Le coach charentais le dit lui-même : il est « impulsif et volcanique ». Sur le banc, il renvoie parfois une image éloignée de celle qu’il affiche au quotidien, et qu’il combat. Son expérience et son admission au BEPF, où il s’enrichit et revisite les outils de formation, doivent l’aider à progresser. Après tout, à 54 ans, il n’est jamais trop tard !

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Photos : ACFC

David Giguel est né un vendredi 13. Mais cela n’a rien à voir avec le football et cela n’a eu aucune incidence chez lui en termes de malchance ! « Je considère même que ça m’a porté bonheur, et ma belle-mère est né un vendredi 13 aussi ! » Quand on lui demande son âge (54 ans, 55 le 13 novembre prochain), il aime bien raconter cette anecdote. Parce que ça l’amuse. D’ailleurs, au cours de cet entretien matinal de près d’une heure en visio – rendez-vous à 7h15 devant l’ordi, café à distance ! -, le natif de Louviers (Eure), une petite ville de 20 000 habitants située entre Rouen et Évreux, a semblé bien s’amuser.

Détendu, convivial, ouvert, cool, David Giguel a souvent rigolé, à la fin d’une question, ou à la fin d’une réponse. Un petit moins quand même lorsque l’on a abordé son caractère « impulsif et volcanique » – c’est lui qui le dit – notamment sur le banc, et l’image qu’il pouvait renvoyer.

Au fil de l’entretien, débuté par le « tac au tac », histoire de raviver ses souvenirs de joueur et aussi d’entraîneur (1), les membres de son staff technique sont arrivés et se sont installés dans le bureau pour préparer la séance du matin (2). Cela aurait pu rendre la suite de notre entretien moins « intime » mais leur présence n’a en fin de compte eu aucune incidence sur son côté naturel. Le coach d’Angoulême, qui répète souvent « C’est top », est resté tel qu’il est : cash. Jamais il n’a manipulé la langue de bois.

Angoumoisin jusqu’en 2028

En février dernier, le Normand, arrivé sur le banc de l’ACFC (Angoulême Charente Football-club) en 2021, a signé un nouveau bail qui le conduira – en principe – jusqu’en 2028 ! Ce qui ferait une belle longévité de 7 saisons au stade Lebon. Un septennat ! Et c’est déjà beaucoup, surtout dans le contexte actuel. Mais avec l’obtention de son diplôme professionnel en 2026 – il suit actuellement la formation du BEPF à Clairefontaine (3) -, qui dit qu’il n’aura pas des envies d’ailleurs ? Des envies de plus haut ? La question lui a été posée. Vous lirez sa réponse, plutôt surprenante.

Pour l’heure, le coach est focus sur sa mission : obtenir un maintien rapide en National 2 avec Angoulême, avant de viser mieux et pourquoi pas jouer les trouble-fêtes en haut du tableau. Le départ canon de son équipe, leader après 4 journées (10 points sur 12), a laissé entrevoir de réels espoirs, mais par la suite, le rythme a quelque peu baissé (4 points sur 12), avec deux revers en quatre matchs, dont un à domicile contre Avranches. Franchement rien d’alarmant. Hier soir, l’CFC a renoué avec le succès face à Saint-Malo (1-0).

Interview : « Dès fois, ça sort tout seul ! »

David, dans un an, avec l’obtention du BEPF, vous serez éligible aux étages supérieurs au N2, et vous avez signé à Angoulême jusqu’en juin 2028… Y-a-t-il une ambition de votre part d’aller en pro avant la fin du contrat si l’occasion se présente ? Y-a-t-il un « gentleman agreement » avec Angoulême ?
En fait, quand j’ai signé ma prolongation de 3 ans à l’hiver dernier, le club voulait me donner 2 ans. C’est moi qui ai insisté pour avoir une 3e année. Si le club est satisfait de moi, si les résultats sont bons, si on a envie de continuer l’aventure ensemble, je ne vois pas pourquoi je quitterais Angoulême en cours de contrat. L’idée, c’est que l’on aille ensemble au bout, qu’on mette tout ce qu’il faut pour avoir les meilleurs résultats possibles.

Après, si je suis allé au BEPF, ce n’est pas uniquement pour entraîner une équipe professionnelle, c’est aussi pour chercher des contenus de formation, car cela faisait longtemps que je n’en avais pas suivis, même si au Qatar j’ai eu des possibilités de le faire, mais depuis mon retour en France (en 2014, à Dieppe, en CFA), je n’ai plus eu de formation. Et puis je pense que le BEPF sera un diplôme peut-être pas obligatoire mais nécessaire pour garder du boulot aussi en National 2, parce qu’on voit bien qu’il y a beaucoup d’entraîneurs qui sont allés au BEPF lors des dernières sessions et qui sont aujourd’hui en N2, en N3, voire sans club.

Voilà, quelque part, c’est comme d’aller au bout du process, j’ai passé tous les diplômes, à partir du « formateur ». Je sais aussi que quand on arrive à mon âge, même si je considère que je suis encore jeune, des opportunités pour aller en Ligue 1 ou en Ligue 2, si ce n’est pas adjoint, il va falloir que je me dépêche, que j’ai beaucoup de réussite, que les planètes s’alignent rapidement, parce que c’est compliqué d’aller dans ce monde-là. Je suis bien à Angoulême. Après, dans le foot, vous savez très bien que ce sont les résultats qui conditionnent tout. Donc demain, si on est amené à avoir de mauvais résultats, on verra ce que décide le club ou ce que l’on décide peut-être ensemble ou alors ce que je décide tout seul si je sens qu’il y a eu une usure. Mais aujourd’hui, ce n’est pas d’actualité. Je viens chaque matin au club avec autant d’envie et de passion.

Et de très bonne heure apparemment…
J’arrive toujours entre 7h et 7h30. On démarre à 7h30 / 7h45. On a des journées denses. Le soir, selon les gars, selon les emplois du temps, on part entre 17h30 et 19h30.

Comment ça se passe avec les collègues au BEPF ? En connaissiez-vous certains déjà ?
Je connaissais Stef’ Dief (Le Puy, National) et Stef’ Masala (Chambly, N2, ex-entraîneur des Herbiers et finaliste de la coupe de France en 2018), que j’avais croisés en National 2. Je connaissais de nom ceux qui étaient dans les clubs pros. Je suis souvent avec Gueïda (Fofana) qui est Normand comme moi, on s’est un peu plus rapproché, je ne le connaissais pas, on est souvent l’un à côté de l’autre. Mais tout le monde est très ouvert, désireux d’apprendre, que ce soient ceux qui viennent du monde amateur ou du monde pro comme Damien Perinelle, Jordan Galtier ou Gueïda. En fait, dans cette session, tout le monde a envie.

Débuts d’entraîneur à Marmande

Ce métier d’entraîneur, c’est venu comment ?
En fin de carrière, j’ai joué en CFA (N2) à Dieppe mais j’avais envie d’autre chose, et le club de Marmande cherchait un responsable technique des jeunes et aussi un entraîneur pour sa réserve, qui était en DSR (Régional 3) à l’époque. J’ai passé deux entretiens, j’ai été pris, et c’est là que j’ai pu me consacrer à l’encadrement, même si au départ j’avais la double casquette d’entraîneur-joueur en réserve. On est monté de R3 en R2 (DHR).

C’est donc là qu’est vraiment venue cette envie d’entraîner ?
J’ai passé le Brevet d’État à 23 ans quand j’étais joueur au FC Rouen, et puis Daniel Zorzetto, le coach, avait imposé que les joueurs du centre de formation encadrent des équipes de jeunes. Je me suis pris au jeu, ça m’a plu. Et dans les clubs où je suis passé ensuite, j’ai continué. C’était naturel pour moi ensuite de me diriger dans cette voie.

Vous avez connu pas mal de coachs, certains vous ont forcément marqué…
Il y a toujours des choses bien à prendre chez tous les entraîneurs et d’autres choses que je ne ferais pas non plus, mais celui qui m’a vraiment marqué, parce que je l’ai eu au centre de formation puis en pro, à Rouen, c’est Daniel Zorzetto. D’autres aussi m’ont marqué, comme René Le Lamer, Nasser Larguet, un formateur exceptionnel et un mec top aussi. Même quand j’étais à Doha, j’ai rencontré des top coachs, des Hollandais, des Portugais. J’ai pris des choses chez chacun d’eux et j’essaie de les remettre à ma sauce. Je ne me suis pas quelqu’un qui se dit, « Le foot c’est comme ça et pas autrement, pour réussir, il faut prendre cette voie-là », non…

« J’aime ce que fait Franck Haise »

Qui sont vos inspirateurs aujourd’hui ?
J’aime ce que fait Franck Haise (Nice), ce que fait le coach de Strasbourg Liam Rosenior aussi, ce que fait Gasperini à Rome et déjà ce qu’il faisait à l’Atalanta Bergame, Guardiola, Klopp… C’est ça qui est bien dans le foot, il y a plusieurs moyens de réussir, d’obtenir des résultats. Je m’inspire de tous les mouvements, je les remets à ma sauce, avec l’idée que mon équipe soit la plus performante possible dans le plus de domaines possibles afin d’être le plus imprévisible possible.

C’est pour ça que vous aimez bien surprendre vos adversaires, que vous n’êtes pas figé sur un système ?
C’est vrai que je ne joue pas tout le temps avec le même système (rires). Après, on peut mettre un système sur le papier et ensuite, tout dépend comment on l’anime. Il ne faut jamais oublier que ceux qui font les résultats, ce sont les joueurs. Pas le coach. Les joueurs sont les plus importants. J’avais un débat justement avec Francky (Haise) quand on était joueur à Rouen (lire le « Tac au tac » plus loin), il me disait qu’il fallait que l’entraîneur soit bon, qu’il soit pour 40 % dans les résultats de son équipe, et je lui disais qu’avec 20 %, déjà, c’était bien. Je crois que depuis, il est d’accord là-dessus. Si tu n’as pas les joueurs, tu peux être Garcimore (un magicien dans les années 70 célèbre à la TV, Ndlr), il faut être capable de développer et de tirer la quintessence de ton groupe de joueurs, mais au bout d’un moment, il y a des limites quand même.

Vous n’auriez donc pas de système préférentiel ?
J’aime bien le 4-3-3 quand même, avec une pointe basse, mais parfois, je fais autre chose, par rapport à ce que j’ai vu dans la semaine aux séances, ou par rapport à l’adversaire. On a beaucoup joué comme ça cette année, mais j’ai le souvenir aussi que, la saison passée, au Puy, on a joué avec six défenseurs (rires), quatre dans l’axes et deux sur les côtés, et ça avait beaucoup énervé Stef’ Dief, le coach (camarade de promotion cette année au BEPF). On avait eu beaucoup de réussite et un grand gardien ce soir-là, on avait gagné 1 à 0 à la dernière minute sur penalty !

« Ce n’est pas l’image que je veux renvoyer »

Soir de victoire de l’équipe de National 2 !

La transition est trouvée : vous aviez énervé le coach adverse mais parfois, c’est vous qui êtes énervé, excité sur le banc… Avez-vous conscience que l’image renvoyée au bord du terrain n’est pas forcément toujours bonne, que votre réputation en pâtit ?
Oui, et ce n’est pas ce que je voudrais… J’essaie de m’améliorer. Je pense que ça va mieux quand même aujourd’hui, mais je ne peux pas vous dire l’inverse, je suis quelqu’un d’assez impulsif, volcanique parfois. J’essaie avec l’expérience de mieux me maîtriser parce que ce n’est pas l’image que je veux renvoyer non plus, d’autant que ce n’est pas comme ça que je suis à l’extérieur. Vous me parliez de l’entraîneur de Grasse (Loïc Chabas), contre qui on a joué la saison passée, eh bien avant le match, on a discuté, ça s’est très bien passé, et pendant le match, c’était beaucoup moins bien (rires).

D’où vient ce côté « impulsif et volcanique » ?
J’étais déjà comme ça quand j’étais joueur, hargneux, avec un caractère pas facile, donc c’est un trait de mon caractère. Est-ce que c’est inné ou est-ce que c’est mon enfance qui a fait que je suis devenu comme ça ? Je ne sais pas. En tout cas, quand je vois le résultat, c’est sûr que je n’ai pas envie de donner cette image. J’essaie de prendre sur moi, d’être beaucoup moins impulsif, de prendre du recul par rapport aux événements qui se produisent sur le terrain. Ce n’est vraiment pas l’image que je veux renvoyer aux autres, aux éducateurs du club, aux gens qui viennent nous voir au stade. J’essaie vraiment de diminuer ce trait de mon caractère. J’aimerais que cela n’arrive plus.

« On doit avoir ce devoir d’exemplarité »

À la formation du BEPF, c’est quelque chose qui est évoqué ?
Oui, on en discute aussi, on a Chloé Leprince, de la FFF (psychologue et chercheure en sciences du sport), qui intervient avec nous, nous responsabilise, nous amène des outils pour que l’on puisse mieux gérer ça, mieux contrôler nos émotions, d’autant qu’on demande la même chose aux joueurs, de contrôler leurs émotions. Et si on veut qu’ils répondent, on doit avoir ce devoir d’exemplarité qui est important, et qui devrait nous caractériser plutôt que d’avoir ces attitudes comme celles évoquées.

Avez-vous déjà vu des images de vous en train de vous énerver ?
Ah oui, oui, plein de fois… En fait, les coachs que tu rencontres avant le match, ce sont des gars comme moi, souvent cool, sympas, alors ça ne sert à rien de s’insulter pendant 95 minutes, de s’invectiver, alors que l’on fait le même boulot, que l’on a les mêmes contraintes, les mêmes problèmes. Quelque part, c’est vraiment con. Par contre, moi, après le match, c’est terminé, je peux discuter avec un coach adverse, j’arrive à switcher, je retrouve le calme, je passe très vite à autre chose. Mais quand même, c’est sûr, il ne faudrait pas faire ça, on est de la même corporation. Quand on se voit dans les formations, ça se passe très bien en plus, on va boire des coups ensemble. Avec Stef’ Dief et Stef’ Masala (entraîneur de Chambly), qui sont à la formation du BEPF avec moi, on s’est « traité » pendant nos matchs, alors que j’échange avec eux en dehors du cadre du match où il y a de la tension; ce sont de supers gars, donc quand quelque part, c’est stupide. J’avais lu l’entretien que vous aviez réalisé avec Stef’ (Dief), parce que je m’étais embrouillé avec lui, et il en parle. Je sais qu’il consulte.

Et vous ? Vous consultez ?
(Rires) Non, non, ni préparateur mental, ni psy, mais je ne dis pas que ce n’est pas bien de le faire, au contraire. Je pense que c’est utile. J’ai eu des entretiens avec Chloé Leprince, elle m’a amené des choses, donc ce serait peut-être une solution. J’essaie déjà de me contrôler, de mettre des mécanismes en place avant les matchs notamment, et même aux entraînements, parce qu’il m’est arrivé d’être volcanique aux séances aussi alors que cela ne servait à rien non plus, il y a d’autres moyens pour résoudre les problèmes. Donc ces outils, j’essaie de les mettre en place. Peut-être qu’un jour, j’irai consulter. Je sais que ça fait partie des méthodes.

« L’image fait partie de la panoplie de l’entraîneur »

Indépendamment de votre caractère, vous êtes quelqu’un qui parle facilement, et sur le terrain, vous parlez aussi beaucoup…
Exactement (rires) ! Je parle beaucoup sur un banc, dès fois ça sort tout seul, alors que ça ne devrait pas !

