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Le coordinateur sportif de La Berrichonne, son club de cœur, revient sur ses passages à Saint-Etienne et à Orléans, où il a occupé les postes de scout et de directeur sportif. Deux expériences dont il se sert aujourd’hui au sein du groupe United World, propriétaire de La Berrichonne depuis mars 2021. Rencontre avec un garçon multi-fonctions.

Photo La Berrichonne de Châteauroux

Dans une autre vie, Julien Cordonnier aurait pu être « instagrameur » ! Tous ceux qui sont abonnés à son compte, les « followers » comme nous, ont suivi ses nombreuses tribulations grâce au réseau social quand, pendant ses récentes années de scouting à l’AS Saint-Etienne, on l’a vu multiplier les « stories » au volant, en avion, en train, dans un stade, puis dans un autre stade, souvent à l’étranger.

C’est juste que le natif de Chartres (Eure-et-Loir) a « kiffé sa life » au sein de la cellule de recrutement du club stéphanois, pendant trois ans et demi, après son expérience à l’US Orléans et avant son retour, en 2021, à La Berrichonne de Châteauroux, le club de son coeur, là où il a disputé son premier match en pro, voilà un peu plus de 20 ans.

A 42 ans, l’ancien joueur de La Berrichonne donc, et aussi de Beauvais (D2), Neuchâtel Xamax (D1 suisse), Clermont (National et Ligue 2), Châteauroux encore (D2) et enfin Orléans (National) est de retour chez lui et « kiffe » toujours sa « life », dans un rôle différent.

Fini les stories ! Fini les nombreux et incessants déplacements dans les stades des pays voisins ou dans l’Hexagone, à tenter de dénicher la perle rare ou à suivre l’évolution d’un joueur ciblé, une « target » comme on dit dans le jargon.

Aujourd’hui, « Cordo » comme certains l’appellent, occupe le poste de coordinateur sportif. Un rôle finalement très proche de celui qu’il a occupé dans le Loiret pendant quatre ans et demi (déc. 2012 – 2017), lorsqu’il a mis fin à sa carrière de joueur, après une blessure au tendon d’Achille, en novembre 2012.

Quelques heures avant la venue du FC Versailles au stade Gaston-Petit, vendredi dernier (défaite 1 à 0), Julien est revenu sur ses débuts et sa carrière de joueur, son après-carrière et sur les différents postes qu’il a déjà occupés dans le football.

« Châteauroux, c’est spécial pour moi ! »

A ses débuts, sous le maillot de La Berrichonne. Photo Philippe Le Brech.

Julien, peux-tu, brièvement, retracer ton parcours de joueur ?
J’ai commencé le foot à Bailleau-le-Pin, tout près de Chartres, puis j’ai intégré le club de ma ville, Chartres, en U15, où je suis resté un an avant de partir à Saint-Jean-de-la-Ruelle en banlieue d’Orléans en 17 ans Nationaux.

Ensuite, j’ai eu l’opportunité d’aller à Cannes mais j’ai choisi La Berrichonne, qui m’avait suivi pendant ma saison à Saint-Jean-de-la-Ruelle, durant laquelle j’avais déjà intégré le sport-études de Châteauroux.

Je suis arrivé au club juste avant l’accession et la saison en Division 1 de la Berrichonne, qui a été fabuleuse même si le club est redescendu immédiatement.

A mes débuts, j’étais milieu de terrain mais au fil du temps, et comme je n’étais pas non plus rapide, je me suis installé à un poste de défenseur central qui correspondait mieux à mes qualités.

« Les projets sportifs sont toujours collectifs »

A la fin de ta carrière de joueur, tu as directement basculé sur un poste de directeur sportif à Orléans : était-ce prévu ? Avais-tu envisagé de rester dans le foot ?
Oui. J’ai toujours été intéressé par les différentes facettes d’un club, particulièrement le recrutement et l’organisation d’un projet sportif. J’avais ce désir d’intégrer un club sur un poste comme celui-là. A Orléans, je me suis blessé et après avoir échangé avec les deux présidents, Philippe Boutron et Claude Fousse, on a trouvé un accord pour résilier mon contrat et embrayer sur un poste de directeur sportif. Au départ, je voulais faire la formation à Limoges mais comme à Orléans, en termes de ressources humaines, le club était limité, et qu’il y avait un gros travail de restructuration à faire, j’ai commencé tout de suite, comme ça. J’ai appris sur le terrain. J’ai d’abord eu six mois, de décembre 2012 jusqu’en fin de saison 2013, pour observer le fonctionnement du club. Ensuite, j’ai véritablement basculé sur le poste.

Quelles étaient les missions exactes ?
Elles étaient très larges, ça allait de l’équipe première jusqu’à la restructuration des jeunes, la post-formation, la pré-formation, la partie recrutement, les négociations, les relations avec les staffs techniques; ça a été très formateur.

Les objectifs ont-ils été atteint ?
Oui. L’équipe première est monté en Ligue 2 en 2014 avant de redescendre puis de remonter immédiatement en 2016; ça a été une vraie réussite professionnelle individuelle et collective car je pars toujours du principe que les projets sont toujours collectifs. Après, on avait d’autres objectifs au niveau de l’équipe réserve, des jeunes et aussi du secteur féminin, que l’on souhaitait développer. Au bout de mes quatre ans à la direction sportive, en 2017, la réserve était montée en National 3, les équipes de jeunes U17 et U19 avaient retrouvé le niveau national et les filles venaient d’accéder en Division 2, donc les choses ont été bien faites. Mais comme cela arrive parfois, il y a eu des divergences, et quelques incompréhensions, donc on a préféré stopper la collaboration plutôt que de détériorer les relations qui étaient très bonnes avec mes dirigeants.

« Découvrir un joueur, c’est fascinant ! »

Sous le maillot de l’US Orléans. Photo Philippe Le Brech.

Depuis, Orléans est retombé en National : est-ce que cela ne te fait pas mal et quelle est la véritable place du club ?
Je respecte toujours les clubs où je suis passé. Avec Orléans, on était sur une voie ascendante, on voulait aussi faire de la vente de joueurs, afin de constituer des fonds propres. Alors bien sûr, aujourd’hui, voir le club en National, voir le centre de formation fermé, ça me fait quelque chose. Mais c’est la vie d’un club de connaître des difficultés.

Pour moi, clairement, Orléans à la possibilité d’être un club « moyen » de Ligue 2, qui doit jouer entre la 10e et la 12e place, ce qui avait été fait quand on a intronisé Didier Ollé-Nicolle au poste d’entraîneur, lequel avait permis au club de s’installer en Ligue 2, malheureusement, les relations entre sa direction et lui se sont dégradées.

J’avais travaillé avec Oliver Frapolli puis ensuite on a fait le choix de partir avec Didier Ollé-Nicolle, que j’avais eu comme coach pendant deux ans à Clermont, mais je suis parti d’Orléans quand il est arrivé. Donc on n’a pas travaillé ensemble.

Après Orléans, tu as donc travaillé pour Saint-Etienne…
J’ai été sollicité par David Wantier, le responsable du recrutement, et Dominique Rocheteau, le directeur sportif, pour intégrer la cellule recrutement en tant que scout. Je connaissais déjà David, qui avait été agent, et avec lequel on avait été amené à « bosser » sur des joueurs, comme Loïc Puyo par exemple. Ce poste à Saint-Etienne, c’est vraiment quelque chose qui m’intéressait, et c’est pour ça que j’ai beaucoup bougé et vu de nombreux stades, ça fait partie du job. Bon évidemment, aujourd’hui, à la Berrichonne, je suis beaucoup plus présent sur place. C’est différent.

« Le foot, c’est la passion »

Photo La Berrichonne de Châteauroux

On ne se trompe pas si on dit que ce poste de « scout », c’est vraiment quelque chose que tu adorais ?
J’adore ça, oui ! J’adore dénicher des joueurs ! C’est une facette du métier que j’ai découvert à « Sainté », où j’allais voir des matchs, où j’ai découvert beaucoup de pays (Portugal, Grèce, Suisse, Serbie, Danemark, etc.), où j’ai « scouté » de nombreux championnats, vu des football et des profils de joueurs différents, ce fut très enrichissant. Je pars du principe que le foot, c’est la passion. Mais ce poste était aussi fatigant, la voiture, les avions, le train… Et puis y’a pas que les matchs ! Les gens pensent qu’on va juste dans des stades mais derrière, il y a un gros travail à faire, avec des rapports à rédiger, du suivi. Cette facette du football me fascine !

Combien de matchs allais-tu voir par semaine ?
En live, je voyais entre 4 et 5 matchs par semaine, sans compter la partie vidéo, ce qui faisait 230 à 240 matchs en « live » par saison. Après, à Saint-Etienne, on avait une méthode de travail avec deux parties : d’abord, les six premiers mois, on voyait le maximum de matchs qu’on dégrossissait, et ensuite, en deuxième partie de saison, c’était plus spécifique, on travaillait sur le visionnage des « target » (joueurs ciblés), des profils susceptibles de nous intéresser, et là, le suivi devenait plus approfondi. Y’a un côté fascinant de découvrir un joueur, de pouvoir en identifier un capable de s’intégrer dans le club où vous travaillez, mais c’est un travail de fourmi car il faut prendre en considération le contexte et plein de critères différents.

A qui rendais-tu tes rapports ?
J’ai connu trois coachs à Saint-Etienne. Le premier, c’était Jean-Louis Gasset, mais mes rapports, je les communiquais à David Wantier; on avait des réunions fréquentes sur site également. Puis j’ai connu Ghislain Printant, qui n’est pas resté longtemps, dont la méthodologie était un peu la même que celle de Jean-Louis Gasset. Ensuite, cela a a été complètement différent avec l’arrivée de Claude Puel. Avec Claude, c’était en direct. On lui proposait les joueurs et comme il avait le titre de manager général, il était le décisionnaire du sportif et même du financier. Il sent le football. C’est un formateur. Il aime prendre les décisions. C’est un personnage. J’ai appris sur la rigueur et l’exigence avec lui. Quand David Wantier est parti, Claude m’a confié la direction de la cellule recrutement pendant quelque temps, c’est aussi un gage de reconnaissance de mon travail, donc rien que pour ça, j’ai énormément de respect pour lui.

« La Berrichonne est entrée dans une nouvelle ère »

Photo La Berrichonne de Châteauroux.

Pourquoi avoir fait le choix de partir après trois ans et demi à Saint-Etienne ?
J’ai fait le choix de démissionner pour rejoindre le projet du groupe saoudien United World à Châteauroux, qui m’a sollicité via Patrick Trotignon (directeur général) et Michel Denisot (président), pour intégrer la structure. La Berrichonne a toujours eu une place particulière dans mon coeur. En fait, à Saint-Etienne, on avait du mal à investir dans des joueurs, je sentais que le projet battait de l’aile, que ça devenait de plus en plus difficile au niveau du recrutement. Pour moi, le club n’avait plus les moyens de ses ambitions. Du coup, j’ai eu du mal à me faire à cette situation et j’ai préféré démissionner. Il y a eu aussi le projet de Châteauroux qui s’est présenté. Châteauroux, c’est spécial pour moi. Le défi est passionnant. Travailler sur un aspect différent, cela m’intéressait.

Du coup, c’est la troisième fois que tu arrives à La Berrichonne !
Oui, il y a un côté sentimental aussi. Je crois en ce projet. Il y a matière à retrouver la Ligue 2. C’est l’objectif. La saison passée, j’étais directeur du recrutement et aussi scout pour les clubs filiales (Sheffield United en Angleterre et Beerschot Anvers en Belgique) et cette année, en accord avec la direction à Châteauroux et avec les dirigeants du groupe United Word, j ai pris le poste de coordinateur sportif de l’équipe professionnelle.

