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Consultant pour beIN SPORTS depuis 10 ans, l’ancien avant-centre retrace en long et en large son riche parcours qui l’a amené là où il est aujourd’hui, au micro, commentateur reconnu de la Ligue 2 et expert attentif d’un championnat qu’il ne connaît que trop bien. Entretien (très) long format !

Sur le plateau de BeIN Sports, avec son compère Samuel Ollivier. Photo Philippe Le Brech.

Le jour où il a brûlé son jeans, son surnom de Goldorak, ses nombreux buts (près de 200), ses clubs encore plus nombreux, ou presque, comme aimait le taquiner Samuel Ollivier, ses montées en Ligue 1, son rôle de consultant et ses fous rires à l’antenne, ou encore sa rencontre avec Rai… Ah ça, il en a à raconter, Robert Malm, « Robbie », pour les intimes et les suiveurs assidus de la Ligue 2 sur beIN SPORTS.

Sans que le temps ne paraisse long, c’est au contraire le plaisir de raconter qui a ralenti les minutes, pendant près de deux heures (!), quand le natif de Dunkerque a balayé sa longue et riche carrière (plus de 500 matchs). 13heuresfoot vous propose cet entretien en deux temps, en miroir du parcours du goleador du Nord, de son après-carrière et son regard sur la deuxième division, à un « Tac au Tac » bondissant sur le joueur Robert Malm, à l’image de l’attaquant qu’il était sur le terrain !

Au centre, à Lens

Bon, Robert, on va commencer par une question cruciale : d’où vient ce surnom de Goldorak ?!
(Il explose de rire). C’est parce que je suis un fan depuis ma plus tendre enfance de Goldorak. J’ai passé un petit peu le virus à mes garçons.

Aujourd’hui, quasiment à 50 ans, je porte des t-shirts Goldorak, et on m’appelle comme ça. Depuis tout petit, je suis fan.

Si ça ne tenait qu’à moi, j’aurais plein de figurines, des nids à poussière, je suis un inconditionnel, je connais quasi tout par cœur. Quand j’arrive à la rédaction, on me dit ‘’tiens voilà Goldorak’’. On en rigole bien.

Le style Robert Malm, c’est aussi ce sourire jusqu’à l’antenne.
Je ne conçois pas une émission ou un match sans qu’on ne puisse sourire ou rigoler à un moment, mais bon, pas tout le temps, car il faut aussi être sérieux. Ça reste un jeu le football, et quand je prends du plaisir, et bien je rigole. Quand j’ai un fou-rire, je ne me retiens pas.

BeIN, c’est d’ailleurs et peut-être le choix le plus simple à lire dans votre longue carrière. Mais comment devient-on le consultant-phare Ligue 2 pour une chaîne ?
J’ai commencé avec Eurosport, où Christophe Jammot me prend pour la Coupe du Monde en Afrique du Sud. Moi, pendant ma carrière, j’ai voulu faire ça (pour l’après). Jean-Luc Arribart m’a donné envie de faire ça, avec d’autres, Christophe Josse qui commente mon premier but en Ligue 1, David Berger, Alexandre Ruiz, Jean-Charles Sabattier époque Canal… Quand j’étais joueur, on m’envoyait souvent faire les interviews, et j’étais curieux, j’ai discuté un peu, à droite à gauche, je disais « J’aimerais bien faire ça ».

« La Ligue 2 ? Quasiment une Ligue 1 bis ! »

Te souviens-tu du premier match que tu as commenté ?
C’était en Coupe du Monde, Algérie-Slovénie (2010). Avec Rémy Tissier à l’époque. Il me fait à un moment, « Mais t’as déjà commenté ? », et je lui ai répondu que non. C’est passé quoi, et on avait une quotidienne avec, justement, Jean-Luc Arribart, Total Coupe du Monde, tous les midis. Ce sont mes premiers pas dans le monde des médias. Et ensuite, j’ai arrêté, et Charles Biétry me dit d’être patient, qu’un projet se mettait en place, et qu’il allait me rappeler. Il m’a rappelé, et c’était beIN SPORTS. Le 31 janvier 2012, j’ai fait mes premiers pas sur beIN, et quasiment dix ans plus tard, j’y suis encore.

Sous le maillot du FC Lorient.

Quel est votre regard sur l’évolution de la Ligue 2, et sa médiatisation, après tout ce temps ?
La Ligue 2 a énormément évolué, on a quasiment une Ligue 1 bis. Je le dis, il y a des coaches qui l’ont dit, comme le coach Stéphane Moulin à Caen, et il n’a pas tort. Aujourd’hui, la Ligue 2 est plus qu’ouverte, plus que médiatisée, et avec beIN SPORTS, ça fait 10 ans qu’on la met en avant. On a tout ce qu’on a maintenant car la chaîne a décidé de la mettre éditorialement en avant. J’ai commencé avec Smaïl Bouabdellah, ensuite j’étais avec Samuel Ollivier. Avec Samuel, on a un peu dépoussiéré cette Ligue 2. On lui a donné de la gueule, on a lancé des rubriques, on a mis des caméras dans les vestiaires, des micros-cravates, on a fait des « inside ». On a rendu cette L2 populaire, avec Samuel Ollivier, François Rabiller, David Benarousse… Quand je dis populaire, c’est-à-dire qu’aujourd’hui tu allumes ta télé, tu te dis « punaise, j’espère qu’il va y avoir une caméra dans le vestiaire ou un micro-cravate », etc. Tu attends le samedi pour avoir les compos d’équipes avec les coaches, que ça parle de tactique. Le téléspectateur attend quelque chose. Pour te dire, Laurent Blanc et d’autres entraîneurs de Ligue 1 regardent la Ligue 2 et disent que c’est agréable d’avoir cette fraîcheur. Je me souviens même d’une fois où Ghislain Printant m’a dit que le match n’était pas terrible, mais qu’il était resté pour nous écouter. Dans le PAF, la Ligue 2 a sa place. Le match de 15h marque le vrai début du week-end foot. On propose des choses différentes, dans les vestiaires, c’est un contrat de confiance avec les clubs, ce sont des séquences que les gens aiment, l’échauffement, les derniers mots dits, l’avant-match. On a rendu le football moins sanctuarisé. Son taux de popularité est important en France maintenant, grâce aussi à des clubs comme Lens, et les gens ne comprendraient pas qu’elle ne soit pas diffusée. Les stades sont pleins, les partenaires sont là.

« Je veux faire passer des émotions, les retranscrire »

Comment on bosse, comment on évolue dans cette carrière-là ? Là aussi, comme en tant que joueur, il y a une évolution. C’est simple, si tu ne travailles pas un minimum tes matches, si tu ne travailles pas un minimum tes équipes, un minimum des choses qui ont l’air d’être simples, tu peux t’en sortir un certain moment, mais après tu butes. Pour moi, ce n’est pas du travail, c’est du plaisir, comme quand j’étais joueur. Je veux faire passer des émotions, les retranscrire. C’est pour ça que je tire un grand coup de chapeau aux mecs à la radio, car eux quand le match est mauvais, en plus ils n’ont pas les images.

On prend d’ailleurs autant de plaisir à commenter qu’à jouer ? Quel est le match où tu as pris le plus de plaisir ?
Le match qui nous reste en mémoire, et si tu poses la question à Samuel Ollivier, je connais sa réponse, on répondra la même chose, c’est Brest-Lorient, avec Jean-Marc Furlan et Mickaël Landreau à la tête des deux équipes. Brest gagne 3-2, on a eu un match, mais d’une intensité… On a tout eu cet après-midi-là. Une pelouse excellente, deux équipes qui ont joué au football, il faisait un temps magnifique à Brest, on a eu un scénario de match comme tu aimerais en avoir tout le temps, et puis des gestes techniques de fou, comme la roulette de Gaëtan Charbonnier pour un but de Gaëtan Belaud, pfff… Franchement, on s’est régalé. C’était un moment sublime. Mais il y en a eu plusieurs. Le barrage de Lens au Paris FC, la communion avec les supporters… C’est pour ça qu’on aime le foot.

« Samuel (Ollivier) ? Il va très bien  ! »

Sous le maillot du Stade Brestois.

Rien à voir, mais comment va Samuel Ollivier ?
Il va très bien ! Je l’ai eu au téléphone pas plus tard que tout à l’heure (entretien réalisé lundi soir) ! Notre duo a marqué une belle page de l’histoire de beIN, et aujourd’hui il a décidé de prendre un autre chemin, et je respecte tout à fait son choix. Il va très bien, il est heureux dans ce qu’il fait, c’est le principal !

Quel regard, toujours sur la Ligue 2, portes-tu sur cette « première partie » de saison ? L’œil de l’expert ! Equipes, joueurs, coups de cœur, déceptions…
Déjà, première partie de saison, non, je vais rectifier ! Il reste encore 5 matches avant la mi-saison, je crois. S’il y a un petit bilan à faire avec cette trêve Coupe du Monde… Il y a le collectif bordelais qui m’impressionne. J’avoue que je suis surpris. Une autre équipe qui me surprend, c’est Le Havre, avec sa constance. Est-ce que c’est enfin la bonne année pour les Havrais ? On verra en fin de saison. Après, en termes de déception, il y a d’abord Saint-Etienne. Malgré les points de pénalité, le contexte du début, aujourd’hui il faut reconnaître que c’est la grosse déception. Ensuite, ce n’est pas vraiment de la déception, mais il y a Caen et Guingamp, au vu de leurs débuts de saison, qui sont un peu rentrés dans le rang. Peut-être un petit peu Dijon aussi. Mais ça me fait mal au cœur pour Omar Daf. Il bosse, c’est un bosseur, mais il faut que les joueurs se réveillent, après un super début de saison. Ces équipes doivent se battre pour les premières places.

« Fier d’avoir donné de l’importance à la Ligue 2 »

Revenons à ce parcours de consultant. Quelle est ta plus grande fierté ?

Sous le maillot de l’AS Cannes.

C’est d’être encore là. Et surtout d’avoir donné de l’importance à la Ligue 2 dans le paysage du foot français, bon je n’étais pas tout seul, avec Smaïl puis Samuel. Tous les acteurs du foot la regardent aujourd’hui. Et ça, pour moi, c’est une fierté. On a un petit groupe WhatsApp avec certains joueurs Clermontois en L1, ils regardent la L2. Laurent Blanc qui dit qu’il regarde, Louis Nicollin, paix à son âme, disait qu’il préférait regarder certains matches en Ligue 2 plutôt que certaines purges en L1 ! Même Guy Stéphan ou Didier Deschamps nous regardent, tu ne peux pas savoir la fierté que c’est.

Juste avant de passer au Tac au Tac, pour faire la liaison, que pense le Robert Malm d’aujourd’hui de sa carrière de joueur ?
Là aussi, je suis fier de ma carrière, de ce que j’ai pu faire. Elle aurait pu être mieux, elle aurait pu être pire. Je suis heureux d’avoir pu vivre tout ça. Et j’ai eu la reconnaissance et le respect, même si j’ai fait la grosse partie de ma carrière en L2, de tous les footballeurs en France, de mes pairs. Quand Rolland Courbis vient te dire « J’ai encore vu ton nom dans les buteurs de L2 ce week-end », t’as un peu marqué les esprits. J’ai un petit regret de ne pas avoir joué une compétition européenne. Mais j’ai fait la Coupe du Monde avec le Togo, une compétition que j’ai failli ne pas jouer. Le ministre des Sports et le président de la fédération sont venus chez moi et m’ont dit « On ne part pas de chez vous tant qu’on n’a pas votre aval pour venir en sélection » ! Ca a créé quelques tensions, je ne voulais pas piquer la place d’autres, on avait eu une discussion avec Emmanuel Adebayor d’ailleurs. La Coupe du Monde n’a pas été facile, on était un petit pays, c’était un exploit d’être là déjà. Maintenant, le Togo doit grandir, être présent une CAN sur deux, se développer.

Robert Malm, du tac au tac

« Commenter la F1 ? J’y vais sur les mains si on me demande ! »

Sous le maillot du GF38.

Meilleur souvenir sportif ?
La toute première montée en D1 avec Lorient, en 1997-1998, la première du club. Il y a aussi celle avec Nîmes en Ligue 2 (2009). On était limite relégables, et on avait effectué une remontée, un final dont tout le monde rêvait. Ce sont deux moments forts, qui représentent beaucoup.

Pire souvenir sportif ?
La relégation avec Toulouse de Ligue 1 en Ligue 2. Ce n’est pas encore trop ça qui me fait mal, c’est l’intersaison, où un dirigeant, il se reconnaîtra, me dit que je n’ai pas le niveau pour jouer en Ligue 2… Alors que je sortais de la saison d’avant avec Lorient meilleur buteur, avec 16 buts. Me dire ça… Je préfèrerais effacer ça.

Ton plus beau but ?
Contre Fabien Barthez, avec le TFC contre Monaco justement. Il y a aussi celui qui entérine la montée en L2 avec Nîmes, face à Laval !

Le but le plus important de ta carrière, ce serait donc celui-ci ?
Il fait partie des buts qui ont compté, à un moment où le scénario était idéal. Mais il y en a eu d’autres, pour le maintien par exemple. Un vraiment important, c’était contre Amiens avec Grenoble. On gagne 1-0, je le marque à la 90e pour la victoire, on se maintient avec Dominique Cuperluy, l’entraîneur. Grenoble, c’est un passage de ma carrière que je n’oublierai jamais.

Ton plus beau loupé ?
Avec Nîmes, pour mon premier match, contre Vannes, et deux occases que je dois mettre tous les jours que je n’ai pas mises ! Mais j’ai fini par marquer.

Qualités et défauts sur un terrain, selon toi ?
Ma vitesse de course, un sens du but, et puis j’avais un bon jeu de tête même si je n’étais pas le plus grand. J’étais bon dans le combat aérien, ça surprenait les défenseurs. Mon principal défaut, c’était le jeu dos au but. Mais j’allais vite, je prenais bien la verticalité comme on dit !

Le club ou l’équipe où tu as pris le plus de plaisir ?!
J’ai pris du plaisir dans tous mes clubs. C’est le maître mot de ma carrière, aller au centre de formation, jouer contre d’autres équipes, dès chez les jeunes, il fallait que je m’amuse. Si je dois donner un petit bémol, sauf sur la fin avec Cannes (National), en 2010.

Cannes, c’est donc le club où tu n’aurais pas dû signer ? L’erreur de casting de ta carrière ?
Tu sens que tu arrives au bout, il y a certaines situations, tu sens que tu es désiré, mais pas par toutes les composantes du club. Je prends moins de plaisir. L’entraîneur ne me voulait pas forcément. Mais ce n’est pas une question de personnes, de sportif, je n’aurais pas dû signer.

Le club où tu as failli signer ?
Après ma saison de meilleur buteur en Ligue 2 avec Lorient, en 97-98, j’ai failli signer au PSG. Charles Biétry avait contacté mon agent. J’aurais dû signer, et à la place je vais à Toulouse. Ça restera un regret dans ma carrière, pour anticiper une autre question.

Le club où tu aurais rêvé de jouer, dans tes rêves les plus fous ?
Au PSG ! Lens, je l’ai réalisé en étant formé là-bas et en ayant joué à Bollaert. J’aurais aussi aimé joué en Allemagne, mon style aurait pu correspondre à ce championnat.

Un stade et un club mythique pour toi ? Un public qui t’a marqué ?
En Coupe du Monde contre la Suisse avec le Togo, on avait joué à Dortmund, un stade de 80 000 personnes, l’ambiance était fantastique. Après il y a d’autres stades, Bollaert, Les Costières, le Parc, où l’ambiance est incroyable.

Un coéquipier marquant ?
Je vais en citer deux, avec qui on formait un trio à Grenoble, Thierry Debès, l’actuel entraîneur des gardiens à Ajaccio, et Sergio Rojas. On est arrivés la même année, on est partis la même année. Je dois aussi citer Bernard Lama à Lens, et Stéphane Pédron. Stéphane Pédron dans le registre du passeur, et Sergio Rojas dans le jeu, ce sont les deux coéquipiers avec qui je me suis le mieux entendu sur le terrain, on se trouvait les yeux fermés.

