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Le club du Loir-et-Cher, rare exemple de stabilité et de longévité en N2, comble son manque de moyens par une politique re recrutement qui vise à relancer des joueurs. Ceux-ci sauront apprécier la sérénité, la tranquillité, la solidité et la fidélité qui le caractérisent.

C’était une occasion rêvée. Celle d’être mis en lumière. Mais le « SOR » – pour Sologne Olympique Romorantin – l’a manquée. Et dans les grandes largeurs. Balayés 4-1 dimanche soir sur la pelouse de Saint-Priest en 16e de finale de la coupe de France, à un stade de la compétition que le club du Loir-et-Cher atteignait pour la cinquième fois après 2005, 2007, 2009 et 2021, les joueurs de Michaël Villatte sont passés au travers.

Le mérite en revient bien sûr à Saint-Priest, virtuel leader de sa poule en National 3 et porté par un stade Jacques-Joly en feu (3000 spectateurs). Il faut aussi reconnaître que le SOR a bien facilité la tâche des Rhodaniens, qui affronteront Valenciennes (L2) à Bourgoin-Jallieu le 7 février en 8e.

C’est une occasion ratée et c’est d’autant plus rageant que cela aurait mis un sacré coup de projecteurs sur ce club discret, peu médiatisé, qui ne manque pas de particularités.

Longévité et stabilité

Au stade Jules-Ladoumègue, en 32e de finale de la coupe de France.

D’abord, il y a cette longévité et cette stabilité : engagé en National 2 pour la 16e saison de suite, le SOR détiendrait le record du nombre d’années d’affilée s’il n’y avait pas Jura Sud et ses 21 saisons consécutives au même niveau ! Compte tenu du football actuel, et pour plein d’autres raisons, cette régularité est un exploit. « 16 saisons de suite en N2, c’est quelque chose sur lequel on s’appuie dans notre recrutement, explique Michaël Villatte, sur le banc depuis mars 2022 et l’éviction de Yann Lachuer; quand des joueurs arrivent au club, ils savent qu’ici, l’air de rien, il y a une histoire et il faut qu’ils s’inscrivent dans cette histoire. Parce que souvent, les nouveaux joueurs connaissent juste l’équipe première de Romorantin, mais pas le club. Cette pérennité à ce niveau, ce n’est pas anodin, ça en impose quand même ! Et cela veut dire aussi que la gestion financière est bonne. Il n’y a pas de mise en péril. On ne fait pas de folie. Et on arrive à trouver les bons choix, pas forcément les premiers choix, en faisant des paris sur des recrutements de joueurs ». Et ça marche. « Après, on en revient aux moyens financiers… J’ai un effectif de 24 joueurs dont 3 gardiens et 3 jeunes du club qui sont là en complément, Kemal Sarigöl, Matéo Dos Santos et Bastien Popineau. »

Michaël Villatte, le coach de l’équipe de N2.

L’autre exploit, c’est d’avoir côtoyé le National, six saisons durant, de 2002 à 2008, et d’avoir aussi rêvé un temps à la Ligue 2, lorsqu’à l’issue de la saison 2003-2004, « Romo » avait fini 4e, à 3 points seulement de Dijon. C’est d’ailleurs Dijon qui avait privé de Ligue 2 l’équipe solognote, alors coachée par Vincent Dufour, à deux journées de la fin du championnat en s’imposant 3-1 à Gaston-Gérard, pour ce qui constituait alors une petite finale d’accession. Le DFCO, briseur de rêve, avait été promu à l’issue de ce match, en compagnie de Brest et Reims.

C’était il y a 20 ans, à l’époque où les « Vert et blanc » jouaient dans la cour des grands ! C’était le temps où, avec 1 million d’euros de budget ou à peine plus, l’on pouvait exister en National, voire jouer les trublions. Pas sûr que cela se reproduise de sitôt en Sologne. Encore que…

L’on touche là une autre particularité du club : l’ambition. À Romorantin, elle est mesurée pour ne pas dire limitée. L’on ne se fixe pas d’objectifs démesurés mais l’on ne se met aucune barrière non plus. Ici, on fait avec avec les moyens du bord, qui ne sont pas extensibles sur le plan financier (850 000 euros de budget), sans perdre de vue l’objectif : le maintien en National 2. Ce qui, avec la refonte fédérale des compétitions nationales (2022-24), s’apparenterait presque à une accession dans ce nouveau championnat la saison prochaine, avec les meilleures équipes de la division, donc, et les 6 clubs de National relégués, auxquels s’ajoutent déjà les 6 de la saison précédente. « On peut dire ça, acquiesce Villatte; ce serait une mini-accession ! Surtout qu’avec la refonte, 20 équipes de national 2 vont descendre, et même 40 en deux ans ! Le championnat va passer un cap en termes de niveau je pense. »

« Un club de copains »

Les deux coprésidents, Jean-Philippe Perraguin (à gauche) et Michel Cheminot.

Ce qui frappe également à Romo, c’est… l’organigramme ! Ici, les gens sont là depuis longtemps, voire depuis très longtemps pour certains comme les deux co-présidents, Jean-Philippe Perraguin et Michel Cheminot, presque 110 ans de club à deux ! Et c’est valable aussi pour le staff. En janvier 2003, le coach est arrivé comme joueur (milieu de terrain puis défenseur central en fin de carrière) en provenance de Châteauroux, où il a été formé et où il a connu le monde pro. Hormis une coupure de 3 ans au District de Loir-et-Cher (conseiller technique), il n’a plus jamais quitté « Romo ».

Son adjoint, Rémi Souyeux (39 ans), buteur du SOR entre 2014 et 2023, est entraîneur adjoint et s’occupe aussi des 18 ans R2. Yohan Cosson (32 ans), de retour au club où il avait gardé les cages entre 2011 et 2015, entraîne les gardiens et Xavier Dudoit (48 ans), de retour dans la maison verte dans le rôle du directeur sportif, après quatre saisons d’exil, deux comme recruteur à Angers et une expérience d’un an et demi sur la banc de Poitiers, en N3, fait aussi partie des meubles.

Ancien joueur du club (entre 2003 et 2010), Xavier Dudoit (lire son interview plus bas) a également entraîné l’équipe seniors N2 de 2010 à 2019. Forcément, 16 ans de présence, cela pose un homme. Le vice-président chargé du sportif, Jean-François Doyon, a joué, entraîné et même assuré un peu le rôle de directeur sportif après le départ de Julien Converso pour Quevilly Rouen, en Ligue 2. « Je n’aime pas trop dire que l’on est un club familial, je préfère dire que l’on est un club de copains, enchaîne le coprésident Jean-Philippe Perraguin; C’est vrai que beaucoup sont là depuis longtemps, il y a aussi le vice-président exécutif, Joachim Campos, au club depuis 20 ans, qui était arrivé comme joueur au départ ! »

Fidélité, loyauté et sérénité

Rémi Souyeux (au premier plan) et Yohan Cosson, membres du staff de la N2.

C’est dire si, au SOR, on marche à la confiance, à la fidélité, à la loyauté. C’est sans doute pour cette raison que, sportivement, ça marche : sans grands moyens, le club s’en sort toujours et parvient à tirer son épingle du jeu en National 2, avec une philosophie de recrutement simple, basée sur le marché des joueurs en difficulté, à la relance, qui reviennent de blessures, ou sur des paris. C’est à dire, sans péjoration, les seconds voire les troisièmes choix. Les premiers choix, c’est pour les gros budgets ! Encore que, cette saison, le SOR a réalisé un très gros coup en enrôlant le buteur de Blois, Jordan Popineau. Le garçon qui pèse 69 buts en 123 matchs officiels avec Blois (66 buts en championnat en 120 matchs de championnat !), est venu en voisin avec son petit frère Bastien (troisième gardien). Une opportunité plus qu’autre chose puisque le joueur, pas forcément retenu par son ancien club, ne souhaitait pas quitter la région. Et comme Romorantin n’est qu’à 40 km de Blois…

Ce qui frappe aussi au Sologne Olympique Romorantin, c’est la sérénité. A la fois dans le travail et dans la vie quotidienne. Une sérénité née de l’assurance de percevoir, à la fin du mois, son salaire. Il suffit de voir le nombre de clubs en difficulté pour comprendre que ce n’est pas un luxe. Le SOR est un club « tranquille, serein, solide » pour reprendre les mots de Jean-Philippe Perraguin, « bien ancré dans le territoire ». Un club qui n’a pas eu à se crêper le chignon lorsqu’il a voulu changer de nom en 2015, pour mieux mettre en avant sa notion de « territoire » : le Stade Olympique Romorantinais est donc devenu le Sologne Olympique Romorantin. « Ce n’était pas trop difficile de trouver ce nom ni de le changer, plaisante Perraguin; D’ailleurs, on n’a rien changé, c’est resté le SOR ! »

Un club à taille humaine

Michaël Villatte avec le vice-président chargé du sportif, Jean-François Doyon.

« On est un club à taille humaine, poursuit Michaël Villatte; les dirigeants sont de très bons gestionnaires, ce qui amène de la sérénité et des objectifs qui correspondent au potentiel du club. Cela laisse une sérénité et une tranquillité dans le travail, et c’est très agréable. On a entre 350 et 400 licenciés dans une région qui n’est pas trop foot, mais depuis 30 ans, le club dure à l’échelle nationale, ce n’est pas rien. Il y a un certain savoir-faire de ce côté là. Chez les jeunes, on compose avec un bassin difficile et on a un peu de mal à être compétitif. « 

« On est un club familial et fidèle, appuie le Toulousain Rémi Souyeux, enfin retraité des pelouses après 9 saisons sous les couleurs du SOR, et 9 autres clubs avant ça, en Ligue 2 et surtout en National (Luzenac, Colmar, Paris FC, Dijon, Rodez, Martigues, Troyes, Nîmes et Alès). « Ici, les dirigeants font confiance aux hommes et les mettent dans les meilleures conditions, avec les moyens du bord. Cette stabilité, cette sérénité, c’est vraiment le gros point positif », poursuit celui qui, profitant d’un concours de circonstances, avait renfilé le short en N2 en deuxième partie de saison, l’an dernier.

Les deux coprésidents.

Des propos corroborés par Roland Vieira, l’actuel coach de Mâcon (N2), passé par Le Puy Foot et le Stade Briochin, et ancien attaquant du SOR en CFA (de 2008 à 2010, 56 matchs, 15 buts) : « C’est vraiment un top club, qui permet à des joueurs de se relancer, où les dirigeants sont bienveillants, ambitieux et dévoués. Je garde un très bon souvenir de « Romo » et j’ai beaucoup apprécié les gens que j’ai rencontrés là-bas. »

Et le co-président, il est là depuis quand déjà ? « Je suis arrivé au club en minimes ! » reprend Jean-Philippe Perraguin, ancien photographe spécialisé dans l’événementiel, aujourd’hui à la retraite. « Après moi, Jean-François Doyon, qui a joué et entraîné, est arrivé, le maire Jeanny Lorgeoux aussi … »

De toutes ces saisons passées en National 2, et de la campagne en National, Jean-Philippe Perraguin en tire lui aussi une certaine fierté : « Avec les moyens d’une ville de 18 000 habitants, rester à ce niveau aussi longtemps, c’est un challenge tous les ans, même si on a été repêché une fois (en 2022) alors qu’on devait descendre en N3 (le club avait profité de la relégation administrative de Béziers). »

Confort dans le travail

Le stade Jules-Ladoumègue.

Cette image d’un club stable et sain, il la cultive : « On essaie de gérer au mieux. On a toujours fait comme ça : on ne dépense pas l’argent que l’on n’a pas. » Ce confort dans le travail, c’est aussi un vrai atout, dixit Villatte : « On s’entraîne en journée, on a de bonnes installations au complexe Jules-Ladoumègue, où tout est centralisé au même endroit, avec trois jardiniers employés municipaux sur le site. On a le terrain d’honneur, deux terrains en herbe à 11 et un petit terrain de foot à 8. Structurellement, on est plutôt bien. Il manque peut-être un terrain en synthétique qui éviterait les arrêtés municipaux et les fermetures en raison des conditions météos, et permettrait d’avoir de meilleures conditions encore, notamment pour nos jeunes. »

Quant à savoir si retrouver un jour le National demeure possible … Là encore, le « coprez » est mesuré. Perraguin : « Notre ambition, c’est de faire le mieux possible. Bien sûr, on ne dira pas non si ça se présente un jour, mais les conditions financières ne sont plus du tout les mêmes qu’avant. Des villes comme Le Puy ou Les Herbiers, avec des tailles similaires, y sont déjà parvenues, mais leur bassin économique et industriel est plus important. Nous, on n’a pas grand chose, surtout depuis la fermeture de l’usine Matra. Néanmoins, quand on va à la DNCG, ils sont toujours surpris de voir que l’on présente un budget avec pour 25 % environ de recettes de partenariat, sur un budget de 850 000 euros. »

Revoir le National, une utopie ?

Le gardien Yoann Djidonou attaque sa 11e saison à Romo !

C’est vrai que la fermeture de l’usine Matra voilà plus de 20 ans fut un coup dur pour la ville… et le club : car si le SOR est parvenu à accéder en National en 2002, c’est aussi grâce à ce gros employeur : « On pouvait proposer des emplois aux joueurs, regrette Perraguin; un jour, un mercredi, alors que l’on avait un match en retard à disputer à Aurillac, je me souviens être allé chercher un joueur à midi à la sortie de l’usine pour aller au match et ensuite, on l’a ramené à 5h du matin car il reprenait le travail ! »

« Rejouer en National, ce n’est pas utopique, mais ce n’est pas une priorité, reprend Michaël Villatte; pour que ça arrive, il faudra que toutes les planètes soient alignés, que tous les paris que l’on a fait fonctionnent et s’avèrent payants, que les joueurs que l’on a choisi de relancer retrouvent leurs meilleur niveau, que ceux qui arrivent du niveau en dessous se soient adaptés et progressent, que les blessures soient peu nombreuses, donc ça fait beaucoup de facteurs ! Et puis on a des concurrents qui ont plus de moyens et qui affichent leurs ambitions. Cela ne veut pas dire que l’on joue petit bras, mais on joue d’abord le maintien, car on connaît nos moyens. On fait partie des petits budgets. »

Après avoir mis un terme à sa carrière de joueur, en juin 2009, Villatte entraîne les jeunes pendant deux ans avant de devenir, pendant trois ans, le conseiller technique du District de Loir-et-Cher. Il obtient son Brevet d’Etat et en profite pour passer son BEF (Brevet d’entraîneur de football), qui lui permet d’officier jusqu’en N2 : « Je suis revenu au club en 2014 comme responsable technique des jeunes et de l’équipe réserve. » Devenu l’adjoint de Yann Lachuer en équipe fanion, il est finalement intronisé sur le banc quand les résultats ne sont pas là, en mars 2022. « On m’a proposé de prendre le poste. Comme c’est mon club, j’ai accepté. Je suis dans un contexte que je connais particulièrement bien. Je grandis et j’apprends ici. »

Une certaine philosophie de jeu

Le buteur de Blois, Jordan Popineau, recrue phare de l’intersaison, a déjà marqué 10 buts en 13 matchs cette saison avec Romo !

Romo, c’est aussi un certain style de jeu, une patte : « J’ai envie d’avoir une certaine maitrise avec le ballon pour, si possible, faire courir l’adversaire et le fatiguer, pour ne pas être que dans la transition, parce que c’est plus difficile et cela nécessite d’avoir de bons défenseurs qui récupèrent le ballon dans la bonne zone. J’ai été joueur, je trouve que c’est plus sympa d’avoir le ballon et de vouloir l’utiliser à bon escient. Il y a 2 ans, on jouait en 3-5-2 mais depuis un an et demi, on a réadapté le schéma en 4-3-3 en fonction des joueurs à disposition, avec toujours cette envie d’avoir la maîtrise, de trouver des décalages, d’avoir des relations et des redoublements de passes. Cette philosophie, elle est un peu ancrée au club aussi ».

Sixième du classement à seulement 3 points du 2e, La Roche-sur-Yon, et du 3e, Saint-Pryvé Saint-Hilaire, deux équipes qui comptent… deux matchs de plus, le SOR mettra en partie à jour son calendrier samedi 17 janvier sur la pelouse du leader, Les Herbiers. Un choc qui n’est pas pour déplaire au coach, six jours après la déconvenue de Saint-Priest : « C’est bien, ça permet de passer très vite à autre chose. Et si on avait le bonheur de gagner ce match en retard, on serait 2e ! Dans ce championnat, que je trouve relevé, on voit bien que tout le monde peut battre tout le monde. Hormis peut-être Saumur et Angers, et encore, la poule est très homogène. On voit que les équipes ont envie d’imposer leur philosophie de jeu. Je discutais avec le coach de Paris 13, qui découvrait cette poule, il trouvait que beaucoup d’équipes avaient des principes de jeu, voulaient avoir le ballon. Il était un peu étonné, parce qu’il était habitué à des blocs équipes, du foot de transition, et là, ils trouvent des équipes qui veulent avoir la maîtrise, qui veulent imposer leur jeu. C’est sur que, par exemple, dans la poule sud, la notion de combativité, de duels, de bloc équipes, est plus présente; nous, dans notre poule, on a, je trouve, un peu plus de philosophie de jeu. Attention, je ne dis pas qu’ils n’en ont pas dans le sud. Et puis il y a l’état des terrains aussi, ça joue. »

Xavier Dudoit : « Notre force, c’est la fidélité »

Xavier Dudoit (48 ans) est revenu à Romorantin l’été dernier, après une « infidélité » de 4 ans et surtout une fin de parcours sur le banc des Solognots qu’il avait, à l’époque, provoquée, au sortir de résultats insuffisants (sa longue collaboration s’était arrêtée en novembre 2018). Depuis, il a passé deux saisons au SCO Angers (2019-2021) comme recruteur et un an et demi coach, à Poitiers, en National 3, où l’aventure s’est terminée à Noël 2022. Il évoque son retour à « Romo » et fait le point pour 13heuresfoot.

Xavier, comment s’est effectué votre retour à Romo ?
Il s’est fait naturellement. J’étais parti en très bons termes du club, où je venais de passer 17 ans ! C’est quand même le signe que j’avais de bonnes relations, notamment avec les dirigeants, dont certains sont devenus des amis. On a toujours gardé le contact. Quand le directeur sportif Julien Converso est parti (après 14 ans au club !), en même temps que moi, en 2019 (Converso est parti comme recruteur à Orléans avant de devenir le directeur sportif de Quevilly Rouen), le club a fait le choix de ne pas le remplacer pour des raisons économiques mais ils se sont aperçus de la difficulté d’exister à ce niveau sans quelqu’un à ce poste. Au travers de quelques échanges, notamment avec le vice-président chargé du sportif, Jean-François Doyon, on a évoqué cette possibilité d’un retour, à ce poste là. L’idée de revenir dans un club que je connais bien et avec lequel j’avais gardé beaucoup d’attaches m’est apparu évident. Je n’ai pas réfléchi longtemps.

Peut-on dire que ce poste est complémentaire de celui que vous avez occupé à Angers ?
Oui. l’intermède à Angers m’a fait découvrir autre chose, une autre facette du foot, qui me plaît. Il y a beaucoup de similitudes avec le poste de directeur sportif. J’ai vu beaucoup de matchs, beaucoup de joueurs… Quand on est coach, et je l’ai été, on a moins le temps de faire ça. Et puis il y a les relations avec les agents : car même en National 2, tous les joueurs ont des agents ou des conseillers, donc on est obligé de composer avec. Ces deux ans à Angers m’ont aussi permis de gérer et appréhender les relations avec ce milieu-là aussi.

Xavier Dudoit, lorsqu’il entraînait Poitiers. Photo Facebook Stade Poitevin.

Vous connaissez le foot : vous revenez au club après y avoir entraîné pendant 9 ans, c’est donc légitime de penser que…
Je vous arrête, c’est la seule condition que j’ai posée : un retour, oui, pour entraîner, non ! Quand je suis arrivé au club, Michaël (Villatte) était déjà là. On a joué ensemble. Il a entraîné la réserve quand j’étais coach de la une et j’avais fait en sorte de valider ce choix. Il a été adjoint en N2 ensuite. Joueurs, on était assez proches, on avait des affinités. Je comprends que cela puisse créer un doute, d’ailleurs, la condition pour que je revienne était que Michaël valide ce choix des dirigeants et que les choses soient bien claires entre lui et moi. De par nos relations, cela a aidé et simplifié ma venue.

Entraîner un jour à nouveau, cela ne vous titille pas ? Le terrain ne vous manque pas ?
Je ne me pose pas la question. Je suis parti d’Angers parce que le staff (de Stéphane Moulin) est parti (en juin 2021), mais je m’épanouissais dans ce nouveau rôle, alors pourquoi aller faire autre chose ? Le terrain ne me manque pas, je me consacre à ce que j’ai à faire, et ça me plaît.

Quels étaient vos prérogatives au SCO Angers ?
On était seulement deux à la cellule recrutement, Philippe Leclerc et moi, on travaillait pour les pros, la post-formation et on supervisait aussi les adversaires pour les pros. Le secteur, c’était toute la France.

Romo est en N2 depuis 16 ans : peut-il un jour retrouver le National et surtout, y exister ?
Pour pouvoir exister sportivement en National, il faut exister financièrement or on sait aujourd’hui que l’on n’a pas les capacités financières pour ça, mais si on doit y retourner, on ne s’en privera pas, c’est normal. On a 840 000 euros aujourd’hui, donc exister en National serait compliqué. L’idée, c’est aussi de perdurer. Donc prétendre vouloir aller en National et y exister, c’est autre chose, même si par le passé des Luzenac, Le Poiré, Pacy, y ont fait bonne figure, et même nous quand on y était, on faisait déjà un peu figure d’exception, avec, sensiblement, les mêmes budgets qu’aujourd’hui, à peine plus élevés.

Le staff de la N2 et l’équipe de N2 aligné au coup d’envoi en 32e de finale de coupe.

C’est quoi, le credo du club, l’objectif ?
Cela peut paraître « réducteur » mais le fait de continuer à exister en N2, de perdurer, compte tenu de la reforme des championnats, c’est notre objectif prioritaire. Le National 2 passe en 2 ans de 64 équipes à 48 équipes, on voit bien que ça se complique d’année en année. C’est juste réaliste de dire ça. Une descente pourrait être catastrophique aux yeux des gens : c’est aussi un peu notre difficulté, parce que, pour eux, c’est devenu une normalité d’être là, en N2, alors que ce championnat devient de plus en plus compliqué.

Vous le décririez comment, votre club ?
Un club à dimension humaine, avec des valeurs bien marquées, des valeurs d’humilité, de fidélité, de loyauté, des valeurs familiales. Vous voyez, certains dirigeants sont là depuis 40 ans, notre gardien Yoann Djidonou (37 ans) attaque sa 11e saison, et ce n’est pas le seul. Alexandre Castro (29 ans) le capitaine est là depuis 7 ans : il a refait son apparition sur le terrain en fin de match à Saint-Priest dimanche dernier en coupe de France, après une longue absence due à une blessure au genou. On retrouve cette fidélité dans le staff aussi, c’est ce qui fait notre force et ce qui nous caractérise. L’entraîneur des gardiens, Yohan Cosson (32 ans), est issu du club, il a même été 2e gardien à l’époque. Rémi (Souyeux) est là depuis 10 ans, Michaël (Villatte) depuis 20 ans… On reste conforme à la politique du club qui est de faire confiance aux gens ici d’ici. Et puis, on est un club sain, on n’a jamais de souci d’ordre financier, on n’a jamais déposé le bilan. Alors c’est vrai, on ne propose pas des salaires mirobolants mais au moins on est certain de les honorer sur la période convenue. Notre force, c’est cette convivialité et cette fidélité.

Le 32e de finale de coupe, début janvier, a attiré la foule à Romorantin.