C’est quoi la différence entre directeur sportif, comme le poste que tu as occupé à Orléans, et coordinateur sportif ?
Il n’y en a pas beaucoup… Les titres, ça veut tout et rien dire. Aujourd’hui, j’ai ce titre-là, mais ça regroupe les missions que j’avais à Orléans. Elles sont les mêmes à ceci près que La Berrichonne, qui est entrée dans une nouvelle ère, appartient à un groupe et que, donc, la façon de travailler est différente.

« Peut-être que, l’an passé, on s’est dit que ça allait glisser tout seul… »

L’objectif, c’est évidemment la montée en Ligue 2…
Ces dernières années, le club était arrivé au maximum de ses possibilités. Le club a très bien travaillé pendant longtemps, en se maintenant en Ligue 2, mais on sentait qu il était « border line » sur les deux ou trois derniers exercice en L2, et malheureusement il est descendu en National il y a un an et demi, comme ça peut arriver quand on frôle la relégation. L’arrivée des Saoudiens et du groupe United World doit redynamiser l’ensemble du club qui peut s’appuyer sur un actionnaire fort, ce qui a permis de conserver une structure de Ligue 2. Malgré tout, on s’aperçoit qu’il manque des choses pour accrocher la montée. On l’a vu la saison passée. On espère régler ces choses-là pour accéder cette année en Ligue 2 mais y’a 10 équipes qui veulent monter …

Sous le maillot de Clermont Foot. Photo Philippe Le Brech.

La saison passée, justement, le recrutement de La Berrichonne avait suscité de nombreuses réactions en National, un peu comme Versailles cette saison : après-coup, ne te dis-tu pas que c’était un peu « too much » ?
L’an passé, on disait qu’on était le PSG du National. Donc forcément, y’a eu beaucoup d’attente autour du club, ce qui est légitime, compte tenu du rachat par le groupe United World et de l’arrivée de garçons d’expérience, mais on n’a pas réussi à faire la bascule sur certains matchs importants.

On était attendu chaque week-end, et peut-être que, par moments, parce qu’on était Châteauroux et qu’on avait des bonnes individualités, on s’est dit que ça allait glisser tout seul.

Le National, je l’ai toujours dit, c est le championnat de l’humilité, et peut-être que l’an passé, tous ensemble, on en a manqué.

On a appris des erreurs de l’an passé, où on avait un groupe trop élargi; cette saison, on l’a réduit à 23 joueurs et trois gardiens de but. On a aussi intégrer quelques jeunes. On est revenu à des proportions normales, à quelque chose de plus structuré et cohérent, qui doit nous permettre d’avoir un groupe où tous les joueurs sont concernés par l’objectif même si, bien sûr, certains joueront plus que d autres, mais ça, c’est la vie du footballeur.

A Orléans, tu as connu deux accessions de National en Ligue 2, donc tu sais les ingrédients qu’il faut mettre…

Ce qui a fait notre force à Orléans, c’est la cohésion de groupe. Bien sûr qu’il y avait des bons joueurs aussi mais on dégageait une vraie force collective, avec des joueurs « plus » comme Pépé, Aholou, Gomis, N’Goma et d’autres. Et les garçons se sont accaparés le projet. On sentait une force, même quand on était moins bien, et je pense que c’est la clé de la réussite d’une saison, à tous les niveaux. Si tu as des bonnes individualités mais que tu n’arrives pas à créer un vrai collectif, une vraie équipe, alors tu vas faire un bon championnat, OK, mais tu n’auras pas les résultats escomptés. Pour réussir un tel projet, il faut aussi que toutes les planètes soient alignées et je ne parle pas que de l’équipe, je parle au niveau du club dans son ensemble.

Julien Cordonnier, du tac au tac

Photo Philippe Le Brech.

Ton meilleur souvenir sportif ?
Mes deux saisons à Clermont Foot, en National et en Ligue 2. On avait une équipe qui, sur le plan humain, était très soudée, d’ailleurs, on s’appelle régulièrement avec les anciens de cette époque.

Pire souvenir sportif ?
La descente en D2 avec Neuchâtel Xamax lors de ma deuxième saison là-bas, c’était contre Sion.

Un geste technique ?
Le jeu long. J’estime que c’est un geste qui, aujourd’hui, disparaît de plus en en plus alors que c’est un moyen de déstabiliser une équipe.

Qualités et défauts sur un terrain ?
Comme je te l’ai dit, je n’étais pas un joueur qui allait vite, je manquais de vitesse, mais j’étais dans l’anticipation, j’avais une bonne relance et, entre guillemets, une intelligence de jeu. J’étais surtout un gros compétiteur et parfois capable de péter les plombs.

Le club où tu n’aurais pas dû signer ?
Il n’y en a pas eu, non.

Le club où tu as failli signer ?
Quand j’étais à Beauvais, en D2, j’avais fait une grosse saison, et j’avais été sollicité par Lille, qui était entraîné par Claude Puel.

Le club où tu aurais rêvé de jouer ?
J’ai toujours eu des rêves mesurés mais si je devais en citer un, je dirais Saint-Etienne, mais je n’ai pas pu y jouer !

Ton premier match en pro ?
Contre Le Mans avec Châteauroux, en D2 (le 12 août 2000, ndlr).

Le stade qui t’as le plus impressionné ?
Geoffroy-Guichard (Saint-Etienne) et Bollaert (Lens), pour leur ferveur.

Le joueur adverse qui t’a le plus impressionné ?
Olivier Giroud quand il était à Tours, et aussi Sebastian Ribas, quand il était à Dijon. Ils étaient vraiment au-dessus et avaient une énorme confiance en eux.

Le coéquipier avec lequel tu as pris le plus de plaisir à jouer ?
J’ai adoré jouer avec Benjamin Nivet, il puait le foot, et aussi Florent Malouda. Mais j’ai vraiment apprécié jouer aux côtés de Kevin Constant, qui avait un talent fou. J’ai joué avec lui à Châteauroux, avant qu’il ne parte au Milan AC. Il ne se rendait pas compte du talent qu’il avait. On a eu des accrochages parfois mais quel talent !

Un coach perdu de vue que tu aimerais revoir ?
Miroslav Blazevic, qui a été mon coach en Suisse.

Un coach que tu n’as pas forcément envie de revoir ?
Aucun même si avec Thierry Froger, au début de ma carrière, ça a été très compliqué, et avec le temps, tu prends du recul, tu analyses les choses, on a rediscuté, on a eu des échanges, donc même s’il m’a fait la misère, je ne suis pas rancunier, je n’ai aucune animosité envers lui.

Un président marquant ?
Claude Michy à Clermont. Il a fait de son club une très belle machine. C’était difficile de négocier les salaires et les primes avec lui. Si Clermont tient une place importante aujourd’hui dans le foot, il y est pour beaucoup.

Un président avec qui ça n’a pas matché ?
Sylvio Bernasconi, le président de Neuchâtel, la deuxième année, je n’avais pas du tout accroché, contrairement à Alain Pedretti, que j’avais eu la première année, un mec exceptionnel.

Le joueur le plus connu de ton répertoire ?
J’en ai pas mal, Savidan, Pépé, et d’autres…

Une devise ?
Pas une devise, plutôt un principe : je pense qu’il ne faut jamais rien regretter donc pour ça, il faut s’imposer un volume de travail très important.

Une idole de jeunesse ?
Le joueur que j’ai adoré, c’est Paolo Maldini : il regroupait toutes les qualités du défenseur central et il avait la classe. Parfois, en rigolant, je disais, « à défaut d’être bon sur le terrain, il faut être beau », alors je faisais attention à mon look sur le terrain (rires) !

Tu mettais déjà du gel sur les cheveux à l’époque ?
Et oui, c’est ma marque de fabrique ! Mon épouse ne m’a jamais vu sans gel !

Le milieu du foot, en deux mots ?
Un monde particulier, où il faut faire un peu de politique, être un peu faux-cul.

Texte : Anthony BOYER / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06

Photos : Philippe Le Brech et La Berrichonne de Châteauroux

Photo de couverture : La Berrichonne de Châteauroux

Vous avez loupé un épisode de la série « 13heuresfoot » cette semaine ? Voici la séance de rattrapage !

  • Samedi 5 novembre 2022

Guillaume Norbert, le chef de chantiers
https://13heuresfoot.fr/actualites/guillaume-norbert-le-chef-de-chantiers/
L’ancien joueur pro de Nantes, Angers et Lorient, a rejoint son père-président au Racing-club de France en 2019, qu’il a fait grimper de N3 en N2. Chef d’entreprise à la vie dans le secteur du bâtiment, il revient sur ses nombreuses expériences et explique comment il gère sa double-casquette.

  • Vendredi 4 novembre 2022

Romain Hamouma : « Mon passage en amateur a été une véritable bouffée d’oxygène »
https://13heuresfoot.fr/actualites/romain-hamouma-mon-passage-en-amateur-a-ete-une-veritable-bouffee-doxygene/
Avant de devenir un excellent joueur de Ligue 1 à Caen et à Saint-Etienne, et depuis cette saison à Ajaccio, l’attaquant non conservé au centre de formation de Sochaux a connu le « monde amateur » à Besançon en CFA, où il s’est révélé à l’âge de 21 ans et où il s’est construit. Itinéraire d’un garçon qui n’a jamais lâché.

  • Jeudi 3 novembre 2022

Joël Lopez : « Il y a toujours eu un potentiel football à Pau »
https://13heuresfoot.fr/actualites/joel-lopez-il-y-a-toujours-eu-un-potentiel-football-a-pau/
Le vice-président du Pau FC (Ligue 2), habituellement discret dans les médias, a accepté de balayer l’actualité de son club. Derrière un discours réaliste, mesuré, réfléchi et lucide se cache une envie de performance et de progression. Paroles d’un sage qui aime la compétition.

  • Mercredi 2 novembre 2022

Mustapha Sangaré (FC Borgo) : le parcours d’un combattant
https://13heuresfoot.fr/actualites/mustapha-sangare-fc-borgo-le-parcours-dun-combattant/
Prêté par Amiens (L2) au FC Borgo (National) début octobre, Mustapha Sangaré, 23 ans présente un parcours plutôt singulier.
Après avoir débuté le foot en club à 16 ans et évolué en District, il avait signé son premier contrat pro à Amiens en novembre 2020 alors qu’il était éducateur sportif tout en évoluant au Racing (N3). Quelques semaines après son premier match de L2, il a été stoppé de longs mois par des soucis au dos, causés par une bactérie.

  • Mardi 1er novembre 2022

Coupe de France / Heillecourt (Reg. 2) … mais pas trop vite non plus !
https://13heuresfoot.fr/actualites/regional-2-heillecourt-mais-pas-trop-vite-non-plus/
L’équipe de la banlieue nancéienne, chantre de la stabilité, a dit adieu à la coupe de France ce week-end, éliminé par Epinal au 7e tour, et va pouvoir se concentrer sur son objectif : l’accession en R1.

  • Lundi 31 octobre 2022

National 3 : Aigues-Mortes, uni dans l’effort !
https://13heuresfoot.fr/actualites/national-3-aigues-mortes-uni-dans-leffort/
A la pointe du Gard, la petite bourgade de 9 000 habitants est réputée pour ses remparts, ses salins, ses courses camarguaises et, depuis peu, pour son équipe de football de National 3 où esprit familial, fidélité et stabilité sont les maîtres mots.