Un coéquipier perdu de vue que tu aimerais revoir ?
Avec mes fonctions, j’ai de la chance, je revois du monde. Je dirais Sergio Rojas, qui est retourné en argentine. On échange sur les réseaux sociaux mais j’aimerais bien le revoir en vrai.

Le joueur adverse qui t’a le plus impressionné ?
Rai. Il a un tel charisme que je suis resté devant lui bouche bée. C’était en Coupe de France, il sortait du vestiaire, dans le couloir, je suis resté presque hypnotisé. Il y a aussi Marco Simone, qui était au-dessus.

Un président marquant ?
Il y en a eu plusieurs, mais Gervais Martel, le premier. Avec Louis Nicollin, un personnage, ce sont deux passionnés. Gervais Martel a contribué au joueur que j’ai pu être, il a fait des choses pour moi, je ne sais pas si les présidents actuels pourraient le faire. Je peux parler aussi de Jean-Louis Gazeau à Nîmes.

Une causerie de coach marquante ?

Son dernier club, comme joueur, à Cannes, en National.

Plus qu’une causerie, ce sont des mots lors de ma première avec les pros à Lens. Après un tournoi de jeunes où je finis meilleur buteur, où il y avait le Barça et où on bat le Dynamo Moscou en finale, je reçois une convocation chez les pros, et Arnaud Dos Santos me dit « Si je te fais débuter le match, comment tu le prends ? Je lui réponds que je veux prendre du plaisir. Je pars en stage, en mise au vert au centre de formation avant le match. Et lors de la causerie, il soulève la feuille, et je vois mon nom, alors qu’il n’avait pas beaucoup de remplaçants à l’époque, juste trois-quatre noms. Je revois encore Cyril Magnier qui se retourne vers moi, me fait un clin d’œil et me dit « bienvenue ». Voilà, ça c’est quelque chose qui m’a marqué.

Une consigne de coach jamais comprise ?
Au niveau pro, je n’en ai pas souvenir. Paix à son âme car il est décédé il n’y a pas longtemps, mais au centre de formation de Lens, une fois avant un match, Jean Dombrowski explique des trucs, et j’avoue que je n’ai rien compris je crois ce jour-là. Mais je me dis « fais ton match, marque, et on si je me fais engueuler je me fais engueuler ». Je marque et on gagne, Jean vient me voir, et il dit « Tu vois, t’as compris ce que je t’avais dit ! ».

Une anecdote de vestiaire jamais racontée, mais que tu vas raconter aujourd’hui !
(Rires, puis il réfléchit) … Il y en a beaucoup que je ne peux pas raconter et que les gens ne peuvent pas lire ! Mais à Montpellier, un jour je mets un jean craqué, aux deux cuisses. J’arrive dans le vestiaire et Bruno Carotti me chambre, « qui t’a accroché ? », comme Fred Mendy et les autres joueurs… Je ne l’ai plus jamais remis… Et je peux le dire aujourd’hui car il y a prescription, mais je l’ai brûlé ! Ils m’ont demandé plusieurs fois pourquoi je ne le mettais plus, mais ils n’ont jamais su que j’avais fait ça.

Un match de légende ?
France-RFA 82. Tu ne peux pas savoir, je vais être grossier, mais j’ai un putain de respect pour ces champions, Michel Platini, Alain Giresse… Pour d’autres aussi, Luis Fernandez, Omar Da Fonseca, Patrice Garande, Diego Maradona…

Quelles sont les passions de Robert Malm en dehors du foot ?
J’aime beaucoup le sport, j’ai commencé par le tennis. Mon autre grande passion, ce sont les voitures. Je suis un grand fan de Formule 1, je regarde les Grands Prix, et quand je dis je regarde, je regarde tout, les différentes qualifications, le GP, etc. Le souci de ma passion pour les voitures, c’est que ça coûte cher ! Si je n’avais pas été consultant, j’aurais aimé être éducateur pour les jeunes, comme je le suis au PSG pour les attaquants, ou j’aurais essayé de commenter la F1 avec Julien Fébreau ou Christophe Malbranque. J’aurais tout fait pour commenter avec eux, j’y vais demain sur les mains si on me demande !

Pour conclure ce Tac au Tac de Robert Malm joueur, peux-tu dire un mot ou deux sur les clubs dans lesquels tu as joué ?
– Lens (réserve et D1) : Lens, ça reste mon club. J’ai tout connu là-bas, la formation, les premiers pas professionnels, la Coupe Gambardella, j’ai commencé à découvrir le haut niveau.
– Fécamp (National) : C’est le moment de ma post-formation, avec Jacky Colinet, qui nous a quittés, c’étaient deux saisons extraordinaires.
– Saint-Brieuc (D2) : L’un des grands regrets de ma carrière, avec la liquidation judiciaire du club, alors qu’on avait un beau groupe.
– Lorient (D2) : Les rapports humains extraordinaires à tous les étages, avec Christian Gourcuff qui me fait venir. Et j’y suis revenu après mon passage à Valence !
– Toulouse (D1) : La découverte de la Ligue 1. Avec Alain Giresse, mais aussi une fin que j’aurais préféré éviter. Il y a un goût d’inachevé. Mais c’est comme ça, c’est la vie.
– Valence (D2) : J’y arrive après un départ un peu contraint et forcé du TFC. Mais je rencontre Bruno Metsu, un homme extraordinaire. J’aurais tellement voulu mieux faire pour lui.
– Gueugnon (D2) : C’est la relance. Georges Bernard (manager) me tend la main et me relance complètement, où j’ai le seul regret de n’avoir pas pu rester.
– Wasquehal (D2) : Je reviens dans ma région, dans le Nord, et ça s’est super bien passé. C’est une année où on obtient un maintien rapide, important pour l’histoire du club.
– Grenoble (D2) : Ce sont trois saisons où je vis des moments forts, le maintien avec Dominique Cuperly, mais aussi un départ amer quand même, et un transfert alors que j’aurais bien fini là-bas.
– Brest (D2) : Je rencontre des personnes extras. Philippe Goursat me fait venir, je rencontre Jacky Le Gall, pour deux saisons et d’excellents souvenirs.
– Montpellier (D2) : Le père Nicollin, ce personnage, me voulait depuis plusieurs saisons. J’ai tenu ma promesse de venir alors que plusieurs clubs me voulaient.
– Nîmes (D2) : Fantastique. Voilà. La montée est un souvenir qui restera à jamais gravé dans ma mémoire. On a fait quelque chose d’extraordinaire avec le groupe.
– Cannes (National) : C’était un projet très intéressant, mais peut-être que ça n’aurait pas dû se faire, non pas pour les personnes, car j’ai rencontré des gens extraordinaires.

Texte : Clément Maillard / Mail : contact@13heuresfoot.fr / Twitter @MaillardOZD

Photos : Philippe Le Brech et DR

 

A 33 ans, le Sénégalais, qui s’était révélé à Epinal avec ses deux « frères » Christophe Diedhiou et Cheikh Ndoye, est de retour à Créteil, où il a fait le choix du coeur et entend bien contribuer au retour de son club en National. Pour l’instant, c’est plutôt bien parti !

Maillon essentiel de l’US Créteil lors de son passage en Ligue 2 (2013-2015), Ibrahima Seck est ensuite parti voir si l’herbe était plus verte ailleurs. Une saison à Auxerre (2015-2016), puis six en Belgique (2016-2022) avec à la clé un titre de champion de Belgique avec le KRC Genk.

Sans club à l’entame des différents championnats nationaux, ce milieu défensif imposant (1,93m) a reposé ses valises à Créteil en National 2. Une surprise pour beaucoup de suiveurs et de supporters qui pensaient voir l’international sénégalais continuer en Ligue 2.

Pas loin de rejoindre son ami, son frère de toujours, Christopher Diedhiou du côté de Quevilly Rouen (L2), Ibrahima préféré raisonner à long terme et laisse parler son cœur. Important dans le jeu cristolien depuis son arrivée, il a été un heureux buteur samedi dernier lors de la victoire à Duvauchelle contre Colmar (4-1).

Leader de son groupe B après dix journées – mais avec un match de plus que Fleury et Belfort – l’US Créteil mène grand train et compte bien retrouver le troisième échelon du foot français, un an après l’avoir quitté. C’est en tout cas l’ambition de « Ibou », qui rêve de ramener les Béliers à la place qui est la leur, l’antichambre de la Ligue 1. Jeudi dernier, 48 heures avant de prendre le dessus sur les Colmariens, Ibrahima Seck a pris le temps de revenir sur son parcours et son arrivée quelque peu compliquée en France.

Formé au Sénégal, tu débarques à Épinal en CFA (National 2) d’abord avec un climat bien différent. Comment tu te retrouves là-bas ?
Déjà, on ne savait même pas situer Epinal sur la carte. C’est un endroit que les gens ne connaissent même pas au Sénégal. C’est grâce à Salif Diao que nous avons pu signer là-bas. Je dis « nous » car l’aventure a commencé à Epinal avec Christophe Diedhiou et Cheikh Ndoye. Et plus que sur le plan du jeu, c’est pour le climat que nous avons eu beaucoup de mal à nous acclimater. Nous sommes arrivés fin septembre à une époque où il fait 25°C ou 30°C au Sénégal. Et en cette année 2009, il faisait déjà froid à Epinal. Deux ou trois semaines plus tard, on voyait la neige sur la ville. Je pense que c’est le pire hiver que nous ayons eu tous les trois à vivre en Europe. Sur le plan du jeu, cela n’a pas été facile non plus car le foot africain est basé sur la spontanéité et l’instinct, pas sur la tactique. C’était notre plus gros problème. On a su le comprendre au fil du temps.

Trois saisons plus tard, et après une saison en National dans les Vosges, vous débarquez tous les trois à Créteil. Qu’est-ce qui t’a attiré dans le projet cristolien ?
C’est Samir Amirèche qui fait venir dans un premier temps Chris’ (Diedhiou) et Cheikh (Ndoye).

Le club visait la montée en Ligue 2 et se disait que nous pouvions être trois atouts pour jouer le haut de tableau.

J’étais en sélection olympique au JO de Londres avec le Sénégal (ndlr : défaite 4-2 ap contre le Mexique, futur vainqueur) et je suis arrivé après à Créteil. J’ai fait un mois d’entraînement en étant super bien accueilli par les joueurs, le staff et les dirigeants et j’ai décidé de rester car je trouvais le projet ambitieux.

Et puis ça me permettait de rester auprès des gars. Nous n’étions pas prêts à la séparation avec Chris’ et Cheikh.

Comme à Epinal, nous vivions tous les trois ensemble. On a vécu 6 ans en colocation.

« Avant de signer en Belgique, je ne connaissais pas le pays »

Avec Créteil, en 2013. Photo Philippe Le Brech

Après un titre de champion de National (2012-13), tu découvres la Ligue 2 avec Créteil. Quelles sont les principales différences que tu as noté entre ces deux championnats ?
Je n’ai pas été choqué par la différence de niveau. On commence bien le championnat, mais c’était dans la lignée de notre saison 2012-2013 exceptionnelle en National. Je pense que nous avions déjà une équipe prête et faite pour la Ligue 2. L’année du titre de National, les quelques matchs que nous perdons c’est parce que nous faisons n’importe quoi, pas parce que les autres sont meilleurs. Il y a eu certes quelques retouches dans l’effectif, mais en National notre niveau était déjà très bon et c’est ce qui explique notre entame en Ligue 2. On a ensuite un coup de moins bien, on est avant dernier je crois, mais on finit par se ressaisir pour se maintenir.

Tout n’est pas toujours rose, mais tu fais deux belles saisons avec l’US Créteil avant de partir pour Auxerre. Tu sentais que tu avais fais le tour de la question ?
Avec Chris’ et Cheikh, nous savions que nous allions chacun prendre des chemins différents, donc nous ne vivions plus tous les trois depuis quelques mois. J’avais fait le tour de la question à Créteil et en Ligue 2, mais la proposition d’Auxerre arrive pour signer une saison en Ligue 2, plus une autre en cas de montée en Ligue 1. Malheureusement, nous passons à côté de l’objectif et je décide de partir.

Le mois dernier, Ibrahima Seck a disputé son 100e match sous le maillot des Béliers de l’US Créteil. Visuel USCL

Tu pars alors en Belgique, un choix surprenant puisqu’avec ton gabarit, on aurait pu penser te voir partir en Angleterre.
J’avais des options pour jouer en Ligue 1 avant de partir en vacances à l’été 2016, mais il n’y avait rien de vraiment concret. Ça tardait à se finaliser en tout cas. Et alors que je suis au Sénégal, je reçois un appel pour me dire que Beveren est intéressé pour me faire signer. À l’invitation du président, je pars deux jours là-bas pour visiter le stade, les installations, écouter le projet du club. Je ne suis pas forcément dans l’optique de signer. Je ne connaissais pas le pays, ni le championnat. Mais ça ne me faisait pas peur. Quand tu quittes le Sénégal très jeune pour aller en France pendant 5 ou 6 ans, tu connais déjà la mentalité, le football européen. Finalement le président et l’entraîneur m’ont fait une proposition concrète, m’ont montré qu’ils voulaient vraiment que je signe. Et rapidement, je prends le brassard de capitaine.

Au cours de ces années, la saison 2018-2019 est peut-être la plus particulière puisque tu partages ton temps entre Genk et Zulte-Waregem que tu rejoins au mercato hivernal. On peut dire tu es à moitié champion de Belgique ?
Je suis même champion à 100% ! Cette saison-là, je me blesse pendant la préparation et l’équipe commence à tourner sans moi. C’est donc compliqué de bouleverser la hiérarchie. Pour autant, je suis toujours dans le groupe, j’ai du temps de jeu, mais je ne suis pas titulaire. Je décide donc de partir alors que nous sommes au-dessus et que nous allons être champions. Mais cela ne m’intéresse pas. Ce que je veux, c’est jouer tous les matchs. Mon choix de partir à Zulte-Waregem, qui joue le maintien, peut surprendre, mais c’est ma décision. Et en plus on se sauve très rapidement. Je ne regrette pas ce choix.

« Quand tu es à Créteil, c’est une chance ! »

Au vu de tes dernières saisons, revenir à Créteil, en National 2, a surpris suiveurs et supporters. Qu’est ce qui t’a décidé de revenir ?
À la base, ce n’était pas dans mes projets. Et si on m’avait dit que j’allais rejouer avec Créteil, j’aurais dis qu’il n’y avait pas 1% de chance. Je suis revenu en région parisienne parce que la famille est ici et je voulais juste m’entraîner avec un groupe.

J’ai demandé à venir et très vite j’ai trouvé l’effectif sympa avec des objectifs élevés. J’ai eu des propositions dans d’autres pays. Créteil est un endroit ou j’ai fait quelque chose déjà. Je me suis dis « pourquoi pas les aider à nouveau ». On ne sait jamais, ça peut se répéter avec un retour en National dans un premier temps.

Le club a beaucoup changé en 8 ans, il y a beaucoup de nouveaux qui ne connaissent pas forcément le club et son identité. À moi de faire au mieux pour aider les jeunes à comprendre la chance qu’ils ont. Parce que je pense que quand tu es à Créteil, c’est une chance. Je ne me vois pas comme un leader, mais plus comme un grand frère.

Aujourd’hui, vous êtes leader de la poule B. Qui sont les plus sérieux candidats pour vous disputer la montée en National ?
C’est un championnat homogène, difficile et beaucoup d’équipes peuvent prétendre à la montée. Il y a de très bons joueurs. C’est un niveau nettement au-dessus de la CFA que j’ai connu en 2009 avec Epinal. Cela s’explique par la qualité des effectifs avec beaucoup de joueurs qui ont déjà joué en Ligue 2 ou en National. Je ne connais pas trop les équipes de N2, mais sur ce que j’ai entendu, il faudra se méfier de Fleury ou Epinal. Ce sera incertain au moins jusqu’en mars tant que personne ne survole la poule.

Ibrahima Seck, du tac au tac

Avec Epinal. Photo Philippe Le Brech

Ton premier match de National ?
Avec Epinal à domicile en 2011/2012 avec Chris (Diedhiou) et Cheikh (Ndoye). On reçoit Colmar et on fait 0-0 à l’issue d’un premier match difficile.

