Des trois clubs promus en National, seul le FC Fleury 91 n’a jamais connu cet échelon, qui sera amené à être remplacé par une Ligue 3 en 2026. Pour Le Puy Foot et le Stade Briochin, descendus ensemble en N2 en 2023, victimes de la réforme, ce retour s’accompagne de belles promesses.

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Photos 13HF (sauf mentions spéciales)

C’est comme si les trois clubs s’étaient donné le mot. Comme s’ils avaient décidé de la date et de l’heure de la célébration. Celle de l’accession en National. Rendez-vous samedi 3 mai à 20 heures ! Pour le FC Fleury 91, la montée était tout de même un peu plus attendue que pour Le Puy Foot 43 et le Stade Briochin, les trois heureux élus pour le National 2025-2026. Avec 9 points d’avance sur son dauphin, le FC 93 Bobigny, et encore 9 points à distribuer, il ne fallait pas être un grand mathématicien pour comprendre que ça allait le faire pour les joueurs de David Vignes, impressionnants de régularité tout au long de la saison. On fait le point sur les trois promus en National !

Fleury au paradis !

Samedi soir, à Fleury, dans le petit stade Walter-Felder, champêtre et convivial, un peu plus d’un millier de supporters s’étaient rassemblés, dans la tribune et autour de la main courante, pour assister au sacre tant attendu des joueurs de Pascal Bovis, l’emblématique président du club.

À défaut de gâteau (le spectacle et la victoire), ils ont eu la cerise (l’accession) ! Les coéquipiers de Clément Badin sont passés au travers de leur match, perdu 2-1 face à Feignies-Aulnoye, mais le résultat est ailleurs : la défaite de Bobigny à Beauvais (3-2) a suffi au bonheur de tout un peuple rouge et noir, les couleurs préférés du président, fan du Milan AC et de l’OGC Nice.

David Vignes, 7 ans après !

David Vignes, le coach, va retrouver le National, qu’il avait quitté à Pau en 2018. Photo FCF91

Après une poignée de main un peu tendue avec Krzysztof Ziecik, son homologue de Feignies, David Vignes, le coach de Fleury, a ensuite fait comme tout le monde : il est resté debout, devant son banc de touche, encore un peu agacé par la défaite. Et puis il a suivi l’évolution du score à Beauvais. « Ils ne vont quand même pas marquer deux buts à la 96e et la 98e » a lancé un supporter au sujet de Bobigny, qui venait juste de réduire la marque à la 90e (3-2).

Et puis, la nouvelle est tombée. Beauvais a battu « Boboche ». Et David Vignes a étreint son staff, enlacé ses joueurs et son président. Il a savouré son bonheur. Et mesuré le chemin parcouru. Automatiquement reconduit en cas de montée, Vignes le Bayonnais (c’est sans doute pour cela que l’on a eu droit à l’hymne de l’Aviron Bayonnais pendant l’échauffement avant le match !), mais Palois d’adoption, va donc retrouver ce championnat National qu’il avait déjà connu deux fois avec son club de coeur, le Pau FC, à la fin des années 2000 et dans les années 2010.

Son dernier passage à ce niveau, lors de la saison 2017-2018, deux ans après avoir fait remonter le club, reste un souvenir douloureux. A l’époque, malgré l’assurance de son président, Bernard Laporte-Frey, de repartir pour un tour, ce dernier avait finalement changé d’avis. Et décidé de ne pas conserver l’enfant du club. Une cicatrice jamais vraiment refermée même si le temps a fait son oeuvre, et que d’autres clubs ont depuis garni son CV, Bergerac (N2), Bruges (D1 Belge, adjoint) et Mandel United (N1 Belge). Rien n’a jamais été simple pour ce tacticien qui entend croquer à fond dans le National l’an prochain, le dernier sous son format actuel avant le lancement de la Ligue 3 en 2026.

Bovis : « Je préfère le scénario de cette saison ! »

Pascal Bovis, un président discret et heureux.

Croquer dans la pomme, Pascal Bovis, le président, entend lui aussi le faire, mais pas seulement : « On ne monte pas pour redescendre dans un an, prévient-il. » Pour ce chef d’entreprise passionné, respecté et écouté, l’attente a également pu sembler longue – l’accession est passée sous le nez lors des trois dernières saisons – mais elle n’est rien à côté des 36 années de présidence au club : « On n’est pas monté l’an passé mais en même temps, c’est peut-être mieux de ne pas arriver comme ça, en National… Je préfère sincèrement le scénario de cette saison. »

Casquette visée sur le crâne et t-shirt à l’effigie du club, Pascal Bovis est resté un long moment sur la pelouse, un peu en retrait, au milieu de la foule, comme pour mieux savourer cet instant magique. L’homme, discret, n’est pas du genre à se mettre en avant. Puis il a été sommé par le speaker de monter sur le podium pour rejoindre les joueurs et le staff, alors il s’est exécuté.

Aujourd’hui, le patron du groupe éponyme, une boîte familiale fondée par son père en 1977, spécialisée dans les transferts et déménagements industriels ainsi que la manutention lourde, mesure le chemin parcouru. Son club entre dans le grand monde : « Quand je suis arrivé, le club était au plus bas niveau. En 4e division de District. Et à l’époque, il y avait aussi la Promotion de 3e division, puis la 3e division de District, puis le Promotion de 2e division, etc ! Cela doit faire 15 montées je crois ! On a une histoire qui ressemble un peu à celle de Chambly ». Elle lui ressemble tellement d’ailleurs que même le petit stade Felder, au complexe sportif Auguste-Gentelet, ressemble à l’ancien stade des Marais du FCCO (en un peu mieux !), celui qui a laissé place au nouveau (et très envié) stade Walter-Luzi.

Au stade Bobin, à Bondoufle, l’an prochain ?

Le Stade Walter-Felder était bien rempli pour le match de la montée.

Bien sûr, il reste encore deux journées de championnat (à Bobigny le 10 mai et contre Haguenau le 17 mai) pour décrocher le titre de champion de N2, mais les dirigeants peuvent déjà se pencher sur le prochain exercice qui n’aura rien à voir tant le fossé est énorme entre le National (10 clubs professionnels sur 17 cette saison) et le National 2.

Et les chantiers sont nombreux, on pense au budget – « On aura le plus petit budget de National » et au stade : « Les dirigeants résonnent dans le temps long, les joueurs, eux, sont dans le présent, et c’est normal, poursuit Bovis, qui avoue n’avoir jamais douté cette saison, « hormis aujourd’hui (samedi face à Feignies). Même quand on a perdu contre Bobigny chez nous en janvier, je n’étais pas inquiet, parce que ce match-là, on méritait de le gagner. Bobigny, c’est costaud aussi, mais on avait un effectif peut-être plus important, et peut-être plus de sérénité aussi. On a été très réguliers ».

La mascotte du FC Fleury 91.

Quid du stade Felder ? Bovis : « Là, en National, on rentre dans la cour des grands, ça n’a plus rien à voir. On va affronter des clubs qui, pour certains, ont des stades de Ligue 1 ou de Ligue 2, avec un public, une organisation autour, une structure, des infrastructures… Donc il faut aller vite, il faut qu’on s’y mette aussi ! Le challenge sera compliqué, mais la finalité, pour nous, c’est d’être en Ligue 3 dans un an. Pour le stade, on va discuter, rien n’est défini. Normalement, la saison prochaine, on jouera au stade Bobin, à Bondoufle, comme les filles (D1 Arkema), dans une enceinte de 17 00 places. Quand on affronte Sochaux ou d’autres équipes de ce standing, je pense qu’il est préférable de les recevoir dans ce type de stade. Et puis je n’ai pas envie que l’on soit trimballé à gauche et à droite. Ici, à Felder, c’est très familial, très convivial, mais ce n’est pas du niveau du National d’aujourd’hui, et ça, tout le monde en a bien conscience, le maire en premier lieu. On est un peu comme Chambly à l’époque, sauf que pour eux, le nouveau stade est arrivé trop tard. Fleury est un club bien organisé, structuré, avec des féminines en D1 Arkema, donc on a déjà une certaine expérience du haut niveau. Simplement, maintenant, il faut regarder les infrastructures. »

« Grand Paris Sports », nouvelle appellation ?

Dans les vestiaires, avec les joueurs, le président et le coach.

Autre sujet à l’étude, le nom du club, qui pourrait changer. « Il va falloir en discuter. Soit on va vers le Département et à terme, on devient le « Grand Paris Sports », soit la ville met les moyens… Mon idée, c’est de pérenniser le club au delà de ma simple personne. Pour perdurer, il lui faut de l’immobilier, c’est la base, il faut que l’on travaille là-dessus sur les trois prochaines années, cela va au-delà du sportif. Il faut un hôtel à côté du stade par exemple. Et puis, je n’oublie pas que l’on a beaucoup de jeunes qui sortent de chez nous : contre Feignies, c’est Kyliane Dong (Troyes), un jeune de chez nous, qui a donné le coup d’envoi : il va partir au FC Augsbourg en Bundesliga et on n’a même pas touché 5000 euros pour ce gamin, ce n’est pas normal. »

« Avant, on était les Prisonniers »

Pascal Bovis ne boude pas non plus son plaisir de voir l’image de son club transformée : « Il faut garder notre esprit de famille. On a quand même réussi un sacré tour de force, parce que je n’oublie pas que quand on jouait dans les petites divisions, on était « les prisonniers » (en référence à la prison de Fleuy-Mérogis). On a « changé » le nom de la ville et là, on lui a donné une image et une connotation positives, ainsi qu’à l’agglo, et ça, ça vaut cher quand même. Ici, c’est avec la sueur que tout a été fait. Tout a été construit à la force du poignet, à l’image des locaux derrière le stade Felder (il nous montre le club house et les bureaux administratifs, à côté du terrain d’entraînement des féminines). On n’est pas un club de vedettes, contrairement à ce que l’on pense. » Pourtant, le FC Fleury 91 traîne aussi cette image de club « qui a les moyens » : « On met les moyens comme il faut, il ne faut pas oublier qu’on a les filles en D1, rectifie Bovis ».

Salah Madjoub : « C’est quand ça devient dur que les durs se mettent à jouer »

Sur le plan sportif, le FC Fleury a fait preuve d’une grande régularité tout au long de la saison : aucune défaite jusqu’à la trêve de Noël, une seule défaite en déplacement, à Feignies-Aulnoye, bête noire des Floriacumois (défaite à l’aller et au retour), une solidité reconnue, notamment en défense, que même les 4 buts encaissés lors des deux derniers matchs ne peuvent effacer (3e meilleure défense des trois poules), un bilan de 59 points en 28 matchs (meilleur total des trois poules avec Le Puy Foot), bref, c’était, de l’avis de tous, l’année ou jamais pour Fleury !

Salah Madjoub, le conseiller auprès du président, et Enzo Bovis, l’un des joueurs du FC Fleury.

Pour Salah Madjoub, arrivé l’été dernier comme « conseiller auprès du président », passé par … Chambly, la montée en National est « un aboutissement » : « Je suis vraiment content pour Pascal Bovis. Cela fait tellement longtemps que le président se bat pour atteindre le troisième niveau national… C’est important pour lui et pour le club qui continue de grandir, de se construire, témoigne celui qui avait déjà passé 6 ans au club entre 2011 et 2017 – « J’étais entraîneur adjoint, on avait notamment fait la montée de N3 en N2 avec le coach Bernard Bouger » – et qui connaissait forcément très bien le contexte. « Le staff et les joueurs ont fait un boulot extraordinaire. Maintenant, c’est quand ça devient dur que les durs se mettent à jouer (sourire) ! Voilà, on sait que le National, ce n’est pas la même chose : à nous de nous mettre au niveau et de faire en sorte que ça marche. On sera prêt, surtout quand on a un capitaine d’industrie comme on a avec Pascal Bovis, je n’ai pas de doute. »

L’expérience du Stade Briochin

Visuel Stade Briochin

Pour le Stade Briochin, l’accession était moins attendue : l’US Saint-Malo avait caracolé en tête de son championnat jusqu’à Noël avant que les Girondins de Bordeaux ne montrent les crocs en début d’année. Et puis… Les Griffons, revenus de nulle part, enfin, pas tout à fait quand même, ont su surfer sur leur campagne de coupe de France (éliminés en 1/4 de finale face au PSG), dans un stade Fred-Aubert à moitié rénové mais sur une pelouse en mauvais état. Ils ont aligné 11 succès de rang (mieux que Le Puy Foot et ses 10 succès de rang !), série en cours. Qui pouvait suivre ce rythme infernal ? Tout simplement personne. « On a performé en première partie de saison, il faudra sur-performer lors de la deuxième partie » avait prédit ici même, à Noël, Gwen Corbin, le coach de Saint-Malo.

Fleury, un exemple pour Saint-Malo

Guilaume Allanou va rempiler sur le banc du Stade Briochin. Photo Stade Briochin

Mais c’est Saint-Brieuc, avec son président – entraîneur – directeur sportif – partenaire – chef d’entreprise (et accessoirement père de famille !), Guillaume Allanou, et son équipe sereine, très expérimentée, notamment derrière (L’Hostis, Angoua, Kerbrat, Le Marer, Diakhité, Boudin), qui a sur-performé et profité d’une fragilité soudaine et, peut-être, d’une inexpérience côté malouin. Et aussi de la chute vertigineuse des Girondins où, il faut le reconnaître, il fallait être sacrément costauds pour supporter la pression et faire fi de tous les soucis extras-sportifs.

Bien sûr, Les Herbiers, La Roche-sur-Yon et Bourges ont animé cette deuxième partie de saison mais ils partaient de trop loin. Après avoir annoncé en cours de saison son retrait, Guillaume Allanou, récemment admis au BEPF pour l’année 2025-2026, va finalement rempiler. Ce qui ne sera pas le cas de Christophe Kerbrat (38 ans), absent depuis le match de coupe face au PSG (hernie discale) : l’emblématique défenseur met un terme à sa riche carrière.

Aujourd’hui, on se met à la place de l’US Saint-Malo : en Ile-et-Vilaine, la déception doit être à la hauteur des immenses espoirs de montée suscités par cette première partie de saison parfaite. Mais l’USSM peut s’inspirer de l’exemple de Fleury, 1er ex aequo en 2024 (mais devancé au goal average direct pour la montée par Paris 13 Atlético), 1er ex aequo en 2023 (devancé au goal average direct par Epinal) et 2e en 2022. Tout vient donc à point…

Le Puy éteint Cannes

La joie des Ponots après leur victoire à GOAL FC samedi dernier, qui les propulse en National. Photo Sébastien Ricou / LPF 43

Pour Le Puy Foot, alors là… Chapeau ! Sans doute plombé la saison passée par leur campagne de coupe de France (1/4 de finaliste face à Rennes) et finalement devancé sur le fil par Aubagne dans la course à la montée, le club du président Christophe Gauthier, quand bien même il a dû repartir d’une page au 3/4 blanche durant l’été, avec un effectif très rajeuni, est resté fidèle à ses principes de jeu – et là il faut saluer le travail du coach Stéphane Dief – et sur ses idées de recrutement. Et là, en matière de recrutement, le mérite en revient à Olivier Miannay, dont l’énorme réseau en National, en N2 et même en N3, a encore servi les intérêts du club.

Stéphane Dief – Olivier Miannay, les artisans

Stéphane Dief. Photo Sébastien Ricou / LPF43

Le chef étoilé, qui a déjà vécu deux accessions en National avec Le Puy sous l’ère Roland Vieira (2019 et 2022), connaît la recette. Les ingrédients ? Un peu d’expérience (Lebeau, Ben Fredj), du flair, le tout agrémenté de joueurs dénichés à l’étage du dessous – Adinany (Raon-l’Etape) l’an passé, Ghemo (Agde), Sakho (réserve de Montpellier) cette saison – ou dans des clubs un peu moins « réputés » de N2, venus se faire un nom en Haute-Loire (Adelaïde de Jura Sud), Diebold de Haguenau, Soualhia d’Avoine, Bouleghcha de Wasquehal, etc.).

Et c’est au plus fort de la tempête, quand il y a eu ce nom-match en 16e de finale de la coupe de France à Dives-Cabourg (élimination 1 à 0), cette grave blessure de l’avant-centre Marvin Adelaïde (compensé en partie par le retour de Mohamed Ben Fredj) et le départ à Montpellier de Nicolas Pays, que les Ponots se sont recentrés sur l’essentiel : le groupe, l’objectif et le jeu. Onze victoires (dont dix d’affilée) et un nul ont fini de mettre tout le monde d’accord, même l’AS Cannes, son plus gros concurrent, dont le creux du mois de mars (deux défaites consécutives à Hyères et contre Angoulême) a été fatal.
Les Cannois, partis d’un peu loin cette saison, auront de plus grandes ambitions encore la saison prochaine mais risquent de ne pas être les seuls si les rumeurs de l’arrivée des Girondins de Bordeaux dans leur poule se confirme, sous réserve bien sûr du passage devant la DNCG. L’été pourrait bien réserver quelques quelques surprises.

  • Texte : Anthony BOYER / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
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Le président du DFCO – depuis juillet 2024 – est un personnage atypique, qui entend faire passer ses idées, atteindre ses objectifs économiques et sportifs, et réaliser ses rêves. Il veut aussi que le stade Gaston-Gérard soit un lieu de cohésion sociale où l’on vient vivre des émotions.

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos Vincent POYER – DFCO (sauf mentions spéciales)

Pierre-Henri DEBALLON

Deux heures trente. C’est le temps passé par Pierre-Henri Deballon, le président de Dijon, dans l’émission du Dijon show, le médias des supporters du DFCO, la veille au soir de notre interview en visio ! Parfait pour peaufiner nos questions !

Tout l’enjeu de cet entretien chez nous avec le chef d’entreprise de 42 ans (il les a fêtés le 15 avril), propriétaire du club depuis le 2 juillet dernier, était donc de ne pas lui faire redire la même chose !

Volontairement, nous ne sommes pas allés sur des terrains que « PHDB » a cent fois évoqués : le plan d’austérité avec le licenciement économique de 50 % du personnel administratif, le rachat du centre de formation (par Dijon Métropole) et son avenir, les féminines, les finances (18 millions d’euros de dettes à son arrivée et une perte sèche de 7 millions par saison), la vente de Cyriaque Irié (Troyes) et Rayane Messi l’été dernier (Strasbourg) pour 5 millions s’il vous plaît, la baisse de la masse salariale (de 2 millions à 1,3), tout ça a déjà été dit et écrit. Nous avons préféré l’emmener sur d’autres terrains. Comme ceux de handball par exemple. Le sport qu’il a pratiqué (au poste de gardien), jusqu’en Pro Ligue (D2) à Villepinte.

Encore en course pour les barrages

Pierre-Henri DEBALLON

Pour sa première année de présidence à Dijon, le cofondateur de Weezevent, une start-up internationale lancée en avril 2008 (avec Sébastien Tonglet) – Weezevent est spécialisée dans la billetterie informatisée et destinée aux organisateurs d’événements – , a été gâté.

À vrai dire, c’est même lui qui, parfois, au détour d’une réponse, s’est aventuré sur ces chemins plus tortueux, avec, toujours en toile de fond, les finances et la réalité économique. Car le but était avant tout de faire découvrir un nouveau personnage central de ce championnat National où les têtes pensantes passent, mais où les problématiques restent.

Pendant près d’une heure, quatre jours après la qualification historique des jeunes dijonnais en finale de  la coupe Gambardella, Pierre Henri Deballon, souriant, décontracté, bavard et ouvert, s’est livré.

Le lendemain, le DFCO a remporté le derby à Sochaux (2-1). Une victoire qui, à trois journées de la fin, permet à Dijon de revenir à 6 longueurs de la 3e place, celle de barragiste pour l’accession en Ligue 2, occupée par l’US Boulogne Côte d’Opale.

L’espoir de disputer une confrontation aller-retour contre le 18e de Ligue 2 BKT (Martigues ou Clermont) est bien réel. Mais cette éventualité ne sera possible que si les joueurs de Baptiste Ridira s’imposent chez la lanterne rouge, Châteauroux, ce vendredi, et, surtout, s’ils battent Boulogne à Gaston-Gérard le 9 mai, avant, pourquoi pas, de disputer une « finale » à distance lors de la dernière journée, à Bourg-en-Bresse, le 16 mai !

Ce scénario fou fait rêver, bien sûr. Ça tombe bien, le rêve et les émotions, c’est vraiment ce qui anime Pierre-Henre Deballon.

Interview : « C’est ma madeleine de Proust ! »

Paul FAUVEL (DG), Baptiste RIDIRA (entraîneur de l’équipe de National) et Pierre-Henri DEBALLON lors du match Le Mans – DFCO

C’est rare qu’un président se livre autant, pendant 2h30, avec autant de franchise et de transparence, comme vous l’avez fait dans Le Dijon Show… C’était un besoin, une volonté, une nécessité d’éclaircir certaines choses ?
Il y a de tout cela. C’est mon caractère d’être très honnête. J’aime dire les choses. Et ça m’a fait du bien de le dire. C’est aussi une chance qu’on vous donne du temps pour vous exprimer et quand c’est le cas, généralement, je ne fais pas de langue de bois. La transparence permet de comprendre d’où je pars dans ma réflexion, où je veux aller et comment je veux faire les choses.

Avec Weezevent, j’ai la même approche : quand j’étais interviewé, je donnais mes chiffres, et les gens me disaient, « Mais pourquoi tu dévoiles tout ? ». Pareil quand quelqu’un a une idée, il n’ose pas me le dire, parce qu’il a peur que je lui pique, mais j’ai envie de lui dire, « Attendez, je ne vais rien vous piquer, je suis suffisamment occuper comme ça ! ». Et quand bien même je lui piquerais l’idée, ce n’est pas ça qui est important mais sa mise en oeuvre.

Pendant l’émission du Dijon show, j’ai fait des constats de situations : je serai jugé sur ma capacité à les résoudre et à en faire des forces. Alors oui, il y avait une partie de thérapie un peu, parce que ça m’a permis de dire que je ne trouvais pas juste certains jugements, comme sur les féminines. Certains sont toujours dans le négativisme. Parfois c’est dur. Il y a même des commentaires qui sont de nature complotistes, mais pas complotistes comme on l’entend. Tout le monde a son avis. J’aimerais que les gens prennent un peu de hauteur.

« On est un beau club formateur »

La joie d’Alexandre PARSEMAIN lors de DFCO-Villefranche en National.

Votre meilleur souvenir depuis que vous êtes à la tête du club, c’est lequel ?
La qualification en finale de la Gambardella de nos jeunes (le 20 avril dernier).

C’est vrai que c’est une vitrine exceptionnelle pour le DFCO, une belle mise en valeur du travail de formation…
Complètement. On voit tout le boulot qui a été fait par tous les éducateurs avant mon arrivée et depuis mon arrivée. Moi, je surfe sur ce qui a été fait; ça envoie beaucoup de positivité dans le club et ça montre qu’on est un beau club formateur : d’ailleurs, beaucoup de joueurs en sont sortis récemment, je pense à Cyriaque Irié qui va signer en Allemagne (à Fribourg), Jules Stawiecki, parti à Monaco, qui est un gardien extrêmement prometteur, Rayane Messi à Strasbourg, c’est une excellente pub pour notre formation dijonnaise.

La joie après DFCO Villefranche

Il faut dire aussi qu’on a un outil de travail assez extraordinaire, avec sans doute un des plus beaux centre d’entraînement en France en termes d’équipements, d’infrastructures, de qualités des prestations; tout ça, ce sont des investissements lourds, qui pèsent encore beaucoup aujourd’hui sur les comptes du club mais on en voit les résultats, ça paie.

Être en finale de la coupe Gambardella, cela veut dire quelque chose. C’est une catégorie particulière parce que c’est le « mix » de deux équipes. Et puis j’ai noté une belle entente entre nos formateurs : on a promu un entraîneur adjoint (Mario Savarino, habituel adjoint de Sébastien Perrin en U19 Nationaux) à la tête de cette Gambardella, pour cette campagne exceptionnelle, et j’ai vu contre Nantes en demi-finale un vrai potentiel, avec des joueurs suivis par d’autres clubs. Pour certains, on travaille avec eux sur des projets sportifs, qui peuvent déboucher sur des réussites économiques, en connexion avec l’équipe première, dont on attendra beaucoup l’an prochain, parce qu’on a un enjeu économique pour monter.

Cette demi-finale de Gambardella, vous avez bien failli la perdre…
Oui, j’ai cru ça, parce que Nantes a eu le penalty de la qualification au bout du pied, et puis c’est la magie du football, il rate son tir, on marque le nôtre et on fait un arrêt… C’était un moment émouvant parce que ça fait un an, un an et demi même, que je bosse énormément sur le projet DFCO, déjà avant le rachat, et je le fais pour me créer des émotions et pour en créer aux autres. Là, on a eu les émotions les plus fortes. C’était un petit pincement de bonheur au coeur !

« Mais qu’est-ce que je fous là ? »

Pierre-Henri DEBALLON lors de sa présentation à la presse

Vous avez parlé d’émotion : c’est vraiment votre plus belle depuis votre arrivée ?
Oui, c’était un moment fort, parce qu’il y a eu beaucoup de moments difficiles. Je le répète souvent, mais quand je suis arrivé au DFCO, le président du Mans, Thierry Gomez, m’a dit « Bienvenue chez les fous ! », il ne s’est pas trompé. Un président est exposé. Tout ce qu’il fait est jugé. C’est ça qui est difficile aussi. Alors que les gens n’ont pas forcément les tenants et les aboutissants. On fait de gros sacrifices personnels, vie de famille, copains, l’argent investi…

J’aurais pu acheter une villa secondaire pour profiter de la Corse ou de la beauté de Nice (sourires), alors quand en plus de ça, vous recevez des critiques acerbes, dont certaines sont parfois justifiées, parce que des choix n’ont pas été bons, eh bien par moments, on se pose la question, « Mais qu’est-ce que je fous là ? ». Et puis, il y a des moments comme ça, où ça gagne, comme là, en Gambardella.

On a aussi besoin d’envoyer des signaux aux partenaires. Nos filles se sont qualifiées pour les play-off de la D1 Arkema, c’est formidable. Alors, bien sûr, cela aurait été parfait si on avait vraiment été dans le wagon de la montée avec l’équipe de National, on l’est quand même encore un tout petit peu, on va jouer notre chance crânement, mais on sait que ce sera complexe.

« Mon avis de footix est le suivant… »

Vous qui avez joué au handball, l’émotion était-elle différente ?
J’ai joué en Pro Ligue (Division 2), à Villepinte. Ma semaine était rythmée par les entraînements avec cette adrénaline qui monte crescendo jusqu’au match…

Très honnêtement, d’avoir retrouvé un vestiaire, même si je ne suis pas joueur mais un tout petit acteur, d’écouter les discours du coach, de voir les joueurs se préparer, d’être dans cette ambiance, c’est ma madeleine de Proust que je suis venu m’acheter. C’est un plaisir que je trouve agréable, j’ai le sentiment de faire partie d’un collectif.

On dit que les gardiens sont … différents, fous, originaux, qu’ils ont ce côté kamikaze. Vous confirmez ?
Il y a un vrai lien. Il y a une congrégation des gardiens de buts au handball. On a du respect entre nous. Effectivement, on est un peu à part et on se considère comme tel. Je fais souvent ce parallèle avec l’entreprise : le chef d’entreprise et le gardien de but, c’est un peu pareil, parce que vous êtes dans un collectif, vous êtes un maillon essentiel, vous ne pouvez pas vous cacher et en même temps, vous êtes très seul. Le chef d’entreprise a beaucoup de responsabilités. Quand vos équipes ont envie de faire la fête, vous n’êtes pas invité et c’est bien normal, donc il y a cette forme d’isolement, parce que vous ne pouvez pas non plus être leur copain. Vous êtes un élément à part.

Le gardien de but, c’est pareil. Il y a cette notion de courage, d’exposition. Vous ne pouvez pas vous cacher, et au handball encore moins parce que vous avez des tirs toutes les deux minutes. Le jour où vous n’êtes pas en forme, c’est plus dur que pour un joueur de champ qui va peut-être faire moins d’efforts, moins tirer, moins prendre de risques, jouer plus la sécurité. Pour la petite histoire, Baptiste Ridira, notre coach de National, est un ancien gardien de but, et Paul Fauvel, notre directeur général, est aussi un ancien gardien de but. Ce trident que l’on a constitué à Dijon est uni par ça aussi, même si eux, c’était le foot. On dit souvent du gardien qu’il est fou, mais au fond, je pense que l’on se fait moins mal en étant gardien de but de handball que joueur de rugby dans certaines situations. D’ailleurs si vous mettez un joueur de rugby dans une cage de hand, il aura une peur bleue, et inversement si vous me mettez sur un terrain de rugby, j’aurai une peur bleue.

Du coup, vous avez un avis sur le poste de gardien au foot ? D’ailleurs, donnez-vous votre avis sur l’équipe, au coach par exemple ?
Le poste de gardien de but est un poste que j’affectionne particulièrement, alors oui, je me permets d’avoir des avis dessus. J’ai aussi des avis sur tous les autres postes, mais je le dis tout le temps en disant « Mon avis de « footix » est le suivant »… Parce que je n’ai aucune prétention sur mes connaissance footballistiques, ni l’expertise suffisante pour juger de la technicité du gardien de foot.

En revanche, il y a quelques chose d’assez commun avec le gardien de hand, c’est sa psychologie, ce qu’il dégage. Récemment, on parlait de notre gardien de la Gambardella, Ilan Marie-Rose, avec Franck Raviot, l’entraîneur des gardiens des équipes de France de foot : il trouvait qu’il dégageait quelque chose, qu’il apportait dans le jeu. Il était assez élogieux sur la « présence » qu’avait eu Ilan pour l’équipe. Bien sûr, dit comme ça, cela veut tout dire et rien dire, mais quand on est gardien, on sait ce que cela veut dire. Ce côté kamikaze, d’aller au devant du danger, on le retrouve aussi au foot.

« J’ai un regard plus pertinent sur les gardiens »

Existe-t-il un parallèle « technique » entre gardien de but au hand et au foot ?
Un petit peu. Sur les parades de près surtout. Au foot, on fait beaucoup d’arrêts avec les mains, et sur les parades de près, un peu plus avec les jambes, en utilisant l’extension, la souplesse, en comblant les angles, comme au hand. Des gardiens de foot pourraient faire de bons gardiens de hand, et inversement. J’ai fait un peu d' »urban », avec des cages de hand, donc c’est plus facile, mais j’avais les réflexes, la capacité à me concentrer, à deviner les trajectoires, à anticiper, à boucher l’angle, à aller au devant du ballon, on retrouve les mêmes bases.

Baptiste RIDIRA lors de Rouen DFCO

Quand vous regardez du foot, en particulier les matchs du DFCO, votre attention est-elle plus focalisée sur le gardien que sur les dix autres joueurs ?
Je regarde les 11 mais effectivement j’ai un regard plus pertinent sur les gardiens. Par exemple, récemment, on a reçu Villefranche (2-0), et en National, on n’a rarement un deuxième gardien sur le banc. Là, le gardien adverse se blesse sur une action. Il boîte bas. J’ai dit après coup aux joueurs, « Quand c’est comme ça, faites des tirs de loin ». J’ai en tête ce but encaissé par Hugo Lloris en finale de l’Euro contre le Portugal, eh bien juste avant, il se blesse. Il n’a pas les mêmes appuis. Et peut-être que cette frappe, même si elle est bien cadrée, même si elle part fort, avec un Lloris dans de meilleures conditions, elle ne passe jamais.

J’ai été étonné qu’on ne teste pas plus la frappe de loin contre Villefranche, de la même manière que je suis étonné qu’on ne la teste pas plus en début de match, parce que regardez bien la toute première prise de balle du gardien, que cela soit au pied ou à la main, elle le rassure, et petit à petit, son niveau de confiance va monter au fil du match. Mais tant qu’il n’y a pas eu cette première prise, il ne sait pas s’il est dans un grand jour ou un mauvais jour. Il faut profiter de ça. Ce sont des petites astuces. Pareil sur un penalty : là, vous avez zéro pression, sauf si c’est un penalty qui vous fait perdre la finale de la Gambardella ! Mais sinon, vous avez zéro pression. C’est très psychologique. Au handball, ça l’est peut-être encore plus, car il y a beaucoup de tirs. L’emprise peut se faire encore plus. Ilan (Marie-Rose), en demi-finale, fait deux arrêts sur sa ligne, et puis il y a un de ses coéquipiers qui vient enlever un ballon sur sa ligne, là, dans ma tête, je me suis dit « Tiens, Nantes a raté le coche, c’est un signe ».

Vous regardiez vos statistiques quand vous étiez gardien de handball ?
Bien sûr ! J’étais un obsédé de statistiques. Mais il y en avait moins à l’époque, c’était plutôt moi qui me faisais mes propres « stats ». Après les matchs, je faisais des fiches sur les joueurs adverses pour me souvenir de la manière dont ils tiraient, leurs courses, comment ils se positionnaient, l’endroit où ils tiraient leur penaltys, etc. Parfois, j’étais content de ma prestation alors que mon équipe avait perdu, ce qui n’est pas toujours très sain, et à l’inverse, on pouvait avoir gagné un match et être déçu de sa prestation individuelle.

Une séance de tirs au but au foot, pour vous, ce n’est donc absolument pas de la loterie…
C’est beaucoup de psychologie.

« Je passais pour le grand méchant loup »

Avec Laurent WEBER, entraineur des gardiens de la Gambardella.

Pire souvenir depuis votre prise de présidence ?
Quand j’ai donné un interview dans Les Échos et que j’ai évoqué la situation du club. Ce qu’il en est ressorti, c’est « Le président veut arrêter l’équipe féminine », j’ai trouvé ça dur. J’avais eu l’honnêteté d’évoquer toutes les pistes, celles-là en était une, mais elle était infinitésimale, parce que ce n’est pas du tout le scénario vers lequel je m’oriente. C’est la dernière des solutions. C’est comme quand un médecin a essayé tous les traitements et décide d’amputer. Non. Cela avait été désagréable.

Il y avait aussi le sujet de la formation…
Oui, se posait la question aussi de la formation, il y avait une grosse pression politique. La Métropole venait de racheter les bâtiments du centre de formation et se disait « Non mais attendez, on a racheté le bâtiment, et ils veulent arrêter la formation, ils vont arrêter les féminines… », et comme je venais de faire des licenciements économiques, je passais pour le grand méchant loup. Ce que je faisais, ce n’était pas rigolo, mais je suis convaincu encore aujourd’hui que c’était la seule et unique voie de salut pour permettre au club de retrouver une forme de sérénité économique, essentielle pour bien travailler et se projeter dans l’avenir.

« J’ai envie de regarder les matchs debout ! »

Quel autre club que le DFCO rêveriez-vous de présider ?
(Rires) Les clubs que j’aime, ce sont ceux qui ont des communautés de supporters extraordinaires. L’OM, Lens, le Red Star, Liverpool, on sent que cela va au-delà du sport, que c’est une religion. C’est pour ça que je souhaite créer au DFCO un supportérisme actif.

C’est vrai que, pour être venu à Dijon cette saison, j’avais trouvé le public…
Vous étiez là pour quel match ?

Dijon-Bourg-en-Bresse, premier match à domicile !
(Rires) Ah oui ! On avait mal commencé (0-1) ! Allez, au bout de quinze minutes de présidence, carton rouge !

Photo 13HF

Le stade est magnifique, à taille humaine, mais le public un peu … « plan-plan », l’ambiance feutrée, bon enfant…
Très plan-plan. On le sait. On est d’accord. Ça ne pue pas encore le foot. Dijon est une ville bourgeoise, très belle. Elle a des difficultés économiques comme toutes, mais elle ne transpire pas la souffrance, quand bien même le travail des vignes est un travail difficile. Peut-être qu’il manque un peu ce côté ouvrier. Le foot n’a pas été le premier sport à Dijon, où c’est plutôt le handball et le basket. Il faut arriver à créer ça et c’est tout l’enjeu, mais cela ne se décrète pas, on n’achète pas une grosse ambiance. Mais on veut la constituer.

L’an prochain, pour faire venir de jeunes supporters, on mettra en place une tribune « famille ». J’essaie d’être dans un dialogue le plus souvent possible avec nos groupes d’Ultras, parce que ce sont eux qui mettent l’ambiance, la passion et la ferveur, parfois, il faut aussi les recadrer car ils font des choses que je n’aime pas. Et je leur dis. Je me souviens que, pour ma première victoire de président, contre Paris 13 Atlético (journée 4), on menait 2 à 0, il restait 5 minutes à jouer, normalement, là, c’est gagné. J’ai couru, je suis descendu de la tribune, tout seul, pour rejoindre les Ultras et fêter ça ensemble. J’avais envie d’être avec eux, au coeur du truc. C’est ça qui me plaît, ces émotions. Je fais un projet dans lequel je veux embarquer les gens. Pour ça, je ne me mets pas dans une loge vitrée, fermée, en buvant du champagne.

J’ai envie de regarder les matchs debout. La pire de mes tortures, c’est quand je suis à l’extérieur, et que très gentiment, le président adverse m’invite à m’asseoir à côté de lui pour regarder le match, comme je l’ai fait au Mans avec Thierry (Gomez), que j’aime beaucoup en plus ! J’ai envie d’être debout, de pouvoir râler, de faire des bonds, de marcher, parce que je suis stressé ! Mais je fais peu de déplacements !