Les affluences au stade Jules-Ladoumègue ?
On fait entre 600 ou 700 spectateurs, on pourrait faire plus. On a fait 3000 spectateurs début janvier en 32e de finale de la coupe de France, grâce à nos amis guadeloupéens (Romorantin a battu le CS Le Moule 4 à 0), qui nous ont bien aidés à remplir le stade et à avoir une ambiance sympathique; cela faisait un moment que l’on n’avait pas vu autant de monde à Jules-Ladoumègue. On sait que la coupe attire le public, notamment un public nouveau et curieux, mais en championnat, c’est compliqué de faire venir les gens au stade.

Un mot sur l’effectif de N2, qui semble un mélange de jeunesse et d’expérience…
C’est un peu ça. Cette saison, on a recruté le buteur Jordan Popineau (Blois). Sa venue est un concours de circonstances. Blois n’a pas tout fait ou n’a pas affiché une réelle volonté de continuer avec lui, on ne va pas s’en plaindre (depuis son arrivée l’été dernier, Jordan Popineau a inscrit 5 buts en 5 matchs de coupe de France et 5 buts en 8 matchs de championnat). Il ne voulait pas bouger de la région, on a saisi l’opportunité. On a de la jeunesse, de l’expérience, et aussi des profils comme Yoan Etienne (26 ans), formé à Monaco et passé par Guingamp et Lorient, qui n’a pas joué pendant un an, ou encore Alex Marchadier (25 ans, Le Puy, Orléans, Moulins), qui est resté longtemps écarté des terrains en raison d’une blessure : ils ont vécu des galères. Alors même si on n’a pas les premiers choix, ça ne nous empêche pas de réussir. C’est là que l’on mesure le très bon travail de Julien Converso avant (aujourd’hui à Quevilly Rouen en Ligue 2), il se trompait très peu, il faisait des paris avec des joueurs à remettre en forme, ou de retour de blessures ou qui sortaient du chômage. Julien a été connu et reconnu pour son travail.

Du coup, passer derrière lui, ça vous met un peu de pression, non ?
Franchement ? Oui ! Je sais que ça va être compliqué de faire aussi bien que lui et durer aussi longtemps que lui. Je passe derrière quelqu’un de très performant, j’en suis conscient, mais les dirigeants ont pris conscience qu’il fallait avoir quelqu’un dans ce rôle-là. J’ai la chance d’avoir leur confiance, à moi de faire en sorte de ne pas les décevoir.

National 2 – samedi 27 janvier 2024 (match en retard de la 9e journée) : Les Herbiers – Romorantin, à 18heures, stade Massabielle, aux Herbiers.

Lire aussi  / Yann Lachuer : « C’est la société qui a changé, pas le foot ! »

https://13heuresfoot.fr/actualites/yann-lachuer-cest-la-societe-qui-a-change-pas-le-foot/

Texte : Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr – Twitter @BOYERANTHONY06

Photos : SOR / Anaïs Afflard et 13HF

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Promue cette saison, l’Entente Feignies-Aulnoye traverse une crise de croissance. Son avenir s’inscrit en pointillés après l’annonce du retrait de son président-mécène et l’échec de la fusion avec Maubeuge. Sportivement, la coupe de France, avec un 16e de finale contre Montpellier et les progrès en championnat montrent qu’elle garde le cap.

En s’offrant le scalp de Quevilly-Rouen Métropole (Ligue 2), les Finésiens-Aulnésiens ont atteint, pour la première fois de l’histoire du club, les 16es de finale de la coupe de France. Face aux Normands, ils se sont imposés sur la plus petite des marges grâce à un magnifique but de l’ancien joueur de Dunkerque, Avranches et Croix, Thomas De Parmentier (13’).

Si l’on a vu passer en boucle la panenka ratée d’Antoine Mille (Châteauroux) ou le superbe 3e but du PSG à Revel, celui du milieu offensif de 33 ans n’a pas eu la même audience sur les réseaux sociaux. Pourtant, son centre-tir a lobé le gardien normand, à la manière d’un Christophe Jallet en équipe de France face à la Biélorussie en 2012 !

Ce manque de reconnaissance pour ce beau geste illustre les difficultés du club sambrien à exister. De très faibles affluences en championnat (265 spectateurs en moyenne cette année), une fusion avec son voisin maubeugeois avortée en 2021 : l’existence de ce jeune projet est compliquée.

Un premier passage en National 2 en 2018-19

La joie après la qualification pour les 16es de finale de la coupe.

Fondé en 2016, l’EFAFC réunit les clubs de deux villes de tailles similaires et distantes de 15 km dans le bassin sambrien : le SC Feignies et l’AS Aulnoye. A l’époque, les deux équipes évoluent depuis 5 ans dans le même groupe de CFA 2. Cette fusion est l’initiative de la famille Menissez, grands industriels dans la boulangerie de la région. Le père, Jacques, jusqu’en 2016, puis le fils, Laurent, se succèdent à la présidence de ce club ambitieux qui grandit dans l’ombre de Maubeuge, la « grande » ville d’à côté, qui compte deux fois plus d’habitants que les 15 000 âmes de Feignies et Aulnoye réunies.

La joie après la qualification pour les 16es de finale de la coupe.

Très vite, le club obtient sa montée en National 2 après être sacré champion de National 3 à l’issue de la saison 2017/2018. La saison suivante, malgré une bataille acharnée pour le maintien, Feignies-Aulnoye redescend. Sous les ordres de Rachid Chihab, le club est classé 3e de son championnat en 2020, un résultat encourageant, lors de la saison “covid”, arrêtée après la 18e journée. Didier Toffolo prend la suite de Chihab, mais sa mission sera de courte durée. Alors qu’il a été engagé en juillet 2020, il est démis de ses fonctions en octobre, avec un bilan insuffisant : 4 points en 5 matchs. Un entraîneur local, qui sort d’une expérience fructueuse à l’IC Croix, vient le remplacer : Jean Antunes, ancien joueur emblématique de Wasquehal. Le championnat est arrêté après 6 journées, aucune accession, ni relégation. Nouveau départ en 2021.

Le PSG en 32e : “la cerise sur le gâteau”

Le coach Jean Antunes.

Pour sa première vraie saison à la tête de l’équipe, Jean Antunes connaît des montagnes russes. Au terme d’une “très bonne saison”, selon les dires de l’entraîneur, le club ne monte pas en N2, alors qu’il a un meilleur bilan que Wasquehal, qui sera promu ! La raison ? Une sanction administrative – l’équipe a aligné un joueur suspendu sur la pelouse de l’Amiens AC. Résultat : défaite sur tapis vert et point de pénalité. “Une grosse déception” pour l’ensemble du groupe, qui avait terminé premier sportivement. Ce coup dur en championnat ne résume pourtant pas leur saison 2021/2022.

Car la France entière découvre le club de l’Avesnois lors de son 32e de finale au Stade du Hainaut, à Valenciennes, face au Paris Saint-Germain ! A guichets fermés, s’il vous plaît ! “La cerise sur le gâteau” pour le club, évidemment très heureux de ce tirage. Pour lui, deux objectifs : profiter et ne pas prendre de « rouste » en prime time à la télé. Objectif accompli, défaite 3-0, avec les honneurs. “Ils ont eu deux penalties, dont un très sévère. C’était une belle prestation. Ça a donné une très belle image du club et de l’équipe. C’était le plus important”, analyse le technicien roubaisien de naissance.

La remontée, enfin !

Jérémy Bekhechi, l’ancien de Croix, QRM, Lyon-Duchère et Sedan, a rejoint l’Entente début janvier !

L’année suivante, le conte de fées se répète avec, cette fois-ci, une fin plus heureuse. Et un nouveau beau parcours en Coupe de France 2022-23, seulement éliminé par Valenciennes au 8e tour à Maubeuge (0-3), à une marche des 32es de finale. Cette même saison, l’Entente réédite sa performance précédente et termine première de son groupe de National 3. Une place synonyme d’accession en National 2. Une grande fierté pour l’entraîneur et son groupe, tant on connaît la difficulté de ces championnats amateurs.
Devant la DNCG, l’EFAFC se voit infliger un contrôle de la masse salariale pour réaliser son mercato. Rien de grave, c’est une « sanction » propre aux équipes promues. “Les joueurs qui nous ont rejoints ont été bien identifiés”, explique Jean Antunes, satisfait, dans ces conditions, de la gestion de l’intersaison. Mais dans le football, tout va très vite : en septembre, leur buteur Franck Vaast se blesse pour la troisième fois en six ans (rupture des ligaments croisés et saison terminée). Pour le remplacer, Antunes fait venir Issam Rezig, buteur passé par Wasquehal et la réserve du LOSC. Et tout récemment, c’est Jérémy Bekhechi, ancien buteur de Sedan et QRM notamment, qui, quelques jours avant le 32e de finale, a rejoint l’Entente … et Antunes, qu’il a connu à Croix !

Un début de championnat difficile

Le stade Didier Eloy, à Feignies.

De retour en N2, les Nordistes commencent mal le championnat (2 nuls et 5 défaites). Contre Haguenau (journée 3), alors qu’ils mènent 3-1 à la mi-temps chez eux, les locaux subissent une remontada et perdent le match 4-3. “Avec le recul, je me dis que quand on gagne 3-1 à la mi-temps, on ne peut pas le perdre. Ça a été une grosse déception.”, réagit Antunes, philosophe.

Finalement, il faut attendre le 4 novembre et la 8e journée pour assister à la première victoire de la lanterne rouge contre l’Olympique Saint-Quentin (2-1). Après un nul encourageant à Furiani (0-0), les Finésiens se qualifient pour le 8e tour de la Coupe de France en battant une valeureuse équipe de R1, Bondues (1-0). Ensuite, la machine se met en marche : victoire 2-1 en championnat à Colmar à 9 contre 11 (! ) puis qualification en Coupe face à la sensation nordiste Itancourt-Neuville (R1), tombeuse de Wasquehal et Croix, signe du destin, les deux anciens clubs emblématiques du parcours d’Antunes !

La « perf » face à Quevilly Rouen (Ligue 2) !

Le 11 au coup d’envoi face à QRM en 32e de finale de la coupe de France.

Après une défaite sur la plus petite des marges contre Créteil, Feignies passe les fêtes à l’avant-dernière place de son championnat, à 5 petits points du maintien avec deux matchs en retard. Tout reste possible. Mais ce n’est pas le maintien qui occupe les esprits des joueurs pendant les fêtes, mais bien la perspective d’affronter un club de Ligue 2 en 32e de finale de Coupe de France. Quevilly-Rouen se déplace dans l’Avesnois et forcément, ça se prépare !

Particularité du club, la majorité des joueurs n’habitent pas dans la région de Feignies ou d’Aulnoye. Certains viennent de Lille, d’autres de Valenciennes. Jean Antunes avale, par exemple, deux heures aller-retour quatre fois par semaine pour assurer les entraînements, ce qui n’est “pas de tout repos.”
Pendant les vacances de Noël, ces incessants trajets ne s’arrêtent pas. “On s’est retrouvé le 27 décembre pour la reprise de l’entraînement. On a fait des séances tous les jours sauf le 31 et le 1er. Pour un club amateur, c’est beaucoup.” Et cet investissement a payé.

Après un match magnifique d’abnégation et de réussite, les hommes d’Antunes éliminent Quevilly-Rouen (1-0), notamment grâce à un pénalty stoppé par Samuel Atrous ! L’après-match a donné lieu à une grande fête avec l’ensemble des “gens qui œuvrent au quotidien pour le club, qui sont bénévoles pour la plupart”, salue le technicien. Pour lui, “voir le bonheur dans les yeux des gens et les émotions qu’on a pu leur procurer” le rend heureux et on peut aisément le comprendre.

Le projet de fusion avec Maubeuge avorté

La joie dans les vestiaires après la qualification pour les 16es de finale de la coupe.

Alors que les deux clubs évoluaient encore au même niveau il y a deux ans en National 3, Feignies-Aulnoye a depuis pris son envol, pendant que Maubeuge, son éternel rival, est descendu au niveau régional.

En 2019, la création d’une section sport-études à l’Entente attire les jeunes du club voisin. Le sens de l’histoire aurait pu être la création d’un grand club sambrien dans la foulée, afin de rivaliser avec les autres clubs de la métropole lilloise. Mais des querelles politiques et d’égo en ont voulu autrement. En 2021, le projet de fusion est largement refusé côté maubeugeois (7 pour / 77 contre) et définitivement enterré.

Dans la lignée de cet échec, Laurent Menissez a annoncé tout récemment, dans les colonnes de la Voix du Nord, son intention de démissionner du poste de président et d’arrêter de financer le club à la fin de la saison. En cause, notamment, le fait que Feignies se trouve à cheval “entre le monde professionnel et le monde amateur”, ce qu’il “ne peut pas supporter”. L’idée est de grandir et ça ne m’intéresse pas de jouer juste pour se maintenir, explique-t-il. »

On parle de lui du côté de Valenciennes. Pour les Vert et Bleu, ce serait le plongeon dans le grand inconnu. Son plus gros investisseur parti, reconstituer un budget deviendrait une tâche très ardue. Maubeuge bénéficiant du soutien des collectivités locales, Feignies retournerait dans l’anonymat.

“Limiter la casse” contre Montpellier en 16e

Le stade Leo-Lagrange à Maubeuge accueillera le 16e de finale.

Mais avant d’envisager cet avenir incertain, Feignies doit affronter Montpellier dans un 16e de finale attendu (NDLR : initialement prévu ce samedi 20 janvier, le match a été reporté mercredi 24 janvier à 20h30 en raison des chutes de neige), qui se jouera à … Maubeuge, au stade Leo-Lagrange, ce qui ne manquera de faire grincer les dents de certains.

Pour cette rencontre, le staff espère “limiter la casse et faire durer le match”. En parallèle, Jean Antunes et ses hommes vont batailler le reste de la saison pour obtenir leur maintien en National 2, en évitant si possible le “trou d’air” que les équipes amateurs connaissent souvent après la campagne de coupe de France. Le staff y est préparé et fera face, avec humilité, comme aime à le rappeler son coach.

Jean Antunes, du tac au tac

Pur nordiste, Jean Antunes a passé l’entièreté de sa vie non loin de Roubaix, sa ville natale. Une carrière de footballeur professionnel, durant laquelle il a connu l’épopée de Wasquehal de CFA jusqu’en Ligue 2 à la fin des années 1990 et au début des années 2000 (le club du Nord a évolué en D2 et en L2 de 1997 à 2003). Puis, une fois les crampons raccrochés, une carrière d’entraîneur qui décolle à Croix (2012-2019) en CFA2 puis en CFA (N2), et aujourd’hui à Feignies-Aulnoye, qu’il a conduit de N3 en N2 cette saison. L’ancien milieu de terrain s’est prêté au jeu des questions réponses, l’occasion d’en apprendre plus sur lui et sa carrière.

Jean Antunes, le joueur

Photo Philippe Le Brech.

Meilleur souvenir sportif ?
J’en ai deux. Le premier, c’est quand on monte de en Ligue 2 avec Wasquehal (NDLR : à l’issue de la saison 1996-1997). On partait avec l’objectif de se stabiliser en National. On s’est pris au jeu et on a réussi à monter en Ligue 2, donc c’est vraiment un bon souvenir. Le deuxième, c’est l’année suivante, lors de notre première saison en Ligue 2. Tout le monde nous voyait dans la charrette, on se sauve au dernier match à Mulhouse. Vu la ville qu’on était, le club qu’on était, se maintenir en Ligue 2, c’était inespéré !

Pire souvenir sportif ?
A l’inverse, notre descente au bout de 6 ans de Ligue 2, en National. On l’a senti sur la deuxième partie de saison. A partir de mars, les choses allaient de travers. On avait perdu cette âme qu’on avait et à partir de là ça a été la dégringolade.

Combien de cartons rouges ?
J’ai dû en prendre 3 ou 4. J’étais assez rugueux donc c’est pas énorme.

Plus beau but ?
Mon premier but en Ligue 2, que je marque à Nice ! Une belle frappe de 25 mètres, pas un but de raccroc. En plus, on gagne 2-0, donc tu ne l’oublies jamais !

Pire match ?
Une fois, à Gueugnon, on ne fait pas du tout un bon match. Je prends deux cartons jaunes en faisant deux fautes successives et je suis expulsé au bout de 40 minutes. On perd le match 1-0, ce n’était pas mon match.

Photo Philippe Le Brech.

Pourquoi avoir choisi d’être milieu de terrain ?
Dès que j’ai commencé le foot, j’aimais bien toucher le ballon, courir, solliciter les partenaires… Donc ce rôle m’allait bien, avec un penchant pour la défense quand même, souvent dans un milieu à deux. J’aimais bien aussi récupérer et redonner le ballon donc ce rôle me convenait et me plaisait en tant que joueur, puis en tant qu’entraîneur. D’ailleurs, j’ai un peu plus l’œil sur mes milieux défensifs, encore aujourd’hui, même si on doit toujours avoir l’œil sur tout !

Un geste technique préféré ?
Aucun en particulier, j’étais un joueur rigoureux : récupération, passe propre. Pour moi, la première passe devait toujours être qualitative et ne pas perdre le ballon.

Qualités et défauts sur un terrain, selon vous ?
Pour les qualités, c’est l’esprit collectif, même si on sait qu’aujourd’hui on tend plus vers l’individualisme. Et pour les défauts, ce qui m’énervait sur le terrain, c’était de voir un coéquipier plus talentueux, mais moins combatif.

Que vous a-t-il manqué pour évoluer en Ligue 1, individuellement ?
La vitesse.

Le ou les joueurs les plus forts avec lesquels vous avez joué ?
Stéphane Capiaux, Christophe Delmotte.

Le joueur avec lequel vous pouviez jouer les yeux fermés ?
Reynald Debaets.

Le ou les joueurs perdus de vue que vous aimeriez revoir ?
Gilles Leclerc, Robert Malm.

Le match ou tout a roulé pour votre équipe ?
Le match de la montée de National en Ligue 2 avec Wasquehal contre Dijon.

Le club où vous avez failli signer ?
Je n’ai pas eu de contact ni de demande avec des clubs de niveau supérieur. A mon époque, on ne bougeait pas trop.

Un adversaire impressionnant ?
Lorient, une année où ils montés de D2 en D1, avec le coach Christian Gourcuff. Et comme joueurs, je dirais Pagis, Meriem, Adebayor, Darcheville… j’en ai croisés des très bons.

Un milieu de terrain comme modèle ?
A l’époque, Robson, Falcao, Zico.

Le club de Wasquehal en deux mots ?
Famille et humilité.

Le club où vous auriez rêvé de jouer, dans vos rêves les plus fous ?
Jeune, j’ai été bercé par Saint-Etienne, donc forcément c’est un club mythique et ça le restera. J’ai d’ailleurs eu le bonheur d’aller jouer dans le Chaudron et de gagner là-bas avec Wasquehal ! Je ne peux pas vous dire les frissons que j’avais !

Des rituels, des tocs, des manies (avant un match ou dans la vie de tous les jours) ?
Je sais que des coéquipiers avaient des petits rituels, des superstitions. Mais pour moi, hormis vérifier deux, trois fois que je n’avais rien oublié en préparant mon sac, rien de spécial.

Terminez la phrase en un mot ou deux : vous étiez un milieu de terrain plutôt …
Travailleur et rigoureux.

Votre plus grande fierté dans votre carrière ?
Je dirais d’être monté en Ligue 2 et d’avoir été professionnel. Je suis fier de mes 200 matchs en pro. Lorsque j’ai commencé le foot, en aucun cas je ne pensais à ça. Quand j’arrive à Wasquehal, on joue en CFA à l’époque. A chaque montée, j’ai su élever mon niveau de jeu, ce n’est pas évident. Donc oui, fier d’avoir joué en Ligue 2 et d’avoir participé à cette belle aventure que l’on a eue.

Si vous n’aviez pas été footballeur, qu’auriez-vous aimé faire ?
Ça s’est vite tourné vers le foot quand même. Après comme aujourd’hui je suis éducateur sportif, je pense que ça se serait tourné vers un métier où l’on transmet dans le sport, tout ce que l’on a pu vivre.

Le milieu du foot à l’époque, en deux mots ?
Passion et respect. A l’époque, on défendait ses couleurs et on pouvait aller boire un verre tous ensemble. Aujourd’hui, ça n’est plus possible. Je trouve que le respect se perd.

Jean Antunes, l’entraîneur

Le staff de l’Entente. Photo Philippe Le Brech.

Meilleur souvenir sportif ?
Quand je suis entraîneur de Croix, on monte en CFA (National 2), lors de la saison 2013-2014, alors que nous n’étions pas les favoris. C’était plutôt Sedan ou Poissy qui étaient pressentis, avec des moyens autres que les nôtres. On avait réussi à gagner le championnat, c’est un beau souvenir. Aussi, réaliser deux fois de suite la montée sportivement avec Feignies. En 2022, on ne peut pas monter à cause d’une sanction administrative. On réédite la même saison, l’année dernière, et ce n’est vraiment pas évident. Je trouve ça extraordinaire.

Pire souvenir sportif ?
En 2015, le 1/8e de finale contre Concarneau que l’on perd à la séance de tirs au but chez nous. On joue dix fois ce match, on va le gagner neuf fois. C’est une grosse déception parce que je pense qu’on avait vraiment fait le match qu’il fallait. Il manquait ce but, on a pas su le mettre et aller en quarts de finale, et ce n’est pas rien.

Le match référence, celui où tout s’est bien passé ?
Étant donné que c’est le plus frais, le match de la qualification pour les 16es de finale de la coupe de France contre QRM (1-0, le 6 janvier dernier). On sent qu’on est bien dans le match et tout le plan de jeu qu’on avait mis en place a été respecté à la ligne. Je dirais que toutes les planètes étaient alignées, notamment quand on voit la réussite que l’on a sur notre but.

Jean Antunes aux côtés du président Laurent Menissez.

Un modèle de coach ?
Il y a des coachs qui sont sympas dans leurs principes de jeu et dans leur conception du management et de coaching. Il y a Guardiola, Ancelotti, c’est la classe. Jürgen Klopp à Liverpool, c’est vraiment pas mal du tout. Il y en a quelques-uns que j’aime bien.

Une devise ?
L’humilité est l’antichambre de la perfection.Dans la vie comme dans le foot, quoi qu’il arrive, il faut rester humble.

Meilleur joueur entraîné ?
J’ai eu des bons joueurs, mais c’est plus un collectif qui fonctionne très bien, plutôt que des individualités dans les équipes que j’entraîne, à Croix, comme ici à Feignies. C’est plus le collectif qui prime, que des individualités qui en ressortent. J’ai eu un super défenseur à Croix, Yero Dia (2011-2017). Avec lui, on savait qu’on pouvait voyager tranquillement un peu partout en France.

Un style de jeu ?
On essaye de garder les mêmes principes. Une équipe qui fait du foot, qui sort les ballons, qui essaye de jouer, qui prône la possession et en parallèle le jeu. On se calque par rapport à l’adversaire aussi, parfois. On aimerait bien, mais on n’est pas Manchester City (rires) !

Le club de Feignies en deux mots ?
Ambitieux et riche humainement.

Terminez en deux mots, vous êtes un entraîneur plutôt…
A l’écoute et rigoureux.

Texte : Emile Pawlik / Twitter : @EmilePawlik

Photos : Philippe Le Brech, EFAFC et DR.

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Place forte du football professionnel jusqu’au milieu des années 90, l’Olympique d’Alès en Cévennes a connu une longue traversée du désert, au point de chuter jusqu’en DHR. Aujourd’hui, le club, à l’image de la ville, renaît de ses cendres en N2. Redevenu ambitieux, il jouit aussi d’une ferveur et d’un soutien populaire rare à ce niveau.

Vous avez souri en lisant le titre ? Vous pensez que la comparaison avec les Verts est exagérée ? Peut-être… Pourtant, après avoir passé une journée à Alès, beaucoup échangé avec les supporters et assisté au 32e de finale de la coupe de France face au Paris FC (1-2), on persiste et signe : cette ville, ce club, ce stade… tout ici transpire le football ! Le ballon rond, c’est un peu le poumon de cette cité minière de 40 000 habitants, enclavée, isolée, sans charme particulier, mais pas sans chaleur.
« On a le sang bleu et blanc » clame Laurent Ivaldi, abonné, venu spécialement d’Aix-en-Provence (lire son interview plus bas). Il n’est pas le seul à venir de loin. D’autres sont de Clermont-Ferrand, Paris, etc.