Ton premier match de ligue 2 ?
À Nîmes aux Costières en 2013 et on gagne 3-2. Fané (Andriatsima) marque le premier but, Jean-Mi (Lesage) d’un coup franc lointain égalise pour nous et Marcel (Essombé) nous donne le but de la victoire. Et de mémoire, je crois que je n’ai jamais perdu à Nîmes. On a souvent affronté cette équipe et ça nous a souvent réussi de les jouer.

Ton premier but en pro ?
En Ligue 2, c’était contre Arles-Avignon à domicile. On fait 1-1 et j’ouvre le score. Sinon, le tout premier, c’était en Coupe de la Ligue à Lens dans un match dingue. On mène 3-1, puis 4-2 et on gagne finalement 4-3. Je marque le deuxième but au retour des vestiaires. C’est Jean-Mi (Lesage) qui ouvre le score et met le 4e et Marcel (Essombé) le 3e.

Ta plus grande émotion ?
La montée en Ligue 2 avec Créteil. Il y avait beaucoup de pression sur Chris (Diedhiou), Cheikh (Ndoye) et moi, car on entendait partout que le club avait pris les trois sénégalais pour monter. Donc c’était une grande fierté de répondre aux attentes des supporters et des dirigeants. C’était une saison incroyable car nous avons été sereins du début à la fin. Les matchs que nous avons perdu ce n’est pas parce que les autres étaient plus forts mais parce que nous n’étions pas dedans ou moins concernés ce jour-là. Quand on était mené à la mi-temps, dans le vestiaire nous savions que nous allions inverser la tendance et gagner.

Ta plus grande déception ?
La défaite à Bruxelles en finale de la Coupe de Belgique en 2018 avec Genk. On fait un match très solide contre le Standard de Liège et on finit par s’incliner 1-0 en prolongation. Je crois qu’ils marquent dès le début de la prolongation.

Le coéquipier le plus impressionnant ?
J’ai joué avec beaucoup de grands joueurs durant ma carrière. J’en ai deux ou trois en tête, mais si je dois en mettre un en avant, c’est Jean-Michel Lesage. Il était impressionnant et encore plus par rapport à son âge. Sa qualité de passe, de vision du jeu. C’était très fort.

L’adversaire le plus impressionnant ?
Là aussi c’est difficile de répondre, mais si je dois en citer un, je dirais Youri Tielemans. L’année avant d’aller à Monaco, il avait été impressionnant en Belgique. Tu sentais qu’il était au-dessus des autres.

L’entraîneur qui t’a le plus apporté ?
Philippe Clément aujourd’hui à Monaco. Je l’ai eu comme coach à Beveren et à Genk et il m’a permis de comprendre la mentalité belge. En arrivant, je ne connaissais pas le foot en Belgique. Le coach m’a expliqué la psychologie des arbitres et la manière dont je devais aborder les discussions en match. Ce n’est pas comme en France ou ailleurs, c’est assez particulier.

Texte : Julien Leduc / Mail : jleduc@13heuresfoot.fr / Twitter : @JulienLeduc37

Photos : US Créteil

Enfant de la ville et du club où il a joué pendant 13 ans, de la DH au CFA (R1 au N2), Rachid Youcef (42 ans) est l’entraîneur d’Aubervilliers (National 3) depuis 2014. Après avoir éliminé Quevilly Rouen (L2), il affronte le club réunionnais du Tampon dimanche au 8e tour de la Coupe de France. Rencontre.

Photo Philippe Le Brech

Depuis lundi matin, le club d’Aubervilliers (National 3) est à la Réunion où il affrontera la Tamponnaise dimanche au 8e tour de la Coupe de France.

Longtemps en National 2 (2010 à 2016) et même en National (1993 à 1997), ce club de la Seine-Saint-Denis a toujours fait partie des places fortes du football francilien depuis les années 80.

La ville est une terre de passion, le stade Karman un petit chaudron prêt à vibrer comme on l’a vu lors de l’élimination de Quevilly Rouen Métropole au 7e tour de la Coupe de France (1-1, 4-1 Tab).

Contrairement à d’autres clubs, Auber mise sur la stabilité en interne autour de la famille Belkebla, Karim, Youssef et Kamel. Le comique Booder est là, presque à tous les matchs, selon son planning. Il est très proche de Rachid Youcef, 42 ans, ancien joueur de l’équipe et entraîneur depuis 2014. Une longévité rare. Interview découverte

Treize ans en équipe première d’Aubervilliers, entraîneur depuis 2014… Votre nom est étroitement attaché au club et à la ville. Comment expliquez-vous une telle fidélité ?
Déjà, Aubervilliers, c’est ma ville de résidence. J’y suis très attaché. J’ai joué en jeunes à l’Esperance Paris 19e et au Paris FC puis à l’ES Colombienne en seniors. Mais je suis revenu à Aubervilliers. J’ai trouvé au club des valeurs qui me correspondaient : la loyauté, la solidarité, la fidélité et une ambiance familiale. C’est aussi un club dirigé par des footballeurs à tous les postes. Cela devient de plus en plus rare. Karim (Belkebla), notre manager a joué à « Auber » puis a longtemps été l’entraîneur; Youssef, le directeur administratif, pareil. Toufik (Belkhous), le président délégué aux jeunes est aussi un ancien joueur. Moi, j’entraîne l’équipe première avec des adjoints qui ont aussi joué à « Auber » : Kamel Belkebla et Ousmane Sidibé. Il y aussi Nassim Dulorme chez les jeunes et Farid Messani avec la réserve. Ici, il y a une politique de promotion interne. On joue et on devient éducateur. On peut se projeter. Bientôt ce sera le tour de Nouha Camara, notre capitaine en National 3. Il habite à Aubervilliers, il travaille pour la ville. La suite logique, c’est qu’il prenne des responsabilités au club quand il arrêtera de jouer.

Quand avez-vous décidé de devenir entraîneur ?
C’est Youssef Belkebla qui est venu me voir un jour quand j’avais 25-26 ans. Il avait décelé chez moi le profil pour devenir entraineur. Moi j’étais à un âge où je pensais encore à jouer, où j’avais encore des ambitions. Mais Youssef avait un coup d’avance. Il m’a dit : « investis toi avec les jeunes, passes des diplômes. » J’ai continué à jouer et quand Abdel (Mourine) a décidé d’arrêter, le club m’a dit que j’allais lui succéder. J’étais encore joueur donc la dernière année, je suis resté à ma place. Je suis resté loyal avec Abdel. C’est ce que j’évoquais. Au club, il y a toujours eu une grande loyauté entre nous. Aubervilliers, c’est une vraie famille.

Vous avez d’ailleurs longtemps joué avec votre frère Aissa…
C’est une chance magnifique de pouvoir jouer avec son frère. Les liens du sang font que sur le terrain, tu te trouves plus facilement. C’est difficile à expliquer. Mais tous les deux, on pouvait jouer les yeux fermés. Souvent, j’étais à la passe et lui à la finition. Je lui en ai fait des diagonales (sourire)… Aissa a le sens du but. Il attirait l’œil.

« Je n’ai jamais cherché à savoir si l’herbe était plus verte ailleurs »

Photo Philippe Le Brech

Contrairement à vous, il a tenté de quitter Aubervilliers pour jouer plus haut ?
Oui, en 2006, on était en DH (ex-R1) avec « Auber » et il est parti à Levallois alors en CFA (ex-N2) qui était entrainé par Pierre Mbappé (l’oncle de Kylian). Le premier match de la saison, c’était à Vesoul. On était parti là-bas le voir jouer avec Toufik (Belkous). Premier match en CFA et premier but ! On était vraiment content pour lui. Mais il n’est resté que trois mois à Levallois. Il est revenu avec nous en DH à Aubervilliers. L’ambiance lui manquait. C’est là qu’on voit que ce club est unique. Moi aussi j’avais eu des possibilités, à Noisy-le-Sec et UJ Alfortville en National. J’aurais pu ne faire que du foot alors qu’à l’époque, je bossais comme surveillant. Mais atteindre ces niveaux, le National, le CFA, je voulais y arriver avec mon club. On a longtemps galéré en DH mais on a fini par monter en CFA2 (2009), où on avait une équipe extraordinaire avec Stéphane Boulila, Steve Marlet, puis tout de suite en CFA (2010). Moi, j’étais tellement bien ici que je n’ai jamais cherché à aller voir si l’herbe était plus verte ailleurs.

Vous souvenez-vous comment un journaliste du Parisien vous avait surnommé à l’époque ?
Bien sûr (sourire) ! Le Roberto Carlos de la DH ! J’ai aussi eu droit plus tard au Juninho du CFA. Tout a commencé lors d’un match de DH contre la réserve du Paris FC, entraînée par Nordine Kourichi. J’étais remplaçant, on est mené 1-0, je rentre et je mets un coup-franc en lucarne. J’avais un bon pied gauche et j’exploitais cette qualité sur les coups de pied arrêtés. Certaines saisons, j’en ai mis 6 ou 7. Cela m’a permis d’être connu et reconnu dans la région parisienne. J’avais ma petite réputation. Ce qui fait plaisir, c’est d’avoir laissé une trace dans la mémoire des gens. Quand je croise certains entraineurs, comme Robert Mendy ou Philippe Lemaître, ils m’en reparlent encore.

Robert Mendy n’a en effet pas dû oublier le match Aubervilliers – Mantes de la dernière journée de CFA le 28 mai 2011…
Mantes, c’était des potes. Mais nous, on s’était écroulé en fin de saison. Ce match, c’était comme une finale de maintien. Le perdant risquait de descendre. On gagne 2-1 et je marque un doublé, deux coups-francs… On s’est maintenu. Un grand souvenir.

« A Auber, on laisse le temps aux entraîneurs d’apprendre. On leur fait confiance »

A 33 ans, vous avez donc arrêté de jouer pour entraîner l’équipe ?
J’avais zéro expérience, pas encore les diplômes mais on m’a confié une équipe de CFA pour succéder à Abdel (Mourine) qui lui aussi avait arrêté tôt sa carrière de joueur en 2005 pour devenir entraîneur de l’équipe. Il est resté 9 ans. Moi aussi, c’est ma 9e saison à ce poste. A Aubervilliers, on laisse le temps aux entraîneurs d’apprendre, de progresser et on leur fait confiance sur la durée. C’est rare quand on voit ce qui se passe ailleurs. Mais ça aussi, ça symbolise bien l’esprit d’Auber. Enfant du club, habitant de la ville et maintenant entraîneur… Je suis peut-être un modèle de réussite. Mais c’est grâce au club. Peu de clubs ont cette politique. Je savais que j’étais attendu au tournant, que je pouvais être critiqué ou que certains pensaient qu’on m’avait mis à ce poste par copinage. Mais tout ça ne me faisait pas peur.

Lors de votre deuxième saison comme entraîneur, le club est relégué en CFA 2 en 2015-2016 . Comment l’avez-vous vécu ?
Ça a été très dur à vivre sur le coup. Heureusement que mes dirigeants m’ont aidé à me relever. Karim (Belkebla) connaît tous les rouages. Il a toujours été d’une aide précieuse pour moi. J’ai bien conscience que si c’était un autre club qu’Auber, j’aurais eu de grandes chances de sauter. Mais ici, on m’a accompagné, soutenu et accordé une deuxième chance. Je le répète : « Auber », c’est une grande famille. Je serai toujours reconnaissant envers mes dirigeants. Avec le recul, cette saison de folie a été finalement enrichissante.

Vous avez aussi mis du temps à obtenir vos diplômes. Que s’est-il passé ?
C’est la grande hypocrisie des diplômes… Oui, j’ai perdu beaucoup de temps, plus de 4 ans. On m’a mis des bâtons dans les roues. Le club a dû prendre des prête-noms, je n’avais plus le droit de m’exprimer officiellement dans la presse sinon on risquait des amendes. C’était compliqué. Mais une fois de plus, j’ai été soutenu et accompagné par mon club. Quand j’ai enfin eu mon DES en 2020, ça a été un soulagement. Bien sûr, depuis 2014, j’ai beaucoup progressé. Je me sens plus serein.

« Après un match, j’ai du mal à dormir »

Avec le staff, Kamel Belkebla et Ousmane Sidibé. Photo Philippe Le Brech.

A vos débuts, vous avez souvent été épinglé par les arbitres…
J’ai été beaucoup sanctionné en effet. Le problème, c’est qu’il y a souvent un peu de folklore… Certains viennent ou arbitrent Aubervilliers avec des à-priori. Mais bon, avec le temps, j’ai appris à prendre du recul. Je gère mieux mes émotions. Mon approche avec les arbitres et les adversaires est différente. Quand on engrange de l’expérience, on gagne en sérénité. Maintenant, je prends moins les choses à coeur. Mais la défaite reste toujours aussi compliquée à accepter. Après un match, j’ai du mal à dormir.

Est-ce facile d’entraîner chez soi ?
Aubervilliers est une vraie ville de foot. Et en ayant vécu ici aussi longtemps, on a beaucoup de potes, de voisins… Tout le monde a son avis sur le match du week-end, la composition. Tu es obligé de te mettre une pression intérieure, d’élever ton niveau d’exigence. Il faut être encore plus exemplaire. Tu sais que tu n’as pas le droit à l’erreur, encore moins qu’un autre. Selon moi, c’est plus dur de durer dans un club où on est installé que si on est de passage. Chaque saison il faut prouver, se remettre en question pour prouver que si tu es à ce poste-là, ce n’est pas seulement parce que tu es un enfant du club et de la ville. On dure aussi parce qu’on a certaines compétences et une envie d’être toujours compétitif.

« Je suis content de voir un Kapit Djoco briller en National »

Depuis lundi, les joueurs et le staff sont à Aubervilliers où ils affronteront dimanche la Tamponnaise au 8e tour de la coupe de France. Photo DR

C’est votre 7e saison en National 3 sans parvenir à remonter. Le temps ne vous paraît pas long ?
On n’a jamais été très loin. J’espère que cette saison, où j’ai un bon mélange d’anciens qui ont connu le niveau supérieur (Kerboriou, Nomenjanahary, Etshimi), d’anciens du club et de bons jeunes, sera enfin la bonne. J’ai un bon groupe. Après, par rapport à nos premières années en CFA, on a des moyens beaucoup plus réduits. On doit souvent faire des paris. Je suis content de voir aujourd’hui un Kapit Djoco briller en National. Quand je l’ai récupéré à Aubervilliers, il pesait 90 kg, il avait arrêté le foot et était dégouté. Il avait la tête ailleurs. Mais il avait besoin d’un environnement familial comme Auber pour se remettre sur pied. J’ai aussi l’exemple de Hakim Naïm, qu’on vient de rencontrer à Montrouge. Chez nous, il a marqué beaucoup de buts mais il n’a jamais plus retrouvé la même efficacité dans les autres clubs où il est ensuite passé. A Auber, on sait y faire pour donner de la confiance aux joueurs. C’est pour ça que beaucoup de joueurs reviennent chez nous.

Le 29 octobre dernier, Aubervilliers a réussi un exploit en éliminant QRM (L2) au 7e tour de la Coupe de France…
Par le passé, Auber a souvent joué contre des équipes pros en Coupe, Montpellier, Lille, Le Mans, le PSG… Mais c’est la première fois qu’on arrive à passer contre un club pro. Le noyau dur de l’équipe est originaire de la ville, ça amène encore plus d’engouement. Contre Quevilly Rouen, il y avait beaucoup d’anciens qui sont revenus. C’était beau de voir qu’on a réussi à les rendre fier. Tout était réuni, l’organisation chez nous, le scénario du match, l’émotion de la qualification : ça donne envie de revivre de tels moments. On sent que la ville est prête à bouillir. Je sais que beaucoup de gens aimeraient nous voir retrouver le National 2 pour avoir d’autres affiches.