Pour en revenir au stade, il vaut mieux être dans une petite boîte de nuit où vous ne pouvez pas marcher, où tout le monde est serré, que dans un grand hangar où tout le monde se regarde, où il n’y a pas d’ambiance. Ce sont des choses comme ça qu’on n’a pas eu le temps de faire l’été dernier, parce que les abonnements étaient déjà lancés. La saison prochaine, je veux être acteur du sujet. Je prendrai peut-être des positions qui vont étonner. Je serai un peu extrémiste là-dessus : je préfère être contraint de rouvrir petit à petit nos tribunes plutôt que d’avoir un énorme complexe rempli au tiers, avec des gens éparpillés un peu partout. Le fait d’être beaucoup plus proche, beaucoup resserré, comme on l’a vu en Gambardella avec cette tribune pleine, a amené cette chaleur, cet impression d’avoir participé à quelque chose de collectif, alors que si vous êtes seul sur votre siège avec personnes à dix sièges à la ronde, vous êtes dans un projet individuel.

« Courageux, ambitieux, pragmatique »

Pierre-Henri DEBALLON

Le but qui vous a fait vibrer ?
Celui que l’on a marqué contre Châteauroux (4-0) en janvier, après 9 ou 10 touches de balle.

Un match qui vous a fait vibrer ?
Le match aller à Boulogne (2-2), que j’ai suivi dans des conditions particulières puisque j’avais un week-end entre copains. Du coup, on était en voiture, j’avais mis FFF TV, et il y avait un léger décalage; un copain avait mis une alerte sur son téléphone et il me disait dix secondes avant « Ouh la la, il se passe quelques chose », et moi je me demandais si on avait marqué ou si on avait pris un but ! C’était assez rigolo. Mais celui qui m’a fait le plus vibrer quand même, c’est la demi-finale de la Gambardella.

Une équipe qui vous a impressionné ?
Orléans au match aller et Le Mans sur la phase retour. Chez nous, contre Le Mans, à la 29e minute, on perdait 5 à 0. Ils sont sur une dynamique intéressante. Je pense qu’ils ont trouvé la bonne recette.

En trois adjectifs, vous êtes un président plutôt…
Courageux, ambitieux et réaliste. Pragmatique plutôt que réaliste même.

« Rêvons encore plus grand »

Des moments forts de l’histoire du club ornent les couloirs, dont la photo de l’équipe qui est montée une première fois en L1 en 2011.

Êtes-vous un rêveur, un idéaliste ou plutôt quelqu’un de terre à terre ?
Je suis pragmatique par rapport à des constats, des choix, mais par contre, je suis un rêveur, parce que si vous n’êtes pas un rêveur, vous ne reprenez jamais un club comme Dijon. Si je n’ai pas le doux rêve de ramener ce club à haut niveau, de refaire vibrer ce stade…

Je dis souvent en rigolant que j’ai gagné la Ligue des Champions avec Football manager, et que j’aimerais bien la gagner avec le DFCO, je sais que c’est quasiment impossible. Souvent, on me dit « Mais il ne faut pas dire ça », mais c’est la réalité. La devise du PSG, c’est « Rêvons plus grand », alors je dis en rigolant « Rêvons encore plus grand ! » (rires).

Pierre-Henri Deballon a remis le premier chèque de la Taxe Tobin à l’association Stella portée par la famille Jobard.

Quand vous évoquer la Ligue des Champions, c’est sur le ton de la boutade, mais un autre président de National en a parlé cette saison, et c’était très sérieux…
Oui, c’était Iwan Postel de Rouen, mais je crois que c’était aussi sur le ton de la boutade. J’ai le sentiment qu’il voulait faire bouger les lignes, et que sa communication en faisait partie. Il s’est dit « Mais qu’est-ce qui m’interdit de dire ça ? Rien, allez, je le dis, et puis « j’emm… » ceux qui ne sont pas d’accord avec ça » ! Moi, quand je dis ça, je n’y crois pas au moment où je le dis, mais c’est un objectif et c’est ce qui fait avancer. Quand on réalise ses rêves, derrière, on n’a plus rien… Mais ce rêve-là, il peut me tenir pendant 20 ans !

J’aimais bien Iwan Postel, je lui trouvais une forme de courage, de jusqu’au boutisme, comme quand il arrivait au stade avec sa veste rouge aux couleurs de Rouen, avec les bons et les mauvais côtés de ces personnages hors-norme : quand on a battu Rouen 1 à 0 à Dijon, alors qu’un but leur a été injustement refusé à la fin et qu’il aurait dû y avoir 1-1, il s’est séparé dans la foulée de son entraîneur dans les vestiaires (Maxime d’Ornano), je n’avais pas trouvé ça d’une grande classe, et à l’inverse, il me faisait marrer quand il parlait de construire un stade de 70 000 places à Rouen.

Sur notre groupe WhatsApp de présidents, quand il a annoncé son départ, je lui ai dit « Tu fais chier Iwan, je voulais jouer dans ton stade de 70 000 places ! », il a rigolé. Je n’ai pas compris son départ. Il m’a expliqué. Il m’a dit « Je vais prendre des vacances ». Je comprends, parce qu’un président prend des mauvais coups, et ça rend la fonction difficile. Moi, quand j’arrive au DFCO, c’est pour prendre du plaisir et en donner. Et en plus je prends des coups. Pour en revenir à Iwan (Postel), j’aime bien les gens qui font bouger les lignes et dont on se rappelle, qui font réfléchir, qui apportent quelque chose. Personnellement, il m’a fait réfléchir, par exemple, je me suis demandé si je n’étais pas un peu trop conformiste.

« Ancrer ce rôle social au DFCO »

Pierre-Henri DEBALLON et Paul FAUVEL lors du match au Mans.

Quels sont vos rapports avec les présidents de National ? Y en a-t-il un avec lequel vous êtes le plus proche ?
On a donc ce groupe WhatsApp, initié et animé par Thierry (Gomez), qui est le plus actif et le plus bienveillant. Il ouvre ses portes, il donne des conseils, il est très investi sur le sujet de la Ligue 3. J’espère pour lui qu’il va aller en Ligue 2 avec Le Mans.

Après, j’ai peut-être une connivence particulière avec des présidents de mon âge, je pense à Alexandre (Mulliez, Versailles), on a un peu cette culture « univers start-up », on a envie de chambouler les choses. Mais ça dépend des moments. Quand on reçoit, on a des moments privilégiés avant le match pour discuter, échanger sur nos problématiques, montrer nos infrastructures, et puis quelques jours après, on a des petits échanges, au sujet de ceci ou de cela, on demande des infos sur le coût d’une tribune par exemple. On est tous dans la même galère. La plupart sont des présidents actionnaires, qui mettent leur propre argent. Cela n’enlève rien au mérite des autres présidents qui sont là pour le compte d’un actionnaire ou d’un investisseur, mais ce n’est pas la même chose quand même : là, c’est vous qui allez devant la DNCG pour apporter votre propre garantie bancaire, qui engagez des fonds personnels.

Pierre-Henri DEBALLON

Après, c’est un arbitrage entre des dépenses que vous pourriez faire pour d’autres choses et le club. Quand j’ai dit à ma mère que je voulais reprendre le DFCO, elle m’a dit « Pourquoi tu ne donnes pas autant d’argent à des gens qui en ont vraiment besoin ? » ou bien « Pourquoi tu n’aides pas des athlètes qui ont fait les Jeux Olympiques et qui ne gagnent même pas le Smic ? », ça m’a ramené sur terre. Je lui ai expliqué qu’il y avait des abus dans le foot, que je me battais contre, mais c’est aussi quelque chose de puissant socialement. Pour certains, c’est leur sortie de la semaine. C’est ça qui me plaît.

C’est pour ça qu’au DFCO, je veux ancrer ce rôle social au maximum, on a mis en place la première taxe Tobin sur les transferts : chaque année, il y aura un pourcentage sur les transferts qui seront reversés à des associations locales. Regardez quand on a vendu Irié pour 3 millions, un garçon que l’on est allé chercher au Gabon, on a entendu dire « c’est du foot business », « ça pue l’argent ». OK, ça c’est la première lecture. La deuxième lecture, c’est que le DFCO perd 7 millions d’euros et que ces 3 millions viennent commencer à combler ce déficit. Ce n’est pas du sport business, c’est juste que l’on essaie de survivre. Et si derrière on redonne localement à notre communauté, pour une action qui a du sens, alors on redonne au foot ce qu’il doit être, c’est-à-dire un vecteur de cohésion social et non pas un vecteur de haine.

C’est ce que je dis aux supporters du DFCO : si on veut se battre, alors il faut aller dans un club de boxe. Pareil si on vient au stade pour lancer des fumigènes… J’adore les fumigènes, mais c’est interdit et cela nous créé des problèmes. On ne peut pas le faire et c’est comme ça. Je serai le premier à défendre le sujet devant la Ligue et lui dire qu’il faut changer ses textes de loi, mais il y a des lois. Il faut créer un climat où l’ambiance est chaleureuse, où il y a des supporters qui se donnent corps et âme, pour pas que l’on dise « Il y a des cinglés » et qu’à la moindre étincelle, cela parte en vrille.

Avec les présidents de National, avez-vous les mêmes problématiques ?
Globalement oui. Comme de dealer avec les joueurs, des problématiques sur les contrats des joueurs, des transferts, de développement de stade, etc. Après, on n’échange pas chaque jour non plus.

Pierre-Henri DEBALLON lors de sa présentation à la presse

Qu’est-ce qui vous a le plus surpris quand vous êtes arrivé dans le foot et qui vous surprend encore aujourd’hui ?
Le rôle des agents. Je ne mesurais pas à quel point ils étaient présents dans le choix des joueurs. Je pensais que les joueurs avaient des convictions sur leurs propres carrières et demandaient que celles-ci soient mises en oeuvre et sécurisées par des agents qui géraient la négociation et encadraient le cadre juridique, un peu comme un avocat, de la même manière que si je veux racheter une boîte, je cible la boîte, je discute avec son dirigeant et je délègue la partie technique à un avocat; là, au foot, c’est comme si un avocat venait me voir et me disait « C’est cette boîte qu’il faut racheter, voilà ce qu’il faut faire, quant aux autres boîtes, je leur ai dit qu’on ne voulait pas y aller », eh bien ça me paraît complètement fou.

Et puis, le côté « très pognon » de ces gens-là me gêne. Parfois, ils nous demandent des commissions et on est presque obligés de leur donner leur petit pourboire, c’est insupportable, cela n’a aucune justification. Parfois, c’est la famille aussi qui s’en même : on a eu le cas avec un joueur, tout était calé, et là, on te dit, « Si je n’ai pas 200 000 euros, on ne transfert pas notre gamin… » C’est hallucinant. Cela n’a aucun cadre légal. Les gamins sont pris en otage. On a tenu bon, ils ont finalement accepté…Je ne comprends pas non plus que, parfois, les joueurs n’aient pas leur propre libre-arbitre. J’ai un joueur qui m’a dit « Je n’arrive pas à avoir mon agent ». « Non mais change d’agent alors ! » J’ai le sentiment que les choix ne sont pas toujours faits dans l’intérêt du joueur. C’est assez perturbant.

« Un club de valeurs, malin et ambitieux »

Photo 13HF

Le DFCO en trois adjectifs…
Je veux que ce soir un club de valeurs, un club malin parce qu’on n’aura pas d’autre choix que de l’être plus que les autres, et un club ambitieux.

Le milieu du foot ?
(Rires) Pas très sain, passionnant.

Deux questions pièges. la première : si je vous dis 1998, vous me répondez quoi ?
La création du club, avec la fusion du Cercle Dijon et du Dijon FC.

Bien. La deuxième : vous êtes né à Chenôve, près de Dijon, tout comme un ancien attaquant des années 90 et 2000… Mais qui ?
Stéphane Mangione.

Bien. Vous avez joué au ballon au hand, vous êtes dans un club de ballon… Rien que de très normal pour quelqu’un qui s’appelle « Deballon » …
(Rires) C’était écrit ! Il y a eu deux ou trois blagues comme ça quand j’ai repris le club, qui disaient que j’étais prédestiné. Ce qui est drôle, parfois, c’est quand je regarde des matchs de foot et qu’il y a des ramasseurs qui renvoient un ballon sur le terrain: là, le commentateur dit « Ah, il y a deux ballons sur le terrain ! (rires) » Mais c’est vrai que j’ai toujours été plus passionné par les sports collectifs. J’ai toujours trouvé incroyable cette alchimie entre des individus et un collectif. On voit souvent que le collectif est plus fort que les individualités.

Votre première fois dans un stade de football pro ?
Il ne faut pas le dire, les supporters ne vont pas être contents (rires). J’étais allé voir Auxerre, c’était l’année de son titre (en 1998), et Djibril Cissé avait marqué, je crois que c’était contre Lens (1-0).

Le match historique du DFCO ?
Celui que j’ai en tête, c’est quand le DFCO a battu le PSG en coupe de la Ligue (3-2, en 2011), c’était exceptionnel, et aussi le match de la montée en Ligue 1.

C’est quoi la place logique du DFCO sur l’échiquier du foot français ?
C’est obligatoirement au-dessus du National, donc en Ligue 2 ou Ligue 1. A court terme, la Ligue 2, et ensuite, la Ligue 1. Mais je préfère être solide et stable en Ligue 2 qu’une étoile filante en Ligue 1. Qu’on ait le temps de construire sur des bases saines, pour qu’au moment où l’on monte, cela soit maîtrisé et préparé.

Une autre équipe que vous supportez ?
J’aime bien le Red Star parce que j’habite pas loin, à Clichy. J’ai une affection aussi pour l’AS Cannes : il y a deux ou trois ans, on m’a proposé le dossier, je m’étais plongé dedans, j’aime bien les clubs historiques. Des clubs où il y a une ferveur positive.

« Vivre à crédit, ça ne marche pas »

L’équipe féminine après sa victoire contre Nantes.

Votre première prime de président ?
Ah ! Les primes… J’ai eu cette discussion avec les joueurs : j’avais vu une vidéo du président Nicollin à Montpellier qui disait, avec sa gouaille, « je vais doubler » ou « je vais tripler », il y avait ce côté Pagnolesque que j’adorais, et je m’étais dit, le jour où j’aurai un club de foot, il faut que je le fasse.

Donc, après une victoire, un jour, je décide de doubler la prime. Déjà, je me suis trouvé très mauvais dans le discours. Ensuite, quand vous sortez du vestiaire, vous vous dîtes « Putain, je viens de claquer X milliers d’euros, c’est complètement débile », et ensuite, surtout, après ça, dès que vous rentrez dans le vestiaire, vous devenez une cible. Les joueurs crient « Président, président »…

Et puis, il y a eu ce match du Mans, chez nous, quand on prend 5 à 0. J’ai pris la parole. J’ai dit aux joueurs que, à chaque fois que j’étais dans ce vestiaire, mes moments de joie étaient gâchés parce que soit je vous donne une prime et je tire une balle dans le pied du club, soit je ne vous la donne pas et je passe pour un radin. Du coup, je leur ai dit que je ne voulais plus jamais qu’ils me demandent une prime. Quand j’en aurai envie, je vous le dirai. Je ne voulais plus avoir à subir cette dictature de la prime, et ça m’a fait un bien fou, maintenant je me sens beaucoup plus à l’aise dans le vestiaire; l’autre fois je leur ai laissé les maillots parce qu’ils avaient fait un super match, ils étaient super-contents. Pour ça, je ne suis peut-être pas trop « foot à l’ancienne », mais je trouve que l’on ne doit pas être là que pour l’argent : il y a un contexte global dont il faut tenir compte.

C’est un peu caricatural ce scénario. D’autres présidents de Dijon m’ont dit que les plus belles saisons avaient été réalisées quand le club avait le moins de moyens. Et cette saison, on a baissé la masse salariale de l’ordre de 30 à 35 %. J’appelle d’ailleurs de mes voeux que tous les clubs baissent en termes de rémunération parce que ce n’est pas possible d’être dans une industrie où tout le monde perd de l’argent. Normalement, l’exception, c’est quand une boîte d’électricité sur dix ne gagne pas d’argent; là, nous, on est dix clubs de foot pro, et il n’y en a pas une qui gagne de l’argent, ça ne peut pas tenir. Vivre à crédit, ça ne marche pas, ou alors, on cède le club à des investisseurs extérieurs dans le cadre de multi-propriété, mais ce football-là n’a pas de saveur pour moi.

Avez-vous déjà piqué des crises de colère au DFCO ?
Non. Même celle contre Le Mans, c’était une colère feinte. J’étais groggy. J’avais le sentiment que rien n’avait fonctionné. On ne sentait pas une équipe qui lâche. C’est juste que c’était un jour sans. J’ai eu des moments en revanche où je me suis dit, « là, on me prend pour un con » : un joueur voulait être transféré, il a simulé une blessure, je l’ai reçu, je lui ai dit « Tant que tu fais semblant d’être blessé, il n’y aura aucune discussion », et deux heures après, il courait sur le terrain, et deux jours après, on le transférait à Bastia. On est entre adultes tout de même. On n’a pas de temps à perdre avec des faux semblant.

Vous êtes toujours en rapport avec Olivier Delcourt, votre prédécesseur ?
Oui, on s’envoie des messages régulièrement. Après, je suis quelqu’un qui aime bien faire ses propres erreurs. Ce n’est pas très intelligent, je pourrais peut-être les éviter en échangeant plus souvent avec lui, mais j’aime bien les choses à ma manière, prendre le lead, sans cracher sur le passé, parce que ce qui a été fait est important et le club a été structuré grâce à lui aussi. On a de bonnes relations.

« Je suis Dijonnais ! »

La joie du public avec les jeunes de la Gambardella, qualifiés pour la finale.

En écoutant votre interview sur Le Dijon Show, on a appris que le club était à vendre depuis 3 ans quand vous l’avez repris : mais alors, pourquoi ne pas l’avoir acheté 3 ans plus tôt ?
Parce qu’il y a 3 ans, j’étais beaucoup plus pris qu’aujourd’hui par Weezevent, parce qu’il fallait beaucoup de moyens et qu’à cette époque, j’avais une opération que je n’avais pas encore réalisée et qui était de céder une partie du capital, donc une fois que cela a été fait, j’ai été en capacité d’acheter le club de façon plus sereine.

C’est aussi pour ça que je n’avais pas plus avancé avec l’AS Cannes à l’époque, où je n’avais pas non plus d’accroches locales, ce qui n’avait aucun sens. En 2023, j’ai été appelé par un membre du DFCO qui m’a dit que le club était en discussion avec des Américains, mais qu’il ne sentait pas le truc, il m’a dit que ce serait mieux que cela soit un Dijonnais qui rachète, bref, il m’a demandé si cela m’intéresserait. Là, j’ai commencé à regarder le sujet, je me suis pris dans le projet j’ai lancé l’aventure.

Dijon, cela a un réel sens pour vous ?
Ah oui ! Je suis né à Dijon. J’y suis resté jusqu’à la fin de mes études, mes parents, mon frère, mes grands-parents sont enterrés à Dijon, mes cousins habitent Dijon, mes copains aussi ! Je suis Dijonnais. Quand j’ai fait mon premier entretien d’embauche avant de créer Weezevent, la première question était « Présentez-vous », donc j’ai dit que j’étais Dijonnais, et là, on m’arrête, et on me demande « C’est important pour vous ? » J’ai répondu que oui, que c’était important de savoir d’où l’on venait. C’est une ville que j’ai ancrée au coeur. Ce n’est pas un investissement financier, d’ailleurs, s’il y avait eu un club à reprendre d’un point de vue économique, le plus mauvais choix, c’était de reprendre Dijon, il y avait des clubs plus intéressants, avec des potentiels plus élevés, avec des besoins financiers moins forts et un endettement nul. Donc je l’ai par amour.

Avez-vous peur de l’échec ?
Oui. La peur que j’ai, c’est la suivante : il y a une probabilité très forte que je sois le président de toute l’histoire du DFCO qui aura mis le plus d’argent. Les anciens présidents ont réussi à développer un résultat d’exploitation suffisant, sans apporter de l’argent personnel, or moi, là, actuellement, je suis en train de combler un déficit d’exploitation, donc j’ai peur de ça, et j’ai peur d’être celui qui, un jour, sera obligé de dire « Stop » et d’arrêter le club, et de passer alors injustement pour le méchant, alors que je serai celui qui aura le plus donné économiquement. Mais ça fait du bien de le dire, parce qu’une fois qu’on est au fond de la piscine, on ne peut que remonter.

Ma mère m’a dit quelque chose de très vrai : parfois, j’ai eu des moments difficiles depuis que je suis arrivé au club, je me demandais comment on allait y arriver, je réfléchissais à tout, je dormais mal alors que je suis un bon dormeur, et elle m’a dit : « Il n’y a pas mort d’hommes ». Une fois qu’on a dit ça, on a tout dit. On est de passage. Cela ne dure qu’un temps. Alors oui, j’ai peur, mais en même temps, il y a plus grave dans la vie.

  • Le point en National à trois journées de la fin

Journée 30 (vendredi 2 mai 2025, 19h30) : La Berrichonne de Châteauroux – Dijon FCO (4e, 46 points); US Boulogne CO (3e, 52 points) – Sochaux et Le Mans FC (2e, 54 points) – FC Rouen.

Journée 31 (vendredi 9 mais 2025 à 19h30) : Dijon FCO – US Boulogne CO et US Concarneau – Le Mans FC.

32e et dernière journée (vendredi 16 mai à 19h30) : FBBP01 – Dijon FCO ; US Boulogne CO – La Berrichonne de Châteauroux ; Le Mans FC – FC Versailles.

Les matchs sont diffusés en direct sur FFF TV : https://ffftv.fff.fr/63-national.html

  • Les confrontations directes (en cas d’égalité au classement) : Le Mans – DFCO 0-0 et DFCO – Le Mans 0-5; Boulogne – Le Mans 3-2 et Le Mans – Boulogne 2-0; Boulogne – DFCO 2-2 / DFCO – Boulogne (match le 9 mai).
  • Le calendrier des barrages Ligue 2 BKT / National : mardi 20 mai 2025 : 3e de National – 16e de Ligue 2 BKT ; dimanche 25 mai 2025 : 16e de Ligue 2 BKT – 3e de National
PH Deballon : « Dijon est une ville bourgeoise, très belle. Elle a des difficultés économiques comme toutes, mais elle ne transpire pas la souffrance, quand bien même le travail des vignes est un travail difficile. Peut-être qu’il manque un peu ce côté ouvrier. » (Photo 13HF)
  • Texte : Anthony BOYER / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : Vincent POYER – DFCO (sauf mentions spéciales)
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Le co-entraîneur du FC Rousset Sainte-Victoire, situé près d’Aix et de Marseille, se livre à une introspection et évoque les particularités du football dans le Sud. Il revient aussi sur la saison exceptionnelle de son club, déjà promu en National 2, sur les difficultés qui l’attendent, et met en lumière l’équipe qui l’entoure.

Par Anthony BOYER (aboyer@13heuresfoot.fr)

Photos FC Rousset SVO / Lucas Zanoni / HMZ Production

Si vous êtes observateur et que vous aimez regarder les paysages en conduisant, vous les avez sûrement déjà aperçus… ces stades ! Il n’y en a que trois aux bords de l’autoroute du sud de la France.

Le premier, celui de Vergèze, entre Nîmes et Montpellier, est facilement reconnaissable avec son logo Perrier et son gardien de but géant qui se détend. Le second, le stade Lamartine, où Consolat évoluait en National, est à Marseille. Le troisième, c’est celui de Rousset, juste avant Aix-en-Provence, quand vous arrivez de Nice, avec l’immense montagne Sainte-Victoire en toile de fond. Voilà pour la géographie !

Pour le volet démographique, Rousset, c’est un peu plus de 5000 habitants. C’est aussi la viticulture, une chapelle de style « art roman » du XIIe siècle, une église du XIXe siècle. Rousset, c’est enfin un club de football qui vient d’accéder en National 2 ! Et ça, ce n’est pas le plus petit des exploits de ce village provençal où il fait vraiment bon vivre.

Un exploit historique

À quatre journées de la fin du championnat, le FC Rousset Saint-Victoire Omnisports, de son vrai nom, est assuré de terminer champion de sa poule de National 3 après son large succès contre Corte (5-0) samedi dernier. Un exploit historique (la réserve accède quant à elle de D1 à Régional 3 et les seniors féminines vont disputer un barrage d’accession en D3 contre Lorient les 1er et 8 juin). Le mérite revient aux joueurs, bien sûr, ainsi qu’aux dirigeants, dont le quatuor Assami-Delachet-Lahouel-Aït Atmane.

Les deux premiers entraînent, le troisième recrute et le quatrième préside. À ce trio, il convient d’ajouter le staff, avec notamment Yoann Taguelmint, 3e adjoint, Victor Ferreri, le « prépa » physique et Eric Vallée, l’intendant.

La présence de Delachet, 75 ans et une expérience longue comme le bras (il a notamment gardé les cages des Girondins de Bordeaux, de Monaco et de Valenciennes en première division dans les années 70, et même celle de … l’OM), est aussi une manière de passer le flambeau, de préparer la suite, de pérenniser l’ensemble : « Il ne faut pas énormément changer de fonctionnement. Le club est en plein développement. On a vu des clubs qui se sont cassés la gueule parce qu’ils voulaient aller trop vite. La chute peut être plus brutale. »

Assistant d’éducation à Marseille

Aux côtés du maire de Rousset, Philippe Pignon (au centre) et du président du club, Malek Aït Atmane.

Le natif de Marseille (37 ans), assistant d’éducation au collège Henri Barnier à Marseille depuis 6 ans, a joué – en défense – dans tous les clubs de la région marseillaise. On exagère un peu. Encore que : Canet Sports (Le Canet / Jean-Jaurès, quartier de Marseille), JO Saint-Gabriel (encore Marseille), Marignane, Istres, Martigues, Marseille-Consolat, Aubagne, Gémenos, voilà pour les clubs provençaux qu’il a fréquentés en short.

Depuis trois ans, il est à Rousset, en survêtement cette fois. C’est dire s’il en connaît un rayon sur le football dans les Bouches-du-Rhône (il a aussi joué à Cannes et Gap en National, Strasbourg en réserve et Pribram en D1 Tchèque).
Pendant près d’une heure, à Aubagne, la ville où il réside, au lendemain de la 17e victoires (en 22 matchs, pour 3 nuls et 2 défaites seulement, 57 buts marqués !) du FC Rousset SVO, premier de la poule J avec 13 points d’avance sur l’Olympique d’Alès-en-Cévennes, Nordine Assami a déroulé le fil de sa carrière. Calme, posé, réfléchi, lucide, l’ancien défenseur a aussi évoqué sa nouvelle vie de coach et expliqué comment il a « switché ».

Interview / « On est un club tremplin ! »

Nordine, Rousset va évoluer en National 2 la saison prochaine : tu réalises ?
Honnêtement, c’est inespéré qu’un club comme le nôtre, compte tenu des structures, de l’environnement, du nombre d’habitants (5 000), du budget (600 000 euros dont 150 000 de masse salariale, hors staff), atteigne ce niveau. On a un budget ridicule comparé à d’autres. On ne s’en rend même pas compte, mais c’est historique. Maintenant, il ne faut pas aller en N2 pour faire de la figuration, sans se préparer. On sait que l’on sera le plus petit budget de la poule, mais en travaillant de la même manière qu’on le fait depuis quelques années, on arrive quand même à attirer de sacrés bons joueurs, et ça, c’est grâce à Hakim (Lahouel), notre directeur sportif : avec lui, on arrive toujours à anticiper nos besoins. C’est ce qui fait la différence. On sait très bien que, financièrement, on ne peut pas batailler avec des clubs comme Fréjus ou Toulon, alors on doit avoir une stratégie de recrutement différente. Pour le moment, cela ne nous réussit pas trop mal.

Est-ce que Rousset et toi avez conscience de la difficulté de la tâche qui vous attend en N2 ?
Rousset va changer de monde. On le sait. En plus, on a entendu dire que Bordeaux, s’ils ne montent pas en National, pourrait intégrer notre poule… De toute façon, on sait bien que plus on monte de niveau, plus l’aspect financier est important. On sait que la fougue et les valeurs ont leurs limites. Quand on est démuni de moyens, qu’on a des conditions de travail plus difficiles, cela peut devenir compliqué.

« S’adapter aux exigences du N2 »

Ta manière de travailler en N2 va-t-elle être modifiée ?
D’abord, c’est important d’être reçu par sa direction. On va se voir rapidement. La division fait que l’on va changer de dimension. Il faudra s’adapter aux exigences du national 2, je pense au pole médical, au staff, à la vidéo, à la logistique, au secteur médical, etc. On a des réflexions par rapport à tout ça. Cette saison, je faisais l’analyse vidéo du week-end, un domaine dans lequel j’essaie de me perfectionner aussi, c’est un outil très important pour la performance. j’ai géré les joueurs aussi, j’ai ce rôle de manager général dans le fonctionnement du club. Quand on n’a pas forcément de moyens, il faut trouver des personnes investies, impliquées, il faut « vivre club » : ça va être le dossier numéro 1. On le voit à Jura Sud par exemple, où un garçon comme l’entraîneur Valentin Guichard, qui a fait de très belles choses là-bas, commence, à l’image de son club, à s’essouffler, parce que c’est usant. Il ne faut pas s’éparpiller.

Aujourd’hui, tu a un travail à côté du foot : envisages-tu, si tu es encore à Rousset la saison prochaine, de te mettre en disponibilité ?
C’est certain que le foot est de plus en plus prenant. Ma réflexion porte également sur ça, oui.

On dirait que la saison s’est déroulée comme dans un rêve…
Là, on a 13 points d’avance à 4 journées de la fin. C’est exceptionnel. Seuls Dieppe et Bayonne avaient déjà assuré leur montée en N2 avant nous. Pourtant, on avait fait un démarrage poussif, avec une victoire et trois nuls lors des quatre premières journées; à ce moment-là, on cherchait notre équipe, un ADN, une identité. L’été dernier, on a eu 60 % de l’équipe qui venait de changer. Il a donc fallu impulser un déclic et à partir de la 5e journée, on a enchaîné les victoires, sept de suite je crois, on est resté invaincu jusqu’au dernier match de la phase aller, perdu à Alès (3-2). Cette défaite a été salvatrice, parce qu’on commençait à entrer dans un certain confort. On n’appréciait plus les victoires comme on le devait. Ce n’était pas faute de mettre les joueurs en garde, de leur dire que ce que l’on était en train de vivre était exceptionnel, que l’on était pas programmé pour jouer quelque chose mais, pour autant, que l’on ne devait pas se priver d’être dans le confort en terme de résultats. Pour ça, il faut être exigeant à chaque match. Parce qu’en N3, on ne va rien nous donner. Quand on des garçons qui travaillent à côté, qui font du football une activité annexe plutôt qu’un vrai métier, qui ne sont pas 100 % dédiés au foot, comme c’est le cas chez nous, il faut toujours les tenir en alerte, être derrière eux, trouver le bon dosage. Mais je reconnais que l’on n’a pas eu de gros problèmes à gérer.

« Un deal gagnant-gagnant »

Aux côtés de Hakim Lahouel, le directeur sportif (au centre) et de Yoann Taguelmint, adjoint.

Cette saison a permis aussi à des joueurs de se révéler, d’être remarqués. C’était déjà le cas la saison passée. Et si c’était ça la philosophie du club ?
Le dernier exemple, c’est Idriss Mohamed (21 ans), qui a fait un essai en Ligue 2 à Annecy, c’est un défenseur central que l’on a pris il y a 2 ans (ex-Marignane, Istres et pôle Espoirs d’Aix). C’est le projet que je vends aux joueurs, surtout aux jeunes : on est un club tremplin. On leur dit « Voilà, vous avez des qualités, nous on a un certain savoir-faire. Si vous êtes performants, on va vous mettre en lumière sur le terrain et on ne vous bloquera pas. Si vous êtes bons et que vous servez les intérêts du club, vous servirez aussi vos propres intérêts. » C’est un deal gagnant-gagnant. Un garçon comme Sofiane Sidi Ali, qui a signé pro à l’OM (en janvier 2023), c’est valorisant pour Rousset. On en aura encore un ou deux je pense cette saison. C’est une vitrine pour le club. Il y a aussi des projets de « rebonds » qui peuvent être intéressants pour des joueurs qui sortent d’un cursus pro, déçus de ne pas avoir été conservés ou de ne pas avoir eu leur chance.

Le village de Rousset avec, au fond, la montagne Sainte-Victoire. Photo DR

Tout n’a cependant pas été rose, on pense à la saison passée, quand des sites internet ont annoncé ton limogeage et celui de Christian (Delachet) en cours de saison…
Les entraîneurs sont jugés par leurs résultats. On le ait. Le duo que je formais avec Christian l’an passé était décrié, c’est normal, les résultats ne suivaient pas. La direction a pris la décision de se séparer de Christian. Pour ma part, je suis resté dans le staff et il y a eu l’arrivée de Yoann Taguelmint aussi comme adjoint qui est encore là aujourd’hui, et de Daniel Jean-Alphonse comme entraîneur principal. En fait, la saison passée, on avait prévu que l’on aurait ce creux-là. On était parti sur un recrutement de joueurs à relancer, qui coûtait moins cher. On se doutait que le démarrage allait être poussif. Simplement, on ne pensait pas que cela allait durer aussi longtemps. Quand on a récupéré les cadres et que les épisodes de blessures se sont terminés, cela a coïncidé avec l’amélioration des résultats à partir de janvier, ce qui nous a permis de finir premiers sur la phase retour. Quant aux articles parus, qui disaient que l’on était virés, c’était erroné. Cela a entaché ce que l’on faisait au quotidien.

Déjà, lors de ta première saison, le coach n’était resté que quelques semaines…
Quand je suis arrivé, le coach venait d’être nommé, c’était Fatsah Amghar (ex-coach de Rumilly, qu’il a emmené en CFA et en demi-finale de la coupe de France en 2021). Cela n’a pas duré longtemps (Amghar a été limogé en septembre 2022), et c’est là que Christian (Delachet) est arrivé. Et à la fin de la saison suivante, Daniel Jean-Alphonse avait averti le club qu’il allait repartir vers Paris, c’est pour ça que Christian est revenu quand il y a eu ce fameux épisode.

Comment fonctionnez-vous avec Christian Delachet ?
Christian c’est le sage, il ne parle pas énormément, mais quand il parle, il est très écouté. Il prend beaucoup de hauteur. Moi, c’est plus la fougue. On se met d’accord sur une programmation et derrière, j’anime les séances. Il y a Yoann aussi (Taguelmint), qui est très important au quotidien.

« On part à l’aventure ! »

Comment est venue cette vocation d’entraîner ?
Après avoir joué à Gémenos (2018/19) avec « Titou » Hasni, j’ai fait une dernière saison en Régional 2 à Saint-Zacharie, on est monté en R1 en 2020. Puis j’ai décidé d’arrêter. J’étais déjà éducateur à Air Bel, juste pour donner un coup de main, avec les U16. Cela a été très formateur. Air Bel, c’est le deuxième club marseillais en termes de jeunes après l’OM, avec une pépinière de talents. Je croise beaucoup de joueurs de N2 et N3 passés par Air Bel. J’ai obtenu mon BEF quand j’étais éducateur en U16 R2 à Air Bel, en parallèle de ma dernière saison à Saint-Zacharie. C’est là que j’ai passé ce cap. J’ai signé ensuite à Carnoux comme adjoint, en Régional 1, avec Bruno Lacoste, lors de la saison 2020-2021. C’était la première fois que je coachais des anciens partenaires ! C’était une nouvelle posture à avoir, une proximité à trouver en même temps qu’une fonction à assumer. Il fallait trouver le bon compromis. Ensuite, j’ai signé adjoint en National 3 à l’Athlético Marseille (ex-Consolat), en 2021/22, avec Jimmy Turi puis Franck Priou est arrivé en cours de saison, mais le club a subi un dépôt de bilan. C’était très dur parce que c’est un club qui comptait pour moi. J’ai vu les galères de la vie, des garçons qui ne touchaient plus de salaire, vraiment une période compliquée. Voir que le club, qui était un monument du football régional, n’existe plus, c’est un déchirement. C’est triste. Ce club a mis en lumière des joueurs et permis l’éclosion de certains, comme Julien Lopez, Umut Bozok, Rémi Sergio, Salim Mramboini, Faïz Selemani, Youssouf M’Changama et plein d’autres.

Quand et comment es-tu arrivé au FC Rousset ?
Je suis arrivé en 2022. Le directeur sportif, Hakim Lahouel, est un ami d’enfance. On a des liens très étroits. On était à l’école primaire ensemble. Il est là depuis 10 ans. En 2018, j’avais failli signer comme joueur déjà.

On dit que Hakim Lahouel, souvent dans l’ombre, est la pierre angulaire du projet à Rousset…
Oui et ça me tient à coeur de parler de lui. Hakim, c’est une belle personne, quelqu’un qui ne se met pas en avant et qui ne cherche pas la lumière, alors qu’il mériterait d’être sous les projecteurs. Il est très compétent. Il a donné beaucoup de son temps au club et aujourd’hui, si Rousset en est là, si on parle autant des résultats, c’est parce que derrière, il y a un garçon très important, et c’est lui. C’est le socle. L’artisan principal de la montée en National 2, c’est lui. Quand il est arrivé, Rousset était en Régional 2. Il est passionné, c’est une encyclopédie du foot, il connaît tous les joueurs, et c’est quelqu’un qui a un boulot à côté.