Les Alésiens veulent une équipe à leur image

Devant le bar des platanes, on affiche ses couleurs !

A Alès, l’histoire est partout. Elle est à la fois houillère et bien sûr sportive : car le foot a toujours fait partie de la vie de ses habitants, des durs au mal, qui savent mieux que quiconque ce que aller à la mine ou aller au charbon veut dire. Qui ont la notion du travail. L’Alésien est fidèle, chauvin, ouvert, chaud et fier de sa terre. Toujours prêt à s’enflammer. Prêt à soulever des montagnes. Et il veut une équipe à son image. Mais là, c’est un autre sujet…

Il est 10 heures du matin, ce samedi ensoleillé mais froid et venteux. Devant le bar des Platanes, à 150 mètres du stade Pierre-Pibarot, l’immense drapeau planté bien en évidence au bord de la route menace de s’envoler. Dessus, on peut lire l’inscription suivante : « Un seul Olympique dans le Gard, l’Olympique d’Alès en Cévennes ». Le message est clair : ici, on déteste Nîmes. On déteste le rouge !

Pourtant, le club voisin est souvent dans les conversations. D’ailleurs, quelques heures plus tard, dans les tribunes du stade municipal de la Prairie (l’ancien nom du stade Pibarot, jusqu’en 1980), en plein match face au PFC, on entend les spectateurs s’enquérir régulièrement du résultat de l’ennemi juré, en déplacement à Orléans pour son 32e de finale. On n’ira pas jusqu’à dire que l’élimination des « Crocos » a atténué la déception après celle des Alésiens, passés un peu à côté de leur match, mais puisqu’il faut bien sourire un peu…

En position de relégable

Il est 10 heures, et les premiers supporters sont là. A midi, ils seront une cinquantaine et à 14 heures, ils se rendront tous ensemble, tel un cortège, au stade, où le coup d’envoi est fixé à 15h30.
A l’intérieur du bar, un établissement qui fut partenaire du club, Simon Balme, le patron, nous accueille chaleureusement et enchaîne les cafés. Ici, la déco est « bleu et blanche ». Les affiches et les écharpes sont partout. D’ailleurs, tout le monde est habillé aux couleurs du club. Vous cherchiez le fief de l’OAC ? Vous y êtes. Les conversations tournent autour du club. L’inquiétude se fait ressentir. Parce que l’équipe de Hakim Malek n’est pas bien classée en National 2 (11e sur 14 et en position de relégable). Et ce joli parcours en coupe de France ne saurait atténuer la déception des résultats en championnat.

Le cadeau de Ribéry au gardien du stade

A deux heures du coup d’envoi, il y a déjà beaucoup de monde au stade Pibarot pour assister au 32e de finale de la coupe de France.

Attablé au fond du café, Victor Chighine, un « ancien » dirigeant des années 70, multiplie les anecdotes. Il parle de Thierry Gudimard, un attaquant des années 80, et de Franck Ribéry, « qui est revenu à Alès après son départ pour offrir une voiture à Pépone, le gardien du stade, et ça, peu de gens le savent… » Il aussi parle de Jean Sadoul, l’ancien président de la Ligue, et d’une histoire de repêchage de l’OAC, dont le pure alésien, décédé en 1991, n’aurait, selon la légende, pas été étranger…

Soudain, un mouvement de foule. « Les gars, c’est le bus du Paris FC ! ». En quelques secondes, le bar se vide. Tout le monde se précipite dans la rue pour huer le cortège parisien, dans une ambiance très bon enfant. On est quand même loin du folklore du sud ! Quelques instants plus tard, c’est Daysam Ben Nasr, l’un des joueurs du groupe N2, qui passe à pied devant le bar. Tout le monde le salue, certains posent en photos avec lui. Il est applaudi comme une star.

Une longue traversée du désert

La tribune bien pleine du stade Pibarot face au Paris FC, le 6 janvier dernier.

A Alès, la venue d’une équipe de Ligue 2 ravive le souvenir des belles années – le club a longtemps été l’un des bastions de la Division 2 -, mais personne n’est dupe : c’est juste une simple affiche de gala qui remet le club sur le devant de la scène et permet de faire parler de lui. Parce qu’au prochain match de championnat, contre Grasse, samedi, ils ne seront pas 3500 dans la tribune comme face au Paris FC, mais sans doute 500.

Les supporters, quant à eux, seront présents. Depuis quelques années, le mouvement socios se fait de plus en plus ressentir, surtout depuis la création du nouveau « Kop Cévenol Héritage », en hommage à l’ancien « kop cévenol » qui prenait place dans la vieille tribune « bois », comme ils disent.

Le stade municipal de la Prairie, à Alès, dans les années 50.

Juste avant la trêve, au 8e tour de la coupe, ils étaient une cinquantaine dans les tribunes du stade Turcan, à Martigues, pour la qualification nette et sans bavure chez le 3e de National (1-2). Et le mercredi soir, sur le site  » https://www.allez-ales.fr/accueil « , ils sont parfois des centaines à écouter ou participer aux débats de Mickaël Bertrand, l’animateur. Ces débats, on peut les suivre sur Facebook, où il existe aussi une autre page appelée « Union pour le renouveau de l’OAC ».

Pour un club de National 2, qui sort d’une très longue traversée du désert – le club a passé dix saisons au niveau régional après la liquidation judiciaire et la relégation de National en DH en 2003, l’année où un certain Franck Ribéry arborait le maillot de l’OAC -, et neuf autres en N3 (CFA2) -, cette ferveur est assez exceptionnelle.

Face au Paris FC, dans l’unique tribune de 3700 places assises (la deuxième tribune a été démolie en 2007), il n’a pas manqué grand chose pour voir le public s’enflammer et se soulever. C’est simple, à chacune des actions offensives alésiennes, c’était comme si les 3500 spectateurs récupéraient le ballon, débordaient et centraient ! En fait, il a un peu manqué cet esprit « coupe », celui qui permet aux « petits » de renverser des montagnes.

Basile : « Il faut un complexe sportif dédié »

La tribune du stade Pibarot, le 6 janvier dernier, bien remplie face au Paris FC en coupe.

Aperçu dans les travées de Pibarot, André Basile, qui habite à 2 kilomètres du stade, ancien joueur de l’OAC et aussi ancien entraîneur, aujourd’hui à la tête de Bagnols/Pont (Bagnols-sur-Cèze/Pont-Saint-Esprit) en Régional 1, n’est pas surpris par cet engouement : « L’OAC, c’est mon club de coeur, pose-t-il d’emblée. J’y ai vécu 4 ans exceptionnel comme joueur à la fin de ma carrière (il a notamment évolué en réserve à l’OM et en pro à Mulhouse, Perpignan et Istres en D2), on a joué 2 ans en CFA et on est monté en National (en 2000), j’étais le capitaine, il y avait un public exceptionnel, de l’engouement, et j’ai eu la chance de côtoyer deux coachs fabuleux, Marc Bourrier et Jacky Novi, qui m’ont beaucoup apporté pour la suite de mon parcours. Alès, c’est là que j’ai commencé ma carrière d’entraîneur, d’abord avec les U18 et le centre de formation, puis avec l’équipe seniors en DH. Le club a un passé important en D2, et on sent que, depuis quelques années, il se structure. Il est aussi en train de reconquérir pas mal de partenaires. Je pense que le National 2, c’est le minimum pour l’OAC. Il est à sa place pour l’instant. Pour franchir un palier, il lui faut un complexe sportif dédié, avec des surfaces synthétiques et « pelousées », et une structure d’accueil pour les jeunes afin qu’ils progressent et fassent un jour partie du groupe équipe première. »

A l’issue de cette élimination en coupe, et avant un déplacement à Toulouse en championnat (qui s’est soldé par un match nul 2-2), Laurent Ivaldi et « l’historique » Jean-Marie Pasqualetti, directeur sportif de l’Olympique, se sont confiés pour 13heuresfoot.

Laurent Ivaldi : « Cette ville pue le football! »

Originaire de Marseille, Laurent Ivaldi (53 ans), ce commercial en spiritueux, habite Aix-en-Provence et vient à chaque match de championnat à Pibarot. « Ma maman est Alésienne, raconte celui qui est aussi l’un des quatre fondateurs du nouveau groupe de supporters, le « Kop cévenol héritage »; j’ai passé toutes mes grandes vacances à Alès et mon amour pour l’OAC date de mes premiers matchs au stade de la Prairie, quand j’avais 10 ans ! Mon père m’emmenait avec lui. Le premier stade où j’ai mis les pied, c’est à Alès ! Et comme je le dis souvent, depuis ce jour là, j’ai pris perpète ! Et 40 ans après, malgré tout ce qui s’est passé à l’AOC, je suis toujours là ! »

Laurent Ivaldi (à droite), ici aux côté d’Erwan, leader du kop cévenol héritage.

Laurent, on voit des supporters, comme vous, venir de loin : c’est rare pour un club de N2, non ?
Oui, on a des supporters qui viennent d’un peu partout, c’est là que l’on voit qu’on a une aura assez particulière pour un club de ce niveau. On a des gens de Paris, Clermont, Bollène, Montpellier, Avignon, Aix, on en a aussi qui viennent de l’Ardèche voisine. C’est exceptionnel de voir un club de N2 ratisser aussi large. On voit bien que l’on est un club atypique.

Ce stade plein, face au PFC, ça vous fait quoi ?
Honnêtement, ça me fait quelque chose, parce que ça faisait quelques années qu’on ne l’avait pas vu aussi bien rempli. Il y avait eu Monaco en Coupe (en 2011), l’AC Ajaccio aussi, mais je ne me fais pas de faux espoirs non plus : je sais très bien que les 3/4 des gens qui sont venus face au Paris FC ne seront pas là samedi pour la venue de Grasse en championnat. C’est ça qui me peine. Mais il faut voir le bon côté des choses : dès qu’il y a un intérêt, dès que le club refait parler de lui, on sent que le potentiel est là, que les gens n’attendent que ça, mais on est confronté au quotidien.

Le stade Pibarot, en 1987, pour la demi-finale aller de la coupe de France face à Bordeaux, avec 17 000 spectateurs.

3500 spectateurs face à une Ligue 2, c’est significatif quand même…
Oui et ça me conforte dans mon idée : cette ville d’Alès, elle pue le football ! Il faut replacer les choses dans leur contexte : il n’y a que 40 000 habitants, ce n’est pas une mégapole, et dès qu’il y a un peu de résultats, un peu d’intérêt, on fait 3000 personnes au stade, c’est magique. j’ai connu le fameux match « historique » du club en 1987 et cette demi-finale de coupe France contre Bordeaux. On avait été éliminés sans perdre (2-2 à Alès à l’aller, 0-0 au retour). Il y avait 17 000 spectateurs ! La moitié de la ville était au match ! Il paraît qu’il y a eu 40 000 demandes de places pour ce match ! Il y avait des chaises d’écoliers sur la piste d’athlétisme et des gens partout, dans les arbres, sur les panneaux publicitaires ! C’est vraiment un club qui fait partie des « historiques ». C’est le plus titré du Gard, avec deux titres de champion de D2, il est centenaire, et c’est le deuxième club français le plus ancien à avoir accédé au professionnalisme en 1923, derrière Le Havre. Pour une petite ville comme Alès, c’est exceptionnel. Et sans leur manquer de respect, ce n’est pas Chambly ni Dunkerque, hein !

Devant le bar des platanes, fief de l’OAC.

Alès, un petit Saint-Etienne : la comparaison est-elle exagérée ?
Là, ça me fait plaisir d’entendre ça, parce que Saint-Etienne, c’est mon club français préféré. C’est le seul qui a réussi à fédérer toute la France derrière lui. Le grand Saint-Etienne, souvenez-vous, c’était l’équipe de France. Le PSG n’aura jamais toute la France derrière lui. L’OM non plus. Il y a un peu Lens. Moi, je me retrouve dans ça, c’est ce terreau minier, ce terreau ouvrier; à Alès, on aime ses joueurs, on aime son club où l’amour du maillot veut vraiment dire quelque chose. On ne veut pas de « starlettes », on s’attache à ces valeurs-là, on veut juste des « types » qui mouillent le maillot et collent à l’image de la ville. De nos jours, je sais que c’est de plus en plus difficile mais nous, supporters Alésiens, on s’attache à ces valeurs-là. Et c’est pour ça qu’on est déçu de la prestation de l’attitude de nos joueurs contre Paris FC en coupe. Je m’attendais à voir 11 tigres et j’ai vu 11 chatons. J’ai été très déçu par rapport à ça. On l’a évoqué dans l’émission de Mickaël mercredi dernier ( https://www.allez-ales.fr/accueil ) et on l’évoquera lors de la réunion avec les dirigeants (ce mercredi matin). Pour moi, l’état d’esprit prévaut, surtout en coupe de France. Là, j’ai eu l’impression de voir un match amical de début de saison. je suis frustré par rapport à ça, surtout qu’il y avait du monde et la possibilité de fédérer des gens. Il fallait se servir de ce match, or on est passé à côté sur ce plan là. Si on avait fait le match que l’on a fait à Martigues au tour précédent, le résultat aurait été tout autre. Mais on est une équipe à réaction : à domicile, on n’a jamais ouvert le score, vous imaginez ! On est toujours en train de courir après le score. C’est la grosse problématique de cette équipe, qui a des qualités et qui, dans le jeu, a le niveau d’une équipe de National, on l’a bien vu à Martigues où on leur a donné une leçon de football. Je m’attendais à voir le même genre de prestation.

Selon vous, elle est où, la place d’Alès aujourd’hui, sur l’échiquier du football ?
En National. Au-dessus, il ne faut pas rêver : pour aller en Ligue 2, soit tu as un très beau centre de formation et tu peux t’appuyer sur des jeunes, mais on n’a pas ça à Alès. Soit tu peux t’appuyer sur des moyens financiers mais là encore, ce n’est pas notre cas. Alors quand j’entends notre président, Didier Bilange (fondateur et PDG de Jubil intérim), parler de Ligue 2 …. Je connais le bassin économique alésien, je suis dubitatif, et quand je vois la situation actuelle en National 2, je signe dès à présent pour que l’on se maintienne en fin de saison parce que, pour moi, le projet cap 2024, il est en train de prendre du plomb dans l’aile.

Le joueur de l’OAC, Daysam Ben Nasr, salue les supporters en allant au stade.

Pourtant, le club a le soutien des collectivités et des partenaires…
Oui, la mairie est derrière le club, l’entente est bonne avec le maire Max Roustan et le premier adjoint, Christophe Rivenq, qui est venu passer un quart d’heure dans le kop; ils prennent conscience du poids du club dans la ville et dans les Cévennes : après le président Didier Bilange, la ville est le deuxième plus gros « partenaire « , ils ont refait la pelouse l’an passé, mais on parle d’une ville de 40 000 habitants, elle fait avec ses moyens. Il y a beaucoup à faire. On part d’une feuille blanche. On est limité. Sur le plan sportif, on vient de perdre notre buteur Abdoulaye Diaby parce que l’on ne peut pas s’aligner sur Thonon Evian qui a trois fois notre budget et qui est dans notre poule en N2. L’an passé, on n’a pas pu retenir non plus notre meilleur joueur, Maël Zogba, parti en National, à Epinal. On a des terrains d’entraînement dans un état catastrophique. Tout ça me fait dire que le N2, c’est déjà pas trop mal, et si le club monte en National, ce sera très bien.

Devant le bar des platanes.

Elle est comment, cette ville d’Alès ?
C’est une ville qui a vécu des temps difficiles à la fin des années 70 quand les mines ont fermé, avec un taux de chômage qui faisait partie des plus élevés de France, mais petit à petit, elle a réussi à relever la tête; il y a eu une petite impulsion au niveau de son économie, pas mal de nouvelles entreprises sont venues s’implanter. La ville est à la relance. C’est en train de payer : Alès est la ville d’Occitanie qui a le taux d’augmentation démographique le plus élevé après Montpellier : on gagne des habitants là où Nîmes en perd par exemple. On serait, d’après le dernier recensement, 44 000 habitants ! La ville a retrouvé un second souffle et on espère que ça va profiter au club. De plus, la mairie peut se servir du club en termes d’image : à la fin des années 80, quand l’équipe tutoyait les sommets de la Division 2, partout en ville on voyait une campagne d’affichage sur l’OAC, qui était alors le fer de lance des Cévennes, avec des panneaux partout. Et c’était vraiment ça, l’OAC : « le club des Cévennes ». C’était vraiment quelque chose. Toutes les entreprises du bassin alésien étaient partenaires du club et le soutenaient. C’est sur ça qu’il faut s’appuyer à nouveau.

A vous écoutez, cela nous rappelle un peu Gueugnon…
C’est fou, on voit les mêmes choses ! Je connais bien ce club, qui n’arrive pas à redécoller, qui est historique, sauf que Gueugnon s’est toujours appuyé sur les forges à côté, qui étaient le partenaire principal. Mais c’est encore plus flagrant à Gueugnon qu’à Alès, car là-bas, il y a le stade et rien d’autre ! Gueugnon, c’est 8000 habitants ! Quand tu es footballeur là-bas, tu n’as que ça à penser. J’ai beaucoup d’affection pour ce club. On est sur les mêmes valeurs. Des clubs comme ça, qui ont connu de belles heures, ont vu le football business arriver, et ils sont tombés. Ils n’arrivent pas à remonter et sont englués en N3. A Gueugnon aussi, ça pue le foot. C’est comme à Louhans, Montceau et même Thonon, dans les années 80… Ce sont des clubs que l’on voyait à La Prairie, il y avait aussi Rodez, Istres, Martigues… Oui, je dis « La prairie », parce que, pour moi, le stade Pibarot, c’est d’abord le stade de La Prairie, comme on l’appelait avant.

Le Kop cévenol héritage, à Martigues, en décembre dernier, en coupe de France.

Ce mercredi, les dirigeants de l’OAC reçoivent les supporters…
Je trouve que les supporters ne sont pas assez accompagnés. On est en N2, vous avez vu la ferveur ? J’ai déjà évoqué ce sujet en assemblée générale. J’en ai parlé au coach Hakim Malek. Je lui ai dit « Coach, chaque samedi, est-ce que vous voyez des équivalents de kop comme le nôtre, à part Cannes et Toulon peut-être ? » « Franchement, même Cannes et Toulon, ça n’est pas comme nous » a-t-il répondu. Il a vu que l’on était 50 à Martigues en coupe, 70 à Toulon, en N2, et on n’a pas les résultats pour nous. Si demain on est en National, on joue devant 2000 personnes à domicile et on a 100 personnes dans le kop, c’est ça qui est rageant. C’est frustrant parce que je sais le potentiel de cette ville, on le voit avec ce match de coupe face au Paris FC, ça frémit. Il y a toujours cette petite étincelle qu’ont les clubs historiques. Il suffit de pas grand chose. On va voir avec le club comment on peut faire pour avancer ensemble.

On n a pas parlé du Nîmes Olympique…
(rires) C’est tabou ! Alès-Nîmes, c’est la vraie rivalité. Y’a des mecs qui se sont inventés un derby avec Nîmes et Montpellier, parce qu’Alès a disparu du paysage, mais quand tu as connu les Alès-Nîmes des années 70/80, c’était autre chose que les Nîmes – Montpellier, vraiment, et en plus, on n’en a pas perdu beaucoup !

Alès serait-elle encore plus une ville de foot que Nîmes ?
Le foot est important aussi là-bas mais Nîmes, c’est quand même trois fois Alès en termes de population. Si Nîmes descend en N2, ce qui ne serait pas pour me déplaire, vous verrez qu’il y a aura plus de monde à Alès qu’à Nîmes… si on se maintient. Nîmes est une ville de foot, c’est indéniable, c’est un club qui a compté et qui a un palmarès aussi, mais je le répète, le club doyen du Gard, c’est Alès, le club le plus titré du Gard, c’est Alès. Les Nîmois n’aiment pas trop qu’on leur rappelle ça, mais c’est la vérité. C’est un peu comme Lyon et Saint-Etienne, la préfecture contre la sous-préfecture, les riches contre les pauvres… Dans les années 80, on disait que Nîmes était la banlieue d’Alès au niveau foot !

En 1970, à Alès, 20 000 spectateurs pour un match Nîmes-OM en coupe de France.

On voit bien que vous êtes obnubilé par Nîmes : pendant le match face au PFC, les gens suivaient en même temps leur 32e de finale à Orléans…
Bien sûr ! Il y a une rivalité qui ne s’éteindra jamais. L’été dernier, même en amical, on était 2000 au stade, on sentait qu’il n’en fallait pas beaucoup pour que l’étincelle se déclenche, mais ça reste du foot. C’est clair que la période que Nîmes vit actuellement, on ne vas pas pleurer, on n’a pas oublié que nous, on s’est retrouvé en Division d’Honneur et même une saison en DHR (en 2006-2007), alors peut-être que les mouches sont en train de changer d’ânes. Ils ont quand même d’autres moyens. Il y a beaucoup plus d’entreprises. Même si nous, petit à petit, ça revit, mais on reste enclavé, avec une population qui n’a pas un pouvoir d’achat transcendant. On fait avec nos petits moyens. Les Cévenols sont des gens qui ont une parole, qui fonctionnent un peu à l’ancienne : je suis d’origine corse, je me retrouve beaucoup dans les Cévenols, dont on a coutume de dire que ce sont un peu les Corses de l’intérieur. Il y a vraiment une identité, je le vois au niveau des joueurs comme Théo Peyrard, le vice-capitaine, ou Yann Djabou, le capitaine : ce sont nos symboles, des joueurs de club qui se dépouillent sur un terrain, des types qui ne vous trahiront jamais. On cherche à s’identifier à des joueurs comme ça, qui colle à la ville, au terroir, à la mentalité cévenole.

Le stade Pibarot a accueilli l’ancien capitaine du Brésil et du PSG, Rai, lors de la venue du Paris FC, dont il est l’un des actionnaires.

Pourquoi avoir accolé le mot « héritage » au « kop cévenol » ?
« Kop Cévenol héritage », c’est une façon de rendre hommage à l’ancien « kop cévenol », un des groupes de supporters mythiques, qui était avant dans la tribune Bois, celle où je suis rentré la première fois quand j’étais gamin. On était proche du terrain, ça sentait le cigarillo et la saucisse. Avec le mot « héritage », c’est une forme de respect et de reconnaissance envers eux. C’est un peu comme un retour vers le futur !

On a recréé ce club il y a 5 ans quand on était dans les bas-fonds, dans une brasserie d’Alès, avec Mickaël, qui s’occupe du site allez-ales.fr, Martial et Jean-Christophe, qui tient la page Facebook « Union pour le renouveau de l’OAC ». On a décidé de faire quelque chose et, deux ans après, le club a présenté son projet Cap 2024. Récemment, on a reçu Toulon en championnat, j’étais sur la pelouse, et quand j’ai vu le kop, j’ai eu les larmes aux yeux. Je me suis revu dans les années 70/80. J’étais comme un gamin. Ce soir-là, je me suis dit : « On est en train d’y arriver ! ». C’est du boulot, du temps, de l’argent et de la passion. Mais on a le sang bleu et blanc.

Jean-Marie Pasqualetti : « La routine ne doit pas s’installer »

Jean-Marie Pasqualetti, directeur sportif de l’OAC.

Il a pris sa première licence à l’Olympique d’Alès en Cévennes en 1990, quand il avait 16 ans, 4 ans après avoir suivi son papa, José, venu terminer sa carrière de joueur chez les Bleu et blanc (de 1986 à 1990), avant d’y entamer celle de coach. Depuis, Jean-Marie Pasqualetti n’a plus bougé, sauf une fois… Mais pas très loin : le Bastiais – « mais je me sens surtout Alésien » – a signé au Nîmes Olympique, où il a passé trois saisons en National (de 2003 à 2006). Sa seule infidélité. Pour le reste, l’ancien défenseur, aujourd’hui âgé de 49 ans, a tout vu, tout connu et tout vécu avec son club de coeur : la Division 2, la descente aux enfers (jusqu’en DHR) et aussi la (lente) remontée dans les championnats nationaux. C’est aussi à Alès que, après sa carrière de joueur, il a endossé le rôle d’entraîneur en DH et en CFA2, entre 2010 et 2016, avant d’endosser le poste de directeur sportif. Rare dans les médias, Jean-Marie Pasqualetti, qui préfère l’ombre à la lumière, évoque le projet « cap 2024 » et son rêve de voir un jour l’OAC retrouver le monde professionnel.