Mais de trop parler, est-ce qu’il n’y a pas le risque d’énerver aussi vos joueurs ?
Les joueurs disent rarement quoi que ce soit ou ce qu’ils pensent de vous. Il y a toujours cette frontière. Je vous dis, j’essaie vraiment de mettre en place des choses pour m’améliorer, parce que je sais que cela fait partie de la panoplie de l’entraîneur, parce qu’aujourd’hui, l’image est importante. D’ailleurs, pour moi, elle est même devenue trop importante. La communication, l’image, ce que vous renvoyez en dehors de ce que vous mettez en place dans les séances de travail et dans les matchs, c’est vraiment devenu un domaine que l’on ne peut pas négliger; je vois bien qu’il y en a certains qui se vendent plus avec leur image qu’avec leurs compétences.

On a l’impression qu’avec vous sur le banc, affronter Angoulême, c’est un peu comme monter sur un ring de boxe… Et puis, vous l’avez dit vous-même : joueur, vous étiez hargneux; votre équipe est à votre image, non ?
(Rires) Je crois que la boxe, on l’appelle le notre art, non ? Donc les deux sont conciliables ! Je peux avoir une équipe qui met beaucoup d’agressivité dans le bon sens du terme quand elle n’a pas le ballon. Regardez le PSG, dont on parle beaucoup aujourd’hui, c’est une équipe qui instaure un pressing de tous les instants, qui fait beaucoup de « un contre un » dans la moitié adverse du terrain, ce qui fait que si vous n’êtes pas dans le duel, dans le combat, eh bien le ballon, vous ne le récupérez jamais, surtout dans ce type de système. Je peux demander beaucoup de choses dans le duel à mon équipe mais aussi d’être capable de bien utiliser le ballon. Nous, à Angoulême, c’est ce qu’on essaie de faire depuis au moins 3 ans : améliorer nos attaques placées, notre capacité technique d’utilisation du ballon et être capable de déséquilibrer nos adversaires.

« La descente en N3, l’an passé, on y a tous pensé ! »

La saison passée, Angoulême a, à la surprise générale, évolué dans la poule Sud de N2 : c’est quoi la différence avec la poule ouest, que vous avez retrouvée cette saison ?
L’an passée, la chose la plus importante, c’était les déplacements, qui ont vraiment impacté notre fin de saison. Je pense que si l’on avait eu moins de déplacements lointains, on aurait mieux terminé, on aurait attrapé une meilleure place que la 6e. Sinon, le N2 du sud est composé d’individualités que l’on ne retrouve pas dans l’ouest, même s’il y a de très bons joueurs aussi, mais dans le sud, ils en ont plein quoi (rires). Dans tous les clubs, il y a des gars qui peuvent faire des différences, notamment devant. C’est impressionnant. Mais c’est plus équilibré et mieux organisé dans l’ouest, parce que dans le sud, on a vu parfois des équipes au niveau de l’organisation défensive notamment, qui étaient moins bien structurées que chez nous. Après, c’est très dur, très physique, très agressif, sans parler parfois des contextes (rires), c’est du combat, de l’intimidation, c’est le sud quoi (rires) ! J’ai quand même apprécié découvrir d’autres terrains, rencontrer d’autres entraîneurs, d’autres clubs, ça nous a a enrichi.

Votre équipe avait très mal commencé la saison passée, au point d’inquiéter vos dirigeants quant au maintien…
Honnêtement, la descente en National 3, on y a tous pensé. Déjà, lorsque l’on a appris que nous étions reversé dans la poule sud, on a tous accusé le coup. On ne s’y attendait pas du tout, et quand on a vu les matchs s’enchaîner… Quand on a commencé le championnat, on n’a pas gagné pendant nos six premiers matchs, parce qu’on se faisait marcher dessus, dans les duels, dans les attaques rapides, on se faisait « tuer ». On a malgré tout réussi à se mettre au niveau sans modifier l’effectif, cela nous a poussé à activer d’autres leviers, à nous remettre en questions. Il a fallu mettre des choses en place pour que l’on puisse s’en sortir. C’est là que l’on voit la stabilité du club, qui est entouré de personnes bienveillantes, qui ont envie d’avancer ensemble, qui sont alignées. Je pense que si la même situation sportive se produit dans un club un peu « déstructuré », avec des dirigeants pas aussi patients, on peut vite prendre des décisions hâtives, qui ne font pas forcément mieux avancer.

« Il nous manque un petit peu de moyens financiers »

Avec son président Patrick Triaud.

Cette saison de N2, vous la voyez comment ?
Notre démarrage est bon même si on sort d’une contre-performance à Saumur (défaite 2-1), et là, on a ce match contre Saint-Malo (entretien réalisé avant la victoire 1 à 0 face aux Malouins) qui peut nous permettre d’être dans la bonne partie du tableau, ou bien de tomber dans la mauvaise. On est un club stable, sain, avec des gens authentiques. On est aligné avec le directeur sportif (Pierre-Emmanuel Allard) et le président (Patrick Triaud), avec mon staff aussi. C’est essentiel pour obtenir des résultats.

Après on est conscient que pour être sur la même grille de départ que les trois ou quatre grosses écuries du championnat, il nous manque un petit peu de moyens financiers. On sait aussi que ce ne sont pas forcément les gros budgets qui réussissent, mais ceux qui ont de bonnes idées, qui ont envie d’avancer ensemble, qui sont sain. Le club a mis beaucoup de choses en place déjà dans le secteur administratif, au niveau de la formation, au niveau commercial, pour que, si un jour on monte en National, on puisse y rester. Mais il faudrait que les planètes s’alignent.

Les soirs de matchs de N2, le stade Lebon attire entre 700 et 1000 spectateurs.

La Ligue 3 n’est donc pas une utopie, à moyens termes ?
Il y a un projet de stade qui existe aussi à Lebon et qui a été lancé, donc si tout fonctionne bien, il devrait permettre d’avoir des rentrées financières plus conséquentes. A partir de là, bien sûr, l’idée sera de retourner un jour en National ou en Ligue 3 pro, parce qu’Angoulême a déjà connu ce niveau. Cela doit être l’ambition de tout le monde. On aime bien notre stade Lebon, même s’il est un peu vieillissant, parce qu’il a une âme, les gens sont proches. Si le projet aboutit, cela permettra d’avoir plus de rentrées financières et de boxer dans la même catégorie que d’autres clubs en matière de recrutement, en tout cas au départ.

Pour terminer, vous allez au rugby parfois ?
Non. Mais à mon initiative, j’ai appelé l’entraîneur de Soyaux-Angoulême en Pro D2, parce que je voulais voir comment il travaillait, comment il fonctionnait, et s’il y avait des choses à prendre pour nous, c’est important. Du coup, mon staff et moi sommes allés les rencontrer, mais je ne suis pas encore allé voir de match au stade Chanzy.

David Giguel, du tac au tac

Au stade Atlantique, à Bordeaux, cette saison.

Meilleur souvenir sportif de joueur ?
Quand on a affronté l’Olympique de Marseille en coupe de France avec le FC Rouen (en 1993, en 8e de finale, 0-1). On avait perdu sur une erreur d’arbitrage on va dire…

Pire souvenir de joueur ?
Quand on est descendu avec le FCR de ligue 2 en National, en 1994, on n’était pas programmé pour ça mais on avait perdu notre fer de lance à l’inter-saison, Jean-Pierre Orts, et en plus, on est descendu à la dernière journée, alors qu’on n’avait jamais été relégables… Pas top. L’année suivante, en National, En National, on n’avait clairement pas fait ce qu’il fallait pour remonter, il y avait je pense trop de traumatismes liés à la descente, même si cette saison-là Dominique Corroyer avait inscrit 30 buts. Il faut dire qu’on ne le servait pas trop mal, avec Yann Soloy notamment. On avait une belle équipe, mais on n’a pas optimisé le potentiel.

Meilleur souvenir d’entraîneur ?
J’en ai deux. Quand on est monté de National 3 en National 2 avec le FC Rouen (en 2019) et aussi quand on a éliminé Metz (Ligue 1, le 6 janvier 2020) en 32e de finale de coupe de France avec le FC Rouen, 3 à 0. Éliminer un club de Ligue 1, c’est bien, mais en plus, quand il y a ce score… Je le rappelais récemment à mes joueurs, à Angoulême, avant d’aller chez un club de Régional 1 en coupe de France, parce que, cette année-là, avec le FC Rouen, avant de jouer contre Metz, on avait affronté une R1 chez elle et on était passé par la petite porte, et encore, quand je vous dis la petite porte, on l’avait imaginée (rires), on aurait dû se faire éliminer et on s’est qualifié aux prolongations, qui existaient encore. Et après on colle 3-0 à Metz ! La coupe c’est ça !

Puisque l’on parle de la coupe, votre club a rappelé que, depuis que vous êtes à la tête du club, Angoulême a toujours passé au moins trois tours et atteint le 7e tour « fédéral »… C’est une petite fierté, non ?
On essaie de préparer au mieux les matchs, de la façon la plus professionnelle possible, après, OK, on a atteint le 7e tour à chaque fois, mais je me souviens que lors de ma première saison, au 8e tour, on s’est fait taper contre une R2, Panazol, aux penaltys (rires), donc voilà… Personne n’est à l’abri de se faire éliminer par des équipes qui, normalement, sont de niveau hiérarchique inférieur mais qui élèvent leur niveau de jeu (4).

Combien de buts avez-vous marqué dans votre carrière ?
(Rires) Pas beaucoup ! Il faudrait compter ceux que j’ai marqués à l’entraînement pour embellir le tableau (rires) ! J’ai dû en marquer une vingtaine peut-être, ce n’est pas énorme. Je jouais ailier, plutôt excentré droit. J’étais quelqu’un qui bossait beaucoup, qui courait beaucoup, qui faisait beaucoup d’appels, pour épuiser les défenses, qui amenait beaucoup de ballons de but, de centres, mais c’est aussi ce qui m’a freiné. Je n’étais pas capable de tout faire.

Votre plus beau but ?
Contre Laval en Ligue 2, sur un ballon qui arrivait très haut, que j’ai repris de volée du pied gauche, pas en lucarne mais pas loin quand même. Je n’étais pas gaucher pourtant. J’étais remplaçant et je crois qu’on avait égalisé mais on avait quand même perdu 2-1

Pourquoi avez-vous choisi d’évoluer à ce poste ?
Honnêtement, je ne me souviens pas, j’ai dû être positionné là. Mais dans les petites catégories, en foot à 7, je jouais plutôt défenseur central. Au fur et à mesure, j’ai évolué plus haut. Comme j’allais assez vite, on m’a mis sur un côté. A l’époque, il n’y avait pas encore trop de défense à 3, peut-être que le poste de piston m’aurait mieux convenu, parce que j’étais capable de répéter les efforts, assez vite, à haute intensité, mais je ne marquais pas de but (rires), j’étais un peu loin des cages !

Aux côtés d’Anthony Castera, l’attaquant de l’ACFC.

Vos débuts au foot ?
J’ai commencé le football à Val-de-Reuil, dans l’Eure, à côté d’Évreux. C’était une cité nouvelle, construite pour désengorger les cités parisiennes à l’époque. Quand j’y étais, ça s’appelait « Le Vaudreuil ville nouvelle ». J’ai été repéré, j’ai fait équipe de Normandie minimes, on est allé en finale de la coupe des régions, c’était pendant les championnats d’Europe 1984 en France, donc ça nous a permis de jouer un match en lever de rideau à Saint-Etienne, et aussi à Lyon en lever de rideau de la demi-finale Danemark-Espagne, ça m’a permis d’avoir différents contacts. Mais je suis resté au FC Rouen, parce que c’était à côté de chez moi, et parce que c’est là que j’allais voir les matchs de première division. C’est Yves Martin (recruteur au centre de formation du FC Rouen, décédé en novembre 2024), qui m’a repéré. Je suis arrivé au club en U14, en minimes DH, et j’y suis resté onze ans, jusqu’à mes 24 ans.

Qualités et défauts sur un terrain ?
J’allais vite, j’étais compétiteur, avec toujours l’envie de gagner, de me dépasser, mais j’avais un caractère compliqué (rires), un mauvais caractère. J’étais râleur, un peu beaucoup, caractériel, mais j’ai progressé ensuite avec les années. J’ai eu quelques déboires, quelques difficultés (rires). Et je manquais de qualité dans la finition.

Que vous a-t-il manqué pour toucher la Division 1 ?
De la justesse technique dans les derniers gestes, j’avais des qualités physiques, j’étais capable d’enchaîner les courses, j’étais bagarreur, mais pour aller en Ligue 1, il aurait fallu que je finisse mieux les actions que je commençais bien. Après, je pars du principe que l’on a toujours ce que l’on mérite. J’ai quand même joué pendant 10 ans, alors si j’avais eu des qualités pour jouer en Ligue 1, on serait venu me chercher ! Cela n’a pas été le cas, mais c’est déjà pas mal.

Si vous n’aviez pas été footballeur, vous auriez fait quoi ?
Bonne question (rires) ! Je ne sais pas, parce que tout est allé très vite, dès l’âge de 12 ou 13 ans, j’étais dans le circuit, je n’ai pas trop eu le temps de me poser cette question. En tout cas, cette passion du foot m’a vite emporté, dès le plus jeune âge. Et j’ai pu en vivre, ce qui n’est pas courant.

La saison où, joueur, vous avez pris le plus de plaisir ?
On a fait une belle saison à Istres, en National, avec une belle bande de potes, on a loupé la montée en National de pas grand-chose. On jouait plutôt bien, avec René Le Lamer. Les regrets, justement, c’est que j’ai souvent loupé les montées de pas grand-chose (rires).

La saison où, entraîneur, vous avez pris le plus de plaisir ?
J’ai vécu de belles choses à Doha, même si j’ai souvent alterné le poste de directeur de l’académie et entraîneur de différentes équipes, et puis il y avait mon fils avec moi aussi, il avait une petite dizaine d’années. Il y a aussi la montée de N3 en N2 avec le FCR. Quand j’arrive à Rouen, le club avait fini juste au-dessus de la relégation la saison précédente, on est parti un peu dans l’inconnu, le président avait mis un peu moins de moyens, on avait effectué un recrutement un peu plus « régional », mais la mayonnaise avait pris, on avait fait une belle saison, et je monte avec mon club formateur, l’année de ses 100 ans, c’était top.

Avec Frank Haise, il y a 6 ans, quand l’un entraînait Rouen, le club où il se sont connus gamins, et l’autre le RC Lens. Photo FCR 1899

Un coéquipier marquant ?
Franck Haise évidemment. Parce que c’est un ami. Il était en avance à l’époque sur nous au niveau de la maturité et sur beaucoup de choses. C’est devenu non seulement un bon coach mais aussi quelqu’un dont la personnalité fait l’unanimité ; quand on parle de lui, c’est sa bonté, sa gentillesse qui ressortent. Il était déjà « spécial ». Il m’a fait la surprise de venir nous voir à l’hôtel l’an passé le matin de notre match à Cannes, il est resté avec le staff et moi, à discuter, de manière très ouverte, très libre, c’était sympa. Il n’était pas obligé de le faire. On a fait équipe de Normandie minimes et cadets ensemble, il était déjà au FC Rouen quand j’y suis arrivé. On est témoin de nos mariages respectifs.

Du coup, vous regardez ses matchs ?
Oui, oui, tout le temps. De toute façon, je regarde beaucoup de matchs, que cela soit ceux de notre poule en N2 ou au niveau national et international. Ce qu’il met en place en matière de contenu, de jeu, c’est top, et puis « Francky », c’est mon pote, je veux qu’il gagne, qu’il réussisse.