  • Samedi 29 octobre 2022

Vire (N3) : Christophe Lécuyer, le président journaliste !
https://13heuresfoot.fr/actualites/vire-n3-christophe-lecuyer-le-president-journaliste/
Depuis 2014, Christophe Lécuyer (42 ans) préside à la destinée de l’AF Virois, qu’il a fait monter de Régional 2 jusqu’au sommet de la N3 normande. En parallèle, il est le correspondant de RMC pour l’Ouest de la France.

L’ancien joueur pro de Nantes, Angers et Lorient, a rejoint son père-président au Racing-club de France en 2019, qu’il a fait grimper de N3 en N2. Chef d’entreprise à la vie dans le secteur du bâtiment, il revient sur ses nombreuses expériences et explique comment il gère sa double-casquette.

A 42 ans, Guillaume Norbert a déjà vécu plusieurs carrières. Aujourd’hui, l’homme, passé par Champigny, PSG, Créteil et Arsenal chez les jeunes, et aussi Angers, Lorient, Nantes ou encore Créteil et Le Havre chez les pros, a remisé les crampons. Et porte une double-casquette : celle de chef d’entreprise dans le BTP (bâtiment et travaux publics) et de coach à succès, au Racing, en National 2 (le club est monté cette année et a repris sa place de leader samedi en battant Rennes B 5-1). Bienvenue dans la vie de Guillaume Norbert, vécue à 10 000 à l’heure !

Photo AlternisPic

Ah ça, il aurait presque un prénom et un nom à jouer dans OSS 117, Guillaume Norbert. Aux côtés des Noël Flantier, Armand Lesignac ou autres Raymond Pelletier, le patron du Racing ne dépareillerait pas.

Dans la réalité, bien loin du cadre de la fiction, le quotidien de l’ancien milieu de terrain de Nantes ou d’Angers n’en est d’ailleurs pas moins rempli et déroutant que la vie d’un espion français du siècle dernier.

Coach le matin, patron d’entreprise le soir, l’agent spécial Norbert n’a pas le temps de s’embêter. A la tête d’une boîte de dix personnes dans le BTP jusqu’à parfois tard le soir, dirigeant ses troupes de Colombes pendant les entraînements le matin et le week-end, le natif de Châtenay-Malabry, dans les Hauts-de-Seine, n’est pourtant pas du genre à se plaindre.
Au téléphone, sur les coups de 20 heures, l’ancien milieu de terrain nous demande d’ailleurs s’il peut rappeler quelques minutes après, le temps de prévenir sa femme qu’il rentrera plus tard. Une question à son l’image de l’être humain qu’il est, disponible pour évoquer sa carrière pendant trois quarts d’heure au bout d’une journée à rallonge.

« Je suis un entraîneur qui réfléchit beaucoup »

Photo : Rayane Jandau

Guillaume, le foot pour vous, on a l’impression que c’est d’abord très lié à l’Île-de-France et à votre papa…
C’est là où j’ai grandi, où j’ai appris à jouer au foot. Mon premier entraîneur, c’était mon père, avec qui d’ailleurs on a fait un beau parcours en Coupe de France en poussins, avec Champigny-sur-Marne, l’ancêtre du Red Star, le RSCC ! On avait passé plusieurs tours départementaux, le tour régional, et on avait représenté la région au tournoi national, avec les huit meilleures équipes de France. Avec notre petit club de Champigny et mon père à la tête, et mon adjoint d’aujourd’hui au Racing, Serge, qui faisait partie de l’équipe, on avait joué en lever de rideau de la finale de la Coupe, Marseille-Monaco, au Parc des Princes. On est un enfant, à dix ans, jouer là-bas, c’est inoubliable. Et c’est d’ailleurs comme ça que ça a un peu commencé pour moi.

Vous êtes repéré à ce moment-là par le PSG… Une autre étape parisienne avant le Racing aujourd’hui ! L’identification à l’Île-de-France, c’est un des fils rouges de votre carrière, avec votre père ?
Le PSG est en tribunes, et me repère. Ils m’ont suivi pendant un an à Champigny, et m’ont fait venir à 13 ans, et je suis resté quatre ans au PSG. Je suis attaché à ma région, c’est là où j’ai grandi, où j’ai vécu mes premières sensations. Après ma carrière, j’ai passé mes diplômes d’entraîneur, sans chercher à revenir dans la région en revanche. Je suis parti en Suisse entraîner avec Marco Simone à Lausanne, en cours de saison. L’équipe était dernière décrochée, à 10 points de l’équipe devant. On a fait plutôt du bon travail, on a recollé, mais sans réussir à maintenir le club. Marco voulait nous prolonger, le staff, mais ne l’a pas obtenu. A ce moment-là, j’étais dans une situation personnelle où j’étais séparé de mon ex-femme depuis 2 ans, et je me suis dit que j’allais me stabiliser pour mon fils, sans qu’il ne soit délocalisé tous les six mois. Je suis revenu en région parisienne, en travaillant dans ma société dans le bâtiment. D’ailleurs, là je suis toujours au bureau ! Ensuite le projet du Racing s’est présenté avec mon père, et le foot m’a rattrapé.

Vous avez la particularité d’avoir coupé du foot et du métier de coach pendant cinq ans, et d’avoir aujourd’hui cette double-casquette de chef d’entreprise et entraîneur ! Ca fait des grosses journées !
C’est sûr que ça fait des journées bien remplies (rires) ! Après, c’est une histoire d’amitié. J’ai un ami qui est dans le bâtiment depuis longtemps, et en faisant construire au Havre, pour les finitions, il m’avait aidé. En blaguant, on s’était dit que quand j’arrêterai on monterait peut-être une société ensemble. Finalement, on l’a fait ! Au début, c’était juste lui et moi, et puis la société s’est développée.

« Je suis heureux de pouvoir vivre ça avec mon père »

Comment menez-vous vos deux métiers de front, coach le matin, patron le soir ?
Je le vis très bien, car ce sont avant tout des aventures humaines. La société, comme je l’ai dit, c’est avec un ami, on a monté ça, on est parti de rien, on s’est fait une place là où on se trouve, c’est une belle histoire. Et le football, je vis ça avec mon père, il m’a donné sa passion du football, a été mon premier entraîneur, il m’a formé jusqu’à mes 11 ans à Champigny, c’est le moment où on se fait son bagage technique, même si d’autres choses se développent ensuite. Et aujourd’hui on se retrouve dans cette aventure au Racing. Je suis heureux de pouvoir vivre ça avec lui.

En plus, pas à un petit niveau, en N3 puis en N2 cette saison : est-ce que bosser tous les jours avec son paternel se passe bien ? Il paraît qu’il est très impliqué !
Chacun connaît son rôle, et ça se passe très bien ! C’est le président, je suis l’entraîneur. Forcément on échange, car il a une très bonne connaissance du jeu. A la fin, j’ai des choix à faire et il les a toujours respectés. Les choses se passent très bien. On a aussi la chance d’avoir des résultats, même si le Covid a stoppé des saisons depuis mon arrivée en 2019, donc ça aide ! C’est une belle aventure humaine. Et pas seulement avec lui, avec Serge (Gnonsoro) également, mon adjoint, un ami d’enfance, le staff et les joueurs, qui représentent un groupe qu’on a créé y’a deux ans. Cette saison, à 90% en National 2, c’est le même groupe que l’an passé en National 3. On a créé un lien avec eux, ils ont créé un lien entre eux, on sent une vraie cohésion. On est invaincus, avec six victoires et deux nuls.

« Retrouver le monde professionnel »

Le Racing, c’est un club historique, aux racines franciliennes. C’est drôle que vous reveniez coacher une telle entité après une telle pause. Quel est votre regard sur le RCF ?
C’est un club magnifique, avec une histoire, qui a gagné plusieurs Coupes de France, qui a été au plus haut niveau en France. C’est un club qui n’est pas à sa place aujourd’hui. Les installations étaient un peu vétustes, elles vont être mises à niveau, tout est réuni pour ramener le club là où il devrait être. Un club comme le Racing, dans une région comme la région parisienne, plus gros pourvoyeur de joueurs professionnels, juste derrière la région de Sao Polo au Brésil – j’avais lu une étude sur ça -, ça montre l’importance. Tout est réuni. Quand on parle aux gens, on sent une nostalgie, une attente de retrouver le monde professionnel. C’est notre objectif. Même si on sait que c’est ambitieux, que ce sera difficile, il faudra du temps. En tout cas on a envie de mettre toute notre énergie dans ce projet.

C’est le projet qui vous a convaincu ?
Mon père a repris le club et m’a demandé si je pouvais lui filer un coup de main comme manager général. J’étais parti de chez moi à 16 ans, j’étais à un moment de ma vie où j’avais décroché du foot, avec une stabilité, mes week-ends, mon entreprise, et je lui ai dit « ok, mais je ne serai pas là tous les week-ends ». Et puis bon, de fil en aiguille, les choses se sont faites. Un coach est parti, un autre est arrivé, je lui ai filé un coup de main en tant qu’adjoint, puis quand il n’a pas été confirmé, je me suis dit, allez, on va tenter l’aventure. Dans ma position, je passais autant de temps qu’un entraîneur, j’avais déjà coaché, j’avais les diplômes, donc autant le faire à fond.

Ca fait suite à une « première » expérience d’entraîneur chez les jeunes à Honfleur et avec Marco Simone donc !
C’était avec mon fils, vraiment chez les débutants quoi. Mais j’ai adoré, et puis je l’ai aussi entraîné au Plessis-Robinson. Ce que j’avais vécu avec mon père, j’ai eu envie de le transmettre à mon fils. Marco (Simone), c’est quelqu’un avec qui je m’entends très bien, on a passé nos diplômes ensemble. C’est un très bon entraîneur, mais il est arrivé à chaque fois en cours de saison, sans pouvoir faire son recrutement, préparer son équipe, sauf sa dernière saison à Châteauroux. Si on regarde son parcours, à chaque fois c’était difficile de mettre les choses en place.

« Arsène Wenger, un très grand entraîneur, humble bienveillant »

Vous êtes aujourd’hui entraîneur principal du Racing, après une formation avec un autre coach connu, Arsène Wenger, à Arsenal, où vous êtes parti à 16 ans tout seul. C’était comment ?
C’était une expérience de vie. J’ai signé mon premier contrat pro là-bas. Les deux premières années, j’étais stagiaire en fait. Le principe est différent de la France, je ne sais pas comment ça se passe aujourd’hui entre la France mais en Angleterre, à l’époque, tous les jeunes joueurs étaient logés à deux dans des familles, il n’y avait pas de centre de formation. Je suis tombé dans une famille anglo-italienne, avec des racines latines, donc ça tombait bien ! C’était une formidable expérience, j’ai appris l’anglais, c’est le moment où on devient un peu homme, du moins ou on croit devenir un homme, avec les premières sorties, tout ça. Puis il y avait le foot, dans un grand club, avec pratiquement que des internationaux, anglais, français, néerlandais, qui font le doublé FA Cup-Premier League. Overmars, Bergkamp, Ray Parlour, Ljungberg… J’avais 16 ans, je découvrais ça, c’était une super expérience. Et puis il y avait ce très grand entraîneur, Arsène Wenger, qui avait déjà gagné beaucoup de choses, très humble, très bienveillant. Après j’ai pris la décision de revenir en France, parce que je pensais que ce serait plus facile de démarrer pleinement ma carrière que dans un des plus grands clubs d’Angleterre.

