Le gardien provençal a préféré quitter une place de titulaire en Ligue 2 à Martigues, où il a vécu deux accessions en trois ans, mais où le fonctionnement du coach ne lui convenait pas, et « descendre » de deux divisions, pour reprendre du plaisir, dans un club ultra-ambitieux. Pour l’instant, ça marche !

Par Anthony BOYER / Photos : Kevin Mesa – AS Cannes et 13HF

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C’est peut-être parce qu’il est gardien de but et habitué, dans sa surface, à prendre des décisions en un laps de temps infime, que Jérémy Aymes (36 ans) répond souvent de manière ultra-catégorique, sans hésiter, à la plupart des questions de notre « tac au tac », quand d’autres joueurs marquent un temps d’arrêt.

Arrivé à La Bocca fin novembre en provenance de Martigues (L2) alors que l’AS Cannes se remettait lentement d’un début de saison manqué, Jérémy Aymes s’est rapidement installé, imposé dans les buts, à tel point que depuis son premier match, ironie du sort, contre … Istres, l’un de ses anciens clubs et la ville où réside sa famille (4-1), son équipe est toujours invaincue.

Porte-bonheur, Jérémy ? En vérité, son nouveau club était déjà invaincu depuis quelques semaines avant son arrivée ! Car depuis sa dernière défaite officielle, contre Hyères, le 19 octobre (J8), à Coubertin, pour le premier match du nouveau coach Damien Ott (l’ex-coach de Colmar, Avranches et Bourg en National a remplacé Fabien Pujo), les Dragons n’ont plus connu la défaite. Et cela fait 14 matchs que ça dure : 5 en coupe de France et 9 en championnat, où les Azuréens se sont replacés en haut de tableau (2es), à une petite longueur seulement du leader hyérois.

En coupe de France, les Dragons brillent également. Qualifiés pour les 8es de finale, ils affronteront à Coubertin, mercredi 5 février à 20h45, Dives-Cabourg, le petit poucet de l’épreuve avec Bourgoin-Jallieu (National 3). Ce match, Jérémy le suivra… depuis le banc : « C’est Fabio (Vanni) qui jouera, c’est établi, il est performant, il le mérite ! » Cannes – Dives.

Pas la peine de faire un dessin : les Rouge et blanc sont ultra-favoris même si l’on sait bien qu’un match de coupe… est un match de coupe, avec tout ce que cela suppose en termes d’engagement, d’intensité et d’incertitude. Les Normands savent pertinemment qu’ils sont, sur le papier, inférieurs, mais ils donneront tout ce qu’ils ont, c’est une certitude. Et puis, le parallèle avec l’équipe cannoise qui avait réalisé la dernière « grande » épopée en coupe de France jusqu’en 1/4 de finale, en 2014 (battu par Guingamp, futur lauréat), est évident (Cannes avait aussi atteint les 16es en 2022, éliminé par Toulouse) : lors de cette édition, qui avait vu Troyes, Montpellier et Saint-Etienne chuter à La Bocca, c’est l’équipe de Plabennec, alors en National 2, qui avait donné le plus de fil à retordre aux joueurs de Jean-Marc Pilorget, eux aussi en National 2, vainqueurs 1 à 0 contre le cours du jeu ! Dives plus difficile à aborder que Grenoble (L2) ou Lorient (L2) ?

« Martigues ? la meilleure chose était de partir »

Ce qu’il y a de bien aussi avec le natif de Martigues (Bouches-du-Rhône), c’est que l’on sait à son expression, à son visage, à sa manière de répondre, qu’il pense ce qu’il dit. Et qu’il dit ce qu’il pense ! « Je suis quelqu’un d’entier » répond-il à la question « Principal trait de caractère ».

Entier, ça, on l’a vite remarqué. Par exemple, à la question « Le coach que tu n’as pas forcément envie de revoir ? », la réponse fuse : « Thierry Laurey ». Et vlan ! Thierry Laurey, pour ceux qui n’ont pas suivi, fut le successeur en juillet 2024 de Grégory Poirier à Martigues, quand ce dernier, auteur d’une double accession « National 2 – Ligue 2 » en trois saisons, s’est engagé au Red Star (Ligue 2). Et le moins que l’on puisse écrire, c’est que le courant n’est pas passé entre certains joueurs martégaux – dont Jérémy Aymes – et l’ancien coach du Paris FC, de Strasbourg, d’Amiens et du Gazelec Ajaccio.

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Petit retour en arrière : début novembre, alors que le FC Martigues est bon dernier de son championnat en Ligue 2, les joueurs provoquent une réunion avec leur coach pour se plaindre de ses choix et de ses méthodes. Trois jours après, à Amiens (1-1, 13e journée), plusieurs « cadres » de l’équipe ne sont pas convoqués : Mohamed Bamba, Karim Tlili et … Jéremy, remplacé par Yan Marillat, sa doublure, pour la deuxième fois de la saison; la première fois, c’était lors de la 7e journée, contre Dunkerque, mais l’expulsion de Marillat à l’heure de jeu avait contraint Laurey à remplacer un joueur de champ par le grand gardien d’1,89m.

Le 28 novembre, le club de la Venise provençale officialise le départ de Jérémy. Le même jour, il est présenté à l’AS Cannes. Dans les colonnes de La Provence, début décembre, au sujet de son départ de Martigues, le joueur déclare : « J’ai vécu une aventure humaine magnifique avec un groupe fantastique (…) Mais je n’avais pas imaginé que cela s’arrêterait comme ça (…) La meilleure chose était de partir (…) On ne peut pas plaire à tout le monde. Il valait mieux, pour les deux parties, que cela se termine. La cohabitation n’était plus possible ».

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La semaine dernière, dans les colonnes de La Marseillaise, c’est la propriétaire du FCM, Lepa Galeb Roskopp, qui y est allée de sa petite phrase, au moment de présenter le nouvel entraîneur, Hakim Malek, ancien joueur du club : « Nous pensions que Thierry Laurey était la meilleure solution pour l’équipe vu son expérience. Malheureusement, durant ses derniers mois, il y avait un contexte délicat (…) J’étais quand même un peu surprise de son attitude envers les joueurs. Il faut que le coach soit de Martigues pour réussir. C’est pour cela que nous avons pris Hakim Malek. »

Voilà comment l’enfant du club martégal, pilier de l’équipe lors des trois dernières saisons (deux accessions de N2 en L2), déjà passé par le FCM dans les catégories de jeunes et aussi par le FC Istres, le voisin, est passé d’un poste titulaire en Ligue 2, un niveau qu’il n’avait fréquenté qu’une seule fois au Mans, en 2019/2020, à un poste de titulaire en … National 2. Un choix qu’il explique un peu plus loin.

Ce n’est pas le club de La Croisette qui s’en plaindra, lui qui s’était mis en quête d’un gardien et qui a donc saisi l’aubaine.

Interview : « Quand j’ai dit à mon père que je signais à Cannes…. »

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Meilleur souvenir sportif ?

J’en ai plusieurs. J’ai la montée avec Martigues en Ligue 2 (la saison passée), un moment spécial, parce que c’était chez moi, c’était quelque chose de fort. Il y a aussi le 1/4 de finale de la coupe de France avec Granville contre l’OM (en 2016), parce que là, j’affrontais mon club de coeur, Marseille. Et aussi la montée en Ligue 2 avec Le Mans à la dernière seconde du barrage retour (en 2018), sur le terrain du Gazelec Ajaccio. Le scénario fut incroyable. Ce but à la 96e, c’est fou !

Le pire souvenir ?

J’en ai deux. La désillusion avec Martigues il y a deux saisons, lorsqu’on est 1er à deux journées de la fin et qu’on perd 3 à 0 à Borgo. On a raté la montée là, parce qu’à la dernière journée, on gagne, mais on apprend que Concarneau et Dunkerque, qui sont passé 1ers et 2es, ont gagné aussi, donc on ne monte pas… Ce fut très dur. Et il y a aussi la descente de Ligue 2 en National avec Le Mans, alors qu’il reste dix journées de championnat, qu’on est à égalité avec Niort (maintenu), il y a la Covid… C’était dur aussi.

Pourquoi as-tu choisi d’être footballeur ?

C’est venu naturellement mais je n’étais pas super-doué. J’ai commencé dans le champ, j’ai pratiqué d’autres sports, et puis, vers l’âge de 10 ou 11 ans, mon cousin me dit de venir jouer avec eux, à Istres, il manquait un gardien, et puis je ne suis plus jamais ressorti des cages ! Après je suis parti à Martigues en jeunes, à l’âge de 12/13 ans, j’y suis resté trois ans, avant d’intégrer le centre de formation de l’Olympique Lyonnais pendant 4 ans.

Combien de cartons rouges ?

Cinq ou six je pense !

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Ton geste technique préféré ?

(rires) Euh… Je n’en ai pas un en particulier ! Je ne vais pas dire que c’est la roulette, hein, ou le passement de jambes (rires) ! Non, c’est plus un geste que l’on utilise à mon poste, un plongeon, une sortie dans les pieds, une prise de balle, un truc comme ça.

Si tu n’avais pas été footballeur ?

Franchement, j’aurais été dans la merde (rires) ! Archéologue peut-être ! C’est un domaine qui m’a toujours intéressé ! Et puis Indiana Jones m’a fait rêver.

Qualités et défauts en dehors du terrain ?

Je suis quelqu’un d’entier. Je dis ce que je pense. J’essaie d’être dans l’empathie. Sinon, je suis bordélique. Mais il faudrait poser la question à mes proches.

Qualités et défauts sur un terrain ?

C’est une question difficile ! J’essaie d’être le plus sérieux et le plus rigoureux possible, afin d’avoir une certaine régularité dans mes performances. Mes défauts, et je pense que c’est ce qu’il m’a manqué au début pour aller plus haut, même si j’ai corrigé ça au fil des années, c’est le jeu au pied, la relance, des gestes devenus importants dans le foot moderne. Et il m’a manqué aussi la maturité.

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C’était justement la question suivante : que t’a t-il manqué pour aller plus haut ?

La maturité. C’est comme ça, ça fait partir de ma carrière et les difficultés que j’ai eues au début m’ont servi ensuite. A Istres (2009-2011), quand j’ai signé mon premier contrat pro, j’étais 3e gardien, derrière Ménétrier et Agassa et après Petric, le club était en Ligue 2, je suis resté deux ans, j’essayais de montrer mes qualités, mais il me manquait cette maturité pour passer le cap.

La saison où t’es le plus « éclaté » sur le terrain ?

C’est la saison dernière, avec Martigues. On avait un groupe exceptionnel, pour certains on se connaissait depuis longtemps, j’avais une grosse affinité avec les joueurs, on prenait peu de buts, voilà, j’étais chez moi, tout était réuni, c’était vraiment la saison la plus complète de ma carrière. On s’est régalé. Je suis encore dans le groupe WhatsApp de Martigues (rires), forcément, quand tu vis des moments comme ça, même la saison précédent, OK, c’était une grosse déception de ne pas monter, mais avec tout ce qu’on avait fait déjà, l’accession de N2 en National, la première saison de National… On a vécu des choses ensemble, y’avait du monde qui venait au stade.

Une erreur de casting dans ta carrière ?

Non, franchement, j’ai appris dans tous les clubs où je suis passé, que cela soit en Promotion d’Honneur à Port-de-Bouc où je me suis retrouvé après mon passage à Istres, quand je n’avais plus de club, ou même à Jura Sud, où je suis allé en CFA, en sortant du centre de formation de Lyon, mais je n’y suis resté que six mois, ça ne s’est pas très bien passé sportivement; ce n’est pas un grand souvenir, c’était dur, le climat, la région, je n’étais pas du tout épanoui là-bas. C’est là que je suis revenu m’entraîner avec Istres, et le club est monté de National en Ligue 2, et j’ai signé. Mais jai appris plein de choses et ce sont des expériences de vie qui font avancer. Je ne regrette rien. Bien sûr, j’aurais aimé jouer plus, avoir 200 matchs de Ligue 2, mais je suis très bien comme ça, j’ai la chance de vivre du foot, d’avoir vécu des émotions fortes, tous les joueurs n’ont pas connu ça et ont souvent plus de déceptions que de joies. Pour en revenir à Port-de-Bouc, là-bas, je me suis régalé avec mon cousin, en PHA, j’y ai joué un an, il y avait Barket Bekrar, un poison (rires), Koffi, c’était le foot plaisir, ça m’a fait du bien, j’ai grandi en tant qu’hommes.

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Ton passage au centre à Lyon ?

J’y suis resté 4 ans. J’ai joué en 16 ans Nationaux, 18 ans nationaux et j’ai fait quelques matchs en N2. A la fin, je m’entraînais un peu avec les pros. Il y avait une forte concurrence, Riou, Hartock, Lopes, Georgelin, et comme je disais, la maturité est venue tard, et dans ces clubs-là, il faut être prêt, et moi, je n’étais pas prêt. Il y avait une question de niveau aussi.

Un club où tu as failli signer ?

Y’en a beaucoup… Quand je suis parti à Granville, en DH, j’avais le choix d’aller à Marignane, à côté de la maison, mais à Granville, il y avait Johan Gallon, que j’avais connu à Istres, et dont je suis très proche, qui m’a persuadé de venir.

Le club où tu aurais rêvé de jouer, dans tes rêves les plus fous ?

(Sans hésiter) L’OM.

Le meilleur match de ta carrière ?

Granville – OM, en 1/4 de finale de la coupe de France (1996). Cela m’a vraiment fait quelque chose de jouer contre l’OM en plus, le contexte était particulier parce que, cette saison-là, je ne jouais pas en coupe de France, c’était l’autre gardien, Clément Daoudou, qui jouait (aujourd’hui gardien de Locminé en N2), mais il s’est passé quelque chose : Clément, que je connaissais d’Istres, et avec qui j’avais joué, s’est fait « tabasser » en soirée, par des forains, à Granville, justement après la qualification pour les 1/4 de finale… Du coup, il n’a pas pu jouer le 1/4 de finale, et c’est moi qui ai joué. Il se serait blessé au mollet, cela aurait été différent, franchement, ce n’était pas facile. Lui aussi supportait l’OM, il est né à Marseille, et j’aurais aimé que l’on se qualifie pour qu’il dispute la demi-finale. Après, sur ce match-là, j’ai pris du plaisir, j’ai été performant.

Tu vas au Vélodrome de temps en temps ?

J’ai emmené mes enfants déjà oui. Quand je peux y aller, j’y vais, oui.

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Le pire match de ta carrière ?

(catégorique) A Borgo. Avec Martigues (en mai 2023). Le match dont j’ai parlé avant. A une journée de la fin. On savait que si on gagnait, on avait notre destin en mains pour monter en Ligue 2 et là, pfff, y’a tout qui va mal, je n’ai pas été décisif. Un cauchemar…

Un ou plusieurs coéquipiers marquants ?

Tommy Untereiner, qui était avec moi à Istres et à Granville, c’est lui qui avait marqué le but décisif en coupe contre Bourg en 8e de finale. C’est aussi le parrain de l’un de mes deux fils. Pierre Lemonnier aussi, avec qui j’ai joué au Mans (il joue aujourd’hui à Guingamp en Ligue 2).

Le joueur avec lequel tu avais le plus d’affinités sur le terrain ?

(Sans hésiter) Pas un joueur, mais une charnière centrale : celle composée de Calvet-Moranté, la saison passée, à Martigues.

Un attaquant adverse qui t’a impressionné ?

Je n’en ai pas … Ah si ! Dembelé à Rennes, je crois que c’était un de ses premiers matchs en N3, c’était quand j’étais à Granville.

Une coéquipier perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?

Je l’ai déjà revu, même si on n’arrive plus trop à se voir maintenant, c’est Francesco Migliore, un Itatien qui a été formé avec moi à Lyon, on faisait chambre commune, il a joué à La Spezia et au Genoa en Série A. On devrait se voir bientôt.

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Un coach perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?

Johan Gallon, on a une relation forte. C’était l’entraîneur de la réserve d’Istres quand j’y étais, c’est lui qui a lancé ma carrière et m’a fait venir à Granville (il entraîne aujourd’hui à Mondeville, en Régional 2, près de Caen). Avec la distance, c’est compliqué.

Un coach que tu n’as pas forcément envie de revoir ?

Thierry Lauray.

Un dirigeant marquant ?

L’ancien président de Granville, Dominique Gortari, et Djamal Mohamed aussi à Martigues, avec qui j’ai une relation assez forte, c’est lui qui m’avait fait revenir et m’a fait confiance.

Une causerie d’un entraîneur ?

Celle de Johan Gallon avant le 1/4 de finale de coupe de France contre l’OM.

Une consigne d’un coach que tu n’as jamais compris ?

(Rires). J’utilise mon joker !

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Le joueur le plus connu de ton répertoire téléphonique ?

Euh… (Il réfléchit) Sébastien Perez déjà (rires) (Sébastien Perez est le directeur sportif de l’AS Cannes, il a joué notamment à l’OM) ! Logan Costa de Villareal, avec qui j’ai joué au Mans. (Il réfléchit encore). Foued Kadir aussi (rires) !

Des tocs, des manies, avant un match ?

J’embrasse mon tatouage sur mon bras gauche, qui représente les dates de naissance de ma soeur, de mon père et de ma mère.

Une devise ?

Le travail paie.

Des passions ?

J’aime bien l’immobilier, le golf, et puis le sport en général, le tennis, le padel, la pétanque…

Ton après-carrière, tu y penses ?

Ma priorité, ce sera d’être entraîneur des gardiens, mais j’aime bien l’immobilier, j’ai investi à Istres, où j’ai ma maison, j’ai un appartement au Mans : quand j’ai acheté, ce n’était pas cher, ça a grimpé depuis ! Et j’ai un petit chalet à la montagne. J’essaie de diversifier mes investissements.

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Pourquoi ce départ de Martigues ?

Je n’étais pas en accord avec ce qui se passait. Tout simplement. Quand Grégory Poirier est parti, cela a fait un gros changement, pour tout le monde, et il est arrivé un nouveau coach… voilà… forcément,… avec un groupe comme le nôtre, avec cette mentalité-là, ça ne collait pas. Quand j’ai entendu certaines choses sur mes coéquipiers, ça m’a fait quelque chose, et comme je suis de là-bas… Donc, quand tu vois ce que le club est en train de devenir, ça fait mal. J’ai cherché à partir. J’ai eu une discussion franche avec le coach, je ne cautionnais pas ce qui se passait, alors que, pourtant, sportivement, je jouais. Juste une fois, il m’a mis sur le banc, mais le match suivant, j’ai rejoué. Je lui ai dit que je ne voulais plus travailler avec lui, tout simplement. Il y a eu l’opportunité Cannes qui s’est présentée. Et voilà.

Tu as préféré descendre de deux divisions plutôt que de rester en Ligue 2 ?

Je savais que si je restais à Martigues, je ne serais pas aussi performant que ce que je le souhaitais, que je ne pourrais pas être bien dans ma tête. Après, je ne cache pas que mon objectif premier n’était pas de jouer en National 2, mais plutôt d’attendre le mois de janvier pour voir si une opportunité se présentait, au moins en National, ou à l’étranger. Mais le feeling est immédiatement passé avec « Seb » (Sébastien Perez, le directeur sportif), la confiance, les conditions, les structures, les installations, et au niveau familial, je suis quand même assez proche de mes deux garçons (9 et 6 ans), qui sont restés à Istres, où ils sont scolarisés, et puis, en 2 heures de route, quand j’ai un jour off, je peux rentrer les voir, sinon, ils viennent le week-end quand on joue à domicile. Ce critère a pesé. En fait, tout était réuni pour que je signe à Cannes. J’avais des opportunités, sincèrement. Peut-être qu’à 26 ou 27 ans, je n’aurais pas pris le décision de repartir en N2, mais là, c’est différent, j’ai 38 ans, je me sens épanoui.