Le joueur le plus fort avec lequel vous avez joué ?
Jean-Pierre Orts, un « phéno », et s’il avait, au niveau de son caractère, été un peu moins « con », comme moi, il aurait joué plus haut, c’est sûr, et puis Karel Jarolim, un international tchécoslovaque.

Le meilleur joueur que vous avez entraîné ?
Jean-Karim Guébé (rires) ! Non, je déconne (rires), c’est mon adjoint, analyste vidéo, il est là, je l’ai lancé en coupe de France de France dans les premiers tours ! Plus sérieusement, ce n’est pas simple. Je dirais Fred Dembi, c’est un joueur que j’ai relancé, à Déville-Maromme en R1, à côté de Rouen, il voulait arrêter le foot. Il a explosé après (Cholet et Orléans en National, Red Star en L2), aujourd’hui il joue en D1 au Maroc, à Agadir. Il nous a beaucoup apporté sur le terrain avec ses qualités de récupération, de percussion.

Un coéquipier perdu de vue que vous aimeriez bien revoir ?
Manu Hutteau. J’ai joué avec lui à Créteil. Je m’entendais bien avec lui.

Un coach perdu de vue ?
Daniel Zorzetto, notre mentor à Rouen. Il était précurseur. En avance sur son époque. Il aurait dû entraîner en Ligue 1. Sa conception du management, ses séances, sa vision du foot, c’était top.

Vous êtes un entraîneur plutôt comment ?
Passionné, exigeant et travailleur.

Angoulême, c’est un club comment ?
Humain, ambitieux malgré tout et authentique. Authentique, c’est vraiment ce qui était ressorti des entretiens que j’avais eus quand j’avais été reçu.

  • (1) David Giguel a joué à : FC Rouen (D2, National), GFC Ajaccio (National) Istres (National) Créteil (National), Le Mans (D2), Royan, Dieppe (CFA). Il a entraîné : Marmande (CFA), Eu (DH), Qatar (directeur technique), Dieppe (CFA), Déville-Maromme (DH), FC Rouen (N3, N2), Angoulême (N2).
  • (2) Le staff est composé de Matteo Cathalot (entraîneur adjoint spécialiste préparation athlétique), Mathieu Couvidat (entraîneur adjoint spécialiste animation du jeu), Jean Karim Guébé (adjoint spécialiste vidéo), Julien Logeais (adjoint spécialiste gardien de but), Alexandre Limousin (entraîneur de la réserve en R1) et Stéphane Roumagne (intendant).
  • (3) La promotion 2025-2026 : Guillaume Allanou, Thierry Debès, Stéphane Dief, Gueïda Fofana, Jordan Galtier, David Giguel, Stéphane Masala, Sylvain Monsoreau, Vincent Nogueira, Damien Perrinelle.
  • (4) Angoulême se déplacera à L’Union Saint-Jean (R1) au 7e tour de la coupe de France (15 et 16 novembre)

 

  • Texte : Anthony BOYER / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : Angoulême CFC
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Le jeune entraîneur (32 ans) du club voisin de Tours est un pur produit de la maison montlouisienne, où il est arrivé à l’âge de 6 ans et où il a grandi. À force de travail, l’une de ses principales qualités, le voilà aujourd’hui aux portes d’un professionnalisme qu’il espère découvrir un jour.

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos : 13HF et FC Montlouis

Reportage réalisé avant l’élimination 1-0 en coupe de France (6e tour) face à l’Union Foot Touraine (N3).

Zakaria Tahri aux côtés du défenseur Alexandre Catro. Photo 13heuresfoot

Parfois, l’histoire est bien faite. Celle qu’a vécu le FC Montlouis en fin de saison dernière, en National 3, est magnifique. Mais à déconseiller aux coeurs fragiles ! On rembobine le film. Il reste une journée de championnat à disputer. Le leader C’Chartres Foot de Vincent Bordot, favori de la poule, reçoit l’OT (Ouest Tourangeau, devenu cette année l’Union Foot Tourraine). Une victoire et c’est la montée en National 2.

Le dauphin, le FC Montlouis, même nombre de points mais devancé au goal-average particulier par Chartres, reçoit Vierzon, une équipe qui lui avait infligé 5 à 0 à la première journée ! Pour Montlouis, qui n’a pas les cartes en mains, les chances d’accession sont infimes. Mais Chartres se viande. Dans les plus grandes largeurs. Défaite 3-1 à domicile ! Dans le même temps, le club de la proche banlieue de Tours s’impose (dans la douleur) 3 à 2. C’est la délivrance ! Le bonheur ! Le rêve ! C’est le National 2 !

Le cruel souvenir de Poitiers

Le FC Montlouis a retenu la leçon et tient sa revanche parce que, un an plus tôt, le club du président Lionel Chica, leader à deux journées de la fin (2 points d’avance sur Poitiers), avaient les cartes en mains pour accéder en National 2.
Mais à l’avant-dernière journée, dans le choc au sommet à domicile face à Poitiers, et alors qu’un nul aurait suffi avant d’attaquer l’ultime ligne droite en bonne position, un but sur penalty du Poitevin Alexandre Durimel, concédé à la 94e, permis aux visiteurs de passer devant, à la fois au score (défaite 2-1) et au classement (un point d’avance pour Poitiers). La dernière journée fut sans surprise. Poitiers et Montlouis s’imposèrent chacun mais c’est le premier qui accéda à l’étage au-dessus.

Quand l’histoire s’inverse…

Soir de liesse, en mai dernier, avec la montée en N2 ! Photo FC Montlouis

Ces deux moments forts, Zakaria Tahri, le (jeune) coach du FC Montlouis (32 ans depuis le mois de juillet), s’en souvient comme si c’était hier. Et dans 40 ans, tout le monde en parlera encore !
Tahri rembobine le film : « Ce dernier match de la saison en N3 et ce mano à mano avec Chartres ? Là, on pense à l’année d’avant, quand on a perdu la montée de manière cruelle chez nous à l’avant dernière journée contre Poitiers, devant 1500 personnes. On avait pourtant fait une saison incroyable, avec 61 points et 19 victoires (sur 26 matchs !), et on ne monte pas ! Cela avait été dur à encaisser, parce que même si ce n’était pas l’objectif prioritaire, même si personne ne nous attendait, on est des compétiteurs ».

La photo souvenir après la montée en N2. Photo FC Montlouis

Finalement, cette année, l’histoire s’est inversée : « En fait, avant le dernier match chez nous contre Vierzon, j’y crois sans y croire. Je suis lucide, je me dis « Chartres va gagner », mais la montée est quand même dans un coin de ma tête, parce que je n’ai pas envie de revivre la même déception que l’année d’avant. Dans tous les cas, on veut d’abord gagner, pour ne pas avoir de regrets, dans le cas où Chartres se fasse accrocher. Et puis, à l’avant-dernière journée, à Orléans, face à la réserve de l’USO, il y a eu un signe… Parce qu’on a marqué à la dernière minute ! Forcément, j’ai pensé à la saison précédente et ce penalty concédé à la 94e contre Poitiers. Pendant le match contre Vierzon, une équipe qui nous pose beaucoup de soucis et qui nous avait battus 5 à 0 à la première journée, on ouvre très vite le score. Et à Chartres, très vite également, le FC OT (Ouest Tourangeau) marque. Et là, on sent quelque chose. Dans les tribunes, les spectateurs suivent les deux matchs en même temps ! Là, j’ai pensé que tout était possible mais Vierzon égalise deux fois contre nous, 1-1 puis 2-2, et ils ont même le face à face du 3 à 2. Sincèrement, s’ils le mettent, je pense que l’on ne revient pas au score… À ce moment-là, un match nul suffisait pour nous puisque « OT » menait 3 à 1 à Chartres, où il y avait un décalage de cinq minutes : c’était la 93e là-bas et nous on était à la 88e, on était à 2-2. On savait que si on marquait un but, Chartres n’allait pas marquer deux fois non plus ! Et on marque le 3e ! Un moment incroyable ! Un but synonyme de montée. C’est la délivrance ! L’histoire est incroyable, elle est belle, parce que c’est mon club, c’est là où j’ai commencé ! »

« Important de mettre une ligne à mon palmarès »

Aux côtés du président Lionel Chica. Photo 13heuresfoot

Tout au long du match, Zakaria suit l’évolution du score à Chartres depuis son banc de touche. Pas simple à gérer. Pas simple de rester également focus sur « son » match, quand on sait que tout se joue à 150 km de là… « On n’avait envoyé personne là-bas. On le suivait sur nos téléphones mais c’était très compliqué, car je voulais vraiment gagner notre match, je ne pensais qu’à ça, parce que si on avait perdu alors que Chartres avait aussi perdu, alors là… »

Zakaria Tahri l’avoue, sur le plan personnel, ce fut également un moment fort : « Pour moi, en tant que jeune entraîneur, c’était important de mettre une ligne à mon palmarès, parce qu’au final, on retiendra que j’ai été champion en National 3, pas que j’ai terminé 2e ou qu’on a fait 61 points ou quoi, non. Ce qui va rester, même dans 10 ou 20 ans, c’est que Montlouis a été champion de N3 en 2025 et qu’il est monté en National 2. »

Zakaria Tahri est comme un gosse à l’évocation de la plus belle page de l’histoire de son club. Un club où il a chaussé ses premiers crampons à l’âge de 6 ans, quand sa maman est venu s’installer en Touraine après le décès du papa, alors que la famille habitait Rennes. « Il est décédé d’un cancer. Ma maman, Samira, avait quitté Léhon (commune rattachée aujourd’hui à Dinan, dans les Côtes-d’Armor), où je suis né, pour se rapprocher de Rennes et de mon père, Mohamed, qui était hospitalisé à l’hôpital Pontchaillou. Après son décès, ma famille, mes grands parents, mes oncles, sont partis à Rennes; ma maman, elle, a voulu se rapprocher de sa famille, en Touraine, d’où mon arrivée à Montlouis. Je suis toujours en contact avec la famille du côté de mon papa. Ils sont venus me voir à Saint-Malo cette saison. Peut-être que certains seront là contre… Dinan-Léhon samedi prochain (reportage réalisé avant le match).« 

Un an en Écosse

Lors de la remise du trophée FFF de champion de N3, à Chauray, en septembre dernier. Photo 13heuresfoot

La carrière de joueur de Zakaria Tahri, milieu de terrain passé par le grand club de Touraine, le Tours FC, pendant 6 ans, dont trois ans au centre de formation avec Bernard Blaquart et Alexandre Dujeux, deux coachs qui l’ont vraiment marqué, se résume à des passages en seniors entre CFA2 (National 3) et Division d’Honneur (Régional 1).

« À mes débuts, en jeunes, je jouais milieu offensif, en 10. Puis au centre de formation, j’étais plus excentré côté gauche en U19, et en seniors, je me suis repositionné, en 8. J’ai fait quelques piges en CFA2 à Tours puis en seniors j’ai joué à Montlouis, Blois, Fréjus/Saint-Raphaël en réserve, Avoine-Chinon, Saint-Cyr-sur-Loire et re-Montlouis, où j’ai arrêté en 2022. J’ai toujours bossé à côté. Sauf durant mon passage à Blois, où là, je ne faisais que du foot. Je travaillais à la communauté de commune comme agent administratif. Là, ça fait 2 ans que je suis à plein temps au foot à Montlouis ».

Zakaria a 28 ans quand il raccroche, persuadé que son avenir est sur le banc : « J’ai décidé d’arrêter de jouer parce que ce n’était plus compatible avec ce que je voulais faire, c’est-à-dire me lancer dans cette carrière d’entraîneur (il est titulaire du DES). J’avais commencé à entraîner à Montlouis quand j’avais 18 ans. J’intervenais chez les jeunes, à l’école de foot, avec les U13. C’était juste après mon passage au centre à Tours, où je n’ai pas franchi le palier pour passer pro. Puis quand j’ai signé à Blois, j’ai continué. »

Dans son CV de joueur, une ligne interroge : Hamilton, au Royaume Uni. « J’ai passé un an en Écosse ! Je suis parti là-bas pour apprendre l’anglais, dans une académie. Je suis un fan du foot en Grande Bretagne. Mais on ne disputait pas vraiment de compétition. C’était un peu comme à l’UNSS chez nous, on faisait des oppositions contre des clubs pros. Pendant cette période, j’ai aussi effectué des essais, comme dans un club anglais, à Brentford (en D2 anglaise à l’époque, le FC Brentford a depuis été promu en Premier League en 2021), par l’intermédiaire d’un joueur français, le gardien Antoine Gounet, que j’avais connu à Tours. On avait sympathisé. C’était intéressant et enrichissant de voir un autre football. Je suis resté une semaine à Brentford, une super expérience ! »

Blaquart, Dujeux, Mouri…

Zakaria Tahri le répète souvent, c’est Bernard Blaquart, un formateur reconnu, dont tout le monde se souvient de son épopée récente avec le Nîmes Olympique en Ligue 2 et en Ligue 1, et Alexandre Dujeux, actuel coach du SC0 d’Angers en Ligue 1, qui sont ses inspirateurs : « J’ai beaucoup appris avec eux mais aussi avec Hamou Mouri, le responsable technique du club de l’Étoile Bleue de Saint-Cyr-sur-Loire, une des meilleures écoles de foot de France ! D’ailleurs, en équipe de France U20, il y a actuellement deux joueurs issus de la formation de Saint-Cyr (Mayssam Benama et Ilane Touré), que j’ai coachés dans ce club, ça vous donne une idée du travail qui y est réalisé. J’ai eu aussi Issiaga Camara, qui est parti à l’OGC Nice (prêté au FC Brommapojkarna, en D1 suédoise) et Christ Letono (Espanyol Barcelona). Ce sont ces trois personnes-là qui m’ont appris mon métier d’éducateur d’abord, d’entraîneur ensuite. »

Quand Montlouis bat tous ses records

Poignée de mains avec le coach de Chauray, Fabrice Fontaine. Photo 13HF

Trois ans seulement après s’être assis sur le banc du FC Montlouis, alors qu’il n’a encore que 28 ans (il est né le 28 juillet 1993), Zakaria passe du National 3 au National 2. La performance est déjà remarquable pour un club, ce n’est pas péjoratif de le dire, de village, plus connu pour son vin blanc AOP que pour son équipe de foot, mais ce qui l’est tout autant, c’est le ratio victoires / nuls / défaites et la marque de fabrique de son équipe, qui encaisse peu de buts… même si c’est plus compliqué en N2.

En trois saisons de N3 sous sa direction, le FC Montlouis ne concède que 17 défaites (en 78 matchs) : 9 en 2022/23, 3 en 2023/24 et 5 la saison passée. C’est peu (21%, soit une défaite tous les 5 matchs). De plus, lors de la saison 2023/24, celle de la montée de Poitiers à la dernière journée, l’équipe bat son record de points : 61 (19 victoires, 4 nuls et seulement 3 défaites). Mais ce n’est pas tout. L’équipe se forge une solide réputation, celle d’être solide défensivement. « C’est un des mes principaux axes de travail. On essaie de concéder le moins de buts possible ».