C’est là que démarre l’autre fil rouge de votre carrière, les clubs de l’Ouest de la France, Lorient, Angers avec votre père qui y est président, puis Nantes et malheureusement les blessures… Comment voyez-vous votre carrière aujourd’hui ?
J’en garde un très bon souvenir, bien sûr. J’ai eu pas mal de blessures, j’en garde de la frustration, car il faut de la continuité, et j’ai eu des coups d’arrêt à chaque fois. Pour en revenir à ces clubs-là, à Lorient j’arrive en Ligue 1, l’année où je signe est particulière, on gagne la Coupe de France, on fait finale de la Coupe de la Ligue, mais on se retrouve relégués en Ligue 2. Et puis je pars en prêt à Créteil, je reviens quand Christian Gourcuff revient. Premier entraînement, je me blesse au genou pour trois mois… En fin de contrat l’été suivant, je pars à Angers où mon père était président depuis un an et demi, il me disait que c’était bien de le rejoindre (rires) ! Vous voyez, on est très famille, donc j’ai rejoint l’aventure. Mon frère jouait aussi, il avait fini meilleur buteur de Ligue 2 à 19 ans avec Angers. Je fais six mois là-bas.

FC Nantes Museum

Et vous partez à Nantes, autre filière du beau jeu, comme Lorient avec Gourcuff père.
Nantes, qui me suivait depuis mon passage à Lorient, fait une offre au SCO au mercato d’hiver. Il y avait un lien avec Lorient, des connexions dans les mouvements. Ils me font signer à un moment où je m’étais encore blessé (entorse au genou), j’étais sur le retour mais ils m’ont quand même pris car il ne me restait que trois semaines de convalescence. Je reprends à Auxerre, à l’extérieur, milieu droit, et le match suivant, à La Beaujoire contre le Lyon de l’époque, je joue latéral droit. On fait 2-2, je suis élu homme du match, avec une passe décisive et en étant impliqué sur le premier but. Et le mardi suivant à l’entraînement, sur un geste anodin, je me blesse au ménisque. Il y a eu des complications, qui m’ont tenu éloigné des terrains pendant plus d’un an. Ce sont des frustrations; à chaque fois il a fallu revenir. J’ai réussi, je reprends comme titulaire contre Marseille, un de mes plus beaux souvenirs, sinon le plus beau. Car quand j’étais arrêté, on m’avait dit que je devrais peut-être arrêter ma carrière. J’ai voulu avoir un second avis et je suis allé à la Pitié Salpêtrière, où on m’a opéré à nouveau. Finalement, ça s’est bien passé, et j’ai pu renouer avec le foot. Je marque le but de la victoire contre l’OM ! Une vraie libération.

« Ce qui ne te tue pas te rend plus fort »

Il y a finalement plusieurs fils rouges dans votre carrière, votre père, les blessures, l’Île-de-France, l’Ouest du pays, les amis… Comme une gigantesque toile entremêlée.
Il y a une phrase un peu bateau, « Ce qui ne tue pas te rend plus fort », mais c’est vrai. J’ai su trouver des forces intérieures pour repartir. J’ai repris, je fais six bons mois avec Nantes, je suis prolongé deux saisons supplémentaires. On descend, et je décide alors d’aller au Havre, avec Jean-Marc Nobilo, qui était l’entraîneur adjoint quand je jouais à Angers. Je pense que partout où je suis passé, j’ai laissé une bonne image, en tant que personne et comme joueur, les gens m’appréciaient en général.

Tout ça vous sert maintenant en tant que coach ?
Encore une fois, dans une vie, toutes ces expériences servent, forgent une personnalité, une sensibilité, une personne. Je suis un entraîneur qui réfléchit beaucoup; pour mettre en place mes séances, j’essaie de me souvenir de ce qui me semblait utile, de ce qui me faisait progresser, de ce que j’aimais faire, j’essaie d’avoir un discours que j’aurais aimé que certains entraîneurs aient avec moi, et que d’autres ont eu avec moi quand j’étais joueur. Je me sers de tout ça quoi.

Quel bilan faites-vous de votre carrière de joueur ? Que pense Guillaume Norbert de sa carrière ?
J’ai pu vivre ce qui était mon rêve d’enfant depuis tout petit, devenir footballeur professionnel, pouvoir vivre de ça. J’ai eu la chance de jouer au plus haut niveau professionnel en France, d’avoir une expérience à l’étranger, de partir à seize ans dans un des plus grands clubs d’Angleterre. J’ai vécu des expériences que peu de personnes ont la chance de connaître. Rien que pour ça je me sens privilégié. Après, voilà, il y a cette petite frustration, je dis petite car ça fait partie des qualités d’un joueur de ne pas se blesser, malheureusement, j’ai eu beaucoup de blessures, mais dans l’ensemble, voilà, j’ai signé mon premier contrat pro à 17-18 ans, j’ai arrêté à 30 ans, donc j’ai fait presque 12 ans en professionnel, c’est quand même… C’est un privilège, et je le ressens comme ça. Je suis très reconnaissant de tout ça.

Guillaume Norbert, du tac au tac – le joueur

Meilleur souvenir sportif ?
Je dirais le but que je marque contre l’OM (victoire 2-1 en 2006) à la Beaujoire. Je mets le but de la victoire. J’ai ressenti ce moment comme une libération car cela faisait suite à une longue blessure où la question s’est même posée de savoir si je n’allais pas devoir arrêter ma carrière.

Pire souvenir sportif ?
Ma blessure au genou qui m’a tenu à l’écart des terrains pendant plus d’un an.
L’équipe dans laquelle vous avez pris le plus plaisir à jouer ?
J’ai pris du plaisir dans chacun de mes clubs mais si je devais ressortir un trio je dirais Lorient, Angers et Nantes.

Le stade où vous avez préféré jouer ?
Pour un enfant qui grandit en région parisienne, jouer au parc des Princes a forcément une saveur particulière. La Beaujoire est également un stade avec une belle ambiance. Le Vélodrome n’est pas mal non plus…

Le coéquipier qui vous a le plus impressionné ?
Jean-Claude Darcheville. Quand je suis arrivé à Lorient, je rentrais d’Angleterre et je ne connaissais pas bien les joueurs du championnat français. La première fois que je l’ai vu, il portait un survêtement assez large et il semblait en surpoids. Dès le premier entraînement j’ai tout de suite constaté que ce n’était pas du tout le cas, c’était juste sa morphologie, il allait à 2000… C’est ce contraste qui m’a marqué.

Un coéquipier perdu de vue que vous aimeriez revoir ?
Imed Mhadhbi. On jouait ensemble à Nantes. On s’est revu en Tunisie après nos carrières puis la vie a fait que l’on s’est perdu de vue. Mais c’est un super mec et ça me ferait plaisir de le revoir.

Un coach marquant ?
Arsène Wenger, pour la sérénité qu’il dégage et sa bienveillance.

Une anecdote de vestiaire que vous ne pouvez presque pas raconter mais que vous allez raconter quand même…
Je vais garder ça pour moi. Il y a des choses qui ne doivent pas sortir des vestiaires !

Guillaume Norbert, du tac au tac – Le coach

Meilleur souvenir sportif ?
Notre montée avec le Racing en National 2.

Pire souvenir sportif ?
La descente avec Lausanne alors que j’étais l’adjoint de Marco Simone.

La musique, une autre passion ! Photo DR

Le match où vous avez pris le plus de plaisir à entraîner ?
La saison dernière contre le PSG en National 3. Tout était parfait ce jour-là, le public était au rendez-vous, les enfants du club étaient venus nombreux et l’équipe a fait un très bon match avec une victoire sur le score de 5-0. Une belle soirée.

Un moment marquant avec un de vos vestiaires ou joueurs ?
Les chants des joueurs après une victoire. C’est un moment où l’on retombe en enfance et qui fait écho aux premières émotions.

Le club que vous rêveriez d’entraîner ?
Le Racing, en Ligue 1 !

Meilleur joueur entraîné ?
Pascal Feindouno.

Votre philosophie de jeu ?
Un jeu basé sur la technique, le mouvement et la générosité.

Vos passions en dehors du foot ?
La musique.

Texte : Clément Maillard / Mail : contact@13heuresfoot.fr / Twitter @MaillardOZD

Photos : Rayane Jandau (photo de couverture)  et AlternisPic

 

Avant de devenir un excellent joueur de Ligue 1 à Caen et à Saint-Etienne, et depuis cette saison à Ajaccio, l’attaquant non conservé au centre de formation de Sochaux a connu le « monde amateur » à Besançon en CFA, où il s’est révélé à l’âge de 21 ans et où il s’est construit. Itinéraire d’un garçon qui n’a jamais lâché.

Photo AC Ajaccio / Facebook

Evoquer Romain Hamouma, c’est évoquer un joueur de football professionnel à plus de 330 matchs de Ligue 1 Uber Eats.

Evoquer Romain Hamouma, c’est évoquer un joueur qui a fait les beaux jours de l’AS Saint-Etienne pendant 10 saisons.

Mais évoquer Romain Hamouma, c’est surtout évoquer un parcours atypique et un passage remarqué dans le monde amateur avant cette très belle carrière. Un parcours sur lequel Romain revient longuement. Un entretien passionnant.

Aujourd’hui à l’AC Ajaccio, Romain Hamouma (35 ans) s’est totalement dépaysé après ses 10 années Stéphanoises. Il en avait besoin après une dernière saison délicate ponctuée par une relégation en ligue 2. La cicatrice n’est pas encore refermée et pour essayer d’oublier, le natif de Montbéliard s’est replongé pleinement dans un nouveau challenge, très délicat aussi, celui du maintien de l’ACA en Ligue 1.
C’est depuis la maison qu’il loue à Ajaccio avec sa famille qu’il a pris le temps de retracer son parcours. Une discussion de plus d’une heure teintée de sincérité.

Si Romain a pris tant de temps à ouvrir la boite à souvenirs c’est parce qu’il sait d’où il vient. Lui le gamin, mordu de foot, fils d’ouvrier, qui a grandi dans un petit village de Haute-Saône (70), n’oublie pas le parcours semé d’embuches qu’il a dû traverser pour arriver là où il est aujourd’hui.

Alors même s’il reste très modeste, sa très belle carrière, il la doit à la sueur de son travail acharné et à son état d’esprit irréprochable car rien ne lui a été donné. Ses racines, il ne les a pas oubliées et cette mentalité aura été le terreau de sa réussite.

Au centre de formation à Sochaux

Sous le maillot du FC Sochaux, en 2005 (en bas à droite). Photo DR

Les premiers pas sont pourtant prometteurs et le début de parcours idyllique avec une entrée au centre de formation de Sochaux à 13 ans, après avoir effectué ses gammes à Lure et un bref passage à l’ASM Belfort.
Malheureusement comme beaucoup de jeunes joueurs qui fréquentent les centres de formation, le contrat tant attendu n’arrive pas. La fin est brutale et c’est un retour à la case départ, dans le monde amateur.

Mais Romain ne lâche pas, il reprend plaisir à jouer au foot et se forge un mental d’acier qui lui aura grandement servi tout au long de sa carrière.

Pendant 4 saisons, il martyrise les défenses de CFA (Actuel National 2) sous les couleurs du Besançon Racing Club. (Aujourd’hui Racing Besançon) avant de découvrir le monde professionnel à 22 ans au Stade Lavallois en Ligue 2.

Il lui faut une seule petite saison pour se faire un nom et être courtisé par de nombreux club de Ligue 1. C’est au Stade Malherbe de Caen, sous les ordres de Franck Dumas, qu’il découvre l’élite.