Jean-Marie, on a bien vu, avec ce match face au Paris FC, qu’il y avait une grosse attente à Alès…
Oui, et les Alésiens sont capables de revenir vite au stade, à condition qu’ils se reconnaissent dans l’équipe. Les affiches de coupe de France ont toujours une saveur particulière, et le public répond toujours présent : en 2011, alors qu’on était en DH (Régional 1), on avait éliminé Nîmes en National, la tribune était pleine aussi, contre Monaco aussi la même année, j’étais sur le banc en tant que coach. En championnat, quand on est monté de N3 en N2 en 2022, on a parfois eu 2000 personnes au stade. Il y a une histoire ici. Les Alésiens aiment le football. Ils ont en mémoire l’OAC des années 80. Cette saison, dans notre poule, en N2, il y a aussi Toulon, qui pour moi fait partie de ces clubs historiques, Thonon aussi, même si leur histoire est plus récente, et Cannes bien sûr. Et il y a eu Sète l’an passé. Ce sont des clubs, à l’instar d’Alès, qui ont compté dans le foot français.

Ce poids de l’histoire peut-il être un frein aux ambitions de l’OAC ? Ne vit-on pas trop dans le passé ici ?
Un frein, je ne pense pas. Depuis 2003, on a un peu disparu de la vie des Alésiens après cette descente de National en DH, si bien que le club n’a pas eu trop de références durant ces 20 ans, à part peut-être au travers de quelques matchs de coupe, ou lors des accessions de DH en CFA2 (en 2013) puis de National 3 en National 2 (en 2002), où l’engouement était bien présent. Ce n’est pas un frein : je vois ça comme une difficulté, un défi, celui de remontrer aux Alésiens qu’il y a un bon club, qui existe depuis longtemps, et qu’il y a un train qui a redémarré, avec de nouvelles ambitions.

Hakim Malek, le coach de l’équipe de N2.

Justement, le président Didier Bilange avait lancé le projet « Cap 2024″… or 2024, on y est : et sans préjuger de ce qui va se passer cette saison, sera-ce un échec si l’OAC n’est pas en National ?
Non, parce que le projet Cap 2024 a été posé sur la période de la Covid. En fait, avant ça, on était un club actif mais on n’affichait pas encore des ambitions qui permettent d’avoir des échéances de progression et de structuration, ni qui permettent aux supporters alésiens de voir quelles étaient nos perspectives. A partir du moment où le projet Cap 2024 a été exposé et validé, la démarche a été de l’expliquer en interne puis aux gens de l’extérieur. D’un coup, le club est redevenu très ambitieux pour les années a venir et la première étape de ces ambitions, c’était que le club, autour de 2024, ait pu commencer à se restructurer à tous les niveaux, administratif, financier, sportif. C’était aussi que le club, autour de 2024, soit un vrai club de National 2 prétendant à la montée avec l’ambition finale d’être en National. C’est pour ça que si on n’accède pas en National cette saison, on restera tout de même sur une idée de progression et de continuité … si on finit mieux classé que la saison passée, c’est à dire si on finit mieux que premier non-relégable. En fait, c’est simple : si on termine moins bien classé, ça sera une descente en N3, voilà. Du coup, on est condamné à faire mieux que la saison passée. Et donc, si on y arrive, on sera dans une forme de continuité, de progression, de structuration, d’avancée.

Ne pas accéder en National ne serait donc pas un échec ?
Il est évident que la montée en National, ça serait un échec si on n’y arrivait pas à notre 3e année de National 2, mais l’essentiel, pour nous, c’est d’avoir une vision à long terme sur le club et de se dire « comment on peut continuer à le structurer ? ». Si on est amené à rester en N2, cela ne remettrait pas en questions nos ambitions. Mais le danger, ce serait de rentrer dans une routine comme on l’a fait en N3 où l’on est resté longtemps (neuf saisons) avant de monter. On s’est rendu compte qu’en étant ambitieux un peu plus tôt, on aurait peut-être déclenché cette accession en N2 plus rapidement. Donc pour nous, idéalement, le National 2, ce serait pour 3 ou 4 ans avant d’enchaîner sur autre chose.

On a l’impression que le club est à un virage…
Dans notre réflexion, on sait que le National est difficile, tant pour y accéder que pour y rester, et avec la réforme de la FFF, le niveau va se resserrer, et il faudra vraiment faire partie des meilleures équipes. Pour y arriver, il faudra des bases solides, tant structurelles que financières, parce que le sportif, on ne le maîtrise jamais. On peut estimer avoir une équipe qui va jouer la montée et puis descendre, et inversement. Le sportif reste la partie aléatoire. Ce que l’on veut, c’est qu’à partir du moment où le sportif nous permettrait de franchir cette étape là, d’aller en National, les à côtés fassent que l’on puisse être en capacité de se stabiliser, à travers un budget, des partenaires, une organisation. Je pense que ce virage dont vous parlez, on l’a déjà pris déjà en sachant que si on passait de N3 en N2, ce qui est arrivé l’an passé, on changerait déjà un peu de monde, en raison de la concurrence, des budgets, de la DNCG, etc. On s’était déjà un peu préparé à ne pas dépendre que du sportif. Le tournant était déjà là, en posant ce projet « cap 2024 », qui a obligé à réfléchir aux échéances à moyens termes, financièrement et au niveau des infrastructures, du budget, etc. Du coup, le maintien ou la non accession ne nous fera pas basculer dans le fossé.

Vous le trouvez comment ce championnat de N2 ?
Je le trouve très intéressant et d’un bon niveau, il y a des matchs d’une grand intensité et beaucoup de très bons joueurs : souvent, ce sont des garçons recalés de centres de formation, qui se retrouvent en N3 ou N2 à 20 ans et qui, quelques années plus tard, avec un peu plus de bouteille, deviennent de très bons joueurs de N2. C’est un bon championnat, relevé. Tout le monde dit que la poule sud est est la plus difficile, je peux l’entendre mais je n’en suis pas convaincu. On rencontre de belles équipes et c’est plaisant. Il y a un fossé entre le N3 et le N2, avec des joueurs quasi professionnels, qui n’ont la tête qu’au football.

Souvent, on entend que dans cette poule sud, les terrains sont en moins bon état, qu’il y a plus de duels, beaucoup de derbys…
La poule sud est est plus serrée athlétiquement, il y a des des paroles, parfois de l’intimidation, mais le niveau est bon. On n’a pas rencontré beaucoup d’équipes qui fermaient le jeu. Après, on a peut-être cet « avantage » de ne pas jouer beaucoup de derbys, donc il y a moins l’emprise régionale, de part notre situation géographique. Dans le sud ouest par exemple, il y a peut-être un plus grand plaisir à produire du jeu. Maintenant, en Rhône-Alpes ou en région parisienne, ça ne doit pas être facile non plus de jouer.
La place d’Alès, selon vous, aujourd’hui, c’est laquelle ?
Ce club peut aller en National. Il y a un public qui répond présent. Après, Didier Bilange, le président, souhaiterait que, suite au projet « cap 2024 », le club puisse redevenir professionnel. Il n’y a pas 36 façons d’y arriver. Il n’y en a que deux : cela passe soit par une accession en L2 d’ici quelques années, mais il y a beaucoup de chemin pour y arriver, ou alors, il y a une autre possibilité d’y arriver, si le National passe pro. Pour l’instant, le seul chemin pour y parvenir, c est la Ligue 2. Mais on est loin d’être un club de Ligue 2. En revanche, avec le National, on n’aurait pas à rougir.

Quid de vos infrastructures ?
Le stade Pibarot, jusqu’à il y a 2 ans, servait à la fois pour les matchs et pour les entraînements aussi. La collectivité a investi sur une nouvelle pelouse la saison dernière ce qui nous a permis d’avoir un bon terrain et de basculer sur un terrain d’entraînement, le terrain du Moulinet, le terrain historique puisque c’était déjà là que je m’y entraînais quand j’étais pro à l’époque de la Division 2. La difficulté, c’est le nombre de terrains pour l’ensemble du club. Il faudrait que l’on arrive à avoir 2, 3 ou 4 terrains supplémentaires avec une utilisation exclusive du club. Deuxième point, qui n’est pas propre à la ville ou au club, c’est la capacité d’entretenir les pelouses, que cela soit l’été avec l’été avec les contraintes d’arrosage, l’hiver quand elles s’abîment vite, etc. On travaille aussi sur l’amélioration de notre outil de travail, qui est un axe de notre projet cap 2024 : mais c’est un des points les plus lents, parce que trouver des terrains, construire, aménager, cela ne se fait pas du jour au lendemain. En résumé, compte tenu de notre ambition sportive, il faudra automatiquement que cela s’accompagne par une meilleure qualité de l’outil de travail.

Souvent, pour réussir, on dit qu’il faut allier le côté populaire, le tissu économique et la volonté politique : Alès a-t-il tout ça ?
On n’a pas un bassin économique très grand si l’on compare avec nos voisins montpelliérains ou même nîmois, après, cela faisait longtemps que le club avait disparu. cela faisait 20 ans qu’il avait quitté le N2. Les entreprises ont un peu oublié le foot, mais la coupe de France et la montée qu’on a vécue il y a un an et demi ont montré que les gens étaient attentifs aux signaux qu’on leur donnait, comme avec ce match face au Paris FC, où il y avait plus de 3000 spectateurs. On existe, on a besoin des entreprises comme partenaires financiers, il y a de l’activité, de la vie. Même si les grosses entreprises d’il y a 40 ou 50 ans ont plus ou moins disparu, d’autres, plus petites, se sont installées à Alès, où il y a un certain renouveau et un certain dynamisme depuis plusieurs années. Et la Ville, au travers de son maire Max Roustan et de son premier adjoint Christophe Rivenq, ont toujours soutenu le club et le soutiennent toujours : ils sont attentifs à cela, et font en sorte que les entreprises du bassin recommencent à aimer le foot et si possible participe au financement du football alésien. Il y a aussi une démarche à faire de notre part : on doit montrer qu’un club de National 2, et a fortiori un club de National, a un impact économique et financier pour les entreprises ou les partenaires, en matière d’hôtellerie, de restauration, de la vie des licenciés, etc. Le foot est une activité économique, même si en N2 aujourd’hui, cela coûte beaucoup plus cher qu’avant, et que cela demande des moyens. Mais cela génère aussi de l’activité.

Quel budget avez-vous cette saison en N2 ?
L’an passé, nous avions 1,5 million d’euros et cette année, nous avons 1,7 million. On savait, dans notre projet cap 2024, qu’en passant de N3 avec 800 000 euros, il faudrait en arriver là. C’était prévu et si on accède en National, le budget est anticipé et ciblé, et potentiellement atteignable compte tenu du bassin économique.

Un dernier mot sur les supporters : c’est rare de voir autant de ferveur en N2…
C’est rare de voir autant de personnes investies à ce niveau, c’est vrai. C’est bien, et ça fait partie des éléments nécessaires dans la vie d’un club, de la capacité à créer une ambiance à Pibarot. C’est bien qu’il y ait de plus en plus de personnes qui aient envie d intégrer le kop des supporters et, à l’image de notre ambition, on a toujours gardé la philosophie d’un club professionnel, même si notre projet date de 3 ou 4 ans. On se doit aussi d’aller dans ce sens-là au niveau des supporters, qui sont de plus en plus nombreux. Maintenant, il faut voir quels liens il peut y avoir entre le club et eux, comment fonctionner avec eux et dans quels domaines, et que veulent-ils exactement. Mercredi (demain), nous les rencontrerons, ce sera le moment d’exposer les attentes des uns et des autres. Je sais par exemple que le Kop cévenol héritage ne fonctionne pas en association : on l’a vu au 8e tour de la coupe de France, quand on s’est déplacé à Martigues, cela engage des responsabilités. Il faut fixer des cadres.

Texte : Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr – Twitter @BOYERANTHONY06

Photos : Olympique d’Alès en Cévennes et DR.

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Depuis près de 30 ans, le photographe, connu comme le loup blanc chez les amateurs et les professionnels, répertorie et classe ses fiches sur les joueurs et les clubs, comme dans un dictionnaire. Ce travail d’orfèvre, il aimerait l’utiliser pour refaire un guide, comme le « DT Foot » dans les années 2000. Portrait d’un homme attachant, passionnant, qui a fait du championnat National son terrain de jeu favori.

Un jour, Philippe Le Brech a sonné à la porte du domicile de Denis Troch, à Saint-Germain-en-Laye. A l’époque, « C’était en 1999 je crois », Philippe remplissait déjà des fiches sur des joueurs et des clubs pour alimenter son « Guide du football ». Surtout, il savait que l’ancien coach adjoint d’Arthur Jorge au PSG (1991-94) et coach principal à Laval (1994-97) et au Havre (1997-89), consultant à la télé, était très féru de statistiques, de chiffres, de données en tout genre. Sans cette rencontre, le dictionnaire du football, le Quidfoot (le nom de la première édition), devenu ensuite le fameux « DT Foot » (DT pour « Denis Troch »), n’aurait pas vu le jour. Les deux hommes ont croisé leurs compétences et allié leur passion pour donner naissance à ce guide, ce dictionnaire, cette encyclopédie, cette bible, n’ayons pas peur des mots, ce livre de chevet indispensable. Une vraie mine d’or ! Au total, il y eut 7 éditions du DT Foot, entre 2000 et 2007. Du jamais vu à l’époque.

« J’ai connu Philippe avant le DT foot, rembobine Denis Troch, reconverti dans la préparation mentale, le coaching et le management, et qui a lancé l’application mobile « Parcours parenthèses » (*). Un jour, il est venu chez moi et il m’a dit « Voilà , je sais que tu es féru de statistiques », et c’est vrai que je faisais beaucoup de statistiques à l’époque, pour Canal, pour TPS, et il m’a présenté sa base de données, son annuaire; ça m’a intéressé et on a collaboré ensemble pour ce qui allait ensuite devenir le « DT foot ». Mais au départ, Philippe avait des données jusqu’en CFA (N2) mais moi, je lui ai dit qu’il fallait aller jusqu’en Division d’Honneur, puisque personne ne le faisait. On est parti sur ce délire. Ce fut un investissement total et un travail considérable de sa part et aussi de la part de mon épouse Odile et de Ludovic Billac, et ça a duré 7 ans. »

Le fameux « DT Foot », le dictionnaire du foot.

Quand on parle de bible, forcément, ça parle au journaliste Arnaud Tulipier, 24 ans de présence à France Football, la « vraie » bible du football, qui s’est intéressé de près au projet « DT Foot ». D’ailleurs, chaque année, il en commandait plusieurs exemplaires pour sa rédaction. « Philippe, je le connais depuis près de 30 ans ! Au départ, je l’ai connu via son associé de l’époque, Ludo Billac. J’étais encore à But! Ensuite, grâce au DT Foot, on s’est croisé sur les terrains, il me rendait visite à France Football, je l’ai trouvé attachant. C’est quelqu’un qui m’a touché. Il est débrouillard, il a un réseau de dingue, il connaît plein de monde. C’est un amateur de foot au sens pure du terme. Il connaît plein de monde. On s’est bien entendu, on avait des atomes crochus, et aujourd’hui, c’est un vrai ami. »

« Je suis perfectionniste »

A Rennes, chez lui, à son bureau, en train de mettre à jour ses fichiers.

Sans le DT Foot, Philippe Le Brech ne serait peut-être pas connu comme le loup blanc… encore que, même pas sûr ! Parce qu’à force de promener partout sa silhouette, toujours vêtu de son fameux chasuble « photographe », l’on s’est habitué à le voir, à lui parler, à l’écouter, à l’entendre s’exprimer, parce que, il faut bien le dire, le Parisien, qui vient de fêter ses 53 ans (le 9 janvier), a du caractère ! L’homme, un peu râleur et entêté – « Je suis perfectionniste, en fait » – cache une personnalité très attachante. Il est touchant, serviable et d’une grande générosité.

« Il a le coeur sur la main » poursuit Arnaud Tulipier, qui a lancé l’application « 90Football » (également disponible sur YouTube) après son départ du groupe Amaury. « Il rouspète si on ne lui demande pas un numéro ou une photo ! Il est comme ça, généreux. J’ai fait des reportages grâce à lui : je me souviens d’une vidéo avec tous les joueurs français finalistes de la dernière coupe du monde, dont les 3/4 sont passés par les équipes de France jeunes : on a pu récupérer toutes les photos d’eux quand ils étaient jeunes entièrement grâce à lui ! Si je n’avais pas eu cette matière première, je n’aurais rien pu faire. »

Et Tulipier de poursuivre : « Il a parfois des obsessions, alors je lui dis « calme toi », mais il est hyper-attachant, je l’aime beaucoup. Son caractère râleur est un petit vernis qui ne tient pas longtemps. Quand j’ai eu des coups de moins bien, il était là. Il est extrêmement généreux, bienveillant. Il n’y a pas beaucoup de gens comme lui. »

Laurent Pruneta, journaliste au Parisien (et collaborateur pour @13heuresfoot), raconte cette anecdote : « Quand ma maman est décédée en 2011, c’est lui qui a organisé une collecte auprès de mes collègues du Parisien qu’il connaissait bien, des patrons du restaurant japonais où on allait tout le temps, pour acheter un bouquet; ça résume l’homme. »

Un globe-trotter

Jérôme Bouchacourt, le rédacteur en chef du site « Footamateur.fr », qui fête ses 10 ans d’existence cette année, connaît bien l’énergumène : ils collaborent ensemble pour le site. « Philippe, il est parfois un peu chiant mais je l’aime beaucoup ! » résume-t-il. « On a appris à se connaître, à force de se rencontrer sur les terrains, parce qu’au début, ce n’était pas ça ! On collabore ensemble depuis le début de l’aventure « Footamateur.fr » ! On s’appelle quasiment tous les jours. Aujourd’hui, 90 % des photos du site Footamateur.fr sont les siennes. Je l’appelle « Le globe-trotteur du foot amateur » ! Il est incroyable, il appelle parfois d’autres acteurs du milieu du foot pour se déplacer avec eux sur un match ! La saison passée, pour le match de coupe de France entre Vire et Caen, il a pris un train pour rejoindre quelqu’un du Nord qu’il ne connaissait pas et qui allait au même match, et ensuite, ils y sont allés ensemble ! C’est un ours attachant, qui a le coeur sur la main. Il connaît tout le monde. Il met en relation des gens. Quand tu as besoin de lui, il est là, mais c’est vrai… quel caractère ! Je me souviens d’une scène à l’aéroport de Nice, en juin 2022, quand je suis allé avec lui à l’assemblée générale de la Fédération, on lui a fait vider tout son sac, il n’était pas content mais au final tout s’est bien passé ! »

Fan du Red Star

C’est vrai que Philippe Le Brech, qui a grandi à Saint-Ouen, fan de la première heure du Red Star, où il a même joué en poussins, pupilles et minimes – « Mais j’ai arrêté car je n’étais pas parmi les meilleurs et les horaires ne collaient pas avec l’école. En plus, je n’ai jamais compris pourquoi je jouais ailier gauche alors que j’étais droitier ! » -, possède un carnet d’adresses long comme le bras. Et il en fait profiter les autres.

Stéphane Delaveau, le directeur de l’agence de presse Lebourg (APL), spécialisée dans la diffusion d’informations à la presse quotidienne régionale, peut en témoigner : « J’ai connu Philippe il y a 25 ans quand le Red Star, à cause d’un problème de délocalisation, a quitté le stade Bauer pour aller jouer à La Courneuve. J’allais voir les matchs, je l’ai croisé, on s’est rencontré, et c’est lui qui m’a mis en contact avec la famille Lebourg, de l’agence de presse Lebourg. Au départ, j’étais pigiste, car j’avais mon travail à côté, et puis j’ai racheté l’agence au décès brutal de Monsieur Lebourg, son fondateur, et aujourd’hui, elle a 35 ans. Philippe, c’est quelqu’un d’entier, avec les qualités et les défauts qui vont avec. Il est parfois excessif, et confond rigueur et rigorisme ! Mais il te donne son amitié et sa confiance entièrement. L’agence APL fait des photos pour la Fédération Française de football sur les matchs des équipes de france jeunes, et c’est Philippe qui en fait une bonne partie. »

« Il a de vraies connaissances sur le football (Arnaud Tulipier). On se fait des quizz de temps en temps, je m’incline souvent ! Bon, il a quand même une mémoire très sélective : parfois, il ne se souvient pas d’un score de Ligue des Champions d’il y a 2 ans mais il va te ressortir des trucs très précis sur des anciens matchs de seconde zone ! Il est vintage ! »

Disquaire et vendeurs de cartes de collection de sports américains

Chez Philippe Le Brech, l’appareil photo n’a pas toujours été son meilleur compagnon. D’ailleurs, rien ne le prédisposait vraiment à s’orienter vers ce métier. Le garçon, qui aime répéter qu’il est né presque en même temps que PSG (lui en 1971, le PSG en 1970), a fait de la comptabilité en lycée professionnel (il a un Bac-Pro secrétariat-comptabilité) et plusieurs « petits » boulots, comme disquaire dans l’ancienne enseigne « Nuggets », vendeur de cartes de collections de sports américains dans un magasin du quartier des Halles, avec comme client le basketteur Joackim Noah, le fils de Yannick Noah, et également Christophe Drouvroy, l’actuel directeur des compétitions nationales à la Fédération !

C’est le « DT Foot » et sa rencontre avec Denis Troch qui a tout changé. « Je m’étais constitué un petit fichier sur le championnat National, c’était lors de la dernière saison à deux poules, en 1996-97, il n’y avait pas de guide pour cette division là, ça s’arrêtait à la Division 2. J’ai rencontré Ludovic Billac sur les terrains de la région parisienne, qui faisait des fiches lui aussi, et ensemble, on a créé une base de données. On a lancé un bouquin l’année suivante, « Le guide du football », par Sportfootball, aux éditions Arcadia. J’ai fait ça par passion. On l’a arrêté en 1999. Ludovic avait des appareils photos argentiques, il m’en a prêté un, et c’est comme ça que j’ai commencé à faire des photos de joueurs en portrait, pour alimenter la base de données. Et vers 2004/2005, je me suis mis au numérique. »

Entre-temps, donc, il y a eu cette rencontre avec Denis Troch : « Je le connaissais un peu car il avait joué au Paris FC et au Red Star, il a été coach adjoint au Matra Racing, et j’allais voir les matchs, j’allais aux entraînements. En fait, quand on a lancé DT Foot, au même moment, Amiens l’a contacté pour entraîner, du coup, c’est Odile, son épouse, qui a pris le relais, même si lui a gardé un oeil dessus. J’avais un CDI. La boîte s’appelait DT Sport International. Cela a duré de 2000 à 2007. Mais c’était compliqué, on ne gagnait pas assez d’argent. C’est dommage, parce qu’on était vraiment fiable, alors que sur Internet, il y a beaucoup de conneries ».