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On a l’impression, de l’extérieur, que tout a mal été géré à Martigues après l’accession en Ligue 2…

Il y a d’abord eu le départ du coach (Grégory Poirier), on était proche de lui, et dans ces-cas là, les cartes sont redistribués quand un nouveau coach arrive, c’est normal. Greg avait une relation particulière avec nous, on se connaissait depuis longtemps. Et nous, après son départ, on s’attendait à ce que celui qui prenne la suite soit aussi … Ici, c’est un club spécial, c’est un peu amateur, il y a des joueurs qui n’ont jamais évolué à ce niveau-là, à qui il faut donner un peu de de la confiance, mais c’était tout l’opposé. Il y a aussi eu l’histoire du stade Turcan (non homologué pour la L2), qui n’a pas arrangé les choses. Martigues, c’est vraiment un club familial, peut-être aussi qu’on est trop vite monté, que le club n’était pas prêt, quand tu vois le stade, le centre d’entraînement, c’est très compliqué. C’est très différent à Cannes, où les infrastructures sont meilleures. Il y a tout déjà ici !

Le mauvais classement de Cannes, quand tu as signé, ne t’a pas fait peur ?

Et bien même pas, non ! Des gens m’ont dit « Mais pourquoi tu vas en N2 ? En plus ils sont relégables…  » Mais je connaissais le projet, je savais que c’était ambitieux, je connaissais Hamza Hafidi, avec qui j’ai joué au Mans, et « Max » Blanc, que j’ai connu au centre à Lyon aussi (ex-Villefranche), et d’autres joueurs que j’ai croisés sur les terrains.

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Tu es un gardien plutôt…

Simple.

Un modèle de gardien ?

Buffon, Barthez, et actuellement, Jan Oblak (Atlético de Madrid).

Ton idole de jeunesse ?

Buffon.

Ton match de foot de légende ?

France-Brésil en 1998.

Ta plus grande fierté ?

Mes enfants.

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Istres ou Martigues ?

Martigues. Déjà en jeunes, je préférais jouer à Martigues. J’ai vécu plus d’émotions aussi à Martigues.

Mais pour y vivre, tu préfères Istres …

Ce n’est pas pareil. Je suis revenu à Istres parce que j’ai ma famille, parce que c’est plus simple. Mais pour y vivre, c’est quand même mieux Martigues…

Le milieu du foot, en deux ou trois mots…

Actuellement, ce n’est pas joyeux (rires). Passionnant, c’est quand même la base, la passion ! C’est le sport que j’aime, rassembleur quand même, qui procure des émotions.

L’AS Cannes ?

Un club ambitieux, structuré, historique, emblématique. Quand j’ai dit à mon père que j’allais signer à Cannes, il m’a dit que ce club représentait vraiment quelque chose, notamment pour les anciens.

Samedi 1er février 2025, au stade Coubertin, à Cannes : match en retard de National 2 (J14) : AS Cannes – SC Toulon, à 18h.

  • Texte : Anthony BOYER / Twitter @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : Kevin Mesa / AS Cannes et 13heuresfoot
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Le nouveau coach du club haut-savoyard, véritable globe-trotter du football, affiche plus de 40 ans d’expérience sur un banc et presque autant d’équipes entraînées. Le Vauclusien évoque sa personnalité et sa vision du foot, donne des recettes et livre quelques savoureuses anecdotes.

Par Anthony BOYER / Photos : TEGG

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S’entretenir, même en visio, avec Noël Tosi, c’est l’assurance de passer un excellent moment. Charisme, bagou, truculence, séduction, humour, bonhomie, l’entraîneur de 65 ans – « Je vais faire comme Raymond Goethals, essayer de gagner la Champion’s League à 75 ans ! » – possède un peu toutes ces caractéristiques, et c’est ce qui le rend très différent de pas mal de ses confrères entraîneurs. Et en plus, il est bavard, à tel point qu’il faudrait deux jours pour éluder tous les sujets; ça tombe bien, l’interview a duré deux jours : elle a été enregistrée en deux matinées ! « Anthony, je dois filer à l’entraînement, on se rappelle demain matin ? » « Ok Noël, mais un peu plus tôt alors ? » « 7h45 ? » « Banco ! »

En un mot comme en mille, le joyeux drille Noël Tosi est ce bon client, affable, pagnolesque, charmeur, rieur. Un personnage haut en couleurs. Mais la singularité a parfois son revers de médaille. Pour préparer cet entretien, on a lu quelques articles consacrés au natif de Philippeville (devenue Skikda), en Algérie, où les anecdotes fusent. Et celle qui a retenu le plus notre attention concernait son arrivée à la tête de la sélection de Mauritanie. Quelle ne fut pas notre surprise lorsque, dès la première question, il répondit exactement ce que nous venions de lire ailleurs au sujet de cet épisode ! Bien sûr, nous l’avons laissé dérouler son histoire, au demeurant incroyable, que l’on a volontairement choisi de mettre à la fin de ce papier, un peu comme une question subsidiaire ! Et puis, Noël Tosi raconte tellement bien les histoires… Le reste est aussi très bon, du Tosi dans le texte, tantôt sérieux, tantôt drôle.

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Début janvier, l’entraîneur, qui affiche 40 ans de carrière sur un banc et 35 clubs dirigés (!), s’est engagé en National 3, à Thonon Evian Grand Genève, en remplacement de William Prunier, quelques semaines après avoir commencé la saison à GOAL FC, en National 2. Sans langue de bois, l’entraîneur au CV long comme le bras évoque ces deux épisodes, notamment son retour manqué à Chasselay, où il pensait retrouver le club qu’il avait connu lors de son premier passage il y a 10 ans, aux Monts d’Or, au-dessus de Lyon. OK, le coach, qui fut le premier avant Patrick Vieira à s’expatrier aux Etats-Unis, à Sacramento, en 1984 (vainqueur de la coupe de Californie), change de clubs comme certains changent de slip. Mercenaire, Noël Tosi ? On lui a posé la question. Vous lirez la réponse. De toute façon, Noël Tosi a réponse à tout.

Enfin, pour ne pas « polluer » cette entame de papier, nous avons préféré lister à la fin (encore !) les quelque 35 clubs et sélections que Noël Tosi a entraînés ! Mieux, nous lui avons demandé de les citer, par ordre chronologique ! Là encore, on vous laisse découvrir le résultat.

Interview : « Je ne suis pas un mercenaire »

Noël, c’est quoi votre mode de fonctionnement ?
Je ne sais pas si je fais du football ou si je fais du Noël Tosi ! D’abord, c’est de m’adapter au rythme du temps. Bon, je fais un peu entraîneur vintage maintenant mais je suis tout jeune dans ma tête et j’ai su m’adapter aux générations. Comme je l’explique souvent, il y a des groupes qui ont des profils psychologiques, certains qui vous conviennent, d’autres qui ne vous conviennent pas. Par exemple, s’il faut un gendarme, ce n’est pas moi qu’il faut prendre comme entraîneur. S’il faut un tacticien, de l’intelligence, de l’humanité, oui, c’est moi qu’il faut prendre. On ne choisit pas toujours les clubs où on va, ni les groupes que l’on entraîne. On est souvent venu me chercher pour sortir des équipes de l’agonie, un peu comme Rolland Courbis en première division à l’époque, sauf que moi c’était en deuxième division, ce qui m’a permis de comprendre une chose : il ne faut jamais mettre un joueur sur le côté. Mon style, c’est de dire qu’un joueur, même s’il n’adhère pas à tes principes, même s’il n’a pas l’esprit que tu souhaites, il faut le considérer, sinon c’est un signe de faiblesse. Avec cet état d’esprit-là, j’ai réussi à « récupérer » des joueurs, des clubs, à me sortir de situations. Pour la fête des pères, je reçois entre 50 et 100 textos « Bonne fête papa ! ». Bien sûr, beaucoup émanent de joueurs africains, parce qu’ils ont encore plus besoin d’amour, et moi j’ai ce côté humain qui plaît, je sais leur donner ce qu’il faut. Mais je sais aussi avoir un main de fer dans un gant de velours : j’ai une technique bien particulière, c’est « Un coup de pied au cul, un bisous », et ça, ça marche (rires).

Votre plus grosse déception d’entraîneur ?
C’était quand j’entraînais Montauban, en CFA (en 1996/97). On est premier avec 12 points d’avance. On perd deux matchs, je me retrouve avec six points d’avance et là, le président, Philippe Delcaillau, me convoque, En fait, ce que je ne savais pas, c’est qu’il avait promis l’équipe à un joueur qui n’avait pas le diplôme, et si c’était moi qui montait, le joueur ne pouvait pas prendre l’équipe, alors il m’a viré. Je n’ai pas compris. D’abord, comme on était le 1er avril, je lui ai dit que sa blague était drôle, mais j’ai compris que ce n’était pas une blague. Je lui ai demandé les raisons, et là, c’est toujours pareil; quand on veut virer un entraîneur, on dit toujours que son discours ne passe plus avec les joueurs. C’est facile, c’est comme quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage. C’est la plus grosse déception de ma carrière. Je ne suis pas rancunier … mais je lui en veux encore. Il n’aurait jamais dû faire ça. J’avais une famille, des enfants, il restait deux mois… Je serais allé au bout (le club n’est pas monté). C’est Jean-Luc Pasturel, un ex-joueur de Rodez, qui m’a remplacé.

« Un journaliste m’avait qualifié d’extra-terrestre »

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Ce n’est pas faire injure que de dire que vous êtes plus près de la fin de votre carrière que du début : c’est quoi votre plus grande fierté d’entraîneur ?
J’espère qu’elle n’est pas encore arrivée ! C’est d’avoir formé des joueurs de qualité, d’avoir donné du bonheur à beaucoup d’entre eux, d’avoir le retour et la reconnaissance que j’ai aujourd’hui, de leur part et de la part des entraîneurs et des dirigeants. Cela dépend de la personnalité : je suis quelqu’un d’affable, qui aime rire, ça dénote un peu dans le milieu. Parfois, on m’a dit que si je n’avais pas fait du théâtre ou si je n’avais pas écrit des livres, j’aurais fait une autre carrière : c’est possible aussi (rires) ! »Un journaliste m’avait qualifié d’extra-terrestre »

Vos qualités et vos défauts selon vous ?
Les défauts, pour moi, ça n’existe pas. Je m’explique. Prenez la relation hommes-femmes : admettons que je trouve tel défaut chez une femme, mais que vous, vous trouviez que ce défaut est une qualité chez elle. Donc ce sont des traits de caractère, et là, où on aime, où on n’aime pas. Après, des qualités, j’essaie d’en avoir le plus possible, mais on ne peut pas plaire à tout le monde (rires) ! Il faut accepter la contradiction. Quand on est entraîneur, il faut essayer d’être différent : quand j’étais en poste à Angers, un journaliste, malheureusement décédé aujourd’hui, avait titré « Noël Tosi, l’extraterrestre », ça me plaît bien (rires) !

« Il faut l’équipe autour de l’équipe »

Cette différence, vous la cultivez ?
Je pense que ça fonctionnerait partout à partir du moment où il y a ce critère, parce qu’en football, il n’y a pas de vérité : il faut l’équipe autour de l’équipe. Si l’équipe autour de l’équipe est bonne, vous réussissez tout le temps. A chaque fois que j’ai eu ça, j’ai toujours réussi. Après, autre critère, il faut trouver le président qui vous choisit, qui vous correspond. Sur tous les présidents de L1 ou L2, il y en a peut-être 2 ou 3 qui vont vous apprécier, les autres vont dire « Non mais attendez, je ne vais pas prendre Tosi, lui c’est un fou furieux… « , mais si on trouve la bonne personne au bon endroit, souvent on réussit.

Vous êtes un entraîneur plutôt comment ?
Humain.

« Les entraîneurs français sont maltraités »

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Des modèles de coach ?
Sur le plan du discours, Michel Hidalgo : c’est quelqu’un qui a bercé toute ma jeunesse, je buvais ses mots, j’aimais son humanité, ses compétences. Je suis amoureux de tous les entraîneurs et je trouve qu’en France, on a des entraîneurs extraordinaires, je peux en citer plein, Stéphane Le Mignan à Metz, Philippe Hinschberger, Régis Brouard, Jean-Michel Cavalli, des garçons qui ont plein de qualités mais qui ne sont pas en Ligue 1, mais heureusement, on a Bruno Genesio, un phénomène, Franck Haise, même Didier Digard, ce n’est pas parce qu’il est mal classé avec Le Havre qu’il n’est pas bon, mais je trouve que les présidents de clubs sont un peu durs avec eux. Pourtant, on a des grands entraîneurs en France. On est maltraités. On n’a rien à envier à personne. Je peux te citer 20 ou 30 entraîneurs qui peuvent aller en Ligue 1 à la place de certains. Je trouve aussi qu’il y a un manque total de respect de la part des entraîneurs étrangers de ne pas apprendre la langue; ça fait genre « Vous vous adapterez à moi, je n’ai pas à m’adapter à vous. » Alors que l’adaptation, c’est la plus belle qualité d’un entraîneur.

« Président un jour ? Pourquoi pas ! »

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Si vous ne deviez citer qu’un seul président ?
C’est impossible ! Même celui qui m’a viré ! Il y en a beaucoup que j’ai plus apprécié que d’autres, mais je ne peux pas tirer sur quelqu’un qui m’a donné à manger, qui m’a pris comme entraîneur, alors je ferais une réponse de Gascon : joker (rires) ! Un jour, René Charrier (ex-président de l’UNFP) m’a dit que je ferais un président extraordinaire, parce que je laisserais travailler l’entraîneur, parce que j’arriverais humainement à emmener tout le monde avec moi ! D’autres me l’ont dit aussi. J’ai répondu « faites moi une proposition, comme ça je prends ma retraite d’entraîneur (rires) ! » Président un jour ? On verra, pourquoi pas ? C’est vrai que j’ai des qualités humaines.

Des erreurs de casting dans votre parcours ?
Oh pauvre, j’en ai fait plein ! Je n’ai fait que des conneries, c’est pour ça que j’ai fini par devenir un bon entraîneur ! Mais avec le recul, je me dis que c’était nécessaire pour avoir la carrière que j’ai eue. Et puis, tu sais, une fois que j’ai fait une connerie, je ne la refais plus.

Un exemple de « connerie » ?
Un match capital pour la montée en National avec Dijon, en CFA, à Metz, contre la réserve (dernière journée de la saison 1998/99), et là, je veux réinventer le football, un peu comme ce qu’a fait Guardiola dans sa première finale de Ligue des Champions contre Chelsea. Je mets un milieu au poste de libero, des gauchers à droite, des droitiers à gauche, je fais une équipe à l’envers et je perds 4 à 2, et on ne monte pas… C’est Besançon qui monte. Et là, je me dis « Noël, la prochaine fois que tu as un match capital, tu mets chacun à son poste, tu n’inventes pas le football », et je ne l’ai plus jamais refait. Ce sont des défaites qui servent pour l’avenir.

De tous vos clubs entraînés, vraiment pas une seule erreur de casting ?
Non, aucune. J’ai toujours été content là où j’étais, et aujourd’hui je suis content d’être où je suis, à Thonon Evian Grand Genève, avec un président, Ravy Truchot, qui a des valeurs humaines incroyables, il a dit « C’est lui que je veux » en parlant de moi, et ça je ne l’ai pas souvent entendu dans ma carrière, mais quelques fois quand même, hein. Quand un président vous dit que vous avez toutes les valeurs humaines qui correspondent à ce qu’il veut mettre en place dans un club, alors là, on a envie de s’arracher.

« Je ne voulais pas être le fossoyeur de GOAL »

Photo TEGG

La présence d’Olivier Chavanon, le directeur sportif de Thonon Evian GG, que vous avez connu joueur, a-t-elle joué dans la décision ?
Olivier, j’étais son entraîneur à Bourges, en D2, on a toujours gardé de très bons rapports pendant toutes ces années; personne ne le sait, mais Olivier a fait gagner des sommes d’argent monumentales à Clermont avec la vente des joueurs. Il connaît son boulot par coeur. Il est ultra-positif. Il m’a présenté à Ravy Truchot mais je pense que c’est le président qui m’a choisi, même si Olivier aussi. D’ailleurs, je devais venir au mois de juin dernier, mais il y a eu une question de timing, je crois que l’on s’est rappelé trop tard, et j’avais donné ma parole à Jocelyn Fontanel, le président de GOAL FC, qui est mon ami aussi. Donc quand Thonon Evian a décidé de ne pas continuer avec William Prunier, qui a fait du bon boulot d’ailleurs, Ravy Truchot m’a appelé à 6h du matin, et il m’a dit, « Voilà, c’était écrit, on va travailler ensemble, on ne l’a pas fait en juin, on va le faire maintenant ! ».

Pourquoi cela pas fonctionné à GOAL ?
Je pensais retrouver le club que j’avais quitté il y a 12 ans. Je pensais qu’il y avait beaucoup d’humanité. Je pensais que j’allais pouvoir mettre en place mes idées. Je pensais aussi qu’il y aurait l’équipe autour de l’équipe, une valeur qui m’est cher. J’ai accepté beaucoup de choses. Mais je ne pensais pas qu’on allait avoir autant de points retirés au classement, ni qu’on allait faire une grève, pour laquelle je n’étais pas pour d’ailleurs, et puis le reste… C’est comme ça, cela devait se faire comme ça… J’ai gardé de bons rapports avec le président et je leur souhaite de tout coeur de se maintenir, je suis content quand ils gagnent. Mais je suis beaucoup mieux où je suis, par rapport à tout ce que j’ai dit avant. Il y a des groupes, des clubs, qui vous correspondent, et celui-là, je pense qu’il me correspond un petit peu mieux et je correspond un petit peu mieux à ce club. Les résultats n’étaient pas catastrophiques à GOAL, sans attaquant. Après, je n’avais pas envie non plus d’être le fossoyeur de GOAL, donc j’ai préféré prendre du recul. Et puis, je n’ai pas été bon, je n’ai pas fait ce qu’il fallait à GOAL au moment où il fallait le faire, mais j’étais persuadé que c’était le même club qu’avant, et bien non : erreur de casting (rires).

« Je n’ai jamais eu peur de rien »

Photo GOAL FC

Petit flash-back : quand avez-vous su que vous vouliez devenir entraîneur ?
Très tôt. En classe, j’étais le délégué. Joueur, j’étais capitaine de mes équipes. J’étais gardien, un poste proche de l’entraîneur. Je suis passé entraîneur-joueur à 24 ans, à Orange, en D3. Ensuite, j’ai été le plus jeune entraîneur d’un centre de formation, le plus jeune entraîneur d’une équipe professionnelle à 28 ans, à Grenoble, il y en avait un autre, au Mans je crois, qui avait 29 ans (il cherche son nom). J’ai aussi été le premier entraîneur français aux Etats-Unis. En fait, je n’ai jamais eu peur de rien. Je suis allé partout où on m’a dit « Je t’aime », et je ne regrette rien. Je suis content d’avoir fait ce que j’ai fait.

Meilleur joueur entraîné ?
Oh là là, ce n’est pas simple ! Je ne peux pas en sortir un (rires) ! On joue à Sacramento contre les San Francisco Seals, en championnat. Je regarde l’échauffement de mes joueurs, mais je vois qu’il en manque un; là, il y a un ballon qui sort sur le côté, et (rires) je vais chercher le ballon, et je vois Antonio Sutton, un joueur qui a été international, en train de fumer du cannabis… Un pétard comme Bob Marley ! Avant un match ! Je lui ai dit « Ce n’est pas possible, allez, va à l’échauffement ». Il jette son pétard, il le piétine, il s’échauffe, il joue et il marque 3 buts… Depuis ce jour-là, je sais que le cannabis fait marquer des buts ! Je ne sais pas si c’est le meilleur joueur que j’ai entraîné, mais c’est le plus fou en tout cas (rires).