Après avoir enflammé le stade Michel d’Ornano pendant 2 saisons, Romain Hamouma rejoint Saint-Etienne pour une magnifique décennie durant laquelle il aura connu la coupe d’Europe, une victoire en coupe de la ligue (2013) puis une fin un peu plus chaotique.

Aujourd’hui, sur l’Ile de beauté, il apporte son expérience et sa vista au jeune effectif d’Olivier Pantaloni en espérant éviter un des 4 sièges éjectables en fin de saison.

« Tu ne seras qu’un bon joueur de CFA »

Romain, quand on est jeune et qu’on rêve de devenir footballeur professionnel, cela doit-être une belle fierté d’intégrer un centre de formation, qui plus est celui de la région ?
Oui, c’est une fierté, mais honnêtement, au départ, on ne se rend pas trop compte de ce qui va arriver. Quand j’étais gamin, le but c’était de prendre plaisir en jouant au foot. Et du jour au lendemain, tu quittes tes parents et tu arrives au château de Seloncourt (lieu de résidence du centre de formation du FC Sochaux Montbéliard), où une soixantaine de joueurs de 13 à 18 ans se côtoient. C’est très particulier. Tu rentres dans une machine à laver où tout va très vite, où tous tes entraînements et tes matchs sont scrutés avant le couperet de fin de saison. C’est une sacré leçon de vie.

Cela ne devait donc pas être simple de s’imposer, surtout que tu faisais partie d’une très belle génération de joueurs…
Non, ce n’était pas simple car déjà, tu arrives dans un lieu où tu n’as plus de repère, où il y a une grosse concurrence. Je suis de la génération 1987 et avec moi à Sochaux, j’avais notamment Mevlut Erding et Jérémy Menez. C’était dur d’exister à coté de Jérémy qui avait des qualités bien au dessus de la moyenne.
Ce passage au centre de formation a été d’autant plus dur qu’à l’âge de 15 ans, je me blesse gravement aux ligaments croisés du genou. Je m’en souviens très bien, c’était lors d’un match contre Auxerre et j’ai eu un gros contact avec Youness Kaboul. La blessure, c’est une étape très difficile de la vie et là tu te retrouves seul pour l’affronter, loin de tes parents, loin de ta famille.

Au final, après 5 saisons, le club ne te garde pas. Comment se passe une telle annonce, quelles étaient les raisons ?
Lors de cette dernière saison, au mois de Décembre, je n’ai que des compliments des éducateurs mais plus la saison avançait, plus je me rendais compte que ça sentait pas bon pour moi. En fin de saison, je suis convoqué seul dans le bureau du directeur du centre de formation, Eric Hely, qui me dit : «  Romain l’aventure s’arrête pour toi ». Ses raisons ? Je suis trop irrégulier, Je souffle le chaud et le froid, je joue trop à l’instinct. Là, tu as 17 ans et demi, tu te retrouve seul dans un bureau pour affronter 5 ans de ta vie, c’est dur, très dur car tu n’es pas préparé à l’échec. Pendant 5 ans, tu as consacré ta vie au foot, tu t’es éloigné de tes amis d’enfance, tu n’as pas profité de ton adolescence comme les autres et du jour au lendemain tout s’arrête. Je me revois d’ailleurs très bien sortir du bureau, monter dans ma chambre et préparer mes affaires. Dès le lendemain j’étais de retour chez mes parents. C’était très violent.

Tu as de la rancœur envers le club ou les dirigeants de l’époque ?
Non, pas du tout. Sûrement qu’à ce moment là, je n’étais pas près pour passer pro. En revanche, ce que je n’ai pas accepté, c’est la manière de te dire les choses. Lors de cette réunion, on m’a dit « Tu ne seras qu’un bon joueur de CFA » avec des reproches pas toujours justifiés. C’est dur à entendre quand tu vis dans une bulle depuis 5 ans. Faire passer le message avec plus d’encouragements pour la suite aurait sûrement été plus facile à digérer.

Sous le maillot de Besançon.

Moralement ce ne doit pas être simple de se relever d’une telle déception ?
Non, c’est dur. Je n’avais pas encore 18 ans, je vivais dans une famille très modeste, je n’avais pas un grand cursus scolaire donc j’étais un peu perdu. Je ne savais pas quoi faire de ma vie, reprendre des études, aller travailler, essayer de persévérer dans le foot… Cet été là, mon frère fait un essai pour jouer à Baume-les-Dames (Doubs) en DH, et vu que je n’ai rien, je vais avec lui. Tout se passe très bien. Le coach veut me faire signer mais je lui demande un travail ou un petit salaire fixe pour vivre mais il ne peut rien me donner. J’envoie des CV un peu partout dont à Epinal mais aucune réponse. En rentrant de vacances, François Bruard, alors coach de l’équipe B du Besançon Racing Club en CFA2 est intéressé pour me faire signer. Comme je n’ai rien, je signe là bas mais je reste vivre chez mes parents car je n’ai pas les moyens de me loger à Besançon. Ma copine, qui est aujourd’hui ma femme, m’emmène aux entraînements. J’en fais que 2 sur 3 car c’est loin de chez moi. La première partie de saison se passe plutôt bien. Je fais des bancs avec l’équipe A en CFA, je rentre quelques minutes et le lendemain je vais en CFA2 où je suis régulièrement décisif.
Au mois de décembre, le club me propose donc un petit contrat et là je prends un appartement à Besançon. En seconde partie de saison, je gagne ma place en équipe première et c’est le début de la belle aventure avec le BRC.

« Les trois dernières années à Besançon, c’est les trois plus belles années de ma vie de footballeur »

Avec Hervé Genet, le coach de Besançon, en CFA.

Cela n’a pas été trop difficile pour toi de te retrouver dans le monde amateur, dans un tout autre environnement ?
Non, finalement, cela s’est plutôt bien passé. Dès la deuxième année, le club de Besançon me propose un petit contrat fédéral. Je gagnais 1 200€ par mois, j’avais de quoi payer mon appartement, j’avais mon scooter pour me déplacer, je vivais simplement et je faisais que du foot. Je ne voyais pas ça comme un truc difficile, j’étais heureux. En plus, nous avions une super équipe, une super bande de potes, deux très bons coachs avec Hervé Genet et Sandy Guichard. Jouer en CFA, le samedi à 18h, devant ma famille, avec des copains c’était génial. Des souvenirs inoubliables. Sportivement cela se passait très bien, on finit deux fois 2e derrière Calais puis Croix-de-Savoie avant de terminer 1er la 3ème année. D’ailleurs, à l’époque, le coach de Croix-de-Savoie, c’était Pascal Dupraz et il y avait une grosse rivalité avec Besançon. La saison dernière, à Saint-Etienne, on en a beaucoup parlé, on s’est bien chambré la dessus. Honnêtement, les trois dernières années à Besançon, c’est les trois plus belles années de ma vie de footballeur.

Avec l’enchaînement de ces saisons en CFA, as-tu envisagé de ne pas atteindre le monde pro ou y a tu toujours cru ?
Depuis Sochaux, j’ai toujours été formaté « centre de formation ». Alors même si à 18 ans j’avais mon appartement à Besançon, je n’avais pas une vie d’étudiant qui fait la fête. Je vivais du foot donc j’étais toujours très sérieux dans les préparations d’avant saison, dans la récupération, dans la gestion des blessures. Au fond de moi, l’objectif c’était d’avoir mon nom au dos du maillot, car ça signifiait que j’étais passé dans le monde pro. C’est toujours resté dans un coin de ma tête.

Cet échec à Sochaux était peut-être un mal pour un bien. Penses-tu que ce passage dans le monde amateur t’a permis de réaliser cette belle carrière ensuite ?
Oui, clairement. Ce passage dans le monde amateur a été une véritable bouffée d’oxygène. A Sochaux, j’avais perdu le goût de jouer au foot, de jouer pour m’amuser. Là, à Besançon, j’ai repris du plaisir, ça m’a fait un bien fou. Même s’il fallait être performant, je n’étais plus jugé à chaque match, à chaque entraînement, j’avais moins de pression pour jouer plus libéré.

« La peur d’un deuxième échec »

Après ces 4 saisons en CFA tu signes à Laval en L2 et tu exploses dès ta première saison. Comment ça se passe ?
J’avais déjà eu des sollicitations en National les saisons précédentes mais je ne voulais pas partir pour partir. La dernière saison à Besançon, j’ai Clermont (L2) qui s’est intéressé à moi. Puis Johann Chapuis, qui était le capitaine de Laval à l’époque et qui est originaire de Franche-Comté, a parlé de moi à la direction du club. Sur un match de CFA Auxerre-Besançon, Loïc Perard, qui est à la cellule de recrutement de Laval, vient observer Steeven Langil d’Auxerre et par la même occasion jeter un œil sur moi. Langil passe à coté de son match et moi je suis plutôt performant ce jour là. Laval me propose donc un contrat professionnel de 2 ans, pas forcément pour un poste de titulaire au début, il fallait que je fasse mes preuves. La rémunération n’est pas élevée, elle est quasiment identique à mon contrat fédéral de l’époque à Besançon car j’avais été un peu augmenté au fil des années. J’hésite à signer, je n’ai pas envie de quitter mes copains de Besançon et j’avais peut-être aussi peur d’un deuxième échec. Finalement, sur les conseils de Yoann Bourillon et Pierre-Henri Lamy, deux ex-Lavallois, coéquipiers à Besançon, je décide de m’engager chez les Tangos.

Dès la fin de ta première saison à Laval, tu signes à Caen et là encore tu éclabousses la L1 de ton talent. Pensais-tu pouvoir t’imposer si facilement au plus haut niveau ?
Déjà, quand j’arrive à Laval, la préparation est hyper dure mais je m’accroche et je réalise de bons matchs amicaux. Le coach Philippe Hinschberger me fait confiance et j’enchaîne très rapidement une belle saison. Dès le printemps, j’ai 8 ou 9 clubs de Ligue 1 qui me contactent mais certains devaient attendre de vendre ou d’autres me voulaient dans un rôle de doublure. J’avais 23 ans et pas de temps à perdre, il fallait que je joue pour apprendre le métier. Finalement, je choisis donc Caen qui m’offrait cette opportunité avec beaucoup de temps de jeu.
Les deux saisons se sont très bien passées et m’ont permis ensuite de signer à Saint-Etienne où j’ai été très séduit par le discours de Christophe Galtier.

Photo AC Ajaccio / Facebook

Tu passes 10 saisons à Saint-Etienne où tu joues même la coupe d’Europe. Aurais-tu imaginé un jour avoir une si belle carrière ?
Clairement non. A la sortie de Sochaux, c’était déjà inespéré pour moi de passer professionnel. J’ai beaucoup travaillé, je me suis beaucoup remis en question. Quand je repense à mes entraînements seuls autour du stade de la Malcombe à Besançon, c’était impensable de faire cette carrière. Dans ce monde du football, le joueur n’est pas décisionnaire de tout et il faut aussi une part de chance, mais en tout cas, je ne regrette aucun de mes choix.

Que retiens tu de ces 10 saisons à Saint-Etienne ? Forcément, tu dois avoir des regrets sur la fin de cette belle histoire ?
Je suis très fier d’avoir fait 10 ans dans ce club-là. C’est un club qui fait partie de l’histoire du pays, c’est un club mythique. J’ai vécu des moments extraordinaires, avec une ferveur et un public magnifique. Avoir participé à écrire l’histoire de ce club c’est une très grande fierté. Malheureusement oui, je suis très triste de la fin mais nous ne sommes pas décisionnaires de tout et nous avons dû composer avec des choix qui n’ont peut-être pas toujours été les bons. L’échec de la descente m’a beaucoup touché.

