Après 15 mois sans club, le défenseur central (32 ans) qui a connu la Ligue 2 puis la Ligue 1 à Clermont, a finalement retrouvé un club à Wasquehal… et surtout son poids de forme, après être passé de 88 à 101 kilos ! Tombé bas, le natif de Colombes raconte comment il a relevé et surmonté ce challenge de la transformation physique.
Par Anthony BOYER / Photos : Lily-Rose Candelle
Quand la fin de son contrat professionnel avec le Clermont Foot 63 est arrivé, en juin 2022, après quatre saisons, trois en ligue 2 et une quatrième en Ligue 1 après l’accession historique de 2021 (deux matchs), Josué Albert pesait 88 kilos.
Quand il a retrouvé un club, quinze mois plus tard, à Wasquehal, en National 2, en septembre 2023, il en pesait… 97 ! Le défenseur central, né à Colombes (Hauts-de-Seine) était même monté jusqu’à 101 kilos.
Valenciennes, le contrat avorté
L’histoire de Josué Albert (32 ans), crème dans la vie de tous les jours, pâte pour n’importe quel entraîneur et guerrier sur la pelouse, c’est celle d’un footballeur qui a d’abord beaucoup galéré et avalé de couleuvres avant de signer pro, à l’inter-saison 2017-2018, à Quevilly-Rouen, en Ligue 2, où, d’un cinquième voire d’un sixième choix en début de saison, il est devenu le premier choix de son coach de l’époque, Manu Da Costa, dès le mois de janvier.
Le Parisien avait alors 26 ans. Avec son CV, son expérience, et même s’il n’était pas forcément « titu » à Clermont (une cinquantaine de matchs de Ligue 2 tout de même), on s’attendait à retrouver l’international guyanais en Ligue 2, voire en National, mais de là à ce qu’il reste sans club pendant plus d’un an, non.
S’il n’a pas signé à Valenciennes, en Ligue 2, dans la foulée de ses quatre saisons à Clermont, à l’été 2022, et s’il n’a pas rejoint Romain Revelli, l’un de ses formateurs au centre à Saint-Etienne, l’an passé, à Villefranche, en National, l’explication est simple. Double même : le temps de jeu et la prise de poids.
Le temps de jeu, c’est souvent l’obstacle qui, dans les discussions, a freiné les clubs intéressés, parce que, lors de ses deux dernières saisons à Clermont, Josué n’a que très peu joué. « Après Clermont, je devais signer à Valenciennes, raconte Josué; tout était prêt ! J’avais discuté au téléphone avec Nicolas Rabuel, le coach. Mon agent, qui avait eu le directeur sportif José Saez, me dit « la direction va valider et tu vas recevoir la proposition ». Le lundi passe, pas de proposition. Le mardi passe, pas de proposition… le mercredi, un journaliste qui suit Valenciennes publie sur Twitter « Deux anciens clermontois, Josué Albert et Jason Berthomier, tout proches de signer au VAFC ». Mon agent ne comprend pas pourquoi l’info est sortie, alors que je n’avais rien dit à personne. Vraiment à personne, hormis à mon épouse, Justine. Le jeudi, Jason se rend à Valenciennes pour signer. Il me dit « Il y avait un autre joueur avec moi, je pense que c’était un défenseur central ». Avec mon agent, on essaie d’appeler le club, mais impossible de joindre qui que ce soit. On était déjà fin août. »
« J’avais le CV, pas le temps de jeu »
Dans le bureau avec Jason Berthomier, ce n’est donc pas Josué qui paraphe le contrat, mais un autre joueur. La fin du mercato approche. Les petites issues de secours se referment petit à petit. « Après cet épisode, je suis passé d’un premier choix à un second, puis à un troisième ou quatrième, et puis les clubs ne me parlaient pas d’expérience, mais de temps de jeu… Un de mes problèmes, c’est que j’avais le CV, mais pas le temps de jeu ! J’ai eu une touche avec le Paris FC, mais ils cherchaient un jeune, pour le revendre derrière en cas d’accession en Ligue 1. Moi, j’allais avoir 31 ans, je savais que ça allait devenir compliqué. L’étranger ? familialement, ce n’était pas simple. Je n’étais pas prêt à me lancer dans des plans bizarres… Je me suis entraîné de mon côté. J’ai écouté ma femme, qui est à mes côtés depuis que j’ai 17 ans… Elle a son travail fixe, c’était à moi de l’écouter cette fois, quitte à mettre de côté ma carrière. A la trêve, il y a eu des contacts, mais rien de concret. Je n’ai pas été surpris. Parce que je sortais d’une saison en Ligue 1 où je n’avais joué que 2 matchs. Après Clermont, les clubs me disaient « tu n’as pas beaucoup joué », alors on n’allait pas, six mois plus tard, me dire que « j’avais joué ». OK, je n’ai pas beaucoup joué, mais donnez-moi du temps de jeu, sinon, je ne vais jamais jouer ! »
Saison blanche
La saison 2022-2023 passe. Sans Josué, qui s’entraîne avec la réserve du Clermont Foot. « Je remercie le club pour ça. » Finalement, ce sera une saison blanche. Et puis, arrive la saison 2023-2024. Sur les réseaux sociaux, il est annoncé du côté de Villefranche-Beaujolais, en National. Mais, une fois encore, l’affaire n’aboutit pas : « Ce qui s’est passé, à Villefranche, c’est que, tout simplement, je n’étais pas dans le meilleur de ma forme, raconte Josué, plein d’honnêteté; pourtant, je m’étais entraîné avec un « prépa ». J’effectue la reprise avec le club et, dès le premier jour d’entraînement, alors qu’on faisait un truc tout simple, deux fois 15 minutes de footing, du travail technique, sur un appui, « bam », je sens une pointe au mollet. Le premier jour ! Je fais une échographie : j’ai deux élongations. Je demande à Romain Revelli, que j’avais eu quand j’étais jeune à Saint-Etienne : « coach, franchement, ne me faites pas espérer, dites moi tout de suite si c’est mort ou pas », et il me répond, franchement « On va chercher un défenseur. Si on trouve, on le fera signer, on ne peut attendre que tu reviennes de blessure, on a une saison à préparer ». Et puis Nathan Dekoké est arrivé. Du coup, je n’ai pensé qu’à une chose, bien me soigner, parce que c’était ma dernière chance ».