Comment se présente ce match dimanche à La Tamponnaise à la Réunion ?
On a réussi à gagner samedi chez la réserve du Paris FC (4-3) après avoir été menés trois fois au score ! C’était un match que je craignais juste avant le voyage à la Réunion. Ils ont su mettre le dernier coup de collier à la fin pour arracher une victoire méritée à mon goût. Je vais enfin pouvoir me consacrer à 100% à ce match de coupe face à la Tamponnaise. On sent l’engouement des Réunionnais pour ce match, ça les intéresse vraiment. Ils se disent qu’on est une équipe de N3 donc ils sont en confiance. J’ai déjà prévenu les joueurs. On ne part pas au club Med et moi je ne suis pas un moniteur de colo : il va falloir avoir un minimum de discipline. Ça sera un match difficile. Mais il peut nous ouvrir les portes d’une belle affiche en 32e de finale.

Rachid Youcef, du tac au tac – Le joueur

Lors de la saison 2004-2005 avec Auber ! Le reconnaissez-vous ? Photo Philippe Le Brech

Première fois dans un stade ?
A 8 ans, je prends ma première licence à L’Espérance Paris 19e. Donc le Stade Ladoumègue, Paris 19e.

Meilleur souvenir de joueur ?
Le maintien en CFA à la dernière journée, Auber-Mantes. On gagne 2-1, je marque 2 coups francs.

Pire souvenir de joueur ?
Le 32e de finale de coupe de France PSG – Auber au Parc des Princes (10 janvier 2010). On perd 5-0 et je sors à la 25e…

Le geste technique préféré ?
Le coup franc direct bien sûr.

Qualités et défauts sur un terrain ?
Compétiteur mais irrégulier dans mes performances

Saison 2010-2011. Photo Philippe Le Brech

Le plus beau but ?
Paris FC – Auber en DH à l’époque. Je rentre à la 90e je mets un coup franc de 30 mètres pleine lucarne à la 93e minute qui nous donne la victoire.

Le joueur le plus fort affronté ?
Christophe Jallet.

Le joueur le plus fort avec qui vous avez joué ?
Stéphane Boulila et Steve Marlet.

L’ entraîneur qui vous a marqué ?
Armand Bouzaglou a la Colombienne, bon pédagogue et gaucher comme moi.

Un joueur préféré ?
Diego Maradona

Un stade mythique ?
Stade du 5 juillet à Alger

Rachid Youcef – L’entraîneur

Meilleur souvenir ?
La victoire contre Quevilly Rouen devant notre public il y a trois semaines.

Pire souvenir ?
La descente en N3 en 2015.

Le meilleur joueur entraîné ?
Kapit Djoco et Lalaina Nomenjanahary

Un modèle d’entraîneur ?
Zidane et Klopp.

Votre style de jeu préférentiel ?
Transition offensive rapide.

Activités pratiquées en dehors du foot ?
Encore du foot… (sourires).

Textes : Laurent Pruneta / Mail : lpruneta@13heuresfoot.fr / Twitter : @PrunetaLaurent

Photos de couverture : Philippe Le Brech

Photos : Philippe Le Brech

En immersion avec les supporters du Red Star, dans un stade mythique et en chantier ! Une expérience unique en National, que nous avons vécue en « live » lors de la venue de Dunkerque. Récit.

On ne va pas à un match du Red Star comme si on allait faire ses courses au supermarché du coin.

On ne va pas à Bauer comme si on allait boire un café sur les Champs Elysées à Paris ou sur le cours Saleya à Nice.

On ne va pas non plus supporter l’Etoile Rouge comme on irait supporter Paris FC, Créteil, Versailles ou Paris 13 Atletico.

On ne va pas voir l’équipe de Habib Beye, entraîneur la semaine et consultant le week-end, comme si elle jouait vraiment en National. Elle joue en National, vraiment ? En tout cas, dans les tribunes, côté supporters, ça joue niveau Ligue 2 voire Ligue 1.

A Bauer, plus de souci pendant deux heures !

Au fond, la fameuse « Planète Z », du nom du HLM qui surplombe Bauer.

Bauer, on y va pour le spectacle. Pour vivre le match. Pour une expérience unique et inoubliable. Ne riez pas, c’est vrai ! Car quand vous êtes au milieu des supporters, debout, pendant 90 minutes, comme nous lundi dernier contre Dunkerque, ça marque. C’est comme dans la chanson des années 80, « Vacances, j’oublie tout », sauf que là, c’est « Red Star, j’oublie tout » ! Plus de souci pendant deux heures, on est à Bauer, et nulle part ailleurs !

A Bauer, on y va comme on va au cinéma pour un film à grand spectacle, ou comme on va à un concert d’un grand groupe de rock. Pour admirer une oeuvre artistique et créative, un peu comme les photos flashys, décalées et innovantes signées du « Red Star Lab » au travers de son projet original, fou et moderne, qui inonde ses réseaux sociaux.

Sauf qu’à Bauer, rien n’est virtuel. On est dans la réalité vraie. Bauer, c’est la vie ! Non mais quelle ambiance ! Non mais quel pied ! Non mais quel stade !

Tout le monde debout !

Pourtant, depuis mon dernier passage en 2019 (Red Star – Le Puy, en National déjà !), beaucoup de choses ont changé dans cette enceinte des plus vétustes mais qui ne vieillit pas. Beaucoup de choses ont changé, sauf un truc : les supporters.

Se fondre au milieu d’eux nécessite un peu d’exercice : l’historique tribune Ouest, vieille de 113 ans (elle date de la construction du stade, en 1909) n’offre aucun confort. Dans l’espace réservé aux supporters, il n’y a pas de siège, tout le monde est debout, c’est une volonté ! Peu importe, ses murs en brique, son toit en tôle et sa charpente en métal lui confèrent un charme fou, une odeur particulière et un aspect unique.

A Bauer, ça résonne, c’est sombre, c’est rustique, ça ne sent pas très bon. Forcément, il y a des drapeaux, des fumigènes, de la bière et des chants. Beaucoup de bières et beaucoup de chants. Et si par bonheur, l’équipe marque un but sur sa nouvelle pelouse hybride, il suffit de lever les yeux au ciel et d’ouvrir la bouche pour avaler gratos les litres de bières que la foule en liesse s’est amusée à balancer devant, derrière, à gauche, à droite. En guise de célébration.

Un conseil : si vous n’aimez pas la bière, du moins, si vous n’aimez pas en recevoir sur la tête et sur les vêtements, choisissez le dernier rang, c’est à dire le premier lorsque vous arrivez dans la tribune, tout en haut !

Un autre conseil, choisissez un match de merde, sans but : aucun risque d’être aspergé. Manque de bol, Red Star – Dunkerque, l’affiche vedette de cette 11e journée de championnat National, a accouché de 6 buts, dont 4 pour les joueurs de l’Etoile Rouge. Garçons, vous reprendrez bien une tournée !

« C’est la fierté de nos couleurs »

Le nombre de litres de bière déversés est inversement proportionnel au nombre de quolibets habituellement entendus dans un stade : mais là, le public sait se tenir. Dire que l’on n’a quasiment pas entendu un seul nom d’oiseau voler est la stricte vérité.

A Bauer, les supporters encouragent leur équipe, chantent tous les tubes de leur répertoire, dont les fameux « C’est la fierté de nos couleurs » et « Il n’y a que Bauer », qui sont un peu ce que « Bohemian Rhapsody » et « We are the champions » sont au groupe Queen.

Un jour, Wilfrid, l’un des supporters emblématiques du Red Star, a eu cette phrase mythique pour son équipe : « Quand vous marquez un but, on chante, et quand vous encaissez un but, on chante encore plus fort ». Difficile de mieux résumer le comportement de ce millier de fans qui a fait de cette tribune, de sa tribune, un lieu respectueux, cosmopolite, tolérant et antiraciste, où tous les gens et tous les genres se mélangent, sans discrimination sociale ni raciale donc. Une tribune libre, en quelque sorte, que l’on s’est même parfois amusé à trouver un brin … bobo ! Y aurait-il une nouvelle population de supporters à Bauer ? A l’évidence, oui.

« Le football, c’est le week-end ! »

Ces valeurs de tolérance, de respect, ce sont celles que prônaient Rino Della Negra, ancien joueur du Red Star en 1942-43, résistant pendant la Seconde guerre, condamné à mort puis fusillé au fort du Mont-Valérien, le 21 février 1944.

C’est ce même Rino Della Negra qui a donné son nom à la tribune où sont parqués les « Ultras », ou plutôt les « fans » du Red Star, regroupés au sein du « Collectif Red Star Bauer ». Une tribune animée par Vincent, le président du Collectif, et où tout le monde connaît les paroles par coeur. Effectivement, la phrase de Wilfrid se vérifie : à 1-0 et 2-1 pour Dunkerque, la tribune ne s’est jamais arrêtée d’encourager, de chanter, de sauter, d’applaudir, de pousser, de donner ce supplément d’âme au deuxième plus ancien club de l’Hexagone, fondé en 1897 par Jules Rimet, l’homme qui a créé la Coupe du monde.

De là à dire que le spectacle était dans les tribunes, ce serait très osé, surtout après un match remporté 4 à 2 qui fut des plus plaisants et qui a servi la promotion du championnat National, quand bien même il fut disputé un lundi soir à 21h, diffusion télé sur Canal + sport oblige. C’est, du reste, l’une des revendications du « Collectif Red Star Bauer » qui a encore fait passer son message – « Le football, c’est le week-end » – et réclamé au passage la démission de Patrice Haddad, toujours président même si, en mai dernier, celui-ci a vendu le club au fonds d’investissement 777 Partners, déjà propriétaire du Genoa et du Standard de Liège.

Et comme pour mieux montrer sa désapprobation quant à la programmation TV, un supporter habillé en tortue ninja n’a eu de cesse de perturber la retransmission en pointant la caméra centrale à l’aide d’un laser vert ! Ce qui a eu le don d’irriter le duo de commentateurs.

La révolution est en marche !

Voilà à quoi ressemblera le stade Bauer en 2024. Photo DR

Dans ce stade Bauer unique de par son emplacement, en plein centre ville de Saint-Ouen, en Seine-Saint-Denis, la magie a une fois encore opéré. Mais il faut bien l’avouer, on a été décontenancé par l’immense chantier et les travaux de démolition de la « grande » tribune tribune Nord, derrière les cages, côté rue du Docteur Bauer. Celle-là même qui abritait un véritable musée, avec ses murs étroits et ses photos d’époque jaunies, ses bureaux où trônaient les trophées sur les étagères et les aussi les vestiaires. Celle-là même qui sera remplacée par la future tribune Rino Della Negra.

En face de la tribune Ouest, c’est le grand chantier aussi : la tribune Sud, fermée de longue date, n’existe plus et a laissé place, là encore, à un vaste amas de gravats. Idem au pied de Planète Z, ovni architectural posé derrière les buts, célèbre pour sa forme pyramidale, indissociable du décor et véritable carte postale du site.

Là encore, au pied du HLM, les pelleteuses ont fait leur oeuvre. La rénovation, engagée par le promoteur « Réalités », qui a racheté le stade à la commune, a commencé. La révolution est en marche ! Bauer pourra accueillir 9 700 personnes dans un stade flambant neuf à l’horizon 2024. Ce projet sera accompagné de la construction, d’ici 2026, d’une « Bauer Box », immense projet immobilier de huit étages et 30 000 m2 accolé au stade, avec des restaurants et commerces, un rooftop, des espaces de coliving, des bureaux, une école, des activités de loisirs et des bâtiments végétalisés. Coût total de l’opération : 250 millions d’Euros, dont 45 rien que pour le stade.

A Bauer, on ne fait pas les choses comme ailleurs. Il est 21h30. Le Red Star s’est imposé 4 à 2 face au dauphin du leader, Dunkerque. Les lumières s’éteignent. Les joueurs viennent communier devant le kop. Dans le noir.

A Bauer, les équipes passent, le stade évolue mais l’âme demeure.

Texte : Anthony BOYER / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06

Photos : AB

Vous avez loupé un épisode de la série « 13heuresfoot » cette semaine ? Voici la séance de rattrapage !

  • Samedi 12 novembre 2022

Quiz National : remportez un maillot de votre choix !
https://13heuresfoot.fr/actualites/quiz-national-remportez-un-maillot-de-votre-choix/
Répondez aux 20 questions du quiz et tenter de remporter un maillot de votre choix ! Mais pour cela, vous devrez vous montrer incollable sur le championnat National !

  • Vendredi 11 novembre 2022

Patrick Bel Abbes (District des Alpes) : « Ce qui m’intéresse, c’est le dialogue ! »
https://13heuresfoot.fr/actualites/patrick-bel-abbes/
A la tête du District qui regroupe les Alpes-de-Haute-Provence et les Hautes-Alpes, le président entend répondre aux nombreuses problématiques des clubs dans une région où les spécificités sont multiples.

  • Jeudi 10 novembre 2022

Yann Kerboriou : « Le National 3, c’est 5 % de plaisir et 95 % de combat ! »
https://13heuresfoot.fr/actualites/yann-kerboriou-le-national-3-cest-5-de-plaisir-et-95-de-combat/
L’ex-gardien de Créteil en Ligue 2 et en National est retourné à Aubervilliers, en N3, où son club a signé un exploit retentissant au 7e tour de la coupe de France en éliminant QRM, un club de Ligue 2. Une performance qui a rappelé la saison 2009-2010, lorsque le club du 9-3 avait affronté le PSG au Parc des Princes en 32es !

  • Mercredi 9 novembre 2022

Adama Camara, profession buteur et pronostiqueur !
https://13heuresfoot.fr/actualites/adama-camara-profession-buteur-et-pronostiqueur/
L’attaquant passé par Calais, Beauvais, Saint-Quentin, Dunkerque ou encore Chasselay, de retour à Creil (R3) depuis la saison passée, a lancé « MaraPronostic », son entreprise de paris sportifs en ligne. Et ça marche !

  • Mardi 8 novembre 2022

Valentin Lavigne (Fleury) : « Je prends autant de plaisir en N2 qu’en L1 ! »
https://13heuresfoot.fr/actualites/valentin-lavigne-fleury-je-prends-autant-de-plaisir-en-n2-quen-en-l1/
De la Ligue 1 avec Lorient au National 2 avec Fleury en passant par la L2 et le National, Valentin Lavigne (28 ans) a tout connu. Ses blessures auraient pu le pousser à stopper sa carrière. Mais l’attaquant a continué par « passion du foot ». Entretien riche avec un homme épanoui et un joueur accompli.

  • Lundi 7 novembre 2022

Julien Cordonnier (Châteauroux) : « Le National, c’est le championnat de l’humilité »
https://13heuresfoot.fr/actualites/julien-cordonnier-chateauroux-le-national-cest-le-championnat-de-lhumilite/
Le coordinateur sportif de La Berrichonne, son club de cœur, revient sur ses passages à Saint-Etienne et à Orléans, où il a occupé les postes de scout et de directeur sportif. Deux expériences dont il se sert aujourd’hui au sein du groupe United World, propriétaire de La Berrichonne depuis mars 2021. Rencontre avec un garçon multi-fonctions.

  • Samedi 5 novembre 2022

Guillaume Norbert, le chef de chantiers
https://13heuresfoot.fr/actualites/guillaume-norbert-le-chef-de-chantiers/
L’ancien joueur pro de Nantes, Angers et Lorient, a rejoint son père-président au Racing-club de France en 2019, qu’il a fait grimper de N3 en N2. Chef d’entreprise à la vie dans le secteur du bâtiment, il revient sur ses nombreuses expériences et explique comment il gère sa double-casquette.

Répondez aux 20 questions du quiz et tenter de remporter un maillot du club de votre choix ! Mais pour cela, vous devrez vous montrer incollable sur le championnat National !

Connaissez-vous bien le championnat National ? Pour le savoir, et pour tenter de remporter un maillot du club de votre choix, répondez aux 20 questions de notre quiz et renvoyez vos réponses par mail à l’adresse mail suivante : contact@13heuresfoot.fr (n’oubliez pas de préciser vos noms, prénoms, âge et adresse postale).

  • Date limite de participation au quiz : jeudi 17 novembre 2022 à minuit.
  • Un seul lot à gagner (un maillot de votre choix) : en cas d’égalité entre plusieurs participants, la question subsidiaire numéro 1 puis la question subsidiaire numéro 2 permettront le cas échéant de les départager. En cas de nouvelle égalité, il sera procédé à un tirage au sort.
  • Attention : dans l’une des questions, deux réponses sont possibles !

