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Franck Priou (Septèmes-Consolat) : pour l’amour du jeu !

Après une coupure d’un an, mise à profit pour retravailler dans la vie active, l’ancien attaquant professionnel des années 80-90 a repris du service sur un banc, à Septèmes-Consolat, en PHA, un niveau qu’il avait découvert à 17 ans avant d’exploser à Istres chez les amateurs. Et il reprend du plaisir !

Avec l’AS Cannes. Photo Serge Haouzi.

« Pri – You », « Pri – You »… Le stade Pierre de Coubertin à Cannes – la Bocca résonne encore des chants et des cris de ses supporters. C’était quand Franck Priou tutoyait les sommets avec le club azuréen, 6e à l’issue de la saison 1993-1994 en première division. C’était quand le tandem Priou-Madar martyrisait les défenses de l’élite hexagonale (18 buts en 32 matchs pour le premier, 10 buts en 27 matchs pour le second), un an après avoir déjà martyrisé celles de Division 2 (21 buts en 32 matchs pour Priou et 17 buts en 27 matchs pour Madar lors de la saison 1992-1993, achevée par un retour en élite après les barrages). C’était un autre temps. Une autre époque.

Quand le natif de Marignane, à côté de Marseille, a débarqué sur La Croisette, il avait déjà 28 ans ans, un CV long comme le bras, une ribambelle de buts à son actif et toujours son sacré… caractère ! Il était, en quelque sorte, à l’apogée de sa carrière qui l’avait vu démarrer chez les amateurs en même temps que son club, Istres, en D4, à l’âge de 20 ans, puis en D3 et enfin en D2, sous l’ère Georges Korac.

Istres, le club tremplin

A Istres.

Des carrières à la Priou, il n’en existe pas beaucoup ! A 16 ans, quand il arrête l’école, il travaille chez Point P à Port-de-Bouc. A 17 ans, il joue en PHA à Gignac, puis à Marignane en DH avant de partir à l’armée à Auxerre à 19 ans. Et quand il revient, à 20 ans, c’est Istres, club avec lequel les attaches sont et resteront très fortes, qui lui sert de tremplin. C’était le temps des copains et de l’insouciance pour celui qui avait démarré chez les minots dans le club voisin, au FC Martigues, toujours sur les bords de l’étange de Berre, à 13 ans, en minimes, là où il habite depuis près de 30 ans maintenant.

Aujourd’hui, à 60 ans, après avoir beaucoup bourlingué, que cela soit comme joueur en D2 et en D1 (Istres puis Lyon, Mulhouse, Sochaux, Cannes, Saint-Etienne, Caen, Martigues), même en National en fin de carrière à Istres (1999-2000), et comme entraîneur (réserve d’Istres, Consolat, Gap, Martigues, Fréjus/St-Raphaël, Marignane, re-Martigues, Mulhouse, Istres, Endoume et Atlético Marseille), « Francky » a posé ses valises à Septèmes-Consolat, pas très loin du stade de La Martine, où feu Marseille-Consolat vécut ses belles heures en National, après un break loin des bancs de touche.

L’équipe de PHA de Septèmes/Consolat, cette saison. Photo Septèmes-Consolat.

Et s’il n’avait pas recroisé la route de Jean-Luc Mingallon, emblématique président de Marseille-Consolat, aujourd’hui président de Berre (Régional 2), et celle de Salah Nasri, président du nouveau « FC Septèmes-Consolat », peut-être qu’il serait toujours en train de travailler au Décathlon de Bouc-Bel-Air et de préparer les commandes, comme il le faisait l’an passé… « J’ai travaillé trois mois à Décathlon, oui, et ça ne me dérange pas, j’avais déjà travaillé à DistriMag, filiale de Maisons du monde, pendant un an et demi, et quand j’avais 16 ans aussi, à Point P, à Port-de-Bouc… Tu sais, j’ai toujours su, même quand j’étais joueur, que j’allais retravailler après le foot, pour cotiser pour la retraite. C’est bien de sortir du foot, de se vider la tête, et puis on voit des gens de la vie de tous les jours. Même si le football me rattrape toujours, avoir travaillé avec des gens de plein de nationalités différentes, j’aime ça, ce mélange, c’est enrichissant. »

2e du championnat

Quand il faisait la Une de France Football, avec Mulhouse !