« Il fallait que je regoûte au pain noir »
Cela fait plus d’un an maintenant que Josué est sans contrat. A 31 ans, forcément, le doute s’installe. Depuis qu’il a 8 ans, il ne sait faire que ça : jouer au foot ! Il a commencé au CSM Gennevilliers, où il était d’ailleurs attaquant – « Je te jure, j’empilais les buts ! », – puis il est passé par le centre de formation à Saint-Etienne, la réserve de Guingamp avant de découvrir le National à Uzès, à 21 ans.
« Et puis, à la fin de l’été dernier, je suis chez mes beaux parents à Saint-Etienne, et Anthony Rogie, un de mes tout meilleurs amis et ancien coéquipier à Quevilly Rouen, m’appelle pour prendre de mes nouvelles. Il s’énerve en apprenant que je n’ai pas de club. Il me dit qu’il a signé à Wasquehal, en National 2*, qu’il va en parler au coach, Mehdi Izeghouine. Je lui ai dit « si ça me permet de rejouer, pourquoi pas ? ». Derrière, le coach et le directeur sportif, Aurélien Capoue, m’appellent dans la foulée. J’en parle à mon épouse : Wasquehal, ce n’est pas à côté de Clermont. Je n’allais pas faire déménager ma femme et mes enfants. Je savais qu’en retournant en CFA, ça allait être compliqué par rapport aux conditions de travail. Mais cela ne me faisait pas peur, parce que, si j’ai connu le très haut niveau, avec la Ligue 1, j’ai connu aussi la DHR quand je jouais en réserve à Uzès. Du coup, je suis parti à Wasquehal, seul. Familialement, c’est dur. Mais il fallait que je regoûte au pain noir, c’était la seule solution si je voulais aspirer à retrouver le National ou pourquoi pas la Ligue 2. Il fallait que je rejoue, que je charbonne à nouveau. Anto Rogie a eu un poids aussi dans ma décision. Wasquehal, c’est une belle opportunité, et je remercierai toujours Mehdi Izeghouine de m’avoir permis de rejouer au foot. »
La transformation
C’est donc à Wasquehal, dans le Nord, entre Lille et Roubaix, en N2, un niveau qu’il n’avait plus connu depuis sa superbe saison à Quevilly Rouen en 2015-16 (accession en National), que Josué va rebondir. C’est aussi là qu’il va prendre conscience de l’importance de son corps : « Au bout de trois matchs, je me suis blessé, c’était le 12 octobre; à ce moment-là, je faisais 97 kilos. Je n’étais pas du tout en forme. » Et Josué de nous montrer la première photo de lui à son arrivée : « ça c’est moi, regarde… »
À partir de là, il prend conscience de la situation et va opérer ce qu’il appelle « la transformation » : « Je revenais en CFA, à 700 km de ma femme et de mes deux filles, j’aurais pu me dire « tu viens, tu prends ton oseille », mais non. Je me suis mis à faire des journées « strictes », réveil – petit déjeuner – diète – sieste – salle – entraînement… C’était un truc de fou ! Je me suis fait mal. C’était un rythme de fou. J’en ai chié. J’étais rentré à Clermont faire mes soins et là, j’ai demandé à Bakary Sako (ex-coéquipier au centre à Saint-Etienne) un contact pour la diète, parce qu’il venait de suivre un programme pour perdre du poids. Et il me parle d’un certain Faress. J’appelle le Faress en question (Faress Brikh), je lui dis que je veux retrouver mon poids de forme. Il me dit « t’es sûr ? Parce que c’est dur tu sais… Une transformation incroyable nécessite des actes incroyables, es-tu prêt ? » Je lui ai dit « j’ai besoin de toi ». Et depuis, on se parle tous les jours ! J’ai échangé 1400 vidéos et photos avec lui (il montre l’écran de son téléphone). On a commencé le programme le 30 octobre. J’ai mes petits plats avec moi, haricots, pâtes, poulet… Je prépare tous mes Tupperware quand je pars en déplacement avec le club, j’ai mes compléments alimentaires, mes collations, mes fruits rouges, mon citron… A Wasquehal, je ne suis pas dans un club pro, donc je peux me permettre de faire ça. Mes performances ? C’est le jour et la nuit. Forcément, elles s’en ressentent. Tu ne peux pas savoir comme j’ai été piqué à mon arrivée, quand des joueurs me disaient « ah ouep, Josué, t’as des bourrelets »… Comme ça m’a vexé. Je peux dire que cela a été le plus gros challenge de ma vie, un challenge incroyable. La dernière fois que je pesais moins de 87 kg, c’était à Quevilly, il y a 10 ans ! Je suis même monté jusqu’à 101 kilos. 101… »
La prise de conscience
Au Clermont foot 63, le poids de forme de Josué était de 87/88 kilos. Mais le suivi était tel, là-bas, qu’aucun joueur ne pouvait se permettre le moindre écart, sinon, il était mis à l’amende. « Le problème, c’est qu’après mon départ, j’ai continué de manger comme si j’avais toujours la même dépense d’énergie chaque jour. Donc forcément, au bout d’un moment, je l’ai ressenti. Mais c’était inconscient. Je rentrais dans une routine, je jouais à la play station tard, je dormais moins, je ne jouais plus au foot, ce fut une période compliquée. »
Le pire, dans l’histoire, c’est que Josué ne s’est pas vu prendre du poids. « Je m’en suis vraiment aperçu juste avant l’été dernier… Je suis sorti de la douche, je me suis assis sur la baignoire, je me suis regardé, et je me suis dit « c’est quoi ça ? Mais non… » J’ai dit à mon épouse, regarde les plis… Je monte sur la balance… 96 ! En fait, quand je m’entraînais avec la réserve de Clermont foot, je me tuais à la muscu, mais je n’avais pas du tout le régime alimentaire adapté pour perdre du poids, j’ai pris du muscle et de la graisse… 97, 98, 99, 100, 101… Je suis monté jusqu’à 101 kilos ! Là, mon kiné m’a dit « Il faut que tu arrêtes la muscu, t’es pas affûté, t’es grand, gras, gros musclé… Tu ne peux pas jouer au foot comme ça. Et j’ai arrêté la muscu. Je suis descendu à 97 en deux mois. Je faisais 97 cm de tour de ventre, j’en fais 80 aujourd’hui. Et j’ai un corps d’athlète ! J’ai pris conscience que le corps, la santé, c’est ce que l’on a de plus cher. Et c’est mon outil de travail. J’ai aussi pris conscience que, si tu veux durer, il faut être un minimum affûté sur le terrain, parce que derrière, la jeunesse qui arrive, elle pousse fort, elle est pleine de fougue. J’aime bien prendre exemple sur des « anciens » qui jouent encore au haut niveau, comme Thiago Silva, 39 ans, Dante, 40 ans, avant il y avait Hilton aussi à Montpellier, qui a joué jusqu’à 42 ans, Akrour, qui joue encore à 49 ans avec Chambéry (N3)… »
Le maintien en N2, un autre challenge
Josué l’avoue, tout n’a pas été simple. Et il a eu des moments de découragement, de doute. Au point de raccrocher ? « Ma femme et mes enfants, Mila et Tiana, ont joué un rôle primordial. Je ne pouvais pas dire stop. Je sentais que je pouvais encore apporter au foot, peu importe le niveau, que je pouvais encore prendre du plaisir. Redonner à mon corps cette souffrance, ça a été un challenge incroyable. Quand tu fais la diète, tu dois être concentré du matin au soir, tu ne dois pas oublier ceci ou cela, il faut tout peser, 200 grammes, c’est pas 201, c’est pas 199, c’est une discipline, une rigueur… »
Vendredi dernier, en National 2, le Wasquehal Foot, malgré un bon match, et sans quelques cadres (Rayan Frikèche et Clarck N’Sikulu étaient absents) s’est incliné chez le leader, le FBBP01 (Bourg-en-Bresse/Péronnas), sur un score de 3 à 0 qui ne reflète pas les débats. Josué, titulaire, qui fait aussi partie des cadres de l’équipe au même titre que l’attaquant David Pollet (ex-Lens, Charleroi), a dû céder sa place au bout de 20 minutes, touché à l’épaule.