« Partir de Gueugnon m’a fait mal au coeur »

Photo TEGG

Le club où vous vous êtes senti le mieux ?
Franchement ? J’ai eu des joies partout. Je suis quelqu’un qui ne regarde pas la couleur, qui ne regarde pas la religion, qui ne regarde pas l’orientation sexuelle, qui ne fait pas de politique. Un homme, c’est un homme. L’aspect humain passe d’abord.

Une décision difficile à prendre ?
Quand on est entraîneur, on a énormément de décisions difficiles à prendre. Mais il y en a une, quand même, qui m’a fait mal au coeur. C’est quand je suis parti de Gueugnon, un des meilleurs clubs de Ligue 2, à l’époque, pour aller dans un autre club de Ligue 2, à Créteil, parce que Créteil avait fusionné avec Saint-Maur Lusitanos, où j’avais déjà entraîné, le président, Mr Lopes, était le même.

Sur votre CV, on voit que certains clubs apparaissent plusieurs fois : étonnant, non ?
Je crois que j’ai entraîné huit clubs deux fois ! Mais à 80 %, c’était les mêmes présidents dans ces clubs, ça veut dire que j’avais laissé un bon souvenir, que j’avais fait du bon travail. Je suis fier de ça. J’ai fait des rencontres incroyables, comme le président Armand Lopes, aux Lusitanos de Saint-Maur, on a été champion de France de N2, Bernard Gnecchi à Dijon, un président d’exception. Ou mon président de Cherbourg, Gérard Gohel : si un joueur a un problème de plomberie, Gérard arrive avec sa caisse à outils et il répare ! Humainement, il est incroyable, il aime rire, et comme je suis un peu comédien à mes heures, je me régalais en lui racontant mes blagues. Cherbourg a été un bon moment de ma vie.

Cherbourg, justement, vous y êtes retourné en N3, il n’y pas longtemps (en 2019)…
On attendait un partenaire qui n’est pas venu, mais j’ai laissé le club en tête du championnat. Gérard n’arrivait pas à me payer et m’a dit « essaie de trouver quelque chose » et c’est là que je suis parti au Luxembourg, et après il y a eu la Covid.

« En situation de crise, j’excelle »

Photo TEGG

La contrepartie de votre CV, c’est qu’avec tous ces clubs, toutes ces durées courtes, vous pouvez passer pour un mercenaire : vous en êtes conscient de cela ?
Pas un mercenaire, non. Mais un globe-trotter, oui. Je ne suis pas du tout un mercenaire, j’ai même entraîné gratuitement certaines fois, quand je le pouvais. Je n’ai pas du tout fait ça pour l’argent. Mais c’est souvent quelque chose que l’on me met sous le nez. Aux Etats-Unis, c’est différent, on dit « Il a entraîné dans plein de clubs, waouh, ça fait 35 ans qu’il est dans le métier, il a toujours trouvé un club, waouh », mais en France, on dit « Ah bah il a fait beaucoup de clubs », mais moi, je n’ai pas fait entraîneur d’un centre de formation où on peut rester en place pendant 5 ans ! Vous savez quelle est la durée de vie d’un coach pro ? C’est 18 mois. Je suis entraîneur professionnel, on me paie pour avoir des résultats. Des fois, il faut savoir partir, des fois il faut savoir rester. Les quelques rares entraîneurs qui durent plus que 18 mois, ce sont des phénomènes. Même Klopp, trois ans à Liverpool, il n’en pouvait plus, alors qu’il avait une équipe exceptionnelle. Quand on presse les joueurs sans cesse, qu’on a tout donné au bout d’un an ou 18 mois, alors il faut savoir partir. Quand je suis dans une mission sauvetage, une fois que c’est fini, qu’est ce que je vais bien pouvoir leur dire aux joueurs la saison suivante, après tout ce que je leur ai dit pour se sauver ? Voilà. Après, en situation de crise, je sais que j’excelle. C’est pour ça qu’on est souvent venu me chercher pour des missions de 6 mois ou un an. On a fait des one shot aussi parfois d’un ou deux ans pour monter. Je ne vois pas pourquoi je m’installerais 5 ans dans un club alors que je sais que ce n’est pas là que je serai le meilleur. Je suis plus performant sur des durées courtes. Et puis, ce n’est pas toujours de mon fait : parfois on vient me chercher, on m’appelle. Au Congo, on gagne le championnat, la coupe, et je pars… Après, je me dis « Qu’est ce que je vais faire d’autre ? ». Je n’ai rien à envier à personne. Je n’ai peur de rien. Je connais mon football. Et heureusement que j’ai foiré parfois, sinon je n’aurais pas réussi à gagner des matchs.

« Perdre un match, ce n’est pas dramatique »

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Qu’est-ce que vous pouvez apporter à une équipe comme Thonon Evian, dont les résultats étaient plutôt bons avant votre arrivée, début janvier ?
Le problème de Thonon, c’était un problème de fonctionnement qu était délicat et qui ne convenait pas aux dirigeants. C’est comme pour vous : vous épousez une femme et vous allez vous apercevoir au bout de trois semaines qu’elle ne veut pas faire l’amour avec vous, alors vous allez en changer (rires !). C’est un peu ça, ça ne correspondait pas à ce que le club recherchait. Pour l’instant, je n’ai que deux matchs à la tête de Thonon Evian, un nul et une défaite. Il va falloir ça pour prendre les bonnes décisions peut-être. Mais perdre un match, ce n’est pas dramatique. J’ai souvent perdu des matchs et ça m’a permis de trouver le solution. Moi je ne pleure jamais, j’ai des attaquants blessés, à GOAL aussi, j’avais perdu mes attaquants… Je sais que l’on aura des jour meilleurs. De toute façon, on sait que ça se jouera en mars/avril. Là, en trois semaines, on ne peut pas changer beaucoup de choses.

C’est quoi, votre style d’équipe, sachant que, forcément, quand vous arrivez en cours de saison dans un club, vous devez vous adaptez…
J’aime bien le jeu offensif, avoir beaucoup d’attaquants. J’aime bien quand ça centre. L’exemple aujourd’hui, c’est de dire qu’on adore le jeu de Liverpool, mais c’est trop facile; j’aime les équipes qui sont à la fois capables de faire de la conservation, du jeu direct, du pressing, où les milieux se projettent vers l’avant. Un jeu offensif et ambitieux, quoi ! Je préfère perdre 4 à 3 à domicile que perdre 1 à 0. Mais pour dire la vérité, parfois, quand il fallu sauver des équipes, on jouait à 10 derrière et on laissait traînait la malette à pharmacie (rires) !

« Mon spectacle, actuellement, c’est Thonon Evian ! »

Avec les Diables noirs de Brazzaville.

Le théâtre, le cinéma, les livres, vous continuez toujours ?
Non. Mais c’est vrai que j’ai ces passions pour le théâtre (il a joué dans des pièces) et l’écriture (il a écrit des romans). Parfois, dans le foot, il y a des gens dont le hobby est d’aller boire du chablis, de jouer au golf ou à la pétanque, moi c’est le théâtre et l’écriture. Mais je pense que cela m’a plus desservi qu’aidé. Même si j’ai appris plein de choses au théâtre, comme la maîtrise de la communication, parce que ce n’est pas facile d’être entraîneur professionnel : parfois on doit répondre à des questions difficiles, et d’avoir fait du théâtre m’a permis de jongler avec ça, d’avoir mon humour, ce bagou. Parfois, quelqu’un me dit « Bonjour » et moi je dis le reste hein (rires) ! Mais ça m’a permis d’avoir un équilibre psychologique, et je retrouvais les sensations que j’avais quand j’étais joueur, parce qu’il y avait un public, des réactions. J’aime aller voir des comédies, des drames, des opéras. J’aime tous les spectacles vivants. J’aime écrire aussi. J’ai écrit des pièces qui ont eu du succès et je peux te dire que faire rire en écrivant, ce n’est pas facile. J’aime m’amuser en dehors du foot (rires). Mais en France, un entraîneur de foot doit être un entraîneur de foot, pas un gars qui écrit des livres ou fait du théâtre… Je ne regrette rien. Je suis heureux. J’ai eu des joies incroyables au football et j’en aurai encore. J’ai eu des joies incroyables au théâtre. Peut-être que je remonterai un jour sur les planches, mais pour le moment, mon spectacle, c’est Thonon Evian Grand Genève (rires) !

Seriez-vous capable de me citer, maintenant, dans l’ordre chronologique, et sans tricher, tous les clubs dans lesquels vous avez exercé ?
Je peux prendre une feuille et un stylo ? Alors (il écrit), SC Orange, entraîneur-joueur, en D3, AST Deauville… FC Grenoble… Non, je n’y arriverai pas, il y a quand même 40 ans de métier. Et oui Anthony !

  • La fameuse question subsidiaire
Photo TEGG

Meilleur souvenir d’entraîneur de votre carrière ?
J’espère qu’il n’est pas encore arrivé. Alors si, j’en ai des merveilleux, bien sûr. J’en ai un qui est fabuleux. C’est long à raconter : je viens de faire une belle saison en Ligue 2, et je pense que je vais avoir un gros club de Ligue 2 ou peut-être un club de Ligue 1, alors j’attends pour signer. Je me retrouve sans rien et quand je me réveille, je n’ai pas non plus de clubs de National ou CFA car tout le monde a repris. Je reçois un coup de fil, je crois comprendre que l’on me dit « C’est Maurice et Annie », alors qu’en fait, c’est la Mauritanie, vous avez entraîné Ahmed Dabo, et il dit que vous êtes le meilleur entraîneur qu’il n’a jamais eu ! Et là il me demande « Est-ce que vous seriez susceptible de venir entraîner en Afrique ? » Je dis « Pourquoi pas », et je pars en Mauritanie sans trop savoir où c’est, je fais 5 heures d’avion, là-bas je suis reçu comme un Milord, on discute, on se met d’accord, et je rentre en France. Et là, je vois que la Mauritanie est 188e mondiale ! 188e ! Derrière, il y avait juste le Liechtenstein, le Vatican et San Marin. Je me suis demandé ce que je venais de faire… Bon, finalement, je me dit, c’est une première expérience de sélectionneur national, de DTN, et je fonce ! J’essaie de faire une sélection, je trouve 20 joueurs valables, mais je n’arrive pas à bien voir le niveau, et Amara Traoré, qui entraîne Saint-Louis, au Sénégal, on fait un match amical, mais de manière informelle, on joue contre une D2 sénégalaise et on perd 6 à 0 (rires). Là, je me dit « Ouh la la ». Et par hasard, pendant une séance de l’équipe nationale, le ministre des Sports de la Mauritanie vient me voir, et m’amène un cabri, pour tout le travail que je fais. Je lui dit « Mettez-le sur le banc, pas comme remplaçant, mais parce que je suis à l’entraînement ! » Et là, il me dit qu’il a un neveu qui joue très bien au foot. Poliment, je lui réponds que pour le moment, je ne peux pas le prendre, que je le prendrai à la prochaine sélection, et je vois son neveu qui sort de la voiture, déjà habillé dans la même tenue que les joueurs de la sélection ! Je le prends, il n’est pas plus mauvais que les autres, même un peu meilleur. Je le garde dans le groupe. Le ministre est content, et il me vient une idée. Il y a eu le tirage du tour préliminaire de la coupe du Monde, Mauritanie-Zimbabwe, 45e nation mondiale. Je dis au ministre qu’il faudrait apporter un peu de professionnalisme à cette équipe, et je lui demande qu’il me fasse onze passeports mauritaniens. A l’époque, il n’y avait pas de loi. On pouvait faire ce que l’on voulait, par exemple, au Togo, ils avaient cinq Brésiliens. Je me suis servi de ce vide juridique pour faire venir 11 joueurs que j’avais entraîné en Ligue 2. Cela a fait un tollé général, je me suis fait traiter de tous les noms, et depuis ce jour-là, une loi oblige un joueur à rester au moins deux ans dans un même pays avant qu’il puisse le représenter. Et là, je n’avais plus la même équipe, et j’avais des joueurs que je connaissais, qui étaient habitués à ma façon de fonctionner, donc j’en mets 7 ou 8, je garde deux ou trois très bons Mauritaniens, et on reçoit le Zimbabwe et au bout de 17 minutes, on mène 3 à 0. Le président de la Fédération Zimbabwéenne descend des tribunes, vire son sélectionneur et se met sur le banc ! Incroyable ! En plus c’était une grosse équipe ! J’avais des joueurs comme Mohamed Benyachou (Nîmes), Ahmed Dabo bien sûr, Antonio Tavares (St-Maur), un Portugais, un mauritanien blanc et citoyen du monde. Tout le monde pleurait à la fin du match, je ne comprenais pas pourquoi, et le président me dit, « Noël, cela fait 14 ans que l’on n’a pas gagné un match ! ». A partir de là, j’ai crée deux académies de jeunes de 17-20 ans, avec les meilleurs jeunes mauritaniens, afin de les faire jouer dans le championnat mauritanien. La Mauritanie est ensuite passée de la 188e place à la 73e, elle a fait la Coupe d’Afrique des Nations, c’était inimaginable avant. J’ai pleuré moi aussi. Je crois que c’est un des plus grands moments de l’histoire de la Mauritanie. Des anecdotes comme ça, j’en ai à la pelle ! Je peux en raconter des centaines !

On veut bien le croire…

  • Le parcours d’entraîneur de Noel Tosi

1984 : Sacramento (Etats-Unis)
1985-1986 : Orange (D3)
1986-1988 : AS Trouville-Deauville (D4, DH)
1988-1992 : FC Grenoble (D3 et D2)
1992-1993 : FC Bourges (D2, adjoint d’Alain Michel)
1993-1994 : Amicale de Lucé (N3)
1994-1995 : SCO Avignon (DH)
1995-1996 : Nîmes Olympique (directeur du centre de formation)
1996-1997 : Stade Quimpérois (National)
1997-1998 : Montauban FC (N2)
1998-1999 : Dijon FCO (N2)
1999-2001 : Saint-Maur (N2, accession en National)
2001-2002 : FC Gueugnon (Ligue 2)
2002-2003 : US Créteil-Lusitanos (Ligue 2)
2003-2004 : Mauritanie (sélectionneur)
2004 : Angers SCO (Ligue 2)
2004 : RC Paris (National)
2004-2005 : Angers SCO (Ligue 2)
2006-2007 : Congo (sélectionneur)
2007-2009 : AS Cherbourg (National)
2009-2010 : Dijon FCO (directeur technique)
2010-2011 : Nîmes Olympique (Ligue 2)
2012 : JS Saint-Pierroise (La Réunion)
2012-2013 : AC Arles-Avignon (Ligue 2, adjoint de Franck Dumas puis entraîneur numéro 1)
2014 : US Le Pontet (N2)
2014-2016 : Monts d’Or Azergues Chasselay (N2)
2017 : FC Mulhouse (N2)
2018/2019 : Wydad Athletic Club Casablanca (D1 Maroc, manager général)
2019-2020 : AS Cherbourg (N3)
2020 : Jeunesse d’Esch (D1 Luxembourg)
2020/21 : FC Balagne (DH, manager général)
2022 : Africa Sports d’Abidjan (D1, Côte d’Ivoire)
2023 : Diables noirs de Brazzaville (D1, Congo)
2024 : GOAL FC (N2)
Depuis Janvier 2025 : Thonon Évian Grand Genève FC (N3)

  • Son parcours de joueur :

Gardien de but à Carpentras (DH), Avignon (D2), au Gazélec Ajaccio (D2), à l’US Bénédictins (La Réunion) et à Orange (D3).

Texte : Anthony BOYER / Twitter @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos : Thonon Evian Grand Genève

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Le leader de la poule B semble filer tout droit vers le National mais la concurrence est rude avec un avion de chasse lancé à ses trousses, Bordeaux. Et si c’était la bonne année pour l’USSM ? Entretiens avec Gwen Corbin, le coach, et Fabrice Rolland, le DG.

Par Anthony BOYER / Photos : Philippe Le Brech

Les Malouins ont terminé l’année 2024 avec un bilan de 32 points en 14 matchs (9 victoires et 5 nuls). Photo Philippe Le Brech

(Reportage réalisé avant la défaite, la première en championnat, face au Stade Briochin à Marville, 1-2). Et à la fin, s’il ne reste qu’un seul club invaincu dans les cinq premières divisions françaises, ce sera peut-être l’US Saint-Malo ! Pour l’heure, les Malouins partagent ce « titre » symbolique, honorifique, avec le PSG (!) et Rousset, un club de National 3 situé à côté d’Aix-en-Provence (Rousset s’est incliné pour la première fois de la saison ce samedi 18 janvier, 3-2 à Alès). Jusqu’à la semaine dernière, ils étaient quatre. C’était avant que le FC Fleury 91 (N2) ne s’incline à domicile face au FC 93.

Rester invaincue, l’USSM se doute bien que cela sera compliqué, mais l’essentiel est ailleurs : 2e de N2 la saison passée derrière l’ogre Boulonnais, 5e il y a 2 ans, l’équipe entraînée par le « régional » Gwenaël Corbin, arrivé en février 2022 après 21 ans passés à la tête du FC Guichen (prononcez « Guichain »), au sud de Rennes, est sur une phase de progression dont la finalité logique serait d’accéder, pour la première fois de son histoire, en National.

A Blois, juste avant Noël, sur un terrain « difficile », les Bretons ont été menés au score mais ont su puiser dans leurs réserves pour égaliser, et partir en vacances sur une bonne note, bien installés en tête de la poule, avec 32 points en 14 matchs (2,3 points par match), avec 7 points d’avance sur Saint-Pryvé / Saint-Hilaire et 8 sur Bordeaux*. La fusée a décollé !

*Battue à domicile samedi 18 janvier par Saint-Brieuc, l’USSM compte désormais 5 points d’avance sur les Girondins, vainqueurs dans le même temps 2 à 0 face au Poiré.

Le stade de Marville de Saint-Malo, à l’Anglaise ! Photo Philippe Le Brech

La semaine dernière, le premier de leur deux matchs d’affilée à domicile, face à leur dauphin, a été reporté, la faute aux conditions météorologiques (le match contre St-Pryvé aura lieu samedi 1er février à 18h). Du coup, ce samedi, à 18h, ils recevront une équipe de Saint-Brieuc qui se présentera au stade de Marville avec le désavantage d’avoir livré une bataille mercredi en 16e de finale de coupe de France contre Annecy (qualification pour les 8es de finale aux tirs au but !). Forcément, la fraîcheur sera un élément à prendre en considération face à l’adversaire qui les avait éliminés de la coupe, au 8e tour, aux tirs au but.

Souvent placé, jamais gagnant, Saint-Malo veut capitaliser sur des années passées à construire et structurer. Et si demain le National arrive, le club sera prêt. Il veut aussi en finir avec cette réputation liée au contexte : parce qu’ici, la vie sur la Côte d’Emeraude est, comment dire, paisible. Propice au farniente, à la flânerie et à la rêverie. Saint-Malo, ville corsaire et historique, c’est le tourisme, les remparts, les balades intra-muros dans la citadelle, la mer, un panorama à couper le souffle… De quoi se « laisser vivre ». « Mais heureusement, à Saint-Malo, on travaille aussi beaucoup, coupe d’emblée Fabrice Rolland ». Le directeur général du club, arrivé en 2017, veut en finir avec ces raccourcis : le joueur ne vient pas ici en « vacances » ou en « touriste » !