Te projettes-tu déjà sur ton après-carrière ? Envisage-tu de rester dans le foot ?
Oui, j’ai un projet de reconversion prévue à Saint-Etienne pour coacher les attaquants. J’ai cette envie de transmettre ce que j’ai appris.

Romain Hamouma du tac au tac !

Meilleur souvenir de joueur ?
La victoire en coupe de la ligue en 2013 avec Saint-Etienne face à Rennes (1-0) dans un stade de France plein. Le lendemain, l’accueil dans la ville de Saint-Etienne par les supporters était magnifique.

Photo AC Ajaccio / Facebook

Pire souvenir de joueur ?
La défaite 5-0 avec Saint-Eteinne à Geoffroy-Guichard face à Lyon en Novembre 2017. Ce match m’a vraiment fait mal. A la 10e minute, je tire un corner alors que je viens de me blesser.

Je le mets beaucoup trop en retrait et Lyon ouvre le score sur la contre-attaque. Dans la foulée je sors blessé et je suis absent plus de deux mois, j’étais à la limite de la dépression dans cette période.

Un match avec Besançon qui te reste en mémoire ?
Le match à Compiègne en Octobre 2008. On gagne 6-2 là bas et je marque un triplé. Au retour, dans un match très important pour la montée, je marque le but du 2-1 sur coup-franc.

Ton plus beau but ?
J’ai marqué pas mal de beaux buts mais je dirais lors de Saint-Etienne – Lille en Mai 2018 où nous l’emportons 5-0. Sur le 2e but, je reçois un long ballon à l’entrée de la surface, contrôle de la poitrine, coup du sombrero et reprise de volée croisée.

L’équipe où tu as pris le plus de plaisir à jouer ?
Saint-Etienne en 2013 avec « Galette » (Christophe Galtier), nous avions une superbe équipe (il cite tous les joueurs) et une belle ambiance. Cette saison-là, c’était beaucoup de plaisir avec cette équipe.

Photo AC Ajaccio / Facebook

Un club où tu as failli signer ?
A la sortie de ma saison à Laval en Ligue 2, j’ai pas mal de clubs de Ligue 1 qui s’intéressent à moi. En fin de saison, je me souviens être allé voir mes anciens copains de Besançon à l’entraînement à la Malcombe (Stade de Besançon), et je reçois un coup de téléphone de Marc Keller, alors directeur général de l’AS Monaco, il fait le forcing pour que je signe.

Je lui dis que je n’ai pas encore signé officiellement mais que j’ai donné mon accord verbal à Caen et que je respecterai ma parole.

Il insiste et le salaire était bien supérieur que celui proposé par Caen mais je refuse la proposition. Le comble c’est qu’à la fin de cette saison (2010-2011), Monaco est relégué en Ligue 2 !

Un club où tu aurais rêvé de jouer ?
Manchester-United. Old Trafford est magnifique, j’y ai joué un match de coupe d’Europe avec Saint-Etienne en 2017, c’était un rêve.

Un stade mythique ?
Geoffroy-Guichard sans aucune hésitation. Franchement c’est le meilleur stade du monde. Quand tout va bien l’ambiance est exceptionnelle et les tifos sont toujours magnifique. C’était un régal de jouer dans ce stade pendant 10 ans.

Un coéquipier marquant ?
Fabrice Levrat que j’ai rencontré à Laval et qui est devenu un vrai ami. Ce fut même mon témoin de mariage. J’étais très proche de Fabien Lemoine à Saint-Etienne. Aubam’ (Pierre Emerick Aubameyang) était vraiment très très fort. Cabella aussi, un super joueur. C’est difficile de n’en sortir qu’un car j’ai côtoyé beaucoup de supers mecs et de bons joueurs.

Un coéquipier en amateur qui aurait pu faire une carrière pro ?
Il y en a pas mal mais je dirais Charly Vuillemot. Avec le coffre qu’il avait et son super pied gauche, aujourd’hui piston gauche dans un 3-5-2 il aurait joué en Ligue 2 sans problème. Mickaël Gamondès, mon arrière droit à Besançon, aurait largement pu jouer plus haut aussi. C’était aussi fort qu’un Léo Dubois aujourd’hui. Mouss (Mustapha) Loukhiar aussi avait des qualités d’élimination exceptionnelles.

Un coéquipier que tu as perdu de vue et que tu aimerais revoir ?
Il y en a beaucoup mais je pense notamment à tous mes potes Bisontins des années en CFA. Matthieu Gégout, Ludo Golliard, Charly Vuillemot et tous les autres. A la fin de ma carrière ce serait une bonne idée d’organiser une fête pour tous se retrouver.

Le joueur adverse qui t’a le plus impressionné ?
Le trio M’Bappé – Messi – Neymar, c’est quelques chose. Je les ai encore affronté la semaine dernière (ACA-PSG le 21/10/2022) franchement c’est un autre métier, ils sont exceptionnels. Ibra dans son genre aussi était très impressionnant.

Un coach qui t’a marqué ?
J’ai aimé quasiment la plupart des coachs que j’ai eus.
Hervé Genet un entraineur amateur entier qui a beaucoup de cœur. Philippe Hinschberger, qui m’a fait confiance à Laval. Christophe Galtier m’a beaucoup fait progresser. Jean-Louis Gasset, un coach très bienveillant, c’était mon papy… Ghislain Printant très humain comme coach.

Des rituels, des tocs ?
J’ai pour habitude de toujours couper mes chaussettes, comme beaucoup de joueurs. Mais moi je brûle les petits fils pour éviter que ça s’effiloche !

Une anecdote de vestiaire qui t’a marqué ?
En début de saison dernière avec Saint-Etienne on reçoit Lille qui était champion de France en titre. On fait plutôt une bonne première mi-temps. A la mi-temps je ne suis pas d’accord avec les consignes de Claude Puel qui me demande de faire plus d’appels en profondeur alors que l’on était bien en place et que ce n’était pas le jeu. Je lui fais savoir et le ton monte. J’enlève mon maillot et je lui dis qu’il avait qu’à me sortir… Au final, il me laisse sur le terrain mais j’étais tellement énervé que je n’étais plus dans le match et il me sort rapidement en 2e période. C’est des instants de vie de vestiaires qui arrivent où parfois le ton monte.

Texte : Aurélien Triboulet / Mail : contact@13heuresfoot.fr / Twitter : @Aurelref

Le vice-président du Pau FC (Ligue 2), habituellement discret dans les médias, a accepté de balayer l’actualité de son club. Derrière un discours réaliste, mesuré, réfléchi et lucide se cache une envie de performance et de progression. Paroles d’un sage qui aime la compétition.

Photo AB

Qui a dit qu’il ne se passait rien, ou pas grand-chose, au Pau FC ? Bien sûr qu’il s’y passe des choses !

Bon, le club béarnais, qui vit sa troisième saison de rang en Ligue 2, n’a ni le passé ni l’histoire de certains de ses concurrents comme Bordeaux, Bastia, Saint-Etienne, Metz, Guingamp, Le Havre, Sochaux, Nîmes… On arrête là sinon c’est toute la liste des clubs, ou presque, que l’on va citer !

Le Pau FC n’a pas non plus connu les joies d’une accession en première division, mais il n’est pas le seul : Quevilly-Rouen, Rodez et Annecy sont dans le même cas.

Le Pau FC ne défraie pas la chronique. Et alors ? Pourtant, on vous l’assure, il s’y passe plein de choses. Jugez plutôt :

– Cette année, un joueur (Nguyen Quang Hai), baptisé le « Messi vietnamien » dans son pays, a signé chez les « Jaune et bleu » et boosté de manière incroyable les réseaux sociaux du club.

– Un autre (Sêssi d’Almeida) a écrit un bouquin, « Footballeur et investisseur », dans lequel il donne des conseils sur la manière de gérer son argent.

– En match amical, cet été, le club a écopé de trois cartons rouges à Hagetmau contre Angoulême lors du premier match de préparation (dont un rouge pour le coach Didier Tholot) et a hésité à continuer à 9 contre 11 avant de finalement s’imposer 1 à 0.

– Le club du président Bernard Laporte-Fray a aussi changé de logo (une réussite, nous y reviendrons).

– A la fin du mois dernier, le jour de la réception du Nîmes Olympique en championnat, il a inauguré son nouveau stade, le Nouste Camp (« Notre terrain » en béarnais), après quatre ans d’aménagements incessants.

– Enfin, il a dû attendre huit journées de championnat avant de s’imposer (à Laval).

– Ah, et puis on allait oublier : voilà quelques jours, Joël Lopez, le vice-président du Pau FC, a fêté ses 60 ans, dont 55 passés sur les terrains de foot ! « 55 ? Vous êtes sûr ? Vous avez compté ? » interroge le natif d’Aressy, village de 600 habitants situé en banlieu paloise, à quelques kilomètres du stade du Hameau.

Photo AB

« 55 ans dans le foot (rires) ? Oui, c’est vrai… » reprend Joël Lopez, qui a touché ses premiers ballons à la JAB de Pau (Jeanne d’Arc La Béarnaise) à l’âge de 5 ans : « C’était le club formateur de Pau. Il existe toujours. Il est plus que centenaire. A l’époque, il était dirigé par Jean Larqué, le père de Jean-Michel Larqué ! J’y ai côtoyé du beau monde. Il y avait aussi Jean-François Larios. Ensuite, en cadets, j’ai poursuivi dans un autre club de Pau, le FA Bourbaki, qui existe encore lui aussi. En fait, il y a 7 clubs de foot à Pau ! C’est beaucoup, surtout que ce sont tous des clubs historiques. C’est ensuite que j’ai rejoint le grand club de la ville, le FC Pau, le seul à évoluer à l’échelle nationale. Je le redis souvent, mais le FC Pau, ce n’est pas le Pau FC d’aujourd’hui qui, lui, existe depuis 1995, année où le FC Pau a déposé le bilan. C’est drôle, je reçois encore des courriers, des factures, à l’attention du FC Pau ! »

Avant d’être dirigeant, Joël Lopez a donc joué au foot. Et plutôt pas mal. S’il a fait l’essentiel de sa carrière à Pau (en D3 notamment et même en National à la création du championnat), le meneur de jeu a connu la Division 2 à Thonon, Mulhouse et Châteauroux dans les années 80.

Il a surtout eu l’immense privilège de vivre une saison à Bordeaux, en Division 1, en 1984-85, avec un titre de champion à la clé ! « C’était le plus grand club français et l’époque des grands Girondins. C’est Aimé Jacquet, l’entraîneur, qui est venu me chercher. J’ai eu la chance de côtoyer des joueurs exceptionnels, pratiquement que des internationaux, et on a été champion de France. »

Soit dit en passant, Joël Lopez a connu deux coachs devenus par la suite sélectionneur de l’équipe de France : Jacquet donc, puis Raymond Domenech : « Je l’ai eu quand il a commencé sa carrière de coach à Mulhouse, en D2 ».

Hier matin, pendant trente minutes, le vice-président du Pau FC, discret et peu présent dans les médias, a balayé l’actualité, refait l’histoire, envisagé l’avenir et parlé du présent, avec de la mesure et du recul. Sans forfanterie. Ce n’est pas le style de cet homme au discours réaliste et rempli d’humilité. Et au bout des trente minutes, une certitude : oui, il se passe plein de choses au Pau FC !