A titre personnel, tu aimerais aller plus haut, plus tard ?
Actuellement, il y a des entraîneurs qui arrivent, qui sont inspirants, je pense là, comme ça, à Patrick Videira, qui m’a envoyé un message sympa pour le titre, Karim Mokeddem, etc. Il y a eu Claude Fichaux à Strasbourg, qui m’a lui aussi envoyé un message pour la montée. Oui, j’aspire, du moins, j’espère faire partie de ces entraîneurs-là, mais chaque chose en son temps. Intégrer un centre de formation aussi, ça peut être intéressant. J’arrive à la croisée des chemins. Je ne me ferme pas de porte. Mais là, aujourd’hui, dans mon parcours, vivre la saison en National 2, ça peut être très intéressant. On n’aura pas de pression, si ce n’est celle que l’on se mettra nous-mêmes ! On sait qu’un maintien en N2 serait historique pour Rousset. On part à l’aventure en fait !

« On attire un peu plus les regards »

La place Paul-Borde du village de Rousset. On y joue au… ballon !

On te demande souvent où se trouve Rousset ?
D’abord, souvent, quand on rencontre les autres clubs, ils ne savent pas comment appeler la ville : ils se demandent si on doit dire « Le Rousset » ou « Rousset » ! Cela montre déjà le degré de méconnaissance (rires) ! Après, au fur et à mesure de la saison, on est devenu l’ovni du championnat. On a attiré un peu plus les regards.

Mais si je te demande « C’est où Rousset ? », tu me réponds quoi ?
Je te réponds que c’est à côté de Marseille, à 15 minutes d’Aix-en-Provence. C’est important de citer les deux villes (rires).

« Un entraîneur ne signe plus pour un projet »

Tu as essentiellement joué dans le sud-est de la France, souvent dans des clubs dits « à problèmes » ou qui ont connu des problèmes… Est-ce le hasard ou y a-t-il une explication ?
Oui, c’est fou ! Je pense que mon profil, à ce moment-là, collait à ces clubs-là. Parce que malheureusement, ici, dans notre région, on a eu beaucoup de clubs où c’était géré, disons, d’une certaine manière sur le plan financier. On était chaque année dans le dur. Si à un moment donné j’ai fait partie de ces clubs-là, Istres, Martigues, Consolat, c’est parce qu’ils avaient besoin de joueurs de ce niveau-là. Dans mon parcours, j’ai souvent connu des clubs sur le déclin. J’ai souvent été dans des projets où il fallait remonter, où ils avaient besoin de joueurs de caractère pour atteindre les objectifs, où les dirigeants faisaient des investissements mais sans forcément bien gérer les finances.

Tu parles de gestion parfois compliquée dans les clubs du sud : mais toi qui connais bien le microcosme régional, c’est quoi l’explication ? Pourquoi plus ici qu’ailleurs ?
Un projet, ça se construit. Mais beaucoup de présidents sont impatients dans les clubs du Sud. Ils veulent monter tout de suite. Ils sont accrochés aux résultats et du coup, pour eux, résultats = réussite. Et à côté de ça, dans d’autres régions de France, on voit plus de coachs qui construisent sur la durée. Dans notre région, les projets n’existent plus. D’ailleurs, ont-ils déjà existé ? Un entraîneur, aujourd’hui, ne signe plus pour un projet, mais pour des résultats, et c’est dommage, parce que, quand on voit des structures comme Toulon, Cannes, Fréjus, avec ce manque de stabilité dont tu as parlé, c’est un échec. Si la ligne directrice d’un club, c’est le projet avant les résultats, forcément, il y aura moins d’impatience et du coup, on va laisser du temps. Après, forcément, si les résultats ne sont pas là, si tu es dernier et que tu ne gagnes pas un match, la question d’un changement de staff va se poser. Mais si on a des résultats un peu moins bons qu’espéré, mais que le projet a l’air d’être sur la bonne voie, alors il faut accompagner les gens en place. Malheureusement, on casse trop vite les projets. À Rousset, Hakim (Lahouel) a compris ça très tôt. La saison passée, dans la tempête, on a pris de la hauteur alors que la facilité aurait été de tout casser. Je pense qu’on récolte les fruits de ça aujourd’hui. Ce mauvais passage a permis de nous souder encore plus. On savait que cela allait nous mener quelque part. Bon, de là à jouer la montée, non ! Avec le président (Malek Aït Atmane), c’est pareil, on est très proche, on a une certaine vision, on n’a pas vraiment ce rapport hiérarchique de président / entraîneur. On est lié par la même passion du foot. Ce qui fait que derrière, on n’a pas de pression. Pas d’obligation. Si ça marche, c’est bien, si ça ne marche pas, on essaie de réguler. Tous ensemble. C’est ça qui est bien à Rousset.

As-tu eu le temps de t’intéresser cette saison aux autres poules de National 3, de National 2 aussi ?
Je regarde beaucoup de championnats. Cela donne des idées pour le recrutement. C’est pour ça que l’on a parfois des joueurs qui viennent de loin, parce que d’autres clubs n’ont pas eu l’idée de les recruter. Il faut avoir la connaissance des joueurs et pour ça, Hakim (Lahouel) est très bon dans ce domaine.

« Nicolas Usai est très inspirant »

Ton meilleur souvenir de joueur ?
La victoire en Gambardella en 2006 avec le RC Strasbourg, il y avait notamment Kevin Gameiro, Quentin Othon, qui est toujours au club, Anthony Weber, c’était une promotion assez sympa. Le coach était Claude Fichaux, ensuite il était ajoint de Rudy Garcia à l’AS Roma, à L’OM et à Lille.

Et le pire ?
Quand on n’est pas monté en Ligue 2 avec Marseille-Consolat, après une saison extraordinaire (2015-2016), avec le coach Nicolas Usai, une personne qui a aussi beaucoup compté pour moi dans mon choix de l’après carrière. Il était très inspirant. La Ligue 2 aurait pu changer la vie sportive de beaucoup de joueurs. C’était une aventure humaine extraordinaire. Mais on a flanché à la fin.

Combien de buts marqués dans ta carrière ?
J’en ai marqué plus sur la fin qu’au début. J’avais la technique on va dire, j’ai marqué pas mal de coups francs directs. Avec Aubagne, je me souviens qu’une saison, j’avais mis 10 buts dont 7 ou 8 sur coup franc ! Sinon, en général, je marquais entre 3 et 5 buts par saison. Pour un défenseur, c’est correct.

« Le foot, un vecteur de solidarité »

L’église de l’Immaculée-Conception à Rousset.

Combien de cartons rouges dans ta carrière ?
Quelques-un quand même… Cela m’est arrivé d’être dur sur l’homme, d’avoir de l’excès d’engagement par moments, mais j’avais plutôt la réputation d’un joueur habile balle au pied, bon relanceur. Je n’avais pas cette réputation-là d’être un défenseur qui faisait mal. J’avais cette culture de vouloir ressortir proprement, ce qui ne m’a pas tout le temps servi, parce qu’à mon époque, on aimait bien les joueurs rugueux. Mais je ne voulais pas déroger à cette mentalité-là. Depuis que je suis passé entraîneur, c’est ce que je prône aussi, même si, parfois, bien sûr, il faut balancer ! C’est important d’avoir ce bagage, parce que le défenseur, comme le gardien, est le premier relanceur.

Pourquoi as-tu choisi d’être footballeur et pourquoi défenseur ?
Parce que c’était le sport populaire, vecteur de solidarité entre nous. C’est ce qui nous rassemblait tous. Et puis, autour de nous, on n’avait pas non plus beaucoup de choix dans les sports à pratiquer. J’habitais dans les quartiers Nord de Marseille, au Canet / Jean-Jaurès, dans le XIVe arrondissement. On était une bande de copains, on se retrouvait après l’école pour jouer au foot dans le club du quartier, Canet Sports, qui n’existe plus aujourd’hui.

Quel a été ton parcours, ensuite ?
J’ai joué à la JO Saint-Gabriel, un club de Marseille un peu plus huppé; ça m’a permis d’être repéré et d’intégrer le centre de formation de Cannes, où j’ai passé 3 ans. Il y a eu le tournoi des Régions aussi, avec la Ligue de Méditerranée, qu’on a remporté, avec Serge Gakpé, Samir Nasri, Ahmed Yahiaoui, Vincent Muratori, Thomas Mangani, on avait une très belle équipe.

Vainqueur de la Gambardella avec Strasbourg

Comment as-tu été repéré par l’AS Cannes ?
On avait une équipe à Saint-Gabriel au-dessus du lot. On avait fini premiers du championnat, on était suivi chaque week-end par les recruteurs. Pour ma part, j’étais surclassé, mais j’étais assez grand, j’avais le profil pour intégrer le centre de formation d’un club pro. À Cannes, j’y suis resté 3 ans, des U15 jusqu’au groupe National, où j’ai même fait des matchs, 7 je crois, avec le coach René Marsiglia et Franck Passi comme adjoint (en 2004/2005). Mais le club commençait à décliner à ce moment-là. Cela m’a quand même permis d’être mis un peu en lumière. A la fin de cette saison, j’ai choisi d’aller au centre à Strasbourg pour évoluer. C’est là que je remporte la coupe Gambardella la première année (en 2006), mais je ne passe pas pro. Pourtant, je faisais partie des quatre joueurs pressentis pour signer. Du coup, j’ai signé pro à Istres, en National, qui venait de descendre de Ligue 2. On a fait une très belle saison avec le coach René Le Lamer. Il y avait notamment Walid Mesloub, Olivier Giroud, qui était prêté par Grenoble, Julian Palmieri, Simon Feindouno… On avait une équipe sympa, jeune, on était une bande de copains. On a terminé au pied du podium et on n’est pas remonté. Ensuite, j’ai attendu quelques mois avant de voir si je trouvais un club de National, cela ne s’est pas fait, et je suis reparti dans le foot amateur, à Marignane, en CFA. Mais je n’y suis resté que quelques mois : je suis parti en D1 Tchèque, à Pribram, sauf que… Financièrement, il y a beaucoup de retards de paiement, bref, ça n’a pas tenu. Mais c’était une bonne expérience et la première fois que je m’expatriais. Cela m’a permis aussi de voir le football ailleurs. Après, j’ai signé à Gap, en CFA, avec Franck Priou, une personne qui est chère à mon coeur et avec qui j’ai une histoire. On est monté en National. Dans la foulée, Franck a signé à Martigues et Patrick Bruzzichessi l’a remplacé. On s’est maintenu sportivement à la dernière journée à Créteil, malheureusement, administrativement, le club a déposé le bilan. Malgré tout, on avait rempli les objectifs sportifs.

Meneur d’hommes, rassembleur…

Victor Ferreri, le préparateur physique.

Qualités et défauts sur un terrain, c’était quoi, selon toi ?
J’étais un meneur d’hommes. Je m’intéressais pas mal aux autres. J’étais rassembleur. Bien sûr, comme chaque joueur, j’étais centré sur moi, mais pas trop en fait, car j’avais ce truc de savoir fédérer. J’ai souvent été capitaine dans les équipes où j’ai jouées. J’étais nonchalant, pas très attiré par l’effort : je me reposais sur mes acquis.

Que t’a-t-il manqué pour jouer en Ligue 2 selon toi ?
C’est un peu ce que je viens de dire : je n’avais pas cette présence d’esprit que j’ai aujourd’hui de me dire que, si j’avais tout donné, j’aurais pu faire beaucoup plus dans le football, parce que je pense que j’avais les qualités pour ça. Mais je ne me suis jamais vraiment donné les moyens d’y arriver. Parce que sur le moment, je ne prenais pas conscience de cela. Je me disais que ça allait arriver. Mais on se rend bien compte aujourd’hui que les qualités ne suffisent plus. Je ne le regrette pas forcément, c’est le destin, mais si je m’étais donné à 200 %, je serais curieux de voir ce que cela aurait pu donner.

« Une carrière, ça va très vite »

Cette prise de conscience tardive, cela te sert aujourd’hui dans ton approche d’entraîneur ?
C’est un peu le message que j’essaie de faire passer auprès de mes joueurs, surtout des jeunes. Je leur dis qu’il faut se donner les moyens pour ne pas avoir de regret, aussi bien dans l’entraînement visible qu’invisible. Il faut prendre conscience qu’aujourd’hui, une carrière, ça va très vite, que l’on peut en vivre mais que l’on peut aussi passer à côté et le regretter, parce que ça peut très vite s’arrêter.

En National 3, c’est possible d’avoir ce discours-là ?
Oui parce qu’il y a quelques clubs qui sont en capacité de donner des salaires cohérents, je pense à Alès où les joueurs vivent du football, s’entraînent le matin. C’est comme un club semi-pro. Là-bas, les joueurs en font un métier. C’est ce que je souhaite a minima à mes joueurs : d’être un très bon joueur amateur, de vivre du football si possible. Maintenant, s’ils ont des qualités pour aller au-dessus, il faut les encourager pour se donner à fond et ne pas avoir de regret.

« Je dois évoluer, adapter mon comportement »

La réserve est championne de D1 et accède en Régional 3.

Tu es un entraîneur plutôt comment ?
J’essaie d’être l’entraîneur que j’aurais aimé avoir. J’ai eu de bonnes expériences, d’autres moins bonnes, et j’essaie de tirer le parti de tout ça. Je suis très proche de mes joueurs. Mais je fais la part des choses. J’ai ce management qui fait que je sais créer un lien, c’est ce qui fait aussi que l’on a des résultats. Je ne pense pas que mettre de la distance soit une bonne chose. En fait, la meilleure pub que l’on peut me faire, c’est celle qui vient de mes joueurs, de ce qu’ils pensent de moi. Pour le moment, les retours sont bons, c’est ce qui me conforte. Mais je dois évoluer aussi. Adapter mon comportement. Je pense que depuis mon arrivée en 2022 à Rousset je me suis énormément développé. J’aspire chaque jour à être meilleur, à progresser.

Des entraîneurs inspirants ?
J’ai eu beaucoup de très bons entraîneurs, je pense à François Keller à Strasbourg, que j’ai eu en réserve en CFA, j’ai eu Lasaad « Titou » Hasni à Gémenos, qui est aujourd’hui directeur du centre de formation de l’OM, une personne très intelligente, qui m’a poussé aussi à passer mon BEF (Brevet d’entraîneur de football) pour franchir ce cap, Nicolas Usai, Eric Chelle, Franck Priou bien sûr avec qui j’ai une relation forte, encore aujourd’hui. Ils m’ont tous apporté quelque chose dans mon parcours.

Un stade et un club mythique pour toi ?
Je suis allé à l’Emirates Stadium (Arsenal), c’était vraiment pas mal, au Nou Camp aussi (Barcelone). Sinon, le Vélodrome, c’est les racines, la meilleure ambiance d’Europe !

Un coéquipier marquant ?
Il y en a plusieurs ! Walid Mesloub. J’ai gardé une relation forte avec lui. Nos épouses se connaissent. C’est quelqu’un que j’ai beaucoup apprécié et pourtant on n’a joué qu’une seule saison ensemble à Istres. C’est l’un des plus talentueux avec lequel j’ai joué. Ibrahim Rachidi aussi, qui est l’adjoint d’Hakim Malek en L2 à Martigues, était particulièrement drôle : on se chambre encore beaucoup, on s’appelle.

Le coéquipier avec lequel tu avais ou tu as le meilleur feeling dans le jeu ?
À Gap et à Martigues, j’ai joué avec Medhi Messaoudi, on se ressemblait physiquement, on était complémentaires. A Aubagne, j’ai joué avec Yann Jean dit Gauthier, on n’était pas les défenseurs les plus rapides mais, là encore, on avait cette complémentarité. On avait fait une très bonne saison, on avait fini 2e.

Le joueur adverse qui t’a le plus impressionné dans ta carrière, contre lequel tu t’es dit « ce soir, ça va être compliqué » ?
Quand on a joué contre Monaco, il y avait Djamel Bakar en réserve, c’était un super joueur. Il allait très vite. Il a fait une belle carrière mais il aurait pu faire encore mieux que ça. Et David Gigliotti aussi, c’était un crack quand il était jeune.

« Quand un coach qui « allez », je ne comprends pas ! »

Un coéquipier que tu aimerais bien revoir ?
Youssouf M’Changama.

Un coach perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?
Claude Fichaux.

Un coach que tu n’as pas forcément envie de revoir ?
A Gap, la deuxième saison, quand on est monté en National, on ne s’est pas forcément compris avec le coach, Patrick Bruzzichessi. C’est dommage. Sur le plan personnel, c’était une année compliquée, mon père était malade, il est décédé, le club était dans une situation compliquée aussi. Dans le management et la manière d’appréhender l’équipe, cela a été difficile. Cette saison-là, je ne l’ai pas gardée dans mon coeur.

Une consigne d’un entraîneur que tu n’as pas compris ?
Quand un coach crie « Allez ! », je n’arrive pas à comprendre ce que cela veut dire !

Un président ou un dirigeant marquant ?
Jean-Luc Mingallon, pour tout ce qu’il représentait à Marseille-Consolat. C’était folklrorique.

Une causerie de coach marquante ?
J’étais très jeune, c’était la causerie de la finale du tournoi des régions avec Bruno Bini, je devais avoir 14 ans, il nous avait fait marcher au bord d’une rivière et il avait fait sa causerie là, il s’était mis à la place de l’entraîneur adverse et il expliquait comment on était perçu. C’était les premiers pas vers le foot de haut niveau; ça m’avait marqué.

Des rituels, des tocs, des manies avant un match ?
J’aime rester dans ma bulle. La manière avec laquelle je fonctionne, et c’est paradoxal, est un peu à l’opposé de ce qui se fait aujourd’hui, où les joueurs aiment bien être décontractés, rigoler, et ils » switchent » à 5 minutes du jeu; ça ne me dérange pas, chacun est libre de faire ce qu’il veut, mais moi, j’aime bien visualiser mon match dans la tête. J’ai besoin de me recentrer sur ça. Joueur, j’étais comme ça aussi. Je ne suis pas très bavard avant les matchs, alors qu’en dehors oui (rires).

Proximité et bienveillance

Une devise, un dicton ?
Non, je n’en ai pas en particulier, même si j’aime bien mettre une petite phrase de temps en temps, quand je pense que c’est le bon moment.

Tes passions dans la vie ?
La famille. Le foot prend tellement de temps ! Il faut trouver le bon dosage entre le foot et la famille. Les moments sont précieux.

Un chiffre ?
Le 7. Mon épouse est née le 7.

Un surnom ?
Nono.

Tu es un entraîneur plutôt …
Bienveillant. Joueur. « Protagoniste », je suis celui qui préfère avoir la balle plutôt que d’avoir à m’adapter à l’adversaire.

Tu étais un joueur plutôt …
Leader, technique et fédérateur.

Un modèle de défenseur ?
J’ai toujours aimé les défenseurs « propres » comme Paolo Maldini, ou Alessandro Nesta.

Une idole de jeunesse ?
Zidane, comme tout le monde.

Le match de légende de l’Histoire du foot, c’est lequel pour toi ?
Real Madrid – Leverkusen en finale de la Ligue des Champions (en 2002) avec la volée de Zidane. Et aussi Milan AC – Liverpool (en 2005), quand Liverpool est revenu de 0-3 à 3-3. On prenait beaucoup de plaisir devant la télévision, il y avait beaucoup de stars sur le terrain.

Le club de Rousset, en quelques mots ?
Familial, en plein développement et sur la bonne voie.

Le National 3 ?
Compliqué, exigeant. C’est ce qui résume ce championnat-là. Le N3 demande beaucoup de concentration, de remise en questions. À Rousset, on essaie de mettre une bonne méthodologie de travail.

  • Texte : Anthony BOYER / Compte X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : FC Rousset SVO (Lucas Zanoni et HMZ Production)
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Adoré des supporters à Nîmes Olympique, le club de la ville où il est né, et où il a laissé bien plus qu’une trace, l’attaquant de 32 ans, actuellement en rééducation, a aussi mis ceux de l’ESTAC (Ligue 2) dans sa poche. Sa générosité, sa simplicité et son entièreté font qu’il est facile de s’identifier à ce garçon solaire et pétillant. Un entretien rafraîchissant !

Par Anthony BOYER (aboyer@13heuresfoot.fr) / Photos @ESTAC

Cette année, Renaud Ripart a délaissé son catogan au profit d’une coupe plus… militaire ! Photo @ESTAC

Après avoir conquis le Sud à Nîmes, Renaud Ripart est parti voilà bientôt quatre ans à la conquête de l’Est, à Troyes. Et à voir la manière dont les supporters de l’ESTAC l’ont célébré au stade de l’Aube, le 20 janvier dernier, lors de la réception d’Annecy (0-1), pas de doute, il a été bien adopté. Et adoubé. Ce soir-là, un tifo en l’honneur du Gardois avait été déployé, sur lequel on pouvait lire « Les Magic solidaires d’un joueur exemplaire ». Un superbe hommage. Mérité.

C’était quelques jours après sa grave blessure contractée à Rodez, le vendredi 10 janvier, quand son ligament croisé avait rompu. La célébration a dû faire chaud au coeur de l’attaquant de 32 ans, au moins autant que celle qui lui avait été réservée aux Jardins de la Fontaine, à Nîmes, quand, alors qu’il profitait d’un week-end pour faire ses valises et rejoindre l’Aube, un tifo avait été spécialement organisé pour lui par les supporters de Nîmes Olympique. Pour ce pur Nîmois, qui, hormis Troyes, n’avait quitté qu’une seule fois « SA » ville – Il fut prêté en National au CA Bastia en 2014-2015 -, ce fut un moment inoubliable, dont il a gardé une image, une photo même. Cet épisode, le raconte dans cet entretien de 45 minutes, accordé entre deux séances de rééducation au club, quelques jours avant de se rendre au Centre national de Clairefontaine, pour des soins de rééducation.

Enfant du quartier de Castanet

Photo @ESTAC

Renaud Ripart, c’est ce gars tranquille, posé, cool, pétillant, que tout le monde apprécie. Qui fait l’unanimité. Que tout le monde voudrait avoir pour ami. À Nîmes, il est devenu un symbole. Une légende. Derrière Kader Firous, dont il cite d’ailleurs le nom en réponse à la question « Le joueur historique du NO ? », c’est peut-être bien lui qui arriverait juste après dans le coeur des Crocodiles au classement des joueurs emblématiques du club.

Parce qu’il y est né. Parce qu’il y a grandi. Parce qu’il y a tout connu. Parce qu’il a commencé dans le quartier de Castanet avant de rejoindre le voisin mythique. Parce qu’il a fait du stade des Costières son jardin, son arène, référence au monde de la tauromachie qui lui est cher, et à qui il a largement rendu hommage à chacune de ses célébrations après un but, en mimant une passe de torero avec sa cape.

Mais tout n’a pas été simple pour cet attaquant de formation, trimballé à plusieurs postes, notamment au début de sa carrière. Une carrière qui l’a vu prendre son véritable envol vers l’âge de 22/23, quand Nîmes a tout d’abord réalisé une superbe deuxième partie de saison 2015/16 en Ligue 2 alors que 8 points de pénalité lui avait été infligé au départ.

Stéphane Rossi : « Il est travailleur, discipliné, rigoureux »

Photo @ESTAC

« Quand on l’a eu avec nous au CA Bastia en National, prêté par Nîmes, il se cherchait un peu au niveau de ses postes, attaquant, milieu excentré, se souvient Stéphane Rossi, un de ses anciens coachs, aujourd’hui à Concarneau (National). On venait de descendre de Ligue 2, c’était une saison compliquée (en 2014/15), on avait souffert, mais si je n’avais pas eu des garçons comme lui, on ne s’en serait pas sorti. Renaud est rigoureux, discipliné, travailleur, avec une super-mentalité. Je me souviens qu’après les séances, il restait pour travailler devant le but. Il en voulait toujours plus. Après, de là à dire qu’il deviendrait un acteur majeur de la Ligue 1 comme ce fut le cas avec Nîmes, ce n’était pas évident, même si je pensais qu’il pouvait évoluer à ce niveau. Il a cette faculté à s’adapter. Pour moi, Renaud est un exemple pour beaucoup de jeunes joueurs qui arrivent dans le circuit. »

Et puis il y a eu cette fameuse saison 2017/18, toujours en Ligue 2, quand les Crocos et Umut Bozok (25 buts en 38 matchs !) marchaient sur l’eau et écrasaient tout et tout le monde sur leur passage, jusqu’à replacer le club et la Ville sur la carte de France de la Ligue 1, 25 ans après !

25 ans, c’est aussi l’âge que Renaud Ripart le bavard avait lorsqu’il a découvert la Ligue 1. C’est tard. Mais c’est son histoire. Et il la raconte en détail, avec franchise, sans regret, avec une lucidité déconcertante et quelques anecdotes truculentes. Et sans son catogan, qu’il a délaissé pour une coupe plus… militaire !

Interview

« Marquer un but, c’est ce qu’il y a de plus beau ! »

Photo @ESTAC

Meilleur souvenir sportif ?
La montée en Ligue 1 (en 2018) avec Nîmes et aussi la saison qui a suivi, avec notamment ce match contre Marseille en début de saison, quand on gagne 3 à 1 pour le retour de la Ligue 1 aux Costières, ce sont des moments assez incroyables.

Pire souvenir sportif ?
Ce sont malheureusement les blessures. Surtout les deux blessures à Troyes, que cela soit mon tendon d’Achille la première fois où là, récemment, le croisé. Ce sont des périodes longues, qui t’éloignent des terrains, où tu n’es pas dans la capacité d’exercer ton métier, ta passion. C’est comma ça. Le matin et l’après-midi, je vais au club faire ma rééducation, ça dépend, les séances ne sont pas tous les jours doublées; la semaine prochaine (cette semaine), je suis à Clairefontaine en soins de rééducation pour la reprise de course. J’ai de la chance, mon genou réagit plutôt bien, il n’est pas « inflammatoire » : quand je fais une grosse séance, je n’ai pas mal le soir, il ne gonfle pas, ça se passe bien, ça évolue bien. C’est vrai que je reprends la course assez tôt mais bon, il y a plein de trucs à valider encore. J’espère être de retour sur les terrains cet été !

« Ces deux dernières années, je n’ai pas été épargné »

@ESTAC

À Nîmes, tu n’avais pas eu de « grosses » blessures…
Très peu. J’avais eu une petite lésion par-ci, une petite déchirure par-là, mais c’était très léger. C’est vrai que depuis que je suis à Troyes, notamment ces deux dernières années, je n’ai pas été épargné. J’ai fait les deux plus grosses blessures qu’un footballeur puisse avoir.

Tu t’es demandé s’il n’y avait pas une malédiction troyenne ?
Non, je ne pense pas, parce que le croisé que je me suis fait en janvier, c’est sur un contact, un joueur m’est tombé sur ma jambe, ce sont des faits de jeu. C’est un peu ce qui est arrivé juste après à Antoine Dupont, avec la jambe tendue, et le joueur me tombe sur le genou. Même les plus costauds, comme Dupont, on voit que ça peut lâcher. C’est la faute à pas de chance.

« J’ai prouvé que l’on pouvait y arriver »

Combien de buts marqués dans ta carrière ?
(Il réfléchit)

C’était juste pour savoir si tu connaissais le chiffre par coeur…
Non, je ne le connais pas par coeur, je dirais 65, quelque chose ça, 70 peut-être. Je crois qu’à Nîmes, j’en ai marqué 50.

Plus beau but ?
Contre Clermont en Ligue 2, j’étais sur le côté droit, je me retourne, je me mets sur mon pied gauche, je fais une frappe de l’extérieur de la surface et elle fait barre, ça tape derrière la ligne et elle ressort, c’était un beau but (cliquer sur le mot « but » pour le voir !).

@ESTAC

Le but le plus important ?
Celui que j’inscris contre Montpellier, c’était le derby, à huis-clos à l’époque, à la 85e minute et on a gagné 1 à 0. Un super-souvenir ! Quand on est rentré à Nîmes, on a été fêté comme des héros.

Plus beau loupé ?
J’en ai raté oui (rires) !!! J’ai des images de buts que j’ai ratés mais je ne pourrais pas te dire contre qui c’était !

Pourquoi as-tu choisi d’être footballeur ?
Par pure passion. Je viens d’une famille où l’on n’est pas du tout football, du coup, durant toute mon enfance, quand on me demandait ce que je voulais faire et que je répondais « joueur de foot », on me disait « fais tes études », sous-entendu, ce n’est pas impossible, mais presque. Je leur ai prouvé le contraire. J’ai commencé dans un petit club de Nîmes, à Castanet, c’est un quartier à l’ouest de la ville. Le club existe toujours. Le président est toujours le même. Il m’arrive parfois d’y passer, quand je vois qu’il y a un entraînement par exemple; en plus, ma maison à Nîmes n’est pas très loin du stade. Mais de moins en moins malheureusement, parce que j’ai une vie de famille bien remplie (rires).

« J’ai l’âme d’un leader »

@ESTAC

Premier match pro auquel tu as assisté ?
Il me semble que c’est Nîmes – Strasbourg en Division 2, il y avait Chilavert dans les buts du Racing C’était après la coupe du monde 1998, par là…
– Le 9 avril 2002, en match en retard de la 25e journée, Strasbourg s’était imposé 3-1 aux Costières en Division 2. A l’issue de la saison, Nîmes, 19e, était tombé en National, accompagné du FC Martigues, 20e, tandis que Strasbourg, 2e derrière l’AC Ajaccio, accédait en Ligue 1.

Ton geste technique préféré ?
Peu importe le geste, c’est de marquer un but. Pour moi, c’est ce qu’il y a de plus beau dans le foot.

Combien de cartons rouges ?
Zéro ! Je touche du bois ! Je ne suis pas passé loin plusieurs fois !

Le message des supporters de l’ESTAC pour Renaud, après sa grave blessure. @ESTAC

Qualités et défauts sur un terrain, selon toi ?
Qualités, je dirais que je suis quelqu’un de très généreux sur le terrain, je cours beaucoup, je suis adroit devant le but, j’ai le sens du but, du placement, j’ai une capacité aussi à fédérer mes coéquipiers, parce que j’ai l’âme d’un leader aussi, que cela soit par la voix ou par ce que je produis sur le terrain. Défauts, souvent, comme je donne beaucoup, j’ai du déchet, je me précipite un peu. Forcément, avec l’âge, avec les blessures aussi, la vitesse, ça diminue un peu, même si cela n’a jamais été ma qualité première. J’arrive à adapter mon jeu, à jouer différemment par rapport à ça.

Qualités et défauts dans la vie ?
C’est un peu pareil que sur le terrain, généreux, avec tout le monde, mes amis, ma famille, même avec des gens que je ne connais pas ! Je suis assez solaire, j’aime bien sourire, faire rigoler les gens. Je suis gentil quoi ! Mes défauts ? Je suis un peu impulsif, je ne suis pas très patient et un peu têtu; ça fait trois défauts, c’est déjà pas mal (rires) !

Que t’a-t-il manqué pour être un top joueur de Ligue 1 ?
Ouf, beaucoup de choses (rires) ! En termes de qualité, peut-être que d’autres joueurs ont un peu plus que moi, partout, c’est pour ça qu’ils jouent pendant 15 ans en Ligue 1, voilà.

« Je suis arrivé en pro sur la pointe des pieds »

@RIPS_20 Renaud, après son opération du croisé, fin janvier.

Ton début de carrière n’a pas été simple, on te trimballait aussi à tous les postes…
Quand je suis revenu de mon prêt au CA Bastia en National (2014/2015), Nîmes ne comptait pas forcément sur moi, c’est vrai, et puis après, il y a eu ce changement d’entraîneur et l’arrivée de Bernard Blaquart qui a fait énormément pour moi. Chacun a son évolution : certains sont prêts à jouer en pro à 16 ans, d’autres à 18 ans, mais moi, comme dans mon enfance, on m’a toujours répété que c’était impossible de passer pro, quand je suis arrivé en pro à Nîmes, je suis arrivé avec un peu trop sur la pointe des pieds, « limite » je ne me sentais pas légitime. Je n’avais peut-être pas assez d’ambition. Je me contentais d’être sur le banc de touche et je me disais que c’était bien. Je pensais que c’était normal de ne pas être titulaire, parce que j’étais jeune, et que c’était comme ça.

Tu penses avoir manqué de confiance ?
Pas forcément. Peut-être que j’ai fait preuve d’un peu trop d’humilité. C’était il y a 15 ans, le foot était différent. On faisait moins confiance aux jeunes que maintenant; pour jouer, pour « accrocher » des minutes, du temps de jeu, c’était plus compliqué. Peut-être aussi que, dans ma réflexion, j’appréhendais un peu ce que c’était que d’être vraiment un joueur professionnel. A 18 ans, je n’avais pas la lucidité de certains pour le comprendre. Je n’ai jamais eu de plan de carrière par exemple. Je ne me projetais pas. J’essayais juste de vivre le moment présent à fond, parce que je ne savais pas quand est-ce que ça allait s’arrêter, entre guillemets.

« Je me suis épanoui à beaucoup de postes »

@ESTAC

Tu as évolué à plein de postes différents : est-ce que cela n’a pas été un frein justement à ton évolution ?
Non, je ne pense pas. Déjà, si je n’avais pas été utilisés à différents postes, peut-être que j’aurais joué moins de matchs, je n’aurais pas autant performé.

À Nîmes, les coachs que j’ai eus me connaissait, ils avaient plus de facilité à me mettre à droite, à gauche, devant, derrière, et peut-être que pour des clubs qui me regardaient de l’extérieur, cela a été un frein parce qu’ils préféraient prendre un joueur à un poste bien spécifique plutôt que quelqu’un qui jouait un peu partout, c’est possible. En tout cas, je ne le regrette pas, parce que je me suis épanoui à beaucoup de postes, et si je m’étais cantonné à un seul poste, je n’aurais peut-être pas fait autant de matchs.

La saison où tu as pris le plus de plaisir sur le terrain ?
Il y en a plusieurs. Je dirais la saison où on monte en Ligue 2 avec Nîmes (2017-18), parce que, franchement, on avait une très bonne équipe, on jouait bien, on prenait beaucoup de plaisir, on marquait beaucoup de buts, on gagnait beaucoup de matchs, alors forcément… Le plaisir, il est aussi dans le résultat. Il y a eu la deuxième partie de saison aussi en Ligue 2, celle où on a démarré avec 8 points de pénalité, et là, on a cartonné, d’ailleurs, je crois qu’on termine premier sur la phase retour, et on se sauve alors que tout le monde nous voyait mort. Cela a été une période vraiment intense. On était une bande potes, on se régalait sur le terrain, on jouait avec insouciance, ce qui était impensable pour une équipe classée dernière de son championnat ! Ces six mois-là ont été incroyables. Enfin, je dirais aussi la première saison en Ligue 1 (2018-19), on termine 8 ou 9e, tout le monde nous voyait redescendre directement et finalement on n’a pas du tout été inquiétés cette année-là (le NO a terminé 9e de Ligue 1). On a perdu des matchs, on a pris des roustes, mais on a pris beaucoup de plaisir aussi. Personnellement, j’ai pris du plaisir à découvrir plein de stades, à jouer à Paris, à Marseille, à Lyon, à Saint-Etienne, à affronter de « gros » joueurs, quand tu arrives de Ligue 2, c’est plaisant.

« Ce match contre l’OM, waouh ! »

@ESTAC

Le club où tu aurais rêvé de jouer, dans tes rêves les plus fous ?
Si je devais en choisir un, je prendrais le Real Madrid, et je ne serais pas seul à le citer, parce que c’est le plus grand club du monde, même s’ils se sont fait taper 3-0 à Arsenal (l’entretien a été réalisé le lendemain du match aller de Ligue des Champions entre Arsenal et le Real Madrid) ! Mais je suis lucide, c’est juste un rêve (rires) !

Le meilleur match de ta carrière, selon toi ?
C’est dur ce que tu me demandes, parce qu’en fait, il y a plein de matchs qui me reviennent, ils sont liés aux différents postes où j’ai évolué; par exemple, tel match quand j’ai joué attaquant, tel match quand j’ai joué arrière-droit, etc. J’ai un match en tête, avec Nîmes, en Ligue 1, quand on va gagner 2-1 à Lille, l’année où ils sont champions (J30, en 2020/21) : j’avais joué numéro 8 ! Je prenais beaucoup de plaisir à ce poste et c’est vrai que j’avais fait un super match. J’avais marqué le 2e but, d’un petit piqué sur Mike Maignan. Je pense aussi au match contre l’Olympique de Marseille, pour le retour de la Ligue 1 aux Costières du Nîmes. Ce match, contre l’OM en Ligue 1, c’était… Waouh ! Je jouais devant, je m’étais senti super-bien, j’avais de très bonnes jambes, je marque, il y avait une ambiance de fou dans le stade ! Après, il y a eu d’autres matchs aussi, en Ligue 2, en coupe de France aussi même récemment avec Troyes. Mais c’est difficile de comparer.

« Adil Rami, un vrai personnage ! »

Avec les enfants de l’ES Municipaux. @ESTAC

Le pire match de ta carrière ?
C’est après une défaite 3-0 à Montpellier. C’est en tout cas le match qui m’a fait le plus mal. On se fait rouler dessus. Je ne me suis pas dit que j’allais arrêter le foot après ça mais c’est vrai que j’ai mis plusieurs jours à m’en remettre.
– Le 30 septembre 2018, dans une rencontré émaillée d’incidents, le MHSC s’était imposé 3 à 0 à La Mosson (Journée 8).

@ESTAC

Un stade et un club mythique pour toi (en dehors des Costières) ?
En dehors de Nîmes, en France, le plus mythique, c’est le Vélodrome, à Marseille. Il y en a d’autres, avec de très bonnes ambiances aussi, je pense à Bollaert à Lens, que j’adore, et aussi le chaudron à Saint-Etienne (Geoffroy-Guichard), La Meinau à Strasbourg, La Beaujoire à Nantes… Ce qui est dommage, c’est que les supporters soient interdits de stade souvent, c’est de jouer devant des stades qui, au final, ont des virages ou des parcages fermés, et ne sont jamais pleins. Mais là, c’est un autre débat.

