est pas pour déclarer forfait…

La surprise pourrait venir des bords de l’étang de Berre, d’autant qu’avec les « disparitions » de Martigues (de Ligue 2 à R1) et de Marignane-Gignac (de National à R1 en deux saisons après un passage en N2 l’an passé), la place est bonne à prendre : c’est sans doute ce que se dit Istres, longtemps place forte du football professionnel en Provence, dans l’ombre de l’OM. Le club a beaucoup recruté et s’est tourné vers les deux autres poules de National 2, sans oublier la touche « sud » bien entendu : Abergel (Le Puy), Dihad (Jura), Marre (Furiani), Amir (Le Mans, National), Quemard (Locminé), Relange (Blois), Niakaté (Bergerac N2, Orléans National), Gueye (buteur d’Argeles avec 20 pions en 35 matchs de N3), Ben Boina (ex-Consolat, Epinal), Khechmar (Toulon). Il sera donc intéressant de voir comment se comportera ce Istres « new look », qui a fait très bonne impression pendant les matchs amicaux.

Souvent bien placé, jamais gagnant (2e en 2020 et 2022, 3e en 2023 et 2024, 4e en 2025), le RC Grasse de Loïc Chabas, avec une nouvelle direction à sa tête depuis six mois, a changé beaucoup de choses. Quelques cadres sont toujours là (Corain, Medjian, Abt, Ako et le revenant Chatelain) mais il a fallu pallier la quinzaine de départs, et pas des moindres. Or, peu d’arrivées sont à signaler, si ce ne sont celles de Valette, l’ancien gardien de Nancy en Ligue 2 (et aussi Sochaux), mais qui s’est blessé, des attaquants Koné (venu de Belgique) et Bekhechi (Poitiers). Pas sûr que le club de la cité des parfums parviennent à faire aussi bien cette saison.

Faire mieux que la saison passée, c’est ce que visera Andrézieux qui espère garnir aussi un peu plus un magnifique « Envol stadium », sans doute l’un des plus beaux outils de la poule. L’équipe a été complètement remodelé autour du nouveau coach Roland Vieira, qui a joué au club il y a 13 ans quand il terminait sa carrière d’attaquant, juste avant de « construire » le club du Puy sur le banc (2013 à 2023). Avec les arrivées, un peu comme à Istres, de joueurs issus des autres poules ou autres régions – signatures de Ley (Granville), Latour (Granville), Da (Bobigny), Mangonzo (Paris 13), Abdelmoula (FC Rouen), Kashi (Créteil), Lehoux (FC Rouen), ou encore des attaquants Misiak (16 buts en 23 matchs avec Thonon Evian) et Doucet (8 buts en 21 matchs avec Istres) -, le club du président François Clerc a l’air bien armé pour faire une belle saison, du moins bien meilleure que la précédente.

Saint-Priest pourrait être l’une des bonnes surprises de la poule avec un effectif chamboulé et une douzaine d’arrivées, dont les expérimentés Flochon (Boulogne), Chapuis (Marignane), Ephestion (Créteil), Séance (La Roche-sur-Yon) ou encore Goteni (Angoulême), des joueurs qui ont tous déjà évolué plus haut, sans oublier Valtriani (Granville) et Raga, l’ex-buteur de Rumilly.

A Hyères, sans trop de moyens, mais avec de bonnes idées et un coach, Lilian Compan, Hyérois d’adoption, au club depuis 2018, qui effectue un super job, on sera dans la continuité de la saison passée, terminée à la 5e place après avoir dominé le championnat pendant près de six mois : Tressens (Angoulême), Hoguet (Saint-Priest), Hari (Dinan-Léhon) et Moutault (Andrezieux) sont tous arrivés de N2. Mais il faudra confirmer, et c’est parfois ce qu’il y a de plus dur.

Pour Nîmes, qui a repris avec quinze jours de retard sur tout le monde, l’heure est à la reconstruction. Les « crocos » repartent d’une feuille blanche, ont recruté beaucoup de jeunes joueurs et aussi quelques cadres ultra-expérimentés (le gardien Salomone de Créteil, le milieu Orinel de Martigues ou encore l’attaquant nîmois Depres de Rodez). Et pour le repêché GOAL FC, il sera intéressant de voir comment se comportera l’équipe de Pierre-Marie Thimonier, conforté à son poste après quatre mois très concluants la saison passée.

Enfin, pour les trois promus, les Lusitanos de Saint-Maur avec sa recrue phare Ibrahima Seck et un ancien goaleador à sa tête, Helder Esteves; Limonest et Rousset, qui a beaucoup recruté et n’a pas hésité à faire son marché dans les autres poules de National 2, un peu à l’instar d’Istres et Andrézieux (Badji de Beauvais, Leonil d’Andrézieux, Chapelle de Blois, Zerfaoui, GOAL FC, etc.), l’heure est plutôt à la découverte. « On entre dans un nouveau monde » disait même Nordine Assami, le coach de Rousset Sainte-Victoire, après l’accession de N3 en N2 au printemps dernier ! Une nouvelle dimension même pour ces trois clubs.

Groupe C – journée 1

Vendredi 15 août, 19h :

  • AS Saint-Priest – Hyères FC
  • US Créteil – GFA Rumilly Vallières

Samedi 16 août, 17h30 :

  • FC 93 BBG – SC Toulon (?)

Samedi 16 août, 18h :

  • RC Grasse – EFC Fréjus Saint Raphaël
  • Nîmes Olympique – FC Limonest / Saint-Didier
  • GOAL FC – Istres FC
  • FC Rousset Sainte-Victoire – Andrézieux- Bouthéon FC
  • Saint Maur Lusitanos – AS Cannes

 

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