Pour 13heuresfoot, « Gwen » Corbin et Fabrice Rolland se sont exprimés avant le premier match officiel de l’année 2025 contre Saint-Brieuc.

Fabrice Rolland : « Un club, c’est une histoire d’hommes »

Fabrice Rolland, le directeur général du club. Photo Bernard Morvan.

Directeur général depuis 5 ans mais présent au club depuis bientôt 8, où il est arrivé au poste de directeur administratif et financier, Fabrice Rolland (52 ans) a eu une vie avant le foot, même s’il était déjà dirigeant d’un club amateur entre Grenoble et Valence, à l’US Chattoise, à côté de Saint-Marcellin, en Isère, le département dont il est originaire. « Je connaissais les rouages du foot même si ce n’était pas au même niveau qu’à Saint-Malo, déroule-t-il; j’ai un parcours de chef d’entreprise, plutôt manager d’entreprise – Il a été directeur d’un centre de profit en services aux entreprises de 200 salariés sur 3 départements, et aussi directeur et gérant d’une société de sous-traitance industrielle de 40 salariés –, mais cet amour du football m’a guidé ».

« Un choix de vie »

Son arrivée à Saint-Malo ? « Un choix de vie ». Un choix de… seconde vie même. « Pour des questions personnelles et de souhait. Je voulais mêler expérience de management d’entreprise avec ma passion et ma connaissance du foot. Avant, j’étais dans un grand groupe national, dans les métiers de service, puis je suis retourné à la faculté de Lyon à l’âge de 43 ans pour y passer une licence de management des organisations sportives. Je me suis retrouvé avec quelques personnes comme moi, en reconversion, et avec des jeunes étudiants. Mais je n’étais pas en quête d’un diplôme : ma présence sur les bancs de la fac avait un sens. J’étais en quête de rencontres, de réseau, de concepts, d’outils, de connaissances. Je venais de perdre mes deux parents, c’était un cheminement personnel, intime même. Vous savez, la vie est constituée d’étapes. Là, cela a été une sorte de révélation avec une motivation très forte de ma part. »

« Se confronter aux enjeux du foot »

Contre les Girondins de Bordeaux, l’USSM avait été tenue en échec 1-1 à Marville en novembre dernier. Photo Philippe Le Brech

Ce goût pour le management, les organisations sportives, le développement et la structuration, il veut le mettre au service d’un club de football. « J’avais une attirance pour ce domaine-là. Je voulais me confronter à tous les enjeux du foot. L’année en fac a été riche. La finalité, c’était de savoir ce que j’allais faire de cette licence. J’avais développé une activité de conseil auprès des organisations sportives, sur la région Rhône-Alpes, avec l’objectif d’intégrer un club de foot en tant que salarié, de participer à un projet de niveau « national », dans un club qui avait de l’ambition, qui était déjà structuré, avec à sa tête des dirigeants sérieux, solides, chefs d’entreprises. Ce portrait-robot que j’avais dressé, je l’ai retrouvé dans l’annonce que j’ai découverte quand Saint-Malo s’est mis à la recherche d’un DAF ». Et voilà comment Fabrice Rolland s’est retrouvé en Ile-et-Vilaine, à près de 1000 kilomètres de chez lui ! « L’USSM cochait beaucoup de cases. J’ai postulé. Et j’ai mis les pieds pour la première fois à Saint-Malo en février 2017 ! Cela va faire 8 ans. »

Fabrice, comment décrirais-tu le club, en quelques mots ?
L’USSM compte un peu moins de 500 licenciés, avec deux équipes Elite, la N2 chez les garçons et la Seconde Ligue chez les filles. Il s’appuie sur un double projet masculin-féminin. Le club a 30 ans de présence dans le foot féminin et un véritable ADN pour ça. C’est un club qui se structure, qui poursuit son développement et sa professionnalisation. On a 54 contrats de travail dont 18 pour le staff administratif et la staff sportif, sachant que le staff sportif, c’est 14 salariés pour la N2, la Seconde Ligue et la formation. On a une structure assez légère sur la fonction support, avec un alternant en plus. On a investi sur la formation afin de tendre vers un projet pro, vers un meilleur niveau sportif chez les jeunes où, pour l’heure, nos équipes évoluent au niveau Régional. L’objectif est de les former pour les emmener ensuite vers l’équipe réserve, actuellement en tête de sa poule en Régional 1. La réserve, championne de son groupe en R1 la saison passée, est composée à 60 % de jeunes formés au club; le reste provient d’un recrutement plutôt régional. Chez les féminines, notre réserve est aussi en R1. »

« Ici, il y a une attente »

Une équipe N2 chez les garçons, une autre en Seconde Ligue chez les filles : vous avez peu d’équivalents en France…
Il y a aussi le FC Fleury 93, avec les garçons en N2 mais les féminines sont en D1 Arkema. Nous, on arrive juste derrière. Sans oublier Thonon-Evian, même si les garçons sont descendus en N3. C’est du haut niveau dans sa globalité d’offre.

Le milieu de terrain Alexandre Leroyer. Photo Philippe Le Brech

Comment se passe la cohabitation filles/garçons ?
L’acceptation voire l’adhésion du football féminin ne va jamais de soi. Ce n’est jamais évident. On a beaucoup travaillé là-dessus et progressé en interne. Il faut dire aussi que tout se passe sur un même lieu et ça, c’est très positif et propice à l’ouverture vers le foot féminin. Tout le monde se croise, les gens, les staffs, les joueurs et les joueuses se parlent, échangent… Le projet féminin a du coup gagné en légitimité de par cette proximité. Le risque, dans nos structures, est de penser que l’un joue contre l’autre, que l’un va au détriment de l’autre : parfois, c’est des questions que l’on a pu avoir. On a essayé de lever ces doutes-là, avec une approche budgétaire analytique. On a développé le modèle économique féminin pour que les deux budgets soient indépendants, pour que l’un ne pèse pas sur l’autre. Cela a aidé à favoriser une cohabitation saine, à favoriser les passerelles, même si je pense qu’il faut toujours faire un peu plus. On voit bien aujourd’hui que dans certains projets professionnels, quand des difficultés économiques se présentent, la variable peut vite devenir le foot féminin. Mais notre lieu unique a certaines limites, comme comme le manque de terrains ou de disponibilités.

Récemment, un classement a montré que l’USSM était, avec 1500 spectateurs de moyenne, la 2e affluence de National 2 derrière Bordeaux…
A Saint-Malo, il y a une attente. On a un vrai stade de foot, qui a une âme, avec une belle atmosphère. On a un public qui est fidèle, familial, qui peut certes manquer de ferveur dans les encouragements, avec des spectateurs plutôt que des supporters, mais au fond d’eux, ils ont cette vraie passion pour leur club. C’est juste qu’ici, les gens l’expriment moins. Cela tient du fait de la sociologie de la ville, de l’environnement propre au territoire. On est vraiment sur une terre de football, il y a une vraie passion qui est plus de l’ordre de l’intime, avec une vraie fidélité, un public qui s’élargit au gré des rendez-vous, comme contre Dinan-Léhon, le derby qui attire beaucoup de monde, ou alors la venue de Bordeaux, qui va plus s’apparenter à un public de coupe de France, comme on l’a vu (2500 contre les Girondins en novembre dernier). On a une croissance de notre audience due aussi à nos résultats – le succès attire le succès -, ce qui permet de gagner 10 ou 20 % de public. On a vu un public un peu plus jeune contre Avranches aussi, la tribune a fait un peu plus de bruit. Et puis, il y a ce que dégage l’équipe, une vraie solidarité, un vrai engagement, une vraie force collective, tout ça combiné à du jeu… Parce qu’ici, les gens aiment voir du foot un peu léché mais avec de l’engagement. Cela correspond aux valeurs d’une ville portuaire, où il y a une vraie identité, une vraie histoire. Les gens peuvent se reconnaître dans cette équipe, dans ces mecs qui donnent sur le terrain.

« Notre engagement pour le foot féminin est fort »

L’équipe féminine de Seconde Ligue de l’USSM. Photo Philippe Le Brech

Et l’affluence chez les filles ?
C’est plus difficile, on fait 100 ou 200 personnes quand on en fait 1300 ou 1400 chez les garçons. Pourtant, on essaie de promouvoir les matchs mais on pâtit d’un programme assez aléatoire, on joue le dimanche, parfois à midi, parfois à 13 h ou 14 h 30, on s’adapte aux demandes adverses pour des questions de logistique (transports), ce sont d’ailleurs des demandes que nous faisons également quand on se déplace. Il n y a pas de rendez-vous clé comme en National ou en N2, et puis, je le disais, il faut faire plus. On a 27 % de nos licenciés qui sont des féminines et on approche les 25 % de budget, donc le poids et l’engagement du foot féminin à l’USSM est fort, alors que dans les clubs pros, même si les échelles de grandeur ne sont pas les mêmes, c’est plutôt de l’ordre de 1 à 3 %.

Justement, quel est le budget de fonctionnement du club ?
Il est de 2,9 millions d’euros cette année. On a dû aller chercher 300 000 euros de budget supplémentaire afin d’accéder en Seconde Ligue féminine et au regard des contraintes du cahier des charges, qui sont fortes : on a notamment triplé notre budget déplacement sur la Seconde Ligue.

Est-ce que tu as un modèle de club ?
J’aime bien m’inspirer, regarder ce qui se fait ailleurs, mais transposer des modèles, c’est difficile, parce qu’un club, c’est une histoire d’hommes et de contexte. Notre quête, c’est de créer notre propre modèle, sans fausse modestie mal placée. C’est pour cela que l’on travaille à structurer le club qui, je le rappelle, est porté dans son budget à 75 % par 220 partenaires privés, ce qui est énorme. Et puis, il ne faut pas oublier que ce club est aussi porté par deux hommes qui sont arrivés il y a 18 ans, Roland Beaumanoir, le président d’honneur, et Yves Fantou, le président du conseil d’administration. Les bases sont là. Le budget, porté par un tissu économique qui nous permet d’avancer dans notre projet, est en progression d’année en année. C’est pensé et réfléchi.

« On est focus sur les 16 dernières étapes »

Ne pas monter en National en fin de saison serait un échec ?
Je ne veux pas envisager ce scénario-là, parce qu’on travaille pour ça. Idem pour la défaite, que l’on essaie de sortir de notre logiciel : on l’a vu à Blois avant Noël, où les gars sont allés chercher le match nul dans des conditions difficiles, sur un terrain difficile. On est invaincu, c’est une très bonne chose. Mais on a une concurrence particulière cette année avec l’arrivée dans notre poule d’un club exceptionnel, Bordeaux. On a fait une première partie de saison exceptionnelle et très forte en termes de ratio points / match (2,30). On sait que tenir toute la saison sera difficile mais c’est notre objectif, il reste 16 étapes, on est focus là-dessus.

Le milieu de terrain Sofiane Barroug. Photo Philippe Le Brech

On voit bien que la progression est constante depuis l’arrivée de Gwen Corbin, en février 2022 : est-ce à dire qu’il y a eu des erreurs de casting avec les coachs précédents, on pense à Grégory Poirier et Fabien Pujo ?
L’élément de contexte est toujours très important pour comprendre une réussite ou une non réussite. C’est valable pour un joueur aussi. C’est une question de temporalité, de lieu, d’hommes, d’environnement… Pour en revenir aux expériences de Greg et de Fabien, on a bien vu que ces garçons-là ont réussi ailleurs, à d’autres moments, dans d’autres contextes. Il y a eu des éléments qui ont mal été appréhendés, par nous. Mais c’est plus complexe qu’une erreur de casting. Est-ce que c’était le bon moment, le bon contexte, la bonne approche, les bonnes décisions pour accompagner leur arrivée ? Il faut analyser en interne ces choses-là, prendre du recul. Mais au-delà des coachs, il y a eu aussi un recrutement de joueurs qui a été beaucoup plus large, un gros renouvellement d’effectif, ça aussi, ce sont des éléments de contexte, et quand l’alchimie ne se créé pas, les choses deviennent beaucoup plus difficiles. Et dans ces moments-là, peut-être que l’approche culturelle peut avoir son incidence. C’est multi-factoriels. La Covid est arrivée quand Greg était là, donc l’expérience n’a pas été aboutie. Et avec Fabien, il y a eu beaucoup de personnes aussi qui sont arrivées d’horizons divers, de renouvellement d’effectif. L’alchimie a aussi été très dure à obtenir et là, l’élément de connaissance de l’environnement, que cela soient les suiveurs, le public, les partenaires, les dirigeants, et bien tout cela fait que quand on a moins d’histoire commune, cela peut être plus difficile dans les moments tendus.

« Etre bien dans un environnement est facteur de performance »

Toi aussi, à titre personnel, tu as rencontré des difficultés d’adaptation ?
J’ai eu une adaptation très facile. On est dans un environnement très sain, avec des hommes à la tête du club qui m’ont très rapidement accordé leur confiance et donné de l’autonomie au quotidien, c’est facilitateur. Et puis il y a une qualité de vie appréciable à Saint-Malo.

L’attaquant Raphaël Gerbeaud. Photo Philippe Le Brech

Justement, cette qualité de vie n’a-t-elle pas été un frein aux ambitions du club ?
C’est vrai que cela pose parfois des interrogations, parce que la qualité de vie de vie ici est telle que l’on peut penser qu’il y a un risque de tranquillité. Moi je pense justement qu’être bien dans un environnement est un facteur de performance. Quand on est joueur, qu’on est en couple, que l’on a déjà une petite famille, arriver à Saint-Malo est un facteur favorisant la performance, même s’il y a d’autres leviers à aller chercher par rapport à d’autres environnements « plus durs »; à Saint-Malo, l’environnement est différent : il faut aller chercher la motivation. Mais être dans un club sain, structuré, où les gens sont solides, y compris quand on joue le maintien en N2 à la dernière journée comme il y a 3 ans, c’est un plus.

Cette solidité et cet environnement doivent être un facteur de réussite et de performance collective, de développement du club pour porter le projet que l’USSM mérite. A Saint-Malo, il y a une forme de citoyenneté qui se perd ailleurs, dans la société. C’est un environnement propice et sain. C’est comme ça que je le ressens. Quand on recrute, il faut tenir compte du contexte. Il y a vraiment des éléments multi-factoriels qui viennent conditionner la durée ou la réussite ou non d’un projet.

Ces éléments, vous les avez pris en compte au moment de choisi Gwen Corbin en février en 2022 ?
Son arrivée a aussi été un choix de revenir à des fondamentaux, de s’appuyer sur quelqu’un qui connaît bien l’environnement régional, qui a une fraîcheur dans ce milieu, parce qu’il a tout fait et tout construit, patiemment, à Guichen, où il a surperformé. Son engagement est total, et ça, on le trouve moins chez certains profils. Etre rattaché au territoire, à l’identité et à la connaissance de l’environnement, c’est un des facteurs de performance.

Gwenaël Corbin :

« Maintenant, il va falloir surperformer ! »

Gwenaël Corbin a passé 21 ans au FC Guichen, près de Rennes, avant d’arriver en février 2022 à Saint-Malo. Photo Philippe Le Brech

Au stade de Marville, tout le monde l’appelle « Gwen ». « Même moi, j’ai l’impression de m’appeler Gwen ! Et quand on m’appelle Gwenaël, ça me fait bizarre » plaisante l’entraîneur malouin (50 ans), arrivé à l’USSM en février 2022 pour une opération maintien.

Le parcours du natif de Granville, dans la Manche, est assez simple : il joue jusqu’à l’âge de 14 ans dans le club de sa ville puis part au centre de formation de Rennes, qu’il ne quittera plus : « Je me sens plus Rennais que Granvillais. D’ailleurs, j’habite toujours à Rennes ».
Au Stade Rennais, le numéro 8 est aspirant, stagiaire-pro puis pro : « Je suis resté jusqu’à l’âge de 21 ans, avec une deuxième partie de saison en 1994-95 et une autre en 1995-96 comme pro. J’ai eu Yves Colleu, un très bon formateur, Patrick Rampillon, le directeur du centre, ou Michel Le Milinaire. A 17 ans, je faisais mes premiers matchs en réserve, en Division 3 à l’époque. »

Titulaire à une seule reprise en Division 1, à La Meinau, contre Strasbourg, en août 1995 (défaite 3-1), aux côtés de Wiltord, Carteron, Ziani ou encore Cyprien, ils quitte le club breton en 1996 pour Angoulême, en National. Mais des blessures à répétition mettent prématurément un terme à sa courte carrière, laquelle se dessine rapidement du côté des bancs de touche. « A Angoulême, j’arrêtais, je reprenais, je me refaisais mal… J’ai dû arrêter. »
Il tente une dernière expérience en CFA, à Pontivy, où il rejoint un pote croisé au centre à Rennes, Gilles Séro : « J’ai essayé de reprendre là-bas, mais je n’ai pas joué, ou très peu ».

Le magicien du FC Guichen, où il a passé 21 saisons, s’est confié sur ses presque trois ans à la tête de l’équipe de National 2 de l’USSM, qu’il avait rejoint en cours de saison, en février 2022, en remplacement de Fabien Pujo. Les « Diables noirs » étaient alors en grosse difficulté dans leur championnat – premier relégable – et ne s’étaient maintenus qu’à l’ultime journée. Depuis, le club surfe sur la vague des bons résultats (5e en 2023, 2e en 2024, 1er à la trêve cette saison). Entretien avec un grand bavard qui, étonnamment, avoue ne pas avoir une grande confiance en lui…

Gwenaël Corbin, sous le maillot du Stade Rennais. Photo Philippe Le Brech

Gwen, un seul match en D1 : que vous a-t-il manqué pour faire une carrière pro ?
Sur la fin à Rennes, j’ai eu un gros problème au nerf sciatique, qui a duré 2 ans. C’est une des raisons. De toute façon, je pense que je serais arrivé à maturité sur le tard, comme disaient mes entraîneurs, car je n’avais pas une grosse confiance en moi même si j’avais des qualités. J’ai signé à Angoulême en National à 21 ans mais je me suis claqué sept fois car mon nerf s’est aggravé, j ‘ai arrêté deux ans, j’ai vu des dizaines de médecins et spécialistes, je l’ai vécu comme un deuil, parce que j’étais passionné de foot, je ne pouvais pas faire un footing, rien. Passer de quasiment dix séances par semaine à ne plus pouvoir faire du sport, ni même conduire, ou alors en mettant la jambe gauche sur la pédale d’accélérateur plutôt que la jambe droite parce que la douleur est là… c’est difficile. Mais ça m’a forgé mentalement et ça me sert encore aujourd’hui, dans les moments difficiles. Cela a été dur aussi au niveau psychologique parce que quand on fait du sport, on sécrète des hormones, et là, mon corps me réclamait quelque chose que je ne pouvais pas lui donner, et ça me rendait dingue.

C’est pour ça que, très tôt, vous avez passé vos diplômes pour devenir entraîneur…
Oui. Parce que j’ai compris que jouer au foot serait derrière moi. C’est juste dommage car je n’ai pas pu profiter de tout ce que j’ai appris pendant mes années de formation. Après, je ne sais pas quelle carrière j’aurais fait. J’avais des qualités techniques, des qualités de perception de lecture du jeu aussi mais peut-être que j’aurais été freiné sur le plan athlétique. Mais comme ma passion, c’est le foot, dans ma tête, c’était clair : j’avais une appétence pour le coaching. Quand j’étais jeune, les coachs s’appuyaient déjà sur moi pour faire le relais et moi, j’avais ce regard sur les séances, j’essayais de percevoir où les entraîneurs voulaient en venir, comment ils les emmenaient à réussir les exercices… En fait, j’avais cette envie de transmettre.