La rencontre avec l’ancien tandem fort de Marseille-Consolat fut finalement la raison de ce retour sur un banc, un an après la liquidation de l’Atlético Marseille, dans un club de Départemental 1, l’équivalent de la PHA. « Après l’histoire de l’Atlético, je suis resté un an loin du foot, j’ai bossé, et puis près avoir discuté avec Jean-Luc et Salah, j’ai accepté, même si certaines personnes m’ont dit « Mais pourquoi tu vas à un niveau si bas ? », alors que moi, ça ne me dérange pas du tout, pour une bonne raison : je viens moi aussi de ce niveau-là ! Le foot amateur, on s’y fait, et je suis agréablement surpris par le championnat. Je m’attendais à des matchs très engagés, des bagarres, mais pas du tout, je touche du bois, ça se passe très bien sur les terrains, les joueurs se connaissent entre eux et puis le District de Provence veille et ne plaisante pas : un écart et c’est vite 8 ou 10 matchs de suspension ! En fait, c’est difficile au niveau de l’arbitrage, mais en même temps, quand je vois en Ligue 1 que, même avec le Var, on n’y arrive pas… Après, à Aix, au même niveau que nous, il y a Sébastien Perez et Didier Samoun (ex-champion d’Europe et du monde de beach soccer) aussi, ils sont là pour prendre du plaisir, comme moi. Finalement, peu importe le niveau. En fait, le seul truc que l’on peut reprocher à cette division, c’est l’assiduité aux entraînements. Les joueurs travaillent, alors, s’ils viennent, ils viennent, s’ils ne viennent pas, ils ne viennent pas. Qu’est-ce que tu veux leur dire ? »

Le duo Mingallon-Nasri. Photo Septèmes-Consolat.

Afin d’utiliser le stade de La Martine, le FC Septèmes, qui reste basé au complexe du Grand Pavois, a adossé « Consolat » à son nom, alors, forcément, cela réveille quelques consciences et suscite de la curiosité. « On parle quand même plus de Septèmes que de Consolat mais en montant les échelons, j’espère qu’on entendra parler aussi de Consolat compte tenu de ce que ce club a fait ces dernières années. D’ailleurs, Jean-Luc Mingallon garde un oeil sur Septèmes-Consolat même si c’est Salah Nasri, l’oncle de Samir, qui est là au quotidien. On joue en championnat et on s’entraîne à La Martine. Pour l’instant, en championnat, ça se passe bien. On est 2e derrière La Cayolle, avec 5 points d’avance sur le 3e, Rousset B. Ce sont les deux premiers qui montent. On a fait, récemment, un faux pas à domicile, contre Saint-Antoine, c’est dommage. Mais on veut remettre le club à un niveau acceptable. Parce que tout ce qui a été fait avant à Consolat a été détruit par des personnes qui n’en avaient rien à faire du club et ne pensaient qu’à leur intérêt; c’est toujours plus facile de détruire que de construire. Si on arrive à faire monter les seniors en Régional 2, cela permettra aux jeunes d’intégrer l’équipe une. Pour l’instant, je n’ai pas pris de U18 avec moi parce que je trouve que ce n’est pas forcément mieux pour eux de jouer en PHA, leur championnat est intéressant. On a une bonne image, beaucoup de joueurs aimeraient nous rejoindre, on attire, même si le niveau est un peu compliqué, c’est pour ça, il faut monter ! Dans mon équipe, il y a le gardien Nicolas Zacharelli qui a joué à Marignane en N2 et National, et aussi Enzo Sauvage, notre attaquant, qui est passé par Wolverhampton chez les jeunes et qui devait partir renforcer la réserve de l’OM à l’intersaison; il a fait 15 jours d’essai avec eux et ils avaient l’air d’être satisfaits. On l’aurait laissé partir pour un contrat, on aurait été content pour lui même si c’est notre meilleur buteur mais du jour au lendemain, l’OM n’a plus donné de nouvelles… C’est l’OM dans toute sa splendeur, ce n’est pas très classe, sans compter qu’il ne nous ont pas avertis non plus. »

Franck Priou du tac au tac

« Mon idole, c’était Jean-Pierre Orts ! »

Avec l’AS Cannes. Photo Serge Haouzi.