Il va profiter de ces quinze jours de repos pour aborder la dernière ligne droite – il ne reste que deux journées de championnat – dans de bonnes conditions : 9e au classement, les Nordistes n’ont aucune marge et sont condamnés à engranger encore des points pour assurer le maintien (la 9e place est synonyme de descente dans l’une des quatre poules de N2). Cela passera par la venue, le 11 mai, au Stadium Lille Métropole de Villeneuve-d’Ascq de Colmar, qui lutte également pour son maintien (10e avec le même nombre de points !) puis un déplacement à Créteil en clôture de la saison 2023-2024, le 18 mai. Encore un sacré challenge !
*Blessé, Anthony Rogie a quitté le club de Wasquehal pour rejoindre Eric Assadourian au centre de formation du RC Lens, où il intervient comme éducateur auprès des 14 ans et des U17 Nationaux. Il envisage de passer le BEF.
Josué Albert, du tac au tac
Meilleur souvenir sportif ?
J’en ai deux ! Y’en a même plus ! Quand on est monté en Ligue 2 avec Quevilly Rouen et que le coach Manu Da Costa m’a annoncé que j’allais signer pro, après deux opérations au ménisque du genou droit, au même endroit. J’avais mal été opéré la première fois. Signer pro, c’était une récompense pour moi. Bon, ça a traîné, je n’ai signé pro qu’à la trêve de cette saison-là en Ligue 2, parce que le club, au départ, n’avait pas voulu me conserver. Et puis finalement QRM a eu besoin d’un défenseur… Le deuxième, c’est l’accession en Ligue 1 avec Clermont.
Pire souvenir sportif ?
Ma première grosse blessure, c’était lors de mon premier match en sélection avec la Guyane, aux Bermudes (mars 2016), je suis mal retombé, et cela a été le début de pas mal de moments compliqués. J’ai eu la chance à ce moment-là d’avoir un très bon entourage, ce qui m’a aidé à ne pas lâcher.
Combien de buts marqués depuis tes débuts en réserve à Saint-Etienne ?
Je n’en ai pas mis des masses ! À Saint-Etienne, je n’en ai mis qu’un seul… non deux… Ah je ne sais pas, je ne les compte pas mais j’en ai mis des beaux, notamment un cette saison avec Wasquehal, dans le jeu, depuis le rond central, et l’autre un coup franc à la dernière minute en CFA avec Quevilly Rouen contre Croix à la dernière minute ! On avait gagné 1 à 0.
Pourquoi as-tu choisi d’être footballeur et pourquoi défenseur ?
Tout simplement parce que quand j’étais petit, j’étais toujours avec un ballon, j’ai toujours joué au foot, en maternelle, en primaire. Mes parents m’ont inscrit à Gennevilliers quand j’avais 8 ans avec mes amis du quartier et mon père a commencé aussi à m’entraîner, sans savoir que je deviendrais pro bien sûr. A cette époque, on n’entendait pas encore parler de « projet », comme le « projet Mbappé ». Moi, c’était le plaisir de jouer au foot. J’ai commencé attaquant, parce que mon père avait joué attaquant. Mais je touchais aussi à tous les sports. Au basket, au hand, au badminton, le mercredi après-midi, c’était le multi-sports dans un gymnase ! J’ai même fait de la gymnastique quand j’étais au collège (rires), parce que faire toutes ces activités permettait d’avoir de meilleurs notes.
Tu étais un enfant plutôt comment ?
Très fougueux. Un peu casse-cou. Très serviable aussi. J’étais l’un des jeunes qui rendait le plus de services aux mamans. Elles savaient que je n’allais pas dire non.
Tu n’as donc pas toujours été défenseur central…
Non ! J’ai été recruté au centre de formation à « Sainté » parce que j’avais joué à ce poste dans un match en sélection Île de France et depuis, je suis resté à ce poste, même si cela m’est arrivé de jouer arrière gauche pour dépanner. Ce jour-là, il y avait un problème de défenseur, je me suis proposé, et voilà… A Gennevilliers, à mes débuts, je jouais attaquant. Et je te jure que j’étais un goaleador !!! En benjamins, j’avais fini meilleur buteur ! Je me souviens d’un match à cette époque, à Clichy, on n’a pas de gardien, je me propose pour jouer dans les cages, mais mon coach me dit « tu joues dans l’axe, je ne veux pas te voir dans les buts », et derrière, on en prend 13 !!! J’en rigolais il n’y a pas longtemps avec un collègue.
Ton geste technique préféré ?
Une bonne passe claquée du gauche, croisée, fort au sol ! Le contrôle aussi, qui te permet derrière d’enchaîner une bonne passe.
Qualités et défauts sur un terrain ?
Je suis trop exigeant, même si c’est une qualité aussi, et auparavant, j’avais quelques sautes de concentration, mais j’ai énormément travaillé là-dessus et je n’en ai plus. Après, je suis généreux, patron, je suis à un poste qui demande beaucoup de communication. Guerrier aussi, je ne lâche jamais. Costaud.