« Sortir un nouveau produit référence »

Ce qui est fou chez Philippe Le Brech, c’est que même si le DT Foot s’est arrêté en 2007, lui continue de remplir ses fiches et de faire ses photos d’équipes et de joueurs en portrait comme si de rien n’était ! Comme si l’activité n’avait jamais cessé ! Parce que, au fond de lui, il nourrit ce rêve : il aimerait que quelqu’un s’intéresse de près à ses précieuses archives et à sa multitude de données, afin, pourquoi pas, de sortir un nouveau produit référence. « Si demain quelqu’un met de l’argent, je dis OK, on pourrait faire un site web, en accès payant; ça me passionnerait de le refaire et en plus, j’ai vraiment de quoi alimenter ! Mais il faut des moyens. J’ai eu des contacts, mais il n’y a rien eu de concret. »

En attendant, il continue d’écumer les stades de football, essentiellement dans toute la partie Nord de la France, que cela soit pour son activité de prestataire ou bien enrichir ses fameuses fiches papiers : « Elles sont mises à jour et classées par club et ça prend un peu plus de place que les photos. J’ai plein d’archives. Et j’ai profité de la Covid pour tout bien trier, ranger, cataloguer, de la Ligue 1 au National 3, puis par Ligue, puis par pays pour le foot étranger, etc. »

Et c’est en cela qu’il peut paraître un peu agaçant pour certains, car il fait fi des codes et des règles « pas toujours utiles » qui ont cours dans le milieu du foot. « Philippe, c’est est un futé ! Il est partout et nulle part, c’est un zébulon, poursuit Denis Troch; Il est plein de bon sens, malin. Il connaît énormément de monde, il est débrouillard et efficace. Il n’est pas envahissant, mais juste présent. »

Un sacré tempérament

C’est pour ça qu’il n’est pas rare de le voir tenir une discussion animée mais toujours dans le respect, avec, par exemple, un responsable com’ d’un club, un officiel ou un agent de sécurité, car avec lui, ce n’est jamais « Halte là, on ne passe pas ! » Philippe a sa version sur le sujet : pour lui, cela dépend des clubs et de la manière dont ils accueillent les gens. « Ya des clubs où certains responsables de la communication ou de la sécurité, à qui on octroie un pouvoir, se prennent pour des rois et t’imposent tout et n’importe quoi sans que tu aies ton mot à dire. On ne peut pas discuter avec eux. Déjà, les personnes qui travaillent à la communication, qui ne répondent pas au téléphone ou qui ne rappellent jamais, ça m’énerve : pourtant c’est leur boulot, ils bossent à la CO-MMU-NI-CATION mais en fait, ils ne communiquent pas ! »

On vous l’a dit, un sacré tempérament ce Le Brech. Et un sacré débrouillard aussi : le système D, il connaît par coeur. Pour se rendre sur un stade, tous les moyens sont bons avec lui, du moment, surtout, qu’il arrive à bon port sans dépenser ce qu’il n’a pas. Et surtout, il a un sens du détail comme personne. Maniaque ? « Il a une démarche presque monacale, renchérit Arnaud Tulipier; il est capable de faire beaucoup de kilomètres juste pour aller faire remplir des fiches à des joueurs, juste pour les mettre à jour ou prendre une photo parce que le joueur a changé de coupe de cheveux ! Je me souviens que Denis (Troch) avait parfois du mal à boucler son « DT foot » et me disait qu’il bossait avec deux malades, son épouse Odile et Philippe, parce qu’il manquait toujours un truc, une photo d’un joueur, et comme Philippe est jusqu’au boutiste, il voulait toujours la dernière photo, la plus récente. C’est ça qui est incroyable avec lui. Il a une exigence du détail et une implication que d’autres, qui ont pourtant plus de moyens financiers, n’ont pas. Pour toutes ces raisons-là, ce qu’il fait est très respectable et estimable. Il est dans ces détails là. Il continue le « DT Foot » alors qu’il n’existe plus, qu’il y a plus de maison d’édition, mais il veut avoir les fiches de tous les joueurs. Philippe, c’est le gars qui a le plus de numéros de téléphone en France dans le foot ! Pour ça, il est précieux. Il a une vision du foot un peu romantique, qui fait du bien, à la fois nostalgique et puriste au sens noble du terme. »

L’art du système D

« Il est exceptionnel et très débrouillard, ajoute Jérôme Bouchacourt ! Quand il se déplace, il prend le train, il prend Blablacar, il fait du stop, c’est le système D poussé à son paroxysme ! »
Ce soir, il sera, comme souvent, au bord d’un terrain, pour le match Red Star – Orléans, à Bauer, en championnat National. Son championnat. Celui qu’il préfère. Il aura son appareil photo, comme d’habitude. Il en profitera peut-être pour mettre d’autres personnes en relation ou pour rendre des services. « Philippe, c’est un gars, il va donner sa chemise pour toi, il va se mettre en quatre toi, conclut Arnaud Tulipier; Une fois, il m’a eu une accréditation au stade de France pour un match de coupe du Racing, alors que je n’avais pas pu l’avoir avec France Football. Il connaît tellement de monde…! »
Ce réseau, il espère l’utiliser aussi pour mieux gagner sa vie. Car il ne le cache pas, ce n’est pas toujours évident financièrement : « C’est dur, lâche-t-il. Je suis prestataire régulier pour la Fédération Française de football, via l’agence APL, et ponctuellement, je fais des piges pour les journaux. C’est pour ça que je minimise les frais au maximum quand je me déplace. Je fais ça par passion, Et bien, je suis ouvert aux propositions ! »

Et, accessoirement, Philippe collabore pour 13heuresfoot ! Alors, merci Philippe !

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Philippe Le Brech, du tac au tac

Il paraît que tu as déjà entraîné ?
Oui (rires) ! J’ai coaché l’équipe du Parisien dans deux tournois de « Five », et on a gagné les deux tournois, dont la première fois contre Canal +, coaché par Pierre Menès.

Comment es-tu devenu photographe ?
Par hasard et par nécessité. C’est devenu passionnant grâce au numérique, qui facilite pas mal de choses.

On dit que tu es une référence dans le foot amateur, d’ailleurs la paire Emmanuel Moine – Vincent Magniez le répète souvent lors des retransmissions des matchs de National sur FFF TV (vidéo)…
Référence, c’est un bien grand mot, car je n’ai pas la reconnaissance financière qui devrait normalement en découler. Mais je fais mon travail avec passion et application. Oui, ils disent que je suis une légende du National.

Vidéo : le soir où la paire Magniez-Moine a dit de Philippe qu’il était une légende !

Pourquoi préfères-tu le foot amateur au foot pro ?
Parce que, jusqu’au National, c’est du foot, après, pour moi, c’est du business, même si ça commence aussi à le devenir en National, par la force des choses, car il y a de plus en plus de clubs pros qui descendent à cause de la nouvelle réforme. Mais en National, il y a encore l’amateurisme du championnat.

Avec Didier Deschamps et Hervé Renard.

Meilleur souvenir de photographe ?
Le match Reims – Amiens, à la dernière journée en Ligue 2 (le 20 mai 2017), quand Emmanuel Bourgaud a marqué à la 96e et envoyé les Picards pour la première fois de la saison en Ligue 1. J’ai eu des frissons comme rarement, alors que, pourtant, je n’ai pas plus d’affinité que ça avec Amiens, mais c’est toute la situation qui a fait que… Tous les matchs étaient terminés, Lens pensait qu’ils étaient barragistes, c’était la dernière journée, la dernière seconde… C’est tout un contexte. Je ressens encore des trucs rien qu’en en parlant. C’était un scénario improbable. On ne le vit qu’une fois. C’était irréel. J’avais l’impression d’être déconnecté, d’être dans un monde parallèle. En plus, j’avais fait la photo de l’équipe d’Amiens avant le coup d’envoi et celui qui a marqué, Bourgaud, n’est pas dessus, car il était remplaçant !

Sa photo préférée : l’île Louet, au large de Carantec, en baix de Morlaix.

La photo dont tu es le plus fier ?
Ce n’est pas une photo de foot, c’est celle que j’ai en couverture sur ma page Facebook et encadrée dans mon salon.

Une photo de foot marquante ?
Le 26 février 2014, Nice gagne 7 à 2 à Roudourou face à Guingamp. Ce soir-là, l’Azuréen Carlos Eduardo met un quintuplé. Voir autant de buts d’un seul joueur n’était plus arrivé depuis Tony Kurbos avec Metz en avril 1984 (il avait marqué 6 buts lors du succès 7-3 face à Nîmes) ; le lendemain du match Guingamp-Nice et les jours suivants, j’ai les photos d’Eduardo dans tous les quotidiens et hebdomadaires sportifs. Il y a même eu des photos dans la presse Brésilienne ! La plupart des photographes étaient en face, côté Guingamp. J’étais au bon endroit au bon moment.

Pire souvenir ?

L’année où Les Herbiers va en finale de la coupe de France, je suis au match Auxerre – Les Herbiers (8e de finale, en février 2018), sous la neige, et mon boîtier tombe en panne au bout de 10 minutes… Je suis resté quand même car après je devais rentrer en covoiturage à Paris. J’ai passé presque tout le match à faire les photos avec mes yeux ! Quelle frustration ! Mon téléphone, lui, n’était pas assez bien pour faire des photos utilisables. ! Depuis ce match, j’ai toujours au moins un autre appareil dans le sac. J’ai un autre souvenir : c’est lors d’un match Angers – Caen en L2 (septembre 2017), quand Billy Ketkeophomphone se blesse gravement, juste devant moi, j’ai la photo… qui passe le lendemain en pleine page de l’équipe.

Zoom ou téléobjectif ?
Les deux ! J’utilise le 80-200 et aussi le 70-200, le 24-70, le zoom, le télé, tout dépend de mes besoins en fait.

Couleur ou noir et blanc ?
Couleur !

Argentique ou numérique ?
Numérique, forcément ! On voit tout de suite le travail que l’on a fait.

On te parle encore du DT Foot ?
Oui, ça arrive régulièrement, et j’aimerais bien que ça reprenne.

Premier souvenir de match avec le Red Star ?
C’était quand le Red Star jouait en Division 4, saison 1980-81, contre Raismes je crois. C’est le premier match qui me viens à l’esprit.

Premiers souvenirs de football ?
Ce sont les multiplex à la radio, lors des soirées de championnat fin 70 début 80, la Coupe du Monde Argentina 1978, les matchs de Coupe d’Europe de Bordeaux, Saint-Etienne, Nantes… et aussi les matchs de Division 2 du Stade Français avec, la même saison, ceux du Red Star, à Bauer en D3, car les deux clubs se partageaient le stade cette saison-là.

Le stade où tu aimes bien travailler ?
Dans des stades lumineux. Mais je préfère travailler en diurne, et dans des stades où je suis bien accueilli.

Le stade où tu n’aimes pas travailler ?
Dans les stades où la lumière est pourrie ! Et où l’accueil n’est pas top : aujourd’hui, ça devient un peu n’importe quoi, on ne peut plus rien faire ! En 2019, j’étais en vacances en Irlande avec ma femme Joëlle et il y avait la phase finale de l’euro U17. Je me suis dit « tiens, pourquoi ne pas aller sur un match de l’équipe de France, faire des photos pour la FFF ? ». L’organisation a été super sympa, j’ai obtenu une accréditation sans aucun problème, l’accueil était top, tout était dans la bienveillance. En France, c’est tout l’inverse, on n’est que dans le négatif, dans la répression, c’est fatiguant et usant. On a pas mal de leçons à apprendre des autres pays.

Les stades « compliqués » ?
Dans les clubs où certains responsables communication ou responsables de la sécurité à qui on octroie un pouvoir se prennent pour des rois, t’imposent tout et n’importe quoi sans que tu aies ton mot à dire. On ne peut pas discuter avec eux. Les gens de la communication qui ne répondent pas ou qui ne rappellent jamais, ça aussi, ça m’énerve : ils bossent à la CO-MMU-NI-CATION mais ne communiquent pas et pensent tout connaître !

Combien de photos par semaine ? Par an ?
Par an, entre 100 000 et 130 000, je fais une bonne centaine de matchs, ça va vite.

Combien de photos par match ?
Ça dépend, ça peut monter jusqu’à 1500 ou 1600, mais ça peut être aussi 600 ou 700.

Combien de kilomètres par an ?
Là aussi, ça dépend, mais j’en fais beaucoup moins qu’avant. Une année, j’ai pris une voiture de location pour la période estivale, j’ai fait 20 000 kilomètres, j’étais allé partout !

Le meilleur accueil ?
On est souvent mieux accueilli chez les amateurs que chez les pros où, couramment, ils délèguent au syndic de presse et là, c’est « tu te démerdes ! » En plus, certains syndics n’ont pas forcément les aptitudes pour gérer les médias.

Entraîneurs préférés ?
Y’en a plein, ceux avec qui je discute, qui sont contents de me voir, certains qui étaient joueurs avant. Ceux qui ont vraiment la même passion du football et qui pourraient passer des heures à débattre sur ce sujet.

Une idole de jeunesse ?
Je n’idolâtre personne mais j’aimais bien Pelé, que j’ai rencontré deux fois et qui m’a fait une dédicace personnalisée.

Un président ?
J’aimais bien Loulou (Louis Nicollin, président de Montpellier), il n’avait pas sa langue dans sa poche, c’était un personnage.

Avec la coupe de France

Des amis ?
Arnaud Tulipier, Christophe Pollet (le papa de Valère Pollet, ancien joueur de Calais, Lille B, QRM, Red Star, actuellement à Furiani en N2), Fred Cochez, qui a été recruteur à Sochaux et qui est recruteur Grand Nord pour Montpellier maintenant, je l’ai connu lorsqu’il entraînait au Red Star. Et aussi Benoît Datin, dont je vous conseille le site web http://www.deux-zero.com c’est une mine d’info, notre est un peu dû au hasard mais elle devait se faire.

En dehors du foot, tu fais quoi ?
J’aime bien sortir avec ma femme, cuisiner, aller au cinéma (principalement pour voir des films français dont l’emblématique « Coup de Tête » qui est ma madeleine de Proust »). Les block-busters américains où il y de la violence pendant 1h30 ne m’intéressent pas. La saga « Star Wars », elle, est à part. J’aime bien regarder des séries : dernièrement j’ai découvert « Astrid et Raphaëlle » qui met en lumière l’autisme, et « l’Art du Crime », une série policière décalée. Ted Lasso, une série atypique sur le foot. J’aime écouter de la musique (années 70-80, Pop-Rock Disco et variété francophone). J’aime aussi faire des quiz (avec Arnaud Tulipier par exemple !), me détendre en profitant du soleil breton qui est bien plus souvent là que la pluie comme la mauvaise croyance populaire le prétend !

Le milieu de la photo ?
Dans l’ensemble, ça va, c’est juste que les anciens, t’as l’impression que tu vas leur bouffer leur pain, ils ne sont pas très ouverts mais il y en a de moins en moins et je commence à en faire partie (sic) alors j’essaie de ne pas être comme cela et d’avoir de la bienveillance et de l’écoute envers mes confrères et surtout mes consœurs qui ne sont pas toujours bien appréciées car le foot en général reste un milieu très macho. Un exemple ? Il y a près de 5 ans, lors d’un quart de Finale de Coupe de France, il y avait au moins 20 ou 30 photographes et j’ai été le seul à parler avec une jeune femme qui débutait dans la photo de foot, mais qui avait déjà une longue expérience dans un autre sport. Depuis, avec le temps, on est devenu amis (c’est un peu « ma fille de photo ») et elle collabore parfois avec moi.

Le milieu du foot ?
Y’a le milieu amateur et le business à partir de la Ligue 2.

Ton championnat préféré ?
Le National, c’est celui que je connais le mieux, je le couvre depuis des années, et c’est le plus indécis.

Rennes ou Saint-Ouen ?
Rennes, pour la qualité de vie. Saint-Ouen pour le stade jusqu’à maintenant mais qui prochainement suite à la reconstruction totale ne sera plus le mythique Stade Bauer.

Tes clubs préférés ?
1. Le Red Star. 2. Le Racing. A l’étranger, Liverpool, le Flamengo de Rio, des clubs pour lesquels j’ai une affection particulière. Dans d’autres sports, il y a les Los Angeles Lakers au basket et les San Francisco 49ers au foot américain.

Une rencontre ?
Oui, Il y en a pleins mais surtout celles qui m’enrichissent humainement. Hors football, c’est bien sûr celle avec ma femme, Joëlle, que j’ai rencontré il y à déjà 13 ans. On habite à Rennes… quand je ne suis pas aux quatre coins de l’Hexagone !

Une info insolite ?
Je suis présent à l’image dans un film sur le football ( »United Passions: La Légende du Football », qui raconte l’histoire de la FIFA) aux côtés de Gérard Depardieu (Jules Rimet), Tim Roth (Sepp Blatter) et Sam Neil (Joao Havelange) !

Vous le reconnaissez ? Il est à gauche de la coupe.

Pour finir, des anecdotes ?
Là aussi j’en ai plein dont certaines avant d’être acteur du milieu ! Une fois, j’ai demandé à Guy Roux si je pouvais monter dans le bus de l’AJ Auxerre avec eux, pour aller au Parc des Princes, c’était pour un match face au Matra-Racing. J’étais abonné. Eric Cantona était assis juste devant moi et au fond du bus les frères Boli mettaient l’ambiance. J’étais allé à leur hôtel à Neuilly-sur-Seine. Une autre fois, j’ai fait chauffeur avec ma petite Saxo (qui n’était pas jaune !) pour Stéphanie Frappart ! En fait, je l’ai vu à un arrêt de bus, je l’ai emmené à Argenteuil. Elle venait d’arbitrer un match à Fleury-Mérogis où j’avais fait des photos. Il m’est aussi arrivé quelque chose de rare sur un match de Ligue 2, lors de la saison 2017-2018 ; j’étais le seul photographe au Mans, pour le match Quevilly-Rouen / Bourg-en-Bresse/Péronnas : à ce niveau-là, ça ne m’était jamais arrivé !

J’ai aussi le souvenir d’une soirée en boîte de nuit avec l’équipe corpo de Montpellier, j’avais même ramené des joueurs dans ma Fiat Panda au petit matin après une nuit bien animée, Castro, Fontaine… Et puis, à Toulouse, en 1994-1995, j’étais le seul supporter du Red Star au Stadium : placé au-dessus du kop toulousain j’étais l’unique spectateur à crier ma joie au moment du but victorieux du Red Star ! Ce jour-là, il n’y avait eu aucun déplacement organisé ! Je me souviens aussi avoir rempli la feuille de match pour un amical entre Clermont et l’UNFP, dans les années 2000 ! J’ai aussi pris le bus avec les supporters de l’AJ Auxerre, pour un match de Ligue des Champions à Madrid, face au Real de Mourinho et Cristiano Ronaldo : je pigeais pour Le Parisien à ce moment-là, et avec un rédacteur, on faisait un reportage « inside ».

Et il y en a une qui, avec le recul, est assez incroyable : ça s’est passé après la finale de la Coupe de France entre le Racing Paris 1 et Montpellier (2 juin 1990). Je me suis retrouvé dans les entrailles du Parc des Princes à errer et visiter les lieux. Au détour d’un couloir, j’ai croisé Loulou Nicollin se promenant avec la Coupe de France qu’il ne lâchait pas d’un pouce même pour une photo, et je suis rentré dans le vestiaire parisien et là, seul et suspendu au porte-manteau, se trouvait l’un des nœuds-papillon rose que les coéquipiers de Pascal Olmeta avaient porté pour rentrer sur le terrain à l’instar des rugbymen victorieux du bouclier de Brénus au même endroit une semaine plutôt. Sur le moment, je n’ai pas évalué l’ampleur de ce que je récupérais mais par la suite j’ai compris que c’était un objet collector de la Coupe de France. Une des plus belles pièces de ma collection, car assez insolite. D’ailleurs, quand je peux avoir un maillot, je préfère celui d’un club en Coupe de France à celui d’un ténor du foot en Champions League. Si certains ont des maillots ou d’autres objets liés à cette iconique compétition, je serai enchanté de les recevoir !

Texte : Anthony BOYER – aboyer@13heuresfoot.fr – Twitter @BOYERANTHONY06

Photos : Remerciements à Pauline Carré, Clotilde Briand, Lisa Paquereau, Blanche Voisin, Amandine Noël, Bernard Morvan, Ombeline Eppe, Clémence Hesdin.

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À près de 26 ans (il les fêtera le 11 janvier), Valentin Liénard n’est pas qu’un simple joueur amateur. Sa notoriété dépasse le cadre des terrains. En parallèle de sa carrière – il évolue à Thonon Evian Grand Genève en N2 -, le défenseur s’est fait un nom sur les réseaux avec ses vidéos, dont sa série QDF (Que du foot) sur YouTube. Aujourd’hui, le créateur de contenu cumule plus d’un million d’abonnés.

Photo Thonon Evian GG FC

Originaire du sud de la France, Valentin Lienard a rapidement été repéré par le club professionnel de sa ville, l’OGC Nice. L’exigence et l’acharnement au travail, il l’a connu dès le plus jeune âge avec le confort d’avoir sa famille à ses côtés. « Ça change, tu sors d’un club de village, où t’es le meilleur de ton équipe et surclassé. D’un coup, tu te retrouves entouré de joueurs qui sont tous comme toi voire meilleurs. J’ai eu une année d’adaptation où je n’étais pas bon, je ne me retrouvais pas. Mais on s’habitue à cette exigence et c’est ça qui fait réellement progresser. Heureusement que j’étais proche de ma famille. »

Après les Aiglons, il parcourt la région. Chez les jeunes, il évolue au niveau national, à l’AS Monaco et au FC Istres, puis il rejoint Le Cannet-Rocheville, à côté de Cannes, en National 3. « Je me suis éloigné de ma famille par étapes, ça s’est fait progressivement. » Depuis, le jeune footballeur a – quasiment – changé chaque saison de club (Louhans-Cuiseaux B, Agde, Limoges, Saint-Priest B, Villefranche/Saint-Jean/Beaulieu et Jura Dolois), excepté la saison du Covid (à Alès, de 2019 à 2021).

12 clubs à 25 ans

Avec le coach Bryan Bergougnoux et le directeur sportif Olivier Chavanon. Photo Thonon Evian GG FC.

« Je n’ai pas spécialement choisi de changer de club à chaque fois. Il y avait plein de paramètres différents. Istres et Limoges ont tous les deux déposé le bilan, Limoges s’est retrouvé en D1. Istres a fermé son centre de formation et a perdu son statut pro. Tu n’as pas d’autre choix que de partir. Villefranche / Saint-Jean / Beaulieu (à côté de Nice) est descendu en Régional 1 et ce ne sont pas mes ambitions. J’ai rejoint Saint Priest ou le TEGG (Thonon Evian Grand Genève) pour avoir l’opportunité de jouer plus haut. Il y a eu aussi certaines réalités de la vie. Je suis parti d’Agde car ils me donnaient 650 euros, et aussi d’Alès car j’avais l’opportunité de me rapprocher de ma famille. Ce sont des paramètres différents mais qui s’expliquent un minimum. »

Visuel Thonon Evian GG FC.

Cette réalité est souvent connue des jeunes footballeurs qui errent en National 3 à cause de la différence de professionnalisme et de structures dans les clubs. « Dans l’idée, j’avais souvent envie de rester. Si j’avais pu faire plein d’années à Istres et monter avec le club, je l’aurais fait. Si à Saint-Priest, ça c’était bien passé, je serais resté. Si j’arrive à trouver un club où je peux me stabiliser ça sera parfait. »

Désormais en National 2 à Thonon Evian Grand Genève, Valentin, qui fêtera ses 26 ans vendredi 11 janvier, progresse doucement dans sa carrière footballistique. « L’entraîneur du TEGG, Bryan Bergougnoux, cherchait un latéral. Greg’ Campi, son adjoint, que j’ai connu à Villefranche-sur-Mer, nous a présenté et ça a matché. J’ai eu un premier mois compliqué. Je ne me retrouvais pas, je n’étais pas assez bon. Là, l’adaptation se passe de mieux en mieux. On voit la différence de niveau chez les joueurs, dans l’effectif, aux entraînements. C’est cool parce que t’as l’impression d’avancer quand t’es entouré de joueurs comme ça et ça devient de plus en plus facile. »

Un million de followers

Photo LAB

C’est à 20 ans que Valentin Liénard a créé sa chaîne YouTube. Qu’il paraît loin le temps où le Niçois faisait ses vidéos de 5/6 minutes, tout seul, depuis sa chambre ! Désormais, « Val » possède sa série, le QDF, et des professionnels qui travaillent pour lui. « Avec un de mes meilleurs pote de collège, Nicolas Irr, on cherchait une idée. Et on s’est dit, « c’est fou, il n’y a pas un seul gars sur YouTube qui joue à un niveau correct en National et qui montre un peu comment il a intégré un centre de formation, comment il s’est retrouvé dans un club, qui montre son quotidien ». » Son ami d’enfance lui suggère donc l’idée d’une chaîne Youtube. « Je lui ai dit « c’est mort je ne vais jamais mettre ma tête sur YouTube ». »

« Finalement, je me suis dit « c’est quand même une idée pas dégueu’ donc je le fais, et voilà, on est parti de là. » A 20 ans, il réalise une saison complète en National 3, à Agde. C’est là que celui qui mène une double vie – footballeur / youtubeur et instagrameur – décide de documenter son quotidien de footballeur : il commence à produire du contenu accessible à tous. « On s’est toujours dit, avec Nico, « dès qu’on arrive à gagner un peu de sous, au lieu de le garder pour nous, on va réinvestir ». Si on gagnait 2000 euros, au lieu de les garder, on voulait progresser, donc on préférait payer quelqu’un pour qu’il travaille avec nous. Si on gagne 4000 euros on va reprendre une autre personne. »

Une vidéo de QDF (« Que du foot »), la chaîne YouTube de Valentin Liénard

Aujourd’hui, deux personnes le suivent au quotidien, cadreur et monteur, et deux autres personnes « montent » le contenu à distance, depuis Nice. De temps en temps, Nico et Val emploient des auto-entrepreneurs s’ils ont besoin d’une main d’œuvre supplémentaire, nécessaire sur certains contenus.