Imprégné du Stade Rennais

Gwenaël Corbin, le coach. Photo Philippe Le Brech

Malouin d’adoption et Rennais de coeur ?
Rennais d’adoption ! Le Stade Rennais est mon club de coeur, quasiment le seul que j’ai vraiment connu, donc évidemment je le suis depuis une trentaine d’année. Mon épouse est Rennaise, je l’ai rencontrée quand j’avais 17 ans. Je me sens complètement rennais, je regarde les matchs, j’en rate très peu, et dès que je peux, je vais au Stade, je connais toute l’histoire du club depuis 1988, quand j’y suis arrivé !

Du coup, les coachs côtoyés, notamment au Stade Rennais, sont source d’inspiration…
Inconsciemment, ce sont des choses qui restent, c’est évident, j’ai été imprégné. J’ai pris le coté joueur de Colleu, la proximité et la façon qu’il avait de parler à ses joueurs. J’ai pris aussi de l’exigence de Rampillon, j’en ai laissé aussi (rires) ! Mais on doit aussi rester soi-même et c’est pour ça que je me documente, que je m’informe. Il faut garder son naturel même s’il y a des choses à prendre partout. De la à dire que j’ai fait un copier-coller des coachs que j’ai eus, non.

Clément Milon, le gardien. Photo Philippe Le Brech

Avant votre arrivée à Saint-Malo, vous avez passé 21 ans au FC Guichen. 21 ans, c’est rare…
En fait, quand j’ai arrêté de jouer pour passer mes diplômes, j’ai eu la possibilité d’intégrer le centre de formation de Rennes comme éducateur, même si je souhaitais plutôt prendre un club où il n’y avait pas grand-chose afin d’en faire quelque chose. Je voulais construire, avoir un peu les mains libres : à 25 ans, Patrick Medjo, avec qui je passais mes diplômes, me dit que Guichen cherche quelqu’un, et c’est parti comme ça !

A votre arrivée au FC Guichen, vous n’avez pas immédiatement pris en charge les seniors…
Non, je faisais deux séances U11, deux séances U13, etc. J’ai vraiment commencé par la base. J’ai pris les seniors en 2003-2004. Quand je suis arrivé, en 2001, le club était au niveau équivalent du Régional 3 aujourd’hui, on est allé deux fois jusqu’en CFA2 (N3).

« A Guichen, je me suis peut-être un peu sacrifié »

21 ans, tout de même, c’est long. N’avez-vous jamais songé à partir ?
Je me suis posé plusieurs fois la question. On me disait souvent « c’est dommage, tu as des qualités pour entraîner au-dessus »… Bon, moi, je ne suis pas quelqu’un qui a une grande confiance en lui. Entraîneur, il ne faut pas croire, ce n’est pas toujours facile. Donc j’ai toujours privilégié l’aspect familial, voilà. C’était mon choix. Je me suis peut-être un peu « sacrifié », et encore, ce mot est un peu fort, mais je ne voulais pas que le foot devienne une priorité, parce que je connais le fonctionnement de ce milieu. Cela m’a peut-être couté un poste ailleurs, même si j’avais quand même identifié quelques clubs pas trop loin de Rennes, susceptibles de m’intéresser. Il y en avait très peu.

A Guichen, c’était la galère à chaque fois qu’on est monté en N3; par exemple, j’avais 100 euros à donner aux joueurs… Il fallait que j’arrive à les convaincre, à les faire progresser. Je m’étais toujours dit que si je devais changer de club, ce serait pour éviter la galère si on devait être amené à monter. C’est pour ça que Saint-Malo m’intéressait. C’est un très bon club, structuré, à travers les gens qui sont en place et qui, je pense, peut évoluer et accompagner un projet.

A votre avis, pourquoi Saint-Malo a pensé à vous en 2022, quand ça allait mal ?
Il faudrait poser la question aux dirigeants (rires) ! Quand je suis arrivé le 15 février 2022, le club était dans une situation sportive extrêmement compliqué, l’ambiance était particulière, tous les joueurs ne s’appréciaient pas forcément, il y avait eu des erreurs de casting.

« Le club a dû faire des choix humains pas simples »

Le milieu de terrain Lucas Daury. Photo Philippe Le Brech

Vos deux prédécesseurs n’étaient pas des « régionaux » : vous pensez que cela a joué dans leur intégration ?
Fabien (Pujo) venait du sud de la France, Grégory (Poirier) aussi. Après eux, le club avait peut-être besoin de retrouver quelqu’un du sérail, de la région, qui allait essayer de ramener un peu de sérénité là-dedans. Il devait y avoir un peu de ça. Parce que je sais que les staffs précédents avaient subi quelques critiques, et pourtant, on sait très bien que Fabien et Greg sont deux très bons entraîneurs, la preuve aujourd’hui. Mais l’environnement n’est pas simple à appréhender à Saint-Malo. C’est un club avec 220 partenaires privés, c’est énorme, dont des entreprises très importantes.

Il y a une section féminine aussi, avec des choix de clubs à faire, des gens qui sont pour le foot masculin, d’autres pour le foot féminin. Cela fait 13 ans que le club est en N2, il y a eu une attente, peut-être qu’il y a eu des erreurs de communication, qu’on est passé pour un club très ambitieux, parce que parfois on a parlé trop haut, mais c’était aussi un problème d’interprétation. Et puis, au club, derrière, il y a monsieur Roland Beaumanoir (fondateur et PDG du groupe éponyme, géant français de la distribution mode, prêt à porter et textile), donc ça fait parler. Le club a dû faire des choix humains aussi (joueurs, staff, dirigeants) pas toujours simples mais indispensables afin de travailler dans la sérénité. Parce que l’intérêt du club doit rester au-dessus de tout.

J’ai cet avantage, par rapport à certains entraîneurs, c’est que je me suis formé par moi-même. J’ai toujours beaucoup donné. Je suis allé chercher les informations. Je connais les composantes d’un club de A à Z. Je sais que les bénévoles sont importants, je sais comment fonctionnent les partenaires, les éducateurs, le respect doit être partout, et c’est souvent ce qu’on oublie, or ça vaut de l’or… J’ai fait cette démarche d’intégration, c’est tellement important : si je n’avais pas fait tout ça, je ne serais peut-être plus l’entraîneur de Saint-Malo. En fait, la clé d’un club repose sur l’entente entre le président, le directeur général et le coach, avec en plus, à Saint-Malo, un monsieur comme Roland Beaumanoir. On se fait tous confiance, on s’entend bien et c’est beaucoup plus important que plein de choses.

Le capitaine Edouard Daillet. Photo Philippe Le Brech

Et ce fameux « contexte » Saint-Malo, dont le club s’est affranchi…
C’est ça, on est bien à Saint-Malo, il y a la mer, la plage, les joueurs sont dans un cocon, un confort, on vit bien, c’est tranquille. Il y a tout ces aspects-là aussi : quand je suis arrivé, c’était le constat. Non mais sincèrement, aujourd’hui, l’ambiance est plus saine, plus sereine, même si je sais qu’en disant cela, au moindre mauvais résultat, on va me le renvoyer comme un boomerang. Quand je suis arrivé, je n’avais pas de légitimité, on a même dû se demander « c’est qui le guignol qu’on a mis là ? », et c’est normal, je n’avais jamais entraîné à ce niveau-là. Néanmoins, je pense que j’ai gagné en crédibilité et puis j’ai les mains totalement libres aujourd’hui.

« J’aime avoir une base solide »

Le style de votre équipe, c’est quoi ?
On est plutôt une équipe dominatrice, de possession, même si contre Bordeaux, le match auquel vous avez assisté, c’était moins ça. On rencontre beaucoup de blocs bas, on travaille là-dessus. On n’est pas du tout une équipe de contres. J’aime bien construire mon équipe à partir d’une base solide. Il faut un socle pour solidifier l’équipe et, une fois qu’on l’a trouvé, c’est toujours mieux d’avoir le ballon, on prend plus de plaisir. Donc si on peut avoir des joueurs de qualité pour faire des différences dans les 30 derniers mètres, c’est mieux. Je n’ai pas eu cette richesse-là à Guichen où je me suis toujours adapté. Ici, on a une équipe très joueuse, mais cela ne veut pas dire qu’elle ne doit pas courir (rires). Je dis ça parce que cela a souvent été le défaut de Saint-Malo (rires) !

Daillet fait l’acrobate entre Heinry et Bourrag. Photo Philippe Le Brech

Depuis votre arrivée, l’équipe ne cesse de progresser : comment l’expliquez-vous ?
En juin 2022, une fois le maintien assuré, on a gardé 5 joueurs de l’effectif sur 24 joueurs. Donc on a tout reconstruit. On a refait un effectif pour pas se faire peur, avec des joueurs ayant une certaine maturité. On a fini 5e. Puis on a renouvelé l’effectif d’un tiers la saison suivante afin de repositionner Saint-Malo dans un bon top 5 et on a fini 2e derrière Boulogne. Cette saison, on a changé 7 joueurs, on a un groupe avec des jouables fiables, bien humainement, qui ont progressé pour certains. Peut-être qu’il nous faut maintenant aller chercher ceux qui vont nous faire passer de la 2e l’an passé à la 1re place cette année (rires) ! (le club vient de s’attacher les services de l’attaquant du FC Versailles en National, Djibril Bangoura, Ndlr)

Dans votre poule, on ne parle que de la concurrence de Bordeaux, alors que Saint-Pryvé est votre dauphin et réalise une saison exceptionnelle…
Saint-Pryvé, on l’a vu avec Baptiste (Ridira, aujourd’hui à Dijon, en National) les saisons précédentes, et on le voit cette saison avec Mathieu Pousse, qui était son adjoint, fait un travail remarquable. Il est dans la continuité. Ils font toujours des bons coups dans le recrutement et ils arrivent à conserver des joueurs importants. Et puis, quand je vois leur milieu de terrain, avec Fortunato, Gope-Fenepej, Galas, et devant, Mendes et Gautier (il cite les joueurs un par un), waouh, c’est pas mal ! Ils ont toujours une bonne base derrière, ils maîtrisent leur 4-4-2 losange à la perfection, ils ont de la régularité, de la stabilité, ils sont malins. Et ils prennent beaucoup de points à domicile, parce que le contexte est particulier là-bas : on en parle souvent entre nous, ce n’est pas le terrain le plus agréable à jouer. Avec Blois, ce sont les deux terrains les plus difficiles.

Ne pas monter en National en fin de saison, ce serait une déception ?
Euh… sincèrement oui. On tourne à une moyenne de points qui est supérieure à 2,28, c’est énorme, donc si le championnat s’était arrêté aujourd’hui, on mériterait de monter, mais on a un avion de chasse derrière nous aussi (Bordeaux), qui continue de recruter, et qui va finir la saison avec un effectif qui n’a rien à faire en National 2, la réalité elle est là. Donc voilà. On a performé jusqu’à maintenant, mais j’ai envie de dire qu’en deuxième partie de saison, il va falloir surperformer, waouh ! Parce qu’on n’est pas dans un championnat normal, de par la présence de Bordeaux. Mais il va quand même falloir venir nous chercher !

Texte : Anthony BOYER / Twitter @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos :  Philippe Le Brech

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Le voisin du Puy-en-Velay, en Haute-Loire, pensionnaire de National 3 et adversaire du PSG en 16e, ne veut pas dévier de sa ligne de conduite et entend capitaliser sur son exploit pour continuer à se structurer. Dans cette commune de 3 500 habitants, on a officieusement décrété que mercredi serait « Journée nationale » pour se rendre au match à Clermont !

Par Anthony BOYER / Photos : FC Espaly et DR

La joie après la qualif face à Dijon.

C’est parce qu’elle génère des émotions indescriptibles et provoque des scènes de liesse mémorables que la coupe de France est l’épreuve préférée des suiveurs du ballon rond, qu’ils soient joueurs amateurs, supporters, spectateurs, dirigeants, partenaires ou néophytes.

C’est parce que l’épreuve reine permet de faire qu’un rêve devienne réalité qu’elle est tant aimée, demandez au club de l’US Revel ce qu’il en pense, lui qui a affronté le PSG et ses stars l’an dernier, en 32e de finale, dans un stade habituellement vouée à la cause de l’ovalie, à Castres.

Demandez aussi au FC Espaly ce qu’il en pense, lui qui va affronter cette même équipe mercredi soir, là encore dans un haut-lieu de l’ovalie, au stade Marcel-Michelin, à Clermont.

Il n’y a qu’à voir les images de liesse au moment du tirage au sort des 16es de finale, diffusées en boucle sur les réseaux sociaux, pour comprendre la portée et la dimension d’un tel événement, qui n’arrive – en principe – qu’une fois dans la vie d’un joueur et d’un club de niveau 5.

Voisin du Puy

Le président Christian Perbet porté en triomphe, après l’accession en N3 en 2023. Photo Lucas Jacquet.

Jusqu’à présent, le FC Espaly n’avait jamais dépassé le 7e tour de la Coupe, en 2015, sorti avec les honneurs par une équipe de National, Fréjus/St-Raphaël (1-3), au stade Massot où évolue le voisin du Puy-en-Velay.

Mais cette fois, les Espaviots, comme on appelle les habitants de cette commune de 3 500 âmes, ont poussé le bouchon beaucoup plus loin en signant l’une des performances les plus marquantes des 32es de finale : ils ont éliminé Dijon, club de haut de tableau de National, aux tirs au but (1-1, 4-3 tab). Et comme un symbole, c’est Joachim Ichane (38 ans), sans doute le garçon le plus expérimenté du groupe (il a joué en L2 à Reims, Laval et Niort, et en National à Cherbourg, Fréjus et au Puy), habituel capitaine mais remplaçant ce soir-là, qui a inscrit le dernier penalty, un scénario que lui avait prédit son président, Christian Perbet, avant le coup d’envoi, comme pour le « consoler » de ne pas être titulaire, comme pour lui rappeler son importance dans le groupe et le garder concerné jusqu’à l’ultime seconde.

Le stade pittoresque du Viouzou, construit dans une carrière.

Ce soir-là, la France du football a non seulement placé, plus ou moins, la commune d’Espaly-Saint-Marcel sur la carte de France, mais a surtout découvert le stade du Viouzou, construit dans une carrière, que même les chauffeurs de bus les plus aguerris ont du mal à atteindre, tant la pente qui y conduit est raide !

Mais une fois sur le terrain hybride, devant sa tribune rouge de 700 places, le décor est pittoresque. Saisissant. C’est simple, le Viouzou, c’est un peu comme le terrain d’entraînement de l’AS Monaco, à La Turbie, construit lui aussi en hauteur et dans la roche, avec une différence majeure : il n’y a pas de vue imprenable sur la mer Méditerranée !

Qu’importe, à défaut de la mer, il y a l’esprit. La convivialité façon rugby. La famille. Le bonheur. Le partage. Tout ce qui anime le club de Christian Perbet, chef d’entreprise de 58 ans, à sa tête depuis 2012, « mais j’y suis licencié depuis 50 ans, aime-t-il à rappeler ! »

« Une bourrasque médiatique »

Les joueurs du FC Espaly, après leur succès en coupe de France face au voisin Velay.

Ces dernières années, ces derniers mois, ces dernières semaines même, les projecteurs étaient toujours braqués sur un voisin tout sauf encombrant, Le Puy Foot, devenu au fil des saisons un spécialiste de la coupe : Lorient (L1) en 2021, Nice (L1) en 2023, Laval (L2) et Dunkerque (L2) en 2024 et, surtout, Montpellier (L1) et ce 4-0 retentissant juste avant Noël, les « grosses » têtes sont souvent tombées au stade Massot ! Des résultats qui forcent le respect et l’admiration, auxquels il faut ajouter deux accessions en National, en 2019 et en 2022.

C’est simple, Le Puy Foot, avec son 1/4 de finale de coupe l’an passé (Rennes à Geoffroy-Guichard), son 8e de finale en 2021, ses deux 16es de finale cette saison et en 2023, sans compter quelques 32es de finale (2018, 2019 et 2020) et ses nombreuses Unes dans les journaux locaux, régionaux et nationaux, phagocytait tout.

Alors comment vivre dans l’ombre de ce « géant » de Haute-Loire devenu référence nationale du monde amateur ? Comment exister à côté de ces Ponots de plus en plus penauds ? La réponse est simple : il fallait construire (le Viouzou a été inauguré en 2019), travailler, le plus souvent sans faire de bruit, être patient et aussi accéder de Régional 1 en National 3 : après plusieurs échecs consécutifs, ce fut finalement fait en 2023 sous la conduite de Sylvain Jore, retourné à Calais ensuite.

Il fallait, surtout, marquer les esprits, réaliser un exploit en coupe de France et avoir un tirage clinquant. Et là… En touchant le gros lot, le FC Espaly est surtout tombé dans ce que son président appelle une « bourrasque médiatique », qui dépasse l’entendement. On n’affronte pas PSG, dont le logo ressemble étrangement à celui d’Espaly, comme on affronte Hauts-Lyonnais, Décines ou Limonest, sans manquer de respect à ces clubs.

2000 Espaviots à Clermont

La statue de Joseph tenant dans ses bras le petit Jésus à Espaly. Photo 13HF

Mais le rêve a ses limites. Le stade du Viouzou aussi. Les Parisiens ne le verront pas. Pas plus qu’ils ne verront le stade Massot du Puy, dont la particularité est qu’il se situe sur la commune d’Espaly, à 300 mètres à vol d’oiseau du Viouzou !

Les Parisiens ne verront pas non plus la statue de Saint-Joseph tenant dans ses bras le petit Jésus, qui surplombe le village et fait face à Marie, bien installée sur son rocher de la Vierge au dessus du Puy-en-Velay, entre la cathédrale, lieu de départ du pèlerinage de Saint-Jacques-de-Compostelle, et l’église Saint-Michel d’Aiguilhe, perchée sur son piton volcanique.

Le stade Marcel-Michelin à Clermont va accueillir ce 16e de finale.

Les Parisiens verront simplement un stade de rugby plein comme un oeuf pour l’occasion (17 000 spectateurs, match à guichets fermés), habituel antre des Jaunards de l’AS Montferrand. Ils verront aussi une ambiance à Michelin à mi-chemin entre ballon rond et ovalie.

Puissent les Espaviots et son entraîneur Lionel Vaillant (ex-formateur à l’AS Saint-Etienne et ancien entraîneur de la réserve du Puy en N3 et R1) résister autant voire plus que les joueurs de Revel l’an passé, lesquels avaient vraiment tenu la dragée haute au PSG pendant 20 minutes avant, évidemment, de céder.

Puisse Espaly montrer une belle image de la Haute-Loire, qui a donc deux représentants en 16e de finale (Le Puy Foot se déplace à Dives-Cabourg, club de N3), une belle image de l’Auvergne et faire la promotion d’un championnat de National 3 de plus en plus relevé. Un championnat dont les coéquipiers de Gabay Allaigre, un autre joueur expérimenté de l’effectif, formé à Saint-Etienne et passé en N2 par Andrézieux et Le Puy, ont fait leur quotidien, mais qu’ils ont un peu plus de mal à appréhender cette saison (13e sur 16 avec 3 victoires, 4 nuls et 5 défaites).

Puisse le rêve se poursuivre et voir la nouvelle prémonition de Christian Perbet devenir réalité : « Comme on va se qualifier, on jouera contre Le Puy en 8e (rires) ! Sinon, on souhaite au Puy de tomber contre le PSG ! »

Interview / Christian Perbet : « C’est une fierté »

Christian Perbet, le président, après la qualification face à Dijon.