Un coéquipier marquant ?
Adil Rami. Quand tu le connais, que tu le côtoie tous les jours, c’est quelqu’un de très simple, de très humble, malgré tout ce qu’il a accompli dans le foot. C’est un vrai personnage. Il est comme on peut le voir parfois à la télé, marrant, toujours en train de rigoler, mais en même temps, très professionnel : même si je ne l’ai connu que sur sa fin de carrière, j’ai tout de suite compris pourquoi il avait réussi une si belle carrière. Il est rigoureux, exigeant. C’est un vrai compétiteur, un vrai professionnel.

« Quand René Marsiglia nous a dit qu’il avait un cancer… »

@ESTAC

Le coéquipier avec lequel tu avais ou tu as le meilleur feeling sur le terrain ?
Teji Savanier. Je jouais souvent sur le côté, lui adore le jeu long, du coup, c’était facile de jouer avec lui, il a une qualité technique tellement incroyable ! Il aimait bien tirer les coups de pied arrêtés au premier poteau, j’ai marqué des buts comme ça ! C’était la zone où j’allais !

Un coéquipier perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?
La plupart, je suis en contact avec eux, par messages, même si on ne se voit pas beaucoup, j’en croise parfois sur les matchs mais on n’a pas trop le temps de se parler. Récemment, j’ai vu un de mes anciens coéquipiers à Troyes, Karim Azamoum, il est venu pour la célébration des 100 ans du Stade de l’Aube et des 125 ans du football à Troyes, il est resté quelques jours, on a pu se voir, manger chez l’un, chez l’autre.

Un coach perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?
Le coach que j’ai eu le pus souvent c’est Bernard Blaquart, on s’écrit souvent, et quand je descends dans le Sud, on arrive toujours à se faire un petit repas, avec d’autres anciens joueurs aussi.

Une causerie de coach marquante ?
Tu me fais aller dans les souvenirs lointains là ! Ce n’est pas vraiment une causerie, mais c’est un événement qui m’a marqué. C’était avec René Marsiglia, paix à son âme. On jouait le maintien en Ligue 2, il était venu entraîner 6 mois à Nîmes (René Marsiglia avait été nommé le 26 décembre 2013), on sortait d’un mauvais match et le lendemain matin, en rentrant de déplacement, il nous a convoqués dans le vestiaire. Il avait des reproches à nous faire mais il les as formulés avec des mots très simples, très bienveillants. Il avait le sentiment qu’on avait peur de se lâcher, peur de descendre, et puis, c’est à ce moment-là qu’il nous a dit qu’il était malade, qu’il avait un cancer, et que c’est pour ça que, parfois, il ratait l’entraînement, à cause des traitements à suivre. En gros, il nous a dit qu’on ne savait pas combien de temps la vie avait encore à nous offrir et que nous, on avait de la chance de jouer au foot, qu’on n’avait pas de pression à avoir. Il nous a racontés qu’il était en vacances quand il a appris la nouvelle et que… bon, ben voilà, il avait un cancer, Forcément, cet épisode m’a marqué. Je m’en souviens encore. Finalement, on s’est sauvé. Quant il nous a dit ça, on est tous tombé des nues. Moi j’étais jeune à l’époque. René, c’était un super coach, humainement, il était top. Nous, les joueurs, on s’en était un peu voulu, il nous a fait relativiser plein de choses. On a pris conscience qu’il y avait toujours plus grave.

« J’ai toujours essayé de bosser plus que les autres »

@ESTAC

Ton premier match en National ?
Contre Orléans. Aux Costières. Avec Thierry Froger (saison 2011-2012). J’étais rentré peut-être dix minutes, quelque chose comme ça. D’ailleurs, cela faisait six ou sept fois que j’étais sur le banc mais que je ne rentrais pas (rires) ! A l’époque, on ne pouvait faire que trois changements et il n’y avait que 16 joueurs sur la feuille de match, du coup, cela faisait moins de turn-over.

Des rituels, des tocs, des manies ?
Je ne suis pas très superstitieux. Je fais beaucoup de sophrologie. Avant les matchs je fais des petits exercices de respiration, des petites visualisations, mais je n’ai pas vraiment de rituel. Ce sont souvent les mêmes choses qui reviennent avant un match mais ce n’est pas parce qu’on a gagné ou parce que j’ai marqué un but que je vais remettre le même caleçon ou quelque chose comme ça, non.

Une devise ?
Pas spécialement, mais si je dois en sortir une, je dirais « Le travail paie », parce que cela me correspond, parce que j’ai toujours fonctionné comme ça. Dans les moments où ça va moins bien, je me réfugie dans le travail. Et même dans les moments où ça va, c’est souvent là où on a tendance à se relâcher, c’est pour ça aussi que j’ai toujours bossé, j’ai toujours essayé de bosser plus que les autres, parce qu’il n’y a pas beaucoup de places, elles sont chères, alors si tu veux y arriver… Il faut essayer de se démarquer, c est pour ça que je bosse plus.

« J’ai besoin de penser à autre chose que le foot »

Le Stade de l’Aube, à Troyes. @ESTAC

Tes passions dans la vie ?
Je suis quelqu’un qui a besoin de couper. D’être toujours maintenu dans le rythme de la compétition, toute une saison, forcément, il y a des moments, c’est éprouvant. Les gens ne se rendent pas forcément compte. J’ai besoin de penser à autre chose que le foot en rentrant chez moi même si ça m’arrive de regarder des matchs bien sûr. Mais le week-end, je ne passe pas ma vie devant le foot à la télé. Je viens d’avoir un troisième enfant, un troisième garçon, il a 3 mois, le plus grand a 4 ans, donc on ne s’ennuie pas (rires). Sinon, je faisais pas mal de golf avant, mais j’en fais un peu moins maintenant : là c’est pareil, ça me permettait de couper avec le foot et la médiatisation notamment. Le golf est un sport qui, physiquement, ne me demande pas de gros efforts, tu marches, tu te dégourdis les jambes, c’est tranquille, sympa.

Un sport (autre que le foot) ?
Le golf, le basket.

Une couleur ?
Le rouge.

Un plat ?
J’aime bien manger, c’est dur comme question ! Un barbecue, une côte de boeuf, c’est clairement ma « cam », pâtes carbonara, paella…

Et ce fameux « burger Ripart » de Nîmes, tu ne l’as pas goûté ?
Jamais… Jamais… Je n’ai jamais pu le goûter. Ils l’ont confectionné quand je suis parti à Troyes, ça n’a duré que quelques jours, mais j’ai eu des bons retours et j’espère qu’ils ont fait un bon chiffre grâce à ça (rires) !

« J’ai adoré l’Andalousie ! »

@ESTAC

Une boisson, toujours le Perrier-citron ?
Non, nous, à Nîmes, on a le sirop de citron qui s’appelle le sirop-Pac, sinon un petit Ricard c’est pas mal, avec modération (rires), en vacances.

Un animal ?
Les taureaux.

Pourquoi as-tu le numéro 20 ?
Parce que c’est le numéro que j’avais quand j’ai signé pro. J’avais le choix. C’est Vincent Carlier qui avait ce numéro et qui me l’a confié. Il y avait le 14 aussi, le jour de ma naissance, mais j’aimais bien le 20. C’est resté. Et quand je suis arrivé à Troyes, celui qui avait le 20 est parti, je me suis dit « Vas-y, c’est un signe » !

Un surnom ?
Rips ou Rino, ce n’est pas très original ! Rips, c’est le diminutif de Ripart, mes potes m’appelaient comme ça,

Un film ?
(sans hésiter) Gladiator.

Un souvenir de vacances ?
Les dernières vacances que j’ai faites, avec mon épouse et mes deux enfants, une dizaine de jours, c’était en Andalousie. On a visité une bonne partie de cette région, on s’est régalé, on a visité des arènes, bien sûr, on a fait la feria à Grenade, on a visité un élevage, on a fait Séville, Cordoue, Ronda, je conseille !

« Les Jardins de la Fontaine, les arènes… »

Une photo de toi que tu aimes bien ?
Il y a une photo que j’adore, c’est après mon départ à Troyes, quand je suis revenu le week-end suivant à Nîmes pour récupérer des affaires et ma voiture, et là, alors que j’étais juste parti pour faire une pétanque aux Jardins de la Fontaine, les supporters m’ont fait la surprise d’être là, ils avaient fait un immense tifo ! Et il y a cette photo où j’ai la cape, où je fais deux-trois passes, avec le tifo au fond.

Photo Le 11 Nîmois

Vidéo (Le 11 de Nîmes) : Quand Renaud Ripart reçoit un hommage surprise des supporters du Nîmes Olympique

Une chanson ?
J’aime bien tous les styles, je peux passer de la variété française au rap US, au reggae, à la musique latino… ça dépende de l’humeur. Quand je suis arrivé à Troyes, j’ai chanté « Je te promets », et là, il y a la version reprise par Chico et les Gipsy King, ça me rappelle le Sud, j’aime bien cette ambiance.

Ecouter « Je te promets » de Chico et les Gypsies :

Une ville, un pays ?
Nîmes, c’est logique ! Et sinon Séville. Je pense que c’est la plus belle ville que j’ai vue.

Un endroit à Nîmes ?
Il y en a beaucoup. Le centre-ville. J’aime bien m’y balader. Et les Jardins de la Fontaine, pour faire jouer les enfants, et ce n’est pas très loin de chez moi. Et les arènes aussi.

On te reconnaît dans la rue à Nîmes ?
Oui, quand même, pourtant cela fait 4 ans que je suis parti…

Et à Troyes ?
Aussi, oui, même si c’est une plus petite ville.

« Nîmes fait partie de ma vie »

Son message aux Nîmois après son départ à l’ESTAC. @RIPS_20

Termine la phrase en deux ou trois adjectifs : tu es un joueur plutôt …
C’est dur ça ! Déterminé. Travailleur.

Un modèle de joueur quand tu étais gamin ?
Mon idole, c’était Zidane. Même si ce n’est pas mon poste. Sinon, comme numéro 9, je regardais beaucoup les attaquants, R9 (Ronaldo, le Brésilien), Djibril Cissé, Pauleta. Et aussi Cavani ! J’ai même joué contre lui quand il était au PSG, j’étais comme un fou. Cavani, c’est le type de joueur qui ne lâche rien, qui est porté sur le collectif, sur son coéquipier, j’adore !

Le match de légende du Nîmes Olympique, c’est lequel, pour toi ?
La demi-finale de coupe de France de 1996 contre Montpellier, victoire 1 à 0, but de Ramdane !
– Nîmes, alors en National, s’était incliné 2-1 en finale de la coupe de France face à l’AJ Auxerre.

Le joueur de légende du Nîmes Olympique ?
Je pense que c’est Kader Firoud, c’est le plus capé.

Parler de Nîmes, sans cesse, tu n’en as pas marre, à force ?
Non, Nîmes fait partie de ma carrière, de ma vie.

« Peut-être qu’un jour, je reviendrai au NO, mais je n’en sais rien… »

@ESTAC

La situation de Nîmes Olympique est critique (avant-dernier en National) : t’impliquer un jour au NO, tu y penses, si tu rentres à Nîmes à la fin de ta carrière ?
C’est vrai que j’ai 32 ans et même si j’espère jouer encore quelques années, j’essaie de préparer au mieux mon après-carrière, parce qu’un jour ou l’autre, ça va arriver. Du coup, oui, il y a de grandes chances que je retourne à Nîmes, parce que c’est ma ville, parce que j’y ai grandi et que je m’y sens bien. Et c’est là où j’ai envie d’être. Après, il ne faut se fermer aucune porte. Oui, peut-être qu’un jour je reviendrai au club, mais je n’en sais rien. Dans quelles conditions, je ne sais pas, mais oui, c’est une possibilité.

Le vendredi soir, après les matchs de Ligue 2, tu regardes les résultats du Nîmes Olympique en National ?
Ah bien sûr, bien sûr ! C’est le premier truc que je regarde en National, j’espère qu’ils vont se sauver, c’est vital pour l’avenir du club.

« J’ai l’impression d’avoir commencé ma carrière hier »

@ESTAC

Le stade des Costières, de le voir comme ça, à l’abandon…
C’est triste. A la base, il y avait ce nouveau projet à la place donc ça pouvait s’entendre mais bon, là, maintenant… Il n’y a pas de visibilité à moyens termes pour le Nîmes Olympique. J’espère que ça va s’arranger. J’espère que le club trouvera des repreneurs qui ont envie de s’impliquer, d’avancer, de faire les choses bien, pour que les gens reviennent au stade, pour qu’il n’y ait plus de fracture entre la direction et les supporters, pour que le club fasse à nouveau rêver les plus jeunes aussi, c’est ça qui est important, parce que le foot, ça se transmet de génération en génération. Si pendant quelques années, les gens ne peuvent plus s’identifier à leur équipe, tu perd une génération, tu perds l’engouement, tu perds la ferveur.

Plus tard, tu voudrais faire quoi ?
J’ai plein de projets. Je ne sais pas si je les réaliserai tous parce qu’à un moment, il faut se canaliser; j’en ai dans le foot, pas dans le foot, comme je t’ai dit, je ne me ferme aucune porte, et puis on verra selon mes envies du moment quand je déciderai d’arrêter ma carrière. J’ai aussi encore envie de profiter des années qu’il me reste à jouer au football, parce que c’est ma passion, j’aime faire ça. J’ai l’impression que j’ai commencé ma carrière hier, alors que c’était il y a presque 15 ans ! J’ai envie de jouer le plus tard possible, d’en profiter au maximum, ce qui ne m’empêche pas de penser à ce que je voudrais faire après, j’ai des idées, on verra.

« L’ESTAC, un club tremplin »

@ESTAC

L’ESTAC, en quelque mots ?
Un club tremplin. C’est une bonne définition je pense. Il y a beaucoup de jeunes joueurs qui passent et qui repartent ensuite dans des grands clubs voire des très grands clubs comme Wilson Odobert qui était avec nous il n’y a même pas deux ans et qui est à Tottenham aujourd’hui. C’est clairement une volonté aussi de l’actionnaire de développer les jeunes talents, de les faire grandir, évoluer.

Le milieu du football ?
(Sourire) Il y a du bon et du moins bon. Le bon, c’est sur le terrain. Nous, en tant que joueurs, là où on s’épanouit le plus, c’est sur le terrain, après, il y a l’extra-sportif, et puis quand tu ne joues pas, quand tu es blessé, comme là pour moi en ce moment, c’est plus dur. Le foot, ce n’est jamais ni tout rose ni jamais tout noir. Il y a des bons côtés et des mauvais côtés, comme dans tous les domaines. Simplement, il faut savoir tirer le maximum des bons côtés.

« Je donne beaucoup, on me le rend bien »

Une appli mobile ?
Je ne suis pas très actif sur les réseaux sociaux, même si j’ai des comptes. Encore une fois, quand tu as une vie de famille, ce n’est plus pareil, j’étais beaucoup plus actif quand j’étais plus jeune. Chacun ses priorités ! Mais je suis quand même pas mal sur mon téléphone, j’utilise beaucoup Instagram et Twitter (X).

Tu jouis d’une super image : ça t’inspire quoi ?
C’est agréable, ça montre que je suis quelqu’un qui donne beaucoup, et les gens me le rendent bien. Je l’ai souvent dit, la plus belle chose qui nous est donné, à nous, footballeurs, c’est de rendre des gens heureux, et ça, c’est exceptionnel. Ce n’est pas le cas dans tous les domaines. Après, c’est souvent les montagnes russes au foot, avec des moments d’adrénaline, des moments plus tristes, on joue au foot pour des émotions, les nôtres, et celles que l’on donne aux autres.

  • Texte : Anthony BOYER / Compte X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : @ESTAC
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L’ascension d’un coach issu du monde amateur qui, s’il n’avait pas connu la réussite avec Luzenac puis Amiens, n’aurait peut-être jamais découvert le monde professionnel. Le Haut-Garonnais, bien ancré à l’AJ Auxerre, et qui a fait de la notion collective son mantra, refuse de se mettre des barrières. Après tout, il faut bien rêver !

Par Augustin Thiéfaine – Photos @AJA

Capture d’écran 13HF

Il est peut-être sous-côté, méconnu du grand public, mais il est respecté par tous les « suiveurs » du football français. Considéré comme l’un des meilleurs tacticiens tricolores en activité, il est aussi l’un de ceux qui obtiennent le plus de résultats, saison après saison. Son nom est d’ailleurs associé depuis quelques années à plusieurs clubs de l’élite (Amiens, Lorient et maintenant Auxerre).

Christophe Pélissier (59 ans) impose sa patte, son style et son état d’esprit dans le monde professionnel depuis bientôt dix ans. Pourtant, il n’est pas de ceux qui ont eu une grande carrière de joueur ni à qui on a donné les rênes d’un club quelques années après avoir rangé les crampons.

Lui, le natif de Revel, en Haute-Garonne, a gravi tous les échelons, fréquenté tous les championnats, avec rigueur et patience. Avec détermination et passion. Ses résultats parlent pour lui et rendent son parcours atypique mais l’actuel stratège de l’AJ Auxerre peut se targuer d’une liste d’opérations montées et maintiens presque toutes réussies. Une mission qu’il a de nouveau menée à bien cette saison.

Meilleur entraîneur de Ligue 2 en 2024, 3e au classement des coachs du quotidien LEquipe lundi dernier (derrière Luis Enrique du PSG et Liam Rosenior de Strasbourg), rien ne l’arrête ! Son équipe, promue en L1, trône à une confortable 10e place cette saison : elle vient d’acquérir son maintien après sa victoire à Rennes (1-0), le 6 avril dernier.

Une philosophie identique

Le stade Paul-Fédou à Luzenac, là où ont eu lieu ses premiers grands exploits d’entraîneurs… Photo @Stades.ch

La méthode Pélissier, qui a une vision bien à lui quant à la manière de construire un groupe, a porté ses fruits dans toutes les divisions. Finalement, seul le totem de l’Europe manque aux expériences du coach occitan.

De l’US Revel, « son » club, qu’il est allé soutenir à Castres la saison passée en 32e de finale de la coupe de France face au PSG, à l’AJ Auxerre, sa trajectoire est semblable à celle d’une comète dans la galaxie du ballon rond. De Luzenac, promu en Ligue 2 en 2014 (mais interdit de montée) à Amiens, qu’il a conduit du National à la Ligue 1, il confie les secrets de la réussite de clubs non-attendus.

Si les effectifs qu’il prend sous son aile changent et si les villes où il passe se succèdent, sa philosophie, elle, reste la même. Christophe Pélissier se replonge dans les livres de son histoire. De ses magnifique et douloureux souvenirs au sein du club ariégeois (Luzenac) jusqu’aux sommets du monde pro, il nous fait entrer dans les coulisses de sa vie d’entraîneur, nous dévoile anecdotes et secrets en exclusivité pour illustrer un parcours jalonné de réussites, de grandes joies mais aussi d’une immense peine. Une douleur jamais refermée…

Revel, Muret et l’amour de l’Occitanie

Avec l’US Revel, à la fin des années 80, quand il était joueur. Photo DR

Christophe Pélissier est un enfant de Revel, en Haute Garonne, où il est né le 5 octobre 1965. Revel : son fief, sa ville, son club. Il y a débuté sa carrière de joueur en 1983 (milieu de terrain) et celle d’entraîneur en 2000.

« J’ai longtemps joué à Revel en Division d’Honneur (R1) et après je suis parti à Muret en National et j’ai fini « ma carrière » à l’extérieur (de la Haute-Garonne), à Carcassonne (Aude). Puis je suis revenu jouer pour ma ville, avec plein d’amis. La première année, j’étais à la fois entraîneur et joueur à Revel. J’aidais le coach en place, Gérard Fournier. Un homme emblématique malheureusement décédé cette année. L’année suivante, le président m’a proposé de prendre l’équipe. Ce n’était pas évident. Ce n’étaient que des joueurs avec lesquels j’avais joués, des jeunes aussi, mais je me suis pris au jeu. On a réussi à monter en CFA2 (National 3). »

Revel : « Pendant six ans, on monte, on descend »

Soir de montée en Ligue 1 avec l’AJA, à … Amiens. Photo @AJA

« Réussir une montée dès ma première année (2000/2001), c’est déjà une belle réussite. En sachant qu’en fin de saison précédente, on avait remporté la Coupe du Midi, que le club n’avait pas gagnée depuis 50 ans ! Pendant six ans, on monte et on descend. Je fais deux montées et deux descentes avec Revel. C’était difficile pour une petite ville de 8 000 habitants d’aller à ce niveau-là et de se maintenir. »

Mais un coup de téléphone l’oblige à faire une première fois ses valises. Il ne part pas bien loin, à un peu plus de 60 km, à Muret, dans la périphérie sud de Toulouse. Un club dont il a aussi porté le maillot quelques années plus tôt.

« Au bout de ces six ans à Revel, le club de Muret, où Éric Carrière (ancien coéquipier) avait repris les rênes, me sollicite pour que je vienne entraîner. Ils venaient de redescendre de National en DH. J’accepte. »

Alors que les bons résultats s’enchaînent (il quitte Muret avec un bilan de 12 victoires, 7 nuls et 7 défaites), il est de nouveau sollicité. Cette fois, c’est un appel de « l’extérieur ». De l’Ariège. « Au mois de mars, un joueur qui était avec moi à Revel et qui était devenu directeur sportif de Luzenac, m’appelle pour me proposer un challenge assez important : prendre la tête de l’équipe d’un village de 600 habitants avec le défi de le stabiliser. Luzenac, à l’époque, c’est un club qui fait le yoyo entre CFA2 et CFA. »

La saga Luzenac : Pélissier « le magicien », acte I

Photo @AJA

C’est le début d’une longue histoire avec le club du coeur des Pyrénées, à quelques kilomètres de la frontière andorrane. « Lorsque j’arrive, ils sont en CFA. On se maintient la première saison (12e) et la seconde, en 2008-2009, on finit champion des quatre groupes confondus. On monte sportivement en National mais le club ne veut pas y aller parce que les moyens ne suivent pas. Le président donne quand même son feu vert pour vivre ce rêve, cette première saison en National (2009-2010). En face, c’était Troyes, Reims, Paris FC, Evian-Thonon-Gaillard, Gueugnon, Créteil, Amiens, Cannes… plein de grosses cylindrées. On y va en se disant qu’on va faire l’ascenseur car il y a quatre descentes au printemps. On se lance avec cette mentalité de vivre le moment, parce qu’on savait que financièrement, ce n’était pas tenable pour nous. »

En fin de saison, contre toute attente, le club est dans le ventre mou du championnat, maintenu ! Mieux que ça, il s’installe en National pour cinq saisons. « En fait, on termine 10e en 2009 avec un maintien assez facilement acquis. » Ce sera le cas encore pendant trois ans (12e, 15e puis à nouveau 12e). « La quatrième saison, on était un peu en fin de cycle. C’est dur. Faire tenir un club d’une commune de 600 habitants à ce niveau, c’est vraiment pas facile. Je suis déjà approché par Amiens à cette époque, qui venait de descendre de Ligue 2. Pour moi, c’est un tremplin parce que c’est un club professionnel mais il y a un refus des instances. Je n’avais pas encore le BEPF (Brevet d’entraîneur professionnel français). »

Un homme vient changer la donne. Jérôme Ducros. Le nouveau président de Luzenac ne le sait pas encore, mais il va bouleverser la vie de ce « club de village », que personne ne savait placer sur la carte. « Il débarque avec Fabien Barthez dans ses valises, qui, lui, deviendra directeur général. J’ai le souvenir d’un repas tous les trois en fin de saison, juste avant, avec un thème : mon départ ou non ? Ils voulaient préparer la saison suivante et m’ont dit : « Nous, on te propose un challenge. Tu signes pour 3 ans et au bout on monte en Ligue 2. » Je les ai regardé un peu interloqué et je leur ai dit : « Mais vous rêvez, vous êtes fous ! Monter en Ligue 2 avec Luzenac alors qu’on n’a même pas le budget pour être en National. » Le nouveau président apporte quelques moyens supplémentaires et la magie opère dès sa première année. »

Luzenac, quelle histoire !

Capture d’écran 13HF

Onze ans plus tard, c’est encore une énigme. Un haut-fait du football français. La montée du LAP (Luzenac Ariège Pyrénées) en Ligue 2 devait être l’une des plus belles histoires à narrer dans le grand atlas du football français. Mais il y a eu un couac.

Avant cela, Christophe Pélissier revient sur l’aspect sportif d’une saison historique. « Elle est incroyable, cette saison ! J’ai le souvenir de l’un de nos premiers matchs, on reçoit Strasbourg, l’un des gros favoris, on gagne 4 à 1. La première journée, on gagne à Orléans (1-0), on sent d’emblée qu’on est costauds : c’est eux qui viennent chez nous ensuite à la dernière journée, et qui nous privent du titre de champion (3-3) ! En préparation, on avait affronté le Téfécé, on rivalisait, on sentait qu’il y avait une force collective qui se dégageait. Les joueurs que l’on a fait venir rentrent bien dans le moule, dans la dynamique qui était en place. Tout ça, ça se ressent d’entrée en championnat. Bref, on caracole dans le trio de tête toute la saison. C’était une aventure exceptionnelle ! Même nous, on n’y croyait pas. On gagne le dernier match avant la trêve hivernale à Carquefou et on est champions d’automne. On en rigolait, on se disait « L’année prochaine on va aller en Ligue 2 ! ». En fait, la vérité, c’est que nous, le staff, ce qu’on regarde à chaque fois, c’est le nombre de points d’avance qu’on a sur le premier relégable. C’est le réflexe du maintien. Malgré tout, on s’est pris au jeu. À sept matchs de la fin, on reçoit Boulogne et on gagne 1 à 0. Dès la fin du mois de mars, on est assurés de monter. »

« On se sentait indestructibles »

Rien ne pouvait arriver. « Il y avait une telle harmonie au sein du groupe, avec le staff… On se sentait indestructibles. On ne se rendait même pas compte de ce qu’on était en train de vivre, de ce qu’on était en train de réaliser. Il y a eu beaucoup de matchs où on gagnait à la 90e ou 91e minute. Il y a eu pas mal de signes. En fait, on sentait que ce groupe là était prêt à tout. À sept journées de la fin, on va à Fréjus qui devait avoir 5 ou 6 points de retard sur nous. Là-bas, il y a Mathieu Scarpelli et compagnie en attaque. C’est un match très difficile, on est mené 1 à 0, on égalise à la 89e et on marque le but de la victoire à la 93e. On sentait que c’était écrit. Il y a beaucoup de joueurs qui se sont révélés avant de partir en pro. En attaque, il y avait Khalid Boutaïb, Ande Dona Ndoh et aussi Anthony Derouard qui venait du Mans en L2. On avait aussi au milieu Nicolas Dieuze qui avaient plus de 300 matchs en Ligue 1 au compteur, Quentin Westberg dans les buts (aujourd’hui au Toronto FC en MLS). Ils ont tous fait leur petite carrière. Jérôme Hergault, lui, m’avait ensuite suivi à Amiens et à Lorient. Beaucoup de joueurs ont profité de cette expérience pour se révéler. »

Interdiction de montée : « On ne nous veut pas ! »

Photo @AJA

Malheureusement, la suite, ce sont des semaines, des mois d’une angoissante attente. Dos au mur malgré leurs procédures, Luzenac est interdit de monter administrativement. Pire encore, le club se fait crucifier. « Cette saison, c’est aussi un ascenseur émotionnel incroyablement dur. Quand on a cette réussite sportive et quand on sait ce qui nous attend… C’est une énorme cicatrice. On sent que c’est le pot de terre contre le pot de fer. On ne nous veut pas ! Peut-être que tout n’a pas été super bien préparé par le club, que ce n’était pas « staffé » comme les autres clubs pros, certes, mais la LFP n’a absolument rien fait pour nous aider. C’est un sentiment de gâchis. On nous enlève quelque chose qu’on a gagné. La cicatrice a du mal à se refermer. C’est s’entraîner sans savoir ce qu’il allait en être. C’est voir le tribunal administratif nous donner raison. C’est voir le début du championnat suivant sans nous… Après, on n’existe même plus. On n’est carrément plus dans les championnats finaux. Et ce fameux 10 ou 11 septembre 2014, on nous dit que c’est terminé, qu’il n’y a plus de club… On se quitte tous sur un parking. C’est dur, c’est très dur après tout ce qu’on a vécu. »

Sa voix en tremble encore onze ans plus tard. « Certains joueurs et membres du staff ont rebondi, moi le premier. Mais ce moment-là, il est très difficile à vivre. J’ai eu, après, la chance de vivre d’autres bonheurs et d’autres succès, mais en tant qu’amoureux du sport, on a enlevé quelque chose à l’âme de notre discipline. La réussite du terrain a été retirée par des instances. Ça gâche l’innocence et la naïveté du sportif qu’on est, et du sport qu’on aime. La Ligue aurait été grandie d’aider un petit club à vivre son rêve professionnel. Certains autres clubs qui sont montés ensuite, comme Bourg-en-Bresse je crois, ont dit ‘’heureusement que Luzenac était passé par là’’, et eux, ils ont été aidés. On nous a dit qu’il n’y avait pas de stade aux normes pour nous, dans notre région. Quelque temps, Rodez monte de National en Ligue 2 et peut jouer au Stadium de Toulouse pendant qu’ils faisaient les travaux dans leur stade… C’est comme ça. C’est une plaie qui sera toujours béante. »

La folie amiénoise : Pélissier « le magicien », Acte II

Ainsi, l’entraîneur qui, quelques semaines plus tôt guidait son équipe sur le chemin d’un immense exploit, pleure-t-il désormais le destin funèbre de ses couleurs, la disparition du Luzenac AP. Sur le plan personnel, il passe par la case chômage et décide d’obtenir son diplôme professionnel. « C’est ce qui me « maintient » un peu. J’ai un objectif, donc je m’y consacre. Assez tôt, j’ai quelques contacts, dont Amiens, en National, et ça se fait à la trêve alors que c’était prévu pour l’année suivante. On est au mois de décembre 2014 et le président Bernard Joannin m’appelle pour me proposer de prendre l’équipe tout de suite pour un an et demi. Je débarque le 29 décembre à l’Amiens SC avec le but de faire remonter le club en Ligue 2 dans ce laps de temps. Amiens venait de perdre son statut pro et il fallait absolument le retrouver. Deux ans et demi plus tard, on était en Ligue 1. »

Amiens (2017-2018) : une saison historique

Photo @AJA

À Amiens, Christophe Pélissier accomplit encore un exploit retentissant : en 36 mois, il obtient deux montées consécutives. « On se dit qu’on a une bonne étoile au-dessus de la tête quand on voit le scénario de la montée en L1. Comme je le dis souvent aux joueurs, la réussite, ça se provoque. Ça prouve que le groupe avait bien travaillé et gardé le cap. Il y a surtout un changement de stature. Quand on monte de National en Ligue 2 (en 2016), on était dans les favoris du championnat. Par contre, quand on monte l’année suivante en Ligue 1 alors qu’on est promus, là on n’est pas du tout attendus. C’est une montée surprise. »

La montée en Ligue 1 du club picard reste aujourd’hui encore iconique. Nous sommes le 19 mai 2017, 38e journée de Ligue 2, Reims reçoit Amiens au stade Auguste-Delaune. Après 90 minutes de jeu, le score est de 1-1. Thomas Monconduit frappe le coup franc de la dernière action du match. Le ballon traîne dans la surface. Oualid El Hajjam le dévie de la tête et trouve le pied droit d’Emmanuel Bourgaud qui le propulse dans le petit filet gauche. Un but extraordinaire. Un but historique ! Même les supporters rémois applaudissent. Les Amiénois et leur entraîneur se jettent au poteau de corner. La folie s’empare du parcage visiteur. Au micro de BeIN Sports, le tacticien confiait alors avoir dit à ses joueurs que « lors des dernières journées, il se passait toujours des choses irrationnelles. On l’a fait. C’est fabuleux. »

« Il faut monter avec ses clubs quand on n’a pas été pro »

Après cet exploit retentissant, le coach devient « Pélissier le magicien ». Un surnom qui, aujourd’hui, le fait sourire. « Oui, car il n’y a rien de magique. Il y a une façon de voir les choses, de travailler, qui ne m’a jamais quitté. Je crois que c’est ce qui a fait cette réussite, que cela soit à Luzenac, Amiens, Lorient ou Auxerre aujourd’hui. J’ai une certaine idée de la manière à adopter pour faire fonctionner un groupe, ce qui, pour moi, est important. Le fait de réussir ces choses-là à un tout autre niveau en DH, en CFA 2 est commun, mais là, c’est en professionnel. J’ai fait trois ans en Ligue 2 avec trois montées et deux titres de champion. C’est une histoire pas banale pour un entraîneur amateur. Je dois être le seul entraîneur de Ligue 1 à avoir grimpé depuis la DH jusqu’à l’élite. En fait, gravir les échelons un à un, c’est ce qui m’a permis d’entraîner à ce niveau là. Je pense que quand on est un entraîneur qui n’a jamais été un joueur professionnel, comme moi, pour avoir des clubs de ce niveau, il faut le valider sportivement. J’ai entraîné en National parce que je suis monté en National avec mon club. Pareil pour la Ligue 2, puis la Ligue 1. D’ailleurs, tout le monde ne me parle que des montées, mais avec Amiens, certes on monte, mais se maintenir deux ans d’affilée ensuite en L1, ça a la même saveur que des promotions. C’était pas simple en termes de budget… Avec Lorient, c’est pareil. Finalement, la seule descente que j’ai connue, c’était avec Auxerre. J’arrive fin octobre 2022, mais il y avait quatre descentes cette saison-là… »

L’état de grâce à Auxerre : Pélissier « le magicien », Acte III

Aux côtés du propriétaire de l’AJ Auxerre, James Zhou. Photo @AJA

Avant de rejoindre Auxerre, il succède d’abord à Mickaël Landreau chez les Merlus en 2019. Une saison stoppée prématurément à cause de la situation sanitaire. Il obtient son premier titre de champion de deuxième division. « Quand j’entraînais Lorient en Ligue 2, on était attendus aussi, on était le gros club. Il faut avoir la démarche que cela soit dans le projet de jeu, dans la façon de construire son effectif aussi. Le changement de stature intervient là. Je change un petit peu d’univers, ça se ressent dans la façon d’appréhender les événements. Quand on est le petit, c’est facile de se placer en outsider, là, c’est plus difficile de se placer en favori. Le travail est un peu différent. Pouvoir réussir avec Lorient, c’est une étape supplémentaire qui a été franchie. C’est comparable aussi à cette même réussite avec Auxerre la saison dernière, en parvenant à remonter immédiatement. »

Nommé meilleur entraîneur de l’année 2024, Christophe Pélissier s’impose comme un acteur incontournable du football actuel. « C’est une fierté, c’est une récompense donnée par les pairs, ce sont eux qui votent. La fierté, c’est aussi d’être arrivé à remonter un an après une descente. Souvent, une relégation, ça traumatise un club. Là, ça redonne un élan positif incroyable à l’équipe. Ça n’a pas été évident au départ. J’avais des cadres qui ne voulaient pas rester, il fallait arriver à maintenir tout le monde, remettre les joueurs dans un projet de jeu. Je crois que c’est une saison où l’on met 72 buts (Ndlr : l’AJA est la meilleure attaque de L2 avec 72 buts devant Angers, 56 buts). On a aussi la deuxième meilleure défense du championnat (36 buts encaissés derrière Saint-Étienne, 31). Le stade est à guichets-fermés sept ou huit fois dans la saison, ce qui est rare en deuxième division. Il y a une communion avec le public incroyable, que cela soit à domicile ou à l’extérieur. Ça prouve que les supporters se retrouvaient dans l’identité de cette équipe. Une équipe, qui, à la fois ne lâchait rien, avait une identité dans le jeu et des joueurs de talents concernés par le projet de jeu. »

Si Christophe Pélissier est récompensé sur le plan personnel, Gauthier Hein et Gaëtan Perrin le sont aussi en étant nommés meilleurs joueurs du championnat pour le premier et meilleur passeur (10) pour le second. Ils figurent tous deux dans l’équipe de l’année avec le défenseur central brésilien Jubal et l’arrière droit Paul Joly dans le onze de l’année. 74 points sont totalisés dans l’escarcelle icaunaise en fin de saison. Un an après sa descente l’AJA revient en Ligue 1 avec la manière.