Le club ou la saison où tu as pris le plus de plaisir ?

Je n’ai pas fait 150 clubs mais le peu de clubs que j’ai fait, j’ai toujours eu de très bonne relations, et il y a encore plein de joueurs avec lesquels je suis encore en contact. C’est malheureux mais j’ai passé 4 ans à Saint-Etienne et sur les 150 joueurs que j’ai croisés, il n’y en peut-être 5 avec qui je parle quotidiennement, et si je devais n’en citer qu’un, je citerais Josuha Guilavogui (à Mayence aujourd’hui), avec qui je suis en contact en permanence, cet été on va encore en vacances ensemble. A QRM, j’ai rencontré des personnes formidables, Mathieu Géran, Anthony Rogie, ma première fille est née là-bas… Maintenant, en termes de plaisir, ça se joue entre Quevilly-Rouen, où on n’était pas encore dans le monde pro comme on l’entend aujourd’hui, et Clermont, où il y a eu ce changement radical, ce déclic du monde pro ! À Clermont, je suis devenu papa d’une deuxième fille qui a bientôt 3 ans; là-bas, les entraînements, l’intensité des séances, la rigueur… J’ai vraiment basculé dans le monde pro.
Le club où tu aurais rêvé de jouer, dans tes rêves les plus fous ?
(Il réfléchit)…
Tu ne vas pas dire PSG hein ?
(Rires), Je suis parisien, n’oublie pas ! Plus sérieusement, le championnat anglais me fait rêver. Manchester City.
Le stade qui t’a procuré le plus d’émotion ?
Geoffroy-Guichard (Saint-Etienne).
Un public marquant ?
Bollaert (Lens) et Geoffroy-Guichard.
Un coéquipier marquant ?

Oh punaise ! Abdoulaïde Mzé M’Baba*, un Comorien, avec qui je jouais à Saint-Etienne. Je n’ai jamais vu ça de ma vie. Il était très fort. Il jouait à l’AC Boulogne Billancourt avant d’aller à « Sainté ». Il faisait ce qu’il voulait avec le ballon. Je n’ai jamais vu ça de ma vie. Il avait signé un pré-contrat avec Arsenal quand il est arrivé à Saint-Etienne, malheureusement, il a fait quelques bêtises, il s’est mis dedans tout seul… C’était LE joueur dont tout le monde parlait. Quand on jouait les derbys ASSE-Lyon, il mettait tout le monde à l’amende. Arsenal n’arrêtait pas de parler de lui.
Le joueur avec lequel tu t’entendais le mieux sur le terrain ?
Oh la la la la ! « Anto » Rogie. Je savais où il voulait le ballon, où il allait être, s’il allait me la remettre… Quand je suis arrivé à QRM, en provenance d’Uzès, en National, je suis tombé sur ce « fou », qui avait le pied droit, le pied gauche, il nettoyait tous les ballons, c’était une machine à laver. J’adorais jouer avec lui. Il s’est malheureusement blessé là. Finalement, après les examens, il a choisi de ne pas se faire opérer et il est parti au centre de formation du RC Lens. Il prépare son diplôme d’entraîneur. Il prépare sa reconversion.
Combien d’amis dans le foot ?
Très bonne question. J’ai énormément de contacts, de connaissances, mais des amis-amis, j’en ai quelques-uns, mais il y en a deux ou trois avec lesquels je suis ami depuis dix ans ou plus même, comme Josuha Guilavogui, Mathieu Géran ou Anthony Rogie. Dix ans, ça commence à faire. Josuha, ça fait 16 ans. Sinon, j’ai des amis de 2 ou 3 ans, c’est trop récent.

Un coach que tu as perdu de vue et que tu aimerais bien revoir ?
J’en ai revu certains, Romain Revelli, en début de saison dernière, quand j’ai failli signer à Villefranche, Abdel Bouhazama, à qui j’avais envoyé un maillot, Gilles Rodriguez… J’ai eu des entraîneurs à Gennevilliers, en moins de 13 ans ou en moins de 11 ans avec qui je suis en contact, mais il y en a un, qui s’appelait Moussa, mais je ne me souviens plus de son nom de famille, il nous entraînait avec Toufik Hamdaoui (aujourd’hui au Paris 13 Atlético). Moussa, oui, j’aimerais savoir ce qu’il devient !
Une causerie de coach ?
Celle de Manu Da Costa à QRM, quand il nous demande de nous lever, de monter sur la chaise, ça m’avait fait des frissons.
L’appli mobile que tu utilises le plus ?
Brawl Stars, un jeu. Regarde (il ouvre l’appli), et tiens, quelqu’un m’invite déjà à jouer avec lui !
Un attaquant qui t’a impressionné ?
J’étais sur le banc avec Clermont quand on a affronté le PSG, j’ai vu de près Mbappé, il est impressionnant. Et sinon, un attaquant contre lequel j’ai joué, Medhy Guezoui était hyper « relou » et chiant à jouer.
Tes manies avant un match ?
Je ne suis pas très superstitieux, mais j’aime bien mon rituel de jour de match, petit-déjeuner, marche, repas, et puis il me faut ma sieste ! C’est vraiment la chose dont j’ai besoin. Écouter ma musique avant mon match aussi, visualiser quelques actions, ça m’aide à me concentrer.
Qu’est-ce qui t’a manqué pour jouer en Ligue 1 ?
Qu’on me donne un peu plus de temps de jeu et qu’on m’accorde un peu plus de confiance. Pourtant j’étais irréprochable aux entraînements, sérieux, appliqué, discipliné.
Tu es un défenseur plutôt…
Costaud et technique.
Un modèle de joueur quand tu étais gamin ?
Carlos Puyol. En grandissant, après, j’adorais regarder Thiago Silva.
Le match de foot de légende ?
Même si je n’avais que 6 ans, le France-Brésil de 1998 tout de même !
Le dernier match où tu as assisté en tant que spectateur ?
C’était Lens-Clermont (1-0, le 20 avril dernier).
Si tu n’avais pas été footballeur ?
Quand j’étais petit, je voulais être prof d’éducation physique et sportive !
Le milieu du foot, en deux ou trois mots…
Footballeur, c’est le plus beau métier du monde, bien qu’il soit ingrat.
*Abdoulaïde Mzé M’Baba a ensuite joué aux Comores, au Fomboni Club, puis à Montélimar en DH et à Ain Sud Foot en CFA2.