Il a le même âge que son homologue du Puy Foot 43, Christophe Gauthier. « On est tous les deux nés en 66 ». C’est dire s’ils connaissent la route, qu’ils ont fait ensemble pour en arriver là, avant de voir leur chemin se séparer. « Parfois, on en rigole… Si on nous avait dit, gamin, que l’on serait tous les deux à la tête des deux clubs de foot ! »

À la tête de l’agence de marketing-communication  TNT, basée au Puy, Christian Perbet (58 ans) est un chef d’entreprise respecté et fidèle : il est entré dans « sa » boîte en 1991, cinq ans après sa création, et il a signé sa première licence au FC Espaly il y a 51 ans. Sans jamais en partir.

Aujourd’hui, il gère TNT comme un père de famille, et on ne dit pas cela parce qu’il y travaille avec ses deux filles, Chloe et Elsa. Mais c’est cet esprit qui l’anime, et qu’il essaie de reproduire au club foot, qu’il préside depuis 2012, en y ajoutant des valeurs de sérieux, de travail, de convivialité, de plaisir. Un esprit cadré. « Dès l’âge de 2 ans, j’habitais en bas du stade, route de Saugues, où j’ai toujours la maison de mes parents, mais à l’époque, bien sûr, ce n’était encore qu’une carrière, puisque c’était une vraie carrière, et le terrain annexe, derrière l’actuelle tribune, était le plus beau pré à luge d’Espaly ! C’était là qu’on descendait à fond (rires), raconte-t-il.

À quelques jours de recevoir Bourgoin-Jallieu en championnat de National 3 (entretien réalisé mercredi 8 janvier) puis le PSG en 16e de finale de la coupe de France, le président du FC Espaly, ultra-sollicité depuis l’annonce du tirage au sort, s’est confié avec lucidité, sans forfanterie. Christian Perbet a la tête sur les épaules et ce n’est certainement pas ce 16e de finale historique pour sa ville, son club et lui qui lui fera perdre la raison. En revanche, il entend bien s’en servir pour la suite de la saison et les années à venir, toujours avec cette volonté de bâtir.

Le stade du Viouzou à Espaly.

Si vous deviez vous définir, vous diriez que vous êtes un président plutôt …
(Il réfléchit) J’essaie de trouver le bon adjectif… Cadré ! J’essaie de mettre la même rigueur que j’ai dans les projets que je monte de manière professionnelle pour des chefs d’entreprises ou des décideurs avec la force et la faiblesse du bénévolat. C’est-à-dire que ce n’est pas professionnel, mais c’est professionnalisé. Inversement, cela laisse une place à tout le monde au club, que cela soit du côté des bénévoles, où chacun peut trouver sa place et avoir des responsabilités, ou des joueurs, quelle que soit la catégorie. À Espaly, on a deux équipes dans chaque catégorie de jeunes et tout le monde peut jouer, qu’on soit bon ou pas bon. A l’arrivée, tout le monde participe à la joie collective quand c’est le moment ou à la peine collective quand ça arrive.

Devenir président du club, c’était écrit ?
C’était mon tour (rires) ! Je suis licencié au club depuis 50 ans. Les bénévoles qui sont là depuis longtemps ont eux aussi estimé cela, que c’était mon tour. Mon fils Yann avait pris le foot un peu avant, du coup je me suis remis dedans à fond. Mais il n’ y a pas de notion de pouvoir dans ce titre de président, d’ailleurs, les quatre anciens présidents sont encore au comité directeur. Il y a plutôt une notion de transmission de générations.

Deux clubs, deux logos mais une ressemblance évidente.

Comment décririez-vous le club d’Espaly à quelqu’un qui ne le connaît pas ?
Familial. Ce qui ne veut pas dire sans ambition ou sans exigence. Ici, on fait tout pour que tout le monde soit bien, quelle que soit sa catégorie, du U4 (le baby foot accueille les enfants dès 3 ans)  jusqu’aux vétérans. Tout le monde a le même maillot, d’ailleurs, quand on fait les maillots, on en fait 400, c’est-à-dire le nombre de nos licenciés. On était 110 il y a 12 ans. On a une quinzaine d’équipes avec les féminines.

Le budget de fonctionnement global du club ?
La saison passée, il était de 460 000 euros, et cette année, il est de 520 000 eurois pour l’ensemble du club, validé par la DNCG. C’est le plus petit budget de notre poule de National 3, et de très loin. Mais on ne fait pas les Calimero. On s’oblige à sur-performer pour exister là où on est, c’est comme ça.

Le capitaine Jo Ichane et Gabay Allaigre

Le 16e de finale de coupe de France va apporter un peu de beurre dans les épinards, avec la dotation (83 000 euros en cumulé)…
Oui, mais ça ne changera pas notre politique sportive. L’argent qui sera mis de côté sera utilisé pour structurer le club différemment. Cela ira dans des infrastructures, des choses qui resteront. On ne dépensera pas de l’argent pour des nouveaux joueurs par exemple ou pour augmenter notre politique salariale. Non, ça, ça ne bougera pas.

Le National 3, pour un club comme Espaly, c’est le plafond de verre ?
Si on est raisonnable, c’est ce que l’on doit se dire, mais on n’est pas sûr d’être raisonnable…

Cela veut dire qu’Espaly peut, un jour, rêver au National 2 ?
C’est aux joueurs de le faire. De repousser leurs limites sportives. On a un groupe stable. 80 % des joueurs de la saison passée sont restés, et 50 % était là en Régional 1. Maintenant, on serait fou de dire que l’on veut monter en National 2 alors qu’il faut déjà se maintenir en National 3 cette saison. On n’attaque jamais une compétition pour descendre. Là, on a fait un point à Noël, comme chaque saison, pour voir où on en était.

Le milieu de terrain Mouad Aït-Boulaalam.

Et ce point, qu’est ce que cela a donné ?
On a fait les cons (sic) lors des trois derniers matchs avant la trêve (trois matchs nuls contre Chambéry, Seyssinet et Saint-Etienne) puisqu’on a perdu 6 points dans le temps additionnel. On est en retard sur le tableau de marche que l’on s’était fixé même s’il n’y a pas le feu du tout. Les matchs qui arrivent sont contre des grosses cylindrées; là, on doit jouer contre Bourgoin-Jallieu chez nous (l’entretien a été réalisé avant le match, qui s’est soldé sur le score de 1-1), on va bientôt affronter Mâcon, Lyon-Duchère et Limonest. Rien ne nous fait peur mais on ne se prend pas pour d’autres. Le groupe sait ce qu’il a à faire.

Exister à côté du Puy Foot, c’est difficile ?
Non, pas du tout. Je suis très proche de son président Christophe Gauthier, on a le même âge. Là, ça nous fait rire, parce que on est tous les deux en 16e de finale, et je pense que l’on n’aurait jamais imaginé un tel scénario quand on était tout petit, sachant qu’il a toujours été plus grand, parce qu’il est grand par la taille (rires) ! On n’aurait jamais pensé qu’on serait là tous les deux, à côté l’un de l’autre ! Mais il n’y a pas du tout de rivalité, de concurrence. Le Puy, club de la préfecture, se doit d’être le club numéro 1. Cela ne veut pas dire que nous, on ne doit pas avoir d’ambition. Ce que fait Le Puy Foot, honnêtement, c’est exceptionnel : ils sont encore en 16e de finale cette saison, ils étaient en 1/4 l’an passé, en 16e y’a deux ans, ils sont aux portes du National, ils travaillent vraiment bien. C’est vraiment une autre cylindrée. Nous, on est plus dans l’ancrage local et régional, qui va de Saint-Etienne à Clermont en traversant la Haute-Loire. Eux ont une ambition plus large, plus « nationale ».

L’entraîneur Lionel Vaillant.

Il n’y a donc pas de rivalité avec Le Puy Foot ?
Non. Nous, on a six ou sept joueurs de Haute-Loire, notre groupe s’est bâti en R1. Et quand on a recruté en National 3, ce n’est pas au Puy que l’on est allé chercher des joueurs.

Un club en N3, un club en N2, dans une agglo de 72 000 habitants (72 communes), ce n’est pas un peu trop compte tenu de la conjoncture actuelle ?
On est 3 500 à Espaly, 19 000 au Puy, il y a une complémentarité qui peut très bien se faire. J’ai l’exemple en tête de deux clubs pas très loin qui ont fusionné mais cela n’a rien apporté (Moulins et Yzeure, Ndlr). On ne fait pas du tout d’ombre au Puy. Personne ne marche sur les plates-bandes de l’autre, et ça, c’est dû aussi à deux présidents, Christophe Gauthier et moi-même, qui s’apprécient. Sans Christophe, il n’y aurait pas Le Puy Foot. C’est comme dans tous les clubs : sans François Inglese, il n’y aurait pas Monistrol, sans Jérôme Ribeyre, il n’y aurait pas Brioude, voilà. En fait, à Espaly, ce qui nous sclérose, ce sont nos infrastructures. Nous n’avons que deux terrains, or pour 400 licenciés, ce n’est pas suffisant. C’est en cela que la coupe de France peut aider à nous structurer, à construire un troisième terrain. En tout cas, c’est l’idée que j’ai en tête. Parce que nous sommes freinés dans notre développement et enquiquinés dans notre quotidien. Un troisième terrain permettrait de désengorger tout ça. Mais fusionner avec Le Puy Foot serait une erreur, cela n’apporterait rien à personne.

Séance vidéo avec le coach.

Grâce à cette qualification contre Dijon et au tirage au sort, qui offre le PSG, Espaly est du coup placé sur la carte de France…
Oui, c’est une fierté, en plus, on a été l’épicentre des 32es de finale puisque je ne crois pas qu’il y ait une seule commune avec deux terrains distants de 300 mètres à vol d’oiseau – puisque le stade Massot du Puy Foot est sur la commune d’Espaly – à avoir vécu deux 32es de finale de coupe de France. Après, c’est vrai que la bourrasque médiatique est forte. Cela fait 35 ans que je suis consultant-marketing, je n’ai jamais vu une « marque » comme celle du PSG qui portait si vite, qui allait si loin. J’ai fait beaucoup d’événementiels ou de stratégie marketing, mais là… Je n’avais jamais connu ça.

Vous êtes vous tourné vers Le Puy Foot, qui a l’expérience de la coupe et déjà affronté des clubs de Ligue 1 à plusieurs reprises ces dernières saisons ?
Dès le lendemain du tirage, le lundi, on s’est appelé avec Christophe (Gauthier) et pour la petite histoire, c’est lui qui m’a orienté vers le stade Michelin à Clermont. Tout de suite, cette solution m’a paru être une évidence. Avec ma boîte, je travaille pour l’AS Montferrand et je suis Auvergnat…

La joie après le but face à Dijon en 32e.

Toutes les places sont parties en une heure : ça aussi, c’est incroyable, non ? Qu’est-ce que cela vous inspire ?
C’est à la fois une prouesse technique de mes équipes à TNT et AchetezA.com, et une prouesse de l’Auvergne qui a acheté 90 % des billets ! C’est un succès marketing, technique et sportif.

Combien y aura-t-il d’Espaviots à Clermont ?
On sera 2 000, c’est sûr, on a 10 cars gratuits affrétés par la Région pour emmener notre école de foot. On a aussi décrété que mercredi et jeudi seraient « jour national à Espaly » : les gamins n’auront pas école, enfin… disons qu’on l’a auto-décrété (rires), mais voilà, c’est ce qui se profile, avec un car de U11, un car de U13, un car de U15, etc. On sera tous dans la loge Michelin de 800 places, ça sera notre kop au sens de la famille, de la fierté, parce que notre ADN, c’est la convivialité et la famille. Par contre, cela ne nous empêche pas d’être hyper-carré, parce que c’est notre façon de faire. On a eu une très bonne écoute de la Préfecture du Puy-de-Dôme, qui a vraiment facilité les choses, on a fait quatre réunions de sécurité, on a aussi eu une très bonne écoute du PSG et de l’ASM Rugby. On ne perd pas de vue que c’est Espaly, le petit club, qui a la fierté et la chance de « monter » et jouer à Clermont, et qui doit être à la hauteur du Michelin.

Dans les vestiaires du FC Espaly.

Disputer un match comme celui-là, même dans vos rêves les plus fous, c’était inimaginable, non ?
Disputer un 32e de finale, même pas, encore moins un 16e… Et le PSG, même si on y pense toujours, on se dit que c’est pour les autres. Même là, au tirage, quand on a attendu la dernière boule…

Gérer une telle affiche en plein milieu du championnat, a fortiori avant de recevoir Bourgoin, cela ne doit pas être simple ?
Non, même si notre match de championnat juste avant PSG tombe contre Bourgoin, une équipe encore qualifiée elle aussi pour les 16es de finale et qui, en plus, affronte Lyon. Avec le président de Bourgoin (Djemal Kolver), on s’est appelé. Pour eux, c’est le Graal, c’est la vraie classe de jouer Lyon. Et en plus, ils ont la chance de jouer chez eux, au stade Pierre-Rajon. Finalement, c’est bien que l’on soit tombé en championnat contre un autre club qualifié en 16e.

Le FC Espaly à la Une de LEveil de Haute-Loire ! On remet ça ?

Votre devise est « L’important, c’est d’être heureux », ça tombe bien, en ce moment, vous êtes un président heureux…
C’est ce qui a guidé ma vie, que ma famille soit heureuse.

Mais vous ne montrez pas trop vos émotions, vous semblez dans la retenue…
C’est parce que je suis un grand émotif. J’intériorise beaucoup. Là, pour la première fois, j’ai une conjonction de ma vie professionnelle et de mon engagement associatif dans le foot. Pour la première fois, je suis devant alors que d’habitude, ce sont mes clients qui sont en première ligne. Quelque part, c’est un accomplissement de tout ce que j’ai pu mettre en place depuis 35 ans.

Pour la première fois, aussi, on va beaucoup plus parler d’Espaly, qui joue contre PSG, que du Puy Foot, qui affronte Dives-Cabourg, une affiche qui sera forcément moins médiatisée…
L’ombre du Puy Foot, on doit l’accepter. Là, comme on va se qualifier, on jouera contre Le Puy en 8e de finale (rires) ! Sinon, on souhaite au Puy de tomber contre le PSG !

Mercredi 15 janvier 2025 – coupe de France (16e de finale) : FC Espaly-Saint-Marcel (N3) – Paris Saint-Germain (Ligue 1), à 21h au stade Marcel-Michelin, à Clermont-Ferrand.

 

Texte : Anthony BOYER / Twitter @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos : FC Espaly et DR

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L’ancien attaquant d’Angers, Brest, Reims, Auxerre, Saint-Etienne ou encore Bastia, a rejoint l’été dernier le club vendéen de Pouzauges Bocage en Régional 1 après l’annonce de sa fin de carrière professionnelle. Il y a retrouvé son grand frère, Valentin, entraîneur de l’équipe fanion, et le monde amateur par la même occasion. Un chapitre qui se ferme et un autre qui s’ouvre !

Par Joël Penet – Photos : Philippe Le Brech et Pouzauges Bocage FC / Illan Visuals

Avec Pouzauges Bocage FC

C’est du côté du Tours FC, un des clubs historiques de l’Hexagone, qu’on entend pour la première fois le nom de Gaëtan Charbonnier, entre 2001 et 2007. Le potentiel est là. Il est décelé par le SO Châtellerault. Le club, qui évolue en CFA, a le nez creux : Charbonnier fait trembler les filets à 11 reprises lors son arrivée. Des stats’ qui tapent dans l’œil du Paris Saint-Germain même si le rêve en professionnel ne se réalise pas au Parc des Princes : « J’ai eu l’opportunité d’intégrer un effectif de Ligue 2 plutôt que d’enchaîner une troisième saison en CFA avec un challenge sportif intéressant ».

L’attaquant originaire de Saint-Mandé (Val-de-Marne) plante pourtant 13 pions en 27 matchs avec la réserve francilienne mais c’est bien dans les Pays de la Loire qu’il se révèle définitivement. Angers SCO lui tend la main en 2009 et après six mois de rodage, le costume de titulaire lui colle à la peau. Jusqu’en 2012, l’attaquant fait se lever les foules du stade Jean-Bouin une trentaine de fois avant de s’essayer à Montpellier puis au Stade de Reims où il goûte à la Ligue 1 l’année suivante ! Mais c’est au Stade Francis Le Blé, sur la rade de Brest, qu’il connaît son apogée : 27 unités inscrites en 2018/2019, faisant de lui le meilleur buteur de Ligue 2. Une distinction aux trophées UNFP avec en prime le retour dans l’élite pour les Ty-Zefs viennent alors agrémenter sa fin d’exercice : « Une saison en apothéose, un groupe exceptionnel, une ambiance incroyable… sans tout ça, il n’y aurait jamais eu cette réussite individuelle ! »

138 buts en 477 matchs

Avec Châtellerault, en CFA, en 2007-08. Photo Philippe Le Brech

Des hauts, il y en a eu mais des bas aussi ! Bien loin de ses premiers pas insouciants à l’US Torcy en région parisienne, « Charbo’ » continue de planter, à Auxerre puis dans le Chaudron de Geoffroy-Guichard avec Saint-Etienne même s’il connaît des blessures. Alors qu’il avait été plutôt épargné jusqu’ici, une rupture antérieure du ligament droit précipite sa fin de saison dans le Forez : « J’ai été stoppé dans mon élan alors que j’étais parti sur de très bonnes bases avec un groupe qui avait envie de se sortir de cette mauvaise passe ».

Malgré 6 buts en 27 matchs, ce coup d’arrêt ne l’empêche pas de vivre une dernière expérience à Bastia, en Corse, un lieu où il raccroche finalement les crampons, laissant derrière lui les strass et les paillettes d’un parcours entamé en 2007. Au total, Gaëtan Charbonnier c’est 138 buts en 477 matchs : un bagage confortable pour appréhender au mieux son « retour » en amateur aux côtés de son frère Valentin sur les terrains de Régional 1 à Pouzauges. Entretien.

« Je ne suis pas arrivé avec mes grands sabots »

Avec Pouzauges Bocage FC

Gaëtan, c’est donc à Bastia que tu as clôturé ta riche carrière de footballeur professionnel…
Je m’attendais à autre chose… Tout d’abord, au bout de dix jours, le coach qui m’a fait venir (Régis Brouard) est évincé. C’est quand même compliqué même si l’adaptation footballistique se passait plutôt bien. Par contre, j’étais seul là-bas, sans ma femme et mes filles et j’ai très longtemps galéré pour trouver un logement… pour au final ne pas trouver ! Du coup, Airbnb pendant six mois, la famille pendant les vacances scolaires… J’ai donc pris la décision d’arrêter car je ne me voyais pas continuer comme ça. C’est quelque chose qu’on a gardé entre nous, ma femme et moi, jusqu’au maintien acquis par le club car c’était la chose la plus importante. A partir de là, une fois le maintien obtenu, il restait 15 jours de compet’ et j’ai pris rendez-vous avec mon président : je n’ai rien demandé au club parce que la proposition qui m’avait été faite à la base était très respectueuse. J’ai expliqué ma situation, il me restait un an de contrat, on s’est serré la main et j’ai pris le temps de réfléchir ensuite.

Comment se passe ta réflexion ?
Je me suis laissé 15 jours, tranquille, le temps de me poser pour voir aussi si le monde pro me manquait. Auparavant, j’avais déjà eu des contacts avec Pouzauges et j’ai recontacté le président quand je me suis senti prêt. J’avais demandé à mes agents de ne pas entamer de nouvelles démarches car je ne savais pas si j’allais trouver un projet sportif et humain qui allait me plaire dans le monde professionnel. Bien entendu, je savais que ça allait s’arrêter un jour mais c’est moi qui ait pris la décision donc je n’ai aucun regret. Après 17 ans à ce niveau, c’était important de revenir vers des choses « vraies », comme profiter de mes filles, de ma femme, de mes proches.