Un promu aux dents longues

Photo @AJA

« Notre année 2025 est une réussite. Dans le sprint final, on a 12 points d’avance sur le barragiste, en tant que promu, on aurait signé les yeux fermés en septembre. » L’effectif est composé de beaucoup de jeunes joueurs, sans grands noms. Un effectif huilée par une force collective à toute épreuve qui a notamment réussi à battre l’Olympique de Marseille à l’aller (3-1) et au retour (3-0) en inscrivant trois buts à chaque fois, une formation qui a tenu en échec le champion : le PSG, dans son antre de l’Abbé-Deschamps (0-0). Un effectif jeune, inexpérimenté dans lequel se révèle au plus haut niveau Gaëtan Perrin (8 buts et 8 passes décisives), Hamed Junior Traoré (10 buts en 24 matchs) et le jeune Kévin Danois (20 ans), entre autres. « Mon rôle c’est de faire croire aux joueurs qu’on peut le faire, que certes, on va affronter des clubs mieux armés que nous, mais qu’ici, on a une identité et que leurs qualités individuelles vont ressurgir. Je pense par exemple à des joueurs comme Kévin Danois, qui sort du centre de formation et vit ses premiers matchs en pro. Il devient un élément moteur de l’équipe. Je pense à Clément Akpa (défenseur central) qui était prêté en National il y a deux ans et qui est devenu international ivoirien. Il y a plein de joueurs comme ça, Paul Joly, Lassine Sinayoko, Gaëtan Perrin, qui arrivent à maturité, qui sont depuis longtemps ici et à qui on a fait confiance. On récupère aussi des jeunes joueurs qui viennent de l’étranger et qu’il faut relancer. C’est dur en début de saison, mais c’est aussi excitant de se demander comment ce jeune groupe, sans expérience significative en Ligue 1, est capable de performer. »

Alors que deux tiers du championnat sont déjà passés, l’AJA montre un solide de bilan de 10 victoires, 8 matchs nuls et 10 défaites. « On a une première partie de saison qui est faite de hauts et de bas. Ce groupe est capable, et on le prépare pour ça, de jouer des matchs les yeux dans les yeux avec nos adversaires. Nos deux victoires contre l’OM sont significatives de ce que l’on veut faire. C’est deux victoires nettes, c’est quelque chose dont les joueurs se souviendront toujours. Par contre, battre Marseille ne signifie pas qu’on a forcément un maintien acquis en fin de saison. Il faut prendre des points partout. » Le « cerveau » de l’AJA n’a plus qu’un an de contrat avec le club bourguignon. Le débat pour son avenir est ouvert. « Auxerre, c’est un club avec un engouement populaire incroyable. Il y a une volonté de franchir les étapes et de retrouver une certaine stabilité en Ligue 1. Ce n’est jamais évident quand on a un budget comme le nôtre. Je me retrouve tout à fait dans cet objectif-là. À la fin de la saison, il me restera un an de contrat, je ne sais pas quelle sera la volonté des dirigeants à propos d’un renouvellement. Ça fera trois ans, on parle souvent d’une fin de cycle à ce moment-là. On verra ce qu’il adviendra. »

« Quand ça va bien, je suis encore plus exigeant »

Le stade Abbé-Deschamps à Auxerre. Photo @AJA

Pour arriver à ce niveau, le tacticien s’est appuyé sur un mantra qu’il a développé, sur son approche personnelle du sport et son expérience au fil des années. « J’estime que pour avoir une équipe performante, la notion collective est primordiale. Quand un collectif tourne bien, les individualités ressortent. Jamais le contraire. Il y a toujours des joueurs de talent qui sont capables de faire la différence, qui, quand on arrive à les intégrer et quand ils se fondent dans le collectif, permettent de gagner des matchs et de gagner des titres. »

Une approche qui fonctionne. Sur le plan purement sportif, Christophe Pélissier, c’est : trois montées en Ligue 1 (Amiens en 2017, Lorient en 2020 et Auxerre en 2024), deux titres de champion de Ligue 2, deux ascensions de National en Ligue 2 (avec Luzenac et Amiens). « J’essaie d’être un peu à l’inverse de ce qui se fait sur un terrain et de ce qui se dit à l’extérieur. Quand ça va bien, j’essaie d’être encore plus exigeant. Je dis souvent que les louanges sont les meilleurs somnifères. Quand on fait des bonnes choses, on a tendance à en faire un peu moins ensuite, donc je suis très vigilant là-dessus. Au contraire, dans des mauvaises périodes, et on en a connu, il faut arriver à maintenir la cohésion et la confiance aux joueurs. Il faut arriver à positiver, à travailler (Ndlr : l’AJA a vécu une période de onze matchs sans victoires entre décembre et février, et a été éliminée de Coupe de France par Dunkerque). Les joueurs le savent : la communication se fait toujours entre quatre yeux. Quand ça va bien, je le dis, mais quand ça ne va pas, je le dis aussi. Je ne laisse pas passer certaines choses. »

L’Europe, c’est pour quand ?

Il ne manque qu’une case à cocher, à toucher pour Christophe Pélissier. La seule chose qui manque à sa carrière d’entraîneur, c’est la ferveur des soirées européennes. Pour un entraîneur parti d’en bas, des championnats régionaux, cette ascension serait un modèle. « Vu mon parcours, je pense que si je veux entraîner un gros club, un club qui joue l’Europe, il faudra que je réussisse à en amener un à ce niveau-là. Comme je l’ai fait jusqu’à maintenant. Au départ, Je n’avais pas de plan de carrière, tout s’est un peu fait par hasard. Certains me disent que je suis sous côté, mais j’ai commencé en Division d’Honneur (R1). Quand on me dit, vingt ans après, tu vas entraîner six ans en Ligue 1, je ne peux même pas dire que j’en aurais rêvé. C’est quelque chose auquel je n’avais même pas pensé ! Quoiqu’il arrive, ma carrière d’entraîneur a été réussie. Je ne me mets pas non plus de barrière : si un club vient me chercher, pourquoi pas ? Mais je me dis aussi que vu mon parcours, le mieux, c’est d’amener un club à ce niveau surtout. »

Christophe Pélissier, du tac au tac

Photo @AJA

Meilleur souvenir ?
La montée en Ligue 1 avec Amiens.

Pire souvenir ?
Il y en a deux. La relégation en Ligue 2 avec l’AJ Auxerre après le match contre Lens et le jour où l’histoire de Luzenac s’arrête.

Un président marquant ?
Ils ont chacun leurs spécificités même si Jérôme Ducros (Luzenac) était un sacré personnage.

La saison où vous avez pris le plus de plaisir ?
On prend souvent du plaisir quand il y a de la réussite. J’ai eu la chance d’en avoir beaucoup. Je pense que la saison dernière avec Auxerre en Ligue 2 était vraiment très belle. On était dominateurs, on marquait beaucoup de buts.

Un modèle de coach ?
J’ai beaucoup aimé ce que faisait Jürgen Klopp à Liverpool. En ce moment, j’aime bien ce que fait Gasperini avec l’Atalanta Bergame. Tous m’inspirent, tout le monde a des idées et pas que dans le monde professionnel !

Choisissez un stade : Le Moustoir, l’Abbé-Deschamps, la Licorne ou Paul-Fédou…
Je crois que le stade Paul-Fédou de Luzenac n’a pas marqué que moi. C’était un terrain atypique, légèrement en pente de droite à gauche. Après, le stade Geoffroy-Guichard (Saint-Etienne) m’a toujours marqué. J’y vais depuis tout petit. J’y ai vu de nombreux matchs. C’est un stade avec une ambiance énorme.

Photo @AJA

Le club que vous rêveriez d’entraîner ?
En tant qu’Occitan il y a le Téfécé (Toulouse) ! Mais Saint-Etienne a une place importante, c’est vrai. Je suis allé à la finale à Glasgow, j’avais 11 ans.

Une devise ?
J’en change souvent ! Mais je crois que « seul, on va vite, ensemble, on va plus loin » me caractérise bien.

Une manie, un toc, un rituel, avant les matchs ?
Je ne sors jamais à l’échauffement et je fais les cent pas dans le vestiaire. J’anticipe la rencontre à venir. C’est le moment que j’aime le moins lors d’un jour de match.

Un style de jeu préférentiel ?
J’ai utilisé tous les systèmes. On était à trois derrière avec Luzenac. Un 4-2-3-1 ou un 4-4-2 classique avec Amiens et Lorient et Auxerre. Le système, c’est le papier, mais je crois que c’est l’animation qui est le plus le point le plus important. Il y a beaucoup de systèmes hybrides aujourd’hui. Les animations sur les sorties de ballon sont primordiales.

Votre plus gros défaut ?
Je suis rancunier. Je donne souvent ma confiance et je n’aime pas qu’on la trahisse.

Un match référence ?
J’en ai beaucoup ! J’ai le souvenir d’un match avec Lorient, on reçoit Saint-Etienne et on est mené 2-0 au bout d’un quart d’heure et on gagne 6-2. Cette année aussi, en gagnant au Vélodrome avec Auxerre et en marquant trois fois en une mi-temps face à ce Marseille-là… On a été performants. En fait, c’est un sentiment où tout marche comme sur des roulettes.

Un joueur adverse qui vous a marqué ?
Mbappé m’a subjugué, je l’ai joué quand il était avec Monaco puis avec Paris. J’ai vu son évolution. Il y a tant d’autres joueurs aussi… Je crois qu’en Ligue 1, on minimise trop la qualité des joueurs. J’ai découvert Désiré Doué à Rennes en commentant un match pour Prime Video quand j’étais au chômage. Il m’avait tapé dans l’œil. Il jouait son premier match avec Rennes, au Vélodrome, il avait une qualité, une maturité… il m’avait ébloui.

Joueur de légende ?
Zinédine Zidane. C’est mon joueur et mon coach préféré.

Photo @AJA

Un match de légende ?
Je vais en dire deux. Un positif et un négatif. Le négatif, c’est France-Allemagne de 1982. Le positif, c’est France-Brésil de 1998. C’est la revanche de 1982.

Vous êtes un entraîneur plutôt…
Proactif. J’aime mes équipes quand elles s’activent dans la récupération du ballon, dans l’utilisation. Quand tout le monde est impliqué dans le projet.

Luzenac était un club plutôt…
Familial.

Auxerre est un club plutôt…
Familial et professionnel.

Le football, en un mot ?
Amour. Je m’infuse beaucoup de matchs depuis tout petit. Je regarde les autres championnats, les autres divisions. Quand on est entraîneur, il faut être curieux. Il y a de très bonnes choses à piocher dans le monde amateur. Quand je n’entraînais pas, j’allais voir des matchs. Il n’y a pas que le très haut niveau qui m’intéresse.

À ce sujet, vous êtes allé voir Revel lors de la réception du PSG l’an passé…
C’était la Coupe de France, c’est ma ville. On jouait à Nice en coupe le vendredi soir, et le lendemain quand on est rentré à Auxerre, j’ai pris la voiture et j’ai fait les 14 heures de route aller-retour. Il y avait 12 000 spectateurs à Castres, c’était fabuleux. Je me devais d’y être, c’est tout et je ne le regrette pas… même s’il y a eu 9-0.

Votre plus grand rêve d’entraîneur ?
Remporter la Coupe de France. C’est l’histoire du football français. Je suis ou j’ai été à la tête de clubs qui ont un vécu avec cette compétition et je n’ai malheureusement jamais eu de parcours et de réussite dans cette épreuve.

  • Texte : Augustin Thiéfaine / Photos : @AJA
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Lire aussi : la nouvelle vie de Julien Outrebon (ex-joueur d’Amiens et Luzenac, ex-adjoint de Christophe Pélissier à Lorient)

https://13heuresfoot.fr/actualites/la-nouvelle-vie-de-julien-outrebon/

 

L’entraîneur de l’Olympique Saumur retrace sa carrière de joueur et d’entraîneur. Si son influence du football italien et du Milan AC de Sacchi est mise à mal cette saison en championnat, où son équipe encaisse beaucoup de buts, il compte sur la maîtrise technique et le jeu collectif pour s’en sortir et accrocher le maintien.

Par Anthony BOYER / Photos : Philippe LE BRECH

Entretien réalisé avant la défaite à Blois 2 à 0.

Photo Philippe Le Brech

Il a toujours son accent provençal et le sourire qui va avec. Patrick Olive est né à Martigues il y a 47 ans mais a su se faire adopter dans le centre-ouest de la France, qu’il a volontairement rejoint voilà 13 ans maintenant, pour des raisons à la fois familiales et sportives. Et il a su s’acclimater !

Aussi surprenant que cela puisse paraître, celui qui a passé un quart de sa vie au SC Orange (devenu en 2018 Orange FC), dans le Vaucluse, n’est nostalgique ni du soleil ni de la chaleur du Sud. L’ancien pensionnaire du centre de formation du FC Martigues, du temps de la Division 1, passé par le National et Istres, s’est rapidement acclimaté à la douceur angevine, ou plutôt à la douceur de Beaufort-en-Vallée, une petite ville près des bords de Loire, à 30 kilomètres de la capitale de l’Anjou. Et accessoirement à 30 kilomètres de l’Olympique Saumur FC, où il est arrivé l’été dernier après deux saisons en Régional 1 dans les Deux-Sèvres, à Bressuire.

Photo Philippe Le Brech

Pendant près d’une heure, cet ancien défenseur qui n’a cessé d’avancer sur le terrain au fil de sa carrière – généralement, c’est plutôt l’inverse ! – est revenu sur ses débuts, sur le football à Martigues, Istres et surtout Orange, un club qui l’a profondément marqué et où sa carrière d’entraîneur a commencé, quand il avait 28 ans.

Depuis, il a pris de la bouteille, que cela soit à l’Elan Sportif de Connerré, en Régional 1, son premier club à son arrivée dans les Pays de la Loire, au Mans FC où il s’est occupé de la formation et des jeunes (U17 et U19 Nationaux), à Bressuire, toujours en Régional 1 et enfin à Saumur, en National 2, avec l’objectif de se maintenir dans un championnat très relevé où, comme il aime à le dire, « son équipe est un peu un ovni ! ». Un ovni qui certes encaisse beaucoup de buts – il en parle avec franchise – mais produit un jeu de possession qui pourrait lui permettre d’éviter l’une des trois dernières places. C’est amplement jouable : à sept matchs de l’arrivée, l’Olympique, présidé par Stéphane Montanier, n’est qu’à un petit point de Châteaubriant, 13e et premier non-relégable, et de Poitiers, le 12e.

« J’aimerais que l’on soit plus guerriers »

Photo Philippe Le Brech

Meilleur souvenir sportif de joueur ?
En U17 Nationaux avec le FC Martigues, c’était durant la période d’ascension du club en Division 1. On avait des grosses écuries dans notre championnat, Lyon, Monaco, Cannes, etc., et on avait terminé derrière le Monaco de Thierry Henry. On s’était qualifié pour les phases finales. On avait éliminé Montpellier en 8e avant de tomber sur l’AS Monaco en 1/4 de finale. On pouvait renverser des montagnes avec cette équipe où quelques-uns ont signé pro comme Stéphane Odet ou Fabien Artès. Il y avait beaucoup de joueurs locaux de Marseille, Martigues, ça donnait une vraie identité. Le coach, c’était Roger Sabiani.

Ton meilleur souvenir d’entraîneur ?
Je ne peux pas dire que j’en ai un meilleur que les autres. J’ai beaucoup de bons souvenirs. Par exemple, à Orange, j’ai fait un maintien inespéré en DHR où il fallait gagner sept des neuf derniers matchs et on l’avait fait ! Quand je suis arrivé à Connerré (Sarthe), en DH, on s’est mêlé à la montée avec Le Mans, qui venait de déposer le bilan et de repartir à cet échelon. On était la surprise ! Plus tard, avec Le Mans FC, on a vécu une belle aventure en coupe Gambardella, jusqu’en 8e de finale à Ajaccio (en 2020). À Bressuire (2022-24, Régional 1), j’ai aussi vécu deux saisons avec des émotions fortes. Lors de ma première saison, tout s’est joué à la dernière seconde de la dernière journée, et c’est Chauray qui est monté en National 3 dans le temps additionnel alors que l’on venait de gagner notre match, et qu’on attendait leur résultat : Chauray faisait match nul et ils ont marqué le but de la montée à la 97e ! Même si sur le moment cela a été dur, cela reste un moment fort. En plus, on venait de gagner quelques matchs précédemment dans ces mêmes circonstances, en marquant dans le temps additionnel, comme contre Chauray deux matchs avant. On a fini champion la saison suivante (2023/24), sauf qu’il y avait les barrages derrière, et on n’est pas monté. C’est le Bassin d’Arcachon qui est monté.

« Les arêtes et les cadavres des poissons à Martigues ! »

Photo Philippe Le Brech

Pire souvenir d’entraîneur ?
Un barrage pour la montée en CFA, perdu avec Orange (en 2004). On était en CFA2, on venait de monter de DH. On avait fait un super début de saison, avec 12 points d’avance sur le 2e à la trêve mais on s’est fait rattraper puis doubler par Le Pontet sur la phase retour. À Orange, il y avait une super-équipe, on a vraiment loupé le coche cette saison-là et après ça, le club a eu un peu plus de difficultés.

Combien de buts as-tu marqué dans ta carrière ?
Je ne marquais pas beaucoup ! J’ai commencé au poste de défenseur au centre de formation à Martigues, ensuite je suis passé au milieu, à Istres, et enfin, à Orange, j’ai fini meneur de jeu donc j’ai plutôt avancé sur le terrain que reculé ! Donc j’ai marqué un peu plus en fin de carrière. Au début, je marquais un but par saison, et puis à la fin, il y a eu une saison, avec Orange, où j’ai mis 9 ou 10 buts en DH.

Photo Philippe Le Brech

Ton plus beau but ?
Celui que j’ai en tête, c’est une frappe de 35 mètres en pleine lucarne avec la réserve d’Istres, contre Marignane.

Pourquoi as-tu pratiqué le football quand tu étais petit ?
J’étais mordu tout de suite! Il paraît que tout petit, j’avais toujours un ballon avec moi et que je tapais sans cesse sur le mur, chez mes grands-parents, à Martigues, mais ça, je ne m’en souviens pas ! Mon papa (Henri) a gagné la Gambardella avec Martigues (en 1968). Donc j’ai été baigné dans cette ambiance sportive et collective de copains. J’ai souvent mis ça en priorité, cela a toujours été un fil conducteur.

Comme tu es de Martigues, le stade Francis-Turcan n’a aucun secret pour toi …
Aucun ! Je me souviens des petites arêtes de poisson que les mouettes lâchaient sur la pelouse, ou encore les cadavres des poissons… Comme il y a la canal juste à côté ! Je retourne à Martigues un peu, car j’y ai encore toute ma famille.

Pas trop dur de quitter le Sud pour le Centre-ouest ?
Non, parce que je suis venu rejoindre ma femme ici. J’habite Beaufort-en-Vallée, c’est près d’Angers. Je suis vraiment très proche de Saumur aussi. Avant, j’avais un petit plus de route pour aller à Bressuire ou au Mans par exemple, 1h ou une 1h15. J’aime beaucoup la douceur et le calme de cette région. Le Sud, ça manque surtout à cause de la météo, parce qu’ici, on a souvent du brouillard en novembre ou décembre, c’est pesant, et puis la famille manque aussi. Mais toute l’agitation du Sud, elle, ne me manque pas. Cela me fait plaisir d’y retourner, bien sûr. Mais voilà…

« J’ai gardé des liens avec Karim Tlili »

Photo Philippe Le Brech

Tu as gardé des attaches au club de Martigues ?
Cela a beaucoup changé depuis mon départ. Chez les éducateurs, il doit forcément y en avoir que je connais mais je n’ai pas forcément gardé de contact. Les attaches, je les ai surtout avec un joueur que j’ai entraîné quand il avait 10 ans, c’est Karim Tlili. C’est le buteur actuel du FC Martigues, en Ligue 2. Il fait partie des joueurs qui ont remis l’équipe sur les bons rails. Il a joué au Pontet et je l’avais eu dans mon équipe aussi à Orange. On a gardé les liens forts. On s’envoie des petits messages de temps en temps. Son parcours a été chaotique mais je suis fier de ce qu’il a fait et de son niveau.

Tu regardes les matchs du FC Martigues ?
Non, parce qu’on a entraînement en même temps. Mais je suis les résultats.

Pourquoi n’as-tu pas pu franchir le cap National-Ligue 2 quand tu étais joueur ?
J’avais un déficit athlétique quand je suis arrivé en seniors. Je mesure 1,71m et je jouais défenseur central. Voilà ! Et à l’époque, ce n’était pas trop les critères recherchés. Donc déjà, en terme de puissance, j’avais ce manque. Ensuite, on m’a fait jouer à un peu tous les postes, latéral droit, latéral gauche, je me débrouillais, OK, j’avais un contrat aspirant, je m’entraînais parfois avec la D1… J’ai eu la chance de côtoyer Ali Bernarbia par exemple, de m’entraîner avec une belle génération. Sincèrement, je ne pouvais pas rêver mieux, pour moi le Martégal… Mais le club est descendu et on ne m’a pas proposé de contrat stagiaire, tout en me conservant. En fait, je suis resté amateur en réserve, et ce contrat que j’attendais, on me l’a proposé un an plus tard. Sauf que moi, entre-temps, je m’étais fait à l’idée que c’était fini, donc j’ai passé la saison à trouver des solutions afin de signer dans un autre club. J’ai refusé le contrat stagiaire qu’on m’a proposé un an plus tard pour rejoindre Istres, juste à côté, en National. Parce que j’avais l’impression que, même en me proposant ce contrat, le club ne croyait pas trop en moi et pensait que je ne pouvais pas franchir l’étape supérieure. Mon objectif, c’était de passer pro avant 21 ans, ou de me rediriger vers autre chose. C’est pour ça que je suis allé à Istres, qui voulait monter en Ligue 2. Le truc, c’est que la plupart des joueurs de ma génération à Martigues ont joué en Ligue 2 ensuite (rires) ! Bon, ce n’est pas un regret, parce que cela m’a permis de me mettre sur la voie pour le métier de coach.

Photo Philippe Le Brech

À Istres, tu y restes 3 saisons : quel souvenir en gardes-tu ?
La première année, c’était Jean Castaneda l’entraîneur. Je m’entraînais avec le groupe National mais comme j’étais muté, je n’ai pas pu jouer en équipe première, seulement en National 3. Il y a eu plusieurs changements de coachs, j’ai changé de poste moi aussi : c’est là que je suis passé milieu de terrain. J’ai commencé à jouer régulièrement avec Alain Ravera, qui a remplacé Jean Castaneda lors de ma deuxième saison, et là, j’ai fait pas mal de matchs. À chaque fois, on était en haut de tableau en début de saison, mais on n’arrivait pas à monter. Je m’étais donné 3 ans pour y arriver, j’ai vu que cela ne passait pas, bien que je prenais beaucoup de plaisir à m’entraîner tous les jours. Là, l’opportunité d’Orange s’est présentée. Le club était en CFA2 et, surtout, il était très bien structuré, mieux structuré qu’à Istres en National ! Il y avait une superbe génération de joueurs, des dirigeants capables de trouver des emplois aux familles. Je suis parti dans ce projet-là, alors que je ne savais pas trop encore ce que je voulais faire, sur le plan professionnel.

L’idée d’entraîner, elle est venue comment ?
À Istres, j’avais passé les premiers diplômes d’initiateur 1, initiateur 2, le tronc commun aussi de mon brevet d’état, dans le cadre de mon contrat de qualification. J’avais mis un peu le pied dedans et quand je suis arrivé à Orange, j’ai trouvé un travail dans l’entreprise du président, une entreprise de pâtes alimentaires : je suis d’origine italienne, de la région de Manfredonia dans les Pouilles, du côté de ma maman, alors les pâtes… (rires) ! Le fils du président François Riva, Raphaël, jouait avec moi, c’était une famille italienne, ils étaient adorables. J’ai eu un super accueil. Je faisais 35 heures dans l’entreprise et pour avoir un complément, et aussi parce que j’étais passionné et que j’aimais ça, j’avais le foot à côté. J’entraînais une équipe de jeunes trois fois par semaine après le boulot, dans laquelle figurait donc Karim (Tlili). Et j’enchaînais ensuite sur ma séance avec les seniors. Le week-end, j’avais les matchs de jeunes le matin, puis mon match avec les seniors l’après-midi. C’était du 7 jours sur 7 !

Photo Philippe Le Brech

Du coup, avec tes origines italiennes, cela veut dire que tu t’intéresses au foot italien ?
Oui, oui, j’adore ce don de soi pour défendre. Après, il y a eu une période où le jeu de l’Italie n’était pas plaisant, mais dans l’aspect collectif, le Milan AC d’Arrigo Sacchi me parle, avec cette priorité donné à l’équipe, cette volonté de ne pas encaisser de but, ça, je l’ai aussi, mais la différence, c’est que moi, je prends des buts, c’est dur (rires) : je suis toujours un peu vexé quand j’en encaisse et c’était déjà le cas quand j’étais joueur. Parce que je me dis que quelque chose n’a pas été fait ou qu’on a manqué de communication. J’ai cette culture-là.

Tu suis quelle équipe en Italie ?
J’ai beaucoup aimé la Juventus de Michel Platini. C’était mes premiers rêves.

Que devient Simon Boyer, l’ancien défenseur de Sète, Bourges et Orléans, et qui était retourné chez lui à Orange ?
Ah Simon c’était mon premier entraîneur à Orange quand je suis arrivé (en 2000) ! Il travaille au service des sports de la commune maintenant. C’était un guerrier ! On préférait l’avoir avec soi qu’en face comme défenseur (rires) !

Photo Philippe Le Brech

Un stade mythique pour toi ?
Le Vélodrome, une ambiance de dingue, je me souviens de mon premier match, c’était un OM-Monaco, 2 à 0, il y avait Jean-Pierre Papin !

Un coéquipier qui t’a marqué dans ta carrière de joueur ?
Je suis obligé de dire le parrain de mon fils (rires) ! Patrice Scrimenti, formé à Saint-Etienne, il a joué à Valenciennes et Wasquehal. Il est de Rognac. Je l’ai connu par un ami de mon père, qui est le parrain de mon frère. On ne se connaissait pas directement. Un jour, il a voulu revenir dans le Sud et il est passé par moi quand j’ai signé à Orange, du coup il a rejoint Orange aussi. On s’est super-bien entendu ! Parfois, on jouait tous les deux en défense centrale. Il avait une exubérance que je n’avais pas, et une folie aussi.

Un coéquipier perdu de vue que tu aimerais revoir ?
On se revoit parfois avec les anciens du centre de formation du FC Martigues. J’ai revu Daniel Cousin au Mans, Laurent Grimaud, Stéphane Odet, Fabien Artès, c’est difficile d’en citer un.

L’Olympique Saumur. Photo Philippe Le Brech

Un entraîneur qui t’a marqué ?
Léon Galli à Martigues, il était beaucoup dans la gestion humaine, très proche des joueurs. Richard Poggi à Orange, qui était fort dans la préparation tactique et mentale, et son approche était géniale. Mais c’est Alain Ravera, à Istres, qui m’a le plus marqué. J’ai travaillé ensuite avec lui au Mans, où on s’est retrouvé par hasard, et où cela a été dur parce que le club venait de subir un dépôt de bilan et se reconstruisait. Alain m’a fait confiance à Istres dans une équipe où il y avait beaucoup de joueurs confirmés et n’a pas hésité à me lancer. Je ne jouais pas tout le temps, mais j’ai beaucoup grandi avec lui. J’ai observé des matchs aussi pour lui quand il entraînait Louhans-Cuiseaux en National. On est toujours en contact.

Un entraîneur perdu de vue que tu aimerais revoir ?
Aucun en particulier mais j’ai croisé Patrick Parizon à Bressuire, c’était le coach en pro à Martigues et j’avais eu un petit différent avec lui à l’époque, cela m’a permis d’avoir une discussion avec lui, je ne l’avais jamais revu depuis cette épisode et cela m’a libéré d’un poids !

Un joueur qui t’a impressionné ?

Thierry Henry, chez les jeunes. On arrivait à accrocher Monaco avec nos valeurs, et puis lui, sur une action, il faisait la différence.

Un président qui t’a marqué ?
Michel Castanier à Orange.

« Orange, les montagnes russes »

Photo Philippe Le Brech

Quand es-tu devenu entraîneur ?
À l’âge de 28 ans. Le club d’Orange venait de descendre en DHR. J’étais capitaine de l’équipe et le coach, c’était Patrice Scrimenti justement. On était en difficulté en début de saison, le club était en train de s’effondrer, alors que quelques années plus tôt on était aux portes du CFA, et puis derrière, on est dans le bas de tableau en DHR… En novembre, Patrice, qui travaillait à côté, me dit que je dois prendre l’équipe, que j’en suis capable. Il me dit aussi que le président est d’accord, mais il ne m’en a pas parlé. Patrice me laisse un jour de réflexion et le lendemain, je lui dis « Je suis d’accord, mais à une seule condition, que tu te remettes en condition physique pendant un mois pour être apte à jouer en janvier ». Patrice avait 35 ans. Il a accepté (rires) ! On a fait une saison mémorable, on a retourné la situation. Mais pour moi c’était éprouvant car je n’avais pas voulu lâcher l’équipe de jeunes U15 Régionaux que j’entraînais. Donc j’avais deux équipes sous ma responsabilité. Parfois je jouais le matin à 11h avec les jeunes et l’après midi j’entraînais et en plus je jouais encore avec seniors en DHR ! C’est là que je vois que j’avais des super-dirigeants, qui me préparaient tout, c’était une sacrée époque, très enrichissante, qui laisse de supers souvenirs !

C’était la fameuse saison où il fallait gagner 7 matchs sur les 9 derniers pour se maintenir ?
Ah non, non, ça c’en est encore une autre (rires) !

Avec les dirigeants de l’Olympique Saumur FC. Photo DR

Le club d’Orange, en quelques mots ?
Les montagnes russes. On était en DH quand je suis arrivé et le club était mieux structuré qu’à Istres en National. Michel Castanier faisait bien les choses, il y avait Jean-Louis Comini et Frédéric Christen, qui était recruteur avant que je n’arrive, avait bien travaillé. Il y avait une génération de joueurs extraordinaires. L’équipe jouait bien, c’était plaisant, avec des supers jeunes. A Orange, j’ai un peu tout connu en 12 ans, des beaux parcours en coupe de France, des beaux parcours en championnat aussi car on a souvent été à la lutte avec des clubs comme Marseille-Consolat ou Gap, qui ont goûté au National par la suite. Mais quand on a loupé les barrages d’accession en CFA, la saison d’après, on est descendu aux barrages aussi, ensuite, le président a changé, le club avait un peu moins de moyens, on est remonté, on s’est à nouveau mêlé au haut de tableau, j’ai vraiment tout vécu dans ce club ! À la fin, je voulais partir, je venais de vivre une séparation sur le plan personnel. C’est comme ça que je suis arrivé dans une nouvelle région, ici, à Beaufort-en-Vallée, où vivait ma nouvelle compagne. Je ne le regrette pas.

« Un groupe de dirigeants et de parents extraordinaires à Orange »

Photo Philippe Le Brech

On sent ton attachement à Orange…
Oui… On avait une superbe pelouse au stade Clapier, et puis dans une ville gérée par une mairie proche du Front national, on avait un rôle social à jouer aussi et on en était fier car on permettait à des jeunes d’être considérés par le biais du sport, du football. J’adorais les jeunes du quartier qui aimaient le foot, ils habitaient juste en face du stade. Quand le club a eu des difficultés financières ensuite, il a failli disparaître… Heureusement, il y avait un groupe de parents et de dirigeants extraordinaires qui n’ont pas lâché le club et qui ont permis aux enfants de pouvoir continuer à jouer. C’est triste de voir Orange si bas (le club évoluait cette saison en District 3 avant d’être forfait général, lire ci-dessous), mais j’ai bon espoir de voir les choses se remettre en place un jour.

– Le 23 janvier 2025, la préfecture du Vaucluse a annoncé qu’elle retirait l’agrément délivré au Orange football club au titre de son affiliation à la Fédération française de football (FFF), suite à des actes répétés de violences, physiques ou verbales, à l’encontre des équipes adverses ou des officiels. Une décision qui a entraîné la fermeture du club avec, comme conséquence, 400 jeunes sans la possibilité de pratiquer le football. Finalement, le 17 mars 2025, le Tribunal administratif de Nîmes a suspendu l’arrêté préfectoral, ce qui a permis au Orange FC, qui a remplacé le SC Orange en 2018, de conserver son agrément, reprendre ses activités et de voir des équipes de jeunes être réintégrées en championnat (l’équipe seniors de District 3 est forfait général).

De Connerré au Mans FC

C’est là que tu arrives à Connerré, près du Mans…
Oui, j’ai répondu à une annonce, c’est à une heure de Beaufort-en-Vallée, où j’habite, près d’Angers. Le club, qui venait de monter en DH un an auparavant et cherchait un coach : on a fait 4e, 3e et 2e !

L’Olympique Saumur. Photo Philippe Le Brech

Après Connerré, tu pars au Mans…
Très rapidement, à Connerré, la Ligue du Maine me contacte pour m’occuper de la section sportive du Mans, car là-bas, leur centre de formation fonctionne avec la section sportive au lycée Sud du Mans. Mais à la Ligue, ils voulaient quelqu’un d’extérieur au club, de neutre, et mon président à Connerré a donné son autorisation afin que je sois mis à disposition. C’est comme ça que je suis intervenu quatre fois par semaine avec la section sportive et que mon premier lien avec Le Mans, qui était en Ligue 2 à ce moment-là, a commencé. La saison suivante, le club a déposé le bilan et a dû repartir en DH et là, je me retrouve dans le même championnat qu’eux avec Connerré ! On leur pose des problèmes d’ailleurs, et c’est là que Le Mans FC veut me récupérer pour intégrer la formation chez les jeunes. L’ancien président, Jean-Pierre Pasquier, me recrute, puis le président Thierry Gomez est arrivé. J’ai fait cinq ans au Mans FC ! Richard Déziré s’occupait des seniors en National 3 (le club venait de remonter) et j’ai pu l’épauler sur le recrutement de joueurs locaux pour son équipe, on a fait venir des garçons comme Romain Dupont de Sablé-sur-Sarthe ou encore Arnaud Billeaux (Sablé), qui est mon aujourd’hui mon adjoint à Saumur. C’était des joueurs cadres en N3 et N2, qui étaient aussi éducateurs au club. La première saison au Mans, j’étais responsable de la formation, mais je n’avais pas d’équipe à coacher, on a juste remis les choses en place, restructurer. par la suite, j’ai pris en charge les U19 et les U17 nationaux.

« Au FC Bressuire, c’était intense ! »

Avec Arnaud Billeaux, son adjoint à Saumur. Photo Philippe Le Brech

Après Le Mans, tu enchaînes à Bressuire, en Régional 1…
Non, d’abord, j’ai arrêté pendant une saison. Le Mans venait de monter en L2, on avait déposé le dossier pour le centre de formation, et dans ce projet, je devais entrer en formation pour devenir le responsable du centre, mais la Covid a freiné le club, qui est descendu sans que le championnat ne puisse aller à son terme… Et donc, comme on n’avait pas une année de présence en Ligue 2, le dossier n’a pas pu être déposé, et ça m’a mis un coup d’arrêt personnel. On était aux portes du professionnalisme pour le centre de formation, on voyait le bout du tunnel, on se disait qu’on allait avoir enfin les moyens de bien travailler, mais là, de devoir revenir en arrière, cela a été difficile. J’ai quand même terminé la saison mais c’était clair dans ma tête. Du coup, la saison suivante, je suis juste retourné avec la section sportive et sincèrement, ça m’a fait du bien de ne plus dépendre du Mans FC. Ce n’est qu’un an plus tard que j’ai signé au FC Bressuire. J’y ai passé deux saisons avec très peu de défaites, très peu de buts encaissés. C’était intense. C’est vraiment un super club de foot, avec du monde au stade, des jeunes à tous les niveaux régionaux, mais avec cependant quelques freins dans les structures, dans la mentalité, dans le fait d’arriver à emmener les gens plus dans la compétition, de mettre des conditions de réussite. Le club pourrait aller plus haut, on se mettait la pression pour remonter en N3 parce qu’on savait qu’on avait les moyens pour ça. le FC Bressuire devrait être au-dessus. Il est structuré, c’est un super-club amateur, avec des dirigeants top. Mais je trouve que c’est un peu un gâchis quand même : on se contente de bien vivre à Bressuire, ce qui est très bien aussi, mais c’est dommage, il faudrait être « plus compétiteur ».

« Pour Saumur, c’est déjà un petit miracle d’exister en N2 »

Tu as dû suivre les déboires des Chamois Niortais, qui vient d’être rayé de la carte…
À Niort, il y a la famille de mon épouse. Les Chamois, c’est une institution dans les Deux-Sèvres. C’était le moteur. C’est triste. Cela fait plusieurs clubs historiques qui disparaissent, il y a eu Tours aussi récemment. J’ai vu quelques matchs au stade René-Gaillard bien sûr, on les a même joués l’an passé en coupe de France (au 5e tour, 1-2 en octobre 2023). Les Chamois fournissaient plein de clubs aux alentours, Bressuire, Chauray…

Parle-nous de ce jeu des chaises musicales entre Bressuire et Saumur…
Alors, quand je suis arrivé à Beaufort-en-Vallée donc, j’ai eu un entretien avec le club de Connerré et à cette époque, Patrice Sauvaget (ex-pro à Lille, Cannes, Angers, etc.), avec qui j’avais joué à Istres, entraînait Saumur. J’avais pris contact avec lui pour qu’il m’aide à éventuellement trouver un club dans le coin, et il m’avait dit qu’il partait de Saumur. J’avais donc rencontré le président de Saumur, qui n’est plus le même aujourd’hui. Bon, le choix s’était porté sur un autre coach, Julien Chevalier, qui était quelqu’un du club. Ensuite, j’ai fait ma vie pendant 12 ans et là, cet été, quand je suis parti à Saumur, le FC Bressuire a enrôlé Julien Chevalier, mais je n’étais pas au courant, cela s’est fait après mon départ (Julien Chevalier a démissionné en septembre dernier). Voilà pour la petite histoire !