« Un champion, ça se respecte ! »

Photo FC Montlouis
Photo Noah Gaultier / @_.ng.prod

Là encore, les chiffres sont éloquents : lors des deux derniers exercices en N3, l’équipe n’encaisse que 37 buts en 52 matchs (17 buts en 2022/23 et 20 buts en 2023/24), soit une moyenne de 0,7 buts encaissé par match. « En début de saison, cette année, en National 2, cela a été plus difficile sur ce plan là (déjà 13 buts encaissés en 8 matchs), mais on avait aussi des absents. On a aussi joué à La Roche-sur-Yon (défaite 4-1), une équipe qui m’a fait forte impression, avec un coach, Frédéric Reculeau, qui prône le jeu, que j’avais connu quand il entraînait Luçon. Depuis, on a récupéré des joueurs, et à partir du moment où j’ai toutes mes forces vives, je pense qu’on peut rivaliser avec tout le monde. On l’a montré à la première journée à Saint-Malo (1-1), une équipe très forte individuellement et qui va monter en puissance, et récemment face à Bourges en coupe, que l’on a éliminé en coupe de France (1-0) à l’issue d’un match référence, et en championnat dans la foulée contre Dinan-Léhon (2-0). Je sens que l’équipe progresse. C’est important de retrouver notre solidité défensive. C’est vraiment ce qui faisait notre force à Montlouis sur nos deux dernières saisons. L’an passé, on a quand même fait 15 clean sheet ! Et la saison d’avant 15 aussi. C’était une notion hyper-importante. »

Evidemment, en National 2, c’est plus dur. Car le niveau est vraiment monté d’un cran, avec une adversité bien plus forte, surtout depuis le resserrement du National et de refonte des poules de N2, passé de 4 à 3 groupes. « Je pense que l’on doit respecter un champion de N3. C’est ce que je dis à mes joueurs dans le vestiaire : un champion, ça se respecte. Par contre, on sait qu’on est les petits gaulois de la poule de N2. Ce que je veux, c’est que, dans deux, trois, quatre ou cinq mois, on dise « Ah ouep, Montlouis, c’est du très-très solide ! ». Voilà. Ce respect-là aussi ont doit aller le chercher et on va aller le chercher. On a su se faire respecter en N3, alors qu’on était aussi, entre guillemets, les petits poucets. Quand j’étais joueur à Montlouis, l’objectif, déjà, c’était le maintien, et on n’avait jamais fini plus haut que la 5e place. »

100 matchs sur le banc !

Photo FC Montlouis

Après un début de saison très difficile, le FC Montlouis semble en effet trouver la bonne carburation depuis un mois, comme le montrent ses derniers résultats : deux succès (Locminé et Dinan-Léhon) contre une défaite en championnat, et une belle qualif’ pour le 6e tour de la coupe de France face à l’un des deux favoris de la poule B, Bourges FC (1-0) : « En fait, en National 2, on se rend compte que la notion d’efficacité dans les deux zones de vérité est beaucoup plus importantes. En N3, on pouvait ne pas marquer, ne pas concrétiser nos occasions, mais continuer à espérer dans un match. Alors qu’en N2… Il y a un palier dans la notion d’efficacité. » Au passage, samedi dernier, face à Dinan-Léhon (2-0), le club de la ville où il est né, « Zak », comme l’appellent ses amis, a fêté son 100e match sur le banc, coupe et championnat compris ! Le club lui a, à cette occasion, rendu un bel hommage.

Châteauroux s’est intéressé à lui

Photo FC Montlouis

Évidemment, les résultats du FC Montlouis et, par ricochets, ceux de Zakaria Tahri, n’ont pas laissé indifférent : des clubs se sont intéressés à lui, comme La Berrichonne de Châteauroux, où il a été reçu à l’inter saison. Mais c’est finalement Valentin Guichard, l’ex-coach de Jura Sud, qui a été choisi pour prendre les commandes du club relégué en N2, puis repêché en National.

Le National, le diplôme du BEPF pour entraîner en pro, voilà les prochaines étapes de Zakaria, qui fait partie de cette nouvelle génération émergente de « jeunes » coachs, et qui ne cache absolument pas son ambition : celle d’aller plus haut. Avec le FC Montlouis, forcément, cela sera difficile, mais maintenir son club de coeur en National 2 serait une nouvelle étape très importante dans son parcours. La tâche ne s’annonce pas simple tant Montlouis, fait, un peu comme Chauray, également promu, figure de petit poucet dans cette poule A, aux côtés des Bordeaux, La Roche-sur-Yon, Avranches, Saint-Malo, Angoulême, Bayonne, etc.

Le travail comme exutoire

Photo FC Montlouis

Cette ambition, cette envie d’aller plus haut, Zakaria, réputé travailleur, tient ça de son enfance, marquée par le décès de son papa. Un épisode qu’il évoque sans pudeur : « Je pense que ça vient de ma maman, aide-soignante. Elle s’est tuée au travail à l’hôpital pour ma soeur Soukayna et moi, elle bossait 12 heures par jour pour subvenir à nos besoins, elle nous a inculqués cette envie de réussir, cette valeur du travail. C’était difficile pour elle, seule avec deux enfants. Ma mère ne nous disait pas que les fins de mois étaient difficiles parfois, elle nous a toujours caché ça. Quand je vois la réussite de ma soeur… Elle a un super-job. Elle est manager dans une clinique d’esthétique, elle a bossé pour L’Oréal dans le mannequinat, elle a été manager de plusieurs boîtes déjà. Moi je n’ai rien fait à côté d’elle, mais je vis de ma passion, le foot. En fait, on s’est réfugié derrière le travail. Moi, je fais 50, 60 et même 70 heures parfois par semaine. Je ne m’arrête jamais. La saison passée, je suis même allé jusqu’à faire un malaise pendant un match, j’étais très fatigué. Aujourd’hui, ma maman suit mes résultats mais elle me laisse tranquille, elle sait que le foot, c’est mon truc à moi ! Ma compagne, Myriam, elle, est dans mon projet. Elle assure, vraiment ! Et elle sait… Si je dois bouger un jour, elle me suivra. Avec elle, on a eu une petite fille, Hana, qui a un an et demi. »

Du 4-4-2 losange au 4-3-3

Photo FC Montlouis

Zakaria Tahri, dont l’éloquence et la forte personnalité sont frappantes – « J’ai un caractère bien trempé ! Quand je crie, on m’entend très-très fort, peu de gens crient plus fort que moi (rires), et quand ça pète, ça pète, même dans le vestiaires ! » – a commencé sa carrière de coach avec un système bien défini, le 4-4-2 losange. Mais un événement a précipité son changement de style : « Le 4-4-2, c’était vraiment notre marque de fabrique, mais après nos deux défaites en ouverture de la saison 2024/25 en N3 (5-0 à Vierzon et 0-1 à domicile contre Cosne-sur-Loire, pourtant réduit à 10), j’ai pensé qu’il fallait changer quelque chose et j’ai modifié le système. Depuis, je joue en 4-3-3, et je n’ai plus bougé de ce schéma ».

L’équipe s’entraîne cinq fois par semaine, dont deux fois en matinée (une séance spécifique facultative et une séance obligatoire). Pour préparer ses matchs, le coach regarde les deux dernières performances de son adversaire à la vidéo et prends beaucoup d’infos à côté; son adjoint, Thomas Philippon, responsable technique chez les jeunes, s’occupe quant à lui des montages. En N2, on découvre le niveau et les techniciens aussi. Je discute avec certains d’entre eux, on échange sur les équipes, comme avec Alexis Capela, l’adjoint d’Arnaud Le Lan à Lorient, qui était avec moi à la formation du DES, et aussi Cherif Djema, le directeur sportif de l’Aviron Bayonnais ».

Un club familial

Lionel Chica, le président. Photo 13HF

Et puis, ce qui fait la force du FC Montlouis, c’est « l’esprit familial », poursuit Zakaria Tahri, capable aussi de se transformer en VRP : « La ville compte 11 000 habitants. Le club a évolué très rapidement sur l’aspect sportif, qui est en progression. Le club possède des infrastructures de niveau « Régional » mais avec un terrain d’honneur de qualité. On a un petit budget (650 000 euros, dont la moitié environ pour l’équipe fanion). Je dirais que c’est un budget moyen de National 3. En N2, certains joueurs travaillent. On a 350 licenciés et 18 équipes. J’ai un rôle de manager et de directeur sportif. Avec le président, on a une relation proche, il est très impliqué. Et puis il y a Jordan Durand, le directeur général : lui, c’est une pépite ! »

Pour les Frelons, le nouveau surnom donné à l’équipe fanion, référence aux couleurs du maillot (jaune et noir), – « C’est bien, ça donne une identité » -, il n’a pas toujours été facile d’évoluer dans l’ombre du « grand » club voisin, le Tours FC, rayé de la carte en début d’année avec la liquidation judiciaire de l’association.

Photo Noah Gaultier – @_.ng.prod

Depuis, Ouest Tourangeau a repris le flambeau du football dans la préfecture d’Indre-et-Loire, sur les cendres du Tours FC, pour devenir le club métropolitain, l’Union Foot Tourraine… prochain adversaire ce samedi au 6e tour de la coupe de France ! Un club qui doit écrire son histoire, de la même manière que son voisin Montlouis écrit la sienne. « Tours FC, c’était le club phare de la région, raconte Zakaria. J’étais supporter. J’ai toujours eu Tours dans le coeur, parce que j’ai grandi avec ce club, j’y ai quand même passé 6 ans ! Je me souviens que, quand j’étais gamin, et quand j’étais au centre de formation aussi, je ne loupais pas un match de Ligue 2 ou de National. Pendant 10 ans, qu’il pleuve, qu’il neige, j’allais tout le temps au stade de la Vallée du Cher. J’ai le tours FC dans le coeur, c’est clair et net, c’est mon club de coeur. Après, quelque part, en étant à Montlouis, j’étais un peu en concurrence avec le Tours FC. Et puis, disons-le, pour moi, cela a été une fracture de ne pas signer pro quand j’étais au Centre. C’est une cicatrice, mais j’en ai fait le deuil. Cela n’a pas empêché Bernard Blaquart de m’inspirer, de me donner envie de devenir entraîneur, pareil pour Alexandre Dujeux, d’ailleurs, je vais voir les matchs à Angers dès que je le peux. Je l’ai revu il y a un an et demi, on s’est rappelé les bons souvenirs ! »

En coupe de France (6e tour), samedi 25 octobre 2025, au stade de La Haye, Union Foot Touraine (N3) a éliminé le FC Montlouis (N2) 1 à 0. 

  • Texte : Anthony BOYER / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : 13HF et FC Montlouis
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🕐Une info signée Laurent Pruneta (membre de la team 13heuresfoot) : Mathieu Chabert, l’ancien coach de l’AC Ajaccio, de La Berrichonne de Châteauroux, du Sporting Club de Bastia, de l’USL Dunkerque et de l’Avenir Sportif Béziers (L2, Nationale et N2) a été nommé entraîneur de AS Cannes Football en #National2 ! Il succès à Damien Ott. Mathieu Chabert, fidèle du site 13heuresfoot, arrivera lundi sur la Côte d’Azur. Il s’était déjà confié à deux reprises chez nous, comme à l’été 2024, à la signature de son contrat la saison passée à Ajaccio. Deux entretiens à retrouver ici ⤵️

  • Mathieu Chabert (article de 2024) : « Aujourd’hui, j’ai plus de certitudes »

https://13heuresfoot.fr/actualites/mathieu-chabert-ac-ajaccio-aujourdhui-jai-plus-de-certitudes/

  • Lire aussi / Mathieu Chabert (article de 2023) : « Dunkerque, la montée dont je suis le plus fier ! »

https://13heuresfoot.fr/actualites/mathieu-chabert-dunkerque-la-montee-dont-je-suis-le-plus-fier/

 


Arrivé en juillet dernier, le nouveau président s’est fixé une mission en même temps qu’il a découvert un stade et un nouveau championnat : celle de ramener le club gardois, qui semble renaître de ses cendres, « à sa place ».

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos : 13HF et Nîmes Olympique

  • Reportage réalisé avant la 8e journée de championnat face à l’AS Saint-Priest (victoire 3 à 0)

Nîmes Olympique revoit la lumière. Après quatre ans dans le brouillard, dans le noir, dans le flou, dans l’errance, dans l’incertitude, dans l’indécision, il était temps.

Nîmes Olympique entrevoit le bout du tunnel. Enfin ! Mais il est encore un peu loin… Il est où le bonheur, il est où ? Il est au bout de ce championnat de National 2, que le club, qui renaît de ses cendres, fréquente pour la première fois de son histoire cette saison, lui qui a passé 36 saisons en Division 1/Ligue 1, autant en Division 2/Ligue 2 et 11 en National. Lui qui n’était jamais tombé aussi bas dans la hiérarchie française.

Un club qui a failli disparaître

Nîmes Olympique aurait d’ailleurs pu, comme d’autres avant lui, tomber encore plus bas, après la décision de la DNCG, le 24 juin dernier, de l’exclure des compétitions nationales. Mais ça, c’était avant qu’une équipe de repreneurs ne présente un solide dossier devant la commission d’appel, à peine trois semaines plus tard. C’était avant que Thierry Cenatiempo, un chef d’entreprise local, n’arrive avec son carnet de chèques (350 000 euros injectés à titre personnel) en compagnie de quelques autres investisseurs parmi lesquels des chefs d’entreprises eux aussi (Philippe Noyer, Denis Llota), l’association Nîmes Olympique représentée par son président Yannick Liron, des joueurs (l’actuel attaquant de N2 Clément Dépres, Renaud Ripart, Anthony Briançon, Théo Valls, Benoît Poulain) et même le collectif de supporters Sauvons le Nîmes Olympique. Suffisant pour sauver l’institution qui a frôlé le démantèlement après que l’ex-président / propriétaire Rani Assaf a annoncé, en juin dernier, vouloir tout arrêter, tout raser aux Antonins, le stade « provisoire », et vendre La Bastide.

Les Antonins et La Bastide bientôt sous giron municipal

Après la victoire contre Créteil, aux Antonins. Photo 13HF

Finalement, la municipalité, via une subvention (1,2 millions d’euros en 2025/26 dont 600 000 déjà apportés), s’est mise d’accord avec Assaf pour louer les installations avant de les racheter, une opération qui devrait être effective en janvier 2026.

Inutile de dire que le soulagement est immense du côté des amoureux des Rouges, qui sortaient d’une douloureuse période marquée par trois relégations sportives en quatre ans, de Ligue 1 en National 2 donc, et d’une situation inextricable avec Assaf, l’homme qui a cristallisé tant de désamour. L’homme coupable de tous les maux.

Assaf a donc passé 11 ans au club, dont 9 au poste de président, et s’en est allé avec un bilan très contesté que seules une magnifique accession en Ligue 1 en 2018 et une première saison dans l’élite tout aussi magnifique dans la foulée ne saurait masquer, surtout quand on pense à son projet avorté de nouveau stade et cette désagréable impression d’avoir abandonné le club. D’être arrivé à une situation de non-retour avec toutes les composantes de la Ville et du club.

Cenatiempo-Dupré, une relation père-fils

Mais depuis ce passage en appel devant la DCNG, le 15 juillet, tout cela est de l’histoire ancienne. Thierry Cenatiempo, 62 ans, nouveau président de la SAS « Nîmes Olympique Ensemble », créée en même temps, a très vite embrayé. Le fondateur de GT Formation et RH, un organisme dédié au secteur de la banque, dans lequel il a travaillé, et l’assurance, a rapidement nommé un directeur sportif, Anthony Dupré.

Dupré, 30 ans seulement, dont on pourrait comparer la relation avec Cenatiempo à celle d’un père avec son fils (ce sont eux qui le disent !) est un ex-gardien de but originaire de Senlis (Oise) et passé par un tas de clubs, d’abord PSG et Bordeaux chez les jeunes. Chez les seniors, il a navigué entre le N2, le N3 et la R1 : réserve de Valenciennes, Trélissac, le Racing, la réserve des Herbiers, Le Poiré-sur-Vie, le RC Cholet, pour ne citer qu’eux. Deux expériences en Belgique (D3) et en Grèce (D2) complètent un CV long comme ses bras tatoués.