Avec Pouzauges Bocage FC

Valentin, ton frère, est coach de l’équipe fanion de Pouzauges Bocage FC en R1. On imagine que le rejoindre était une évidence à ce moment-là ?
Sur l’aspect professionnel, on parle le même football. Il a aussi été joueur (à Châtellerault, à Chartres, au TVEC Les Sables) et puis il s’est mis à entraîner. J’avais envie de l’aider et je souhaitais aussi continuer de jouer. Cette option s’est présentée et tout était aligné pour que ça se passe.

Il y a environ 6000 habitants à Pouzauges. Comment apprivoises-tu ce nouvel environnement ?
Mon frère vit ici depuis bientôt dix ans, j’habite à dix minutes de chez lui en plus de ça. On fait la route ensemble. « Val » l’a fait pendant très longtemps seul donc le faire à deux, ça lui fait du bien (sourires) ! Tout se passe très bien depuis, je me plais, j’aime le foot et la relation que j’ai avec le milieu amateur aujourd’hui… c’est une sorte de transition légère !

« Je suis agréablement surpris »

Quel regard poses-tu sur le football amateur justement ?
Je suis agréablement surpris par ce qui est mis en place par les joueurs, dans le travail, dans le sérieux, dans la qualité technique des séances. Je savais très bien que mon frère allait créer un groupe qui lui ressemble, avec la vision qu’il avait envie d’amener. On sent qu’il y a de la qualité et je prends beaucoup de plaisir !

Est-ce que tu as connu un club en professionnel avec la même ambiance, ce côté chaleureux, convivial ?
Oui, je dirais à Angers lors mes débuts, une ambiance que j’ai pu retrouver à Brest. On vivait bien tous ensemble. Dans d’autres clubs, il y a des affinités qui se créent plus facilement avec certains mais globalement, partout où je suis passé, il y avait des groupes intéressants. Après, c’est vrai que je me suis senti vraiment bien au SCO Angers et à Brest.

« Je suis quelqu’un de normal, simple »

Avec Angers, en Ligue 2, en 2010-11. Photo Philippe Le Brech

Quel a été ta première impression dans le vestiaire vendéen ?
Je ne suis pas quelqu’un qui va arriver avec mes grands sabots. Je pars du principe que j’arrive dans un groupe où des gars sont là depuis longtemps et j’ai plus à apprendre d’eux dans la vie de groupe que l’inverse. J’ai cette envie de m’intégrer du mieux possible car c’est d’abord un sport collectif et c’est aussi ce que je ressens dans le discours de mon frère. Je me suis très bien adapté et acclimaté au groupe. Je suis quelqu’un de normal, simple, je chambre, je me fais chambrer (sourires) ! Sur le terrain, j’en loupe aussi comme les autres. L’important, c’est de persévérer, d’être meilleur à chaque match et on est dans une très bonne spirale au niveau du club (Pouzauges Bocage FC est 2e de son championnat en Régional 1 avec 7 victoires, 1 nul et 2 défaites et 22 points, à 3 longueurs de la réserve du Mans, leader).

Est-ce simple de s’acclimater dans un groupe où la priorité n’est pas forcément le foot ?
J’échange comme je peux avec mes coéquipiers. Je suis ouvert à tout même si je ne pourrais peut-être pas répondre à toutes les interrogations. On essaye de trouver des solutions ensemble afin que les petits besoins de chacun soient comblés. On a un groupe qui est très exigeant avec lui-même et je suis admiratif de sa progression !

Après 138 buts en 477 matchs en pro, qu’est-ce que tu peux amener à ce groupe ?
Je n’ai pas envie d’avoir l’étiquette du joueur sur qui on peut tout miser. Je suis juste moi-même, j’essaye de faire jouer les autres, de faire marquer, de marquer aussi ! C’est ce qui m’a animé toute ma carrière. Être dans une équipe qui joue bien, avec des situations pour marquer offensivement.

« L’important, c’est que le collectif marche »

Avec Châtellerault, en CFA, en 2007-08. Photo Philippe Le Brech

Néanmoins, est-ce que tu t’es fixé des objectifs comptables cette saison ?
Non pas du tout ! Même en pro, je ne m’en fixais pas ! L’important c’est que le collectif marche. En pro, des fois en début de saison, je ne marquais pas mais je savais que dans le jeu j’étais influant. Quand ça doit venir, ça viendra tout seul. Je n’ai pas à forcer les choses, je ne suis pas du tout dans cette mentalité-là.

Tu as un profil un peu atypique, non ?
Je suis grand et tout le monde s’attend à ce que je reste devant à dévier les ballons. Pourtant, j’ai été pendant longtemps le plus petit de ma génération. J’étais très mobile, me déplaçant dans l’espace pour être « joignable ». Je ne suis pas le genre de joueur qui court longtemps et très vite.

Comment caractériserais-tu les ambitions sportives du groupe ?
Mon frère entame sa deuxième saison sur le banc et je dirais que c’est plutôt un club qui se reconstruit après le départ de l’ancien entraîneur (Cédric Fuzeau) qui est resté dix ans à la tête du groupe. On est des compétiteurs mais il y a aussi la réalité du championnat avec des écuries comme la réserve du Mans, du Poiré, d’autres clubs qui ont évolué en N3 aussi. C’est très homogène et c’est surtout très difficile de déterminer qui terminera premier. Sachant qu’en plus, il y a un barrage d’accession à disputer pour valider la montée. Pour l’instant, on est dans les clous, on est là où on veut être.

Tu as connu plusieurs montées en Ligue 1, tu sais les émotions que ça procure. On imagine que tu as envie de revivre cela ?
Une saison, c’est long ! On a eu un passage ou on a été un peu dans le dur mais on essaye de mettre en place une idée de jeu, de travailler avec un objectif. Le principal, c’est d’abord avoir un contenu positif si on veut gagner des matchs. Tout le monde commence à bien se connaitre, ça joue aussi ! Des fois, ça prend très vite, d’autres fois ça peut prendre plus de temps.

« Faire grandir les jeunes du pays de Bocage »

Avec Pouzauges Bocage FC

Comment le club se conditionne-t-il pour performer ?
Il y a des bases intéressantes avec 550 licenciés foot féminin et masculin confondus. C’est un groupement de plusieurs villages alentours et le club de Pouzauges veut faire grandir les jeunes du pays de Bocage. Il y a une belle mixité entre les locaux et ceux qui viennent d’un peu plus loin. Il y a des bases avec tout ce qui a pu être mis en place depuis une dizaine d’années. Après on sait que le football amateur a besoin de subventions et doit aussi pouvoir s’appuyer sur les collectivités.

Tu essayes donc d’avoir un rôle majeur au sein du club et notamment auprès des jeunes…
Au-delà de mon rôle de joueur, sur l’aspect sportif, une fois par mois, j’anime un spécifique attaquant pour les catégories U15 à U19. Quand je peux aller voir des matchs de jeunes, j’échange avec les éducateurs, j’observe aussi. J’essaye d’avoir un œil sur tout l’aspect organisation car il y a beaucoup de choses qu’on ne voit pas sur les séances : les infrastructures, la gestion du matériel…

« Même en Régional 1, on a des exigences »

Avec Angers en Ligue 2 (2010/11). Photo Philippe Le Brech

Justement, est-ce un moyen de préparer ta reconversion ?
Je vais déjà jouer jusqu’en fin de saison, très probablement la prochaine aussi. On va mettre des choses en place suivant les demandes du président. Je m’occupe aussi de la communication au club. On a refait la charte graphique, c’est une base de travail sur laquelle on peut s’appuyer. Elle donne une ligne directrice et c’est important si on veut attirer du monde car même en R1, on a des exigences. On essaye d’illustrer au mieux notre quotidien, par les résultats, par le travail chez les jeunes. Par exemple, nous avons mis en avant la montée en R1 des U19, une première historique ! C’est pourquoi on a imaginé une collaboration avec l’équipementier NOLT afin de pouvoir leur offrir les maillots.

Tu es aussi titulaire d’un BEP hôtellerie-restauration. Est-ce toujours un domaine qui t’attire ?
Après le collège, j’ai toujours eu l’envie et l’ambition d’être footballeur pro. Mes parents m’avaient donné pour objectif d’avoir un diplôme. Ensuite, j’ai eu la même période pour trouver un club professionnel. C’était soit l’un, soit l’autre, mais aujourd’hui je me vois dans le football, c’est ce que j’ai toujours connu !

Gaëtan Charbonnier du tac au tac

Avec Pouzauges Bocage FC

Meilleur souvenir sportif ?
Les montées en Ligue 1 avec Brest et Auxerre.

Pire souvenir sportif ?
La descente avec Reims.

Plus beau but marqué ?
Lors de la rencontre Toulouse – Brest avec une victoire 5-2 !

Un but tout fait que tu as loupé ?
Avec Reims contre Sochaux !

Pourquoi as-tu choisi d’être footballeur ?
C’était mon rêve.

Avec Brest, en 2019, à Charléty, face au Paris FC. Photo Philippe Le Brech

Ton but le plus important ?
Y’en a plusieurs, mais le doublé à Le blé qui valide la montée de Brest en L1 !

Ton geste technique préféré ?
Le petit pont.

Combien de cartons rouges dans ta carrière ?
Cinq, six je dirais…

Qualités et défauts sur un terrain, selon toi ?
Altruiste (trop pour certains), vision du jeu… Impulsif et râleur pour les défauts je dirais !

Le club ou l’équipe (ou la saison) où tu as pris le plus de plaisir sur le terrain ?
Brest sans hésitation.

Le club où tu aurais rêvé de jouer, dans tes rêves les plus fous ?
Barcelone.

Un stade et un club mythique pour toi ?
Barcelone.

Un public qui t’a marqué ?
Brest.

Un coéquipier marquant (si tu devais n’en citer qu’un), mais tu as droit à deux ou trois…
Quentin Bernard, pour son leadership et sa capacité à rassembler. Aïssa Mandi et Gauthier Larsonneur pour leur professionnalisme !

Le coéquipier avec lequel tu avais ou tu as le meilleur feeling, avec lequel tu t’entendais le mieux sur le terrain (idem, tu as droit à 2 ou 3) ?
Mathias Autret dès la première séance, incroyable ! Après, avec le temps, sur une saison, Claudiu Keseru et Gauthier Hein !

Le joueur adverse qui t’a le plus impressionné ?
Thiago Silva, Verratti, Edin Dzeko.

L’équipe qui t’a le plus impressionné (impuissance, souvenir d’un match) ?
Paris SG, Arsenal là bas en Ligue des Champions.

Un coéquipier et un coach perdus de vue que tu aimerais revoir ?
Aucun, je suis plus ou moins en contact fréquent avec tous ceux qu’avec qui j’avais créé du lien.

Avec Pouzauges Bocage FC

Un président ou un dirigeant marquant ?
Louis Nicollin.

Une consigne de coach que tu n’as jamais comprise ?
Anime Off, ça part d’une touche, le ballon circule de droite à gauche, un des défenseurs casse les lignes pour toucher un attaquant et là : « à partir de là, on voit ce que ça donne »; en gros, démerdez vous !

Le joueur le plus connu de ton répertoire ?
Aïssa Mandi.

Le stade qui t’a procuré le plus d’émotion (en dehors des clubs où tu as joués) ?
Le stade de Schalke 04 à Gelsenkirchen !

Des rituels, des tocs, des manies ?
J’ai toujours pleins de paires de chaussettes le jour de match pour pouvoir choisir ! Et je ne m’échauffe jamais avec la paire avec laquelle je joue.

Avec Brest, en 2019, en amical face à Rennes. Photo Philippe Le Brech

Une devise, un dicton ?
Marquer un but de plus que l’adversaire.

Tes passions dans la vie ?
Ma famille, mes ami(es), la Play.

Termine la phrase en un adjectif ou deux : tu étais un joueur plutôt …
Altruiste.

Un modèle de joueur ?
Denis Bergkamp, Dimitar Berbatov, Edin Dzeko, Mickael Pagis.

Une idole de jeunesse ?
Zidane.

Le match de légende, c’est lequel pour toi ?
France-Brésil en 1998.

Le Pouzauges Bocage FC, c’est un club plutôt… ?
Familial.

Ci-dessous : avec Brest et Reims (Photos Philippe Le Brech).

Texte : Joël PENET

Photos : Philippe Le Brech et Pouzauges Bocage FC

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L’ex-gardien de but de Bourg-Péronnas et Toulon, formé à Nice, sa ville natale, et à Sochaux, est devenu un entraîneur dur, exigeant, rigoureux et cash. Un vrai général d’armée, qui n’aspire qu’à transmettre, progresser et gravir les échelons. Et à mettre de l’eau dans son vin !

Par Anthony BOYER / Photos : 13HF, FC Albères-Argelès et Besançon Foot

Photo FC Albères-Argelès

Mettre les mains dans le cambouis, ou plutôt les gants, Benoît Pansier sait ce que cela veut dire. Et on ne dit pas cela uniquement parce qu’il était gardien et qu’il a joué par tous les temps ! Mais parce qu’avant de côtoyer les championnats nationaux sur un banc, l’ancien joueur de Bourg-Péronnas et Toulon, notamment, a fait ses armes à des niveaux régionaux voire départementaux, là où les moyens sont souvent limités et où il faut user du système D. Et même s’il considère qu’il a « vagabondé » deux ans au Lavandou, un an à La Seyne, en Promotion d’Honneur, et six mois à Mouans-Sartoux, en DHR, où ce n’était « pas simple », les premières années de coach – dont une autre expérience avec la réserve de Toulon également – lui ont beaucoup servi.

« Sincèrement, je n’étais pas adapté pour ces niveaux-là, et ces expériences se sont révélées être des échecs plus qu’autre chose, reconnaît-il avec une lucidité rare dans le milieu. C’est d’ailleurs avec cette même lucidité – et aussi son côté « cash » – qu’à la question « Qu’est-ce qu’il t-a manqué pour faire une carrière de joueur en Ligue 2 » que lui, l’ancien gardien coté en National et en National 2, a répondu avec la plus grande franchise : « Le talent ».

« Le terrain me manquait trop »

Photo FC Albères-Argelès

« Honnêtement, entraîner en PHA et en DHR, c’était plus de la survie; poursuit-il. Mais à un moment donné, il faut bien manger… Cela m’a appris des choses, notamment sur la gestion humaine. Mais je ne suis pas fait pour ces niveaux-là. Ensuite, je suis parti deux ans à Fos-sur-Mer, comme responsable de la formation, une super-expérience, mais le terrain me manquait trop. Et puis, au moment où je pense que c’est mort, le projet du BF (Besançon Foot), en National 3, est arrivé de nulle part ! »

Attention, quand Benoît Pansier dit qu’il n’était pas « fait » pour ces niveaux-là, n’y voyez là aucune prétention : simplement, chez lui, son exigence, sa rigueur, sa discipline, son professionnalisme sont tels qu’il est presque impossible de retranscrire tout ça à l’échelle amateur. C’est pour cela que le natif de Nice (47 ans) a un profil qui se rapproche plus du haut niveau, et avec le National 3, il a déjà trouvé un échelon plus en rapport avec ses désirs, un échelon plus élevé (surtout depuis la refonte des championnats l’été dernier) où certains joueurs n’ont que le ballon pour métier.

Alors, quand l’autre club de Besançon, le « BF », lui a proposé un contrat, il n’a pas hésité : « Le club cherchait un coach, et puis, vous savez comment c’est, un agent, l’ami d’un agent, puis l’ami d’un ami d’un agent connaissait le directeur sportif de Fos-sur-Mer, James Strauss, à qui j’avais dit que j’aspirais à retrouver le terrain. On m’a appelé, et voilà, en 48 heures, ça s’est fait avec le Besançon Foot. »

« J’ai du mal à arrondir les angles »

Trois saisons et trois maintiens plus tard, le titulaire du DES – il peut entraîner jusqu’en National 2 – a ressenti le besoin d’aller voir ailleurs. Puis les portes qu’il avait entrouvertes à l’intersaison se sont tour à tour refermées, au point que le doute s’est à nouveau installé : « Je suis resté trois saisons à Besançon et à ce jour, c’est mon fait d’armes. J’avais fait trois ans à Sochaux, donc je n’arrivais pas en terrain inconnu, je connaissais la région, c’était un peu comme un retour aux sources. Mais après trois ans, j’avais la sensation d’avoir fait le tour, de tourner en rond, mon discours s’usait, et puis, il faut avouer aussi que j’ai un management très dur… C’est pour ça que, rester trois ans dans un club avec mes méthodes de management, c’est un exploit. Avec moi, c’est à la dure, à la militaire. J’ai du mal à arrondir les angles. Mais je tends vers plus de souplesse, parce que mon leitmotiv, c’est d’aller au plus haut niveau. Et je mettrai tout en oeuvre pour y aller. Si cela doit passer par un peu plus de rondeur dans les angles, alors OK. » L’exigence dont on vous parlait plus haut.