Connaissez-vous bien le championnat National ?

1. En quelle année le championnat National, alors à deux poules, a-t-il été créé ?
A. 1992
B. 1993
C. 1994
D. 1995

2. A la création du championnat, une finale entre les deux premiers de chaque poule était organisée pour attribuer le titre de champion de France de National. Le premier titre a été remporté par :
A. Guingamp
B. Châteauroux
C. Amiens
D. Perpignan

3. Quel est le club recordman du nombre de participations en National ?
A. Paris FC
B. Pau
C. Créteil
D. Gazelec Ajaccio

4. Depuis la saison 2012-2013, il est possible de voir les matchs de National gratuitement sur FFF TV : quelle fut la première rencontre à être diffusée simultanément sur la plateforme de la Fédération et sur DailyMotion ?
A. Metz – Boulogne
B. Créteil – CA Bastia
C. Amiens – Colmar
D. Quevilly – Orléans

5. Depuis la création du National, combien de clubs ont participé au moins une fois au championnat ?
A. Plus de 120 clubs
B. Entre 101 et 120 clubs
C. Entre 80 et 100 clubs
D. Moins de 80 clubs

6. La fin de saison 2008-2009 en National fut particulière avec de nombreuses décisions administratives à l’issue du championnat. Du coup, la saison suivante, dans la poule 2009-2010, il y a eu :
A. Six clubs de CFA (ex-National 2) promus en National
B. Sept clubs de CFA (ex-National 2) promus en National
C. Huit clubs de CFA (ex-National 2) promus en National
D. Neuf clubs de CFA (ex-National 2) promus en National

7. Lequel de ces internationaux français n’a jamais joué en National ?
A. Olivier Giroud
B. Mathieu Valbuena
C. Ulrich Ramé
D. Corentin Martins

8. A l’issue de saison 2001-2002, le nombre d’accessions de National en Ligue 2 fut de :
A. 3 clubs promus en Ligue 2
B. 4 clubs promus en Ligue 2
C. 5 clubs promus en Ligue 2
D. 6 clubs promus en Ligue 2

9. De nombreux ex ou futurs internationaux ont évolué en National, dont un certain Franck Ribéry, qui a joué dans trois clubs de cette division. Mais lesquels ?
A. Boulogne, Alès et Brest
B. Boulogne, Uzès et Brest
C. Boulogne, Beaucaire et Brest
D. Boulogne, Arles et Brest

10. Lequel de ces clubs n’a jamais évolué en National ?
A. Nevers
B. Charleville
C. Mont-de-Marsan
D. Pontivy

11. Quel est le record du nombre de points marqués sur une saison par un club ?
A. 87 points
B. 91 points
C. 95 points
D. 101 points

12. Quel est le record du plus petit nombre de points inscrits sur une saison par un club ?
A. 10 points
B. 14 points
C. 18 points
D. 22 points

13. Depuis sa création, combien de clubs ont réussi l’exploit d’enchaîner deux montées consécutives de National en L2 puis de L2 en L1 dans la foulée ?
A. 10 clubs
B. 11 clubs
C. 12 clubs
D. 13 clubs

14. Un club peut, cette saison, en cas de maintien, égaler le record du nombre de présence d’affilée en National (à ne pas confondre avec le nombre de saisons au total) : lequel ?
A. Dunkerque
B. Cholet
C. Concarneau
D. Avranches

15. Depuis la création du National, plusieurs clubs ont réussi à remporter deux titres de champion, mais combien de clubs exactement ?
A. 5 clubs
B. 6 clubs
C. 7 clubs
D. 8 clubs

16. Lors de la saison 1996-1997, un club de National a parallèlement disputé une coupe d’Europe; il s’agit de :
A. SCO Angers
B. Nîmes Olympique
C. Paris FC
D. CS Sedan Ardennes

17. Quel est le record du nombre de buts marqués par un joueur sur une saison ?
A. 29 buts
B. 31 buts
C. 33 buts
D. 35 buts

18. Quel est le record du nombre de spectateurs pour un match de National ?
A. 37 820 spectateurs
B. 32 820 spectateurs
C. 27 820 spectateurs
D. 22 820 spectateurs

19. Quel club détient le plus grand nombre de points sur une saison ?
A. SC Bastia
B. Clermont Foot
C. Evian Thonon Gaillard
D. Istres

20. Avec 79 buts encaissés, cette équipe détient le triste record de plus mauvaise défense de l’histoire du championnat. Il s’agit de :
A. Calais
B. Beaucaire
C. Arles
D. Epinal

  • Attention : dans l’une des 20 questions précédentes, deux réponses étaient possibles !
  • Question subsidiaire numéro 1 : combien de personnes, au total, vont répondre au quiz ?
  • Question subsidiaire numéro 2 : combien de personnes trouveront les 20 bonnes réponses au quiz ?

Bonne chance !

A la tête du District qui regroupe les Alpes-de-Haute-Provence et les Hautes-Alpes, le président entend répondre aux nombreuses problématiques des clubs dans une région où les spécificités sont multiples.

Patrick Bel Abbes a deux passions : le ballon rond et les règlements généraux de la Fédération Française de football : « C’était mon livre de chevet ! ». Une passion telle qu’il a appris ce « code du football » par coeur, pendant que ses copains, eux, lisaient France football ou LEquipe !

C’est comme ça que cet ancien joueur de niveau départemental dans son village, à Rosans, puis à Serres et à Laragne, dans les Hautes-Alpes, a pu intégrer une commission a sein de l’instance départementale, avant de devenir, en janvier 2020, un président très apprécié du District des Alpes.

Ce cadre commercial dans une entreprise de… blanchisserie (rien à voir avec le ballon !) passe beaucoup de temps sur les routes, « trop de temps même ! », et profite parfois de ses moments au volant pour gérer les problèmes, par téléphone. « Les problèmes ». Car, de son propre aveu, « être président d’un District, c’est 95 % de soucis et 5 % de plaisir ».

Quand Gap jouait en National et Manosque en CFA…

Il faut donc être un peu « fou » pour occuper un tel poste où les satisfactions sont très rares, à moins qu’il ne faille tout bonnement « être passionné ». Oui, ça doit être cela. La passion. Dans les Alpes-de-Haute-Provence et dans les Hautes-Alpes, les deux départements qui composent le District des Alpes (depuis 1983), la passion n’a pas de division. Du moins, elle n’a pas de « grande » division : la meilleure équipe seniors, Gap, évolue en Régional 2, l’équivalent de l’ancienne Division d’Honneur Régionale.

Il est loin le temps où l’EP Manosque, avec son redoutable et puissant avant-centre Pierre Manfredi, jouait les trouble-fête en CFA (le National 2 d’aujourd’hui), et où le Gap HAFC accédait au National, à l’issue d’une saison 2009-2010 mémorable.

Malgré une mission maintien réussie sur le terrain par Patrick Bruzzichessi en 2010-2011, le club, qui a reçu dans son petit stade municipal des adversaires comme Strasbourg, Bastia, Amiens, Guingamp, Rouen, Cannes, Niort, Beauvais, Orléans, Créteil, Paris FC, Rodez ou encore Gueugnon, fut rétrogradé administrativement en CFA avant d’être placé en liquidation judiciaire en janvier 2013 et contraint de repartir en première division de District. Grandeurs et décadences.

Les belles années gapençaises, notamment la décennie 2000-2010, n’auront cependant pas été veines pour tout le monde : elles auront au moins mis en lumière le football de haut niveau dans un département où le ski est roi, quand il y a de la neige évidemment, et il y en avait plus souvent, à l’époque, en hiver, au point de devoir reporter de nombreuses rencontres. Une habitude, une tradition même, là-bas.

Grimandi, Theréau, Mercadal, les ambassadeurs

Elles auront aussi permis de voir éclore certains joueurs passés par Gap comme Belkacem Zobiri (Louhans-Cuiseaux, Amiens, Cannes, Sétif), Romain Ciaravino (Istres, Amiens, Laval), et surtout Gilles Grimandi (Arsenal) et un certain Cyril Theréau (Angers Charleroi, Chievo Verone, Fiorentina), que l’entraîneur alpin Fabien Mercadal, alors coach du Gap HFC, était allé déniché à Laragne, en Division d’Honneur. Ce même Fabien Mercadal qui, selon les dires de son président de l’époque, était trop jeune pour entraîner le club de la Préfecture des Hautes-Alpes, en CFA. Sans doute pour cela que, derrière, le natif de Manosque a exporté ses compétences à Dunkerque (CFA, National et Ligue 2), Tours (L2), Paris FC (L2), Quevilly Rouen (L2) et même Caen (Ligue 1) !

« C’est vrai qu’il y a 15 ans, et même 20 ans, on avait deux équipes en CFA, avec Manosque et Gap, se souvient Patrick Bel Abbes; malheureusement, ce n’est plus le cas, les mécènes sont partis, parce que c’est toujours la même chose : l’argent, c’est le nerf de la guerre. Aujourd’hui, Gap est remonté en Régional 2, c’est l’équipe la plus « haute » en termes de niveau. Et à Manosque, y’a une bonne génération de jeunes de 17 et 18 ans qui, je l’espère, permettront à l’équipe seniors de retrouver le niveau régional. »

Des objectifs sportifs plus mesurés

Difficile, cependant, d’envisager mieux aujourd’hui, tant le football a changé, tant les budgets ont augmenté, tant l’argent a bouleversé les codes : « Au niveau du District, on aimerait avoir une équipe seniors en Régional 1 dans un premier temps, voire en National 3, mais ce sera très difficile d’aller en National 2 ou en National. »

Aujourd’hui, Patrick Bel Abbes, l’homme fort du football dans les Alpes, passe l’essentiel de son temps libre au district, à Sisteron, et de manière bénévole. Avant les bureaux, il a tâté du terrain : « J’ai été joueur et puis je suis devenu dirigeant, et j’ai aussi été entraîneur-adjoint à Laragne jusqu’en 2005. J’ai arrêté car j’avais du mal avec la mentalité des jeunes joueurs. Comme je connaissais bien les règlements généraux de la FFF, « Jeannot » Rei-Rosa, l’ancien secrétaire général du District des Alpes, m’a fait rentrer à la Commission des statuts et règlements et m’a nommé délégué départemental au début, puis je suis passé délégué régional et aujourd’hui délégué national A ».

Il n’est donc pas rare de croiser Patrick Bel Abbes sur les pelouses du championnat National, l’antichambre de la Ligue 2 : « Je vais à Bourg-en-Bresse vendredi contre Martigues (ce soir, NDLR). En moyenne, j’officie sur trois rencontres de National par mois, auxquels il faut ajouter des matchs de Coupe de France; par exemple, dernièrement, j’étais délégué au match Toulon (N2) – Aubagne (N2) en coupe. Et quand il y a des équipes professionnelles engagées en coupe de France, on est délégué adjoint. »

« En National, c’est très tendu cette saison »

Alors, monsieur le délégué, comment ça se passe cette saison en championnat National ? « C’est tendu, c’est très tendu même, du fait des six descentes… C’est aussi le retour que j’en ai de la part des clubs ».

Et oui, tendu, ça, on avait remarqué, entre un arbitrage qui distribue les cartons à gogo, des matchs aux couteaux, des coachs qui valdinguent au moindre faux pas de leur équipe et des dirigeants qui dépensent sans compter pour sortir de cette compétition hybride, l’exercice 2022-2023 ne ressemble à aucun autre. Et va laisser des traces… Et ce n’est pas fini, rebelote la saison prochaine !

Après avoir appartenu au District de Provence puis de Rhône-Alpes-Provence, le District des Alpes, qui regroupe donc les deux départements du 04 et 05 (Alpes-de-Haute-Provence et Hautes-Alpes), ne pèse peut-être pas bien lourd à l’échelle nationale, mais n’en demeure pas moins très actif. « Notre District regroupe 6 000 licenciés (dont 60 % de jeunes) et représente 45 clubs. C’est vrai que l’on est petit, mais il y a plus petit que nous encore, comme l’Ariège je crois, il faudrait vérifier ! Mais je suis très fier de représenter le District des Alpes, parce que je suis Alpin, je suis né dans un village de 400 habitants, Rosans, dont le nom vient des roses d’ailleurs… »

« Avec les clubs, on est dans le dialogue »

Quand on lui demande à quoi sert un président de District, Patrick Bel Abbes a cette réponse à la fois surprenante et terriblement révélatrice : « Mon rôle ? En fait, je ne sers à rien, je suis juste là pour régler les problèmes. »

Bon, il exagère un peu, le successeur de Gérard Capello (il a pris la suite en 2020). Car être président, c’est donner des directions, avoir une vision : « Quand j’ai été élu à la tête du District en 2020, j’ai moi-même choisi mon équipe pour travailler à mes côtés. Je me suis entouré de compétences. Et j’ai la chance d’avoir une équipe de salariés qui travaille, qui prend du plaisir et je prends aussi du plaisir à échanger avec eux. »

Sa vision de l’instance ? « Mon objectif, c’est d’essayer de redonner le District aux clubs. J’ai appartenu à l’ancienne équipe, et sans vouloir polémiquer, je trouvais que le District n’était pas assez présent auprès des clubs. Donc nous, on en a fait notre leitmotiv : on souhaite se rapprocher des clubs au maximum. C’est la raison pour laquelle nous avons instauré des réunions de secteurs, en divisant le District en quatre : secteurs Nord, Centre, Centre 04 et Sud 04. On essaie de s’y rendre plusieurs fois, en début et en fin d’exercice. Ces réunions permettent de se rencontrer, d’échanger, de se parler. Là, on est vraiment dans le dialogue. Alors parfois ça se passe bien, parfois moins bien mais ce n’est pas grave, tant que le dialogue est instauré. On vient juste de finir nos premières réunions, on en a enchaînées quatre en quatre semaines. »

« Pour avancer, il faut être désintéressé »

Aux côtés du président de la Ligue de Méditerranée, Eric Borghini (à gauche)

On comprend mieux, dès lors, pourquoi Patrick Bel Abbes, qui se targue de connaître (presque) tout le monde, d’être joignable – « Mon portable, tous les présidents de clubs l’ont ! » -, de miser sur la proximité et l’échange, assure être à ce poste « juste pour régler les problèmes ». Car évidemment, ces réunions de secteurs ont servi à les soulever : « Les clubs en ont profité pour exposer leurs problématiques, pour dire ce qui ne va pas, mais aussi ce qui va ! Souvent, cela tourne autour de la logistique, des moyens. Par exemple, à la demande des clubs, l’an passé, en Division 3 de District, où il n’y avait que onze équipes engagées et deux poules, ils ont validé en assemblée générale le passage à une poule unique, sauf que, victime du succès, on est passé à 16 équipes ! Mais ce n’est pas grave, tout le monde est content de jouer chaque week-end, même s’il y a plus de contraintes. Et on ne déplore pour le moment aucun forfait ! « .

Membre de droit du comité de direction de la Ligue de Méditerranée eu égard à son statut de président du District des Alpes (au même titre que Michel Serre – Grand Vaucluse -, William Pont – Var -, Edouard Delamotte – Côte d’Azur -, et Erick Schneider – Provence -), Patrick Bel Abbes entretient également d’excellents rapports avec Eric Borghini, l’homme fort de la Ligue : « Avec Eric, on a de vraies bonnes relations, des relations privilégiées. Avec lui, le dialogue est permanent. Il connaît tous les rouages du football. Quand j’ai besoin de son appui, je l’appelle. Personnellement, je ne fais pas de politique, cela ne m’intéresse pas, car je pars du principe que pour avancer, il faut être désintéressé. »

Une convention avec le parquet de Gap contre la violence

Et parce qu’un président, « c’est 95 % d’emmerdements et 5 % de plaisir », Patrick Bel Abbes évoque à nouveau une difficulté : la violence dans les stades. Ou plutôt… autour des stades.