Meilleur souvenir sportif de joueur ?
Il y en a beaucoup ! Il vaut mieux ! S’il n’y en avait qu’un seul, ce serait dramatique (rires !). La montée en D1 avec Mulhouse mais la plus belle, quand même, je pense que c’est avec Istres, quand j’étais amateur, en Division 3, on est monté en Division 2, je n’étais pas destiné à devenir joueur pro, et à 19/20 ans, je monte de D4 en D2 avec Istres, c’est le plus beau, parce que c’était inattendu. Je termine meilleur buteur de D4 puis de D3 (22 buts), et je fais une saison honorable en D2 avec Istres (30 matchs, 14 buts), où on était amateur, mais c’est ce qui me permet de lancer ma carrière. Mes plus belles années, c’étaient celles-là, parce que je découvrais tout. Je découvrais la vie. Je sortais de l’armée à Auxerre à 19 ans, je n’avais jamais rien fait, j’avais quitté l’école à 16 ans, je travaillais à Point P. J’avais été sollicité mais le fait de monter avec Istres en D2 ça me donnait l’occasion de savoir ce dont j’étais capable. Il fallait que je me prouve à moi-même d’abord, il fallait que je sache si, déjà, je pouvais jouer en D2 avec mon club, avant d’espérer viser mieux. C’est ce que je reproche au football d’aujourd’hui : un jeune, on le met sur un piédestal alors qu’il n’a pas prouvé grand-chose, pour certains, qui n’ont jamais fait un match en pro.

Meilleur souvenir de coach ?
La montée en National avec Gap en 2010. Mais partout où je suis passé, j’ai vécu de grands moments. A Gap, j’y ai passé deux ans, le club était au bord du gouffre, et on fait une saison, la première, où on se maintient en CFA (N2) avec très peu de moyens, et la saison suivante, c’est tout le contraire, sans avoir beaucoup plus de moyens, mais on fait un super recrutement.

Avec l’AS Cannes. Photo Serge Haouzi.

Pourquoi n’es-tu pas resté à Gap après la montée en 2010 ?
Parce que je pense qu’ on a fait le tour de la question, on monte en National, et compte tenu de la région et des structures, je pense que l’on ne peut pas faire mieux, et j ai cette proposition de Martigues qui arrive… Cela faisait deux ans que je faisais des allers retours pour rejoindre ma famille à Martigues, où j’habite depuis 1997, et puis Martigues avait ce projet de remonter en Ligue 2, c’était logique que j’aille là-bas, pour essayer de faire quelque chose de plus grand, mais je serais resté à Gap s’il n’y avait pas eu cette proposition. Aujourd’hui Gap est en PHA, c’est dramatique, et il y a beaucoup de clubs comme ça qui ont disparu.

Le club où tu as pris le plus de plaisir comme joueur ?
Cannes. On avait un groupe et entraîneur fantastiques, sauf ma première année (1991-1992), quand il y a eu les stars, les Asanovic, Omam-Biyik et les autres, c’était du grand n’importe quoi ! Ils étaient grassement payés, et ils n’en foutaient pas une. Le vestiaire était scindé en deux. On est descendu en D2 mais c’était prévisible. Mais après, avec Luis (Fernandez), quand il a repris l’équipe, en D2… Avec lui, on partait se mettre au vert à Saint-Vallier (sur les hauteurs de Grasse), c’était fantastique, on était heureux d’être ensemble, on a passé des moments mémorables, et si on est remonté en D1 aux barrages en fin de saison, et que l’on a fait la saison que l’on a faite après (6e en 1993-1994), ce n’est pas pour rien ! Luis (Fernandez) pouvait nous faire grimper aux arbres. On était un un groupe.