Mickaël Gas, « made in Crocos »

Mickaël Gas, le nouvel entraîneur de Nîmes Olympique. Photo 13HF

Une fois nommé, Dupré a choisi le coach, Mickaël Gas, un pur nîmois. Un ex-milieu de terrain reconverti défenseur central. Un produit « made in Crocos ». Gas, 32 ans, est un débutant sur le banc en National 2 qui a commencé au club chez les… débutants, jusqu’à parapher un contrat de stagiaire pro (un seul match titulaire en Ligue 2 sous l’ère Victor Zvunka, en défense, le 30 août 2013, contre Le Havre, aux Costières, 0 à 0).

Pour Mickaël Gas, coach de la réserve nîmoise la saison passée, la suite s’écrit dans les championnats amateurs, mais jamais très loin du cocon nîmois, où il n’avait pu franchir le cap professionnel : Arles, Sète, Agde… avant un retour à la maison, à Nîmes Olympique, pour encadrer les jeunes en réserve. Toujours sur le terrain donc !

Quand il raccroche les crampons, à 28 ans, c’est pour aller au bout de sa passion pour l’encadrement, découverte avec les U12 de Sète, alors qu’il n’a que 23 ans. À Nîmes Olympique, ce passionné de pétanque passe des U16 à l’équipe de National 2 en seulement 3 ans ! Avec une certaine réussite.

Déjà la meilleure défense

L’équipe, « montée » tel un mécano en seulement quelques jours cet été, et à qui l’on promettait un départ compliqué compte tenu des déboires de juin, compte tenu également de la réputation de ce championnat, répond au-delà des attentes et des espérances. Après 8 journées et ce dernier succès face à Saint-Priest 3-0, elle est en tête du classement devant Rumilly-Vallières et Saint-Maur-Lusitanos (5 victoires, 2 nuls et 1 seule défaite, à Rumilly). Et sa défense est la meilleure du groupe C : 3 buts encaissés, tous à Rumilly. Les bases sont posées.

Dire que c’est un départ inespéré est cependant exagéré. Parlons plutôt d’une renaissance, d’un départ prometteur voire rêvé, quand bien même Nîmes Olympique n’a pour l’heure rien gagné, si ce n’est l’amour et la furia retrouvés du peuple nîmois, à nouveau fier, et ça, c’est déjà une très belle victoire !

Le retour du douzième homme

Photo Nîmes Olympique

Aux Antonins, un stade homologué jusqu’en 2032, que les supporters des Rouges sont enfin en train de s’approprier, le public est revenu. Ils étaient plus de 5000 contre Fréjus/Saint-Raphaël et plus de 4000 contre Créteil. Et on vous l’assure, ça pousse, ça chante, ça crie, ça encourage, ça chauffe, ça fait du bruit… La flamme, incontestablement, s’est rallumée.

Entre deux journées de championnat (victoire 2 à 0 contre Créteil et réception de Saint-Priest ce samedi aux Antonins), Thierry Cenatiempo s’est confié. L’entretien, d’une quarantaine de minutes, n’avait pas pour but de raconter l’historique des quatre derniers mois ni de dresser un premier bilan. Tout a déjà été dit et écrit. Plutôt de mieux connaître le natif d’Ouenza, en Algérie, mais qui a grandi près de Grenoble. L’ancien maire (2014-2020) de Saint-Hilaire-d’Ozilhan, son village, tout près du Pont du Gard, dont il est toujours conseiller municipal, a quelques tics de langage : il aime bien parler de « mèches courtes » et de « mèches longues » lorsqu’il s’agit d’évoquer le rapport au temps, et d’autres encore que vous découvrirez ici !

Thierry Cenatiempo n’a pas pu s’empêcher non plus de rappeler quelques anecdotes, comme celle, « mignonne, que j’aime bien raconter », de ce fameux 1er mars 2005. Ce soir-là, tandis qu’il est à la clinique et que son fils Valentin est en train de naître, il aperçoit au loin les projecteurs éclairés des Costières où le Nîmes de Didier Ollé-Nicolle, « un ami », alors en National, étrille Nice (Ligue 1) 4 à 0 en coupe de France ! L’un des matchs références du club. Et pour pousser l’histoire encore plus loin, le gardien des Crocodiles ce même soir, Cédric Duchesne, sera celui qui, un peu plus tard, donnera goût au football et aux cages à Valentin, aujourd’hui à l’US Concarneau. Il y a des signes qui ne trompent pas.

Interview : « Voir Nîmes Olympique perdre son âme, c’était douloureux »

Thierry Cenatiempo. Photo Nîmes Olympique

Président, vous avez fondé en 1996 l’entreprise GT Formation (GT pour Gilbert et Thierry), et avant cela, que faisiez-vous ?
J’ai bossé une dizaine d’années dans la banque. J’ai été directeur d’une agence bancaire en montagne, à la Banque Populaire, aux Gets (Haute-Savoie) puis ensuite j’ai travaillé dans le secteur du marketing, toujours dans le domaine de la banque. En parallèle, j’ai aussi créé « Zero to One », une entreprise spécialisée dans l’IA (Intelligence artificielle) mais je ne suis pas un spécialiste dans le domaine. Je suis surtout un spécialiste de la pédagogie : j’adore transmettre, j’adore former, c’est d’ailleurs un sujet en soi dans le foot.

Pour vous avoir rencontré à Grasse et ici, à Nîmes, vous semblez calme, mesuré, réfléchi, naturel, placide, sympathique et proche : est-ce un bon portrait ?
Il me semble que ça me correspond, oui. J’aime bien les gens. J’aime bien le contact humain.

« J’aime l’échange, j’aime l’humain »

Depuis votre arrivée au club en juillet dernier, vous avez donné beaucoup d’interviews : c’est quelque chose qui vous plaît ?
Pas particulièrement. Je ne suis pas en recherche de ça. Mais j’aime bien l’échange, ça relève de bien aimer l’humain. Et à partir du moment où l’on doit communiquer, échanger, je le fais sans déplaisir.

Et être mis sur le devant de la scène, cela ne vous gêne pas ?
Je me dis qu’il faut que je sois à ma place, c’est tout. Il ne faut pas que j’en fasse de trop, mais il ne faut pas que je me cache non plus. Je suis quelqu’un d’assez pudique, pas très démonstratif. Mais si c’est ma place, il faut que je l’assume. J’avais vécu un peu ça, mais dans une autre mesure, quand j’ai été maire (à Saint-Hilaire-d’Ozilhan, près d’Uzès, entre 2014 et 2020), mais c’était à l’échelle d’un village de 1200 habitants où là, d’un coup, on devient une personnalité dans sa commune et un petit peu autour.

« Maire, j’étais parfois en souffrance »

Voilà comment on fête une victoire à Nîmes ! Photo Nîmes Olympique

C’est plus dur d’être maire d’un village, chef d’entreprise ou président du Nîmes Olympique ?
Je suis très content de vivre ces trois expériences. Je ne sais pas quel est le niveau de difficulté de chacune des trois fonctions mais je dirais que, de par mon naturel, mon côté « automatique », j’ai l’impression que c’est beaucoup plus facile d’être chef d’entreprise où de diriger un club de foot, que d’être maire. Maire, j’étais en mode « manuel », parfois en souffrance. Juste avant, je vous parlais d’échanges : quand j’étais maire, les échanges étaient plus politisés et c’est moins mon truc sans doute. Là, je me sens plus à l’aise, ce qui ne veut pas dire que je suis meilleur.

Maire, vous étiez donc moins à l’aise ?
Non, au niveau de la commune, je me suis toujours senti à l’aise, ça allait, mais c’est quand je sortais de la commune que cela devenait plus compliqué pour moi. Parce qu’on est obligé, quand est on maire, de traiter avec le Département, la Région, la Communauté de communes, etc., et là, il y a avait des clivages politiques, des clans. Ce rapport-là, sans doute que je n’avais pas toutes les capacités à le gérer, en tout cas, je l’ai géré comme j’ai pu, mais j’étais en mode « manuel », pas en mode « automatique ».

« Ma fonction de maire m’a appris à anticiper »

Le stade des Antonins, contre Créteil. Photo 13HF

Votre mandat de maire s’est arrêté en 2020 : est-ce vous qui ne vous êtes pas représenté ?
Je me suis représenté mais en tant que conseiller municipal sur la liste de ma première adjointe, Liliane Ozenda, qui a été élue. Et à ce jour, je suis toujours conseiller municipal de Saint-Hilaire, un joli petit village assez touristique, qui est connu pour sa viticulture, qui a une appellation « Côtes-du-Rhône ». Beaucoup de gens ont choisi de venir y habiter : parce que ce n’est pas un endroit où l’on vient habiter par défaut. Il est super-bien situé, très vivant. Il est passé de 700 à 1200 habitants en une douzaine d’années, c’est énorme, la population est assez jeune, assez dynamique.

Y a-t-il des similitudes entre la fonction de maire, la fonction de chef d’entreprise et celle de président du NO ?
Je m’amuse beaucoup à comparer les fonctions de maire et de président, et il y a vraiment quelque chose de marquant, c’est le temps. On a un rapport avec le temps qui est très différent. Maire, les prises de décision sont lentes, le rapport au temps est long : quand vous avez une idée pour faire aboutir un projet, ça peut prendre des années, c’est très long. Alors qu’au foot, on a une idée le lundi, si elle n’est pas concrétisée le samedi, elle ne verra peut-être pas le jour : là, on est sur un rapport au temps très accéléré. Et dans une entreprise, je dirais qu’on est entre les deux, mais plus proche du foot quand même.

Est-ce que votre passage d’élu à la commune de Saint-Hilaire vous a appris quelque chose d’utile dans le foot ?
Oui. L’anticipation. Dans le foot, quand le match est fini, on se laisse un peu embarquer et on se projette immédiatement sur le suivant, et en même temps, il faut aussi penser à ce que l’on veut faire en 2026 et en 2027. Voilà pourquoi, avec mon directeur sportif, Anthony Dupré, on parle déjà de la saison prochaine. L’expérience de maire m’a appris à anticiper, à voir plus loin, à préparer… J’aime bien parler de « mèches courtes » et de « mèches longues ». Les « mèches courtes », c’est bien, OK, mais il faut aussi penser aux « mèches longues ».

Un projet « ensemble »

Photo Nîmes Olympique

Sur le média « Ici Gard Lozère », vous avez dit en début de saison, je cite, « Après 7 ou 8 matchs, on regardera où on est et à partir de là, on aura un objectif un peu plus chiffré » : on y est là…
L’objectif, là, c’est de gagner le prochain match !

Nîmes Olympique est un projet local, avec des dirigeants du cru, et aussi familial, avec vos deux filles, Laura et Marie, qui sont partie prenante, l’une à la billetterie, l’autre à la communication : c’est important pour vous ?
C’est très-très important. C’est essentiel. On a rajouté, pour des raisons juridiques, le mot « ensemble » derrière la SAS « Nîmes Olympique » (Nîmes Olympique Ensemble), parce que, justement, ce projet, on le fait « ensemble ». Et mon premier « ensemble’, c’est ça, c’est ma famille, parce que si je n’ai pas mon épouse, si je n’ai pas mon fils, même s’il est loin (il est 3e gardien de l’équipe de l’US Concarneau en National) et si je n’ai pas mes deux filles qui me disent « Banco, papa, vas-y, tu as toujours rêvé de ça, on sera avec toi », alors je n’y vais pas.

Quel est le budget de fonctionnement du club et la masse salariale de l’équipe de N2 ?
Le budget, c’est 3,2 millions d’euros. Le budget de la SAS, qui gère uniquement l’équipe de N2, c’est à peu près la moitié, quant à la masse salariale, elle est environ de 800 000 euros et quelque.

« Il a fallu que ça tombe sur moi ! »

Savez-vous combien de fois Nîmes Olympique a joué au 4e échelon dans son histoire ?
En 4e division ? C’est la première année. Je dis parfois « Il a fallu que ça tombe sur moi ! ». Après, je sais que le club a joué 36 ou 37 saisons en première division (36, Ndlr), et autant en 2e division (36 également). Et une quinzaine d’années en National (11 précisément, ndlr).

N’avez-vous pas peur de la traversée du désert, si le club végète en N2 ?
Non et à vrai dire, je ne m’étais jamais posé cette question. C’est même la première fois qu’on me la pose. J’essaie de réfléchir … mais non, je n’ai pas peur.

« Ce que fait Rodez est inspirant »

Photo Nîmes Olympique

Êtes-vous condamné à réussir ?
En tout cas, on va mettre le maximum d’ingrédients de notre côté. Je me suis fixé une mission, mais pas tout seul. Ensemble. Et c’est celle de ramener le club à sa place, qui est entre la 10e et la 30e place française. Je n’invente rien : 36 ans en Division 1, 36 ans en Division 2… Donc ramener le club à sa place, c’est là. Frédéric Antonetti a dit la même chose au sujet de Bastia.

Vous parlez de Bastia, mais j’ai vu que Rodez était un club qui vous « parlait » et qu’une visite y était prévue…
La visite n’a pas encore eu lieu. Clément (Dépres, l’attaquant, auteur de 4 buts déjà cette saison) a joué là-bas en Ligue 2. Il fait l’interface. On a effectivement prévu d’y aller une journée, dès qu’ils seront disponibles, parce que ce que fait ce club est très inspirant.

Un modèle de gouvernance plutôt que de présidence

Vous diriez que vous être un président comment ?
Inexpérimenté, déterminé, humain, humble et assez enthousiaste !

Un modèle de président ?
Je m’intéresse depuis toujours à la gouvernance des clubs, à la façon de se comporter des présidents, mais je n’ai pas vraiment de modèle. J’ai plus un modèle de gouvernance. Par exemple, à Nîmes, un facteur de réussite indispensable, c’est que le coach Mickaël Gas, le directeur sportif et moi, on soit vraiment ensemble. Je redis le mot « ensemble » volontairement. Il faut que cela soit du papier à musique entre nous. Je me souviens de la grande époque de Saint-Etienne, avec ce trio Roger Rocher – Robert Herbin – Pierre Garonnaire, qui avait construit toute une époque. C’est pour ça que je pense plus à un modèle de gouvernance qu’à un modèle de président en particulier.

« On est sur des temps courts »

Anthony Dupré (à gauche) enlace Clément Dépres. Photo Nîmes Olympique

Parfois, même si c’est rare dans le foot, des équipes descendent mais conservent leur coach : cela n’a pas été le cas d’Adil Hermach. Y a-t-il eu une réflexion à son sujet ?
Je ne me suis pas posé la question. En fait, tout est allé très-très vite, tout a basculé en 48 heures. Comme je vous l’ai dit, j’avais d’abord besoin de l’aval de ma famille et ensuite, deuxième chose, j’avais aussi besoin de l’aval d’Anthony (Dupré) pour le poste de directeur sportif. J’ai tout de suite su que c’était lui pour ce poste. Je le connaissais. Je l’avais rencontré au bord des terrains. Il y a quelques années, il s’était intéressé à mon fils Valentin, on avait discuté, sympathisé. On a un rapport un peu père-fils tous les deux. Je vous parlais tout à l’heure de temps court et de temps long. Dans le foot, on est sur des temps courts et ma conviction, c’est qu’il vous faut des gens qui vous permettent de gagner du temps. Et Anthony, c’est quelqu’un qui vous permet de gagner du temps : il est direct, ça va vite, c’est du parler vrai, ça ne prend pas de détour, voilà. C’est celui dont j’avais besoin pour faire un bon complément avec moi. Il me le fallait. Et à partir du moment où il m’a dit « oui », c’était à lui de choisir le coach, pas à moi. Donc je ne me suis pas posé la question pour Adil.