Car le phénomène a changé : « Alors, jusqu’à présent, on était un peu épargné dans le 04 et le 05, mais là, je ne sais pas si ce sont les effets secondaires de la Covid ou quoi, ou la frustration de ne pas avoir vu de football pendant des mois, mais depuis, on a des soucis en dehors des terrains. On s’est rapproché des deux parquets, et il se trouve qu’au parquet de Gap, on a la chance de connaître quelqu’un, Florent Crouhy, qui n’est autre que le procureur de la République, et à qui on fait directement remonter les incidents. Je peux vous dire que, derrière, selon la gravité des faits, ça va très vite, les dossiers sont en haut de la pile. On a d’ailleurs passé un projet de convention, signé en juin dernier, en compagnie de l’UNAF Provence (Union nationale des arbitres de football), lors de l’assemblée générale du District, projet dans lequel on met en place des fiches de signalement en cas de soucis en dehors des terrains. L’idée, c’est de mettre en relation directement le parquet avec les différents acteurs du football. Avec le parquet du 04, on a aussi un accord de principe, on n’a pas encore finalisé la convention, mais cela concerne toujours des problèmes en dehors des terrains. Car lors des réunions de secteur, les clubs nous ont fait remonter leur manque de pouvoir face à ces situations avec les parents ou les supporters. Mais cette violence autour des terrains, ces bagarres, on s’aperçoit que, malheureusement, c’est le reflet de ce qui se passe dans les stades au plus haut niveau depuis quelque temps, avec tous ces incidents intervenus récemment. »

En quête de partenaires

Pour terminer avec le chapitre « problèmes », il y a la superficie. Pas celle du terrain, non, celle qui sépare l’un des clubs les plus « hauts » à l’un des plus « bas » : « La grandeur des deux départements, c’est là encore une problématique, on a une équipe de Vinon-sur-Verdon, par exemple, qui est distante de 200 kilomètres de Briançon par exemple. Pour un district, c’est énorme. Et il y aussi le climat : en décembre, en janvier, il neige dans le Nord du 05… enfin, j’espère, on espère tous qu’il va neiger, donc on ne joue plus pendant cette période. Ce sont des spécificités. »

Du côté des bonnes nouvelles, le district des Alpes pourrait prochainement compter sur l’arrivée de nouveaux partenaires : « Ce matin, on a rencontré, j’espère, un futur « gros » partenaire. On est constamment en recherche dans ce domaine. Quand la nouvelle gouvernance est arrivée, on a su qu’on aurait moins d’aide de la part des collectivités donc on a mis en place une commission partenaires et pris une personne en apprentissage pour s’occuper de ce secteur : là, on en est à 35 000 euros d’aides de la part de partenaires, contre zéro avant. Actuellement, on discute, on négocie avec deux gros partenaires potentiels. Ces rentrées d’argent, ces aides, cela permettrait, par exemple, d’aider les clubs et les jeunes notamment : on n’avait pratiquement plus de détections. On est passé de une à quarante-deux détections (300 jeunes concernés), ce qui a permis de voir des gamins intégrer le pôle Espoirs d’Aix-en-Provence. On a aussi mis en place des sélections départementales, on envoie aussi des jeunes à des tournois régionaux, nationaux voire internationaux. Tout cela, ça a un coût. C’est pour ça qu’on a besoin d’aides. »

Texte : Anthony BOYER / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06

Photos : District des Alpes

L’ex-gardien de Créteil en Ligue 2 et en National est retourné à Aubervilliers, en N3, où son club a signé un exploit retentissant au 7e tour de la coupe de France en éliminant QRM, un club de Ligue 2. Une performance qui a rappelé la saison 2009-2010, lorsque le club du 9-3 avait affronté le PSG au Parc des Princes en 32es !

Sous le maillot de l’US Créteil. Photo Philippe Le Brech

À l’heure où la mode est à la langue de bois et aux discours feutrés, Yann Kerboriou – actuel gardien d’Aubervilliers en National 3 – dit clairement les choses. L’homme aux 87 rencontres de Ligue 2 sous le maillot de l’US Créteil aurait pu avoir une trajectoire plus belle encore avec plus de travail, comme il le dit si bien.

Elle aurait aussi pu se résumer à quelques apparitions avec les Cristoliens et de longues soirées sur les bancs de touche de France et de Navarre s’il n’avait pas cru un minimum en lui. Critiqué par beaucoup, le « p’tit gars d’Auber » s’est construit seul ou presque.

À 34 ans, alors que le portier séquano-dionysien pourrait aspirer à une retraite sportive méritée, il a choisi de continuer à se faire mal à l’entraînement et en match en National 3. Un championnat où le plaisir n’est pas souvent au rendez-vous, selon ses mots. Et avec pourquoi pas, le plaisir de vivre une nouvelle montée avec son club de cœur. Histoire de boucler la boucle après deux ascensions successives de DH en CFA (2008-2010).

Sous le maillot de l’US Créteil. Photo Philippe Le Brech

En attendant le verdict d’un championnat ô combien difficile, et après avoir signé l’un des exploits du 7e tour en éliminant un club de Ligue 2, Quevilly Rouen (1-1 puis 4-1 TAB), « Bouyou » va se rendre une semaine à La Réunion pour y affronter la JS Tamponnaise au 8e tour de la Coupe de France.

Un déplacement aux allures de vacances certes mais avec un enjeu important pour la formation de Seine-Saint-Denis : une place en 32e de finale de la Coupe de France. Et pourquoi pas un nouvel affrontement face au Paris-Saint-Germain, 13 ans après un 32e de finale au Parc-des-Princes ou le jeune Yann Kerboriou, fan inconditionnel du PSG, s’était rendu, avec Aubervilliers, pour une élimination certes, mais un beau souvenir indélébile.

Sous le maillot de l’US Créteil. Photo Philippe Le Brech

Yann, raconte nous un peu ce 7e tour victorieux contre Quevilly Rouen Métropole !
Même si j’étais sur le banc, contrairement au championnat, ça rappelle de bons souvenirs, des moments agréables de la Coupe de France. Ça permet aussi à la ville de fédérer autour d’un match, de voir le stade plein. Et puis pour les gars de l’équipe c’est une bonne occasion de se confronter à des joueurs de Ligue 2. Un niveau que certains n’auront peut-être jamais la chance de découvrir, même si c’est tout le mal que je leur souhaite.

Tu avais déjà connu ce rôle de « Petit Poucet » ?
Oui et déjà avec Aubervilliers, mais ça doit faire 10 ans (ndlr : 10/01/2010). Nous avions tiré le Paris Saint-Germain en 32e de finale. Et comme le club ne pouvait pas recevoir dans son stade André Karman, nous avions « reçu » le PSG au Parc-des-Princes. Un rêve de gosse quand tu supportes cette équipe et c’est sûrement mon plus beau souvenir dans cette compétition, même si j’en prends cinq! Et il y aussi l’année suivante (2010-2011) avec Créteil alors en National. On prend Nice qui est en Ligue 1 à Duvauchelle et on perd aux tirs-au-but (ndlr : 6-5).

Sous le maillot de l’US Créteil. Photo Philippe Le Brech

Au prochain tour, Aubervilliers va se rendre à La Réunion pour jouer La JS Tamponnaise avec l’étiquette de favori. Le risque c’est de se dire que vous partez en vacances ?
Je ne sais pas si on est favori, mais c’est un match que l’on espère gagner. On va tout faire pour gagner, mais ce ne seront clairement pas des vacances. Et il n’y aucun risque qu’on puisse le penser avec un coach comme le notre. Rachid Youcef saura parfaitement avertir tout le monde. On va aborder ça avec le plus de sérieux possible. Il ne faut pas oublier qu’à la clef il y a un ticket pour les 32e de finale avec la perspective éventuelle de jouer une Ligue 1. J’espère que tout le monde a conscience de ça et est dans la même optique de vouloir gagner.

À côté de la Coupe de France, Aubervilliers vise une montée en National 2. Comment décrirais-tu ce championnat francilien de National 3 ?
Ce championnat c’est 5% de plaisir et 95% de combat tous les samedis. Ce n’est pas la division la plus attrayante. Même pour un spectateur. Je me mets à sa place et ce n’est pas forcément agréable à regarder. Ça ne joue pas beaucoup au foot. Ce sont beaucoup de duels, d’engagements, d’insultes. Avec la réforme des championnats, si jamais « Auber » ne monte pas, ce sera tout de même plus sympa je pense la saison prochaine avec à nouveau des déplacements dans le Nord ou l’Est de la France.

Avec l’US Créteil en 2017-2018. Photo Philippe Le Brech

Hormis une courte parenthèse en National 2 avec Fleury, tu n’as connu que deux clubs : Aubervilliers et Créteil. Comment as-tu commencé à « Auber » ?
J’ai passé deux ans au centre de formation de Lille, mais je n’étais clairement pas prêt. À 15 ans, je n’avais pas compris qu’il fallait vraiment bosser pour le haut niveau. C’était trop tôt pour moi et je n’étais pas prêt à tous les sacrifices nécessaires. Je suis arrivé à Aubervilliers en DH*. Deux ans plus tard, nous montions en CFA et moi je prenais le chemin de Créteil.

Là, tu y débarques en 2010-2011 pour huit saisons…
Je n’en garde que des bons souvenirs pour plusieurs raisons. Déjà, j’y signe mon premier contrat pro et ensuite j’arrive à faire une carrière là-bas alors que si je comptais les personnes qui croyaient en moi à l’époque, une main serait largement suffisante. Je n’ai aucun regret sur cette période. Je me dis juste que si j’avais bossé un peu plus, j’aurais peut-être pu viser plus haut, mais on ne le saura jamais.

Avec Créteil en Ligue 2 en 2015. Photo Philippe Le Brech

Tout n’a pas été rose néanmoins pour toi avec une situation particulière. Chaque saison ou presque, tu partais comme doublure avant d’inverser la tendance. Comment l’expliques-tu ?
C’est le mental tout simplement. Je ne pouvais pas accepter ce statut, qu’il soit justifié ou non.

Tu ne peux pas te satisfaire d’être sur le banc de touche. Je dois rendre hommage à quelqu’un qui m’a toujours poussé à aller au bout des choses. C’est Rachid Bachiri qui était alors numéro 3. Lui, il croyait en moi et me disait de ne pas lâcher, que ça finirait par payer. Et à force de persévérance, j’ai réussi à jouer.

*Après ses deux saisons au centre de formation de Lille, Yann est retourné chez lui, à Montrouge, pendant une saison, avant de jouer en seniors PH, puis il s’engage en DH à Aubervilliers.

Les buts du PSG en coupe de France face à Aubervilliers en 2010

Yann Kerborou, du tac au tac

Sous le maillot de l’US Créteil. Photo Philippe Le Brech

Le joueur plus fort avec lequel tu as joué ?
« Ils sont deux : Rafik Gérard et Rudy Carlier. Rudy, c’était un tueur à gage à l’entraînement, mais en match c’était un autre joueur. Je n’ai jamais compris ces deux visages. Ça reste une énigme. Et Rafik Gérard c’est certainement le plus fort avec qui j’ai pu jouer. Mais aussi le plus fou et le moins constant. »

Le joueur le plus fort contre lequel tu as joué ?
« Yohann Rivière, je n’ai jamais aimé le jouer. À Dijon, c’était un casse-couille sans nom. Il était ultra efficace devant le but, très roublard et c’était chiant de le jouer. C’était souvent des duels compliqués. Et puis il y a eu aussi Mathieu Duhamel qui est parti l’année où j’ai signé à Créteil. L’avoir en face à face n’était pas un cadeau. »

Tonpremier match de Ligue 2 ?
« À Nîmes aux Costières en 2013. On gagne 3-2 avec des buts de Fané (Andriatsima), Jean-Mi (Lesage) et Marcel (Essombé). Et si je dois être très honnête, je me chiais dessus avant le coup d’envoi. En plus c’était compliqué car le club fait signer Issa Ndoye pour nous mettre en concurrence. Il y avait les pros Ndoye et les pros Kerboriou alors que nous on s’entendait hyper bien. Il y avait eu l’histoire de la photo officielle qui veut que généralement le gardien titulaire soit au milieu et le remplaçant un peu plus sur le côté. Et c’est Issa qui était au centre de la photo. Et ça ne plaisait pas à Jean-Luc Vasseur. On sortait du titre de national et le coach trouvait normal de me garder sa confiance. »

Sous le maillot de l’US Créteil. Photo Philippe Le Brech

Ton dernier match de Ligue 2 ?
« C’était à Niort avec Créteil en 2016. Je prends un carton rouge au bout de 30 minutes alors que l’on mène 2-1. Sur un duel avec l’attaquant, je sors et Tony Chapron siffle pénalty. Je me dis pourquoi pas, je vais essayer de l’arrêter. Et là, je vois qu’il sort le rouge. Je n’ai pas compris sa décision. On perd 4-2 et on descend officiellement en National. Derrière, je prends une flopée d’insultes et quelques jours plus tard on met à tord mon intégrité en question en parlant de match arrangé. Le contraire à d’ailleurs été prouvé. »

L’entraîneur qui t’a le plus apporté ?
« Je vais en citer trois. Daniel Ravaudet à Montrouge. Il m’a fait confiance et m’a surtout aidé à prendre confiance en moi. J’avais 14 ans, c’était avant mon départ au centre de formation de Lille et il a compté dans mon début de parcours. Ensuite, il y a Abdallah Mourine qui m’a accueilli à Aubervilliers alors que je n’étais rien, ni personne. Il m’a accordé sa confiance pour garder la cage de l’équipe. On a connu deux montées ensemble. J’arrive en DH et en deux ans on se retrouve en CFA. Le troisième c’est Jean-Luc Vasseur. Beaucoup lui trouve des défauts. Il en a forcément, mais pas tant que ça. Il a l’avantage de toujours laisser tout le monde concerné dans un vestiaire. Ce n’est jamais évident pour un coach. Je lui suis reconnaissant pour toutes ces années. »

Vidéo : entretien avec Yann Kerboriou avec Créteil en Ligue 2 :

 Texte : Julien Leduc / Mail : jleduc@13heuresfoot.fr / Twitter @JulienLeduc37

Photo de couverture : Philippe Le Brech

Photos : Philippe Le Brech

 

L’attaquant passé par Calais, Beauvais, Saint-Quentin, Dunkerque ou encore Chasselay, de retour à Creil (R3) depuis la saison passée, a lancé « MaraPronostic », son entreprise de paris sportifs en ligne. Et ça marche !

« Depuis que j’ai commencé à jouer au football, j’ai toujours été attiré par le fait de marquer des buts » pose d’emblée Adama Camara, dont les débuts au football remontent en débutants, vers 6 ans, du côté de Nogent-sur-Oise. « Je ne me débrouillais déjà pas trop mal car je jouais au quartier avec les copains donc j’avais déjà quelques qualités. »
Assez en tout cas pour être repéré en moins de 13 ans « lors d’un match contre eux » par le voisin et club phare du département, l’AS Beauvais Oise. « J’y suis resté 2 ans, mais le coach est parti, et comme c’est lui qui m’emmenait, je n’avais plus de moyens de transports pour me rendre là-bas. Du coup je suis parti à Chantilly car c’était plus proche de chez moi. »

D’abord défenseur central

Un passage dans la « Cité du Cheval » qui sera surtout marqué par un repositionnement en… défense centrale. « J’avais beaucoup grandi, donc pour avoir de la taille derrière on m’a demandé de reculer. Cela se passait plutôt bien, mais ce n’était pas trop mon kiffe. J’étais un défenseur assez technique… Cela m’arrivait souvent de faire des passements de jambes ou des roulettes derrière. Le coach n’était pas serein. Par contre en ce qui concerne la gestion de la profondeur, il n’y avait aucun souci. Comme j’allais vite, dès qu’un attaquant partait au but je le rattrapais toujours. »

S’il finira ses dernières années de jeunes à ce poste, il retrouvera sa place de prédilection après une prestation XXL lors d’un match amical avec les seniors. « Le coach m’avait dit qu’il voulait m’essayer un peu plus haut. Résultat j’ai mis 8 buts lors de la rencontre, et à la fin du match il est venu me voir en me disant qu’il avait trouvé mon nouveau poste. »

Dès lors, Adama Camara ne bougera plus… ou presque. « J’évoluais avec la réserve en R3, et lors d’un match contre Senlis, un recruteur du Havre était venu observer un de nos adversaires. Au final, c’est moi qu’il a retenu et il est venu me demander mon numéro à la fin de la rencontre. Quelques jours plus tard, je me suis retrouvé à partir faire un essai avec la réserve du Havre. »

A peine arrivé en Normandie, le directeur du centre de formation lui réserve une première surprise. « Je vais le voir pour me présenter et lui dire que je suis là pour la semaine ; sauf que lui me réponds qu’il me dira après le match amical prévu le soir même combien de temps je reste. Cela se passe bien et il me propose de rester la semaine au centre. »

Sous le maillot de Nesle.