« On progresse chaque saison pour améliorer le club »

Vous donnez peu d’interviews, posez peu en photos, une raison ?
Je suis pas très réceptif à cela. J’ai toujours voulu souhaiter rester discret. C’est dans ma nature, je n’aime pas m’épancher.

Bon, finalement, il s’est passé beaucoup de choses cette année au Pau FC…
Et l’année n’est pas finie ! J’espère que nous n’aurons que des choses positives qui vont arriver (rires) ! Plus sérieusement, il se passe ici des choses comme dans toutes les organisations, comme dans tous les clubs. Nous, on a quand même besoin de développer le Pau FC, de faire évoluer les choses, d’apporter des améliorations. Chaque inter-saison, on progresse pour développer les différents services du club. On est plein de projets, liés à notre présence au niveau professionnel, ce qui nécessite beaucoup de travail.

Photo Pau FC

Le club a franchi un sacré palier avec son nouveau stade…
Son inauguration s’accompagne aussi d’un centre d entraînement qui a été construit cette saison. Il offre de meilleures conditions de travail pour notre staff et nos joueurs. Des pelouses ont été refaites, on a une pelouse hybride pour la compétition, une autre qui a été « retravaillée » pour les entraînements, il y a eu des aménagements au stade, pour l’accueil des supporters, pour le secteur « réceptif » (hospitalité). En fait, celui qui est venu y’a deux ou trois ans et qui revient aujourd’hui ne reconnaît pas le club tant il y a eu des changements, des bouleversements pour ne pas dire une révolution. On avait un stade de niveau régional, avec la main courante autour. Avant, on cohabitait avec le rugby. Réunir toutes les activités du football sur un même site dédié, c’est quelque chose que l’on souhaitait et que l’on a pu réaliser grâce aux collectivités et au maire actuel de Pau, François Bayrou. C’est un projet évolutif. Chaque année, on a des projets d’amélioration.

« Au club, on est très attaché à notre région et à ses valeurs »

Lors de l’inauguration du Nouste Camp, le 22 octobre dernier. Photo Ville de Pau.

Dans quelles domaines le site peut-il encore s’améliorer ?
Le chantier à venir, c’est l’espace : on en manque. On essaie de pousser les murs mais ce n’est pas évident. On a envie d’augmenter la capacité pour le grand public déjà. On a la possibilité de créer une troisième tribune et plus tard une quatrième, ce qui permettrait de doubler la capacité et d’y associer des espaces réceptifs : aujourd’hui, on est complet avec un peu plus de 300 places VIP, toutes commercialisées. On a une capacité d’à peu près 4000 places sachant qu’on a un nombre important de places « parquage » visiteurs (un peu plus de 800). Quand on fait 3200 ou 3400 spectateurs, on est complet. On a le plus petit stade en capacité mais on le remplit bien. Ce qui compte, déjà, c’est de satisfaire le public. Les gens qui viennent nous le disent, nos adversaires aussi : on a réussi à créer une ambiance très sympa, ça se ressent. Y’a un côté convivial. Une ambiance familiale. Et puis on a un groupe de supporters (la « STUP ») qui participe à toutes les animations, qui est dynamique, dans un bon esprit. Voilà, tout ça fait qu’on a une enceinte sympa, accueillante, avec de l’ambiance, où les gens prennent du plaisir à venir et sont proches du terrain. Où les joueurs et le public se sentent bien.

Une enceinte où l’identité du club est bien présente, comme sur le nouveau logo, où l’on retrouve le pic du midi d’Ossau, les trois pals, le paon, le blason de la ville, la couronne et les initialies d’Henri IV retravaillées …
Oui, et aussi les vaches béarnaises ! Pour les initiales d’Henri IV, on voulait quelque chose de plus moderne, on les a écrites sous forme de marque, H4, que l’on décline sur nos produits dérivés, sur nos textiles.

Et puis, il y a la date, 1995 : même si je sais que ça a déplu chez certains… Mais nous aussi, avec Bernard (Laporte-Fray), le président, nous étions là avant 1995, du temps du FC Pau. On n’oublie pas ce qui a été fait, mais le Pau FC, c’est 1995.

Vous savez, dans le club, on n’est pas très nombreux et pour la plupart nous sommes des locaux, dont l’actionnaire principal, Bernard Laporte-Fray, qui est un Béarnais pure souche. On garde ça en tête.

On est très attaché à notre région et à ses valeurs. On essaie de décliner cela à tous les niveaux, jusqu’aux joueurs, dont la majorité vient de l’extérieur : ils sont rapidement dans cet esprit et ressentent l’attachement au territoire. Sans oublier les jeunes de chez nous, qui arrivent derrière. On a besoin de faire perdurer ce qui, dans notre esprit, représente notre force.

« Il faut rattraper le retard, se stabiliser et perdurer »

Comment se passent vos relations de travail avec le président, qui est aussi un ami et que vous connaissez depuis si longtemps ?
J’ai joué avec Bernard (Laporte-Fray) au début des années 80, quand il était gardien, en Division 3. On a grandi ensemble, bon, lui, il a grandi un peu plus que moi en taille (rires) ! On a une relation amicale de longue date. En fait, voilà ce qui s’est passé. Le club a eu des soucis financiers au début des années 90, et le maire de l’époque, André Labarrère, en 1995, a sollicité des personnes dont je faisais partie pour reprendre le club quand il s’est retrouvé en dépôt de bilan. A l’époque, j’étais toujours au club, on parlait déjà d’un projet mais qui n’avait pas abouti. C’est là que j’ai sollicité Bernard (Laporte-Fray), qui était déjà chef d’entreprise mais détaché du foot, pour reprendre le club avec quelques autres, et constituer une équipe. Ensuite, avec Bernard, on s’est succédé à la présidence du club, il y a eu aussi Jacques Le Coadou, qui était un nos amis. Et le club a vécu comme ça. Finalement, cela a abouti à cette accession en Ligue 2 en 2020.

Photo Pau FC

Aujourd’hui quelle est la véritable place du club ? Peut-il rêver un jour d’aller en Ligue 1, comme Clermont-Ferrand par exemple ?
Quand on arrive à ce niveau-là, en Ligue 2, il faut rester réaliste, lucide. Quand on est monté en 2020, le club n’était pas forcément formaté ou prêt, d’un point de vue structurel et administratif, pour aller en L2, compte tenu du fossé, du gouffre qui existe avec le National. Aujourd’hui, il faut arriver à se stabiliser, à rattraper le retard aussi. Cela nécessite du temps. En travaillant bien et en développant tous les secteurs, on peut avoir de bonnes surprises. Mais il est compliqué d’afficher des ambitions autres que celles de faire progresser l’ensemble du club et de perdurer en Ligue 2.

« On doit être convaincu que l’on peut exister »

Photo Pau FC

Voir Pau en Ligue 2, après tant d’années de présence au club, cela doit être une sacrée fierté pour vous qui êtes né à quelques kilomètres de Bizanos, là où se trouve le nouveau stade ?
Oui, une partie du site se trouve effectivement sur la commune de Bizanos. Forcément, c’est une fierté. Le foot à Pau a toujours existé. Je suis très reconnaissant des dirigeants précédents, qui ont oeuvré. Il y a eu toujours eu du potentiel ici même si le football n’est pas seul, comme vous le savez, avec le rugby et le basket notamment. Et puis le foot est devenu un marché concurrentiel très rude. Sur le plan national, on est en face de projets importants. Alors, d’avoir hissé le club au niveau professionnel, déjà, c’est un aboutissement, une récompense pour nous. Bien sûr, mais on pense aussi à tous ceux qui ont oeuvré dans l’ombre. Après, une fois qu’on y est, dans ce monde pro, il faut faire preuve d’humilité, parce que c’est un milieu qui est dur. Il faut se focaliser sur ce qu’il reste à faire pour perdurer, pour satisfaire les gens, pour être suffisamment attractif. Mon souci aussi, c’est le sportif : une fois sur le terrain, il faut répondre présent et obtenir des résultats, et nous, on essaie de mettre toutes les conditions pour cela, d’avoir des compétences à tous les niveaux. On a un staff technique de haut niveau et des gens de haut niveau dans d’autres domaines. C’est important d’avoir atteint la Ligue 2 mais on doit aussi être convaincu que l’on peut exister. On ne doit pas faire de complexe.

L’entraîneur Didier Tholot et le président Bernard Laporte-Fray. photo Pau FC

Votre discours est toujours empreint de recul et d’humilité…
Oui… vous savez, le foot, c’est un milieu où on croise des tas de gens, des chefs d’entreprises, et d’autres. Il a ceci d’extraordinaire que l’on peut faire toutes ces rencontres mais qu’on peut rapidement avoir des difficultés. Il faut prendre la mesure du football, qui est très aléatoire. Il faut être conscient que l’on peut gagner des matchs que l’on ne mérite pas et inversement. C’est une remise en question permanente et à partir de là, ça va très vite dans un sens comme dans l’autre. Moi, j’admire les gens qui sont à des niveaux inférieurs et qui travaillent très bien pendant que d’autres sont à des niveaux au-dessus du notre et qui font n’importe quoi. C’est le milieu qui veut ça : le foot est attractif, médiatisé, et certains recherchent ça. Ce phénomène, on ne le retrouve pas dans d’autres secteurs d activités. C’est pour cela que je pense qu’il faut rester humble et lucide. Faire fonctionner un club, je considère que c’est un travail d’équipe avec un projet, une vision et des ambitions communes.

Durant votre carrière, vous avez été joueur, dirigeant, entraîneur, président, vice-président, président délégué : quel est le poste qui vous convient le mieux ?
(Rires) Je ne suis pas unique ! Un club comme Pau… on est aussi atypique car on est amené à toucher un peu à tout. Quand j’étais entraîneur (de 1999 à 2002), je pouvais aussi être intendant et toucher au domaine administratif. Il faut être polyvalent. Pour ma part, devenir entraîneur, je ne l’ai pas souhaité : certains aspects du poste m’intéressait comme la gestion humaine mais le terrain au quotidien, moins. Je n’étais peut-être pas fait pour ça. Avec le temps et l’expérience, je me suis retrouvé à d’autres postes. L’idéal est que chacun soit bien dans son rôle et je pense aujourd’hui que j’ai bien trouvé ma place.

« Dans le foot, certains sont là pour de mauvaises raisons »

En 2010, vous êtes parti à Evian Thonon Gaillard, où vous avez même occupé la présidence en Ligue 1. Pourquoi ce choix et qu’avez-vous retenu de l’expérience ?
Oui, j’ai fait une infidélité à Pau en 2010… J’aurais même pu partir plus tôt. En fait, à un moment donné, j’étais usé, Bernard (Laporte-Fray) avait pris du recul. Je crois que j’avais besoin de souffler après 15 ans à la direction du club, de 1995 donc avec la naissance du Pau FC, jusqu’en 2010. Le projet d’Evian Thonon Gaillard est arrivé : Patrick Trotignon, le président, m’a sollicité pour rejoindre ce club en pleine ascension. Je connaissais quelques personnes sur le secteur car j’avais joué à Thonon et ils cherchaient des personnes pour améliorer le fonctionnement du club. Je connaissais déjà Patrick (Trotignon), Pascal Dupraz (l’entraîneur) aussi, et d’autres personnes. Mais la fin a été douloureuse, à la fois pour moi et pour d’autres personnes. J’ai des regrets car je reste convaincu qu’il y avait la place pour que ce club extrêmement sympathique perdure au plus haut niveau. Sauf que ce fut une affaire d’hommes et malheureusement ce club était miné par les conflits de personnes, ce qui l’a amené à sa perte. Je suis retourné avec Pau au stade à Annecy, récemment, et j’ai revu des personnes qui faisaient partie du projet de l’ETG FC à l’époque, et on en reparlé; c’est dommage qu’il y ait eu ces conflits qui ont détruit ce magnifique projet. Mais en fait, l’expérience d’Evian n’a fait que confirmer ce que je savais déjà, c’est que dans le foot, il y a des gens qui sont là pour de mauvaises raisons, et ça ne s’est pas arrangé depuis… Mais j’ai fait des erreurs aussi. J’ai manqué de clairvoyance. J’ai vécu à Evian ce que je craignais qu’il puisse se passer dans un club de foot. On a souffert. Au final, c’est tout un département, un territoire qui vivait pour ce club. Quand je suis retourné au stade, j’ai vu que les infrastructures étaient toujours un frein pour le FC Annecy, comme il l’était pour nous : ça n a pas avancé sur ce plan-là.