« Ma culture italienne, elle en prend un coup ! »

L’Olympique Saumur, en février 2025. Photo Philippe Le Brech

Parle-nous de l’Olympique Saumur FC ? De l’extérieur, cette saison, en N2, on constate une certaine irrégularité dans les résultats. C’est quoi, la place du club, selon toi ?
l’Olympique Saumur FC, c’est un peu un ovni en National 2. C’est déjà un petit miracle d’exister. On a le plus petit budget de la poule avec 800 000 euros, les joueurs bossent et ne s’entraînent que trois fois par semaine, mais depuis cette saison, j’ai rajouté un quatrième créneau, mais le groupe au complet n’est vraiment là que trois fois. On a deux contrats fédéraux, ce qui est déjà un effort financier considérable de la part du club, qui était déjà relégable sportivement la saison dernière déjà. Mais Saumur a cette mentalité-là de faire des exploits, des parcours en coupe de France, donc l’irrégularité, peut-être qu’elle part de là, déjà. On réalise des coups, oui, mais sur la durée, on n’est pas armé comme les autres. Après, cet été, j’ai composé une équipe avec seulement deux mutés, parce qu’on n’était pas en règle avec le statut de l’arbitrage. Il a fallu trouver des joueurs libres, non mutés, ce qui voulait dire qu’ils n’avaient pas joué pendant un an : cela ne pouvait être que des joueurs blessés qu’il fallait relancer, donc il ne fallait pas se tromper sur l’état d’esprit, qui est primordial chez nous, sinon, on n’existe pas. L’effectif que l’on a, au final, est un peu improbable, parce qu’on a quand même des joueurs d’expérience, avec le gardien Hugo Cointard (ex-Béziers, Les Herbiers, Chartres, Lusitanos), Simon Pambou, qui revient d’un accident de voiture (ex-Grenoble Foot en L2), Vincent Manceau, un ancien historique du SCO Angers en Ligue 1, Wail Bouhoutt, qui est des meilleurs buteurs du championnat chaque année (81 buts en 132 matchs officiels depuis son arrivée en 2019 !) et aussi Emmanuel Bourgaud (ex-Amiens, club qu’il a conduit en Ligue 1 en 2017 en inscrivant le but de la montée à la dernière seconde de la dernière journée !).

En National 2, ton équipe encaisse beaucoup de buts…
On n’est pas solide défensivement. Pourtant, dans le jeu, on arrive à se créer des occasions, on est assez agréable à voir : en fait, c’est même la première fois de ma carrière de coach que j’ai une équipe qui maîtrise autant le jeu collectif. Avant, j’avais souvent eu des équipes qui luttaient, et ça aussi c’est nouveau, je dois apprendre moi aussi. Bien sûr, j’ai toujours aimé avoir des équipes qui jouent, mais là, avoir autant de maîtrise, je n’avais jamais connu ça. C’est un peu perturbant parce que défensivement… (Saumur a encaissé 40 buts en 23 matchs et possède la 14e moins bonne défense de sa poule B en N2, sur 16). Parfois aussi on manque de vitesse et d’équilibre, donc il faut travailler pour ne pas perdre nos points forts comme la tenue du ballon et le jeu. Parce qu’on n’est pas capable de ne faire que défendre, on n’a pas les joueurs pour ça. Donc il faut trouver la meilleure alchimie possible et c’est vrai que ma culture italienne, elle en prend un coup là (rires) ! Et puis on constate qu’en National 2, en face, les attaquants adverses vont vite et comme on manque un peu de puissance, quand on fait le jeu, qu’on joue haut, on s’expose aux contres.

« On doit avoir plus d’exigence et de concentration »

Photo Philippe Le Brech

T’attendais-tu à une saison aussi difficile en N2 ?
Alors je me suis imaginé ça quand je suis arrivé, quand il a fallu construire l’effectif. Et après, le fait d’avoir autant de maîtrise du jeu, dès le début de saison, ça m’a surpris : là, j’ai pensé qu’on pourrait tranquillement être en milieu de tableau. Et en fait non ! Chaque match bascule sur une action d’inattention, une belle action adverse ou autre, alors que les matchs sont équilibrés… Là, ça change les choses, je pense à nos défaites récentes à Châteaubriant et à Avranches (3-0). Franchement, ces matchs étaient serrés jusqu’au premier but encaissé. Il n’y a pas un match où j’ai senti qu’on était dépassé ou que l’on ne pouvait pas marquer, hormis notre défaite 6 à 0 aux Herbiers, que je mets à part, parce que c’était notre 3e match en 8 jours. C’est pour ça que l’on doit avoir beaucoup d’exigence et de concentration. Que l’on ne doit pas être résigné. J’aimerais que l’on soit plus « guerriers ».

Y a-t-il eu un relâchement après la victoire à Bordeaux le mois dernier (1-0) ?
Je ne le pense pas. Mais on est plus à l’aise sur des bonnes pelouses. Quand on est sur les terrains gras en hiver, même le nôtre, qui n’est pas top, on n’est pas à notre avantage. À Bordeaux, la pelouse, c’était une galette, ça donne envie, les joueurs ont pu exprimer leur qualités techniques, c’était un avantage pour nous. Et le match suivant, à Châteaubriant, il nous manquait deux joueurs au milieu : alors ça a été plutôt bien pendant 70 minutes jusqu’au premier but, et ça a été plus compliqué. Pour ce match, j’avais deux jeunes qui découvraient le niveau, dont le petit Lenny Herin, qui a 19 ans, qui jouait en Régional 2 la saison passée. C’était son premier match titulaire en N2. Mais il n’y a pas eu de relâchement après Bordeaux, c’est juste que c’est de la National 2, et que c’est dur.

« Je ne suis pas un gueulard »

Ce week-end, Saumur se déplace Blois, où la pelouse est…
Bon bah voilà…

On dit que c’est le pire terrain de la poule, avec celui de Saint-Pryvé / Saint-Hilaire… Mais si ça peut te consoler, dans le Sud, c’est pas fameux non plus !
Dans le Sud, on le sait que les terrains ne sont pas bons. Et on fait en fonction. Ici, c’est plus dur. Par exemple, à Châteaubriant, dans un match pour le maintien, avec de l’enjeu, et bien j’ai trouvé que c’était un match propre. Dans le Sud, ce type de match, avec cet enjeu, cela aurait été la « guerre » !

Quel type d’entraîneur es-tu ?
Je suis passionné, déjà. Je m’adapte beaucoup aux environnements. Je n’arrive pas en terrain conquis. Je ne mets la pression à personne. Je n’ai pas ce caractère-là. Je prends le temps de connaître les gens et d’essayer d’en tirer le maximum. Je ne suis pas un « gueulard », je dis les choses à ma manière. J’aime le jeu : je n’oublie pas que quand je jouais défenseur central, je sais très bien que je n’étais pas à ce poste grâce à mes qualités physiques, mais en raison de ma lecture du jeu, de ma qualité de relance. Après, il faut avoir les joueurs pour le faire, pour jouer.

« Le 4-4-2, c’est idéal pour cerner un groupe »

Photo Philippe Le Brech

Ton style de jeu préférentiel ?
J’ai un peu tout expérimenté, mais j’ai une certitude, c’est que pour vite faire connaissance avec un groupe et savoir à qui on a affaire, il faut partir sur un 4-4-2, afin de créer des connections défensives, parce que si la ligne des 4 milieux ne travaille pas ensemble ou si les deux attaquants ne s’adaptent pas l’un à l’autre, alors on explose vite. Il faut qu’il y ait beaucoup d’intelligence et de connections pour rester équilibrés. Dans tous les clubs où je suis allé, on est parti comme ça. Après, ça a évolué, pour tirer le meilleur des joueurs mis en place, et cela s’est transformé en 4-3-3 ou en 4-2-3-1, en fonction. Il m’est arrivé de jouer à 3 centraux derrière, hyper costauds, avec deux pistons sur les côtés comme on dit maintenant, à Connerré, parce qu’ils avaient la puissance et le coffre pour faire des aller-retour. Après, il faut s’adapter, trouver la meilleure formule pour exploiter les qualités du groupe.

Le public répond-il présent au stade ?
On fait du monde en début de saison, 700 à 800 personnes, pendant la période estivale, quand notre buvette, située près du poteau de corner, fonctionne bien ! Il y a toujours du monde à cet endroit à la période estivale (rires) ! Je plaisante, mais j’ai senti de la bienveillance et beaucoup de monde pour nous soutenir, un peu moins sur la période hivernale : peut-être que c’est de notre faute, on a été moins bons à domicile, on n’a pas su créer ce truc qui ferait que l’on se sente plus soutenu. À Bressuire, je me souviens du derby contre Thouars, on jouait devant 2200 ou 2300 spectateurs. C’était génial.

« Saint-Malo, la meilleure équipe affrontée »

Photo Philippe Le Brech

Je ne vais pas te demander qui va descendre en N3, même si pour Granville, cela sera compliqué, alors que Le Poiré est condamné, mais plutôt… qui va monter en National ?
Saint-Brieuc est dans la meilleure dynamique, plus que Bourges encore, même Avranches n’est pas largué et bordeaux peut revenir. Mais si je dois me baser sur les matchs que l’on a joués face aux équipes du haut de tableau, les plus forts qu’on a vu, c’est Saint-Malo, mais c’était dans leur bonne période. J’ai trouvé Bourges moins armé techniquement que Saint-Brieuc et Saint-Malo, notamment pour ressortir le ballon. Sur la durée, ça peut les limiter même s’ils font une super deuxième partie de saison.

C’est comment, sinon, la vie à Saumur ?
Saumur, c’est un petit Angers, au bord de la Loire, avec beaucoup d’activités festives dans la ville. C’est tranquille !

  • Texte : Anthony BOYER / Compte X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : Philippe LE BRECH
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Le capitaine de l’équipe de Calais, finaliste de la coupe de France 2000, dont les exploits à répétition sont restés gravés dans le marbre, revisite l’Histoire et raconte, 25 ans après, l’avant, le pendant et l’après épopée ! Discussion à bâtons rompus avec l’un des héros du CRUFC.

Par Anthony BOYER / Photos : 13HF et captures d’écran FFF

Les larmes après la finale de Réginald Becque. Capture d’écran FFF

Les photos ont fait le tour de l’Hexagone. Il y a tout d’abord celle où l’on voit les deux capitaines, Mickaël Landreau et Réginald Becque, soulever la coupe ensemble. Une initiative du gardien international nantais, comme pour rendre le plus bel hommage au football amateur. Comme s’il n’y avait pas un seul mais bien deux vainqueurs de cette édition 2000 de la coupe de France, marquée par cette fabuleuse épopée calaisienne.

Aujourd’hui, qui se souvient que Calais a perdu ce match contre Nantes, 2-1, le 7 mai 2000, au Stade de France ? Personne. Car tout le monde se souvient que les Jaune et noir (et rouge !), les couleurs du CRUFC, sont allés jusqu’en finale !

Et puis il y a cette deuxième photo. On y voit Réginald Becque craquer et fondre en larmes. C’était au coup de sifflet final. Le capitaine de cette « belle bande d’amateurs », comme avait titré la FFF dans son documentaire très réussi d’une heure et demie, tourné vingt ans après l’exploit, avait tant de choses à évacuer.

Dunkerque, Cannes, deux clubs, deux exploits ?

Réginald, le 28 mars 2025 ! Photo 13HF

Mais le natif de Denain, dans le 59, entre Valenciennes et Cambrai (52 ans), sait aussi se tordre de rire : d’ailleurs, il a beaucoup ri durant cet entretien qui a un peu débordé sur le timing imparti, notamment quand on lui a dit que pour le préparer, on avait, nous aussi, pleuré en regardant les différents documentaires consacrés au CRUFC, submergés par les émotions !

Vingt-cinq ans après, et à quelques jours des demi-finales de l’épreuve préférée des Français, qui verra deux « petits » tenter de s’inviter à la table des grands au Stade de France – l’USL Dunkerque tout d’abord, club de Ligue 2 à la trajectoire linéaire et régulière depuis 15 ans et son passage en CFA2 (2010-11); l’AS Cannes ensuite, club de National 2, un « Historique » du championnat de France qui sort d’une très longue traversée du désert, et retombé en DHR (Régional 2) en 2014 -, Réginald Becque revisite l’Histoire avec un grand H.

Dunkerque, Cannes, deux clubs, deux matchs, face au PSG et au Stade de Reims. Deux exploits ? La magie de la coupe opérera-t-elle encore ? L’on sait une chose, c’est que Réginald Becque, lui, sera du côté des « petits ». L’inverse aurait été surprenant. Il suivra bien entendu les deux affiches, il nous l’a dit, et sera sans doute présent au stade Pierre-Mauroy à Lille pour encourager Dunkerque, lui qui habite le quartier de Rosendael, à 2 kilomètres du Stade Tribut, où il n’est pas rare de le voir dans les tribunes encourager les « Marine et blanc ».

Ce qui est très rare en revanche, et là c’est surprenant, c’est de le voir à Calais. Au stade de l’Épopée. Dans cette ville qui l’a consacré et qui a consacré une équipe de « fous furieux », lors de cette fameuse saison 1999-2000. Celui qui est aujourd’hui salarié de la Fédération Française de football explique les raisons de ces « absences » à Calais. Et déroule une énième fois l’Épopée !

Et si jamais les coachs de Cannes et de Dunkerque cherchent des idées pour leur causerie d’avant-match, pour les demi-finales, nous n’avons pas de conseil à leur donner, seulement une suggestion : qu’ils montrent à leurs joueurs le reportage d’une heure et demie sur l’Épopée de Calais… Cela ne fera peut-être pas gagner le match, mais certainement prendre conscience de beaucoup de choses et donnera une énergie positive folle !

Interview : « Les gens se sont identifiés à nous ! »

Au Stade de l’Épopée, il y a quelques années, pour un reportage. Les larmes après la finale de Réginald Becque (Capture d’écran).

Réginald, explique-nous ce que tu fais à la FFF …
Je suis salarié de la Fédération Française de Football depuis 2017, à la direction du football amateur, dans le service événementiel-partenariat. J’interviens sur tous les événements du football éducatif, comme la « Rentrée du foot », le « Festival Foot U13 Pitch » ou la « Journée des débutants », etc. On a aussi six événements annuels organisés pour les bénévoles, notamment La journée qui leur est consacrée au Stade de France pour la finale de la coupe de France : là, on invite 1 000 bénévoles ! On a aussi la tournée « FFF Tour » sur les plages en juillet et août : j’interviens sur la partie animations des nouvelles pratiques (futnet, fit foot, beach soccer, foot en marchant, etc). Enfin, je m’occupe aussi du suivi du partenariat Nike, notamment pour ce qui est des dotations pour les Ligues et les Districts, comme les opérations bons d’achat, mises en place pour les clubs. D’ailleurs, c’est grâce à ce partenariat que j’ai pu être embauché, car la FFF cherchait une personne à l’époque pour s’occuper de cela, et j’ai postulé. Depuis, pas mal de choses ont été mises en place pour le foot amateur, car avant, il n’y avait que les sélections qui bénéficiaient des dotations.

Tu n’as pas de mission liée directement à la coupe de France ?
Non.

« Une vie bien remplie »

Capture d’écran FFF

Et avant 2017, que faisais-tu ?
Déjà, pendant ma carrière de joueur, très tôt j’ai passé mes diplômes. Je suis allé jusqu’à l’ancien DEF, je pouvais à l’époque entraîner en National mais aujourd’hui, le maximum, ce serait Régional 1. Quand j’ai arrêté de jouer à Calais, en 2005, j’ai entraîné la réserve du CRUFC (Calais Racing Union Football-club), ensuite j’ai coaché les seniors à l’AS Marck, à l’US Gravelines puis à Audruicq en Régional 2. J’ai aussi entraîné les U19 à Calais, d’ailleurs, on a fait un 8e de finale de Gambardella (en 2007) avec Calais contre Nantes avec Laurent Guyot coach sur le banc adverse ! On avait perdu aux tirs au but. En parallèle du football, je travaillais à SeaFrance (société de flottes de bateau de type « ferry »), qui était le partenaire principal du club de Calais. Je me suis formé sur le tas, il fallait notamment parler anglais ! J’y suis resté 10 ans, jusqu’en 2010. Juste avant que l’entreprise ne ferme, le maire de Coudekerque-Branche, une ville de 25 000 habitants collée à Dunkerque, m’a contacté : c’est un amoureux de sport et de foot. Mon profil lui plaisait et j’ai fait 7 ans au service des sports de la commune. Le mercredi et le samedi, j’étais détaché et j’intervenais dans le club de foot de Coudekerque, pour l’école de foot. Et ensuite, est arrivée la FFF. Cela fait une vie bien remplie, des expériences, des formations sur le tas, des rencontres, ça me plaît !

Aujourd’hui, en marge de ton travail au sein de la FFF, tu as toujours des fonctions au club de l’AS Marck ?
Oui, je suis toujours secrétaire. J’essaie d’apporter ma contribution, d’accompagner. Je suis attaché à ce club, j’y ai entraîné les U19 et la réserve. L’AS Marck, c’est un état d’esprit et une mentalité qui me plaisent bien.

« À Fontainebleau, c’était très bucolique ! »

Lozano-Becque. Capture d’écran FFF

Tout le monde te connaît pour ton épopée calaisienne, mais peu de gens savent comment tu as commencé le foot ni où tu as été formé…
Je suis né à Denain, entre Valenciennes et Cambrai, dans le Nord, mais j’habitais juste à côté, à Bouchain. Le mercredi, j’allais chez ma grand-mère à Denain, et comme elle habitait juste à coté du stade de foot, c’est là que j’ai commencé. Puis en minimes, je suis allé à Valenciennes, au centre de formation. J’y ai fait deux passages d’ailleurs puisque je suis revenu plus tard en seniors. J’avais signé aspirant mais quasiment tous les jeunes du centre ont été remerciés, c’est un peu bizarre. C’est là que je suis allé au centre de formation du Havre, pendant une saison, où cela n’a pas été évident car c’était la première fois que je partais loin de chez moi. Mais je suis toujours en relation avec Gilles Fouache (entraîneur des gardiennes des équipes de France à la FFF), on a passé des supers moments ensemble ! J’ai ensuite rejoint le centre de formation de Niort, deux saisons, avec son directeur Roger Fleury, qui entraînait Valenciennes, mais je n’ai pas signé pro. C’est comme ça que j’ai atterri à Fontainebleau, en Division 3 : il y avait du beau monde, le coach « Paco » Rubio (ex-Nancy et OM), Pierre Neubert (ex-Valenciennes et Nancy), qui ont tous deux gagné la coupe de France, Philippe Mahut (ex-Le Havre), le président. Cela m’a permis d’effectuer mon service militaire au bataillon de Joinville. J’ai fait trois saisons à Fontainebleau, dans le groupe Ouest de l’ancienne Division 3 (National 2 aujourd’hui). On jouait devant 17 personnes ! Et encore, c’était quand la famille venait (rires) ! Franchement, il n’y avait pas de spectateurs, le terrain était situé en dessous du centre équestre, en bord de forêt, c’était très bucolique !

Sur ton CV, il est écrit aussi que tu as joué en équipe de France U16 : dans cette catégorie, qui a fait une carrière ensuite ?
Le plus connu, c’est Eric Rabesandratana je pense; il était à Nancy à l’époque et ensuite il a joué au PSG.

« Pour passer pro, il m’a manqué de la qualité »

Que t’a t-il manqué selon toi pour être pro ?
De la qualité, tout simplement (rires) ! D’être là au bon moment aussi, d’avoir un peu de réussite, même si à Calais, on était là au bon moment je pense. Il m’a manqué aussi un peu de confiance en soi, des choses comme ça. Mais toutes ces années passées dans les centres de formation m’ont servi pour m’installer ensuite dans les championnats de CFA et National, pour jouer à un bon niveau amateur et vivre de belles émotions. J’ai quand même été champion de France de CFA avec Valenciennes en 1998. J’ai fait des bonnes saisons avec Fontainebleau. Et puis, il y a eu la coupe de France, bien sûr, avec Calais… Mais on a aussi fait des bonnes saisons avec le CRUFC, on jouait devant beaucoup de monde au stade Julien-Denis.

« J’étais un joueur fiable »

Réginald sur le balcon de l’hôtel de Ville de Calais. Capture d’écran FFF.

Avec Valenciennes, tu es champion de France de CFA, vous survolez le championnat, mais tu n’es pas conservé en National : que s’est-il passé ?
À Valenciennes, le coach, c’était Ludovic Batelli. Deux ans plus tôt, le club avait été relégué administrativement en CFA (N2). J’avais signé un contrat fédéral, et la deuxième saison, on a explosé le championnat, j’ai joué quasiment tous les matchs, je m’étais investi, pour passer mes diplômes notamment, et là, on ne me garde pas, on me dit que je ne passerai pas le cap du National, que je n’avais pas le potentiel… J’étais un joueur fiable, pas souvent blessé, je faisais attention à ce que je faisais, mais bon… Ce fut une mauvaise nouvelle, mais sans ça, je n’aurais jamais vécu l’épopée de Calais ! Du coup, comme on avait un peu le mal du pays avec mon ex-épouse, on s’est dit « Pourquoi ne pas remonter dans le Nord ? ». Et me voilà à Calais !

L’Épopée de Calais en coupe, on t’en parle tous les jours ?
(Rires) Non, non, pas tous les jours ! Déjà, je n’en parle pas si on ne m’en parle pas. Après, c’est vrai que lorsque la coupe de France approche, comme là, avec les demi-finales qui arrivent (1er et 2 avril), ça m’arrive, oui, mais c’est tout. Là, ça fait 25 ans, mes enfants n’étaient pas nés… Mais 25 ans, c’est une date, alors peut-être que l’on va en parler un peu plus, je ne sais pas. Calais, cela reste un formidable exploit, mais les gens sont passés à autre chose. C’est toujours un plaisir d’en parler, d’échanger, de faire des comparaisons. Après, c’est sûr, au début, c’était beaucoup plus régulier qu’aujourd’hui, c’est normal. Cela reste un moment incroyable pour moi, pour le club, pour la ville, pour l’épreuve aussi. Un moment magique.

« J’ai vécu la coupe de France en tant que coach aussi »

Est-ce que, du coup, tu suis la coupe de France chaque année ?
Oui. Je regarde régulièrement des matchs, ça c’est sûr. Je vais voir aussi les clubs de District dans les premiers tours de la compétition. Et puis j’ai vécu la coupe aussi en tant que coach, quand j’étais à Coudekerque, en Promotion d’Honneur, on avait éliminé un club de N3, Gravelines, ça crée un engouement particulier, une émulation, ce sont des bons moments. En fait, la coupe, ça crée quelque chose qui va même au delà du football.

Qu’est-ce que cela a déclenché de spécial chez toi ?
Avant l’Épopée avec Calais, je n’avais jamais rien fait en coupe de France. J’avais juste fait un 7e tour avec Valenciennes, que l’on avait perdu contre Wasquehal. Avec Calais, l’année juste avant la finale, on avait perdu au 7e tour contre Lille. Avec Fontainebleau, je ne t’en parle même pas ! On s’était fait marcher dessus par des clubs de District de la région parisienne (rires). Depuis que je ne joue plus, je suis la compétition, je comprends les émotions, je vois les évolutions aussi des clubs, et alors là, quelles évolutions ! Quand je vois que nous, avec Calais, on s’entraînait le soir, trois fois par semaine, après le boulot, sur un terrain très compliqué… Il faut comparer ce qui est comparable, en relativisant aussi un peu.

« L’image forte, c’est la demi-finale et l’après match »

Lozano-Becque. Capture d’écran FFF

En coupe de France, tu es toujours pour le « petit », pour les amateurs ?
Oui, très souvent, à moins que cela ne soit un club de coeur ou de ma région qui joue ! L’an passé, j’ai supporté Valenciennes, où j’ai passé de très bons moments; le club est allé jusqu’en demi-finale. Quand Lille gagne, quand Lens gagne ou quand Dunkerque gagne, je suis content aussi !

Si tu devais ne retenir qu’un seul souvenir de l’Épopée de Calais ?
C’est le stade Bollaert, à Lens, et cet exploit improbable en demi-finale contre Bordeaux (3-1 ap), champion de France en titre, et le retour à 3 heures du matin, l’hôtel de Ville de Calais qui est ouvert, et nous qui montons au balcon; là, tu as plusieurs milliers de personnes qui nous acclament, qui chantent, qui sont heureux. Je crois qu’on est tous unanimes là-dessus, c’est l’image la plus forte que l’on a pu vivre. Il y a eu beaucoup d’autres moments aussi, mais pas à ce niveau là d’émotion et de plaisir.

Tu vas voir des matchs dans ta région ?
Oui, je vais à Dunkerque, j’habite à 2 km du stade Tribut, et puis je suis resté en contact avec le club de Coudekerque-Branche, je vais voir des matchs de tous niveaux dans l’agglomération dunkerquoise, moins chez les jeunes, plutôt des seniors.

« J’ai la nostalgie du CRUFC »

Ladislas Lozano, le coach du CRUFC, au stade Julien Denis à Calais il y a quelques années. Capture d’écran France 3.

Est-ce que tu es allé voir des matchs à Calais cette année, qui est remonté en National 3 ?
Non. Cela fait longtemps que je n’y ai pas mis les pieds.

Ah bon ? Depuis quand ?
Cela doit faire… Je ne sais plus. Cela devait être pour un match de l’équipe de France espoirs ou féminines, ça remonte…

Pourtant, avec le retour de Sylvain Jore (ex-joueur et entraîneur du CRUFC, aujourd’hui directeur sportif du nouveau club, le RC Calais, et qui vient tout juste de succéder à Olivier Laridon au poste d’entraîneur de la N3), que tu as bien connu, tu pourrais y retourner…
Oui, oui, bien sûr, mais j’ai la nostalgie du club, qui a été dissout (en 2017). Aujourd’hui, hormis Cédric Schille, qui donne un coup de main pour les gardiens (Schille fut le gardien de la campagne calaisienne), il n’y a quasiment plus personne qui faisait partie de l’Épopée, c’est un peu… Voilà… au fond de moi, il y a de la nostalgie, de la déception aussi… Notre club n’existe plus, c’est un peu bizarre. Il y a eu beaucoup de remous à Calais. Là, ils ont repris le nom d’un club, le Racing, qui existait déjà avant. C’est comme ça. Je n’ai pas de souci avec ça. Et puis maintenant, je suis beaucoup plus sur Dunkerque et Paris, alors qu’avant, je travaillais à Calais, donc il y a ça aussi. Mes habitudes ont changé.

« Je ne m’identifie pas au RC Calais »

Tu ne ressens pas ce besoin d’aller voir un match à Calais, au stade de l’Epopée ?
Non, pas du tout. Je ne m’identifie pas au club d’aujourd’hui. Nous, à l’époque, en finale, on avait sept ou huit joueurs calaisiens, ou qui avaient fait leur formation au club. Là, c’est différent, c’est plus compliqué, il faudra leur laisser du temps sûrement. Ce qui a fait notre force, en plus d’être de bons joueurs, c’est qu’on était du sérail, on était quasiment tous du Nord, avec une certaine mentalité, un certain état d’esprit.

Quelques années après l’épopée, en 2006, Calais a recroisé Nantes en 1/4 de finale de la coupe de France…
J’entraînais la réserve du club à l’époque, donc j’y ai participé un peu, avec Sylvain (Jore), qui était entraîneur, je me souviens qu’on était allé supervisé Nantes à Nantes, Brest à Brest aussi, on allait voir les adversaires.

« Boulogne, je les suis attentivement »

Cédric Schille, le gardien du CRUFC, entraîne les jeunes gardiens du RC calais aujourd’hui. Capture d’écran FFF.

Et Boulogne alors ?
J’y suis allé en coupe de France pour commenter leur match contre Beauvais, pour France 3 Hauts-de-France. Je suis très content pour eux, en plus, les deux personnes qui sont à la tête du staff, Fabien Dagneaux et Antony Lecointe, sont deux personnes que j’ai croisées sur les terrains, ce sont des purs boulonnais. Ce qu’il réalisent cette saison en National, c’est exceptionnel ! Ils font vraiment du bon travail depuis qu’ils sont à la tête du club, ils sont encore en course pour la montée en Ligue 2. Leurs matchs sont serrés, ils marquent souvent à la fin, ils s’arrachent, ça démontre un état d’esprit et les valeurs de la ville et du club. C’est un club que je suis attentivement.

La coupe de France a-t-elle changé ta vie ?
(rires) Forcément un petit peu ! Oui, évidemment ! Il y a deux choses, le parcours et la photo (avec Mickaël Landreau, quand tous les deux soulèvent la coupe). Personnellement, j’ai vécu des émotions que je n’avais jamais vécues, des moments de joie, de solidarité, en plus, tout ça grâce au foot, ma passion. Sûrement que cela a changé ma façon d’être, aussi, sans m’en rendre compte.

Comment es-tu devenu capitaine du CRUFC ?
J’avais déjà été capitaine chez les jeunes à Valenciennes. Cela s’est passé lors de ma deuxième saison à Calais, le capitaine de l’époque, Stéphane Canu, se blesse, et « Ladi » (Ladislas Lozano, le coach) me dit que je vais prendre le brassard, mais il y avait plein d’autres joueurs, des purs calaisiens, qui auraient pu prétendre à occuper ce rôle. Ou même un défenseur central, parce que moi, j’étais arrière gauche, ce n’est peut-être pas le poste idéal pour jouer ce rôle, que j’ai essayé de remplir du mieux possible.

Qui sera le nouveau Calais ?

Chaque saison, des clubs de N2 ou N3 arrivent en 8e ou en 1/4 de finale de la coupe, et on cherche le nouveau Calais : tu crois que ce sera Cannes ?
C’est drôle, j’en avais discuté une fois lors d’un tirage au sort avec Stéphane Masala, le coach qui avait emmené les Herbiers en finale (en 2018), il me disait que si Calais l’avait fait, pourquoi pas un autre club ? On a été les premiers, alors s’il y en a un autre, tant mieux, cela ne ‘est pas joué à grand chose par le passé. Je me souviens de Carquefou qui élimine l’OM (le club de CFA2 avait crée la surprise en 2008), alors même s’ils ne sont pas allés en finale, ils ont vécu cet exploit là, et quel exploit, face à l’OM ! C’est sur que quand tu vas en finale, ça change l’Histoire, ça met encore plus en valeurs les joueurs, le club, la ville, forcément.

« Contre Bordeaux, c’était chaud ! »

Au Stade de France, avec Mika Landreau. Capture d’écran FFF.

À l’issue de la finale de Calais en 2000, on a vu des liens se nouer avec des Nantais, les vainqueurs, mais on ne peut pas en dire autant avec les Bordelais, en demi-finale… Tu as recroisé des Girondins ?
J’ai croisé Christophe Dugarry, avec le Variété club de France et aussi Elie Baup, qui était le coach. On avait fait une photo avec Elie Baup. Mais j’ai plus d’affinités avec des « Mika » Landreau qu’avec des Bordelais (rires). Quand je vais à Capbreton pour le festival U13, je croise toujours des Landais qui sont supporters de Bordeaux, il y a toujours des petites remarques, ça chambre, mais voilà, ça ne va pas plus loin. C’est vrai qu’en demi-finale, contre Bordeaux, c’était chaud, mais c’était improbable ! Il y avait des champions du monde en face, Bordeaux était champion de France en titre et affrontait une équipe de CFA qui n’avait jamais joué devant 40 000 spectateurs ! Les Girondins ne s’attendaient pas à cette physionomie de match : on est à 0-0 au début de la prolongation et c’est nous, les amateurs, qui mettons 3 buts, c’est juste improbable ! Inimaginable ! On n’allait pas les laisser jouer, alors on a été agressifs, on a joué avec nos valeurs, mais on a toujours respecté nos adversaires, on n’a jamais chambré personne. Si les gens se sont tant identifiés à nous, c’est parce qu’on donnait le maximum et qu’on respectait tout le monde.

Pourquoi ça a tant marqué les gens ? On en parle encore 25 ans après …
C’est ce que je disais : les gens se sont identifiés à nous parce qu’on ne lâchait rien, on donnait tout, on proposait du jeu. Nos discours dans les médias étaient cohérents. Il n’y avait pas de rancoeur vis à vis du monde professionnel, au contraire, parce que tout ce que l’on avait appris dans les centres de formation nous a servi pour vivre cette épopée, comme le don de soi, la solidarité, l’amour du maillot, et puis cette équipe, avec la colonne vertébrale, Cédric Schille, Manu Vasseur et Mickaël Gérard, pff…. Dans cette équipe, personne ne pensait à sa gueule, on ne pensait qu’à l’équipe, qu’au club.

« Le Puy, contre Montpellier, ressemblait à Calais »

Ladislas Lozano, le coach du CRUFC. Capture d’écran FFF.

En 25 ans, tu as déjà vu une autre équipe qui ressemblait à Calais 2000 ?
Non. Après, je n’ai pas regardé tous les matchs ou toutes les épopées suivantes, mais attend, quand même, si, récemment, il y a eu Le Puy, qui a mis 4 à 0 à Montpellier, cette équipe avait un état d’esprit remarquable et des joueurs de qualité. Elle ressemblait un peu au Calais de l’époque. De toute façon, il n’y a pas de secret, il faut que tout le monde, joueurs, remplaçants, staff, ait la même ligne directrice, le même objectif, sinon cela ne peut pas marcher.

Vous avez un groupe WhatApp avec les anciens ?
Oui ! Il y avait tout le monde mais y’en a qui se sont retirés, mais pas parce qu’on ne s’aime pas, c’est juste que certains sont moins branchés réseaux sociaux, c’est tout. On essaie d’organiser un tournoi de futsal chaque début d’année pour se retrouver, et de faire un match en juin, comme lors du challenge Claude Thiriot (du nom de l’ancien manager général du club), au profit des handicapés. On a toujours des moments pour se retrouver.

Ladislas Lozano est sur le groupe ?
Non, c’est vraiment un groupe pour les joueurs.

Vous n’êtes pas invité à la finale ?
Non (rires) cela n’est jamais arrivé ça !

Pour les 25 ans, la FFF pourrait y penser !
Oui, oui, la finale est le 24 mai, il y a encore du temps !

Tu es toujours en contact avec lui ?
Un petit peu, comme ça. Il est revenu sur Calais après avoir habité dans le Sud-Ouest.

« Lozano nous a donnés la confiance »

Au Stade de France, avec Mika Landreau. Capture d’écran FFF.

Quand on visionne les différents reportages consacrés à Calais, on s’aperçoit à quel point Lozano fut prépondérant dans l’épopée… Sans lui, tout cela n’aurait jamais eu lieu, même si on ne peut pas le savoir…

On n’a pas la réponse mais je pense que tu n’es pas loin de la vérité quand même ! Il a eu un rôle essentiel. Il y a ses qualités de coachs, ses préparations de match, il se déplaçait pour voir nos adversaires parce qu’il trouvait qu’à la télé, il ne ressentait pas les ambiances. Il avait cette faculté de nous faire croire qu’on était les meilleurs joueurs du monde et que l’on pouvait battre n’importe qui. Et sur le plan tactique, toutes les recommandations qu’il a pu nous donner, nous, on les appliquait, et ça marchait. On était vraiment un groupe à l’écoute, qui avait envie d’y croire.

C’est vrai que dans les reportages, on dirait qu’il raconte les scénarios des matchs à l’avance…
Exactement, c’est tout à fait ça ! Il disait « Faites ça, faites ça, ça va marcher ». Contre Bordeaux, sur les corners, il nous avait interdit de les tirer « direct », il fallait forcément les jouer à deux, parce que, par rapport à leurs gabarits, on aurait eu aucune chance de récupérer un ballon; ça c’est un petit truc qui permettait de garder le ballon, de faire jouer. On savait aussi que Bordeaux n’allait pas trop dans la profondeur, des petites choses tactiques, comme ça, et puis il nous a donnés la confiance.

Il y a aussi une anecdote incroyable avec Thierry Debès, le gardien de Strasbourg, quand il dit qu’il a du mal à capter les ballons et qu’il faut suivre…
Oui ! Et ça s’est passé comme ça ! Mais c’est tout un groupe; le staff, André Roche le président, Claude Thiriot le manager, les dirigeants… quand il y a ce « tout », tu peux réussir de grands exploits !

« On aurait pu être éliminé au 7e tour ! »

On n’en parle pas souvent, mais votre match le plus dur, ce fut contre Béthune (CFA), au 7e tour…
(Rires) Oui, vraiment ! On passe par un trou de souris, on marque à la 45e ou 46e, je ne sais même pas si on avait dépassé le milieu de terrain en deuxième mi-temps, ils frappent sur le poteau, et on se qualifie, c’est ça aussi la beauté et la magie d’une épopée. Cela aurait très bien pu s’arrêter là.

La prime de la finale ?
180 000 francs (27 500 euros environ). Le président a été généreux, après, il mettait des montants de primes qu’il ne pensait pas donner (rires), et il a rien donné sur la finale ! Avec cet argent, je suis resté sur mon idée de base : cela a accéléré un peu mes projets, notamment de construction de maison. J’en ai gardé aussi pour payer les impôts, parce que ça a fait drôle ! Mais on ne peut pas comparer avec aujourd’hui.

« La saison en National, ce fut un fiasco complet »

Réginald sur le balcon de l’hôtel de Ville de Calais. Capture d’écran FFF.

La saison qui a suivi la coupe de France, Calais est monté en National…
Oh la la oui, après un barrage mémorable à Cherbourg, 10 à 9 aux tirs au but, avec la moitié de l’équipe en tribune parce qu’on était tous blessés ! On a fini à 10 parce que Thierry Vaillant s’est fait expulser ! C’était vraiment un truc de fou ! Maintenant, avec le recul, je ne sais pas si c’était une bonne chose de monter en National, parce que le club n’était pas du tout prêt. J’avais toujours un travail en National, le club a fait venir des contrats fédéraux, il y a eu un nouveau coach, Manu Abreu, parce que « Ladis »(Lozano) est parti. Il y a eu énormément de changements, et puis on avait des problèmes d’infrastructures, d’installations, dans l’organisation aussi. Cela a été un fiasco complet.