Texte : Anthony BOYER / Twitter : @BOYERANTHONY06 / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr
Photos : Lily-Rose Candelle
- Suivez-nous sur nos réseaux sociaux (Facebook, Twitter et Instagram) : @13heuresfoot
-
Contactez-nous (mail) : contact@13heuresfoot.fr
41 ans. C’est l’âge de Lamine Djaballah, le capitaine du Aubagne FC, buteur samedi dernier au Puy dans un match qui s’apparentait à une petite finale du groupe A de National 2, et remporté 2-1 par les Provençaux.
Les plus optimistes prétendent que, pour l’accession, cela pourrait être réglé dès ce week-end si Le Puy Foot 43 ne gagne pas à Cannes, et surtout si, dans le même temps, les coéquipiers des expérimentés Thibault Vialla (6 buts, ex-Ajaccio et Dunkerque en Ligue 2, Le Mans et Red Star en National) et de Cédric Odzoumo (meilleur buteur de l’équipe avec 8 buts, ex-Boulogne, Bastia-Borgo et Chambly en National) s’imposent chez eux, au stade de Lattre-de-Tassigny, face à Hyères.


Promis à un printemps 2024 d’enfer, talonné par une équipe du Puy impressionnante de régularité et louée pour sa qualité de jeu (1/4 de finaliste de la coupe de France fin février face à Rennes et invaincue en National depuis début octobre et une défaite à domicile contre Fréjus/Saint-Raphaël), confronté à un calendrier démentiel avec, justement, un voyage sinueux en Haute-Loire, le club aubagnais a finalement réussi à s’extirper de tous les pièges. Il a su profiter d’une petite ouverture pour récupérer la première place quand, au bénéfice d’un difficile succès à domicile face à Cannes (2-1) lors de la 21e journée, les Auvergnats, leaders le temps d’une petite semaine, ont laissé filer deux points chez eux la veille face à Bourgoin-Jallieu (1-1). Un premier tournant avant le grand virage, une semaine plus tard, au stade Massot, là où Dunkerque et Laval, deux équipes de Ligue 2, s’étaient cassés les dents en coupe de France cet hiver !




Comment définiriez-vous le club, à quelqu’un qui ne le connaît pas ?
Cela fait deux ans qu’on réfléchit au projet. Il y a eu pas mal d’oppositions au départ (une pétition contre le projet circule actuellement) et aussi des gens enthousiastes. Aux gens qui sont « contre », il a fallu expliquer les choses, parce qu’on ne voulait pas arriver et « foutre » en l’air tout ce qui a été fait. Bien entendu, dans une fusion, des gens s’y retrouvent et d’autres pas : peut-être que ces derniers, ceux qui vont partir, reviendront vers nous dans un an ou deux. On s’y attendait. Air Bel, c’est le premier quartier, quand on arrive à Marseille, pratiquement limitrophe avec La Penne-sur-Huveaune, qui elle est juste à côté d’Aubagne, donc il y a une vraie raison et une vraie logique géographique à ce rapprochement. Et une raison sportive bien entendu.
Oui. mais on ne peut pas dire que la différence sera énorme entre les deux. Si on monte, on ne fera pas de folie. On va garder les pieds sur terre et la tête bien fraîche, sans s’enflammer. La différence de budget serait minime. On fonctionnerait avec un budget en légère augmentation. Pour le stade, il est aux normes du National, sauf au niveau de l’éclairage, qui est insuffisant et qu’il faudrait changer. La mairie est prête, elle a budgétisé ces travaux, le cas échéant. Mais ce que l’on veut, c’est essayer de former des jeunes. Actuellement, dans notre effectif, on a des joueurs de la région marseillaise, c’est bien, et, depuis l’an passé, on en a quelques-uns qui sont devenus des titulaires comme Ryan Silva ou Yassine « Zino » Benattab, les deux qui jouent régulièrement : ça donne une connotation locale à notre équipe. C’est notre ambition et c’est ce que l’on souhaite développer encore plus.
On ne s’y attendait pas, c’est vrai. Et le National n’était pas prévu cette saison. Bon, on n’y est pas encore. Il reste trois matchs. Quand on a lancé le projet de fusion, on s’était dit qu’on jouerait la montée dans une saison ou deux. Surtout que, l’an passé, on était lanterne rouge à mi-saison; heureusement, on avait fait une belle remontée et on s’était sauvé à la dernière journée à Louhans-Cuiseaux. Donc bon… impossible d’imaginer qu’on allait jouer la montée cette année, et en plus, on a perdu à Andrézieux à la première journée, on a perdu à Alès à la 3e journée, on n’a pas bien démarré. Mais de fil en aiguille, le groupe est resté solide et il y a vraiment une bonne entente entre les joueurs cette saison.
Oui. Cela fait 10 ans que je suis président, et cette saison, c’est le groupe le plus uni et le plus soudé que j’ai vu. La différence, pour moi, elle se fait là. Parce que, très franchement, j’ai vu d’autres équipes dans notre poule, même Toulouse et Alès, qui ne sont pas loin de nous et contre lesquelles ça s’est joué sur des détails. C’est vraiment un championnat très serré. Regardez les budgets de certains clubs… après, nous, on est comme le chien qui a l’os dans la bouche : on va essayer d’aller au bout !





































Si Loïc Chabas n’avait pas été entraîneur de foot, il serait peut-être… journaliste sportif ! C’est l’intéressé lui-même qui a nous a confié sa passion pour ce métier, entre deux cafés, dans son bureau, au stade de La Paoute, situé dans la plaine de Grasse.
Loïc Chabas, c’est donc 33 ans de licence au Racing-club Pays de Grasse. 33 ans de fidélité. Et 11 ans d’affilée passés sur le banc de coach de l’équipe première, d’abord en Division d’Honneur, en 2013, lorsqu’il fut intronisé par le tandem Roustan-Henry (François Roustan, ancien président, aujourd’hui adjoint aux sports, et Romain Henry, actuel directeur sportif), puis en CFA2 après une première accession (en 2016) et enfin en CFA (National 2) après une deuxième accession consécutive, en 2017 ! De quoi légitimer les débuts de ce nouvel entraîneur en chef, à l’époque promu alors qu’il n’avait, finalement, que peu de références, moins en tout cas comme joueur que comme entraîneur chez les jeunes : « J’ai joué au club mais jamais en équipe première. J’étais capitaine de la réserve mais j’ai arrêté tôt, car je prenais plus de plaisir à entraîner qu’à jouer. J’étais latéral droit, mais bon, je n’étais pas… »
Les deux accessions, de DH en CFA2 et de CFA2 en CFA (N2). S’il fallait en choisir une, je dirais la deuxième montée, alors qu’on est tout juste promu en CFA2. En plus, il y a le contexte qui va avec, on gagne à l’extérieur, lors du dernier match de la saison, à Toulon, face à la réserve. En fait, j’ai vraiment trois souvenirs marquants sur les dix saisons (onze saisons en réalité, Ndlr), donc ces deux accessions, et aussi le match de coupe de France, l’an passé, contre Rodez, avec ces trois poteaux pour nous et cette élimination aux tirs au but.