C’est ainsi qu’il s’entraînera aux côtés de Benjamin Mendy, Brice Samba et surtout Riyad Mahrez. « Il était déjà au-dessus et techniquement c’était le meilleur de l’équipe. Je me souviens qu’il m’avait mis pas mal de ballons lors du match et qu’il était étonné de ma vitesse » rigole-t-il encore plusieurs années après. « A la fin de la semaine, les dirigeants du club sont venus me dire qu’ils voulaient me revoir en fin de saison ; mais l’agent, lui, ne voulait pas que je reste à Chantilly. Il m’a donc envoyé faire un test à Charleroi, et j’ai signé là-bas. »

C’est ainsi qu’à 20 ans, Adama Camara quittera pour la première fois de sa vie l’Oise, pour prendre la direction de la Belgique. « Cela s’est plutôt bien passé, et j’ai continué d’y apprendre le métier d’attaquant. Je jouais pas mal avec les jeunes (-21 ans), tout en faisant quelques matchs avec l’équipe fanion ( D3, équivalent du National français). C’était moins technique qu’en France, mais beaucoup plus physique et intense dans les duels. Et puis, c’était tout pour l’attaque, du vrai « Kick and rush ». Mais voilà, j’étais un peu jeune, c’était mon premier départ, ma famille me manquait, il y avait de la solitude, donc j’ai préféré casser mon contrat à l’issue de la première saison pour revenir chez moi. J’étais venu pour durer, mais tout ne s’est pas passé comme j’ai voulu, donc j’ai préféré dire stop plutôt que de prendre le risque de prolonger. Ce fut un mal pour un bien, car cela m’a permis de me lancer en France. »

De retour chez lui, à Creil

Pourtant, c’est sans club qu’Adama Camara rentre chez lui, à Creil. Quelques mois plus tard, il démarchera celui de sa ville, qu’il rejoindra en décembre. « En revenant, le but n’était pas de tout casser, mais vraiment de retrouver du temps de jeu et d’être compétitif. Après, j’ai eu la chance que tout se passe bien, j’ai inscrit de nombreux buts, confirmé mon statut d’attaquant et tout cela m’a permis d’attirer, en 6 mois, les sollicitations et de toucher un niveau un peu plus haut que Creil. »

Adama Camara rejoindra Saint-Quentin à l’été 2012 avec qui il disputera deux saisons, en DH puis en CFA2. « La première année fut compliquée car j’avais eu des soucis pendant l’été, mais je me suis accroché. Par contre à la trêve estivale, j’ai senti que j’avais franchi un cap, que j’étais devenu un autre joueur. Jusqu’à présent, je faisais mal à toutes les défenses grâce à ma vitesse, mais j’avais pas mal de déchets devant le but. J’ai travaillé cela et j’ai pu faire encore plus de différences lors de ma deuxième saison. »

En Juillet 2014, il franchira un nouveau cap en signant du côté de l’Amiens AC ( CFA). « Je n’ai pas eu beaucoup de temps de jeu, donc j’ai préféré partir pour rejoindre Nesle (DH), car quand je suis dans un club, il n’y a qu’une chose qui m’intéresse, c’est de jouer. »

Une descente qui « avait pour but de rester compétitif à un niveau raisonnable. En plus de cela, ils étaient relégables, donc il y avait un vrai défi que nous sommes parvenus à réaliser. Et puis, dans le même temps, nous avons remporté la Coupe de la Somme et sommes allés jusqu’en finale de Coupe de Picardie. »

Camara-dépendance à Beauvais

Un retour au premier plan qui lui permettra de retrouver l’AS Beauvais Oise (CFA2) en 2015, grâce à un homme, Thierry Bocquet ( alors coach des sang et neige). « L’année d’avant, j’avais joué contre lui et il voulait déjà me faire venir à Poissy. Cela ne s’était pas fait, mais je savais qu’il me suivait. Alors quand il m’a rappelé je n’ai pas été trop surpris. » Arrivé par la petite porte – « Je venais de DH, donc j’étais plus un pari » -, Adama ne tardera pas à provoquer une « Camara-dépendance » au sein de l’effectif beauvaisien.

« Au bout de 2 mois, j’ai compris que si nous voulions monter, je me devais de faire une grosse saison car, même si je n’étais pas programmé pour ça, j’étais devenu l’attaquant numéro 1. Cela me motivait et me donnait envie d’être performant à chaque rencontre pour aider le club à gagner. »

Si l’ASBO restera finalement à quai, Adama Camara, auteur d’une saison pleine (7 buts et 8 passes décisives) fera un bond en avant en rejoignant, à 26 ans, Dunkerque et le National. « C’est à Beauvais que j’ai vraiment vécu ma meilleure saison. C’était proche de chez moi, ma famille venait à chaque match, j’avais le public et le coach dans la poche… mais c’était difficile de refuser une National. C’était quand même deux niveaux au-dessus et le contrat était beau. »

« J’aurais pu m’imposer à Dunkerque »

Malheureusement, il n’aura pas l’occasion d’exprimer tout son potentiel. « J’avais fais une grosse préparation ; nous étions trois attaquants, et j’avais réussi à faire la différence sur mon concurrent car Malik Tchoukounté était indiscutable. Je devais débuter lors de la première journée, et quelques jours, avant je me blesse. Fabien Mercadal (l’entraîneur de l’USL Dunkerque) était dégoûté. Le gars qui me remplace fait le taf, et derrière il n’a plus bougé. C’est dommage car sans cela, je suis certain que j’aurais pu m’y imposer. Encore aujourd’hui je suis certain que si je joue ce match, la suite n’est pas la même… Comme quoi une carrière ne tient pas à grand-chose. »

La suite justement ? Calais, « où je fais une dizaine de matchs en CFA et inscrits 8-9 buts mais où je pars en fin de saison suite à la relégation administrative du club en DH », puis une dernière année en N2 à Chasselay où il évoluera dans un poste d’excentré gauche. « Derrière j’ai décidé de tout stopper et de mettre ma carrière de côté car ma femme était enceinte de notre deuxième enfant ; et elle était toute seule à Creil. Alors autant avec un enfant c’était jouable, que là avec deux cela ne l’était plus, et je me devais de m’occuper de ma famille. »

En 2021, il effectue son retour à Creil.

S’il fait le bonheur des siens, il fait également depuis 2018 celui des clubs isariens, à l’instar de Creil, son dernier point de chute (après des passages par Senlis et Nogent), un club de Régional 3 qu’il a emmené cette année au 6e tour de la Coupe de France et où il compte déjà 15 buts en 7 apparitions !

« A n’importe quel niveau et dans n’importe quel championnat, un buteur reste un buteur. Si tu marques des buts, tu le feras toute ta vie, c’est l’instinct. Après, c’est vrai aussi que je savais que je serais performant cette saison, car contrairement à l’an passé, où je marquais sans m’entraîner (une quinzaine de réalisations), là, je bosse sérieusement. »

Un retour en force et en forme qui amène chaque week-end ses adversaires à se demander si Adama sera sur le terrain. « Je sais que je suis un peu attendu quand j’arrive sur une pelouse picarde. Mais c’est bien, ça me motive, et c’est une sorte de reconnaissance. »

Pour d’autres, se pose la question de savoir s’il pourrait retrouver prochainement un club plus huppé. « Sans prétention je n’ai pas besoin de marquer des buts pour savoir que je peux encore évoluer plus haut. Mais est-ce que j’en ai envie ? Maintenant j’ai 3 enfants, je ne suis plus tout jeune ( 32 ans) donc faire la route pour s’entraîner tout les jours, ce n’est plus pour moi. Après, bien sûr, si l’opportunité se présente, j’y réfléchirai, mais encore une fois ce ne sera pas pour aller n’importe où. Et puis vous savez, je suis bien ici à Creil, je suis davantage axé sur un projet club que personnel. Nous avons un bon groupe avec pleins de jeunes de qualités, donc ce serait bien de les aider à remonter le plus haut possible. »

« J’ai voulu griller les étapes »

Une maturité et une stabilité nouvelle qui aurait sans doute pu lui permettre d’avoir une autre carrière ; et éviter certains de ses détracteurs de le qualifier de mercenaire.

« Il faut que les gens se mettent à la place du joueur. Si dans leur travail, une entreprise concurrente vient les chercher pour un salaire nettement supérieur, je pense qu’ils réfléchiraient. Et en plus, dans mes choix de carrière, j’ai toujours mis l’argent au second plan, préférant le niveau. Pour l’anecdote, quand je pars de Beauvais, j’aurais pu aller en CFA et toucher bien plus qu’en signant à Dunkerque. Mais voilà c’était du National, donc je n’ai pas hésité une seconde. Après c’est vrai que si j’avais eu moins la bougeotte, j’aurais pu faire quelque chose d’autre. La stabilité c’est aussi une des clés pour réussir dans ce milieu. Après je suis quelqu’un d’un peu caractériel, ce qui fait que c’était dur de rester dans les clubs, à un moment donné, cela ne passe plus. Et puis, j’ai toujours voulu aller jouer plus haut, donc si nous ne montions pas, il fallait que je parte.  J’ai voulu griller les étapes et cela m’a un peu cramé. Alors oui je n’ai pas percé, mais je suis allé chercher les choses tout seul en gravissant les échelons un par un. Je viens d’en bas et je n’oublie pas que tout a commencé en Régional 3. »

« MaraPronostic – l’insomniak », sa société de paris sportifs

A défaut d’être devenu l’attaquant numéro 1 français, Adama Camara s’est lancé un nouveau défi, celui d’être désormais le pronostiqueur numéro 1 en France . « J’ai commencé à jouer vers 18 ans, et cette passion m’a toujours suivi. Ce qui me plaît ? Déjà, le gain, car c’est le nerf de la guerre, mais aussi l’adrénaline qui s’en dégage ».

Ainsi sur une blague, il ouvrira sa société le 1er mai 2021. « Souvent, quand je faisais un ticket, les gens me disaient : « Adama, tu joues quoi ? ». Je leur donnais tout le temps mais j’en avais marre qu’on m’appelle pour ça. Du coup, un jour, il y avait Troyes – Chambly et Juventus – La Spezia. J’avais mis mon ticket (victoire de Troyes et C. Ronaldo marque plus de buts que La Spezia) avant sur Snapchat pour que les gens suivent. Troyes s’impose tranquille, C. Ronaldo marque à la 88e et La Spezia a un penalty dans le temps additionnel. S’ils marquent, j’ai perdu… Et ils loupent. Cela m’a donné l’idée de faire un autre Snap (marapronostic) où tout le monde pouvait suivre gratuitement ce que je jouais. Pendant 10 jours d’affilée, nous avons gagné avec des coups incroyables, comme un combiné « but de Mbappé en première période et de Salah en seconde avec une côte qui permettait de multiplier la mise par 13. Le même jour,  j’avais fait un autre ticket avec une côte de 9. Cela a forcément fait un peu le buzz. »

Car oui, sa spécialité reste avant tout le « dénichage » de buteurs. « Je joue sur ce que je connais. Je suis un vrai passionné, pas comme tout ces pronostiqueurs qui ne connaissent pas le milieu. Je regarde tous les matchs, et je connais tous les buteurs, même ceux en Australie, en Chine ou en Ukraine. Je passe beaucoup de temps à analyser, et mes résultats sont avant tout le fruit de ma passion. Je me fie à la forme du moment mais aussi à l’instinct. Cela va faire 2 ans que ça marche et je ne m’en plains pas. D’ailleurs, ma plus belle réussite est que ma communauté soit satisfaite. Chaque mois je fais des sondages, et j’en ressors toujours avec 93-95% de positif. Après, Cela reste un jeu d’argent, il n’y a rien de sûr, et même si je ne joue que ce que je maîtrise, cela m’arrive aussi de perdre. C’est pourquoi il faut vraiment faire attention et jouer uniquement ce qu’on est capable de jouer. Si on s’enflamme, on peut vite redescendre et perdre plus que ce que l’on a ». Paroles d’homme, de buteur et désormais de pronostiqueur !

Adama Camara, du tac au tac

Ton meilleur souvenir sportif ?

Mon but inscrit en Coupe de France avec Beauvais ( alors en CFA2) face à Valenciennes (L2) lors d’un 8ème tour ( 2015). Nous étions à la 85ème, Brisson était mort et tout le monde nous voyait dehors. Je suis parti tout seul et après un petit exploit personnel j’ai égalisé pour arracher les prolongations. Je peux vous dire que le stade s’est réveillé. Mais ce qui était fort et magique, c’est qu’il y avait mon fils, ma famille et tout mes amis dans les tribunes.

Ton pire souvenir ?

Toujours ce même match car lors des prolongations (défaite 1-2) je provoque un pénalty que je loupe. Leur gardien (Paul Charruau) était venu me voir en me disant qu’il savait où j’allais tirer et je suis tombé dans son jeu. La vérité, c’est que Valenciennes était venu nous observer la semaine d’avant et que j’avais déjà inscrit un pénalty de cette façon. Et j’avais oublié ce fait là.

Ton plus beau but ?

Je dirais l’an dernier où j’ai mis un énorme coup-franc contre Chambly. J’ai toujours eu une bonne frappe et je n’ai jamais été mauvais dans cet exercice ; mais jusqu’à présent il y avait meilleur spécialiste que moi partout où je suis passé.

Ton coéquipier le plus fort ?

Alexis Araujo (aujourd’hui à Créteil). Il était incroyable, et je me demande encore comment cela se fait qu’il n’ai jamais percé ?

Le défenseur qui a posé le plus de problème ?

Gustave Akuesson ( Versailles). Il allait aussi vite et était aussi fort que moi. A chaque fois c’était de vrais batailles.

Le coach qui t’a le plus marqué ?

Thierry Bocquet. J’aimais bien la relation que nous avions, il me faisait énormément confiance et je garde beaucoup de très bons souvenirs avec lui.

Ton match le plus marquant ?

Quand nous avons éliminé Chambly avec ma petite équipe de Nesle (R1) au 7ème tour de Coupe de France, en 2018 (1-1, victoire aux tirs aux buts). En plus de cela je m’étais fais un petit peu chahuter sur le terrain, notamment par Dequaire qui n’acceptait pas trop de se faire balader par un joueur de R1. Sur la pelouse je suis quelqu’un qui chambre beaucoup et qui aime rentrer dans le cerveau des défenseurs. Je peux vous dire qu’il a passé une sale après-midi. Sur cette rencontre, j’ai tout simplement montré que même s’ils étaient en National, je n’avais rien à leur envier.

Ton modèle ?

Gabriel Batistuta. J’étais un vrai fan de lui, c’était un vrai buteur et je regardais toutes ses vidéos.

Un geste technique ?

Ma spéciale, quand je fais le double passement de jambes. Beaucoup de joueurs y sont passés (rires). C’est sûr que lorsqu’on me voit, on se dit qu’un grand comme ça (1m95) n’est pas capable d’éliminer. Mais j’ai été formé au « city » donc je n’ai pas de souci à ce niveau là.

Une anecdote ?

C’était lors d’un déplacement à Sedan avec Saint-Quentin quand nous étions en N2. A l’aller j’étais absent et nous avions perdu 4-0. Quand nous arrivons les gars ne me connaissent pas et me regardent un peu de haut. Un de mes coéquipiers, qui avait joué à Sedan, parle un peu avec eux et ils lui demandent qui je suis. Lui leur dit que je suis l’attaquant, et ils lui répondent que leur défenseur, Dikamona (qui joua par la suite en D1 écossaise) va me manger et que je ne vais pas voir le jour. Mon coéquipier vient me répéter cela 5 minutes avant le coup d’envoi. Je lui réponds : « On va voir ». Je lui ai fait une misère pas possible, et à la fin de la rencontre les supporters chantaient « Camara à Sedan ».