En National, tu as donc joué à Cannes, en championnat…
Oui, tout à fait, je connais le stade, je me souviens qu’il y avait l’attaquant David Suarez, qui entraîne les jeunes du PSG aujourd’hui, il y avait aussi Toulouse dans ce championnat avec Christophe Revault que j’avais revu, et que j’avais connu au Havre.

« Je n’ai pas regardé Cannes, non… »

Tu as regardé Cannes en coupe de France cette saison ?
Non. Je suis désolé (rires) ! Mais j’ai vu des vidéos de leur attaquant (Julien Domingues) qui a mis des buts exceptionnels. Mais je vais regarder Cannes-Reims.

L’engouement n’atteint pas celui de Calais 2000…
Il y a les réseaux sociaux aujourd’hui, et puis ce n’est pas du tout pareil. La région cannoise et la région calaisienne, je pense que c’est très différent, ce ne sont pas les mêmes populations. Maintenant, pour Cannes, ça va monter en puissance à l’approche du match et s’ils parviennent à se qualifier pour la finale, alors là, ça prendra beaucoup plus d’ampleur.

Tu vas aller voir Dunkerque-PSG ?
Oui, normalement, je serai à Lille, en espérant un exploit de Dunkerque, où je connais quelques personnes comme Christophe Lollichon (entraîneur des gardiens à l’USLD), que j’ai croisé par hasard dans un train en revenant de Paris, avec qui j’ai échangé, et quelques personnes du secteur administratif, même si le club a beaucoup évolué. Le nouveau stade Tribut est sympa, on est proche du terrain, avant, il y avait une piste, mais je me demande s’ils ne l’ont pas fait un peu trop petit. Le stade est vite plein !

Lens mis à part, quelle est la vraie ville de foot : Calais, Boulogne, Dunkerque, Valenciennes ?
(Rires) Ce ne sont pas les mêmes populations, chaque ville a ses spécificités, mais je dirais Boulogne quand même, c’est elle la ville de foot. Mais à Calais, le stade Julien-Denis, c’était quelque chose… Peut-être qu’il aurait fallu le rénover pour continuer à faire vivre ce quartier et ces gens qui avaient leurs habitudes, avec les cafés autour. Là, le stade (de l’Épopée) est à l’extérieur, c’est complètement différent…

Réginald Becque, du tac au tac

Meilleur joueur côtoyé ?
Manu Vasseur.

Pire souvenir sportif ?
Je n’ai que des bons moments !! Je n’en ai pas ! Ou alors peut-être quand je n’ai pas été conservé à Valenciennes !

Tu as déjà marqué des buts ?
Ah bah quand même, j’en ai marqué plusieurs, et puis je tirais les penaltys je te rappelle (rires) !

Ton plus but ?
C’est à Boulogne-sur-Mer, quand je jouais à Fontainebleau, un ballon qui sort de la surface et je le reprends du pied gauche et ça file en lucarne opposée !

Pourquoi as-tu fait du football ?
Mon père jouait au foot, on habitait en face d’un stade, je m’y suis mis très vite, c’est pour ça.

Capture d’écran FFF.

Qualités et défauts sur un terrain, et dans la vie ?
(Rires) Que cela soit sur un terrain ou dans la vie de tous les jours, ce sont un peu les mêmes, c’est voir le côté positif, donner le meilleur de soi-même pour que ça marche, pour que ça réussisse.

Un club où tu as failli signer ?
Quand j’étais jeune, avant de signer à Valenciennes, j’avais eu un contact avec le RC Strasbourg mais comme j’habitais la région de Valenciennes, je suis allé à Valenciennes.

Dans tes rêves les plus fous, le club où tu aurais aimé jouer ?
Dans un club allemand, je ne sais pas pourquoi !

Le coéquipier avec lequel tu avais le meilleur feeling ?
Jérôme Dutitre.

Combien d’amis dans le football ?
J’en ai pas mal !

Le joueur adverse qui t’a le plus impressionné au cours de cette épopée calaisienne ?
Christophe Dugarry, par son charisme, par son envie, par son caractère, par son statut.

Un coach perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?
Avec les réseaux sociaux, aujourd’hui, on arrive à être en contact avec tout le monde, donc non, tous ceux que je peux voir ou que j’aimerais voir, je suis en contact avec eux.

Un joueur perdu de vue que tu aimerais revoir ?
C’est un peu la même chose, je pense à Gilles Fouache (Le Havre), on est arrivé à se croiser ou à échanger de temps en temps.

La causerie qui t’a le plus marqué ?
C’est celle de « Ladi » (Lozano) avant la demi-finale contre Bordeaux. Elle a marqué.

Des manies, des tocs avant un match ?
Le vendredi soir, c’était pâtes-carbonara forcément (rires) !

Demi-finales de la coupe de France / USL Dunkerque (L2) – PSG (L1), mardi 1er avril à 21h10 à Lille (sur France TV et BeIN); AS Cannes (N2) – Stade de Reims (L1), mercredi 2 avril, à 21h, à Cannes (sur BeIN unuqiuement).

 

  • Texte : Anthony BOYER / Compte X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : captures d’écran @FFF
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Voir le documentaire de la FFF : https://www.youtube.com/watch?v=A_rB5teeHtI

 

L’entraîneur qui avait conduit Les Herbiers en finale de la coupe de France en 2018 a trouvé, dans l’Oise, un projet dont l’ambition est partagée et assumée : retrouver le monde pro. Avec ses ingrédients – travail, rigueur et… travail -, il compte bien y parvenir.

Par Anthony BOYER / Photos : Eric Crémois – EC Photosports

Photo Eric CREMOIS / EC Photosports

Si le maire de Chambly, David Lazarus, lit cet article, il faut qu’il sache que le réseau est mauvais au stade Walter-Luzi. Il faut vraiment agir, parce que là, ce n’est plus possible ! La liaison avec Stéphane Masala ne fut pas terrible, souvent coupée, tant et si bien que le coach de l’équipe de National 2 a dû quitter son magnifique bureau pour s’installer dehors – au soleil ! – afin de mieux capter le réseau. Et ce n’est pas parce qu’il commençait toutes ses phrases par « Ecoute », un tic de langage, que cela a aidé à bien l’entendre !

On exagère. Bien sûr que l’on a « écouté » ses réponses ! Car l’entretien fut fluide. Et les réponses de l’ancien coach des Herbiers et de Créteil, au demeurant extrêmement sympathique, furent, elles, à la fois très claires et très spontanées.

Le natif de Nantes (48 ans) aime parler, ça se sent – sans doute ses origines sardes ! – et le plus souvent d’une voix qui porte. Si le ton est fort, c’est peut-être parce qu’il n’a pas un physique imposant comme certains, quand bien même il dégage un charisme naturel et beaucoup de personnalité. Pour autant, ses réponses sont assez courtes et il va à l’essentiel. Stéphane Masala ne s’embarrasse pas de longs discours et n’en fait pas des tonnes.

Une 5e place et seulement 3 défaites en 22 matchs

Dans un emploi du temps chargé et entièrement consacré au football, le coach de Chambly – depuis juillet 2023 – a tout de même trouvé le temps de caser 45 minutes d’entretien avec nous. C’était mardi, à midi 30, au sortir d’une séance d’entraînement pas encore débriefée.

Photo Eric CREMOIS / EC Photosports

Avec lui, on a parlé, évidemment, de la coupe de France : comment voulez-vous se défaire de pareille étiquette ? C’est lui, Stéphane Masala, qui a signé l’un des plus grands exploits de l’histoire du foot amateur, en « emmenant » Les Herbiers, club vendéen de National à l’époque, en finale de la coupe de France à Saint-Denis, au Stade de France ! C’était en 2018.

On a aussi parlé du FC Chambly Oise, bien sûr, où il a pris la succession de Fabien Valéri en 2023, dans une période où le club tentait de digérer sa double descente, de Ligue 2 en National 2. Pas simple. Surtout que le nombreux public du splendide stade Walter-Luzi (où l’on enregistre souvent des records d’affluence en N2), nostalgique, avait pris l’habitude de ferrailler avec quelques grands noms du football français… Forcément, affronter Villers-Houlgate, Chantilly, Aubervilliers ou Feignies-Aulnoye, sans leur faire injure, et affronter Lens, Auxerre, Caen ou Le Havre, ça n’a pas la même saveur.

Mais c’est désormais le quotidien d’un club qui envisage de retourner, au moins, en National. Cette saison, cela paraît compliqué, même si l’équipe du président Fulvio Luzi n’est pas si loin au classement (5e) et n’a perdu qu’une fois de plus que le leader, Fleury (trois défaites contre deux pour le club essonnien).

Le problème, ce sont ces 3 points de pénalité qui plombent le bilan comptable (le même que celui de Thionville, actuel 2e ex-aequo, qui lui a gagné 3 points sur tapis vert) et aussi ces nombreux matchs nuls (10 en 22 matchs). Mais depuis quelques semaines, le FCCO, qui prend beaucoup de points face aux « gros », a semble-t-il trouvé la formule pour transformer les nuls en victoires (5 succès sur les 7 derniers matchs). Presque un rythme de champion…

Interview : « Chambly est un gros club ! »

Photo Eric CREMOIS / EC Photosports

Meilleur souvenir sportif ?
La finale de la coupe de France avec Les Herbiers (en 2018).

Pire souvenir sportif ?
La descente de National en National 2, avec Les Herbiers, trois jours après la finale de la coupe de France, à la dernière journée de championnat. Un moment difficile. On n’avait jamais été relégable de la saison, et il fallait un concours de circonstances incroyable pour que cela arrive et c’est arrivé : je me souviens que Sannois-Saint-Gratien, qui n’avait jamais gagné à l’extérieur, qui était relégable, est allé gagner à Grenoble qui jouait sa montée en Ligue 2 ! L’entraîneur des gardiens de l’époque à Sannois, « Baba » (Kamel Bouzid), est avec moi aujourd’hui à Chambly !

Ce match à Béziers, perdu 4-1, tu peux nous en reparler : c’était vraiment injouable, trop dur, trois jours après la coupe ?
Il y a plein de choses qui, mises bout à bout, ne seraient pas à refaire. On en reparle parfois avec les anciens. En fait, on s’est trompé dans la logistique déjà. On décide d’emmener tout le monde en finale de la coupe au Stade de France, qui se joue un mardi, et le lendemain matin, on part directement à Béziers, deux jours avant le match. Ce n’est pas ce qu’il aurait fallu faire. On aurait dû rentrer aux Herbiers, quitte à repartir à Béziers. Le soir après la finale, dans la nuit, à 2 ou 3 heures du matin, je reconvoque tous mes joueurs, je leur dis qui va partir à Béziers quelques heures plus tard, le lendemain matin. Et on arrive là-bas avec des gars qui, pour certains, sont frustrés de ne pas avoir joué la finale, on savait que les joueurs étaient vidés, qu’ils n’avaient plus de jus, et en plus, ils n’avaient même pas pu profiter de la soirée. Franchement, c’était compliqué. On a essayé avec le staff de… mais sincèrement, on n’a pas très bien géré cette situation, mais ça, c’est l’expérience qui nous l’a appris après. Si c’était à refaire, on referait différemment.

« Le National n’a pas fait preuve de solidarité »

Et le match à Béziers ?
En face, tu avais une équipe qui jouait la montée, dans son stade, qui était sur-motivée. En fait, au début, on est dans le match, mais après, dès qu’on a été mené 2-1, puis 3-1, ça a lâché, c’était fini quoi… Il n’y avait plus de ressort. Le truc, c’est que j’entendais les résultats des autres matchs depuis mon banc, et là, très sincèrement, j’avais l’impression d’être dans le Titanic, de couler, de ne pas réussir à piloter mes gars.

C’est quoi la morale de cette histoire ? La leçon à retenir ?
Le club des Herbiers avait effectué une demande auprès de la Fédération Française de football pour décaler le match de Béziers du vendredi au samedi, mais il aurait fallu décaler tous les autres matchs aussi puisque, pour la dernière journée de National, tous les matchs doivent se dérouler en même temps. Il fallait que tous les clubs valident ça : or tous n’ont pas validé, et la journée n’a pas été reportée, ce que je peux comprendre, car chaque club voit son intérêt, c’est normal, mais sur ce coup-là, la division n’a pas fait preuve de solidarité. Ils auraient peut-être pu marquer l’Histoire, en se disant « On est tous derrière Les Herbiers », mais il n’y a pas eu cette solidarité.

« Cette finale, ça fait partie de mon histoire ! »

Photo Eric CREMOIS / EC Photosports

Tu crois que cela aurait changé quelque chose si vous aviez joué le samedi à Béziers au lieu du vendredi ?
(Il réfléchit) Non, je ne le pense pas. Mais peut-être que cela nous aurait forcé à prendre d’autres options. Si c’était à refaire, je dirais à mes gars « Faites la fête, profitez de vos familles, de vos amis après cette finale », on serait retourné aux Herbiers, on serait allé à l’arrache à Béziers, mais là, cette continuité, ce n’est pas ce que l’on aurait dû faire.

Parfois, tu n’en as pas marre d’être catalogué comme « le coach qui a emmené Les Herbiers en finale de la coupe » et que l’on t’en parle tout le temps ? »
Alors ça c’est une bonne question, on ne me l’avait jamais posée ! Cette finale de coupe, ça fait partie de mon histoire, ce n’est pas anodin quand même. C’est même un point fort je pense. Cette image, je l’ai un peu moins aujourd’hui, on m’en parle un peu moins, même si ça reste fort. Après, non, ça ne me dérange pas du tout ! Maintenant, repose-moi la question dans 10 ans, et là, peut-être que je te dirai « Put… j’en a marre d’être catalogué comme le coach des Herbiers qui est allé en finale… ! »

« Cannes-Reims ? Je serai pour Reims ! »

Photo Eric CREMOIS / EC Photosports

Le 2 avril, il y aura Cannes-Reims en demi-finale de la coupe de France : tu seras pour le petit poucet ?
J’aime beaucoup Damien Ott, le coach de Cannes, c’est un ami, mais je serai pour Reims ! Le Stade de Reims vit une saison difficile et pour eux, ce serait bien de se retrouver en finale de la coupe de France. Je me souviens qu’au moment de la finale avec Les Herbiers, en 2018, Jean-Pierre Caillot, le président de Reims, m’avait appelé pour me féliciter, et m’avait dit « Tu ne sais pas ce que j’échangerais pour être à ta place, en finale face au PSG, au Stade de France »… Je lui avais dit « Mais président, vous êtes en Ligue 1 » et il m’avait dit « Oui, mais ça ne vaut pas une finale de coupe de France face au PSG ». Donc je lui souhaite de tout coeur d’y aller !

Le club ou la saison où tu as pris le plus de plaisir ?
Je prends beaucoup de plaisir à Chambly avec Fulvio Luzi et ce stade Walter-Luzi, d’un point de vue « spectacle », je suis en phase avec le club; après, la saison qui me revient, c’est celle à Créteil (N2, 2022-23), où j’étais dans un vrai projet professionnel, élaboré par Helder Esteves, le directeur sportif de l’époque, c’était vraiment très intéressant. J’ai côtoyé là-bas des gens d’une grande compétence.

Pourquoi n’être resté qu’une seule saison à Créteil alors ?
Le projet reposait surtout sur le directeur sportif, Helder Esteves, et quand le président a décidé d’arrêter de travailler avec lui, pour moi ce fut une évidence qu’il fallait partir, que le projet n’était plus viable.

Un club où tu as failli signer, mais cela ne s’est pas fait ?
J’ai eu beaucoup de sollicitations après la finale de la coupe de France, mais il y avait le souci du diplôme. J’ai eu notamment une sollicitation très sympa, d’Olbia en Sardaigne, en série C italienne; mon papa est Sarde, il était venu en France pour travailler, et je trouvais ça sympa d’aller travailler là-bas… Le directeur sportif et l’avocat du club s’étaient déplacés, les discussions avaient duré…

« Je rêverais d’entraîner Cagliari ! »

Le superbe stade Walter-Luzi, à Chambly, du nom du papa de Bruno et Fulvio Luzi. Photo 13HF

Le club que tu rêverais d’entraîner, dans tes rêves les plus fous ?
Cagliari.

Je pensais que tu dirais la Juventus de Turin …
J’ai hésité, mais dans mes rêves les plus fous, ce serait Cagliari !

C’est ton amour de la Sardaigne, ça… Tu as toujours des attaches là-bas ?
Oui. J’y retourne, j’essaie d’y emmener mes enfants, pour leur montrer les origines sardes et la culture sarde, dans le village, à Anela, où j’ai tous mes amis. C’est le coeur de la Sardaigne pour moi. On y a toujours la maison de ma grand-mère. J’essaie de passer 4 ou 5 jours de vacances par an là-bas.

Un modèle de coach ?
C’est un entraîneur italien de volley-ball, Julio Velazco, il m’inspire. Il est Argentin (naturalisé italien). Je le suis beaucoup. Je m’intéresse beaucoup à ce qu’il fait. Il a remporté la médaille d’or l’an passé aux JO avec l’équipe nationale féminine italienne de volley. Après, sinon, on est tous influencé par les grands entraîneurs, Guardiola, Ancelotti, Luis Enrique en ce moment, qui propose quelque chose de très sympa au PSG.

Le meilleur joueur que tu as entraîné ?
Sur l’aspect technique, je dirais Charly Charrier, que j’ai eu quand j’étais adjoint à Luçon, et que j’ai ensuite eu aux Herbiers, il a un peu joué en Ligue 1 (à Amiens). Sur le plan du leadership, du patron, c’est Ibrahima Seck à Créteil, un vrai pro, un leader. Ce sont les deux garçons qui me viennent à l’esprit.

« La valeur du travail est très importante »

Photo Eric CREMOIS / EC Photosports

Pourquoi as-tu choisi d’être entraîneur ?
Mon rêve était d’être joueur professionnel, je remercie d’ailleurs mon formateur à Troyes, Carlos Lopez, qui nous a poussés à passer des diplômes d’entraîneur, parce que nous, les jeunes, on ne voulait pas du tout les passer, mais au fil du temps, quand j’ai vu que c’était compliqué de passer pro mais que j’avais cette passion du football, que j’aimais transmettre, parce que j’ai fait des études de STAPS, et bien cela s’est fait un peu naturellement. Chez moi, cette envie est venue vers l’âge de 25 ou 26 ans, j’ai commencé à copier les séances d’entraînement de mes coachs dans un cahier. J’aimais bien aussi la manière de travailler de mon père dans son entreprise de maçonnerie, à Cormontreuil, tout près de Reims; pendant les vacances, je ne restais jamais sans rien faire, il fallait aller travailler, parce que dans notre famille, la valeur du travail est très importante. Il m’emmenait avec lui et m’expliquait comment il gérait ses dix employés, pourquoi il mettait un tel dans ce chantier et un tel dans un autre chantier… Et cette façon de gérer l’humain par rapport à la tâche à effectuer, de le comprendre, ça m’a parlé. En fait, mon père m’a toujours dit « Tout le monde est bon, mais il faut pour chaque personne lui trouver sa place ». J’ai toujours cette phrase en moi.

« Je prends mon temps, je continue d’avancer »

Ton parcours de joueur ?
Je suis formé au stade de Reims, qui s’est cassé la figure, le club est descendu en DH, et quand je suis revenu, le club était en CFA avec Manu Abreu, on a fait la montée en National. J’ai passé quatre ans au centre de formation à Troyes. Reims, Troyes, ce sont les deux gros clubs près de chez moi, à Cormontreuil, où mes parents habitent toujours. Et mon frère (Mike) entraîne l’équipe de basket de Cormontreuil (en Pré-Nationale).

Que t’a t il manqué pour jouer en pro ? Et que te manque-t-il pour entraîner plus haut que National ou N2 ?
Quand j’étais joueur, je n’avais pas les qualités physiques suffisantes. J’étais structuré, intelligent, mais pas assez bon techniquement et physiquement. Après, ce qui me manque pour entraîner plus haut, c’est du temps ! Tout simplement. J’espère réussir à aller entraîner en pro. Je prends mon temps et je continue d’avancer. Je vais postuler à nouveau cette année, comme l’an passé, pour la prochaine session du BEPF.

Un coach qui t’a marqué dans ta carrière ?
Il y en a eu plusieurs. Franck Lorenzetti, qui était l’adjoint d’Alain Perrin en Ligue 2 à Troyes : sa façon d’entraîner m’inspirait. Je l’ai connu à Chalons-en-Champagne, où j’ai joué également. Et il y a eu « Fred » Reculeau à Luçon, qui a une façon bien particulière d’entraîner, et qui a voulu que je sois son capitaine là-bas, et aussi son, adjoint; je trouvais ça loufoque, mais avec le recul, je me dis que c’était une bonne idée de sa part.

Yoga et visualisation avant un match

Superbe image de la demi-finale Les Herbiers / Chambly en 2018 avec les deux coachs, Bruno Luzi et Stéphane Masala, à Nantes. Photo Eric CREMOIS / EC Photosports

Un entraîneur que tu n’as pas forcément envie de revoir ?
Non, aucun, même ceux avec lesquels ça s’est moyennement passé, je serais content de les voir aujourd’hui pour, justement, leur demander pourquoi ça s’est passé comme ça !

Combien d’amis entraîneurs ?
Je considère que j’en ai quatre sûr ! Après, j’ai beaucoup de collègues entraîneurs.

Le coach le plus connu de ton répertoire ?
J’ai le numéro d’Angelo Castellazzi, qui était dans le staff de Carlo Ancelotti à Paris (il est aujourd’hui directeur sportif de la section féminine du PSG) : j’étais entré en contact avec lui pour une vidéo, à l’époque, je l’avais eu par l’intermédiaire d’Olivier Létang, avec qui j’ai joué. Je crois que c’est le plus connu de mon répertoire (rires).

Tu as des manies, des rituels avant un match ?
Avant les matchs, j’essaie de faire de la visualisation, sous forme de yoga, afin de mettre en ordre toutes les informations que mon staff et mes joueurs ont pu me donner dans la semaine. C’est un exercice que j’ai pris l’habitude de faire.

Une devise ?
« Dai ! Dai ! Dai !  » (rires) ! ( Alez, allez en italien !)

« Prendre le ballon, c’est aussi une manière de défendre »

Eric CREMOIS / EC Photosports

Ton style de jeu ?
J’aime que mon équipe soit ambitieuse, parce que le football, ça reste un rapport de force : il faut prendre le ballon. Je suis plus à l’aise dans une défense à 4, dans un système en 4-3-3 ou 4-2-3-1. J’aime ne pas prendre de but, même si cela a changé avec le temps, mais on ne peut plus uniquement jouer en défendant devant son but; prendre le ballon, c’est aussi une manière de défendre pour moi.

Un match référence avec toi sur le banc ?
En coupe de France, Auxerre – Les Herbiers (8e de finale); ce match-là, tout se passe exactement comme on l’avait prévu avec le staff; c’est comme si on l’avait écrit avant et que les joueurs récitaient. Je me suis même permis pendant les dernières secondes du match de regarder tout autour de moi, on menait 3 à 0, il commençait à neiger, je me disais « Waouh, c’est incroyable ! ».

Le pire match avec toi sur le banc ?
C’est avec Saint-Aubin-la-plaine en première division de district, où j’ai commencé à entraîner. C’était à cause de l’arbitre ! J’étais joueur à Luçon à l’époque, et je voulais entraîner : du coup, le président Michel Reculeau m’a mis en relation avec ce club, et on a gagné le challenge de Vendée : pour eux, c’était comme gagner la coupe de France (rires) ! L’expérience a duré trois saisons.

« Je suis chiant et rigide »

Le superbe stade Walter-Luzi, à Chambly, du nom du papa de Bruno et Fulvio Luzi. Photo 13HF

Qui est le joueur de foot de légende ?
Maradona.

Le match de foot de légende ?
Italie-Allemagne, finale de la coupe du monde 1982.

Une idole de jeunesse ?
Gianluigi Buffon.

Une passion, autre que le foot ?
J’essaie de vraiment faire attention à ma famille, c’est quelque chose à laquelle je suis très attaché. Dès que je le peux, j’essaie de leur accorder du temps mais c’est difficile, parce que le foot, c’est du 24h sur 24. Donc je n’ai pas le temps pour les autres passions.

Tu es un entraîneur plutôt…
Je pense que je suis chiant. J’en demande toujours beaucoup, travailler, travailler, travailler… Je suis rigide, un peu : on en revient aux valeurs de travail et de discipline. Je suis honnête.

Tu as acheté une maison pas loin du stade de Chambly : c’est important pour toi d’être là, sur place ? C’est aussi un signe d’engagement, d’intégration…
C’est ce que je disais tout à l’heure : quand le projet du FC Chambly s’est présenté, je me suis dit qu’on avait les mêmes ambitions. Le club veut retourner en Ligue 2, et je veux entraîner en pro. On peut donc faire un bout de chemin ensemble. Je me déplace toujours avec la famille, c’est important. Je veux m’inscrire à fond dans ce projet et pour ça, il ne faut pas être loin du stade, pour pouvoir y passer un maximum de temps, pour aller voir jouer les autres équipes le week-end, et c’est ce que je fais.

À Chambly, on le sait, il y a le nom « Luzi » et le lien avec l’Italie… Vous vous parlez en italien parfois avec Fulvio, le président ?
Ce que tu dis est important parce qu’avec le président, on a un socle et un logiciel communs : on ressent les mêmes choses, on est éduqué d’une certaine manière, on a des valeurs communes qui nous rattachent. J’ai beaucoup de sympathie pour lui.

« C’est rare en N2 d’avoir un stade comme ça »

Le superbe stade Walter-Luzi, à Chambly, du nom du papa de Bruno et Fulvio Luzi. Photo 13HF

On a l’impression que le club de Chambly, avec son ascension jusqu’en Ligue 2, a du mal à se remettre de ses épopées et vit un peu dans le passé : on se trompe ?
Cela a été difficile à vivre pour eux. Ce club s’est construit en étant toujours le « petit » qui doit faire ses preuves, qui doit être plus malin; ça a été difficile de passer de la Ligue 2 au National 2 en deux ans, et malheureusement, il faut changer un peu cette mentalité : aujourd’hui, Chambly n’est plus le petit club. Chambly est un gros club, en tout cas, il est perçu par l’environnement extérieur comme tel, et le stade en apporte la preuve. C’est rare en National 2 d’avoir un stade comme ça, aussi top. C’est une sorte de transition que l’on est en train d’opérer, avec cette culture de la gagne que j’essaie de conserver, afin de retourner en haut ! Parce que cette envie est là.

C’est mort pour le National cette saison ?
(Il réfléchit) On a perdu 3 points à la DNCG et je ne connais aucun club qui soit monté en perdant des points sur tapis vert. Maintenant, commençons par restructurer le club, par bien faire ce que l’on a commencé à faire. Après, on est dans du sport, et quand on a connu une finale de coupe de France, je me dis que tout peut arriver finalement ! C’est pour ça qu’il faut constamment rester en alerte.

Si tu devais choisir entre les stades Jean-de-Mouzon (Luçon), Massabielle (Les Herbiers), Duvauchelle (Créteil) ou Walter-Luzi (Chambly) ?
Le Walter !

Le club de Chambly, en trois mots ?
Familial, la gagne, et la mémoire. Le FC Chambly, c’est un club qui a de la mémoire, et ça, ça me plaît beaucoup.

« Avec Fred (Reculeau), on s’est revu récemment… »

Eric CREMOIS / EC Photosports

Ton histoire, ton parcours, comporte deux faits marquants liés à Chambly…
Dis-moi…

Tout d’abord, tu élimines Chambly en demi-finale de la coupe de France pour un ticket au Stade de France, et puis, surtout, c’est après un match perdu avec Les Herbiers contre Chambly que Frédéric Reculeau se fait évincer de son poste… Ce sont des signes, non ?
On peut l’interpréter comme ça… Quand on s’est croisé en demi-finale de coupe, malgré l’enjeu, des liens se sont crées, parce que… Voilà, deux clubs de National en demi-finale de la coupe de France, ce n’est pas courant. D’ailleurs, je me souviens bien de mon entretien avec Fulvio Luzi au moment des contacts avec Chambly : je me suis demandé si j’allais être bien reçu, parce que j’étais le coach qui avait éliminé son club en demi-finale et qui l’avait privé du Stade de France. Finalement, il m’a rassuré là-dessus et j’ai été bien accueilli.

Et c’est après un match perdu face à Chambly que Frédéric Reculeau a perdu son poste aux Herbiers… et que tu l’as remplacé… Tu as des nouvelles de lui ?
Oui, j’en ai eu cette année. Fred est venu récemment avec son équipe de La Roche-sur-Yon disputer un match de championnat délocalisé à Compiègne, c’était contre Saint-Pryvé Saint-Hilaire, et j’y suis allé. Je suis toujours en contact avec Benjamin Guillou, son adjoint à La Roche, et qui était aussi mon adjoint aux Herbiers. Avec Fred, on s’est revu.

Vous vous êtes dit quoi ?
Dans le regard, je pense qu’on s’est dit « On a vieilli », même si on ne se l’est pas dit (rires), mais on l’a pensé fort ! On a pris des nouvelles l’un de l’autre, c’était respectueux et courtois. Ce n’est pas allé plus loin, déjà parce qu’il sortait d’un match de foot, donc le moment n’était pas idéal. Sincèrement, je pense qu’on se reverra et qu’on boira un coup ensemble.

Votre amitié, votre histoire forte, cette séparation douloureuse, ça ne te touche pas, ça ne te fait pas mal ?
On a été touché tous les deux, je pense. Ce qui est sûr, c’est qu’on était jeune. C’est la première fois qu’une telle situation nous arrivait à tous les deux. C’était la première fois qu’un président cassait le contrat de l’entraîneur numéro 1. Mais on n’a pas bien géré la situation. Si c’était à refaire, je le conseillerais différemment; Fred me dit qu’il faut que je reste au club, que ce n’est pas un souci, qu’il faut que je fasse mon job, et qu’on va retrouver un club ensemble plus tard, mais moi, je suis paniqué… On a manqué d’expérience lui et moi. Si c’était à refaire, je lui dirais « soit on reste tous les deux, soit on part tous les deux », je lui dirais aussi qu’il faut qu’il se positionne fortement. Je verrais les choses différemment.

  • Texte : Anthony BOYER / Compte X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : Eric CREMOIS / EC Photosports
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Le portrait d’un jeune président, peintre en bâtiment, adepte du football de terroir, chantre de la convivialité et du partage, qui n’arrête jamais et que jamais rien n’arrête ! Toujours speaker le soir des matchs, ses mots d’ordre sont de préserver l’ADN alsacien de son club, l’un des plus importants du Bas-Rhin, et de ne pas se prendre pour d’autres.

Par Augustin Thiéfaine / Photos : Philippe Le Brech (sauf mentions spéciales)

Le président, Emmanuel Rustenholz. Photo FRH.

Avec son accent alsacien affirmé et sa vision de l’humain qu’il porte en étendard, Emmanuel Rustenholz n’est pas un ovni dans le vaste monde du ballon rond, mais presque. C’est un président passionné par son sport, un homme à tout faire qui n’hésite pas à donner de sa personne et de sa voix au-delà de sa fonction. Du micro de speaker aux sandwichs jusqu’à la logistique, il n’arrête jamais et rien ne l’arrête.

Propulsé durant l’été 2024 à la tête du FR Haguenau (FRH), pensionnaire de National 2, l’un des plus importants clubs d’Alsace, cela représentait un sacré défi pour lui. Un défi que le rookie de 36 ans est en train de relever avec des choix payants sur sa façon de s’entourer et sa capacité à déléguer. Son but : préserver l’ADN local et surtout « rester à sa place ».

Maître à bord du plus petit budget du groupe C de N2 (c’est l’intéressé qui le certifie), Rustenholz et le FRH sont sur la bonne voie pour mener à bien cette opération maintien (8e place, 28 points après 21 journées). Un maintien qui serait le septième consécutif pour le club bas-rhinois, qui, en prime, s’est offert le droit de rêver en Coupe de France, au gré d’un parcours historique jusqu’aux 16es de finale avec comme trophée, le scalp de l’US Boulogne Côte d’Opale (National, 4-1).

Loin de lui le strass, les paillettes et les coupes de champagne. À Haguenau, c’est football-terroir; la convivialité et le partage comme marque de fabrique. Emmanuel Rustenholz nous dévoilera aussi son paquet d’anecdotes et sa vision du ballon rond depuis le point de vue du monde amateur et de la quatrième division. Portrait d’un président pas comme les autres. Un président venu d’en bas.

Interview : « Payer un coup, c’est mon plaisir ! »

Le coach de N2, Cédric Deubel. Photo Philippe Le Brech

Emmanuel, on vous décrit comme atypique. Un passionné de foot qui a gravi les échelons jusqu’à la présidence. Vous avez commencé comme speaker au club en 2018 : racontez-nous votre ascension ?
Mon parcours au FR Haguenau est finalement assez simple. Tout a débuté avec une annonce sur les réseaux sociaux car le club recherchait un speaker. Annonce à laquelle j’ai répondu car je voulais faire du bénévolat dans un club et quoi de mieux que de le faire à Haguenau sachant que je suis originaire de la région d’Haguenau. Localement, ce club, tout le monde le connaît. Quand j’étais jeune, sur les terrains, c’est là que je rêvais de jouer. Même encore aujourd’hui, le FRH a cette réputation d’être un bon club. J’ai été reçu par Jonathan Voltz, qui était speaker avant mon arrivée. Il m’a expliqué ce qu’on attendait de moi et ça c’est fait de but en blanc. C’était un rôle classique avec les annonces de partenaires, les compositions d’équipes, les buts, les différentes annonces à faire dans les tribunes. Des choses moins marrantes avec les annonces de minutes de silence, etc etc.

« Speaker, je le suis toujours »

Hamza Sahli. Photo Philippe Le Brech

Vous êtes toujours le speaker, d’ailleurs…
Oui. Je ne suis pas quelqu’un qui se prend pour ce qu’il n’est pas. J’ai commencé en tant que speaker, je le suis toujours. Effectivement, par la force des choses, je vais devoir me trouver un(e) remplaçant(e). Je ne peux plus tout faire. J’ai d’autres mission. Ensuite, on est venu me voir pour savoir si j’étais intéressé à l’idée de rentrer dans le comité, si je voulais faire d’autres choses. J’ai commencé à faire des déplacements avec le groupe, à me montrer sur les terrains à gauche, à droite. Au début, j’avais beaucoup d’idées, on m’a dit « Les idées c’est bien, mais vas-y, fais » et j’ai fait ! L’ambition et l’envie d’avancer ont pris le dessus sur la vie personnelle et je me suis investi de plus en plus, toujours en m’appuyant sur les anciens. Ils sont toujours là et ce sont des personnes qu’il ne faut ne pas oublier. Par la force des choses, je suis devenu vice-président il y a quatre ans. C’était sur le papier. Je n’avais pas de missions spéciales, mais je remplaçais le président s’il ne pouvait pas être là pour certains rendez-vous ou convocations. Depuis l’été dernier, on m’a confié les rênes.

Vous êtes président et très présent dans l’extra-sportif : intervenez-vous aussi dans le volet sportif ?
En tant que président, je ne décide et ne me mêle de rien au niveau sportif. Il y a le coach, Cédric Deubel, et le manager général Laurent Brengel, pour chapeauter tout ça. À côté, on peut les retrouver aussi chez les jeunes avec Antoine Kieffer (préparateur de l’équipe première et coach des U16), Jean-Luc Riedinger le responsable jeunes, et Caroline Deubel pour la section féminine (qui est également vice-présidente).

« Je n’oublie pas d’où je viens »

Emmanuel Rustenholz, le président. Photo FRH.

Vous disiez que vous ne pouviez pas tout faire, mais que faites-vous justement ?
Il y a une anecdote qui circule pas mal et qui a été racontée par mon ami René-Louis Geay de Chambly (Directeur général du club et actionnaire), où il explique que c’est moi qui prépare les collations. S’il faut faire les sandwichs pour les équipes qu’on reçoit, c’est vrai que je m’en occupe, c’est vrai. Je gère les stocks au niveau de la buvette, plein de petites choses comme celles-là. J’arrive, en général, a déléguer de plus en plus désormais. »

À 13heuresfoot, nous avons eu vent d’une anecdote vous concernant, notamment lors d’une rencontre face à Chambly, où vous auriez payé votre tournée de votre propre poche, sans toucher aux caisses du club…
Je n’oublie pas d’où je viens et je suis un joueur de district, un footeux. Je suis un Alsacien, j’aime la convivialité. Ce n’est pas parce-que je suis président que je dois me permettre des choses. Payer un coup, j’aime ça. C’est mon plaisir. Si je peux payer un resto aux joueurs de temps en temps, je le fais aussi. Il y a une autre anecdote, c’était à Oberlauterbach, en Coupe de France cette année. Les boissons que les joueurs ont consommées après le match, je les ai réglées moi-même. C’est un club amateur, je trouve ça normal de payer un coup ou d’aider à mon niveau. J’ai toujours été comme ça et mes fonctions ne me changeront pas. Au travail, c’est pareil. Je ne veux pas être le gars qui met des millions dans son club et qui ne s’en occupe pas. De toute façon je ne les ai pas ! S’il faut monter un chapiteau, on y va, pareil ! S’il faut poser des barrières, tenir la buvette ! Je travaille dans le bâtiment, je suis peintre en bâtiment, ça ne me fait pas peur. Mes mains sont faites pour travailler.