Cela s’est fait de fil en aiguille. J’ai commencé à entraîner quand j’avais 18 ans, je m’occupais des touts-petits, bénévolement, puis très vite, parce qu’il y a eu un entraîneur qui est parti, j ‘ai pris une équipe de foot à 11 alors que je n’avais que 19 ou 20 ans. C’était des U13. Ce n’était pas évident parce qu’il n’y avait que 6 ou 7 ans d’écart avec eux. Ce fut un démarrage très rapide mais ça s’est bien passé et ensuite j’ai eu des U15 avec qui on est monté au plus haut niveau régional. Après, j’ai enchaîné avec les U19, et là, pareil, on monte en DH : cette même saison-là, l’équipe seniors tombe de CFA2 en DH. Et c’est là que l’on me propose de reprendre les seniors I, après la descente et une saison compliquée, où beaucoup de joueurs n’étaient pas des locaux, donc des joueurs pas forcément concernés. Et là, je pars avec Romain (Henry, directeur sportif) sur un projet basé sur l’identité, et on se lance dans le truc. On ne garde que cinq joueurs (Kevin Raccosta, Jonathan Minasi, Anthony Calatayud, Vincent Bardaji, Salim Chaffar) et on lance les jeunes du coin. En fait, mon arrivée à la tête de l’équipe fanion s’est faite sans calculer, mais naturellement.
J’avais plusieurs projets, dont celui de devenir journaliste sportif. D’ailleurs j’ai été pigiste à Nice-matin ! J’étais partie dans la branche du tourisme aussi, mais le sport a toujours été ma passion.
Oui. Je suis assez impulsif et souvent, après une contre-performance, je me dis « mais qu’est-ce que je fais là ? » ou « pourquoi je fais ça ? ». Souvent, à chaud, je me pose ces questions. Alors, ma deuxième saison à la tête des seniors (en 2014-2015), celle où on a failli descendre de DH en DHR, je me suis dit que je n’étais peut-être pas fait pour les seniors, que j’étais juste bon à entraîner des jeunes… De toute manière, des doutes, j’en ai tout le temps. Depuis samedi, par exemple, je cogite énormément bien que l’on ait fait match nul contre le leader, Aubagne… Cela fait partie de ma personnalité. C’est très rare que l’on encaisse un but à la fin, que cela soit à domicile ou à l’extérieur. Et là… (Ndlr, la semaine suivante, le RC Pays de Grasse a de nouveau encaissé un but à la fin du match, à Cannes, 1-1).

Là aussi, sur ce plan, on a évolué. Pendant des années, on a joué en 4-4-2 losange, dans lequel on aimait bien avoir une vraie possession. Et puis après, on est passé à trois défenseurs, cinq milieux et deux attaquants : quand on a changé ça, on s’est aussi adapté, on a mis du temps. On aime bien aller chercher haut défensivement l’adversaire, presser, récupérer, harceler, mettre beaucoup d’intensité sur des séquences. Offensivement, on aime bien travailler sur les transitions. Après, on bosse beaucoup sur les attaques placées, un domaine dans lequel on doit s’améliorer, car on a pas mal de déchets cette année.
Le match référence, j’en ai parlé, c’est celui en coupe de France contre Rodez la saison passée parce que je pense qu’avec le staff, on avait vraiment fait le travail qu’il fallait. On n’a pas eu peur d’affronter cette équipe. Malheureusement, il y a eu ces trois poteaux qui font que l’on n’a pas pu gagner ce match, mais pour nous, ce fut vraiment un match abouti de A à Z.
France – Brésil 1998 par rapport aux émotions, et OM – Milan aussi en 1993 mais j’étais jeune…
(Sourire) Alors y’a eu une année, on n’est pas terrible, sinon, c’est vrai qu’on est souvent sur le podium. Des sollicitations ? Non, pas plus que ça. Pour être honnête, je pense que la réussite d’un club, ce n’est pas que la réussite d’un coach. Déjà, au début, tout est parti de François Roustan (l’ancien président) et de Romain Henry (le directeur sportif) : avec eux, d’entrée, ce fut carré, on est parti sur des bases solides. On a travaillé dans la sérénité, par exemple, sans se sentir menacé à la moindre défaite. Après, il y a eu l’ère Cheton, avec Jean-Philippe Cheton, le président, et Thomas Dersy, le directeur. Avec eux, c’est pareil. Ils m’ont mis dans un cadre sécuritaire. Ils m’ont présenté un projet basé sur des joueurs locaux et un staff local. Ils m’ont dit que c’était avec mon staff et moi qu’ils avaient envie d’avancer. C’est pour ça que je vous dis que ces bons classements, 2e, 3e, c’est un tout : ça reflète la gestion d’un club qui ne fait pas de folie, qui recrute avec de la réflexion et du temps. C’est aussi une organisation et un staff solide. Tout est mis en oeuvre pour que l’on travaille bien. Après, pour en revenir au classement, on est conscient que, quand même, on est bien placé, et cela fait plusieurs années que l’on est en haut de tableau, on le sait, et parfois cela permet de relativiser les choses après une défaite, parce qu’on sait qu’il y a des clubs avec des gros budgets qui aimeraient être à notre place et qui galèrent même pour se maintenir. Ces résultats stables, c’est une vraie fierté aussi.
Déjà, la première des choses et le plus simple serait de pouvoir garder les joueurs qui font de grosses saisons chez nous, mais ça, c’est compliqué, parce que, économiquement, on ne fait pas partie des plus gros clubs. Et sportivement, on ne peut pas empêcher un joueur d’aller jouer plus haut. C’est sûr que, quand on n’est pas passé loin de monter en National, ce fut un frein et ça nous a fait défaut les saisons suivantes. La vérité, c’est que chaque saison, on repart à zéro. Il faut continuer à avoir un temps d’avance sur le recrutement. En fait, ce que l’on fait, c’est qu’on imagine toujours qui sont les joueurs que l’on va perdre et il faut très vite imaginer par qui on va les remplacer, et ça c’est un travail qui est déjà bien commencé : on a déjà des idées pour la saison prochaine.