Aucun regret de ne jamais avoir entraîné l’AS Cannes ?
Pas forcément… Oui et non… Je vois par où le club est passé… Aujourd’hui il a l’air mieux structuré même si je pense qu’il ne montera pas en National, parce que je connais bien le N2, et je pense que cette équipe n’est pas prête pour ce niveau, je la trouve tendre, comparé à des équipes comme Aubagne par exemple, où c’est physique, où « ça rentre ». Quand j’entraînais en N3, à l’Atlético, il y a 2 ans, je la trouvais déjà tendre. En revanche, je trouve que l’AS Cannes a plus une équipe cette saison pour figurer au niveau au-dessus qu’en N2. Après, honnêtement, oui, j’aurais aimé, et c’est vrai qu’avec mon épouse, on s’est toujours dit que si on devait habiter quelque part, ailleurs, ce serait Cannes, où on s’est marié, ou dans les alentours de Cannes. Quand je jouais à l’AS Cannes, on habitait à La Roquette-sur-Siagne. Et c’est à Cannes que mes deux premières filles sont nées : Samantha et Tiffany. Samantha joue en D1 au handball à Plan-de-Cuques, Tiffany travaille dans un journal régional comme commerciale. Ma troisième fille, Jade, est née à Martigues, et travaille dans un club de tennis. Et depuis 7 mois, je suis grand-père d’une petite Raphaëlle ! Je suis devenu gaga !

Avec l’AS Cannes. Photo Serge Haouzi.

Sur ton CV, on voit que tu as parfois entraîné dans des clubs où tu avais joué auparavant, comme Mulhouse…
Mulhouse, c’était un souhait de ma part et aussi du président de l’époque, Alain Dreyfus, mais ça ne s’est pas du tout passé comme prévu. C’est à Mulhouse que j’ai connu mon épouse, Isabelle. C’est aussi à Mulhouse que j’ai découvert la Division 1, mais quand je suis arrivé comme entraîneur, le club était en difficultés et le président a été obligé de le vendre en décembre. Et quand l’Américain (Gary Allen) a racheté le club, il a mis son équipe en place, et c’est tout naturellement que je suis parti. On a vu ce qu’ils ont fait derrière… Humainement, cela a tout de même été une bonne expérience. J’ai retrouvé des personnes que j’avais perdu de vue, malheureusement, sportivement non, cela n’a pas été une réussite.

La saison où tu as pris le moins de plaisir comme joueur ?
A Sochaux.

La saison où tu as pris le moins de plaisir comme entraîneur ?
L’année de Consolat (en 2021-22), en N3. Non pas que je ne me sentais pas bien, mais parce que le club a déposé le bilan en cours de saison. Le seul truc qui nous a tenus, c’est la Coupe de Provence, que l’on a remportée. C’est une fierté, parce que… Allez entraîner des joueurs qui ne sont plus payés depuis 6 mois, vous … ! Ils ont joué le jeu jusqu’au bout. Cette coupe de Provence, c’est tout ce qu’il reste aujourd’hui de ce club. En championnat, on jouait sans vraiment jouer, plutôt pour ne pas se blesser. On attendait que ça se passe mais on ne voulait pas être forfait général, par respect pour les autres équipes, comme l’AS Furiani, le club corse, qui était premier, et qui est monté en N2.

Avec l’AS Cannes. Photo Serge Haouzi.

Une erreur de casting dans ta carrière de joueur ?
Je n’ai pas de regret. Partout où je suis passé, ça m’a endurci et fait apprendre certaines choses. Quand je suis parti d’Istres pour passer pro à Lyon, en D2, on m’a dit « Mais pourquoi tu vas à Lyon ? », parce que là-bas, la première saison, j’étais remplaçant pendant un an, mais en fait, j’avais besoin de ça, j’avais besoin d’apprendre. Je venais du monde amateur à Istres, et pour moi, Lyon, je n’en ai tiré que des bonnes choses puisque ça m’a permis de faire une super saison après à Mulhouse. Je ne peux pas avoir de regrets. Ma carrière, ce n’est que du bonheur, même si cela n’a pas toujours été simple dans certains clubs, mais c’est comme ça, ça fait partie de la vie d’un joueur de foot.