Faut-il remettre de l’humain dans le foot ?
Il faut, il faut. Il en manque terriblement. On doit remettre l’église au centre du village et moi ça me tient à coeur. Je discute toujours avec les équipes qu’on rencontre. Je leur propose de venir au club-house à la fin du match s’ils ont le temps. Est-ce qu’on fait des sandwichs à emporter, est-ce qu’on fait des petits plateaux ?

« Je reste Emannuel, « Manu » »

Photo Philippe Le Brech

Vous avez eu un hiver assez médiatique, agité. Qu’en tirez-vous ?
J’ai eu une formation accélérée avec notre parcours en six mois, avec la Coupe de France. D’un coup, tout s’est emballé. Ce qui me fait le plus frissonner et me fait plaisir, c’est quand je vois les jeunes du club, qu’ils savent que je suis le président et qu’ils viennent me voir et me disent « Bonjour ou salut président ». Ça me fait quelque-chose. Avec les autres je reste Emmanuel ; « Manu ». Je ne compte pas sur le fait d’être président pour être quelqu’un, mais ça fait un peu bizarre. Quand les entraîneurs disent « Les enfants, vous allez dire bonjour au président », ça ne laisse pas de marbre. C’est beau. J’ai toujours eu énormément de respect par rapport aux présidents, aux entraîneurs. C’est des valeurs, du respect. C’est ce que j’essaie d’inculquer à tout le monde, à tous les jeunes. J’ai un métier, une vie à côté. Je ne peux pas être toujours là non plus. Quand je peux, je fais. Au travail, j’ai la chance d’avoir un directeur qui est lui-même président de club. J’ai joué pour lui, pendant huit ans, à l’AS Uhrwiller (D1), donc on s’entend très bien. On est devenu amis avec le temps. Quand je fais les déplacements avec la N2, vous ne me verrez jamais sans mon PC en train de bosser sur la route à l’aller.

Photo Philippe Le Brech

Des décisions difficiles ?
Difficiles ? Non. Il faut arriver à les assumer et elles deviennent difficiles lorsqu’on ne les assument pas ou qu’elles ne sont pas réfléchies. J’essaie de m’entourer des bonnes personnes, de demander conseil. Il y a des vices-présidents, un manager général. Quand j’ai une décision à prendre, quand j’ai une question, je n’hésite pas. Je ne suis pas le tyran qui va prendre des décisions à la hâte, bêtement.

Quand tout s’accélère, a-t-on le temps de réfléchir ?
Ce qui me reste gravé, c’est l’annonce de l’arbitre lors de la première programmation contre Dunkerque en Coupe de France. « Ecoutez, le match, on va l’annuler…» On avait déjà 600 / 700 personnes dans le stade. Là, on n’a pas le temps de réfléchir. On est pris de court. On nous impose une décision que je respecte, mais à ce moment-là, on se retrouve seul. On se demande comment on va gérer ça. Une semaine plus tard, le match était là, on l’a joué.

« Je suis la personne qui laissera sa place »

Erwann Madihi, le capitaine. Photo Philippe Le Brech

Que pensez-vous de l’importance de la formation et des jeunes ?
Pour moi c’est le fer de lance de notre club. Les jeunes représentent la majorité de nos licenciés et à Haguenau, on aime conserver l’ADN local, c’est-à-dire des joueurs et des joueuses des alentours. C’est très important parce-que tout le monde peut se connaître, créer des relations et la section jeunes est fondamentale. C’est là que se trouve nos futurs et actuels bénévoles dont on a clairement besoin et sportivement ils sont l’avenir de demain. C’est un pilier de l’institution. On est le club formateur le plus représenté dans les formations de R1 dans le nord de l’Alsace et dans notre secteur.

Vous disiez ne pas vouloir mettre des millions dans le club, comment fonctionne votre économie sous votre présidence ?
On est l’une des trois dernières associations en N2. Le reste sont sous d’autres entités. On est clairement un club associatif, doté d’une petite enveloppe d’environ 900 000 euros. C’est le plus petit budget de N2, en tout cas dans notre poule. On n’est pas peu fiers de ça car on arrive quand même à survivre depuis maintenant six saisons. Je ne mélange pas mon travail avec le foot. Notre cellule marketing est efficace, elle génère pas mal de partenariats et de sponsoring. On a des partenaires institutionnels et locaux. Si je peux, j’aiguille les personnes compétentes vers de potentiels partenaires mais je préfère payer des coups toute l’année qu’injecter du capital. Je n’ai pas les moyens aujourd’hui d’injecter ce qu’il manque. Ce n’est ni mon rôle, ni ce qui m’est demandé. On me demande d’être présent et de fédérer. Si demain quelqu’un se présente avec un projet de reprise et des fonds ou qui amène de nouvelles opportunités financières, c’est quand même le nerf de la guerre. Je suis la personne qui laissera sa place. Cela fera avancer le club.

Le parc des sports d’Haguenau. Photo Philippe Le Brech

Sportivement, Haguenau est un historique de la N2. Il y a 30 ans, le club était en National : votre place est-elle à ce niveau ?
Pour moi oui, elle est là, en N2. On doit exister dans cette division et se donner les moyens de le faire. On est a notre place. Les saisons se suivent et se ressemblent : notre objectif c’est le maintien. On a survécu aux fameuses cinq descentes, aujourd’hui il n’y en a que trois. On a, par contre, une poule très relevée. Comme le dit le coach, « à Haguenau, on sait courir ». On a encore beaucoup de joueurs du cru comme Dominik Wolf (gardien), Romain Metzger, Hamza Salhi, Henri Scherer, Thomas Bierry (défenseurs), Quentin Bur, Erwann Madihi, Nicolas Hintenoch, Marco Rosenfelder (milieux), Noa Bauer (attaquant). On a des Strasbourgeois, des Haguenauviens, des gens du coin et c’est ce qui, je crois, fait un peu la différence. On a une conception du recrutement qui se fait avec le cerveau. On cherche des joueurs qui ont conscience de nos valeurs. On est un peu en décalage avec les autres clubs. Les entraînements ont lieu le soir, pas le matin. Les joueurs travaillent. On essaie de ne pas aller recruter trop loin, de ne pas non plus trop éloigner les joueurs de leurs familles. C’est un tout.

« Boulogne, c’était fantastique ! »

Photo Philippe Le Brech

Vous avez vécu une folle expérience en Coupe de France jusqu’en 16es de finale et une défaite contre Dunkerque (Ligue 2, 1-3) qui est en demi désormais. Vous vous êtes notamment offert le scalp de Boulogne-sur-Mer (4-1) et du rival et voisin colmarien (N3) aux tirs-au-but. Pouvez-vous revenir sur ce volet ?
Déjà, il est important de souligner qu’on a eu un important et large soutien. Tout s’est vraiment emballé à partir du match à Colmar (1-1, 4-3 tab). C’est un adversaire historique, on est de la même région, on est a 1h30 de route. C’est un derby, vraiment. Se qualifier la-bas, il fallait le faire malgré la division d’écart et d’un certain point de vue, on a changé de dimension. Le tour suivant, Boulogne, c’était fantastique ! Il y avait grosso-modo 1 000 personnes au Parc des Sports, BeIn Sport pour diffuser, alors qu’en National 2 on dépasse péniblement les 100 spectateurs, et encore… L’un de nos derniers matchs c’était contre Balagne (2-1), on avait 70 personnes. Contre Boulogne c’était un événement. Les joueurs avaient leurs familles, leurs amis. C’était la belle parenthèse enchantée. On gagne 4-1 contre une grosse cylindrée de National, je leur souhaite la montée en Ligue 2. Ils le méritent, c’est un beau club. On a partagé les pizzas.

Photo Philippe Le Brech

Puis il y a eu Dunkerque (L2)…
C’était pas facile. Il y avait des circonstances avec le match remis. Des choses ont été racontées… Des bruits de couloir sur une demande de qualification sur tapis vert ont circulé… Officiellement, je n’ai pas été mis au courant de cela. Je n’en tiens pas rigueur. J’ai eu une bonne relation avec leur président-délégué, on s’est dit les choses, on a échangé, discuté, en toute transparence. On ne peut pas être d’accord sur tout. C’est aussi un club qui fait une saison folle, ils ont réalisé un super exploit contre Lille (L1) ensuite (1-1, 5-4 tab). On a quand même tenu tête à une équipe en course pour la montée en Ligue 1. On peut être fiers. La différence de niveau de jeu est vraiment marquée sur ces deux rencontres. Ça va plus vite, c’est plus intense. La Coupe de France, ça sublime les gars. Ils sont motivés, ils en ont envie. Maintenant, si j’ai un coup de gueule à passer, c’est qu’on est dans un pays où les instances font jouer ces tours-là en semaine. Je ne comprends pas. On ne nous met clairement pas dans les meilleures dispositions, on nous met même en difficulté. Pour des professionnels, cela ne change rien, mais pour nous, ça change. Aujourd’hui, je ne sais pas comment fait Cannes par exemple (qui est aussi en N2). Ça s’enchaîne, beaucoup, il y a le championnat qui continue aussi à côté. On n’y changera rien, on le sait, mais ça a le mérite d’exister. Les primes, on ne les a pas encore reçues (au moment de l’interview, le 16 février) mais elles seront réinvesties dans le club-house, la cuisine, pour développer le club, pour qu’il y fasse mieux vivre. On ne va pas rénover la tribune, ça c’est pour la ville ! Quoi qu’il en soit, on est une association à but non-lucratif, on n’a pas le droit de faire des bénéfices, on n’est pas devenus millionnaire. Dunkerque nous a laissé la recette malgré les coûts, pour eux, d’un second déplacement. C’est classe.

« C’est la face d’ombre derrière la lumière »

Photo Philippe Le Brech

Sortir avec les honneurs face à un tel adversaire, c’est une belle histoire ?
En façade, c’est une belle histoire. C’est beau pour les joueurs. Les bénévoles ont été mis en lumière et ça nous offre un gros coup de projecteur. La Coupe de France a été pour nous cette saison une très-très belle histoire dans son ensemble. On est en train de créer des choses qu’on n’avait peut-être jamais vu ces dernières années. Je dis toujours que si nos joueurs étaient un peu plus costauds, un peu plus grands et qu’au lieu de chausser du 42, ils chaussaient du 44, on était pendant ce match, plus proches du 2-0 que du 1-1. A un moment donné, on loupe deux ballons qui sont à quelques centimètres des bouts de pieds… Je resterais sur ce que j’ai dit à l’un des dirigeants dunkerquois. Quand je vois Gaëtan Courtet, un vétéran, un joueur talentueux. Il a mon âge. C’est lui qui allait chercher les ballons derrière le but pour accélérer le jeu quand ils étaient menés et c’est lui qui marque le but égalisateur. C’est lui qui fédère cette équipe. C’est une scène qui est restée graver. A la fin du match, j’étais content pour lui. C’est peut-être bizarre de dire ça quand on est président et qu’on vient de perdre, mais encore une fois c’est l’humain, le cerveau. Je garde ce genre de moment. C’est beau.

Romain Metzger. Photo Philippe Le Brech

Mais ?
Mais me concernant, il y a eu des moments pas facile. Le poids de l’organisation combiné au match à rejouer, combinée encore à la défaite. C’était très lourd à porter. J’ai vécu une descente pendant la semaine de cette période là, c’était horrible. La nuit après le match joué a été difficile. J’ai eu énormément de soutien, notamment de Marine qui s’occupe de la communication au club, et même de personnes qui n’évoluent pas à Haguenau. En tant que club amateur, structuré comme on l’est, on oublie vite qu’à ce niveau là, ça peut être difficile. Depuis, on a repris notre train-train avec la N2, ça va beaucoup mieux (rires) ! C’est aussi là que je dis qu’on a notre place en N2, c’est a notre portée à tous les niveaux.

Finalement, c’est un peu la face caché de la fonction ?
Effectivement. On ne s’attend pas à toutes ces difficultés qui sont à gérer. Pour Haguenau, c’est exceptionnel ce qu’on a vécu. Un 16e de finale, c’est une première. Franchement, concernant l’organisation de ce type d’événements, on n’est pas aidé par la Fédération ou d’autres. On nous impose beaucoup de choses, la télé, la sécurité, ainsi de suite, on doit ci, on doit ça. On doit se mettre aux normes. J’ai été beaucoup aidé par le référent supporter de la FFF pour la sécurité. Et aussi par Caroline (Deubel) et Claude (Hintenoch), qui m’ont énormément aidé pour l’organisation. C’est un peu la face d’ombre derrière toute la lumière sur ce type d’événement. « Se donner les moyens » c’est écrit en capitales dans le vestiaire de la N2, c’est l’une de nos devises. « Suzammen », comme on dit ici : « ensemble ». On a vu ce que c’était. Passez-moi l’expression, mais on en a vraiment ch***. On s’en est finalement bien sortis. Maintenant on sait comment cela fonctionne et on sera prêts si cela doit à nouveau arriver. On fera mieux.

Que peut-on vous souhaiter désormais ?
Parler de montée, ce serait être totalement déconnectés de la réalité mais notre vitrine reste l’équipe de N2. Avec le Racing (Strasbourg) et Biesheim, qui figure mieux que nous en N2, on est dans les meilleures équipes alsaciennes. Je pense qu’on peut nous souhaiter de nous maintenir à ce niveau le plus longtemps possible, continuer d’exister et de pourquoi pas refaire un parcours en Coupe de France ! On a encore beaucoup de pages à écrire, encore tout à faire ! On parle de nous grâce à la Coupe de France, grâce à quelques joueurs aussi. Je pense à Gaëtan Weissbeck, qui est passé par Sochaux et Bordeaux et qui aujourd’hui est à Chypre. Avant de signer pro, il était ici. L’épanouissement pour le club dans son ensemble. J’espère qu’on continuera de parler de nous en positif. Enfin, pour nos membres, les féminines, les jeunes, la première, la réserve… que tout le monde continue d’avoir envie de venir au FRH pour la convivialité et le sportif, c’est l’objectif. L’humain c’est mon combat.

National 2 (poule C) – Journée 22 – samedi 15 mars 2025 : Chambly – Haguenau, à 18h, au stade Walter-Luzi.

  • Texte : Augustin Thiéfaine / Photos : Philippe Le Brech (sauf mentions spéciales)
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Photo Philippe Le Brech

 

L’ex-adjoint de Baptiste Ridira et auparavant de Mickaël Ferreira, gérant d’une ferme agricole familiale, a passé 12 ans dans l’ombre avant d’être propulsé à la tête du club du Loiret l’été dernier, avec un certain succès : son équipe, qui a conservé ses principes de jeu, est dans la continuité avec une 3e place, à seulement 4 points du leader Saint-Malo.

Par Anthony BOYER / Photos Coralie HOUEIX (sauf mentions spéciales)

Photo SPSHFC

Petite devinette. Quel est le point commun entre une ferme agricole et un club de foot ? Réfléchissez bien ! Vous n’avez pas la réponse ? On vous la donne : le point commun, c’est Mathieu Pousse. Un garçon de 40 ans qui a passé… 40 ans dans la ferme agricole familiale à Baccon, à 10 kilomètres au sud-est d’Orléans (Loiret), dont il a hérité avec ses frères, au décès de son papa, et presque autant d’années sur les terrains de football du département et du département voisin, le Loir-et-Cher.
Car le père de famille – son petit garçon de 5 ans vit à Nice – cumule deux casquettes : gérant de l’entreprise qui cultive des céréales et entraîneur de l’équipe fanion de National 2 de Saint-Pryvé Saint-Hilaire FC, un club où il a posé les pieds voilà 13 ans déjà. On pensait avoir tout vu à Saint-Brieuc avec le président-entraîneur-sponsor-directeur sportif, Guillaume Allanou… Et bien non !

Travailleur et compétiteur

A Saint-Pryvé Saint-Hilaire, Mathieu Pousse peut tout aussi bien monter sur un tracteur que diriger une séance d’entraînement. Il n’y a qu’en National 2 que l’on voit ça ! Et c’est sans doute parce qu’il vient d’un milieu rural, où les valeurs de travail sont essentielles, où l’on sait ce que mettre les mains dans le cambouis veut dire, qu’il n’a pas peur de faire des heures : Mathieu Pousse est bosseur et… compétiteur. Ce sont ses deux moteurs. Et bien sûr passionné. Le foot ? Il a baigné dedans tout petit ! « Mon papa était footeux, mes tontons aussi, ce qui fait que, mes frères et moi, on était très tôt autour des terrains, on a pratiqué dès le plus jeune age. »

« Je suis un homme de club »

Mathieu est un ancien défenseur central au parcours qu’il qualifie de « modeste » (niveau régional) : « J’ai été embêté par les blessures. Je me suis fait quatre fois les croisés entre l’âge de 15 et 20 ans, donc à partir de là, le foot est devenu une pratique loisirs. »
Une pratique loisirs, mais avec une vocation : celle d’entraîner. A l’âge de 15 ans, il s’occupe déjà des tout-petits. « Dans les deux clubs où j’ai joués, à Ouzouer-le-Marché (Loir-et-Cher), juste à côté de Baccon, où je suis resté jusqu’à mes 20 ans, et à Jargeau/Saint-Denis, près de l’aérodrome d’Orléans, où je suis resté 6 ans, j’étais aussi éducateur. Je suis un homme de club. »

Ferreira-Ridira, deux rencontres déterminantes

Photos Coralie HOUEIX

L’on dit souvent que les rencontres sont le sel de la vie. Et font parfois bien les choses. Celles avec Mickaël Ferreira et Baptiste Ridira, à l’âge de 20 ans, sur les bancs de la faculté à Orléans, où il est étudiant en STAPS, sont déterminantes.
Outre une grande amitié naissante, c’est aussi une passion commune pour le football, le jeu avec un grand J, que tous les trois développent. « En fait, comme j’étais régulièrement blessé quand j’étais joueur, je compensais ce manque par ce côté éducateur. C’est pour ça que j’ai très vite basculé. J’ai développé ma passion pour l’encadrement, au travers de cette filière STAPS, la plus passionnante selon moi, celle de l’entraînement ».

La suite de l’aventure, c’est Mathieu, qui a pris la succession de son ami Baptiste Ridira l’été dernier avec réussite – Saint-Pryvé/Saint-Hilaire est 3e à seulement 4 points du leader, Saint-Malo – qui nous la raconte, au beau milieu d’une semaine surchargée, entre deux récoltes, trois entraînements et une formation à Clairefontaine dans le cadre de son DES (diplôme d’état supérieur).

Et s’il n’a pas toujours été facile à joindre, quand bien même il suffit de taper son nom sur Google pour tomber sur son 06 (!), une fois face à nous, Mathieu, qui se définit comme un gros travailleur – « J’essaie d’engager mon équipe dans ma philosophie sur cet aspect-là » -, s’est montré très locace et disponible. « Il y a mon 06 sur Google ? Comme ça c’est pratique, plaisante-t-il ! ». Pratique… Enfin, ça c’est lui qui le dit !

Interview
« Etre l’arbitre, ça nous va bien ! »

L’équipe de St-Pryvé St-Hilaire en N2. Photo St-Pryvé St-Hilaire FC.

Mathieu, comment s’est fait ton arrivée au club de Saint-Pryvé/Saint-Hilaire ?
Après mes études de Staps à Orléans, ma ville natale, j’ai poursuivi à Lyon en faisant une première année de Master PPMR sur la préparation physique et le mental. Ensuite, je suis allé en stage à l’US Orléans puis à Saint-Pryvé Saint-Hilaire, et du coup, je suis resté à Saint-Pryvé ! Il y avait Mickaël Ferreira au club, l’ancien coach : on s’était côtoyé avec Baptiste (Ridira) en Staps, alors quand Mickaël a pris en main l’équipe Une, je me suis engagé à ses côtés avec la double casquette d’adjoint et de préparateur physique.
Dans notre club, il y a souvent des doubles casquettes. J’avais 26 ans à ce moment-là. J’ai fait 4 ans avec lui, 5 ans si l’on compte l’année de stage, durant laquelle j’encadrais aussi les U19. Et puis, Baptiste (Ridira) a pris la succession de Mickaël. Avec Baptiste, on avait des affinités de longue date depuis notre passage ensemble à la fac, et à la tête de l’équipe, ensemble, on a fait 8 années (dont 7 en National 2 après la montée en 2017). Donc là, c’est ma 13e année au club !

« Je ne suis pas une exception »

Tu as commencé à encadrer des jeunes très tôt…
La première équipe que j’ai encadrée, j’avais 15 ou 16 ans, c’était des benjamins (U13) et à 17 ans, j’entraînais du foot à 11, que je n’ai plus quitté. Parce que le foot de compétition, ça me correspondait plus. Je n’ai fréquenté que deux clubs quand je jouais. Dans le premier, j’étais joueur-éducateur à Ouzouar-le-Marché, où je suis resté jusqu’à mes 20 ans. Les seniors évoluaient en DH/DHR. Pareil, à Jargeau/Saint-Denis, j’étais joueur-éducateur, puis responsable technique à la fin. Je suis resté 6 saisons. Je suis un homme de club.

Revenons à tes débuts : c’est incroyable cette histoire de ferme agricole familiale…
Non, c’est juste que j’ai grandi à Baccon, à côté d’Orléans. C’est un petit village rural qui est à la limite du Loi-et-Cher, et où mon père avait une exploitation agricole. On l’a toujours d’ailleurs puisque, quand j’ai perdu mon papa il y a 15 ans, on a hérité de l’exploitation que je fais tourner. J’en suis le gérant. Donc à côté du foot, il y a l’entreprise. J’ai toujours été exploitant agricole mais je ne fais pas tout, tout seul. Je bosse avec des prestataires. Je ne fais pas que de la gestion, je monte aussi sur le tracteur : on fait de la culture de céréales, c’est cyclique. Il y a des périodes dans l’année où c’est plus prenant que d’autres.

Photos Coralie HOUEIX

Tu es un peu une exception dans le milieu du foot, à ce niveau, en National 2…
Je ne suis pas une exception. Il y a d’autres coachs de ce niveau qui travaillent à côté. Là, c’est juste que c’est le secteur d’activité qui peut paraître original. Je suis chef d’entreprise, ce qui me permet d’organiser mon travail et mon temps comme je le souhaite. C’est juste une gymnastique permanente pour mener de front les deux activités. Il n’y a pas que le foot qui est familial, il y a aussi l’exploitation ! C’est un héritage, on est tous les trois, avec mes frères, qui ont aussi baigné dans le foot (l’un des deux a encadré les U19 ans Nationaux de Saint-Pryvé à une certaine époque), à avoir nos parts dans l’exploitation. C’est juste que j’ai le rôle du grand frère, du gérant, et ça se passe très bien.

Entre l’exploitation agricole, le foot et actuellement la formation pour ton DES, te reste-t-il du temps pour toi ?
Je m’accorde toujours du temps, parce que je suis un bon vivant. Je m’engage dans ce que je fais, donc j’y passe beaucoup de temps, mais c’est important d’avoir cette philosophie là, de garder le plaisir de faire autre chose; ce qui m’aère, c’est de monter dans un avion et partir au soleil !

« Je ne me fixe pas de limite »

Photos Coralie HOUEIX

Entraîner plus haut, plus tard, c’est quelque chose qui t’intéresse ? Te motive ? S’occuper de l’exploitation agricole, n’est-ce pas un frein ?
Il faut savoir que j’ai une dérogation cette saison pour entraîner en N2. Ensuite, c’est une certitude, l’évolution de ma carrière devra m’amener à effectuer certains choix, comme mettre l’exploitation en gestion, mais il y a plein de possibilités, j’en suis conscient. Quant à mes ambitions, ce qui me caractérise, c’est que je ne me fixe pas de limite. Pour autant, je ne cours pas après quelque chose qui aujourd’hui est incertain. Dans le foot, on ne peut pas tout prévoir, on est dépendant de nombreux facteurs, dont les résultats. Mais ça ne me fait pas peur, je ne me ferme aucune porte.

Avec Mickaël (Ferreira) et Baptiste (Ridira), c’est toujours une histoire d’amitié aujourd’hui ?
On se connaît depuis la fac. On est du même coin. Avec Mickaël, nos parcours ont fait que l’on ne se côtoie plus particulièrement; il est à la Ligue du Centre (il est Conseiller technique régional à la Ligue Centre-Val de Loire de Football), on se croise, on se salue, on n’a pas gardé de contacts privilégiés, mais avec Baptiste oui, on est en contact permanent !

Du coup, quand tu m’as dit, vendredi dernier, que tu regardais un match de foot, tu regardais l’équipe de Dijon, entraînée par Baptiste ?
Non, j’ai fait une infidélité (rires) ! Pour le coup vendredi, j’étais au match à Orléans (victoire 4 à 2 face à Sochaux), je n’ai pas regardé Dijon cette fois !

Sinon, en général, tu regardes les matchs de Dijon (National), son nouveau club ?
Je les regarde régulièrement. On échange au téléphone sur nos quotidiens. Baptiste passe régulièrement voir nos matchs, et son fils joue à Saint-Pryvé.

« Avec Baptiste (Ridira), on connaît bien la vie de chacun »

Photos Coralie HOUEIX

Vous parlez de quoi, avec Baptiste ?
On parle de tout ! De nous, de foot ! On se côtoie en dehors du foot depuis la fac, on connaît bien la vie de chacun ! On était ami avant de travailler ensemble.

A-t-il compté au moment de sa succession à Saint-Pryvé ?
Cela s’est fait naturellement et logiquement. On faisait tout à deux, on était un binôme sur tous les aspects, surtout dans une structure comme Saint-Pryvé Saint-Hilaire, où on a tout à faire, mais avec les mains libres, car on n’a pas de directeur sportif. On s’occupait du recrutement jusqu’à la gestion quotidienne de l’équipe. Naturellement, quand Baptiste a décidé de partir, mes dirigeants se sont tournés vers moi et comme je suis un homme de club, la question ne s’est pas posée. En dix minutes, ma décision était prise.

Prendre la suite, dans un championnat a priori plus relevé du fait de la refonte, cela ne t’a pas fait peur ?
Non, pas du tout. C’est vrai que l’on a vu le National 2 évoluer, mais je n’ai pas hésité. J’ai une histoire particulière avec le club, je ne pouvais pas, ne serait-ce que pour ça, refuser. Le seul truc, c’est que cela s’est fait après le 15 juin et que l’on n’avait encore rien fixé, à quelques jours de la reprise. On s’est retroussé les manches, il a fallu faire le travail que j’avais l’habitude de faire avec Baptiste, dans un premier temps tout seul, puis avec les gens qui sont venus constituer le staff.

L’importance de connaître le club et ses particularités

Photos Coralie HOUEIX

Avec ton adjoint, essaies-tu de reproduire le modèle qui était le vôtre avec Baptiste ?
Un petit peu, d’autant que je me suis entouré de quelqu’un (Hubert Marchand) avec lequel j’ai des affinités de longue date, qui connaissait le club. Ma priorité, quand j’ai eu à constituer mon staff, c’était de prendre des gens qui connaissent le club, en qui j’ai confiance, pour gagner du temps. On était déjà le 20 juin, on a commencé le travail de l’inter-saison à seulement 15 jours de la reprise, il y avait beaucoup à faire.
Le préparateur physique, Antoine Rivet, était déjà avec nous, j’étais un peu son tuteur avant. J’ai fait revenir un ex-gardien, Charles-Henri Chatelin, comme entraîneur des gardiens, mais qui bosse à plein temps côté; Quant à Hubert, mon adjoint, il était responsable technique et s’occupait des jeunes, c’est quelqu’un que je connais aussi en dehors du foot. On est cinq en tout, avec un jeune analyste vidéo, Marius David, qui a joué en jeunes chez nous. Mais on n’est pas tous à temps plein. Comme je l’ai dit, il y a des doubles casquettes : certains sont engagés dans d’autres missions, comme celles d’éducateur. On fonctionne un peu comme d’autres structures du type de celles de Locminé, Châteaubriant, Saumur…

« La qualité du terrain, le bémol »

Justement, c’était la question suivante : depuis le temps que tu te déplaces en N2, tu dirais que Saint-Pryvé se rapproche de quels clubs en terme de fonctionnement ?
Alors, sur le plan des installations, peu de clubs nous ressemblent, parce que la qualité du terrain, c’est vraiment le gros bémol chez nous. Même si nos installations, bien que modestes, nous permettent d’exister en National 2.
Après, dans la structure, on ressemble à Locminé, qui vient de monter en N2, qui fait un très bon championnat. Locminé, ça ressemble à ce que l’on fait chez nous. J’ai discuté récemment avec les deux coachs (Jacques Pichard et Florent Besnard), qui fonctionnent aussi un peu en binôme : sur plein d’aspects, comme le budget, qui est identique, on se ressemble. Je citerais aussi Châteaubriant et Saumur, comme j’ai dit auparavant. Après, je ne connais pas Villers-Houlgate, qui n’est pas dans notre groupe, mais j’image comment cela peut être.

« Le National 2 a été tiré vers le haut »

Photos Coralie HOUEIX

Le niveau du N2, tu le trouves comment cette saison ?
Le niveau progresse. La réforme a fait son chemin, elle a brassé la masse de joueurs, et ceux qui sont encore là aujourd’hui, au niveau N2, ce sont les meilleurs, donc le niveau s’en ressent, et on a un championnat qui, dans son homogénéité, a été tiré vers le haut. On voit que ça bataille fort dans toutes les poules. C’est de plus en plus dur de rivaliser avec les grosses écuries.

Malgré ça, vous faites un championnat exceptionnel : vous êtes 3e, le club a fini 4e l’an passé …
Oui et ça valorise le travail que l’on a accompli lors de la petite intersaison. J’ai la connaissance du contexte, du fonctionnement de mon club, donc dans l’approche de la saison, dans la préparation de mon groupe à tous les aspects, c’est un point fort. Je sortais quand même de 12 saisons passées au club. Cet atout, tous mes collègues n’ont pas la chance de l’avoir. Après, il y a le savoir-faire aussi, et ça, par rapport à ma fonction élargie et mes 8 ans aux côtés de Baptiste (Ridira), ça a été une belle garantie de faire les choses correctement. On a bien recruté, humainement déjà, parce que chez nous, on a toujours l’habitude de bien regarder les profils de l’homme pour voir si ça peut peut coller aux valeurs du club et à ses particularités, s’il peut bien s’intégrer à notre projet.

Un projet de jeu « maison »

Photo SPSHFC

Comment expliques-tu que Saint-Pryvé soit, saison après saison, toujours très performant ?
Ici, c’est la stabilité de notre projet de jeu qui valorise notre parcours en N2 depuis des années. Ce projet, il est plutôt reconnu, avec ce 4-4-2 en losange : ça c’est la photographie. Après il y a la philosophie de jeu qui va avec ! On l’a co-construit avec Baptiste dès la première année, alors que l’on n’avait jamais évolué comme ça avant de bosser ensemble. C’est juste que ça collait à ce que l’on voulait faire, surtout à l’effectif que l’on avait à l’époque. Ce projet de jeu a été façonné « Made in Saint-Pryvé ».
Cette continuité-là a donné de la visibilité à l’ossature que j’ai conservée, et cela a amené l’équipe à une certaine forme de confiance. Cela a donné des certitudes aussi quant au projet de jeu, ce qui fait que quand on a démarré la préparation, il y a tout de suite eu de la qualité, et moi, j’ai essayé d’amener un versant très « compétition », parce que c’est ma nature. Ce qui fait que l’on a bien entamé la saison. On a toujours cette volonté-là, à Saint-Pryvé, de bien démarrer, c’est une constante chez nous, parce que c’est important, et c’est souvent le cas. Cela a été le socle de notre première partie de saison.
Et puis on sait aussi que, quand l’hiver arrive, cela va être plus dur, on va subir certains aléas, sur la qualité des terrains, sur notre fonctionnement aussi, quand on doit se balader d’un terrain à un autre, mais ça fait partir de nos particularités.

« Le match à Bordeaux a pesé dans les têtes »

C’est vrai qu’en novembre/décembre, les résultats ont été un peu moins bons…
On a été moins constant. Depuis 2025, c’est pas mal même si on a un peiné à retrouver notre efficacité offensive qui nous caractérisait en début de saison. En novembre / décembre, on n’a pas réussi à faire basculer des nuls en victoire, mais on est sur la bonne voie.

Votre terrain fait parler en National 2…
C’est le point le plus impactant. Surtout que l’on a un projet de jeu porté sur l’utilisation du ballon, sur le jeu offensif, donc évidemment, quand le terrain devient difficile lors du passage à l’automne, des adaptations doivent être installées mais ce n’est pas toujours facile car on construit notre effectif pour jouer. On veut jouer, on y arrive en début de saison quand le terrain est de bonne qualité. Cette année encore, on n’y a pas coupé. Et on a eu aussi ce déplacement à Bordeaux, qui a pesé dans les têtes…

Avec Baptiste Ridira, en 2020, la fine équipe de Saint-Pryvé ! Photo Facebook Esprit Foot

Parle-nous un peu de Bordeaux, justement…
Quand on a joué chez eux (10e journée, le 9 novembre, défaite 2-0), on regardait vers le haut à ce moment-là, quand bien même ce n’était pas notre discours au niveau du staff. On a pris une petite claque là-bas. On a rivalisé une mi temps (0-0), on aurait dû ouvrir le score, mais on a pris la vague en 2e mi temps et ça nous a affectés psychologiquement. J’en avais discuté avec Gwen (Corbin), le coach de Saint-Malo, quand on a joué chez eux au début du mois de février (1-1, journée 15), et il a eu le même sentiment par rapport à ce match-là, face à Bordeaux, dans le sens où l’on a essayé de l’aborder comme les autres, parce qu’on veut que le groupe l’envisage comme ça, mais finalement, on voit que nos joueurs ont clairement coché ce match, qui est finalement très particulier, et qui peut impacter. D’ailleurs, Gwen (Corbin) m’a dit qu’après ce match, les joueurs étaient un petit peu touchés sur les matchs qui ont suivi, par rapport à la rivalité qu’ils ont avec Bordeaux et par rapport à leurs objectifs. Pour moi, Bordeaux n’a rien à faire là, et c’est vrai que cela peut être impactant dans le championnat.

« Essayer de rester au contact »

Du coup, qui va monter en National ?
Joker !

Photo SPSHFC

Saint-Pryvé est plus que jamais dans le coup, à 4 points seulement du leader, Saint-Malo
On peut même encore imaginer que certaines équipes, qui sont sur des grosses dynamiques, puissent recoller si ça tâtonne encore devant. Clairement, aujourd’hui, je suis incapable de dire qui va monter. On voit juste que la lutte entre Saint-Malo et Bordeaux devrait perdurer.

Quant à nous, en début de saison, on avait l’espoir de faire mieux que l’an passé, alors que l’on sortait de notre meilleure saison, avec notre meilleur classement (4e) et un ratio de 1,4 ou 1,5 point par match. C’est un peu ce que l’on arrivait à faire ces dernières années, pour finir sur le podium, mais c’est pas gagné. Nous, on veut faire le mieux possible sur nos trois prochains matchs en mars, parce qu’après, en avril, on va recevoir Bordeaux et on va recevoir Saint-Malo : être l’arbitre du duel, ça nous va bien ! On va essayer de rester au contact, ce qui validerait le fait que l’on est en progrès et que l’objectif de départ aura été réussi.

N’est-ce pas frustrant d’entraîner un club pour lequel il sera compliqué de voir plus haut que le N2, compte tenu de ses moyens et de ses infrastructures ?
C’est la magie de notre sport ! Des clubs ont réussi à faire des choses incroyables : quand les frères Luzi se sont engagés à Chambly, si on leur avait dit qu’ils iraient jusqu’en Ligue 2… Des exemples, il y en a d’autres, Luzenac, ou encore, plus lointain, Guingamp, qui est devenu un club professionnel important. Ce n’est pas du tout ce que l’on vise à Saint-Pryvé mais il n’y a rien d’impossible dans le foot, en tout cas, on n’est ni prévu ni programmé pour ça. La plupart des joueurs travaillent, certains dans notre structure comme apprentis ou en formation sur les métiers de l’animation, de l’encadrement, du management de club, c’est très classique, d’autres sont étudiants.

Tu es un coach plutôt…
Passionné, engagé, compétiteur, perfectionniste et exigeant.

Le club de Saint-Pryvé/Saint-Hilaire ?
Familial, franc, où il fait bon vivre.

Un modèle de coach ?
Pas spécialement. Par contre, j’ai des affinités avec la philosophie du foot espagnol. Avec l’exigence des profils de coach portugais.

Baptiste Ridira : « Je suis très heureux pour Mathieu »

Visuel SPSHFC

Interrogé au sujet de son ancien adjoint et ami dans la vie, Baptiste Ridira , l’entraîneur de Dijon, en National, a eu des mots très élogieux à l’endroit de Mathieu Pousse : « Voir Mathieu à la tête de Saint-Pryvé en N2, c’est une évidence pour moi, je n’avais aucun doute là-dessus, par rapport à son implication au club et pour ce qui est de la continuité du projet de jeu. C’était une vraie décision du club de vouloir rester dans la continuité. Mathieu a fait beaucoup pour le club et s’est énormément investi, pendant 12 ans, ce qui est ENORME. Ces années passées à travailler avec lui resteront gravées à jamais. Notre fonctionnement fut remarquable. Le plus important pour moi est de savoir que, si un jour je dois retravailler avec Mathieu, je sais la personne qu’il est, loyal, investi, passionné, et dévoué pour son club. Il s’est toujours mis en retrait,  que cela soit avec « Mika » (Ferreira) dans un premier temps, avec moi ensuite, et là, après avoir été dans l’ombre pendant toutes ces années, c’est bien qu’il prenne la lumière, je suis très heureux, il exprime toutes ses qualités que certains ne lui reconnaissaient pas. »

 

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  • Texte : Anthony BOYER / Compte X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
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