Il y a quelques années, vous aviez déjà été manifesté un certain intérêt pour Nîmes Olympique : pourquoi est-ce que cela n’avait pas abouti ?
Je ne sais plus quand c’était, vers 2017 peut-être. En fait, j’avais été approché pour un projet de reprise dans lequel il avait été imaginé que je puisse avoir un rôle de président délégué. Mais je n’avais pas rencontré Rani Assaf. Avec lui, il y a seulement eu des échanges de SMS.

« Avec Rani Assaf, il n’était pas incontournable que l’on se rencontre »

Comment, de l’extérieur, avez-vous vécu ces neuf années de présidence Assaf, l’homme qui a cristallisé le désamour autour du club ?
Dans le règne de Rani Assaf, il faut se souvenir qu’au début, tout était beau. C’était l’euphorie. Il y a eu la montée en Ligue 1 (en 2018). Donc il n’y a pas eu 9 ans de difficultés mais c’est vrai que l’on se souvient plus des dernières années, douloureuses. C’était douloureux de voir ce club perdre son âme. On avait l’impression que son coeur battait de plus en plus faiblement : on sait maintenant que, malgré ces dernières années, il est bien vivant ! C’est le moins que l’on puisse dire.

Du coup, avez-vous rencontré Rani Assaf ?
Non, je ne l’ai pas rencontré. Je le rencontrerai peut-être un jour, si c’est nécessaire, je ne sais pas… Vous savez, je vous l’ai dit, j’aime beaucoup « l’humain », je n’ai pas de problème avec ça, mais je sais que c’est quelqu’un de distant et et je respecte ça. Il n’était pas incontournable que l’on se rencontre.

« L’histoire doit s’écrire aux Antonins »

Anthony Dupré – Mickaël Gas : les Crocos d’abord ! Photo Nîmes Olympique

Le public revient au stade où l’on sent un nouvel engouement, une nouvelle ferveur : ça, c’est quelque chose qui, forcément, est nouveau aux Antonins, et fait plaisir…
Oui, on a retrouvé le public, ce public chaud, qui fait la force du club. L’histoire s’écrit aux Antonins, et doit s’écrire aux Antonins.

Pourtant, ce n’était pas gagné dans ce stade provisoire étiqueté « Assaf », construit par l’ancien président : l’objectif n’est-il pas, à long terme, de retourner un jour aux Costières ?
Vous savez, j’ai vécu de supers moments aux Costières, maintenant, ce n’est pas mon sujet. Mon sujet, c’est de ramener le club à sa place, et je le ferai aux Antonins. On a la chance de disposer d’un outil quand même très fonctionnel, c’est un petit stade quasi à l’Anglaise où, dès que l’on a 5 000 personnes, c’est le feu. On va faire en sorte que les gens aiment les Antonins; ce ne sont que les succès, les performances, qui feront que ce stade correspondra à une époque heureuse. Après, si un jour on retourne aux Costières, ce sera top, mais ce n’est pas mon sujet.

Tristesse et frustration passée

Le dress code de Thierry Cenatiempo : rouge ! Photo 13HF

Mais jouer « Chez Rani Assaf », c’est bizarre, non ?
On est dans une situation transitoire par rapport aux infrastructures, et pas seulement sur les Antonins, sur la Bastide aussi. Je vous parlais tout à l’heure de 2026 ou 2027, en vous disant que je me projetais déjà là, parce que justement, sur La Bastide, on a vraiment l’ambition d’améliorer l’infrastructure, d’améliorer les pelouses, d’avoir un outil qui favorise au maximum la performance des joueurs. Mais pour cela, il faut que le changement de propriétaire ait lieu et que les partenaires nous accompagnent. Après, on paiera un loyer, comme cela se fait dans les autres clubs.

Racheter un jour le stade des Antonins, c’est quelque chose auquel vous pensez ?
Là pour le coup, c’est une mèche très-très-très longue (rire) ! On peut se poser la question sur le domaine de la Bastide. Ce ne serait pas inintéressant que la Bastide … (il coupe) Mais ce n’est pas notre sujet pour le moment. Aujourd’hui, normalement, si tout est conforme à ce qui est prévu, on change de propriétaire au 31 janvier et le stade des Costières ne sera plus la propriété de monsieur Assaf. Et à partir de là…

Fin décembre, cela fera 3 ans que Nîmes joue aux Antonins. Vous avez prévu un anniversaire ?
Pas du tout ! On prévoir d’autres festivités, mais pas celles-là (rires) !

Étiez-vous déjà venu voir des matchs de Ligue 2 ou de National aux Antonins ?
Je vais vous faire un aveu : je n’avais jamais mis les pieds aux Antonins avant cette saison. J’étais présent au dernier match de Nîmes Olympique au stade des Costières, contre les Girondins de Bordeaux, en Ligue 2, pour la symbolique, mais je n’avais jamais vu un match aux Antonins. Je n’avais pas le coeur. Mais je n’ai jamais non plus été animé d’un sentiment d’animosité. En fait, c’était plus de la frustration, de la tristesse. Aller voir un match aux Antonins, devant 1 000 personnes comme c’est arrivé la saison passée en National, cela aurait été un supplice. Non, impossible.

La couleur rouge comme dress code

Mickaël Gas. Photo Nîmes Olympique

Vous êtes très attaché à la couleur rouge…
Vous savez, le public de Nîmes, c’est le foot que j’aime. J’aime aussi Saint-Etienne, Lens, Sochaux, Bastia, Marseille, parce que, tout de suite, quand on parle de ces clubs, on voit une couleur, les Sang et Or pour Lens, les Verts pour Saint-Etienne, etc. Et Nîmes, c’est les Rouges. Il y a une quinzaine de clubs comme ça en France où l’on voit les gens venir au stade avec les couleurs du club. Là, on est assailli de demandes pour les maillots (1), parce que tout le monde le veut ! C’est trop beau quand on arrive au stade, avec tous ces gens, au bord de l’autoroute, habillés en rouge. C’est une chance, et pour les joueurs, c’est le kiffe total ! Je le dis souvent, chez nous, il n’y a aucun joueur qui soit venu pour l’argent. Ils ont tous fait des sacrifices. On leur a vendu de la passion et du monde au stade.

(1) Le nouveau maillot sera vendu à l’occasion du match face à Saint-Priest, samedi 18 octobre, dans la bodega située sur le parvis de la Halle des sports, en attendant l’ouverture de la boutique, en décembre, boulevard V. Hugo, à Nîmes. 

Ce championnat de National 2, vous le trouvez comment ?
J’ai juste raté le déplacement à Toulon mais j’ai vu le match sur internet. On voit que ça va être chaud dans notre poule, tous les matchs sont compliqués. Quand je fais référence au dernier match de championnat contre Créteil, mais aussi au match contre Fréjus, je trouve qu’il y a de la qualité, de l’intensité, ça joue bien, franchement. Là, c’est l’amoureux du foot qui parle : j’ai pris du plaisir sur ces matchs. Il y a vraiment un bon niveau. Je pense qu’il faudra être très compétitif, match après match. Il n’y a aucun match facile où on arrive en se disant « Là, c’est bon… » Non, pas dans cette poule. Et c’est vrai pour toutes les équipes. Je suis amateur de foot mais pas un spécialiste, ce n’est pas mon métier, et c’est très bien comme ça. Moi, ce que j’entends, c’est que l’équipe qui va sortir de cette poule pourra tout de suite être performante à l’étage supérieur. C’est l’impression que j’ai, car je regarde beaucoup de matchs de National, comme Concarneau forcément, et franchement, notre dernier match de championnat contre Créteil, ça valait bien des matchs de National.

« Content de ce que l’on est en train de faire »

Content de ce début de saison tout de même ?
C’est vrai que là, on est gâté, on est content de ce que l’on est en train de faire, de produire, mais cela ne veut pas dire que l’on est satisfait, parce que si on était satisfait, cela voudrait dire que l’on y est arrivé or ce n’est du tout le cas. Mais content, oui, on peut le dire.

Votre nom de famille, « Cenatiempo », c’est d’origine espagnole ?
Oui mais pour autant mes grands-parents, mes arrière-grands-parents et mes arrière-arrière-grands-parents étaient italiens. Il y avait des Cenatiempo sur des bateaux italiens à l’époque de Garibaldi, qui sont arrivés au sud de l’Italie au XVIIe siècle je crois, et qui se sont installés au nord de Naples. Il y a beaucoup de Cenatiempo là-bas. Mais avec la consonance espagnole. Parce qu’il y a aussi des « Cena – Tempo », mais nous, c’est bien « tiempo ».

  • Texte : Anthony BOYER / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : 13HF et Nîmes Olympique
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Le défenseur latéral, ex-grand espoir de l’AJ Auxerre, est rentré sur ses terres bigourdanes en 2023 en même temps que son frère Damien, pour aider à structurer son club formateur et épauler une nouvelle équipe dirigeante. Il se partage entre le poste de manager général et entraîneur, avec déjà une certaine réussite : le TPF, remonté en National 3, est bien parti pour s’y installer.

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos : Philippe LE BRECH

Le rendez-vous à Tarbes était (presque) fixé. L’entrevue avec Marc Fachan programmée. Mais le calendrier, notre calendrier, en a décidé autrement. Quel regret ! Moi qui aime le sud-ouest, la convivialité, j’aurais été servi !

Du coup, c’est en visio que le manager/entraîneur du « TPF » (Tarbes Pyrénées Football) a répondu à nos questions, en direct de… chez lui, avec le ciel bleu au-dessus de la tête – « Il n’y a pas que chez toi, à Nice, qu’il fait beau ! » – et le Pic du midi de Bigorre et ses 2 876 mètres à sa droite, qui orne le blason du club, « Je le vois en tournant la tête ! ». Merci pour l’accueil virtuel ! Et mea culpa !

Une nouvelle dynamique

Photo Philippe LE BRECH

En tout cas, Marc Fachan n’a pas forcé son accent chantant de la région, qui vous donne la banane, et n’a pas joué un rôle pendant l’heure qu’il a passée avec nous, faisant preuve d’une grande convivialité. Pour un peu, on se serait cru dans les montagnes. Les Pyrénées forcément. Elles sont si imposantes. Si importantes. Elles surplombent et longent Tarbes, sa ville (45 000 habitants), dont il est originaire et qu’il défend becs et ongles. « Non, Tarbes ce n’est pas du tout une ville-dortoir, même si, bien sûr, on ne va pas venir s’y installer sur un coup de tête ! C’est une ville identitaire, où il y a un esprit montagnard, où les gens sont là de génération en génération. »

Tarbes, on y a déjà mis les pieds. Rapidement. Le temps d’un match de foot, en CFA (National 2). C’était un Tarbes-Cannes, en mars 2014, juste avant un 1/4 de finale de coupe de France entre Cannes et Guingamp. À vrai dire, cela ne nous avait pas semblé folichon. Et puis il n’y avait pas grand monde au stade Maurice-Trélut, situé juste derrière celui du rugby, que l’on voit en travers depuis la tribune.

Mais c’était il y a 11 ans, et depuis, le foot s’est refait une belle santé dans la préfecture des Hautes-Pyrénées. Le soir des matchs, il y a de nouveau beaucoup de monde au stade. Parce que les arrivées des nouveaux dirigeants (Carlos Amorim et Patrick Desai, coprésidents) et de Marc Fachan, en 2023, ont coïncidé avec le retour d’une équipe identitaire, dans laquelle se reconnaissent à nouveau les Bigourdans. Les prémices d’un renouveau s’étaient déjà fait ressentir sous l’ancienne présidence, avec Régis Vidal.

International U19

Photo Philippe LE BRECH

Titulaire depuis cette années du DES, un diplôme qui lui permet d’entraîner jusqu’en N2, Marc Fachan, 36 ans, est un peu l’enfant du club. Celui qui y a grandi dans les catégories de jeunes avant de partir au pole espoirs de Castelmaurou puis au centre de formation de l’AJ Auxerre, où il a passé 5 ans. Il est revenu à l’été 2023, en Régional 1, en même temps que son frère Damien, 35 ans, avec qui il a évolué en National à Dunkerque, un club qui l’a vraiment marqué, également à Carquefou (National) et à Bergerac en N2. Marc Fachan a aussi vécu des expériences en Division 2 espagnole (Alavès, Tarragone), au RC Strasbourg, en National, avant de « finir » en N3 à Anglet. Depuis, le TPF est monté en juin dernier en National 3, à l’issue d’un barrage.

Mais ce que l’on ne savait pas, c’est que l’ancien international U19, grand espoir auxerrois à la fin des années 2000, avait signé à l’âge de 19 ans au Dynamo Kiev. Une expérience malheureuse, qu’il raconte sans tabou. Mais avec quelques regrets, parce que, s’il est fier de sa carrière et de son parcours, il sait que partir en Ukraine, seul, à ce moment-là, ne fut pas un choix opportun. Mais comme il y a toujours des choses à prendre dans chaque expérience, bonnes ou mauvaises, celle-ci lui a aussi donné des billes.

Marc Fachan : « Refaire de Tarbes un super club de N3 ! »

Photo Philippe LE BRECH

Tu as la double casquette entraîneur / manager : pas trop difficile à gérer ?
Je n’ai pas le choix ! J’aimerais avoir plus de temps pour ma fonction d’entraîneur mais je me suis organisé pour ça, j’arrive à allier les deux. Tarbes, c’est mon club, c’est ma ville, c’est ma passion. Le plus dur est passé au niveau structurel. On a des partenaires privés et publics qui nous suivent, donc c’est plus facile à gérer, on ne ne sent pas seul. J’ai des appuis derrière moi, qu’on a réussi à fédérer pour nous permettre d’avancer. On part de zéro. Il faut bien se mettre à l’esprit que l’on est un club amateur et ça c’est le plus dur : je n’ai pas d’analyste vidéo, je n’ai pas de préparateur physique, je suis coach, je suis manager, je suis analyste, je suis prépa… Je touche à tout, ça me passionne, j’essaie de bien caler mon agenda pour respecter mon organisation, afin de ne pas m’éparpiller.

Y a-t-il une volonté d’étoffer le staff ?
On a un entraîneur des gardiens, on s’organise au niveau médical, on a trouvé un kiné, ça tourne, les joueurs savent comment cela fonctionne. J’ai juste à m’occuper des rendez-vous avec le médecin, et là c’est plus compliqué parce que notre territoire est un désert médical. Heureusement, on a des liens avec quelques-uns pour nous faciliter la tâche. En fait, tout s’organise. Le but aussi, c’est de se dire que, si un jour je pars, le club continuera de tourner, parce qu’on aura tout mis en place.

« Entraîner, j’ai toujours eu ça dans un coin de la tête »

Photo Philippe LE BRECH

Quand as-tu su que tu voulais entraîner ?
En vrai, je me le suis toujours dit. Je l’avais dans un coin de ma tête. J’ai toujours eu de bonnes relations avec mes coachs quand j’étais joueur, je les ai toujours respectés, et je pense que c’était réciproque. Moi, j’avais le respect aussi pour cette fonction d’entraîneur qui n’est pas simple, parce que gérer 25 mecs quand tu en as 10 qui ne jouent pas le week-end… Bon, ce côté-là, aventure humaine, passion, ça m’a toujours fait envie. Quand je suis allé à Anglet, où j’avais prévu de vivre, parce j’adore le Pays Basque et l’océan aussi, j’ai passé mes premiers diplômes en continuant à jouer pendant deux ans en National 3, avant de venir à Tarbes.