« Le foot n’est pas toujours bien aimé et n’a pas toujours une bonne image. Si j’arrive à donner une image positive du foot, tant mieux, c’est ce que j’essaie de faire. Montrer le côté sérieux et pro qu’on a dans nos divisions et en même temps que les gens kiffent et qu’ils aient un bon divertissement, voilà ce que je veux. »

« Si un club me dit « tu ne peux pas faire de contenu », je n’y vais pas » »

Vous le reconnaissez, en bas à droite ? Valentin (accroupi, au centre) a évolué chez les jeunes avec Kylian Mbappé à l’AS Monaco. Photo DR

Après avoir beaucoup « vagabondé » en National 3 au cours de sa carrière, Valentin nourrit des objectifs footballistiques en parallèle de ses projets. Il reste cependant réaliste sur la dure réalité du football semi-professionnel. « Quand tu commences le foot, t’as envie de finir pro mais la réalité te montre que ce n’est pas si simple. Je veux aller le plus haut possible. Déjà, j’aimerais arriver à m’imposer dans un club comme le TEGG en National 2 puis avoir la chance de continuer cette ascension avec le club, ou bien arriver à jouer plus haut. Le sportif prime avant tout mais je suis obligé d’être un peu réaliste. Il y a pas mal de gens qui bossent avec moi, donc je ne peux pas être égoïste. Si un club me dit « tu viens chez nous mais tu ne peux pas faire de contenu » je réponds non. »

Rien que la chaîne YouTube « QDF » regroupe près de 400 000 abonnés.

A Thonon Evian, le YouTubeur se retrouve. Le club lui laisse l’opportunité de continuer sa série et ses créations de contenu. « Cette saison, je veux gratter le plus de minutes en N2 possibles et arriver à monter avec le club. »
Valentin Liénard souhaite également élargir son travail de vidéaste. « Je veux continuer à faire progresser le QDF mais aussi faire d’autres projets. On va développer les formats courts et lancer une chaîne Twitch. Je veux tenter d’autre choses. Sur la chaîne Twitch on va recevoir des abonnés une fois par semaine et essayer de résoudre leurs problématiques en rapport avec le foot. »

C’est donc avec plein d’ambition que Valentin entame cette année 2024 !

Valentin Liénard du tac au tac

Photo Thonon Evian GG FC.

Ton meilleur souvenir sportif ?
Le Mondial de Montaigu avec les U17 de l’AS Monaco en 2015. C’était le premier tournoi où je me suis dit « ça commence à être sérieux ».

Ton pire souvenir sportif ?
La descente avec le VSJB (Villefranche / Saint-Jean / Beaulieu) de National 3 à Régional 1 en 2022. Ça a été difficile parce que je me projetais sur du long terme là-bas, il y avait un contexte que j’aimais bien mais à cause de la descente j’ai dû changer de club.

T’as marqué combien de buts dans ta carrière ?
Trois en seniors. Je suis latéral (rires) ! C’était deux en réserve en plus !

Ton plus beau but ?
C’était chez les jeunes à Istres en demi-finale de la coupe régionale et on pouvait jouer l’OM en finale. J’ai marqué le but de la qualification. Je n’en ai pas mis beaucoup donc je m’en souviens facilement (rires).

Ton poste préféré sur le terrain ?
Latéral droit, c’est là où je suis le meilleur.

Pourquoi avoir choisi d’être footballeur ?
Depuis petit, mon frère y jouait ça m’a influencé, je ne voulais faire que ça.

Ton geste technique préféré ?
Je ne suis pas le joueur le plus exotique du monde… mais la feinte de frappe !

Sous le maillot de Jura Dolois, la saison passée, en National 3. Photo Jura Dolois.

Tes qualités et défauts sur un terrain ?
Qualités : la hargne, la détermination, l’endurance. Défauts : je ne vais pas être le joueur le plus technique qui va faire des passements de jambes ou des roulettes.

L’équipe où t’as pris le plus de plaisir ?
La saison dernière (2022-2023) avec Jura Dolois. Une très belle saison en National 3. On finit 3e, je joue presque tout les matchs. On ne monte pas mais bête de groupe, bête d’équipe.

Le club où tu rêverais de jouer dans tes rêves les plus fous ?
Le FC Barcelone.

Un match qui t’a marqué ?
On perd en prolongation mais j’étais en National 3 à Limoges : on fait 8e tour de Coupe de France. On joue Villefranche-en-Beaujolais (National) et je fais un gros match : après ce match, Villefranche me met une semaine à l’essai (sous la direction d’Alain Pochat). C’est là que tu te dis « Ok, je peux vraiment me rapprocher du monde pro »; ça a été un déclic.

Un coéquipier qui t’a marqué ?
Mon pote Jordan (Aidoud). Dans le foot, c’est rare d’avoir des amis qui durent et lui c’est vraiment devenu un frérot. J’ai joué avec lui à Alès (2021-22) et à Jura Dolois (2022-23).

Le joueur adverse qui t’a le plus impressionné ?
Kylian Mbappé, même si ça a été un coéquipier aussi à Monaco.

Avec son coach Grégory Campi au VSJB (Saint-Jean-Cap-Ferrat / Villefranche-sur-Mer / Beaulieu-sur-Mer), à côté de Nice, en N3. Photo DR

Un coach que t’aimerais revoir ?
C’est fait, je l’ai retrouvé cette saison : c’était Greg Campi (adjoint à Thonon Evian GG).

Une causerie de coach marquante ?
Celles de Greg Campi : il arrivait toujours à trouver un truc nouveau pour arriver à motiver le groupe.

Une consigne de coach  jamais comprise ?
La saison dernière, j’avais un coach qui n’aimait pas que les latéraux repiquent dans l’axe pour centrer. Ce centre côté pied intérieur, il n’aimait pas. Quand il s’est rendu compte qu’on mettait pas mal de buts comme ça, il a changé d’avis.

Une anecdote de vestiaire ?
Greg Campi qui en pleine causerie jette son téléphone de colère.

Photo LAB

Le joueur le plus connu de ton répertoire ?
J’ai le père de Kylian Mbappé mais ce n’est pas un joueur. Je dirais Malang Sarr.

Une devise un dicton ?
Fluctuat Nec Mergitur (« Il est battu par les flots, mais ne sombre pas », la devise de la Ville de Paris).

Tu es un joueur plutôt…
Efficace.

Un modèle de joueur ?
Philippe Lahm.

Une idole de jeunesse ?
Messi.

Photo LAB.

Un plat, une boisson ?
Pizza coca.

Tes loisirs ?
La création de contenus, le sport automobile.

Un film culte ?
Rocky.

Dernier match que tu as vu à la TV ?
OM-OL (le 6 décembre 2023).

Thonon Evian Grand Genève en deux mots ?
Un club ambitieux et professionnel.

Le monde du football en deux mots ?
Extraordinaire et horrible, il peut te faire vivre les meilleurs comme les pires moments.

Texte : Olesya Arsenieva / Twitter : @ArseneviaO

Photos : LAB, Thonon Evian Grand Genève FC et DR

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L’entraîneur du promu costarmoricain en National 2, adversaire de Reims en 32e de finale de la coupe de France dimanche, évoque le projet participatif et collectif de son équipe, basé sur une nouvelle culture de la gagne. Un passage obligé, selon lui, pour exister à ce niveau.

Photo Philippe Le Brech.

L’exploit a fait le buzz au printemps dernier. Ce n’était pas en coupe de France. Non. Pour ça, le Dinan-Léhon Football-club attend dimanche soir et la venue du Stade de Reims pour, peut-être, signer le plus bel exploit de son histoire, même si tout le monde sait au stade de Clos Gastel que ce sera extrêmement difficile.

L’exploit, ce n’est pas non plus le fait d’avoir résisté à 10 contre 11 pendant 70 minutes contre une autre équipe de Ligue 1, le Stade Brestois, il y a tout juste deux ans, à ce même stade des 32es de finale de la coupe, sur la pelouse de Saint-Malo. La séance de tirs au but qui avait départagé les deux équipes était alors entrée dans les annales, avec de nombreux rebondissements (et de nombreuses balles de match pour Dinan), mais finalement, les pros avaient tenu et gagné leur qualification (13 à 12 !).

Photo Philippe Le Brech.

Cet exploit dont on parle, c’est du niveau … national ! La saison passée, Dinan-Léhon fut l’équipe restée le plus longtemps invaincue dans les cinq premières divisions, de la Ligue 1 au national 3. Finalement, après 18 rencontres (12 victoires et 6 nuls), les joueurs de Stéphane Lamant ont subi leur premier – et unique – revers fin mars, à la 19e journée, à Saint-Pierre Milizac, chez le dauphin. Et encore, il a fallu attendre la 90’+7 pour voir les Costarmoricains chuter (2-1). Un exploit récompensé par une accession en National 2 après un exercice mené tambour-battant (16 victoires, 9 nuls et 1 défaite, 52 buts marqués, 21 encaissés et 11 points d’avance sur le 2e !).

A la tête de cette formation qui ne cesse d’étonner, un homme, Stéphane Lamant (43 ans). Né au Plessis-Trévise, dans le Val-de-Marne, en région parisienne, ce cadre au Crédit Agricole est arrivé à Dinan en 2016, après deux expériences d’entraîneur-joueur à Dinard et à Saint-Malo, en réserve. Joueur, il n’a jamais franchi le cap amateur/pro, malgré des passages aux centres de formation de Lens et de Sedan. Dans ce long entretien, Stéphane Lamant raconte son parcours et évoque sa vocation : celle de devenir entraîneur. Car très tôt, il a su que son avenir dans le football s’inscrirait sur un banc de touche. Il décortique également sa méthode et le projet du club. Un projet partagé, comme il aime à le rappeler, où toutes les composantes sont concernées. Passionnant.

Interview :

« Honnêtement, la coupe, c’est tous les week-ends ! »

Photo Philippe Le Brech.

Stéphane, peux-tu retracer ton parcours ?
J’ai habité en région parisienne jusqu’à 16 ans puis j’ai intégré le centre de formation du RC Lens pendant un an, avant de revenir à Pontault-Combault (Seine-et-Marne) à 18 ans où là, j’ai été repéré par Sedan. Je suis parti 3 ans au CSSA, dans les Ardennes, à l’époque où le club était en Ligue 1. J’étais capitaine de la réserve. J’ai fait une année avec le groupe pro, quand Alex Dupont était là : je m’entraînais avec les pros, mais je ne jouais pas. C’était la belle époque de Sedan, le club avait fini 5e de L1 et avait disputé la coupe d’Europe. J’ai juste participé à des matchs amicaux et quand Henri Stambouli est arrivé, je sui parti à la GSI Pontivy, en N2 : le club jouait la montée en National mais on avait fini 2e, avec le coach Michel Jarnigon. On avait une belle équipe mais cette saison-là, c’est le Libourne de Jean-Marc Furlan qui est monté. Ensuite, à je suis parti à Saint-Malo, où j’ai passé mes diplômes d’entraîneur, et à 24 ans, j’ai tout arrêté.

Photo Philippe Le Brech.

C’est là que tu es devenu entraîneur…
Oui, mais d’abord entraîneur-joueur pendant 4 ans à Dinard, sur la côte. J’avais carte blanche sur tout, avec des dirigeants en or (Paul Herbel et Jacques Houtteville). Puis je suis revenu à Saint-Malo pour entraîner l’équipe réserve : là encore, j’étais joueur aussi, cela a duré 6 ans. Donc pendant 10 ans, de 24 à 34 ans, j’ai cumulé les deux. Et là, depuis 8 ans, je suis entraîneur à Dinan.

Joueur, tu évoluais à quel poste ?
A Lens et à Sedan, je jouais milieu offensif, excentré ou axial, puis quand je suis passé entraîneur-joueur, j’ai fait un peu tous les postes, même défenseur central et numéro 9 ! Et jusqu’à mes 13 ou 14 ans, j’étais gardien de but ! J’ai vraiment une culture poussée de tous les postes !

« J’ai toujours voulu être entraîneur »

Photo Philippe Le Brech.

Que t’a-t-il manqué, selon toi, pour franchir le cap, pour passer pro ?
J’entraînais déjà des gamins quand j’avais 16 ans à Pontault-Combault, des U8-U9. J’ai toujours voulu être entraîneur, c’était plutôt ça, ma motivation, et je pense que cela se ressentait. Il me manquait le mental et ce supplément d’âme pour aller chercher ce petit truc, ce contrat pro, parce que, au fond de moi, j’avais un autre projet : celui d’entraîner rapidement. Cela m’a bloqué sur certains aspects. J’avais une réflexion sur le foot. Je prenais du recul. J’aurais dû, à un moment donné, me poser moins de questions et croquer dans ce que j’avais, mais moi, je faisais déjà des plans sur la comète et je pensais à autre chose que le simple fait d’être joueur. Mentalement, je n’étais pas câblé pour passer pro.

Photo Philippe Le Brech.

Comment fais-tu pour cumuler ton travail et ton rôle au club de Dinan-Léhon ?
C’est vrai que j’ai deux vies et même trois avec ma famille; je suis cadre au Crédit Agricole d’Ille-et-Vilaine, où je travaille depuis 16 ans. J’ai toujours poursuivi mes études en parallèle, jusqu’à décrocher un master (bac + 5). J’y suis rentré par le biais du foot, quand j’étais à Dinard. Les deux sont liés. Au Crédit Agricole, j’ai été adjoint puis directeur d’agence pendant 7 ans avec 14 personnes sous ma responsabilité, répartis sur 2 sites, à Dol-de-Bretagne et Pleine-Fougères, près du Mont-Saint-Michel. Mais depuis octobre 2023, j’ai changé de mission : depuis octobre, je m’occupe du marché de la santé en Ille-et-Vilaine.

Entraîneur, on peut donc dire que c’est ta vocation ?
Je n’ai pas de prédisposition. Je dirais qu’avec mon papa, ce qui nous reliait, c’était le foot. Il jouait au niveau régional, on avait cette passion de regarder les matchs ensemble le soir, et on passait du temps à les analyser. Inconsciemment, c’est venu comme ça. A l’époque, on était en région parisienne, on souffrait avec le PSG de Valdo, Ginola, Weah et Kombouaré, dont la fameuse tête victorieuse face au Real Madrid fut un souvenir qui restera gravé à jamais. Je pense que ça vient de là. J’habitais à côté d’une cité, et l’activité principale, c’était le foot. Je suis tombé dedans.

« Quand on passe par Lens, c’est difficile d’oublier »

Photo Philippe Le Brech.

PSG, c’est ton club de coeur ?
Mon équipe favorite, c’est le PSG, mais mon coeur balance avec Lens : je me retrouve peut-être davantage dans les valeurs du RC Lens, en plus mes deux parents y sont nés, c’est pour ça que ça me tenait à coeur d’y jouer. Lens, quand on y passe, en tant que joueur, c’est difficile d’oublier. Et puis j’ai quelques liens avec Franck Haise, même si je ne l’ai jamais rencontré : j’échange de temps en temps avec lui, et pourtant, je ne l’ai jamais vu physiquement. Quand je lui demande quelque chose, je n’attends jamais 24 heures pour avoir une réponse : c’est cet état d’esprit là que j’aime. On en revient à ce que l’on disait tout à l’heure : quand j’étais dans le groupe Ligue 1 avec Sedan, je ne me retrouvais pas dans l’état d’esprit des uns et des autres. Moi, j’arrivais de CFA2, où je jouais avec un groupe de joueurs issus de la région parisienne, où la cohésion était magnifique, et là, à Sedan, je me suis retrouvé dans un monde de requins, avec des gens qui vous disent bonjour, mais à peine… Je n’avais pas aimé ce monde-là. Mais j’avais adoré le club de Sedan. Franck Haise m’a redonné le goût du RC Lens et puis il y a eu cette saison 2022-2023 en termes de foot, de valeurs humaines, que j’ai trouvée exceptionnelle. J’ai adoré leur courage, leur abnégation, leur intensité, j’ai vraiment accroché. J’ai d’ailleurs montré à mes joueurs à la reprise au mois de juillet, le reportage consacré au RC Lens de Prime Amazon, qui retrace leur année. C’est magique.

Photo Philippe Le Brech.

Cette histoire avec Franck Haise est surprenante : vous échangez, mais vous ne vous connaissez pas…
Non, je ne l’ai jamais rencontré. Humainement, Franck Haise, c’est du « plus plus ». Il y a 2 ans, quand on a affronté Brest en 32e de finale de la coupe de France après avoir éliminé Caen (L2) aux tirs au but, et aussi éliminé Saint-Malo, Avec Franck Haise, on avait commencé à échangé à ce moment-là, par l’intermédiaire de Kevin Beauverger, mon capitaine à Dinan, qui fut aussi son capitaine à Lorient chez les jeunes. Je l’avais eu pour préparer ce match face à Brest, que l’on avait perdu après une séance aux tirs au but mémorable (13-12), alors que l’on avait joué à 10 pendant une heure (0-0). Je ne suis rien pour lui et pourtant il a ce respect du foot amateur, cette solidarité qui fait qu’il se passe quelque chose entre coachs. Je me souviens avoir échangé aussi avec Philippe Hinschberger, entraîneur d’Amiens à l’époque, avant notre match face à Caen : je pensais que ce serait compliqué de l’avoir et finalement on était resté longtemps au téléphone. Il est d’une gentillesse incroyable. Tout cela, c’est inspirant pour moi. J’espère donner cette image-là à mon niveau, à toutes les composantes du club à Dinan. J’espère être accessible. De la même manière, j’essaie de faire en sorte que mes joueurs soient bien élevés et bien éduqués, notamment auprès des jeunes et de leurs parents : je veux qu’on dise bonjour à tout le monde. Ce sont des choses qui me tiennent à coeur et qui font que Dinan-Léhon est ce qu’il est aujourd’hui : un club familial.

« Collectivement, il se passe quelque chose chez nous »

Photo Philippe Le Brech.

Tu parlais de Saint-Malo il y a 2 ans et là, tu viens de regagner chez eux en championnat …
Oui, on a joué deux fois en trois ans contre eux, et là, juste avant Noël, on vient de gagner (2-1) encore chez eux en championnat, alors qu’on était mené et dominé : c’est la 8e ou 9e fois qu’on est mené cette année et qu’on revient, c’est incroyable. Saint-Malo peut plier le match en début de 2e mi temps et sur une transition, on les punit, puis on tient, mais cela a été compliqué, parce que Saint-Malo est deux crans au-dessus, individuellement notamment. Toutes les équipes que l’on rencontre depuis le début de la saison le disent, et à force, on va commencer à le croire : il se passe quelque chose collectivement chez nous à Dinan , avec des valeurs qui nous unissent, de courage, de solidarité, de détermination, qui font que l’on a réussi à renverser la vapeur dans ces matches-là.

Photo Philippe Le Brech.

La saison passée, quand Dinan caracolait en tête de la N3, tu avais fait naître des doutes quant à une future accession en N2, avec la perspective d’une saison compliquée à tout point de vue. Après 5 moins de compétition, tes doutes ont-ils été levé ?
L’an passé, c’est ma responsabilité de cadre d’entreprise qui m’a fait prendre de la hauteur sur la situation, en me disant « Attention, où on va ? », parce qu’au lieu de 16 équipes, il n’y en a plus que 14 avec toujours 5 ou 6 descentes : c’était ça ma seule préoccupation. Il ne restait que le gratin de la saison passée, et on allait arriver là-dedans comme un cheveu sur la soupe avec notre petit budget. Ma principale inquiétude était de me dire « Si on monte il faut que, un an après, en juin 2024, on soit plus fort que la saison précédente, qui fut extraordinaire en N3 (seule équipe en Europe à être restée invaincue aussi longtemps avec une première défaite en championnat fin mars contre Milizac); on pouvait penser que le N2, ce ne serait qu’un coup d’épée dans l’eau, que cela pourrait devenir dramatique d’un point de vue des résultats et que l’on se retrouverait dans le rouge financièrement à la fin de la saison, avec une équipe à reconstruire. Parce que l’on aurait perdu certains joueurs qui étaient venus pour jouer en N2, d’autres qui n’auraient pas beaucoup joué parce que le niveau est au-dessus, d’autres qui jouaient avant mais qui ont laissé leur place à ceux qui sont arrivés et qui, du coup, seraient aussi repartis… Non, la condition pour monter, c’était que le club puisse être prêt d’un point de vue administratif (organisation, logistique), et que d’un point de vue sportif, on privilégie les joueurs du cru, qu’on reste sur les mêmes valeurs de travail : 100 % ont un boulot à côté du foot, staff et joueurs compris. L’idée était de ne pas s’embourgeoiser, mais de capitaliser pour apprendre et se structurer.

« Sportivement, on est dans les clous »

Photo Philippe Le Brech.

Qu’est qui a changé cette saison par rapport à l’an passé ?
On s’est « staffé ». Le président a changé – en juin dernier, Laurent Dartois, chef d’entreprise de 46 ans, a succédé à Serge Lefort, qui a fait un gros travail – et il s’appuie sur un autre chef d’entreprise, Fabrice Caro, pour mener à bien sa mission. Au niveau administratif, on a Christiane Soquet, une personne qui nous aide beaucoup et qui est à la retraite. Elle vient d’arriver pour soutenir Cécile Quenouault et Roselyne Prigent, qui étaient déjà actives administrativement. Quant à l’effectif, on a gardé 16 joueurs sur 22 de la saison passée, et j’ai recruté 6 joueurs venus principalement de N3, des garçons en situation d’échec ou qui sortaient de blessure, qui n’ont pas beaucoup joué. Ce sont des paris. Ces choix se révèlent payants car les 6 jouent ! On a aussi amélioré certaines choses : on a désormais une petite salle d’échauffement, des vélos, des tapis, un poste à plein temps sur la vidéo et la préparation physique, grâce à un contrat aidé par l’État. On na pas fait de folie, de manière à ce que la stabilité financière et logistique du club soit assurée si jamais on venait à redescendre.

Photo Philippe Le Brech.

Pour l’heure, Dinan est plutôt bien parti pour se maintenir (5e avec 5 victoires, 4 nuls et 3 défaites)…
La première partie de saison nous fait dire que, sportivement, pour l’instant, on est dans les clous. On a aussi cette humilité, cette conviction de dire que, plus le temps va avancer, plus cela va être difficile pour nous. On a un groupe de 20 joueurs de champ et 3 gardiens, et je vois bien que ça a déjà été difficile d’aller au bout de l’année 2023 : là, par exemple, au moment où on se parle (entretien réalisé jeudi 21 décembre), je n’ai que 13 joueurs à disposition ce soir pour le dernier entraînement de l’année : ça montre bien qu’on a beaucoup donné, qu’on a besoin de se ressourcer. Heureusement qu’il y aura quelques trous dans le calendrier en deuxième partie de saison, parce que depuis juillet, on n’a pas eu un seul week-end de libre, sauf le week-end de Noël. Il va falloir être costaud dans nos têtes et costauds physiquement car ça risque d’être interminable.