Après, là où je ne suis pas d’accord, c’est que je trouve qu’on est bien organisé et bien structuré au niveau du club. Donc si on venait à monter d’un cran, on serait prêt. Ce qui manque, cette saison, c’est peut-être une ou deux individualités supplémentaires pour faire la différence. Je n’oublie pas qu’on a perdu des joueurs importants sur blessures, d’autres ont été suspendus, notamment après le match de coupe de France face à Fréjus/Saint-Raphaël où je pense que l’on a été plutôt victimes que coupables.
Je ne sais pas. On n’en sait rien. Il n y a rien de plus beau que de réussir dans son club. On est déjà monté deux fois, et si on arrive à monter une troisième fois, ce serait le summum. Je me donne cet objectif suprême. Après, on ne sait pas comment les choses vont se passer : peut-être que dans deux ou trois ans le club prendra une autre direction, on ne peut pas savoir, et peut-être que, à ce moment-là, j’aurai des possibilités pour aller voir ailleurs.




Maintenant, ne nous faites pas écrire ce que nous n’avons pas écrit ! « Vincent, le National, vous y pensez ? » « Notre credo a toujours été d’être focus sur le maintien. Bon, mathématiquement, 34 points c’est bien mais derrière ça gagne aussi (Biesheim compte 10 points d’avance sur le 9e, la réserve d’Auxerre, Ndlr). Après, on est des compétiteurs, on a aussi cette ambition de bien faire, de rivaliser avec les équipes qui sont avec nous. Récemment, on a gagné à Auxerre B (1-0), face à leur réserve, mais c’était un match très serré, ils méritaient d’ouvrir le score en première mi-temps, on voit bien que les matchs ne se jouent à pas grand-chose ».
On me le demande souvent, oui. Nos adversaires aussi nous le demandent parfois ! Biesheim est une petite ville de 2600 habitants, on est proche de Colmar (15 kilomètres environ), proche du Rhin, proche de Fribourg en Allemagne (35 kilomètres environ)…


Une revanche ? Non. Mais une fierté, ça c’est sur. Dans le foot, vous savez, parfois on fait des bons choix et parfois des mauvais choix… Je suis quelqu’un d’entier : quand je m’engage quelque part, c’est à 200 %. Mais si je vois que certaines choses ne me conviennent pas, alors cela devient compliqué.
C’est vrai, même si on a beaucoup de joueurs qui ont été formés au RC Strasbourg. On a beaucoup de Haut-Rhinois ou de joueurs de la région mulhousienne, de la banlieue de Strasbourg, et seulement deux ou trois de l’extérieur. Anthony Lamonge, notre deuxième gardien, a été pro à Lorient (ex-Avranches, Vannes), Mouhameth Sané, notre capitaine, a été formé à Dijon et Auxerre et a connu la Ligue 2. Reda Bellahcene a aussi un vécu, en première division algérienne, avant de revenir à Schiltigheim.

Peut-être que les équipes étaient un peu plus joueuses avant, or là, comme il y a beaucoup de descentes, chaque match est un véritable combat. Il n’y a pas de ventre mou : soit on est en haut, soit on est en bas. Donc les adversaires se livrent un peu moins mais il y en a quand même qui jouent au foot.
Sa carrière de joueur l’a mené de La Rochelle (N3), sa ville natale, à Amiens (L2) en passant par Vergèze (N3), Arles (N3 à National) et Nîmes (L2). « C’est une fierté d’avoir été pro car je partais de loin. Mais ça a été au prix d’un gros mental et d’exigences car j’ai dû changer dans mon quotidien pour basculer dans le monde pro. » Quand il évoluait encore en N3 et N2, Grégory Poirier effectuait des études de management du sport à Montpellier. « Au final, j’ai eu une modeste carrière pro qui n’a duré que cinq ans (14 matchs de L2, 88 de National). Mais j’ai pu voir les deux mondes et les deux milieux. D’abord les amateurs puis les pros. Ça me sert aujourd’hui dans ma carrière d’entraîneur. »
Mais à son retour, il se rend bien compte qu’il n’est plus le même joueur. « Je n’ai jamais été un milieu très rapide. Mais j’avais perdu dans certains aspects athlétiques, au niveau de la vivacité, de la gestuelle. Avant ma double opération, je gagnais beaucoup de duels ariens. Je me souviens que lors d’un match de Coupe de la Ligue en 2011 contre Montpellier, Olivier Giroud m’avait dit « J’ai rarement vu un adversaire aussi bon de la tête. » Mais quand je suis revenu, je ne gagnais plus un duel… »
S’il est cruel, l’arrêt de sa carrière sonne pourtant comme un soulagement. « J’ai toujours dit qu’après la naissance de mes enfants, les plus beaux jours de ma vie, c’était quand j’ai signé mon premier contrat pro à Nîmes et quand j’ai accepté d’arrêter de jouer. Ça a été une libération. J’ai accepté ma blessure car je savais que j’allais maintenant faire ce qui serait le mieux pour moi. »
C’est dans l’un de ses anciens clubs, à Arles, qu’il a débuté sa reconversion. « Je pense que je méritais d’avoir un contrat pro à Arles. Mais quand on est monté en Ligue 2, les nouveaux dirigeants m’ont annoncé qu’ils ne me conserveraient pas. Le président historique du club, Patrick Chauvin, n’était pas d’accord avec cette décision. Il m’a dit, « Si un jour tu veux revenir, il y aura toujours une place pour toi ». »
Quand il arrive dans le club des quartiers ouest de Marseille, l’équipe est 6e. « Je faisais la route Nîmes – Marseille (240 km aller-retour) tous les jours. On m’avait dit, « C’est un club historique, tu n’es pas de la région, ça risque d’être difficile pour toi… » Mais en trois mois, on gagne 8 matchs sur 10 et on termine 2e derrière Cannes. On est promu en National 3. En toute humilité, je suis donc monté deux fois en un an. »
En juillet 2019, il met le cap sur la Bretagne avec un contrat de deux ans à Saint-Malo (N2). « Honnêtement, je m’attendais à avoir davantage de propositions. Il y a eu quelques approches mais pas tant que ça au final. Mais j’étais content d’arriver à Saint-Malo qui est un bon club à ce niveau. C’était une nouvelle expérience à tenter. »