Justement, comment as-tu atterri à Tarbes, chez toi, dans « ton » club ?
C’est venu tout seul. Il y a eu un changement de président au TPF. Carlos, c’est un ami (Carlos Amorim, le coprésident avec Patrick Desai) . On a fait ce projet ensemble. Il m’a convaincu de venir. Et puis feu ! On a décidé de foncer dans cette aventure. Voilà comment j’ai « enquillé » à Tarbes. J’avais déjà le BEF, qui me permettait d’entraîner en Régional 1, le niveau de l’équipe fanion à mon arrivée, mais j’ai failli ne jamais aller à Tarbes.

Ah bon ?
Oui, le club s’est sauvé de justesse en Régional 1 en 2023, à l’avant-dernière journée, sur un miracle. Je les voyais aller en Régional 2 et là, jamais je ne me serais engagé. Tant mieux que l’histoire se soit passée comme ça. Je n’avais pas encore pris ma décision à ce moment-là mais vu que mon frère, Damien, rentrait lui aussi à Tarbes, je me suis dit que c’était un signe : le club se maintient, mon frère revient et Carlos (Amorim) veut que l’on fasse le truc ensemble… Cela n’a pas été une évidence mais une réflexion, parce que je quittais beaucoup de choses sur le Pays Basque, mais en tout cas on a foncé dans le projet. J’avais de toute façon prévu d’arrêter à Anglet. Tout s’est parfaitement coordonner.

« Une saison, c’est long »

Photo Philippe LE BRECH

Pas trop dur de faire la transition joueur / coach ?
Non, l’adaptation a été naturelle. J’ai toujours fait partie des cadres dans les équipes quand je jouais, j’avais ce côté « gestion des mecs ». Je n’ai pas senti que c’était un truc où je devais lire 20 bouquins pour gérer un vestiaire. J’ai lu beaucoup de choses, bien sûr, pour apprendre, pour avoir d’autres billes que celles que j’avais, j’ai appris, mais j’avais ce côté-là je pense en moi. Pour le moment, je pense que je m’en sors bien par rapport à ça.

Le rythme des séances ?
On en fait trois le soir en semaine, plus le match du week-end. Le mercredi, je passe voir les équipes du club, je regarde comment ça entraîne, etc.. Oui, trois séances, c’est juste, c’est un équilibre à trouver avec les mecs qui bossent, qui ont des vies de famille. On fait une quatrième séance avec les jeunes qui ont le temps de la faire, qui sont demandeurs, mais c’est important aussi de garder de la fraîcheur mentale. Une saison, c’est long.

Tu disais que le coprésident était un ami…
Carlos a été mon entraîneur chez les jeunes. C’est quelqu’un qui a toujours cru en moi. Il coache encore aujourd’hui au club : il a les 17 ans. L’an passé, il avait les 18 ans. Petit à petit, du fait de sa fonction de président, il lâche un peu celle d’entraîneur pour s’y consacrer, mais il a cette passion du football, il a toujours entraîné, il adore les gamins, et puis quand je vois tout ce qu’il fait pour le club. En fait, lui, il est plus axé sur l’administratif, et Patrick Desai, l’autre président, s’occupe plus du sportif. Évidemment, je connais mieux Carlos, avec j’ai une relation privilégiée depuis gamin : il était persuadé que je ferais une carrière, et on a gardé ce lien au fil des années, et là, on se retrouve, l’histoire est belle. Les deux coprésidents ont des caractères qui matchent, ils sont complémentaires.

« Mon frère ne sera jamais sur le banc ! »

Damien Fachan, le frère de Marc (ici avec son coéquipier Maxime Dannfald). Photo Philippe LE BRECH

À Tarbes, tu es « rentré » en même temps que ton frère Damien, que tu entraînes du coup…
Mon frère bosse dans un cabinet de prothésiste-dentaire. Il aurait pu continuer à jouer, et même plus haut qu’en National 2. Il est rentré aussi pour des raisons familiales. Cela faisait quand même quelques années qu’il était parti pour le foot, et du coup, au moins, je me suis dit, on le fait ensemble ce projet aussi.

Mais devoir « gérer » son frère, ce n’est pas trop difficile ? Imaginons que tu le mettes sur le banc…
Il ne me fera jamais la gueule (rires), et en même temps, il ne sera jamais sur le banc (rires) comme ça c’est dit ! C’est mon frère, c’est mon capitaine, c’est notre pilier. On a construit l’équipe autour de lui. Il est exemplaire. C’est une chance incroyable de l’avoir, surtout pour les jeunes, de par l’exemplarité qu’il met à notre niveau. Il ne faut pas oublier que la N3, on n’y est que depuis deux mois. Mais déjà, l’exemplarité qu’il a mis en Régional 1, l’humilité qu’il a eue, et qu’ont eu certains joueurs de retomber à ce niveau, je pense aussi à « Manu » Delgado, qui est Tarbais, et que l’on a fait revenir (ex-Toulon, Annecy, Fréjus/Saint-Raphaël et Hyères). Tout ça fait que, forcément, derrière, les autres suivent; ça entraîne tout le monde.

Qui a parlé le premier à l’autre du « projet Tarbes » ?
C’est Dada (Damien). Il m’avait dit qu’il rentrait. Il savait que je voulais rester sur le Pays Basque, où j’étais installé depuis deux ans avec ma compagne. Mais il ne m’a pas dit « Viens absolument à Tarbes », non, c’est moi qui ai pris la décision de venir, et je ne le regrette pas parce que je vis une aventure exceptionnelle.

« Il fallait remettre des valeurs de territoire à Tarbes »

Photo Philippe LE BRECH

Pas trop difficile de passer du Pays Basque à la Bigorre ?
(Rires) Tu m’as demandé si j’avais du temps pour assouvir d’autres passions (lire plus loin le « tac au tac »), je peux te garantir que le temps est rare mais dès que l’on peut, on part au Pays Basque, on a des amis là-bas, j’y suis souvent. Quand j’ai besoin d’océan, de me faire plaisir, j’y vais ! En 1 heure 15 de route, j’y suis, mais je suis vraiment très heureux à Tarbes, je m’y sens très bien.

Tarbes, ville de rugby, ville industrielle, où le rugby a toujours eu une place importante : le foot trouve t-il la sienne ?
Avec les coprésidents, quand on a fait le brainstorming de début de saison, on s’est demandé comment on allait développer le projet, ce qu’on allait mettre en place. Il y a un contexte, or le contexte n’était plus du tout respecté chez nous : quand on faisait l’analyse, on voyait qu’il n’y avait plus de joueurs de chez nous, du 65 (du département des Hautes-Pyrénées), ou même du grand sud-ouest. Donc à partir de là, difficile pour les gens de se reconnaître dans cette équipe. Et si on a du monde aujourd’hui qui vient au stade, il y a une raison. Mais pour faire revenir les gens, il fallait qu’ils arrivent à se reconnaître dans cette équipe, et pour ça, il fallait remettre des valeurs du territoire, et à Tarbes, c’est très important.

Tarbes n’est pas du tout une ville-dortoir : certes demain tu ne vas pas te dire « je vais m’installer à Tarbes », mais c’est une ville où les gens sont d’ici, de génération en génération, ancrés dans le territoire, qui connaissent la Bigorre, qui ont ce côté montagnard, qui aiment les randos, avec un aspect familial. Le football a exactement les mêmes valeurs que le rugby chez nous. Si tu ne te déchires pas pour le copain, si tu ne mouilles pas le maillot, si tu n’as pas ce côté familial, ce côté « amis », alors tu n’es pas fait pour jouer ici. C’est ça qui est passionnant, parce que lorsqu’on est arrivé au club, on s’est demandé ce qu’il fallait faire pour que les gens reviennent au stade, pour que les entreprises et les élus nous suivent, et quels joueurs on allait prendre. On a vraiment remis un projet identitaire au sein du club, une vraie identité bigourdane, de chez nous, avec des vraies valeurs sur le terrain, afin que les gens prennent du plaisir en tribune, et ça a pris. Et puis forcément, quand tu fais une montée de Régional 1 en National 3, ça valide le projet.

« Aujourd’hui, le club n’est pas prêt pour aller National 2 »

Le public revient de plus en plus nombreux au stade Marcel-Trélut. Photo TPF

Le club a quitté le National 2 en 2018 : peut-il retrouver cet échelon un jour ?
J’ai une lucidité et une humilité qui d’abord m’ont permis de vite m’adapter à ce contexte amateur, et ce n’est pas simple, parce que j’ai connu aussi un niveau plus haut, et qui me font dire que… La vérité, c’est qu’un club, pour aller en National 2, il doit avoir aujourd’hui un budget minium d’ 1,2 million d’euros. Si tu ne les as pas, tu mets ton club en danger au niveau structurel. En National 2, les joueurs sont quasiment des professionnels, entre guillemets, des professionnels smicards du foot, et très peu d’équipes s’entraînent le soir. En fait, les joueurs vivent du foot en N2, on appelle cela du professionnalisme, toutes proportions gardées, et ça, il ne faut pas l’oublier. Il faut que ton club soit prêt et à l’heure actuel, le Tarbes Pyrénées Football n’est pas prêt. J’estime que ce serait presque dangereux d’y aller.

Après, ce qu’il faut, c’est mettre en place un projet pour se dire, « Bon, on a envie de redevenir un club de N3 », et forcément, le budget reste le nerf de la guerre, tu as besoin de staff, de joueurs qui peuvent se dire « le foot est presque mon métier mais pas totalement », et pour passer ce cap-là, il faut des moyens. Ici, tout le monde travaille et ce n’est pas négociable. C’est un équilibre qui correspond à la structure de notre club. Bien sûr que j’aimerais avoir demain les joueurs à disposition tout le temps, mais ça ne correspond pas à notre club, on se tromperait d’objectif. Refaire de Tarbes un super club de N3 et continuer à faire ce que l’on fait chez les jeunes, où toutes nos équipes sont quasiment en Régional 1, il est là notre axe de progression, sur les jeunes, pour garder ce projet d’identité et alimenter les seniors. On a le Pau FC à côté, mais avec un budget incomparable au notre, on n’est pas invité à la table, donc, restons tranquille sur nos objectifs, stabilisons le club en N3 et développons nos jeunes. Ce qui ne veut pas dire que l’on n’a pas d’ambition.

Le maintien en N3 est donc l’objectif; quid de l’équipe réserve de R3 ?
Elle a raté la montée en R2 l’an passé à la dernière journée à la maison. C’est l’objectif prioritaire de la ramener plus proche de la National 3. Et pour la N3, l’objectif est d’exister dans ce championnat : je suis lucide sur notre effectif, on a de supers jeunes, avec quelques anciens qui les entourent, avec de supers axes de progression, donc si on fait bien notre taf… On n’a pas de limite en fait. Si tu me demandes quel est l’objectif avec la N3, je te réponds « le maintien rapidement » et ensuite, c’est justement de ne pas avoir de limite.

« Il y a un plafond de verre »

L’équipe réserve de Régional 3 visera l’accession en R2 cette saison. Photo TPF

C’est comment, le National 3, dans ta poule ?
Je l’ai connu et découvert à Anglet pendant mes deux dernières années, ça joue quand même. Il y a des supers joueurs. C’est une poule ultra-homogène, avec des grosses équipes comme Arcachon, Agde ou Anglet qui ont des budgets colossaux par rapport au nôtre.

Et dans le département, quelle est la 2e meilleure équipe ?
C’est Lourdes, qui vient de remonter en Régional 1.

L’avenir du football à Tarbes passe-t-il par un rapprochement avec un club voisin ? On se souvient qu’au rugby, Tarbes et Lannemezan avaient fusionné avant de retrouver leur indépendance ?
Non (catégorique). Il n’y a aucun autre gros club susceptible de faire naître cette réflexion, de se dire « si on matche les deux, ça permettrait de passer un cap », comme Bergerac et Trélissac l’avaient envisagé à un moment donné, pour un projet qui aurait eu de la gueule. Il y a un plafond de verre, il faut être lucide. Je l’ai dit, c’est le N 3.

« Je suis obsédé par la victoire »

On connaît l’importance du rugby à Tarbes : y a-t-il une synergie avec le « Stado » (Stado Tarbes Pyrénées Rugby) ?
Tout le monde suit le rugby chez nous ! Ils jouent en championnat le vendredi soir, mais pendant ce temps-là, nous, on fait nos veilles de match sur le terrain à côté. Mais j’ai toujours suivi les résultats du « Stado ». Le sport à Tarbes a été très compliqué ces dernières années. On était sur une décennie de descente. Le club de foot a failli ne plus exister. Franchement, si on était descendu en Régional 2, les subventions auraient baissé, et là, c’était « finito ». Il faut que demain, si on n’est plus là, le TPF continue de tourner.

Les deux coprésidents, Patrick Desai (à droite) et Carlos Amorim. Photo TPF

Sur un plan personnel, le fait d’être Tarbais, de revenir dans le club où tu as commencé, est-ce que cela te met une pression supplémentaire ?
La légitimité, il faut la gagner. C’est rare d’arriver quelque part en terrain conquis. Pour moi, c’est en gagnant des matchs, en ayant des résultats au niveau du club, que … Peut-être que les gens ont pensé, quand je suis arrivé, « OK, Marc, il a joué en pro, mais il n’a jamais entraîné », mais peut-être que d’autres ont pensé « C’est top, avec son vécu, il va apporter au club ». On peut le voir de plusieurs manières différentes. Je suis né et j’ai grandi dans la compétitivité, avec cette pression du résultat. Je me suis mis une grosse pression en arrivant au club, pour avoir les meilleurs résultats possibles. On a eu ce barrage d’accession en National 3 en juin dernier, qui s’est bien terminé (victoire 1 à 0 à Carcassonne face à Atlas Paillade Montpellier, sur un but de Manuel Delgado), tant mieux. On a eu la chance de monter, les feux sont au vert, tout roule, je suis super content pour le club ! Maintenant, voilà, je me dis toujours que personne n’est indispensable. Mon but, c’est que demain, si je ne suis plus là, le club continuera de tourner.

Après, le fait d’être Tarbais, bien sûr, ça me met une petite pression complémentaire, complètement. Quant tu es chez toi, que tu connais tout le monde, que tout le monde te parle du club en ville, au resto, tu as envie que les gens te disent « Put… c’est trop bien ce que vous faites au club… » Tu as envie que les gens soient fiers du club qu’ils vont voir le week-end, et c’est ce que l’on a réussi à créer autour de Tarbes. C’est pour ça que les gens viennent. La pression du résultat, de toute façon, moi, je suis obsédé par la victoire. Mais pour gagner, il faut construire. Pour l’instant, je pense qu’on le fait bien mais je sais qu’on aura des jours compliqués dans l’année, comme on en a eu aussi la saison passée, mais ça fait partie du taf.

Marc Fachan du tac au tac

« Je suis un coach à l’inverse du joueur que j’étais ! »

Photo Philippe LE BRECH

Ton meilleur souvenir sportif ?
Ma première sélection en équipe de France U19, en en Italie, je l’attendais avec impatience.

Pire souvenir ?
J’en ai quelques-uns (rires) ! Je dirais le match nul 2-2 chez nous avec Dunkerque contre Boulogne lors du dernier match de National (saison 2016-2017). Une victoire nous aurait permis de finir 3e et barragiste, et on serait monté (finalement, c’est le Paris FC qui a fini 3e et qui est monté de National en L2, malgré sa défaite en barrages aller-retour contre Orléans). Notre coach était corse (Didier Santini) et il savait que le Sporting-club de Bastia allait couler et que ça libérerait une place…

Combien de buts marqués dans ta carrière ?
Très bonne question ! Pas beaucoup mais j’ai toujours marqué ! Sur ma dernière saison avec Anglet, en N3, j’en ai mis 8 ou 9 je crois.