En regardant ton effectif, on voit que très peu de joueurs ont évolué plus haut que le N3…
Trois joueurs seulement : Kevin Beauverger, qui a joué à Saint-Malo, à Lorient avec Franck Haise en réserve et aussi à Rennes en réserve; Kevin Simon (Saint-Brieuc) et Sofian Valla (Saint-Malo, Bordeaux B, Bergerac).

« Les joueurs m’ont fait progresser »

Photo Philippe Le Brech.

En N3, l’an passé, tu disais que techniquement, vous n’aviez pas survolé le championnat. As-tu le sentiment d’avoir progressé sur ce plan-là cette saison, et sur le plan général ?
Cela fait 18 ans que j’entraîne, ma plus mauvaise place c’est 7e; avec Dinan-Léhon, j’ai fait 7 fois top 5, et c’est vrai que l’an passé, je l’ai avoué, c’est peut-être la saison où j’ai pris le moins de plaisir dans le jeu. Par contre, on a appris à gagner. Les autres années, l’animation était beaucoup basée sur le jeu mais dès qu’on était mené, c’était difficile de jouer face à des équipes blocs bas, etc. L’an passé, un peu par hasard (on a eu des problèmes d’effectif avant de reprendre le championnat), j’ai changé d’organisation : on s’est retrouvé dans un 3-5-2 avec un numéro 10 et deux attaquants, un système que je n’avais pas beaucoup utilisé avant parce que je le trouvais difficile à animer dans la maîtrise collective; c’était pour moi un système basé sur la verticalité et les phases de transition. On a commencé comme ça, et on a gagné tous les matches ! On était devenu une équipe de transition. On avait du mal à animer le jeu, parce qu’on n’avait pas de joueurs extérieur-couloir. On était dans la densité axiale. J’avais dit aux joueurs que je n’aimais pas ce système mais ils m’ont répondu qu’ils avaient envie de continuer comme ça, qu’ils se sentaient forts comme ça, tant que ça marche. Du coup, on a appris à jouer différemment, à aimer la culture de la gagne : peut-être que c’est quelque chose qui me manquait, parce que j’ai toujours été un adepte du foot. Je pense que, la saison passée, les joueurs m’ont beaucoup fait progresser là-dessus, on s’est mis en mode compet’, où seul le résultat compte. Ils m’ont appris ça et cette saison, ça nous sert beaucoup parce qu’on a une opposition plus joueuse. On a besoin de la la culture du résultat parce qu’on n’a pas le choix : très honnêtement, la coupe de France, pour nous c’est tous les week-ends. C’est comme ça. Individuellement, on est en dessous de toutes les équipes que l’on a rencontrées, il n’y a pas de sujet là-dessus, mais on a une force collective, une force tactique, une organisation… J’en parle avec des coachs, on fait des petites innovations tactiques qui font parfois la différence : sur les douze matchs de N2 cette saison, on a dû être menés huit fois, on a marqué 8 buts dans les dernières minutes, et la saison dernière, on a marqué 75 % de nos buts dans le dernier quart-d’heure, ce qui est énorme. Ce sont des valeurs que l’on essaie de conserver, on en joue, dans les causeries, à la mi-temps, et je pense que nos adversaires le savent et nous craignent par rapport à ça. On a progressé collectivement, les joueurs et moi, sur la dimension « jeu » : je m’éclate plus cette année, avec des problèmes récurrents qu’il faut résoudre. J’adore changer de système en cours de match, je peux le faire deux ou trois fois. En fait, mon management est basé sur la compréhension tactique, j’adore ça. Mes joueurs, eux, m’apportent cette culture du résultat et font un « mix » entre ce qu’ils sont capables de faire et ce que je leur propose. Il y a un juste équilibre. En fait, c’est çà le projet : ce n’est pas mon projet, ce n’est pas celui du club, c’est un projet collectif : rarement j’impose des choses. La décision de partir sur un aspect tactique, la rigueur et les options de jeu sont partagées collectivement avec le groupe. Je suis exigeant avec mes joueurs, mais je pense qu’ils en ont besoin. Quand je baisse un peu d’intensité, ils sont demandeurs, et c’est ça qui me plaît, j’ai l’impression d’être utile pour eux.

« Le but, c’est de partager »

Le stade de Clos Gastel. Photo Dinan Agglomération.

Ce projet collectif, comment se matérialise-t-il ?
Par exemple, j’aime bien finir les entraînements du mercredi soir par des petites oppositions, avec des mi-temps de 15 minutes, et proposer deux choses complètement différentes sur les deux mi-temps. Après, on se pose, les joueurs me donnent leurs points d’attention et des bons de commande. Et le vendredi, à la mise en place, j’en tiens compte. Tout ce qui est organisationnel et logistique est aussi partagé avec eux sous forme de sondage : si on doit partir plus tôt, si on mange chez nous ou sur la route, etc. Je prends rarement des décisions tout seul car sont les joueurs qui sont sur le terrain. Ils partagent les options tactiques, les choix, les différentes options que l’on peut avoir avec des plans A et des plans B en match, j’adore les systèmes avec et sans ballon. C’est ça, le vrai projet collectif. Notre groupe WhatsApp fume ! Je leur envoie plein de vidéos, des retours de match, je leur demande ce qu’ils en pensent. Le but, c’est de partager. Après, il y a certainement des choses que l’on ne fait pas bien, mais le but est que les joueurs soient épanouis dans un projet collectif et qu’ils progressent sur le plan de l’état d’esprit et de la culture foot.

As-tu des coachs qui t-inspirent ?
Je me nourris de tout le monde, je regarde beaucoup de matchs, surtout le championnat de France, dont je suis fan. J’aimais beaucoup l’animation de Franck Haise à Lens l’an passé, notamment à Bollaert : c’était l’exemple type de ce que j’aime comme football, et c’est ce que j’ai retrouvé à Reims pendant 20 minutes face au Havre, avant que les Normands ne terminent à 10 (dès la 21e minute), ce football total, avec beaucoup de phases de transitions mélangées à des temps de préparation, d’intensité dans les duels, un pressing haut. J’aime ce foot où ne laisse pas trop respirer l’adversaire, et nous, on est un peu comme ça, à défendre en marche avant, parce qu’à Dinan, on n’a pas les qualités pour défendre bas, on rend 10 centimètres à toutes les équipes sur le plan athlétique, et en termes de vitesse, les autres vont plus vite que nous. Notre leitmotiv, c’est « pas de regret ». Il n y a pas de vérité dans le foot : j ai parfois critiqué des équipes qui se contentaient du minimum, qui jouaient bloc bas, mais je me suis aperçu que, en fait, si ces équipes là sont convaincues que c’est comme ça qu’elles devaient jouer, alors il fallait qu’elles jouent comme ça, qu’elles aillent au bout de leur idées. Je ne critiquerai plus ça. Il faut jouer avec ses convictions.

« Le foot, chez moi, ça se vit en famille »

En National 2, tu goûtes au professionnalisme : le football peut-il devenir ton métier plus tard ?

Stéphane Lamant sous le maillot du CS Sedan Ardennes, en CFA2, saison 2000-2001. Photo Philippe Le Brech.

D’abord, je précise que la plus importante de mes trois vies, c’est la vie familiale. Ma famille est pleinement impliquée dans ma vie sportive. Mon fils Noah (17 ans) est féru de coaching, de management : d’ailleurs, il entraîne déjà ! Mon épouse et ma fille viennent à tous les matchs à domicile. Le foot, ça se vit en famille, ce ne serait pas possible autrement. J’ai eu des sollicitations mais le facteur limitant, c’est d’être à plein temps. Si je n’ai pas basculé jusqu’à présent, c’est pour deux raisons : 1. mon diplôme ne me permet pas d’aller au dessus du N2, donc je ne vais pas m’inventer une vie ailleurs, en faisant déménager toute ma famille, pour être au même niveau; 2. Le club de Dinan-Léhon : ici, je suis avec des gens vrais, humains. Je me retrouve complètement dans ce club-là et je suis épanoui au Crédit Agricole, un groupe de 1800 personnes, où je connais les 3/4, je prends du plaisir. Je « switche » de l’un à l’autre. C’est un équilibre, et peut-être que j’en ai besoin. Alors, peut-être que dans un monde parallèle j’aurais rêvé d’en faire mon métier, mais voilà, aujourd’hui, ma famille a tellement d’importance que je gagnerais peut-être en termes de football, mais je perdrais d’un point de vue familial, parce que je sais que ce sont des vies complètement différentes quand vous allez à un niveau au-dessus. Mon épouse Céline est épanouie dans son métier – elle est responsable communication dans une grosse entreprise (le groupe Roullier) et aussi professeur de danse -, mes enfants, Noah et Lycia (14 ans) vont avoir besoin de moi dans leurs études et le soutien que je peux leur apporter, ne serait-ce que financier, je ne veux pas louper ces étapes là. On partage cette vie à 100 à l’heure. On adore se retrouver, partir en vacances ensemble. Je ne dis pas que je le ferai jamais, on ne peut pas fermer la porte, mais peut-être que l’opportunité dont je rêvais n’est pas encore arrivée; et si elle se présente, il faudra qu’elle coche toutes les cases que j’ai évoquées. Je suis heureux dans ma vie aujourd’hui, je prends du plaisir à mon niveau, je n’ai pas envie de tout bouleverser.

« Ce n’est que du bonheur »

La ville de Dinan.

Parle-nous de Dinan, la ville, le club…
C’est extraordinaire comme ville ! Elle est située à 20 km de Saint-Malo, dans les terres, avec un château fort. C’est touristique. Elle a des rues piétonnes à pavés. Le club, lui, est un club populaire, avec des vrais gens du cru, qui vivent pour leur club, et des partenaires financiers fidèles, qui sont à notre image, qui sont dans tous les secteurs d’activités (comme le monde agricole, le bâtiment, l’hôtellerie-restauration), avec des valeurs importantes de travail, de fidélité et de courage. Le club est à cette image. On a beaucoup de personnes qui bossent 40h par semaine et dont le bonheur est de venir au stade le week-end, où 800 personnes sont régulièrement là cette année, sur 8000 habitants (11 000 avec Léhon). Le club a beaucoup d’humilité, il essaie de se structurer avec ses moyens, et progresse à son rythme. Aujourd’hui, on est 5e en National 2 et qualifié en 32e de finale de coupe de France : j’espère que les gens réalisent que ce que l’on est en train de faire est exceptionnel. Après, certainement que l’on a eu beaucoup de réussite sur cette première partie de saison, on en est conscient, on sait qu’on va souffrir en 2e partie de saison, mais égoïstement, on a envie de profiter de tout ça, parce qu’il y a 4 mois en arrière, aucun des 23 joueurs n’auraient misé sur ça, ni le staff d’ailleurs. Ce n’est que du bonheur.

Le stade de Clos Gastel. Photo Dinan Agglomération.

Dimanche, ce sera la première fois qu’une Ligue 1 (Reims) viendra jouer chez vous, à Clos Gastel…
Sportivement, on est content de jouer chez nous, où on n’a plus perdu depuis mai 2022 ! Cela fait 18 mois qu’on est invaincu à Clos Gastel, c’est exceptionnel ! Mais il y a des contraintes : les capacités d’accueil ne sont pas énormes, notamment avec le cahier des charges de la FFF. On va se retrouver avec 400 places assises et le reste en pourtour (la rencontre se disputera devant 2700 spectateurs, à guichets fermés). Tout le monde voulait que l’on joue au Clos Gastel, c’est le premier 32e de finale ici, alors qu’il y en a eu deux avant, dont celui contre Brest, mais c’était à Saint-Brieuc. Cette fois, on aura la saveur du match à domicile, même si on avait pensé un temps jouer à Guingamp ou à Rennes. Mais on n’a vu que ce n’était pas possible et pas rentable un dimanche soir (coup d’envoi à 17h30). Le coté raisonnable a pris le dessus chez le président.

Qu’as-tu retenu de cette élimination aux tirs au but face à Brest (L1) il y a 2 ans, en 32e de finale ?
L’aventure humaine. On avait passé deux mois ensemble. On avait éliminé Caen (L2) aux tirs au but, c’était déjà exceptionnel, et aussi Saint-Malo le jour de mon anniversaire, dans un derby, le 27 novembre. Contre Brest, ce fut l’apothéose. On a été héroïque à 10 contre 11. Lors de la séance de tirs au but, qui est resté dans les annales, on a pensé à chaque fois qu’on allait se qualifier parce qu’on tirait en premier et Brest devait marquer : ils ont eu un mental d’acier pour le faire à chaque fois. Ce qui est beau aussi, c’est qu’on avait emmené tout le club derrière nous. Il y avait une union. Malgré l’élimination, on avait ce sentiment valorisant d’avoir tenu tête à un club de Ligue 1. On avait eu beaucoup de reconnaissance. Là, avec Reims, je pense que le curseur est un cran au-dessus si l’on compare la situation de Brest au moment où on les avait joués. Malgré tout, on va mettre en place un projet de jeu pour les embêter même si je dois dire que Reims, que j’ai regardé jouer récemment – entre autres – contre Le Havre (1-0), m’a impressionné dans le pressing et dans l’intensité. Déjà, affronter une Ligue 1, c’est dur, mais là, en plus, une Ligue 1 qui est en marche avant, qui veut gagner tous ses duels, difficile de faire beaucoup plus compliqué. Quand je vois leur coach, Will Still, qui est sans cesse derrière eux, sa façon de pousser ses joueurs, je me dis qu’avec lui, impossible qu’il nous prenne à la légère. Il va vouloir tout de suite mettre en place une équipe pour le mois de janvier, par rapport aux absents de son effectif partis à la Coupe d’Afrique des Nations et le coupe d’Asie. Notre chance est infime mais on a la naïveté de croire qu’elle existe, alors… let’s go !

Dimanche 7 janvier 2024 – coupe de France (32e) : Dinan-Léhon FC (N2) – Stade de Reims (Ligue 1), à 17h30, stade de Clos Gastel, à Dinan.

Texte : Anthony BOYER – aboyer@13heuresfoot.fr – Twitter @BOYERANTHONY06

Photo de couverture : Philippe Le Brech

Photos : Philippe Le Brech (sauf mentions spéciales).

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Christophe Pélissier, l’enfant du pays devenu entraîneur pro, Cédric Garcia, le gardien/commercial reconverti directeur sportif, et Jean Boyer, l’avant-centre et bonne pioche du recrutement, évoquent l’US Revel (Régional 1) et ce 32e de finale historique face au PSG, dimanche soir, à Castres.

Après la qualification face à Blagnac. Photo Idriss Imelhaine.

La vidéo a fait le buzz. Et tourné en boucle sur les réseaux sociaux. On y voit les joueurs de l’US Revel, fraîchement qualifiés pour les 32es de finale de la coupe de France après une série de tirs au but victorieuse face à Blagnac (National 3), « mater » le tirage au sort tous ensemble, après avoir dégusté un bon couscous offert par un partenaire, et ouvert les cadeaux.

Et puis, la magie du père Noël a fait son oeuvre. PSG ! La cerise sur la bûche. La scène de liesse qui a suivi l’évocation du nom de l’adversaire des joueurs de Régional 1 restera comme l’une des images fortes de l’édition 2023-24 de la Coupe de France. Qu’importe le résultat du match dimanche soir au stade Pierre-Fabre (20h45 en direct sur BeIN), sur la pelouse des rugbymen du Castres Olympique, devant 10 000 personnes. Car Revel a déjà gagné. La notoriété, la reconnaissance, le respect, l’amour, le soutien du monde amateur.

PSG, c’est l’Everest

Après la qualification face à Blagnac. Photo Idriss Imelhaine.

Ce match, c’est un peu comme un joueur de tennis de 3e série qui doit affronter Roger Federer au premier tour du tournoi du club de son village. C’est un peu comme passer de quelques longueurs à la brasse dans le lac voisin de Saint-Ferreol, très prisé des locaux, à une traversée à la nage sans aide ni assistance dans la Garonne jusqu’à l’estuaire de la Gironde !

PSG, c’est l’Everest. C’est l’excitation. C’est l’interminable attente. C’est aussi la peur d’être dépassé et, peut-être, d’être ridicule. C’est aussi tout une organisation car on ne reçoit pas l’un des clubs les plus riches du Monde comme on reçoit Luzenac, adversaire en championnat de Régional 1 et ancien club du gardien revélois, Cyril Garcia, du temps d’un certain Christophe Pélissier, fierté locale, parti d’en bas pour arriver jusqu’en Ligue 1 avec Lorient et Amiens.

Après la qualification face à Blagnac. Photo Idriss Imelhaine.

Ce dernier, actuellement entraîneur de l’AJ Auxerre (2e de Ligue 2 à Noël) sera au match. Il l’a confirmé dans l’entretien que vous lirez plus bas. A lire également, l’interview de Cédric Garcia, le frère de Cyril, lui aussi gardien de but et retraité des terrains depuis deux ans. Enfin, retraité, pas vraiment : il a récemment renfilé le maillot pour suppléer son frère, blessé, alors que son emploi du temps est désormais partagé entre sa famille, son métier de commercial à Castres et son nouveau poste de directeur sportif de l’US Revel.

Enfin, le troisième témoin de cette affiche aussi déséquilibrée qu’excitante s’appelle Jean Boyer, un attaquant de 22 ans qui revient de nulle part après trois ans de galère et de blessures… En à peine deux mois – il a signé fin octobre -, le natif de Castelnaudary (Aude), à 20 kilomètres de Revel, a mis tout le monde d’accord en inscrivant 5 buts lors de ses 5 premiers matchs. Et même s’il est resté muet lors des deux matchs qui ont suivi, et même s’il reste encore muet lors du prochain match, son apport s’est vite fait ressentir dans le onze de Nicolas Giné, le coach du club de Haute-Garonne.

Les témoignages de trois hommes – Pelissier-Garcia-Boyer – avant, peut-être, un coup fin ? Tout est permis, même de prolonger le rêve à Revel !

I. Christophe Pélissier : « Je voulais tomber sur Revel ! »

Devinez où l’actuel entraîneur de l’AJ Auxerre a passé les fêtes de Noël ? À Revel ! L’homme qui a fait monter Luzenac, un village de 500 âmes, en Ligue 2 (le club de l’Ariège fut cependant interdit d’accession), Amiens en Ligue 1 à la dernière seconde de son championnat et aussi Lorient en Ligue 1, est né à Revel. A Grandi à Revel. A joué à Revel. A entraîné à Revel. Bref, qui mieux que lui pour évoquer « son » club et ce tirage au sort ? Et vous voulez un scoop ? Le régional de l’étape sera présent à Castres pour ce match face au PSG !

Christophe, si je vous dis Revel…

Christophe Pélissier, la saison passée, à Nice, avec Auxerre. Photo AJ Auxerre

Bien sûr que ça me parle ! D’ailleurs, j’y suis en ce moment (entretien réalisé jeudi 21 décembre). J’ai gardé ma maison ici. Je suis né ici. J’ai commencé le foot ici et j’ai passé 25 ans au club comme joueur et entraîneur. J’y ai ma famille et des amis.

Du coup, vous revenez souvent ?

C’est dur de revenir souvent à cause du métier. J’y passe une partie des vacances d’été et d’hiver, comme là. En général je viens deux fois dans l’année. Cette année, je suis aussi venu pendant une trêve internationale.

Oui, vous étiez en tribune en début de saison en championnat…

Je suis venu voir un match, le premier de la saison. J’avais des choses à faire à Revel, j’en ai profité. J’avais trouvé l’équipe très cohérente.

« On sent un groupe, une équipe de copains »

C’est comment, Revel, comme ville ?

C’est une petite bourgade de 10 000 habitants entre Toulouse et Carcassonne, très agréable à vivre, surtout l’été, avec un lac très prisé des Toulousains et aussi des touristes, le lac de Saint-Férreol.

Vous diriez que Revel est plutôt une terre de foot ou de rugby ?

Photo AJ Auxerre

Une terre de foot quand même. Quand mon père jouait dans les années 60/65, le club était en CFA (équivalent de la D3 à l’époque), le plus haut niveau amateur. L’US Revel a toujours été un bon club de niveau régional. La ville a aussi eu son club de rugby en 2e division. Après, contrairement à Castres, où le foot a du mal à émerger, où il y a le Castres Olympique (rugby) que tout le monde connaît, ici c’est vraiment égalité entre le rugby et le foot. Chacun a son histoire.

Vous avez porté le maillot de Muret, Carcassonne, mais c’est à Revel que tout a commencé, n’est-ce pas ?

Oui, j’ai tout le temps joué à Revel, depuis tout petit, et j’ai commencé en seniors DH à 16 ans avant de partir à l’âge de 24 ans à Muret, en National. J’ai entraîné l’école de foot, des débutants aux minimes, j’ai pris en mains les seniors de Revel quand je suis revenu après 4 ans à Muret et 1 an à Carcassonne. Je pense que j’ai dû entraîner toutes les équipes. J’étais aussi éducateur sportif à la ville de Revel, où je m’occupais du sport dans les écoles et d’une classe foot 6e et 5e.

Vous connaissez encore des personnes à l’US Revel ?

Oui, beaucoup de gens sont encore là. Je connais les anciens dirigeants bien sûr, et aussi les nouveaux. En revanche, c’est vrai, je connais moins l’équipe de Régional 1, mais je connais quand même Cyril (Garcia), le gardien, que j’avais à Luzenac, Josuah, le frère de Ande Dona Ndoh, et quelques joueurs d’ici, mais c’est tout. Je suis parti il y a longtemps déjà (en 2006) !

Y-a-t-il une identité, un style, qui se dégagent ?

Photo AJ Auxerre

Non, il n’y a pas un en particulier; à ce niveau, en Régional 1, c’est difficile de parler de style, mais le club est familial. Les gens qui jouent à Revel sont de Castres ou Toulouse. Il y a une très bonne unité de groupe, et cela a souvent été le cas à Revel : à notre époque, c’était déjà comme ça. On était une équipe de Revélois, on jouait entre copains. Là, on sent aussi qu’il y a une équipe de copains, un groupe.

Vous serez au match dimanche soir, à Castres ?

Oui. Samedi, la veille, avec l’AJ Auxerre, nous jouons en coupe de France à Nice et dimanche, je pense que je ferai les 7 heures de route entre Auxerre et Castres pour venir. D’autant que notre match de championnat contre Bordeaux a été décalé au lundi de la semaine suivante.

« Je dois tout à Revel »

Revel, c’est l’endroit où vous vous installerez à la retraite ?

Oui, je pense. Mes filles sont à Paris et Bordeaux. Revel, c’est l’endroit où tout le monde se retrouve, la famille, les amis d’enfance. C’est là où sont nos racines.

En fait, vous devez tout à Revel ?

L’équipe de l’US Revel.

Oui, c’est là que tout a commencé ! A 5 ans, j’ai signé ma première licence ! Je me sers de ce que j’ai connu ici, les entraîneurs, les éducateurs que j’ai eus, les dirigeants, tous ceux m’ont transmis les valeurs.

Avez-vous suivi le tirage au sort des 32es ? Comment avez-vous réagi à l’annonce du match Revel-PSG ?

D’abord, le matin du tirage, j’étais déçu de voir qu’Auxerre et Revel n’étaient pas dans le même groupe et ne pouvaient donc pas s’affronter, parce que je voulais tomber sur Revel ! C’était mon voeu le plus cher, de revenir ici. J’avais échangé avec le président le matin… Ensuite, non, le soir, je n’ai pas suivi le tirage au sort, mais j’ai vu après que j’avais énormément de messages sur mon portable. En fait, j’avais juste deux messages de mon président à l’AJ Auxerre et de l’intendant, pour me dire qu’on jouait à Nice. Mais tout le reste, c’était des dizaines de messages pour m’annoncer que Revel était tombé sur le PSG ! C’est incroyable ! Comme quoi, l’histoire… Parce que mon premier match sur le banc d’un club de Ligue 1, avec Amiens, je l’avais joué au Parc des princes contre PSG ! Là, même si je n’y participerai qu’en tant que spectateur, ce sera aussi particulier pour moi.