De Besançon à Argelès…

Photo FC Albères-Argelès

À Besançon, le foot, le foot, ça a l’air compliqué, non ? « C’est compliqué au Racing surtout, pas au Besançon Foot. Le BF, c’est un club qui s’est retrouvé en National 3 sans avoir vraiment voulu y être, qui a profité des différents dépôts de bilan du Racing; à la base, c’est un club de PHA de quartiers, qui a fusionné avec d’autres clubs, qui a gravi les échelons parce que ça a bien travaillé. Mais il n’a pas les structures d’un club de National 3. On se partageait juste le stade Léo-Lagrange pour les matchs de championnat. D’ailleurs, quand je suis arrivé, les deux clubs étaient en N3, comme cette saison d’ailleurs. Pour le derby, y’avait 1500 à 2000 personnes. Après, le Racing a toujours fait du monde, c’est le club historique. Mais les deux ne s’entendent pas. Moi, par exemple, j’avais des contacts avec David (Le Frapper, aujourd’hui coach à Bourg-en-Bresse/Péronnas, en National), mais je n’en avais pas avec son prédécesseur, Jean-Marc Trinita. »

Finalement, après une inter-saison où il a bien cru ne trouver aucun projet, est arrivé Albères-Argelès, toujours en National 3, dans les Pyrénées-Orientales, à côté de Perpignan. « Je connaissais très bien l’ancien coach, Guillaume Boronad (de 2017 à 2022), avec qui j’avais joué à Toulon, et qui a fait monter le club de Régional 1 en N3. En discutant avec lui, je lui ai dit que je cherchais un nouveau challenge, et il m’a dit que le coach de la saison passée, Raphaël Girardot, allait partir, et derrière, ça s’est fait vite. »

Au pays du rugby

Le stade Eric Cantona à Argelès. Photo FC Albères-Argelès

En terre d’ovalie, Benoît découvre un club jeune (il est né en 2006 de la fusion entre l’ASEA Sorède, situé sur le territoire des « Albères », qui regroupe plusieurs petites communes, et le FC Argelèst), avec un peu plus de moyens : « On a 650 000 euros de budget contre 350 000 euros au BF » et surtout une équipe où la plupart des joueurs ne font que du foot. Je peux travailler avec un groupe où je n’ai que quatre joueurs qui bossent à côté, mais comme ce sont les quatre cadres de l’équipe, alors on s’entraîne le soir. On a trois contrats fédéraux. On a vraiment des bons joueurs, un bon groupe, un bon effectif, avec Pascal Vié, qui a joué à Martigues, Marignane et Canet, Toufik Ouadoudi, qui a joué au Puy et à Canet, Max Ferri, l’ex-gardien du Canet, Quentin Martin (ex-Villefranche, Bourg, Béziers)… Bien sûr, en termes de structures, on reste un club amateur, on n’est pas Alès, Gueugnon, Mâcon, Jura Dolois ou Louhans-Cuiseaux, pour ne citer que ces clubs-là. Il ne faut pas oublier qu’Albères-Argelès était en Régional 1 il y a 4 ans et demi. »

Le National 3, plafond de verre ? Comment exister au pays du rugby ? Quid du football à Perpignan et dans sa région ? Un rapprochement est-il possible comme ce fut le cas avec Canet et la capitale de la Catalogne ? « Le National 3 a des exigences, répond Pansier; notre club n’a pas d’histoire, et ça, c’est difficile, parce qu’on est dans une région ou le football n’est pas la priorité. Mais il a de l’ambition. Tant qu’Albères-Argelès restera tout seul, ça sera compliqué. Il faudrait se rapprocher de Perpignan, faire un club Perpignan-Argelès. Perpignan est quand même une grande ville. Pour Canet (N3), c’est pareil : ils ont juste un peu plus de moyens que nous, mais ils ont la même problématique : un jour, un mécène est arrivé, mais le jour où le mécène s’en va… Ils ont eu cette réflexion et tenté le rapprochement avec Perpignan; géographiquement, c’était justifié, parce que Canet est juste à côté, alors qu’Argelès est à 25 kilomètres de Perpignan. Mais cela leur a plus coûté qu’autre chose, parce que Perpignan, où la politique sportive est le rugby, a jeté l’éponge. C’est incroyable que la capitale de la Catalogne n’ait pas un club de foot au moins en National. La Catalogne, c’est le Barça tout de même ! »

« L’objectif ? Un bon maintien en N3 »

Photo FC Albères-Argelès

Sportivement, le FC Albères-Argelès, coprésidé par Raymond Vazquez et Mickaël Lafond, a livré une première partie de saison intéressante (7e à la trêve), qui s’est terminée par un 0-0 sur le terrain de Bayonne, une équipe que Pansier voit bien accéder en National 2 la saison prochaine (lire l’interview « du tac au tac »), même si, pour l’heure, c’est la réserve de Toulouse qui est en tête. « Le National 3 est relevé, c’est dû à la refonte des championnats. Après, est-ce que c’est notre poule qui est plus relevée ? Je ne sais pas, mais c’est dur : les écarts sont faibles. Notre objectif, c’est un bon maintien. C’est la première fois que les dirigeants prennent un coach de l’extérieur, avec quelques joueurs aussi de l’extérieur. On a un peu professionnalisé le club, au niveau du staff et du fonctionnement, avec un adjoint / préparateur physique (Maxime Moretti), un entraîneur des gardiens, Hicham Rhoufir (demi-finaliste de la coupe de France 2010 avec Quevilly), un intendant sportif (Damien Potteau), un kiné (Nicolas Cladiu) et un team manager (Logan Ropero). Mais le point noir, c’est la coupe de France, on a été sorti tôt (élimination au 5e tour face au FC Comtal, club de R2, sur le score de 2 buts à 1). »

Une grosse déception, parce qu’un parcours en coupe est synonyme de médiatisation : « Le club manque de notoriété et c’est en ce sens que la coupe aurait servi. Je comprends la position des dirigeants, mais le problème, c’est que j’ai 25 joueurs à concerner : or, si du 18e au 25e, aucun ne joue contre un club de Régional 3 en coupe, quand est-ce que je le fais jouer alors ? Parce qu’il faut garder tout le monde concerné. Aujourd’hui, le jeune joueur de 20 ans, il veut jouer : ce n’est plus comme à mon époque, où on était content d’être à l’entrainement, d’être dans le groupe. C’est là que, parfois, les discours dirigeants / coachs diffèrent. Mais je comprends : la coupe, ça fait rentrer de l’argent au club et ça engendre une médiatisation. »

Benoît Pansier, du tac au tac

« Passion, travail, rigueur »

Meilleur souvenir de ta carrière ?

Benoît Pansier sous les couleurs de Toulon (Photo An. D.)

J’en ai plusieurs ! J’ai vécu pas mal d’épopées en coupe de France, avec différents clubs, Bourg-Péronnas notamment (1/4 de finale en 1998 et 8e de finale en 2003). Et avec Toulon, on a quand même fait un 16e de finale à Clermont (en 2005). Ce sont des souvenirs marquants. Mais peut-être que mon plus beau souvenir, c’est la montée de CFA en National avec Toulon en 2005. On monte à la dernière journée contre Saint-Priest devant un stade de Bon Rencontre plein. Je pense que ça passe avant la coupe parce que c’est l’aboutissement d’une saison, ce n’est pas éphémère.

Le pire souvenir ?
C’est la descente, la seule que j’ai connue, de National en CFA, lors de ma dernière saison à Bourg, en 2004. Cette saison-là, je me suis blessé au dos, je n’ai malheureusement pas disputé tous les matchs, c’était aussi ma première saison en National, et même quand je jouais, je n’étais pas à 100 %. Une saison de merde.

As-tu déjà pris des cartons rouges ?
Oui, quelques-uns… Mais pour un gardien, je pense que j’en ai pris un peu plus que ce que je ne n’aurais dû. Mon caractère, mon style de jeu avec ma capacité à jouer haut, et donc à être moyen dans la couverture de ma défense, ont fait que… En fait, j’étais un gardien à l’ancienne, bon sur sur sa ligne et dans les 18 mètres, mais peu à l’aise dans le jeu en dehors de mes 18 mètres, et parfois, je m’aventurais loin de ma surface et il m’arrivait de découper l’attaquant.

Photo 13HF

Qualités et défauts sur un terrain ?
Qualités, le jeu sur ma ligne, la technique, la prise de balle, plongeon, détente, les sorties aériennes… mais à l’époque, nous, les gardiens, on était vachement jugé sur notre jeu aérien : c’est beaucoup moins le cas maintenant. Aujourd’hui, cet aspect du jeu est devenu anodin et plus du tout prioritaire. J’étais un gardien à l’image de Lionel Letizi, très sobre sur sa ligne, toutes proportions gardées.

Justement, Letizi, le Niçois comme toi : c’est un modèle ?
Oui, j’allais le scruter aux séances à Nice. J’ai eu la chance de faire des entraînements spécifiques avec lui, j’étais ce gamin qui admirait son « grand frère ». Jusqu’à en avoir même des mimiques sur mes déplacements, ma manière de jouer.. On a un peu la même morphologie, la même nonchalance, un peu les même caractéristiques. En plus, au-delà de ses qualités de joueur, c’est un homme en or.

Une erreur de casting dans ta carrière ?
Oui, avoir quitté Toulon pour Fréjus. Je ne veux pas dévaloriser Fréjus, parce que pendant deux ans, le club fut mon employeur, mais quand on a connu Toulon… Si c’était à refaire, je n’y serais pas allé, parce que passer de Bon Rencontre avec plusieurs milliers de supporters à un stade de … Le samedi, quand je jouais à Fréjus, ça sentait la merguez alors que, un an avant, à Toulon, ça sentait les fumigènes. Pour la motivation, c’était compliqué. Je n’y arrivais pas. Ce n’était pas un problème d’équipe, car on avait une bonne équipe à Fréjus, mais je n’arrivais pas à me transcender et les deux saisons que j’ai fait là-bas, en terme de rendement, sont mes deux plus pourries.

Un club où tu aurais rêvé de jouer ?
J’y ai joué, mais en jeunes, c’est l’OGC Nice; j’aurais aimé y faire ma carrière si j’avais eu le choix. C’est mon club de sang, c’est ma ville. J’allais avec la Brigade Sud au stade du Ray quand j’étais jeune. Je suis Niçois quoi ! J’y reviens à toutes les vacances.

Photo Besançon Foot

Un match qui ressort de ta carrière ?
(Rires) Bayonne – Toulon en National : là-bas, ce soir-là, on avait été héroïque, j’avais fait cinq ou six arrêts déterminants. C’était Alain Pochat sur le banc d’en face, que je viens juste d’affronter à nouveau à Bayonne avant Noël en N3 avec Albères-Argelès (0-0). Après ce match Bayonne-Toulon, je me souviendrai toute ma vie de ce que m’a dit le directeur sportif André di Scala à la fin : « Lundi tu passes au bureau, et tu signes pour la durée que tu veux au Sporting » ! Je lui en avais voulu de m’avoir dit ça. En fin de saison, il me lourde de Toulon ! C’est le football.

Le pire match de ta carrière ?
Certains de mes matchs avec Fréjus en CFA, je me disais « Il ne faut pas que je reste, cela ne sert à rien ». Je n’étais pas épanoui, mais j’étais payé, et pas mal payé… D’ailleurs, le club payait bien les joueurs pour les faire venir, sinon, les joueurs ne viendraient pas.

Un stade mythique ?
Le Ray à Nice. Même si, contrairement à la plupart des Niçois pure souche, j’adore l’Allianz Riviera (le nouveau stade de Nice, inauguré en 2013), quand il est plein, y’a une ambiance de malade. Je suis un des rares niçois à kiffer l’Allianz !

Un coéquipier marquant dans ta carrière ?
À Sochaux, j’ai côtoyé des garçons qui ont fait une grosse carrière, mais si je dois en ressortir un, je dirais Camel Meriem, il aurait dû faire une carrière à la Zidane. C’est le meilleur joueur avec lequel j’ai joué.

Et le meilleur feeling sur le terrain ?
Sébastien Soulas à Toulon. Lui aussi, c’est pareil, il aurait dû faire une meilleure carrière.

Avec Omar Daf à Sochaux. Photo Besançon Foot

Combien d’amis dans le football ?
Omar Daf, mon ami d’enfance, avec qui j’ai joué à Sochaux, c’est la famille.

Un adversaire qui t’a impressionné ?
L’attaquant Do Marcolino (ex-Laval, Angers, Amiens), quand il jouait à Vannes, m’avait mis un hattrick en National et m’avait impressionné, à tel point que Jean-Louis Garcia, notre coach à Toulon, voulait le récupérer la saison d’après; finalement, il l’a récupéré, mais plus tard, à Angers. Et je citerais aussi quelqu’un avec qui j’ai joué et qui a aussi été un adversaire, c’est Mesut Bilici, un attaquant redoutable.

Un coach que tu as perdu de vue mais que tu aimerais revoir ?
Parfois je l’ai au téléphone, c’est une personne que j’ai eu comme entraîneur, et pourtant, à ce moment-là, notre relation n’était pas au top, c’est Jean-Louis Garcia. Une référence. C’est le meilleur coach que j’ai connu, et pourtant, j’en ai connu beaucoup, Francis Gillot à Sochaux, Faruk Hadzibegic, Jean Fernandez, des noms plus ronflants, mais Jean-Louis… J’aurais aimé bosser avec lui, même si je sais qu’il bosse beaucoup avec Manu (Nogueira), qui est un pote, mais là, je ne sais pas si Jean-Louis reprendra à nouveau un club. J’aurais aimé le côtoyer dans un staff.

Photo FC Albères-Argelès

Un coach que tu n’as pas forcément envie de revoir ?
Non, aucun. Joueur, je me projetais déjà en tant que coach, donc j’essayais d’apprendre. Je n’étais pas un joueur chiant. J’étais sérieux, bosseur, rigoureux, respectueux. J’avais un sale caractère mais je n’étais pas un « falabrac », je n’étais pas Ruffier ! Moi, c’est plus la sobriété, Letizi, Lloris… Je n’étais ni bruyant ni bouillant. J’étais dans mon coin. D’ailleurs, pas sûr qu’à l’époque on aurait pu penser que je deviendrais entraîneur, car je n’étais pas un meneur d’hommes, je ne faisais pas de bruit dans le vestiaire, je ne criais pas à la mi-temps ou à la fin d’un match. Par contre, j’en faisais plus que les autres. J’arrivais le premier, je partais le dernier.

Une causerie ?
Oui, celle de Didier Christophe à Bourg, il avait repris l’équipe en National, je crois que c’était le match du maintien; il avait fait une causerie un peu à la Pascal Dupraz. Il avait demandé à quelques épouses et familles de joueurs de dire un petit mot en vidéo, j’avais trouvé ça fabuleux. D’ailleurs, je l’ai imité une fois.

Des rituels, des manies avant un match ?
Toucher ma barre au coup d’envoi, notamment. J’en avais plein d’autres !

Photo Besançon Foot

Une phrase, un dicton ?
Le travail surpasse le talent, alors que le talent échoue face au travail.

Pourquoi as-tu pratiqué le foot, quand tu étais gamin ?
C’est mon père qui m’a transmis le virus. C’était sa passion. Il m’a initié au foot, à La Victorine, à Nice, puis j’ai intégré l’OGC Nice où j’ai suivi des amis. J’y ai passé cinq ans de U15 jusqu’à la réserve de CFA où on s’entraînait très jeune, parce qu’il n’y avait pas de 18 ans nationaux; j’avais eu des formateurs comme Gaby Desmenez, Daniel Sanchez, Hugues Buffat…

Tu ne pensais qu’au foot ?
Oh oui, j’étais un malade de foot, je le suis toujours d’ailleurs. Le foot, c’était une obsession. Je voulais réussir. C’est un trait de caractère fort chez moi, mais dans le foot, parce que dans la vie, je ne suis pas du tout comme ça. Dès que ça touche au football, je deviens fou furieux, c’est ma vie, et je dirais même, c’est ma thérapie, une drogue : quand je ne vais pas bien, je me mets un match de foot !

Que t’a-t-il manqué pour franchir le cap et jouer en Ligue 2 ?
Le talent. Ce que j’ai réalisé, je le dois à 90 % au travail. Je n’avais même pas le talent pour jouer au niveau où j’ai joué. J’ai arrêté à 35 ans parce que mon cerveau était usé. Usé de mon surplus de travail, d’investissement, tout ce travail invisible que je me suis imposé pendant quinze ans, avec une hygiène de vie draconienne, à la limite de la folie. Je pesais les aliments, je me couchais à 23 heures… J’avais conscience que je n’avais pas le talent pour jouer ne serait-ce qu’en National, mais j’ai réussi à gravir des échelons grâce au travail.

As-tu déjà marqué un but ?
Malheureusement non !

Si tu n’avais pas été footballeur ?
J’aurais peut-être fait l’Armée.

Photo FC Albères-Argelès

Quand as-tu su que tu allais devenir coach ?
Très jeune, quand j’avais 18 ou 19 ans. C’est une vocation. Celle-là je l’avais ! Je l’ai toujours eu en moi. C’est paradoxal. Autant quand j’étais joueur, j’avais l’image de quelqu’un de humble, autant j’ai l’image d’un coach hautain, prétentieux, sur de lui… Après, je sais que j’ai des qualités pour ce métier de coach, et j’aspire à aller plus haut. Ce qui n’empêche pas le travail : je suis pareil, j’arrive trois heures avant la séance et je repars deux heures après, ça, ça n’a pas changé ! Je m’impose la même rigueur de travail que si j’étais en Ligue 1. J’ai commencé avec les gardiens, à Bourg, j’avais l’école des gardiens, même à Sochaux, parfois, on nous envoyait coacher une équipe de jeunes.

Les entraîneurs qui t’ont inspiré ?
J’ai deux mentors. Il y a Jean-Louis Garcia, ancien gardien comme moi, même rigueur, même exigence, même caractère, avec l’obsession du moindre détail. Après, quand je l’ai eu à Toulon, ça avait matché moyen, parce qu’il est « casse-couilles ». Mais les deux meilleures saisons que j’ai faites, c’est avec lui, j’avais atteint un niveau que je ne pensais pas pouvoir atteindre. Il est toujours derrière toi, il ne te lâche pas, il te met la pression, il te crie dessus. Mais il fait aussi constamment aller au-dessus. Je suis un peu comme ça avec mes joueurs. Et j’ai Pep Guardiola. Bien sûr, je n’ai jamais « pratiqué » Guardiola, alors que Jean-Louis, oui, c’est plus concret. Mais je reste un pro-guardiola, j’aime le jeu de possession, au point d’en être obsédé et fermé à tout autre football, mais j’ai dû évoluer dans ma réflexion : Guardiola, il a les meilleurs joueurs du monde… Faire ce qu’il fait, tu ne peux pas le faire avec Nancy par exemple (rires). Avec Argelès, Besançon ou la réserve du Sporting de Toulon, ce n’est pas possible non plus. Est-ce que l’on veut mourir avec ses idées ou bien essayer d’évoluer, parce que tu as envie de progresser, de durer, d’aller vers un plus haut niveau ? J’ai pris cette deuxième option, en essayant toutefois de garder les grands principes de jeu.

Photo 13HF

Justement, tes principes de jeu ?
Aujourd’hui, j’insiste aussi beaucoup sur les valeurs de combativité et de générosité, de solidité dans les duels, parce que le N3 le demande. Tout en conservant le cadre du jeu. Je suis beaucoup plus adepte d’une défense à 4, j’essaie de bâtir mes effectifs à partir de ce socle, mais cela m’est arrivé de jouer à 5 ou à 3, même si je ne suis pas un grand fan. Ensuite, est-ce que je joue avec une sentinelle devant la défense, ou deux numéros 6… ? Je ne suis pas fermé. Mais j’ai une obsession depuis 2 ou 3 ans, que je n’avais pas avant : c’est de faire du pressing, très haut. Je trouve qu’en N3, on arrive toujours à chiper des ballons, parce que les défenseurs sont avant tout des défenseurs justement, et pas des gros relanceurs. Et puis on met beaucoup plus l’adversaire en difficulté en allant le chercher, en le pressant. Depuis quatre saisons que j’entraîne en N3, j’ai noté que, dans l’ensemble, les joueurs n’aimaient pas attendre. Le bloc bas, ils n’aiment pas trop : ça tombe bien, parce que je préfère que mon équipe soit active plutôt que passive. Après, j’ai toujours cette haine de prendre un but, je préfère gagner 1 à 0, j’aime bien être « meilleure défense » même si je ne l’ai jamais été, là, avec Argelès cette saison, on n’est pas trop mal (6e défense).

Que manque-t-il a un entraîneur comme toi pour toucher le monde pro ?
Il faut des résultats et un réseau, et bien sûr le diplôme ! Mais tu ne peux le passer que si tu es dans une structure pro, c’est dur. Adjoint en pro un jour ? Oui, si j’ai de grosses affinités avec le coach, sinon, non. En revanche, je suis ouvert aux U17 ou aux U19 dans un centre de formation pro, là oui, ou une réserve pro.

Qui va monter en N2 dans ta poule ?
Bayonne et Toulouse sont les plus armés. Bayonne a une équipe très puissante, très N2, elle a le profil. Toulouse, on a pris le feu chez eux, on a perdu 4 à 0. Mais ce jour-là, il y avait eu 9 redescentes de pros, de joueurs de 20/23 ans. Mais c’est une réserve pro, ils ne joueront pas tout le temps avec une équipe comme ça.

Le foot, en trois mots ?
Passion, travail, rigueur.

  • Un peu d’histoire ! Pourquoi le stade d’Argelès s’appelle-t-il stade Eric Cantona ? « Nous cherchions à donner un nom de footballeur marquant à ce stade (inauguré le 30 août 2019), expliquait sur France Antoine Parra, le maire d’Argelès; Dans notre département, c’est rare ! On a pensé à Eric Cantona car il a une histoire liée avec Argelès-sur-Mer. Son grand-père a fait partie des Républicains qui ont fui le franquisme en 1939 et il a été interné au camp d’Argelès ». Le jour de l’inauguration, Eric Cantona était présent en compagnie de sa famille.

Texte : Anthony BOYER / Twitter @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr

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