Ton plus beau but ?
Avec le Racing-club de Strasbourg, en National, contre le CA Bastia, à La Meinau, un intérieur du pied à la Thierry Henry. Un bon souvenir car ce but avait permis de gagner.

Photo Philippe LE BRECH

Pourquoi as-tu choisi d’être défenseur ?
Je n’ai pas choisi ! C’était une opportunité entre guillemets. J’alternais les postes au centre de formation d’Auxerre, sur les côtés, devant, en 9 et demi ou en 10, et un jour, en coupe Gambardella, il y a eu une opportunité de jouer latéral droit. C’était le début de l’ère moderne, avec des latéraux. Guy Roux m’a fait descendre à ce poste.

J’ai pensé aussi à ce moment-là qu’il y aurait peut-être un moyen pour moi de « monter » plus vite, plus haut, en jouant à ce poste, donc j’ai essayé de m’y adapter le plus vite possible et j’ai bien fait. Après, j’ai toujours eu cet état d’esprit de vouloir attaquer, parce que j’aimais ça, mais j’aimais défendre, donc le poste me convenait parfaitement.

Ta première fois dans un grand stade ?
C’était au « Tèfe » (Téfécé, Toulouse), avec le centre de préformation de Castelmaurou, on était allé voir un match, je ne sais plus lequel. Mais le premier vrai choc, c’est quand je suis arrivé au stade Abbé-Deschamps.

Photo Philippe LE BRECH

Ton geste technique préféré ?
Crochet intérieur, feinte de frappe ! Il marche encore celui-là, il n’a jamais été démodé (rires) ! C’est un geste simple à réaliser et très efficace.

Qualités et défauts sur un terrain selon toi ?
Mes qualités : j’étais régulier, je n’étais jamais vraiment mauvais, j’étais un bon contre-attaquant et un bon défenseur. Mes défauts : parfois trop caractériel, trop hargneux.

Tu as beaucoup joué en National : que t a-t-il manqué pour jouer en Ligue 2 en France ?
J’estime qu’il ne m’a rien manqué. Il y a un facteur chance qui n’a jamais trop tourné en ta faveur, et au bout d’un moment tu penses que c’est de ta faute, qu’il manque « le truc en plus ». Et il y a aussi un facteur « profil »: peut-être que je ne rentrais pas dans les cases, dans les fameux critères. Enfin, il y a eu aussi les blessures, et ça m’a coûté cher à des moments clés. J’ai eu de graves blessures (hernie discale) et à chaque fois, au lieu de te relancer, tu dois te re-relancer, ce n’est jamais simple. Mais je n’ai aucun regret sur ma carrière, elle a été belle, même si j’aurais peut-être pu faire mieux.

Le club où la saison où tu as pris le plus de plaisir ?
À l’USL Dunkerque. Sans aucune hésitation. Je n’avais plus trop goût au football quand je suis arrivé là-bas et j’ai trouvé à Dunkerque une ville qui me correspond, des gens qui me correspondent, un club avec des valeurs. J’ai aimé cette ville et ce club. j’ai encore des amis au club. J’y retourne dès que je peux. J’ai vu le nouveau stade, mais il n’était pas encore fini. Dunkerque méritait cet équipement.

« J’ai été opéré cinq fois du dos »

Lilian Roume. Photo Philippe LE BRECH

Un match où tu t’es dit après, « J’arrête le foot » ?
Non, je ne me suis jamais dit ça après un match. Ce sont surtout les blessures qui sont dures à encaisser. Quand tu arrives 27 ou 28 ans, que tu ne t’en sors pas, que ça pète à chaque fois… J’ai eu de graves blessures, j’ai été opéré cinq fois du dos, avec de grosses séquelles. Je suis revenu à chaque fois. Tu dois faire de la rééducation, tout seul, tu te prends en charge, tu te démerdes seul pour te soigner, et ensuite, soit tu reviens, soit c’est fini. C’est comme ça. Et là, tu te poses des questions, forcément.

Une erreur de casting dans ta carrière ?
Même si j’ai arrêté de jouer il n’y a pas longtemps, c’est sûr que ma carrière, j’ai eu le temps de l’analyser (rires) ! Après, me considérer vraiment comme joueur professionnel… J’estime que cela faisait déjà quelques années que je ne l’étais plus car à partir du moment où tu touches le National 2, tu ne l’es plus vraiment.

Pourtant, en National 2, il y a certains clubs qui fonctionnent comme des clubs de National voire de Ligue 2, même parfois en N3…
Oui et non, parce qu’il y a beaucoup de stades où tu vas au charbon tous les week-ends et ça, ça n’arrive pas en pro. Quand tu es à Cannes, par exemple, et que tu dois aller jouer en hiver sur des terrains où il y a plus de terre que d’herbe, devant quelques centaines de spectateurs, ce n’est pas simple. Tout le monde sait que le National 2 est un championnat amateur mélangé avec des pros.

Les seniors N3. Photo Philippe LE BRECH

Revenons à la question : une erreur de casting ?
Le Dynamo Kiev. C’était le pire choix de ma carrière. Je l’ai regretté et je le regrette encore. Avec le recul, et si j’avais été mieux entouré à ce moment-là, ce n’est pas le choix que j’aurais dû faire. Cela m’a coûté cher. Je sortais d’Auxerre et j’ai signé 5 ans là-bas ! Je suis reparti en Espagne au bout de cinq mois. Un mauvais épisode, un mauvais casting…

Comment t’es-tu retrouvé à Kiev ?
À Auxerre, j’étais un espoir du centre de formation, avec la génération 89, avec Willy Maeyens (ex-Sedan) on était avec le groupe pro, que j’avais intégré à l’âge de 17 ans et demi. C’était très tôt. On était en équipe de France jeunes, et forcément, la lumière s’allume vite à cet âge-là… J’avais beaucoup de clubs qui s’intéressaient à moi, et j’en ai sélectionné trois : Dynamo Kiev, Villareal qui me proposait d’intégrer le groupe pro et de jouer avec la réserve qui était en D2 au début, et Lille, où je devais partir… Mais j’ai bifurqué vers Kiev parce qu’avec Jean Fernandez, l’entraîneur d’Auxerre, on n’était pas sur la même longueur d’ondes quant à mon évolution de carrière, j’avais un bon de sortie, et voilà… Au dernier moment, j’ai choisi Kiev, un choix dicté par l’aspect financier. Kiev a écrasé la concurrence à ce niveau-là et aussi au niveau sportif, le club jouait la Ligue des Champions. Simplement, je ne me rendais pas compte de ce que c’était que de partir à l’étranger, dans un club comme ça, et quand je suis arrivé là-bas, je suis tombé dans un micmac d’agents très compliqué à gérer, le coach a changé, j’ai préféré partir, et ça m’a coûté cher.

Haoufou Guira. Photo Philippe LE BRECH

Tu en retiens quoi de cette expérience, de cette leçon ?
Aujourd’hui, les joueurs sont très entourés. Moi je ne l’étais pas assez. Je n’étais pas prêt pour un club de ce standing. C’était trop d’un coup. A cette époque-là, j’avais un agent, Jean Gérard Czajka, mais si tu n’es pas patient, si tu ne veux pas brûler les étapes… J’avais 19 ans, c’était tentant d’aller à Kiev, sauf qu’il y a eu un changement d’entraîneur au moment où j’y suis allé, et avec les licences intercommunautaires, il n’y en avait que trois, j’ai été switché, le nouveau coach ne me voulait pas; ça a été dur psychologiquement.

En plus, il y a eu l’histoire des 5 années de contrat que le club ne voulait pas payer… Je suis arrivé dans un club, je sortais de l’Abbé-Deschamps où on était couvé, protégé, et là, quand je suis arrivé, je me suis dit « Waouh », le centre d’entraînement du Dynamo Kiev, il faut le voir pour le croire ! C’était dingue ! Mais on ne t’accueillait pas à bras ouvert dans ce club, c’était chacun pour sa gueule, donc moi, Français, j’arrive, ils ne parlent pas ma langue, ils ne parlent pas anglais, pour l’intégration, c’était très dur, ils ne parlaient que le russe, l’ukrainien, le serbe, le croate… En fait, je compare ça à un choix universitaire, quand tu as tout bien fait, et que tu te plantes au moment de l’orientation après ta « draft ». Je n’ai pas su me relever comme je le souhaitais. Alors qu’en France, j’aurais pu me développer sereinement. Je n’avais aucun intérêt de partir à l’étranger à cet âge-là. Aucun. J’avais choisi Lille, j’aurais pu choisir même un autre club de Ligue 1… J’ai eu du mal à me remettre de ce choix.

Beaucoup de joueurs « rouge » à la récupération ! Photo Philippe LE BRECH

Un club où tu rêvais de jouer gamin ?
J’ai toujours été fan du Real Madrid mais je n’ai jamais rêvé d’y jouer, je n’étais pas dans ce truc-là. Par contre, il y a un joueur qui m’a fait rêver, c’est Thierry Henry, à Arsenal.

Pourtant tu as le maillot du Real Madrid là, non ?
Non, c’est celui du TPF (Tarbes Pyrénées Football), j’ai fait en sorte que cela ressemble à celui du Real ! On joue en Rouge et Blanc à Tarbes mais la tenue de sortie est différente, c’est blanc !

Un stade mythique ?
C’est Highbury, avec les invincibles d’Arsenal. J’étais fan absolument à cette époque-là. Après, quand tu as goûté une fois au Vélodrome, forcément, plus aucun stade ne lui arrive à la cheville après ça !

Photo Philippe LE BRECH

Un coéquipier avec lequel tu t’entendais bien dans le jeu ?
J’ai adoré joué avec un top attaquant, qui s’appelle José Mari, à Tarragone. Il avait joué au Betis Seville, à l’Atlético Madrid, au Milan AC, à Villareal… Il était en fin de carrière mais j’ai eu un super feeling avec lui, et franchement, quel joueur ! Même si on voyait qu’il était en mode tranquille, au bord de la mer, à Tarragone, et qu’il finissait sa carrière. J’ai joué 2 ans avec lui, un régal.

Un joueur perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?
J’ai des nouvelles de toute notre bande quasiment à Auxerre mais j’aimerais bien revoir Alain Traoré ! Je ne l’ai pas vu depuis les années d’Auxerre. Cela me ferait plaisir de le revoir.

Un attaquant adverse que tu n’aimais pas affronter ?
Khalid Boutaïb ! Il était chiant ! Il scorait à chaque fois ! Très malin, très chiant à prendre.

Photo Philippe LE BRECH

Un coach qui t’a marqué ?
Je pense à ceux que j’ai eu au centre de formation, qui m’ont permis de grandir. C’était strict, mais ils voulaient te faire avancer. Je pense à Gérald Baticle et Christian Henna. Gérald m’a fait passer un cap. Après, j’ai eu des tops coachs plus tard, comme Fabien (Mercadal) et Didier (Santini), des bons managers et des bons coachs.

Un coach perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?
Jacky Duguépéroux, à Strabourg. J’ai eu une relation particulière avec lui. J’aimerais bien le revoir.

Un coach que tu n’as pas forcément envie de revoir ?
Oui, mais je ne me souviens plus de son nom de famille, celui du Dynamo Kiev (rires) ! Il n’y avait même pas l’ombre du respect de la personne, j’étais un pion.

Le stade Maurice-Trélut de Tarbes. Photo Philippe LE BRECH

Un président marquant ?
Sans aucune hésitation, Marc Keller, à Strasbourg. Mais si tu vas en Alsace, beaucoup de gens te répondront la même chose !

Un président à oublier ?
Je ne vais pas en citer un, je n’aime pas trop ça, parce que je suis devenu manager d’un club, donc je vois les choses différemment. Bien sûr qu’il y a eu des choses électriques avec des présidents, mais quand tu passes de l’autre côté, tu comprends mieux.

Une causerie marquante ?
Celle de Cesar Ferrando, pour ma première en Espagne, avec Tarragone, on affrontait la Real Sociedad à domicile, je ne comprenais pas tout, même si j’avais le traducteur à côté, et je me disais « Waouh, je suis sur une autre planète », j’ai adoré, on avait gagné. Un super souvenir.

Photo Philippe LE BRECH

Une anecdote de vestiaire ?
Ce n’est pas une anecdote, mais plutôt des moments avec Dunkerque, pendant le carnaval, on était surmotivé, on faisait tout pour gagner le vendredi soir pour avoir la chance d’y aller le samedi, parce qu’on savait que si on perdait, on allait se faire allumer (rires) !

Le joueur le plus connu de ton répertoire téléphonique ?
(J’en ai quelques-uns) rires ! C’est un coach ! Luis de la Fuente ! D’ailleurs, j’ai oublié de le citer tout à l’heure !!! Comment je peux l’oublier ?! (Luis de la Fuente, actuel sélectionneur de l’équipe d’Espagne, fut son coach à Alavès, en D2 espagnole).

Combien de cartons rouges dans ta carrière ?
Pas beaucoup. J’ai dû en prendre 4.

Et depuis que tu entraînes, tu en as pris ?
Oui. J’ai eu un peu de mal à m’adapter… J’en ai pris deux je crois.

Une devise ?
Je répète souvent à mes joueurs de ne jamais oublier d’où ils viennent.

Combien d’amis dans le foot ?
Une quinzaine. C’est long 20 ans de foot (rires) !

Tu étais un joueur plutôt…
Avec la grinta.

Tu es un coach plutôt ?
Compréhensif, exigeant et ambitieux.

Le club de Tarbes ?
Il est identitaire, stable. Du moins il est devenu stable. Et lucide.

Des rituels, des manies avant un match ?
Alors ça, si tu as un joueur qui te dit qu’il n’en a pas, c’est un menteur, même un petit geste anodin ! Je suis croyant, donc je prie. Sinon, les mêmes vêtements, des trucs comme ça, mais je ne m’attachait pas trop à ça.

Le public lors de la venue d’Anglet, le mois dernier, à Trélut. Photo TPF

Et en tant que coach, tu as des manies d’avant-match ?
Je suis très calme avant un match. Je ne sors pas sur le terrain, je reste dans ma bulle, j’ai besoin de déconnecter. Mon tempérament de coach est totalement différent de mon tempérament de joueur. En fait, je suis tout l’inverse du joueur que j’étais. C’est un travail que j’ai dû faire sur moi-même, notamment dans la compréhension et la gestion de mes émotions. Je peux être électrique, mais c’est rare. Je lis beaucoup de livres sur le comportement personnel, mais je n’ai pas fait de formation spécifique. J’ai discuté avec des personnes spécialisées dans le domaine. Forcément, ça aide.

Tu as un style de jeu ?
J’aime dominer l’adversaire. J’aime le côté tactique. Après, possession, pas possession, moi, ce que je veux, c’est poser des problèmes à l’adversaire via un projet de jeu ou en t’adaptant à celui de l’adversaire, parce que parfois, il faut accepter de se dire que tu n’es pas au-dessus de lui et que donc, tu ne pourras peut-être pas mettre ton jeu en place. En fait, l’apprentissage du foot, c’est un monde sans fin. C’est passionnant. C’est pour ça que je me suis mis là-dedans.

As-tu le temps pour des passions en dehors du foot ?
Des passions, tu as plus le temps d’en avoir quand tu joues que quand tu es coach (rires) ! J’en ai deux : je suis passionné de mer et de montagne. J’ai la chance d’avoir l’océan pas loin et la montagne juste à côté ! Donc j’aime aller en rando, au ski ou surfer. Mes passions, c’est la nature ! Et ici, avec ce que m’offre la Bigorre, ma région, je me régale !

  • Texte : Anthony BOYER / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : Philippe LE BRECH (sauf mentions spéciales)
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