« Il y a de très bon coachs chez les amateurs »

On vous connaît pour vos parcours avec Luzenac, Amiens, Lorient, et toutes ces accessions, mais peu de gens savent aussi que vous êtes descendus deux fois sur le banc avec Revel…

Alors on est monté deux fois en CFA2 aussi ! Mais on est descendu deux fois, c’est vrai… C’était déjà difficile pour un club comme Revel de tenir en CFA2 (N3) à l’époque, ce n’était pas évident d’exister à ce niveau-là compte tenu de l’organisation du club, des joueurs, dont certains faisaient leurs études à Toulouse.

Vous répétez souvent que vous savez d’où vous venez… et vous venez de Revel !
Oui, je sais d’où je viens. Le foot amateur m’a permis d’être là ou je suis aujourd’hui. J’ai fait du National pendant 5 ans et je connais bien ce championnat, je connais surtout ses difficultés, et je peux vous dire qu’il y a beaucoup de qualité chez les coachs amateurs. Je ne dis pas que c’est plus facile, attention, mais parfois, c’est plus facile de travailler dans des structures professionnelles que dans des structures amateurs, même s’il y a des problématiques différentes à gérer. Récemment, je suis allé voir la réserve de l’AJ Auxerre contre l’AS Furiani en National 2, j’ai vu des choses pensées, structurées. Je sais que certains ont été surpris que je reparte en Ligue 2 cette saison, mais moi, je suis entraîneur professionnel de foot, pas entraîneur de Ligue 1 ou de Ligue 2, et je sais d’où je viens. C’est pour ça, avec la magnifique réforme du football (ironique), il y aura encore quatre staffs en moins en L1 et en L2, donc aujourd’hui, c’est compliqué, surtout que beaucoup d’entraîneurs sont étrangers en L1, et on commence à en voir de plus en plus en L2, ce qui fait qu’il va rester une vingtaine de places pour un entraîneur français dans les deux divisions, c’est tout.

II. Cédric Garcia : « On a déjà tout gagné ! »

Cédric Garcia avec le coach Nicolas Giné. Photo Idriss Imelhaine

Il a l’accent chantant du midi et ça tombe bien, il est midi pile ! Le rendez-vous est fixé depuis quelques jours. Depuis le tirage au sort des 32es de finale, le téléphone de Cédric Garcia fume. Du coup, l’homme aux trois casquettes – commercial, gardien de but sorti de sa retraite et directeur sportif du club – filtre les appels et rajoute des rendez-vous à son agenda déjà très chargé; le nôtre est honoré mais le timing est serré : le frère de l’actuel gardien de l’US Revel, titulaire le temps d’un match cette saison, alors même qu’il avait raccroché les crampons depuis deux ans, a encore des obligations après nous : il doit se rendre dans l’école de sa fille pour une intervention avec quelques joueurs de son équipe.

Cédric Garcia. Photo Pamisire.

A 39 ans, Cédric Garcia a – presque – tout connu à l’US Revel, où il a débarqué à l’âge de 20 ans, et où il a joué pendant 18 ans, dans les cages, avec le brassard de capitaine autour du bras.

En 2022, il a passé le relais à son frère Cédric, avant de reprendre du service, une première fois, quand sa belle soeur a accouché, puis une seconde fois cette saison donc, quand l’ancien joueur de Luzenac, en National, s’est blessé : « C’était juste avant notre 7e tour de coupe contre Montpellier-La Paillade. J’ai joué contre Clermont-L’Hérault, on a gagné, c’est cool ! J’en ai encore un peu sous le pied ! ».

Le Castrais, qui figure toujours sur la feuille de match en coupe depuis le 5e tour, et qui, dans sa jeunesse, a évolué en cadets nationaux à Castres, s’est surtout forgé une réputation en corpo (entreprises), avec les célèbres laboratoires Pierre Fabre, ce qui lui a permis d’être sélectionné en équipe de France corpo, d’avoir un peu de visibilité dans sa région et de se constituer un réseau. « J’avais effectué quelques essais avec des clubs pros du coin mais cela n’a pas abouti. Et puis Christophe Pélissier, alors coach de Revel, m’a appelé. Je ne pensais faire qu’une saison pour mieux rebondir. Finalement, j’ai pris racine ici, je me suis attaché à ce club, j’ai refusé quelques sollicitations et j’y suis resté 18 ans ! »

Cédric, présentez-nous l’US Revel, en quelques mots…

Nicolas Giné le coach. Photo Idriss Imelhaine

C’est un club de 400 licenciés situé en Haute-Garonne, à 45 minutes de Toulouse, à proximité du Tarn aussi. L’éloignement du bassin toulousain peut aussi être un problème en termes de joueurs et de recrutement dans la mesure ou ça fait tout de même un peu de trajet pour venir. On est un club familial, qui vit bien, avec une bonne passerelle entre les seniors et l’école de football : j’attache beaucoup d’importance à ça. Le club est très structuré, sain financièrement, bien géré, ce qui permet d’envisager sereinement l’avenir, encore plus aujourd’hui avec ce qui nous arrive.

« Clairement, la place du club est en R1 »

Vous avez connu la DHR (Régional 2), la DH (Régional 1) et même le CFA2 (National 3) : vous diriez que, pour Revel, le Régional 1 est son véritable niveau ?

Quand je suis arrivé, on était en DH et l’équipe 2 était en DHR, donc ça faisait deux groupes qui pouvait « switcher » facilement. En 2010, alors que l’on n’avait pas la meilleure équipe, on est monté en CFA2 (National 3) avec une bande de copains, malheureusement on est descendu pour un point la saison suivante. Clairement, la place du club, c’est en R1. J’ai aussi vécu deux descentes en R2, mais à chaque fois, on est tout de suite remonté en R1 : ça montre bien que l’on n’a peut-être pas les capacité pour évoluer au-dessus, mais pas non plus en dessous. On est à notre place. Et cette saison, on est 1ers avec un match en retard et encore qualifié en coupe de France.

Du coup, si vous montez en N3, cela voudra dire que le club ne sera pas à sa place ?

Cyril Garcia, le gardien de l’US Revel et frère du directeur sportif, Cédric. Photo Idriss Imelhaine

Comme je l’explique souvent, il faut y aller étape par étape. Il y a 2 ans, on n’avait pas de directeur sportif, il n’y avait pas trop de stratégies sportives bien définies. L’équipe 1 prenait ses décisions dans son coin, l’équipe 2 le faisait aussi de son côté. Ce n’était pas clair. Alors j’ai défini un cadre, des logiques sportives. Pour l’instant, ça se passe bien, on est remonté en Régional 1 cette saison et on a construit un groupe avec des joueurs qui puissent répondre aux attentes du niveau, tout en visant un objectif de moitié de tableau et un maintien rapide. On a recruté six joueurs et les six sont titulaires indiscutables. Ils ont apporté une vraie plus value au groupe déjà présent, ils l’ont redynamisé, parce que certains se laissaient un peu vivre à cause du peu de concurrence. Là, on est premiers, on a un 32e de finale de coupe de France à disputer qui n’était pas prévu, entre guillemets, avec le PSG qui arrive ! Je peux vous dire que je suis content d’avoir engrangé un maximum de points avant ce match parce qu’on sait très bien qu’après PSG, il risque d’y avoir une grosse période de décompression. La chute risque même d’être costaude.

Comment vous situez-vous chez les jeunes ?

Le président Didier Roques. Photo Idriss Imelhaine

On essaie de se structurer, progressivement, ce n’est pas facile de mettre en place des choses. Là, on a instauré une commission sportive chapeautée par trois personnes : Franck Angelini, ancien joueur de Revel (et vice-président), référent foot à 8 jusqu’en U14, le président, Didier Roques (prononcez « Roc »), avec lequel on se voit chaque semaine pour prendre les décisions nécessaires, et moi-même, référent du football à 11. À Revel, on a un bon vivier de jeunes, une belle école de foot. On veut faire monter nos U14 au niveau régional pour créer une dynamique et tirer les autres équipes derrière : le problème, c’est que nos équipes de jeunes évoluent encore au niveau District, donc souvent nos meilleurs jeunes partent dans les équipes voisines pour alimenter les clubs de Ligue et reviennent après chez nous. En fait, on voudrait éviter ce passage-là. Par exemple, Castres, en seniors, ne jouent qu’en Régional 3, mais ils ont quasiment toutes leurs équipes de jeunes au niveau Ligue et automatiquement nos meilleurs éléments sont convoités, sans oublier les clubs de la région toulousaine, Balma, Saint-Orens, Castanet, qui brassent aussi beaucoup de jeunes.

Vous faites du monde en Régional 1 au stade ?

Pour un match « normal », on a entre 50 et 100 personnes. Bon, avec la coupe, on est monté jusqu’à près de 1500 contre Blagnac au 8e tour. C’est énorme. Et à Castres, au stade Pierre-Fabre, face au PSG, on a une capacité de 10 000 places : on perd les 1600 places de pesages qui sont interdites. J’espère que l’on va jouer à guichets fermés. On donne d’abord la priorité à nos licenciés et à nos partenaires. Mais on sent un engouement dans la ville et aussi dans les clubs voisins.

L’équipe est authentique, simple, à l’image du club

Elle est comment, cette équipe de Revel ?

Habib Ouhafsa. Photo Idriss Imelhaine

Elle est authentique, simple, à l’image du club. C’est un mélange de jeunes et de quelques joueurs expérimentés. Je sens que les mecs sont bien. Ils sont sur un nuage depuis le tirage. Mais je le répète, on prépare la chute, on verra comment on va réagir après la coupe. Mon frère a joué à Luzenac et en National 3 à Castanet, et avec son réseau, on a réussi à faire signer d’autres joueurs de ce niveau comme Pierre Ritter et Jonathan Vieu, qui jouaient aussi en N3 à Castanet et qui amènent une vraie plus-value au groupe et apportent leur expérience. Il y a longtemps que l’on n’avait pas senti autant de sérénité dans le groupe, dans le jeu, dans la maîtrise. Avant, on était toujours en train de bricoler, on avait quelques individualités qui sortaient du lot. Là, on a un collectif. On a aussi le défenseur Maecky Lubrano, qui a joué à Pau en National et qui a fréquenté les équipes de jeunes de l’Athletic Bilbao, où il a côtoyé Aymeric Laporte. Il y a aussi Maxence N’guessan, un défenseur central formé au LOSC, qui a joué à Wasquehal, et le frère de Ande Dona Ndoh, l’ancien buteur de Luzenac et de Niort, Joshua Mbuluba Ndoh, qui a un parcours atypique. Tous ces joueurs n’ont pas eu l’opportunité de jouer plus haut.

« On ne vit ça qu’une fois »

Comment se passe l’organisation de ce 32e de finale ?

Pierre Ritter, une des recrues venues de Castanet en N3. Photo Idriss Imelhaine

Honnêtement, les premiers jours, on était noyé. En fait, les jours qui ont suivi le tirage au sort, ça n’a pas arrêté, notamment les sollicitations médiatiques. Le soir du tirage, les joueurs ont regardé la cérémonie ensemble, pendant que mon président et l’intendant se sont rendus sur place. Et puis, PSG est tombé ! Sur le plan émotionnel, ce qui s’est passé, c’était extraordinaire. On ne vit ça qu’une seule fois. Le soir, tu rentres à la maison, il est minuit, tu ne dors pas, tu pleures. Le lendemain matin, je suis allé au boulot, à Castres, j’étais serein, mais j’ai commencé à sentir un peu d effervescence dans l’agence où je travaille, un peu d’engouement, et une heure après, mon téléphone a commencé à sonner, et là, ça n’a plus arrêté. Le soir du tirage, j’ai eu 253 textos ! 253 ! Non lus ! J’ai mis dix jours pour répondre à presque tout le monde !

Cédric Garcia. Photo Pamisire.

On a mis la vidéo du tirage avec la joie des joueurs sur nos réseaux sociaux, elle a été relayée partout ! La secrétaire du club a été prise d’assaut le lendemain, par les médias notamment. Il y a vraiment eu deux ou trois jours avec énormément de sollicitations, et puis, c’est redescendu d’un coup. Après, il a fallu rentrer dans le dur et répondre à la question principale : où va-t-on jouer ? On a pensé à Toulouse avec le Stadium ou Ernest Wallon, mais on avait, il faut bien le dire, une préférence pour le stade Pierre Fabre, le stade de rugby du « CO » : pas mal de nos joueurs sont natifs de Castres, et puis ce n’est qu’à 35 minutes de Revel. C’est un petit chaudron. Le Castres Olympique et la Ville de Castres ont été très réceptifs. Après, il a fallu s’occuper de la billetterie, de la partie sportive et de la partie médias. Pour les médias, on a décidé de mettre tout le monde en lumière, mais pas toujours les mêmes. Je vois bien les appels que j’ai : « Avec les frères Garcia, on tient la belle histoire ». OK. Mais pas question que mon frère et moi focalisions toute la lumière. On veut que ce soit le club dans son ensemble qui soit mis en lumière. On veut montrer la meilleure image possible de tout le club, des plus petits jusqu’aux vétérans.

Jouer à Castres, c’est aussi faire des déçus : vous auriez pu accueillir beaucoup plus de monde à Toulouse…

Le stade Pierre-Fabre, à Castres, accueillera ce 32e de finale entre Revel et PSG.

On va faire des déçus, bien sûr, car on ne pourra pas accueillir tout le monde, mais bon… Il faut voir le côté positif des choses. On est un petit club. On a déjà tout gagné, une image, le respect, la notoriété, et on va gagner une manne financière. Il faut retenir ça. Pas le fait que l’on aurait pu jouer devant 25 000 personnes à Toulouse. Nos gamins sont allés disputer des plateaux dans les clubs extérieurs, tout le monde ne parlait que du match.

Revel, c’est plutôt rugby ou foot ?

Hormis le « Tèf » (Téfécé), qui sort un peu du lot niveau football, on est dans une région « rugbystique », notamment le coin de Castres, avec le CO à côté, club phare du top 14. Après, il y a quand même beaucoup de footballeurs. Pour ma part, je suis natif de Castres, ma société est partenaire du Castres Olympique, je vais régulièrement voir les matchs, d’ailleurs, j’y étais le 31 décembre pour le match contre Perpignan. Et dire que, dans quelques jours, je serai dans ce même stade, et sur le banc ! C’est top !

« C’est la fête du football »

Que représente la coupe de France pour vous ?

Jonathan Vieu. Photo Idriss Imelhaine

La magie. C’est ça le foot amateur ! Aujourd’hui, tous les clubs amateurs de la région s’identifient à l’US Revel. On voit bien que c’est la fête du football. Malheureusement, on est limité en nombre de places. tout le monde ne pourra pas venir. L’essentiel, c’est que nos gamins, nos licenciés, nos partenaires, la ville, les familles, les bénévoles, soient là. On a beaucoup d’enfants de l’école de foot qui sont dans les écoles de la ville, qui ne quittent plus le maillot du club.

Vous aurez quelles couleurs face au PSG ?

On devrait jouer en rouge, short noir, le gardien en jaune, et PSG sera en blanc. D’après nos informations, la délégation du PSG aura 45 minutes après le match pour quitter le stade, ça fait court : parce que j’aimerais bien obtenir un petit moment d’échange dans les vestiaires avec eux et nos joueurs, on verra. Je ne suis pas certain que cela soit réalisable. Ce qui est dingue, c’est que je reçois énormément de gens qui me demandent si c’est possible de voir les joueurs du PSG, y’en a même qui sont prêts à me payer pour passer du temps avec Mbappé !

Le club doit être très sollicité médiatiquement : comment allez-vous faire pour gérer ça à l’approche du match ?

C’est simple, à partir de jeudi soir à 19h, trois jours avant le match, je veux que nos joueurs rentrent dans une bulle : à partir de ce moment-là, c’est STOP ! Plus d’interview, plus rien. On se met en mode match !

III. Jean Boyer revit à Revel

L’attaquant Jean Boyer. Photo Idriss Imelhaine

Pour l’avant-centre de l’US Revel, c’est peut-être – enfin – la fin de la galère ! A 22 ans, le natif de Castelnaudary, à 30 kilomètres de Revel, sort de trois saisons de galères, perturbées comme de nombreux footballeurs amateurs par la Covid-19 mais surtout par une vilaine blessure. Mais tout ça, c’est de l’histoire ancienne.

Aujourd’hui, le solide gaillard (1,83m. et 79 kg) revit à Revel et savoure l’instant. Enfin débarrassé de ses pépins physiques, il rejoue… et surtout, il marque ! « J’avais contracté une blessure à la rotule, un syndrome femoro-patellaire, en août 2020, quand j’étais à Velay (le club de Polignac, à côté du Puy-en-Velay), ça a traîné, ça a tardé à être diagnostiqué, j’ai multiplié les visites chez les spécialistes… Cette saison, ça va ! J’ai pris mon temps cet été pour bien me remettre en forme. Là, je n’ai plus mal du tout. »

Jean entend aussi se servir de cette nouvelle expérience en Régional 1 pour rebondir et retrouver au moins le National 3, comme à Velay FC (2020-2021) et Onet-le-Château, à côté de Rodez (2022-23) où il a finalement très peu joué.

« Je devais signer à Châteaubriant »

S’il a posé ses valises de globe-trotter à Revel (il a aussi joué à Espaly, toujours à côté du Puy, en 2021-2022 et au Puy, en U19 Nationaux, juste avant), c’est un peu par hasard. Sans club après un transfert avorté à Châteaubriant, son ami depuis les classes jeunes à Castelnaudary, Pierre-Antoine Palacios, milieu de terrain de l’US Revel, joue les intermédiaires entre le staff et lui : en octobre, Jean débarque au club pour s’entretenir et s’entraîner. Et ça matche ! « A Châteaubriant, ça ne s’est pas fait au dernier moment, raconte-t-il; j’avais besoin de temps de jeu. Je connaissais Pierre-Antoine (Palacios), avec qui j’avais joué aussi l’an passé à Onet-le-Château, on jouait déjà ensemble à Castelnaudary. »

« La première fois que je l’ai reçu, je l’ai trouvé très timide et réservé, raconte Cédric Garcia, le directeur sportif de Revel. Je me suis dit « comment je vais faire pour l’intégrer ? » et en fait, il passe super bien dans le groupe. Jean, j’apprends à le connaître. Il est très sérieux, très pro. On a eu un « couac » avec un attaquant cet automne, Jean est arrivé à ce moment-là pour s’entraîner, il est resté trois semaines et finalement, on l’a gardé. C’est la belle histoire. Ce type de joueurs, ce sont des bonnes pioches, parce qu’ici, on ne vend pas du rêve. On essaie juste d’avoir du nez, après, il faut que le joueur se sente à l’aise, qu’il soit pris en considération, parce qu’on a quand même de quoi bosser. La R1, ça demande un peu d’exigence. Je prends aussi l’exemple de Pierre-Antoine (Palacios), qui a eu du mal à Onet : or chez nous, clairement, il sort du lot. Je pense que si le joueur est bien, derrière, il te le rend. Pierre-Antoine, on l’a pris en BPJEPS (Brevet professionnel de la jeunesse, de l’éducation populaire et du sport), il fait ses études en parallèle, ses parents ne sont pas loin, donc il y a un équilibre qui se fait. Jean, c’est pareil. »

A 45 minutes de chez lui

Mais si Jean Boyer s’est rapproché à 45 minutes de Bram, dans l’Aude, un petit village où vivent ses parents, ce n’est que pur hasard : « Honnêtement, je connaissais Revel de nom, c’est tout ! C’est vraiment le hasard si je suis là, chez mes parents. Cela faisait six ans que j’étais parti de la région. J’ai joué à Bram jusqu’en U13 avant de partir à Castelnaudary en U15 et en U17, puis au Puy-en-Velay, où j’ai joué en U19 Nationaux. »

S’il est réservé, calme et timide en dehors des terrains, sur le pré, Jean est plus expressif et surtout plus prolifique : lors de ses 5 premiers matchs avec Revel, il a marqué 5 fois ! Comme début, difficile de faire mieux. Et même s’il n’a pas marqué lors des deux matchs suivants, en championnat face à Pibrac (0-0) et en coupe face à Blagnac (1-1), il a déjà gagné le respect de son staff et de ses coéquipiers. « J’ai signé ici le 23 octobre et quelques jours après, j’ai enchaîné directement par un match en coupe contre Montpellier – La Paillade (R1). Je suis rentré à l’heure de jeu et je marque à la dernière minute, le but de la qualification, 1 à 0, chez nous, ça m’a permis d’enchaîner les matchs derrière. »

« J’aime bien la pression »

Aujourd’hui, son nouveau club est leader en Régional 1 avec un match en moins, et qualifié face au PSG en 32e de finale de la coupe de France. Tout roule. Ou presque. Seule ombre au tableau, Jean a manqué son tir au but dans la fameuse séance au 8e tour face à Blagnac (N3) : « Mais il ne faut pas le dire, plaisante-t-il ! Cela faisait longtemps que je n’avais pas loupé un « peno », pourtant, je n’avais aucune pression, on a avait deux tirs au but d’avance, il restait deux tireurs de chaque côté, mais le gardien l’a arrêté ! Bon, ça va que derrière, mon coéquipier (Joshua Ndoh) a fait le travail ! En fin de compte, tant mieux si j’ai loupé, comme ça, j’ai remis les compteurs à jour, et puis moi, j’aime bien la pression ! Ce match contre Blagnac, joué devant 1000 ou 1500 personnes, était équilibré, mais franchement, on n’a pas volé la qualif ! On a une équipe plutôt expérimentée, avec pas mal de joueurs autour de la trentaine, et deux ou trois joueurs de mon âge, dont Pierre-Antoine. Notre gardien, Cyril Garcia, a connu les belles années de Luzenac en National, il est très bon ! On a quelques joueurs qui ont joué en N3 et aussi Maecky Lubrano, défenseur central ou latéral, qui a connu le National à Bayonne et Pau. Après, dans le jeu, on est capable d’avoir de bonnes phases avec le ballon et on est capable aussi de faire mal sur les longs ballons. »

« Je vais demander les crampons de Mbappé ! »

Photo Idriss Imelhaine

Evidemment, depuis ce fameux lundi soir du tirage au sort, sa vie, comme celles de ses coéquipiers, comme celle du club dans son ensemble, a changé : « Tous les joueurs ne pensent qu’à ça ! Les deux nuits qui ont suivi le tirage, j’ai eu du mal à dormir, mais là, ça y est, c’est passé. Maintenant, on ne pense qu’à la préparation du match. On a 0,5 % de chance de passer, on sait très bien qu’on peut en prendre 10, mais on va s’accrocher. On n’est pas nombreux à y croire, c’est sûr. Je vais acheter des places, pour en faire profiter les collègues et mes parents. J’ai même des amis du Puy-en-Velay qui veulent venir. Beaucoup de mes coéquipiers vont demander le maillot de Mbappé, moi, je vais demander ses crampons, ça vaut cher (rires !). L’an passé, apparemment, en 32e de finale, Pays de Cassel, qui avait joué contre eux, avait été sondé à l’avance pour savoir quels maillots ils voulaient; par exemple, s’il y avait 20 demandes pour Mbappé, le club préparait 20 maillots de MBappé ! »

Dimanche 7 janvier 2024 – coupe de France (32e) : US Revel (R1) – PSG (Ligue 1), à 20h45, à Castres, stade Pierre-Fabre. En direct sur BeIN Sports.

Le match se disputera à guichets fermés (plus aucune réservation possible). Une fan zone est organisée à la salle Nougaro, à Revel, à 20h, dimanche soir (650 places maximum), sans réservation.

Texte : Anthony BOYER – aboyer@13heuresfoot.fr – Twitter @BOYERANTHONY06

Photos : Idriss Imelhaine, Pamisire, US Revel, AJ Auxerre et DR.

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