Malgré l’année de contrat qui lui restait, Poirier choisit de répondre favorablement à la proposition de Sedan qui venait de rater la montée en National au profit du SC Bastia. « Ma famille était très bien à Saint-Malo et j’étais dans un club très sain. Avec le recul ça a été une erreur de partir à Sedan. Mais cette erreur, tout le monde l’aurait certainement fait… J’ai toujours été dans l’idée d’être ambitieux, de faire monter mes équipes et j’ai bien vu que ce serait compliqué avec Saint-Malo. Quand on a une proposition de trois ans de contrat dans un club historique comme Sedan avec des moyens pour monter, c’est difficile de refuser. C’est humain, on a tous envie de grandir. Mais ça m’a servi de leçon. Aujourd’hui, même avec une proposition comme ça, j’y réfléchirais à deux fois, notamment par rapport au cadre qui te permet de bien travailler. »
À Sedan, il a été écarté après sept matchs (1 V, 5 N, 1 D) alors que les championnats s’étaient de nouveau arrêtés. « Quand je suis arrivé, j’ai senti un club encore sous le choc d’avoir raté la montée après avoir été 1er presque toute l’année. Il y a beaucoup de supporters. Je sentais cette passion mais aussi une forme d’impatience. Je remplaçais aussi un entraîneur ardennais, ce n’est jamais évident. Sur les matchs, ça ne s’est pas joué à grand-chose, on a eu des poteaux. Après, j’étais en désaccord avec une personne décisionnaire au club. »
Après six mois de chômage, il est choisi pour succéder à Éric Chelle, parti à Boulogne-sur-Mer (National), sur le banc de Martigues (N2). Il ne signe que pour un an. « Djamal Mohamed, le directeur sportif, me connaissait par rapport à mes parcours avec Arles et Endoume. Je lui suis très reconnaissant de m’avoir choisi ainsi que le président Alain Nersessian, malgré les bons profils qui se sont présentés car Martigues est un club attractif. Prendre un jeune entraîneur qui sortait d’une expérience difficile à Sedan, cela aurait pourtant pu les refroidir. »
« On est un peu isolé géographiquement et les déplacements ont vraiment été énergivores. On n’avait pas un effectif très large. En plus, sur la 2e partie de saison, on a beaucoup joué le lundi sur Canal +. Ce qui fait qu’on a souvent enchaîné le lundi et le vendredi. Pour un club amateur, ce fut compliqué à gérer. On avait joué Dunkerque et Concarneau en prenant 4 points sur 6. Ensuite, on est resté 18 jours sans jouer. C’est là qu’on perd la montée. On avait 3 points à prendre contre Nancy et Borgo mais on n’en prend qu’un seul… »
Un mois après cette terrible déception, la reprise de l’entraînement est entourée d’interrogations. « Je me demandais si on allait rebondir, comment le groupe, le staff, le club allait réagir ? Les gens me disaient « Tu as raté un truc exceptionnel, si tu arrives à te maintenir, ça serait déjà bien ». Mais on avait quand même réussi à garder 3/4 des joueurs. Le 1er juillet lors de la reprise, j’ai vu qu’on était tous contents de se retrouver. Cette journée m’a réconforté. J’ai senti qu’on était tous prêt à repartir, à se battre et à reprendre du plaisir. Je mets le jeu au centre de tout. Dans ces conditions, c’est forcément plus facile pour le coach et les joueurs de repartir. »
Au-delà des bons résultats avec Martigues, Grégory Poirier s’est aussi fait remarquer par la qualité du jeu pratiqué par son équipe, qui fait l’unanimité chez les adversaires et observateurs du National. « C’est une fierté que ce collectif soit réputé et remarqué. À Arles et Endoume, j’avais construit mes équipes dans l’intensité et le résultat. Depuis Saint-Malo, j’ai changé de philosophie. Il faut prendre du plaisir à jouer, créer un collectif à travers des valeurs et du jeu. On est dans un football nouvelle génération avec un nouveau management. Avec mon staff, on essaye de se réinventer et de se renouveler. Avec les joueurs, on construit une relation exigeante en termes de performances mais en leur offrant un cadre de travail, un cadre humain où ils se sentent bien. Ils sentent les moyens à mettre dans le jeu et en même temps, ils apprécient notre compréhension sur le plan humain. Moi, j’essaye de mettre mes joueurs dans les meilleures conditions mentales. »
Sous contrat jusqu’en 2025 avec Martigues, Poirier, qui avec son BEPF pourra prétendre entraîner en L1 et L2, ne cache pas ses ambitions. « J’ai un profil d’avenir, je sais que je vais entraîner au plus haut niveau. Je suis plus fort depuis mes expériences à Sedan et à Saint-Malo. Mais je ne veux pas faire n’importe quoi comme quand j’ai quitté Saint-Malo. Ce que j’ai fait avec Martigues me réconforte dans ce que je mets en place. Je n’ai jamais changé. Bien sûr que je me remets en question. Je connais mes valeurs, je donne un sens à ce que je fais. Il y a la compétition que j’adore, mais aussi la relation avec le groupe, les gens avec qui tu travailles. Au quotidien, c’est extraordinaire. C’est de l’humain. Comme beaucoup d’entraîneurs, j’y mets des valeurs. La pire chose qui puisse t’arriver, c’est qu’on te salisse humainement, alors que tu a mis des valeurs dans ton management, que tu as tout donné. Mais ça t’apprend sur le monde du foot. Je préfère rester comme je suis car je sais que sur 10 fois, ça va marcher 8 ou 9 fois. Mais au moins je suis fidèle à ce que je veux mettre comme valeurs. »
Mes montées. Celle avec mes U17 à Arles où on a gagné 23 matchs sur 24. Ensuite, celle de N3 à N2 avec Endoume Marseille après avoir été au coude à coude avec le SC Bastia. Et le parcours sur la durée avec Martigues.
J’essaye d’être le coach que j’aurais voulu avoir quand j’étais joueur, notamment sur le plan humain. J’ai essayé de prendre chez tous les coachs que j’ai connus. Je peux notamment ressortir Jean-Michel Cavalli à Nîmes, Francis de Taddeo et Ludovic Batelli à Amiens, et Michel Estevan à Arles. J’ai aussi eu Patrice Neveu chez les jeunes. Jean-Louis Saez, qui est actuellement directeur sportif de Montpellier, m’a, lui, sensibilisé sur les connexions dans le jeu.