Une erreur de casting comme entraîneur ?
Quand j’étais entraîneur de Marignane (en CFA, en 2013-2014), je n’aurais pas dû partir en fin de saison. J’étais arrivé mi-décembre pour jouer les pompiers, on s’était sauvé, mais ensuite, je suis retourné à Martigues où le président de l’époque (Vincent Caserta) ne me voulait absolument pas mais comme c’est le maire (Gaby Charroux) qui me l’a demandé… Il y a eu une forte pression pour que j’y retourne mais franchement… J’avais vécu de grands moments à Marignane.

Tu vas voir des matchs encore à Martigues en National ?
Jamais ! Je ne supporte plus ce club. Attention, je n’ai absolument rien contre Greg (Poirier, le coach de l’équipe de national), je parle du club, où des gens n’ont pas été honnêtes et se sont servis de moi … J’y suis quand même allé en coupe de France en décembre parce que j’avais des amis dans l’équipe d’en face, Alès. Sinon, non. Et puis j’ai un peu coupé aussi avec le foot pro. Déjà, je joue le dimanche, et le samedi, aller voir des matchs amateurs… non merci.

Un modèle d’attaquant ?
Quand je suis allé à Lyon, il y avait Jean-Pierre Orts : c’est lui mon idole. C’est une personne que j’aime beaucoup. On est toujours en contact. Il a effectué la majeure partie de sa carrière en Division 2 mais il aurait largement eu sa place en D1 car c’était un buteur hors pair et un personnage hors pair aussi.

Qui de vous deux a le plus marqué en D2 ?
C’est lui ! Moi, je sais que j’ai marqué 106 ou 107 buts en D2… (Jean-Pierre Orts a inscrit 182 buts en D2, c’est le recordman, et Franck Priou a inscrit 105 buts en D2).

Des modèles de coach ?
Je me suis inspiré des coachs que j’ai eus, j’ai pris un peu de tout le monde. De Luis (Fernandez), la convivialité, la grinta, l’envie, la façon de fédérer un groupe pour des missions de sauvetage; de Silvester Takac, lui, c’était la méthode allemande, avec beaucoup de discipline, de physique, j’ai pris aussi de Didier Notheaux, de Pierre Mankowski, de Robert Nouzaret, après, je n’invente rien, je refais ce que l’on m’a fait faire. Entraîner, ce n’est pas compliqué, ce qu’il faut, c’est fédérer, faire en sorte que les joueurs bataillent ensemble, qu’ils s’entendent bien sur le terrain pour faire les efforts ensemble, et ça, ça me procure des émotions, ça fait plaisir à voir.

Avec l’AS Cannes. Photo Serge Haouzi.

Ton club de coeur ?
Saint-Etienne ! J’avais 13 ans quand j’ai découvert les Verts à la télé ! Alors quand j’ai signé là-bas (en janvier 1995), j’ai réalisé mon rêve. Je me souviens m’être retrouvé dans les salons du club après un match avec les Curkovic, Piazza, Lopez, les frères Revelli, Sarramagna, et ils venaient me saluer en me disant « Monsieur Priou »… Mais de quoi « Monsieur Priou » ? « C’est vous, le Monsieur » ! Christian Lopez, c’était une idole pour moi. Il est adorable. Et de le voir, là… Malheureusement, je suis allé à Saint-Etienne au moment mauvais, c’était après l’histoire de la caisse noire, le club a dû dégraisser, et je suis parti en fin de saison.

Le joueur avec lequel tu avais le meilleur feeling sur le terrain ?
Je l’ai toujours dit, c’est Mickaël Madar, un garçon capable de marquer et de faire marquer, ce qui n’est pas mon cas, j’étais plus un buteur. Il avait une technique et un jeu de tête incroyables. On était complices sur et en dehors du terrain.

Le joueur le plus fort avec lequel tu as joué ?
Zidane.