La chose inavouable ?

C’était toujours avec Saint-Quentin lors d’un amical contre Chauny. Pendant le match, je ne faisais que de m’embrouiller avec mes coéquipiers. A la mi-temps le coach me dit « Adama qu’est-ce que tu as ? Pourquoi tu es énervé comme ça ? » Et là je lui réponds comme ça « Désolé coach, je n’ai pas fumé mon joint, je suis venu comme ça. » Du coup il m’a dit que la prochaine fois il fallait que je fume (rires).

Texte : Thibault Hannicq / Mail : contact@13heuresfoot.fr
Photos : T. H. et AFC Creil

De la Ligue 1 avec Lorient au National 2 avec Fleury en passant par la L2 et le National, Valentin Lavigne (28 ans) a tout connu. Ses blessures auraient pu le pousser à stopper sa carrière. Mais l’attaquant a continué par « passion du foot ». Entretien riche avec un homme épanoui et un joueur accompli.

Photo FC Fleury 91

Dans le bus qui emmène les joueurs et le staff de Fleury à Belfort (l’entretien a eu lieu vendredi), l’ambiance est joyeuse. Valentin Lavigne nous donne rendez-vous pour un peu plus tard. A ses côtés dans la chambre d’hôtel, le buteur Anthony Petrilli. Le lendemain, Fleury concédait sa première défaite de la saison (3-0) et perdait sa place de leader du groupe de National 2.

International U20, buteur lors de son premier match de L1 avec son club formateur Lorient en août 2014 à Monaco (2-1), le Breton (28 ans aujourd’hui), qui compte 21 matchs de L1 (3 buts) et 47 de L2 (3 buts) avec Lorient, Brest, Laval et le Paris FC, était destiné à une toute autre carrière.

Mais les blessures l’ont ralenti. L’attaquant, qui a ensuite rebondi en National à Concarneau et Saint-Brieuc (78 matchs, 14 buts) se dit pourtant « ni aigri ni revanchard ». « Je suis juste heureux de me réveiller tous les matins pour aller jouer au foot », confie celui qui a choisi cet été de redescendre d’un niveau en signant un contrat de 2 ans à Fleury. Généreux et altruiste sur le terrain, toujours de bonne humeur, c’est le coéquipier presque idéal…

« Ce que fait Concarneau, c’est juste magnifique ! »

Sous le maillot du Stade Lavallois. Photo Philippe Le Brech

Avec neuf buts marqués, vous avez réussi votre plus belle saison sur le plan statistique avec Saint-Brieuc l’an dernier en National. Pourquoi avez-vous signé en National 2 à Fleury ?
Je sais que ce choix a étonné beaucoup de monde. J’avoue que si j’avais eu des propositions en L2, j’y serais allé. Mais ça n’a pas été le cas. J’ai eu des opportunités dans des clubs de National. Mais si c’était pour jouer en National, je serais resté à Saint-Brieuc où j’étais très bien. Mais venir en région parisienne, c’est d’abord un choix de vie. J’avais vraiment passé une bonne année quand j’étais au Paris FC. Fleury m’a contacté très tôt; ça me tentait bien de revenir en région parisienne et de voir autre chose que la Bretagne, même si j’y retournerai. Ma compagne va aussi avoir plus d’opportunités pour son travail de community manager. On n’a pas encore d’enfant. C’était le bon moment pour profiter de la dynamique de Paris. On habite juste à côté, à Châtillon (Hauts-de-Seine). Mais attention, je ne suis pas venu ici juste pour me promener à droite à gauche. Je reste focalisé à fond sur le foot.

Comment s’est passée la transition avec le National et la Bretagne ?
Très bien. On a des longs déplacement en bus pour aller jouer dans l’Est mais sincèrement, je kiffe à fond ! A Saint-Brieuc, les gens étaient au top humainement, mais ça restait quand même parfois compliqué au niveau des structures. A Fleury, on est vraiment mis dans un certain confort. Les installations sont dignes d’un bon club de National ou de L2. Il y a un bon projet ici ! Le président Pascal Bovis est passionné, proche de ses joueurs et cherche à monter en National depuis des années. Je suis persuadé que tout est réuni pour qu’on fasse une bonne saison.

« Je veux retrouver le National avec Fleury »

Sous le maillot du FC Lorient. Photo Philippe Le Brech

Vous avez rejoint une équipe où le noyau dur (Petit, Sert, Gamiette, Enzo Bovis, Sery, Sanches, Petrilli…) est présent depuis plusieurs années…
Il n’y a que des bons mecs dans ce groupe ! Dès mon arrivée, j’ai ressenti une bonne alchimie. Avec Théo Bloudeau qui vient également de Saint-Brieuc, on essaye d’ajouter notre expérience à cette équipe qui se connaît déjà bien. Je pense que le club applique la bonne méthode pour monter. Un noyau dur qui est déjà habitué à jouer ensemble avec 3 ou 4 recrues comme moi. J’ai signé deux ans. Je veux retrouver le National avec Fleury.

Le 22 octobre dernier contre Wasquehal, vous avez-vécu un moment très fort. Racontez-nous…
On était mené 3-0 chez nous à la mi-temps. Anthony (Petrilli) marque le but de l’égalisation à la 87e. Et moi celui du 4-3 à la 96e minute… C’était une émotion incroyable. La célébration, la communion avec les copains et les gens dans le stade, c’était magnifique. C’est pour vivre de tels moments que je joue au foot. C’est certes de la N2 mais j’ai ressenti autant de joie que pour mes buts en L1 ou en National. Le foot, les émotions, ce n’est pas juste qu’une question de niveau. Gagner de cette manière, était déjà inespérée. Et moi, c’était mon premier but avec Fleury. Je joue plutôt relayeur en ce moment, je n’ai jamais été un joueur qui était obnubilé par ses « stats » mais ça fait quand même plaisir de signer mon arrivée à Fleury de cette manière.

« Je ne suis ni frustré, ni aigri ! J’aime le foot ! »

Photo FC Fleury 91

Vous nous racontez tout ça avec beaucoup d’enthousiasme et de passion. Il n’y a quand même pas une pointe de regrets chez vous de vous retrouver aujourd’hui en National 2 à 28 ans ?
Les gens me posent souvent cette question. Il me disent, après ce que tu as connu, la L1, les stades pleins, etc., ce n’est pas trop dur ? Ils sont surpris et parfois bluffé de me voir dans cet état d’esprit, épanoui et heureux. C’est certain qu’à ma place, avec le même parcours que moi, la L1 à 20 ans puis les blessures, beaucoup auraient arrêté le foot. Mais moi, je n’ai jamais été dans le doute. Je ne me suis jamais posé cette question. Que ce soit en L1, L2, National, N2 ou même encore plus bas, je prendrai toujours du plaisir à jouer au foot. J’aime le foot en général. Ce qui me fait vibrer c’est d’être sur un terrain tous les jours, d’aller m’entraîner tous les matins. Je ne suis ni frustré ni aigri même si je joue aujourd’hui à un niveau moins huppé que la L1.

Quand vous repensez à vos débuts en L1 avec Lorient, vous vous dites quoi ?
Que je vivais alors dans un monde parfait. Mais c’était un peu celui des bisounours… Je jouais en L1 dans le club de ma ville où j’avais été formé. J’avais une belle vie, j’étais insouciant et je n’avais pas aucun problème. Mais je ne connaissais que les bons côtés du foot et de la vie. Je ne vais pas dire que ma première blessure a été un mal pour un bien… Mais elle m’a fait grandir. Mon parcours m’a fait grandir. J’ai compris que le foot était un vrai métier. Ça peut paraitre surprenant mais dans ma tête et mes attitudes, je suis beaucoup plus pro aujourd’hui alors que je joue en N2 que quand j’étais en L1. Je ne regrette pas mon parcours. Avant, j’étais un peu trop sage, trop propre sur moi. Je n’avais pas la dalle. Tout ce que j’ai vécu m’a endurci et m’a fait comprendre des choses.

« Loïc Landre ? Il n’a rien compris, c’est malheureux pour lui… »

Sous le maillot du Stade Briochin. Photo Philippe Le Brech

En voulez-vous à Loïc Landre qui a brisé votre ascension quelques mois après vos débuts en L1 en vous blessant gravement au genou gauche sur un tacle ?
Je ne lui en veux même pas.. Si un peu quand même. Il avait pris huit matchs de suspension. Mais il a récidivé ensuite… Il a blessé d’autres joueurs comme Youssef Atal (Nice). Ca montre que lui, n’a rien compris, qu’il n’a tiré aucune leçon après m’avoir fait ce tacle. C’est malheureux pour lui.

Vous avez connu le monde pro et maintenant les amateurs. Où avez-trouvé le plus de franchise ?
Chez les pros, j’ai vécu des injustices. Il y a forcément plus de franchise dans les rapports humains chez les amateurs. On se dit peut-être plus facilement les choses. Moi j’ai aussi mon caractère. Je suis plutôt entier, pas lisse. Je n’ai jamais joué un rôle pour plaire aux autres ou à un entraîneur. Si je suis autant épanoui aujourd’hui, c’est que l’état d’esprit qui règne dans un club amateur me correspond peut-être davantage.

« J’ai toujours raisonné en termes de collectif »

Sous le maillot de l’US Concarneau. Photo Philippe Le Brech

Vous donnez l’impression de toujours vous fondre dans les groupes où vous êtes passé ?
C’est mon éducation qui m’a donné ce goût d’aller vers les autres, de partager. Sur un terrain, cela ne m’a jamais déranger de courir et de me dépenser pour faire briller le copain.

J’ai toujours raisonné en termes de collectif. Le foot, c’est aussi de l’humain, des rencontres, des découvertes, des voyages. C’est tous ses côtés que j’apprécie aussi. Partout où je suis passé, j’ai noué de belles relations et j’ai essayé de laisser une belle image de moi.

Un petit mot sur un de vos anciens clubs, Concarneau qui est en tête du National…
Chaque vendredi, je regarde les matchs de Concarneau et Saint-Brieuc sur FFF TV. Ce que fait Concarneau, c’est juste magnifique. Je prends un plaisir énorme à les regarder jouer.

Il faut saluer le travail du coach Stéphane Le Mignan. Il a réussi à concerner tout son groupe, même ceux qui jouent moins. Quand un coach arrive à créer une telle alchimie, il a tout gagné.

Valentin Lavigne, du tac au tac

« J’ai toujours apprécié faire la Madjer ! »

Première fois dans un stade ?
Évidemment le Moustoir ! J’ai commencé à 6 ans le foot au FC Lorient et j’y ai connu mes premiers match ! Même si j’allais souvent à Chaban-Delmas voir les Girondins car j’avais de la famille en Gironde.

Avec le Stade Briochin la saison passée en National. Photo Philippe Le Brech

Meilleur souvenir de joueur ?
Forcément mes buts en Ligue 1 qui étaient des moments magnifiques. Mais je dirais que mes meilleurs souvenirs restent liés au centre de formation à Lorient. On avait une vraie bande de potes, c’était incroyable !

Pire souvenir de joueur ?
Sans hésiter ma blessure contre Lens le 22 novembre 2014 après un bon début de saison à Lorient en ligue 1. Je me blesse devant ma famille, c’était un moment compliqué.

Une manie, une superstition ?
Plus jeune j’adorais prendre un bain chaud l’après midi avant les matchs. C’est le truc à ne pas faire (éclats de rires)… Mais bon, j’ai arrêté depuis.

Le geste technique préféré ?
La Madjer ! J’ai toujours apprécié faire ce geste , que ce soit pour marquer ou dans le jeu.

Avec l’US Concarneau en National en 2019. Photo Philippe Le Brech

Qualités et défauts sur un terrain ?
Je dirais généreux… Courir et me sacrifier pour les autres n’a jamais été un problème. Mais justement, des fois je suis trop généreux et je ne pense pas assez à moi, surtout offensivement. J’ai toujours préféré faire une bonne passe que de marquer un but. Sinon je dirais, un peu nerveux, même si je me suis calmé !

Ton plus beau but ?
Je ne pense pas que ce soit le plus beau. Mais c’était évidemment le plus important , celui contre Monaco, le 10 août 2014 lors de la première journée de Ligue 1 sur Canal + a 21h. Je rentre à la 81e minute, ce sont mes débuts en L1 et je marque à la 87e minute. On gagne 2-1 là-bas.

Le joueur le plus fort que tu as affronté ?
Au vu de ce qu’il fait maintenant : Mbappé. Mais à l’époque il était à Monaco et ne jouait pas trop. Donc je dirais Pogba. En équipe de France U20, on avait joué contre les espoirs et on avait pris une jolie fessée.

Le joueur le plus fort avec qui tu as joué ?
Je vais avoir du mal à en nommer d’un seul .. Je dirais Seko Fofana et Mario Lemina. En jeunes, ils étaient déjà très forts et en pro, Raphaël Guerreiro, toujours simple mais très efficace.

Photo FC Fleury 91

L’entraîneur ou les entraîneurs qui t’ont marqué ?
Beaucoup d’entraîneurs m’ont marqué , sachant que je fonctionne pas mal à l’affect ! A Lorient, j’ai eu de très bons formateurs comme Pierrick Le Bert , et j’ai eu la chance d’avoir Julien Stéphan et Franck Haise aussi ! Dans le monde pro, ce serait Christian Gourcuff et Sylvain Ripoll. J’ai été éduqué à bien jouer au foot et c’était un vrai plaisir !

L’entraîneur que tu ne voudrais pas retrouver ?
Ah ah bonne question ! Je ne fais pas trop de langue de bois , donc je dirais Denis Zanko connu à Laval et Fabien Mercadal au Paris FC (désolé je sais que vous l’appréciez à 13heuresFoot !). J’étais prêté par Lorient au Paris FC et j’ai bien senti que je n’étais que de passage … Ça n’a pas collé.

Le club où tu n’aurais pas dû signer ?
Laval. Je revenais de 8 mois de blessure. J’étais hors de forme et je n’étais prêté que 5 mois … Quand j’y repense, c’était impossible que ca fonctionne. J’aurais dû rester à Lorient et retrouver du rythme petit à petit.

Sous le maillot du FC Lorient. Photo Philippe Le Brech

Le club, l’équipe où tu as pris le plus de plaisir ?
Lorient ! Depuis que j’ai 6 ans jusqu’à 24 ans, j’ai évolué sous les couleurs des Merlus. Je connais le club, la ville, les éducateurs par cœur ! C’était magnifique. J’ai pris aussi énormément de plaisir à Saint-Brieuc, avec les moyens qu’on avait, on a fait de très bonnes choses ! Les gens sont très gentils, c’est un club saint !

Ton club ou tes équipes préférées ?
Je n’ai jamais été supporter d’une équipe spécialement, mais j’aime bien suivre les clubs parmi lesquels je suis passé.

Ton joueur ou tes joueurs préférés ? Un modèle ?
J’aimais beaucoup Eden Hazard quand il était à Chelsea. Sinon Kevin de Bruyne, je suis fan !

Un stade mythique ?
J’ai joué au Vélodrome et c’est vrai que c’est impressionnant !

Sous le maillot du Stade Brestois. Photo Philippe Le Brech

Bretagne ou Région Parisienne ?
Je suis obligé de dire la Bretagne, j’y ai toute ma famille et je pense que j’y retournerai plus tard !

Mais j’ai toujours aimé la vie parisienne. C’était déjà un kiff quand j’étais au Paris FC et je profite encore plus aujourd’hui à Fleury

Le milieu du foot, en deux mots ?
Il faut le vivre de l’intérieur pour le comprendre.

Combien d’amis dans le milieu du foot ?
Énormément, je me suis toujours bien intégré dans tous les clubs où je suis passé.

Activités pratiquées en dehors du foot ?
J’adore le sport en général, donc j’en pratique énormément, mais en ce moment je dois avouer qu’on joue énormément au ping pong avec Antoine Petit notre gardien, au grand désarroi de notre prépa physique à Fleury !

Texte : Laurent Pruneta / Mail : lpruneta@13heuresfoot.fr / Twitter : @PrunetaLaurent

Photos : Philippe Le Brech et FC Fleury 91