Le défenseur que tu n’aimais pas affronter ?
C’est peut-être surprenant mais c’est Olivier Dall’Oglio ! Quand j’étais à Lyon, je l’ai affronté pour la première fois quand il jouait à Alès, il était latéral droit et moi je jouais côté gauche. J’avais des difficultés avec lui, je ne m’en sortais pas, il n’était pas grand mais vif, explosif, et ça me gênait, parce que moi, je préférais affronter les Prunier, Boli, parce que je savais qu’avec eux, on allait à la « guerre », ça « rentrait », c’était un rapport de force, et ça me plaisait, parce que je partais du principe que, pour me faire respecter, il fallait que je sois le premier à « rentrer dedans ». Dall’Oglio, lui, il me cassait les c… !

Le coach marquant ?
Luis (Fernandez).

Un coach que tu as perdu de vue et que tu aimerais bien revoir ?
J’ai revu Robert Nouzaret et je l’ai de temps en temps au téléphone, il a lancé ma carrière; Luis, je l’ai de temps en temps… Il n’y a que Takac dont je n’ai pas de nouvelles, c’est une bonne personne, un bon entraîneur, même si je ne garde pas un bon souvenir de mon passage à Sochaux. Mais ça faisait partie de mon apprentissage.

Le coach que tu n’as pas envie de revoir ?
Patrick Parizon. Je l’ai eu à Martigues.

Un président marquant ?
A Mulhouse, André Goerig, qui était proche de ses joueurs, et Francis Borelli à Cannes, un personnage hors du commun. Dans l’ensemble, je n’ai eu que des bons rapports avec les présidents, sauf à Martigues, quand j’étais entraîneur, où le président m’a dit, alors qu’on est monté en National (en 2011), « Si tu n’es pas content, tu pars », et c’est pour ça que je suis parti à Fréjus en National.

Le joueur le plus connu de ton répertoire ?
Micoud, Fernandez, Orts, Madar… Zidane ? Non, je n’ai pas son téléphone, mais je l’ai croisé à l’Atlético Marseille parce que, il y a deux ans, j’ai eu son neveu dans mon équipe, c’est un très bon joueur, et il venait de temps en temps au stade de La Martine. On s’est revu avec plaisir, on a vécu de bons moments à Cannes : à l’époque, on voyait qu’il était au dessus de tout le monde et il a cette humilité qui le caractérise bien, il est discret, il est resté le même.

Le joueur le plus fort que tu as entraîné ?
A l’échelle du National et du National 2, je dirais Driss Bouyarmani, un milieu de terrain que j’ai eu à Gap puis à Fréjus, il me fascinait, et aussi le défenseur Nordine Assami, un joueur formé à Strasbourg, mon poulain, qui m’a suivi partout ! Aujourd’hui, « Nono » est coach à Rousset en National 3.

Tu es un entraîneur plutôt…
Exigeant ! Mais je suis devenu plus cool parce qu’avec les nouvelles générations, il faut composer. Je suis cool mais exigeant, tu es obligé de l’être si tu veux des résultats.

Tu étais un joueur plutôt…
J’étais « casse-c… » sur le terrain avec mes partenaires et avec mes adversaires, parce que je voulais gagner. Comme disait souvent Luis (Fernandez), que j’estime beaucoup, je mettais la tête là où certains ne mettaient pas le pied ! Luis, c’est simple, on avait envie de se battre pour lui, et ça, ça n’existe plus aujourd’hui, car le foot est devenu égoïste. Un joueur qui va se mettre minable pour un entraîneur, ça ne se voit plus.

Ta philosophie de jeu ?
A Septèmes-Consolat, on joue en 3-5-2, avec deux latéraux qui vont assez vite, qui prennent les couloirs, deux attaquants, et deux relayeurs capables d’aller de l’avant.

Ton plus beau but ? Cannes-Nantes, un ciseau retourné (saison 1903-1994).

Le but en vidéo :

Le match de légende du foot français ?
Beaucoup disent que c’est le France-Brésil de 1986, d’ailleurs Luis (Fernandez) en parlait souvent, depuis il y a eu aussi la finale de la France en 1998 (3-0 contre le Brésil), mais moi, j’ai vraiment un match qui me vient en mémoire, c’est le Marseille – Milan de 1991, en demi-finale de la Ligue des Champions, deux ans avant la finale face au même Milan AC.

Le joueur de foot de légende ?
Chacun sa génération, mais pour moi, Maradona, c’était peut-être le plus fort, parce qu’en plus, il prenait beaucoup de coups, alors qu’aujourd’hui, les joueurs sont beaucoup plus protégés. Sur un terrain, il était phénoménal. J’ai beaucoup aimé le documentaire d’Emir Kusturika, ça m’a donné des frissons.

Avec l’AS Cannes. Photo Serge Haouzi.

Pourquoi n’as tu jamais entraîné plus haut qu’en National ?
Déjà, je n’ai pas passé les diplômes pour. Et aujourd’hui, le BEF ne suffit plus même en National, il faut le BEPF, et je n’ai jamais eu l’occasion de le passer, même si à un moment donné, quand j’étais à Fréjus, en National, il était question que je le passe si le club accédait en L2, mais vu que je ne suis resté là-bas que quelques mois… Et puis il aurait fallu que j’anticipe les choses car à 36 ans, à la fin de ma carrière de joueur, à Istres, en National, je suis devenu directeur sportif du club et je le suis resté pendant 10 ans, avec deux montées jusqu’en Ligue 1. J’aurais dû enchaîner après mon BEF pour me présenter au BEPF. Et après ça, à 44 ans, quand je pars entraîner en National 3 à Consolat (en 2007), il aurait fallu que je paye mon diplôme 30 ou 40 000 euros, mais si je paye pour m’entendre dire à la fin que je ne l’ai pas, je crois que je pète un plomb (rires), alors, ça ne s’est pas présenté, et après, c’était trop tard. Je suis resté dans le foot amateur, je savais que je pouvais entraîner jusqu’en National.

Avec l’AS Cannes. Photo Serge Haouzi.

Compte tenu de ton expérience, tu n’aurais pas aimé apporter quelque chose au monde pro ?
Je ne sais pas parce que quand j’étais joueur, je disais toujours « Je ne serai jamais entraîneur » ! Gérer 25 mecs, je crois que je péterais les plombs avec certains, j’aurais vrillé, je n’aurais pas été patient. Je n’étais pas parti pour faire entraîneur, c’est juste que j’ai eu un opportunité à 44 ans de le faire, à Consolat. Mais entraîneur, je ne l’ai pas préparé. Et en pro, je ne sais pas si j’en aurais été capable. Quelque part, c’était logique que je reste en amateur. J’ai commencé avec la réserve d’Istres pendant un an, et à Consolat, j’ai gagné du temps : quand je suis arrivé là-bas, il n’y avait que des caractériels dans le vestiaire mais les joueurs étaient intelligents et me respectaient, et on s’est sauvé. C’était la meilleure école possible pour moi. Il y avait déjà Jean-Luc Mingallon, le président emblématique de Marseille-Consolat.

Le milieu du foot ?
Ah… J’ai 60 ans aujourd’hui… Je ne m’y retrouve plus. Le foot a perdu ses valeurs mais je ne veux pas cracher dans la soupe car j’ai bien gagné ma vie sauf qu’aujourd’hui, c’est devenu indécent; je ne comprends pas pourquoi les clubs dépensent des milliards… L’argent tue le foot et le sport en général. Il n’y a plus de bénévoles non plus. Ils veulent tous quelque chose. Pour gagner ce que je j’ai gagné, il a fallu que je prouve pendant 5 ou 6 ans en pro avant pour mériter. Aujourd’hui, un club donne d’abord de l’argent à un jeune joueur avant que celui-ci n’ait prouvé quoi que ce soit, des salaires à 20 ou 30 000 euros par mois, où est-ce que tu as déjà vu ça ? Autre chose, il n’y a plus de respect non plus.

Texte : Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr – Twitter @BOYERANTHONY06

Photos : Serge Haouzi et Septèmes-Consolat

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