Pour terminer, évoquons le plan sportif : après un début de saisons difficile, ça va beaucoup mieux (Pau FC est 11e après 13 journées) !
Oui, je crois qu’on a pris 15 points sur les 8 derniers matchs, donc si on pouvait conserver ce rythme, ce serait magnifique ! On craignait que cela ne se passe bien en début de saison car l’effectif a beaucoup changé, on était arrivé en fin de cycle, avec des joueurs en fin de contrat, beaucoup en prêt, d’autres qui étaient sollicités, bref, j’ai été confronté à une intersaison difficile mais j’ai la chance d avoir Didier Tholot, l’entraîneur, à mes côtés, pour la partie sportive : son staff et lui ont beaucoup travaillé. On a beaucoup de nouveaux joueurs. On est convaincu d’avoir le potentiel pour exister, sans faire de complexe, pour faire un bon championnat. On a une marge de progression. Il faut être aussi conscient que ce championnat est dur, long, qu’il ne faut surtout pas se relâcher. Tout cela est exacerbé par le fait qu’il y a 4 descentes et donc, il faut travailler d’arrache-pied.

Texte : Anthony BOYER / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06

Photos : AB, Pau FC et Ville de Pau

Prêté par Amiens (L2) au FC Borgo (National) début octobre, Mustapha Sangaré, 23 ans présente un parcours plutôt singulier.

Après avoir débuté le foot en club à 16 ans et évolué en District, il avait signé son premier contrat pro à Amiens en novembre 2020 alors qu’il était éducateur sportif tout en évoluant au Racing (N3). Quelques semaines après son premier match de L2, il a été stoppé de longs mois par des soucis au dos, causés par une bactérie.

Photo Philippe Le Brech

Un avion décollant de l’aéroport de Poretta à Bastia interrompt brièvement notre conversation. A l’autre bout du fil, on sent Mustapha Sangaré, souriant et épanoui.

Depuis quelques semaines, le grand attaquant (1,95 m) de 23 ans découvre la Corse, prêté par son club d’Amiens (L2) au FC Borgo (National). Comme une petite renaissance. Son histoire était belle. Alors éducateur sportif et joueur au Racing CFF (National 3), il avait signé un contrat pro à Amiens en novembre 2020.

Trois ans auparavant, c’est sur les terrains de… 4e division de District qu’il enfilait les buts !

De la 4e division de District à la Ligue 2, une telle ascension est rarissime. Mais après avoir débuté en L2 sous les ordres d’Oswald Tanchot à Amiens, son rêve s’est transformé en cauchemar. Une vilaine bactérie l’a cloué au lit pendant plusieurs mois, le dos endolori. Mais il a su se relever.

Après presque un an d’absence, il a retrouvé la L2 en effectuant quelques apparitions. Son été a aussi été compliqué avec un faux-départ à Nancy. Mais il espère rattraper le temps perdu à Borgo, dans un club qui a relancé ou révélé de nombreux joueurs ces dernières saisons (Isidor, Durbant…). « Mon histoire montre qu’il y a toujours moyen de gratter quelque chose dans le foot même si on n’a pas fait de centre de formation et qu’on est pas formaté pour ça au départ… »

Un bond de… dix divisions en trois ans !

Photo Amiens SC

Petit, contrairement à beaucoup d’enfants ou d’ados de son âge, Mustapha Sangaré ne s’est jamais rêvé en footballeur professionnel. Il a longtemps joué au tennis. « Le foot, ce n’était qu’en bas de chez moi avec mes potes, explique-t-il. Ce sont eux qui m’ont poussé à m’inscrire. C’était un loisir. »

Sa première licence, il ne l’a signée qu’à l’âge de 16 ans, au club de la Camilienne, une association culturelle, artistique et sportive dans le XIIe arrondissement de Paris. Titulaire du DEJEPS (Diplôme d’État Jeunesse, Éducation Populaire et Sport), il était même employé comme éducateur.

Avant de partir à Amiens, il était responsable de la section féminine et donnait également des cours d’éveil corporel et de cirque à des enfants. « Le XIIe arrondissement, la Camilienne, c’était toute ma vie. J’étais épanoui, j’adorais mon travail. Avec les enfants et leurs parents, j’avais construit une belle relation. Beaucoup de gens me disaient que j’avais les qualités pour jouer plus haut mais je ne voyais pas lâcher mon travail. »
Niveau foot, il a débuté en… 4e division de District. « Je jouais en réserve car il y avait un souci de mutation. Ma dernière année, j’en ai marqué plus de 30 ! »

« Je garderai toujours la tête sur les épaules »

Photo Philippe Le Brech

A l’été 2018, il signe à Vincennes pour évoluer également avec la réserve en 1ère division de District. « J’y suis allé car je connaissais le coach et que ça restait près de chez moi. Il y a eu des blessés et j’ai joué en Régional 1. J’ai marqué et j’ai vu que je pouvais avoir le niveau R1. J’ai eu ensuite plusieurs contacts en National 3 parisienne. J’ai choisi le Racing car c’était moins loin mais en finissant mon travail à 18 heures à la Camilienne, j’arrivais parfois en retard à Colombes. Au départ, l’entraîneur, Guillaume Norbert, m’avait prévenu que je serai le 4e attaquant. »

Après une première année perturbée par une entorse au ligament interne d’un genou, le Parisien explose lors du début de saison 2020-2021. « J’avais pris un agent et dès le premier match de N3, des clubs et d’autres agents ont commencé à appeler. J’ai effectué un essai à Monaco. Ils voulaient me garder. Mais Monaco, ça me paraissait trop haut et c’était d’abord pour être en réserve avec un contrat pro. »

Il choisit Amiens où il signe au début du mois de novembre 2020 un contrat pro de 3 ans en L2. « Je pensais finir la saison au Racing et garder mon emploi d’éducateur. J’avais des responsabilités à la Camilienne et tous mes potes étaient au Racing. Mais j’ai aussi pensé à moi. Vu mon parcours, je me suis dit qu’une telle opportunité ne se reproduirait peut-être jamais. Je me suis dit » fonce et ne te retourne pas ». J’avais bien conscience d’avoir grillé beaucoup d’étapes en 3 ans. Mais vu d’où je viens, je n’avais pas peur. Mon parcours de vie, mon éducation font que je garderai toujours la tête sur les épaules. »

Presque un an d’arrêt à cause d’une bactérie

En arrivant à Amiens, il doit encaisser le rythme des entrainements. « Je suis passé de 2-3 séances par semaine à des entrainements quotidiens. »
Le 22 décembre 2020, il effectue ses grands débuts en L2 en entrant à la 80e minute face à l’AC Ajaccio (0-0). Il enchaîne ensuite par trois nouvelles entrées en jeu. Le 19 janvier, il marque son tir au but et contribue à la qualification en Coupe de France à Dunkerque (L2). Mais il est stoppé par une déchirure. « Je pense que mon corps a subi les charges de travail supérieures à ce que j’avais connu en amateur. »

Le début de près d’un an de galère et de doutes. « Au départ, on m’a diagnostiqué une déchirure aux ischios. Mais après, on s’est rendu compte qu’elle partait du bassin jusqu’au dos… J’avais mal. Je ne pouvais pas me lever ni manger. J’ai perdu presque 20 kilos. J’ai passé 50 scanners, des IRM, effectué plein de prises de sang. Je suis allé voir des médecins à Amiens, Lille, Paris, Marseille… Mais ils ne trouvaient rien. On m’a ensuite fait une ponction lombaire. Sur la première, encore rien… Mais sur la deuxième, ils ont trouvé qu’il y avait une bactérie. J’étais un peu soulagé d’avoir enfin trouvé la cause de mes douleurs. J’ai commencé un traitement aux antibiotiques en juin, juillet et août. Mais ça n’a pas fonctionné. On m’a donc mis sous perfusions à Paris. »

« Mon parcours atypique m’a donné de la force »

Le traitement fonctionne et Mustapha commence enfin à se sentir mieux. « Ce sont les épreuves de la vie. Moralement, il y a eu des moments difficiles. Ma famille était derrière moi, le docteur d’Amiens, Mr. Carpentier, est toujours venu avec moi, mon ancien coach Oswald Tanchot prenait souvent des nouvelles. Mais je ne pensais pas y arriver… Ce n’était même pas une question de rejouer au foot. Je pensais déjà à ma santé, à ma vie. C’est à dire remanger, remarcher correctement, ne plus avoir de douleur. Le foot, si ça aurait dû s’arrêter, ça ce serait arrêté. Je n’ai pas la même philosophie ni la même pression qu’un mec qui est passé par un centre de formation, qui ne pense qu’au foot depuis qu’il a 12 ans. Moi, je connais déjà la vie active. Je suis passé par là. Mon parcours atypique m’a donné de la force. Cela n’aurait pas été un drame absolu de devoir retourner travailler. Le principal était de retrouver ma santé. Heureusement, j’ai été guéri et j’ai pu retrouver l’entraînement après un très long purgatoire. »

Le 12 février 2022, plus d’un an après sa dernière apparition, il retrouve la L2 en disputant les dernières minutes d’Amiens – Niort à la Licorne. Après quatre autres apparitions, il marque son premier but lors de la dernière journée de championnat à Auxerre. « C’était une grande émotion car je revenais de si loin, un an de galère avec l’infection, les problèmes de dos, les blessures…»

Son but avec Amiens face à Auxerre, au stade Abbé-Deschamps.

Le faux-départ à Nancy

A l’intersaison, les choses sont claires avec le staff. « Le coach Philippe Hinschberger m’a dit que si je restais, je serais le 4e ou 5e attaquant dans la rotation. On a évoqué un prêt en L2 ou National. C’est une solution qui me convenait. »

Le 19 juillet dernier, Mustapha officialisait son départ de l’Amiens SC pour Nancy. Dans un tweet, il remerciait le club picard de « l’avoir accompagné pour ses débuts dans le monde professionnel ». Il avait un accord avec le directeur sportif John Williams pour être libéré de sa dernière année de contrat et ainsi s’engager librement avec le club relégué en National.

L’attaquant avait passé la visite médicale et posé pour des photos de présentation. Il s’était entrainé avec le groupe d’Albert Cartier et avait même trouvé un logement. Déjà prêt, le communiqué officiel annonçant sa signature n’a pourtant jamais été publié. Bernard Joannin, le président d’Amiens, a mis son véto et bloqué le prêt. Il a en effet réclamé 37 000 euros à Nancy pour se faire rembourser les frais occasionnés par les dégradations des supporters nancéiens lors de leur venue au stade de la Licorne.

Nancy, qui disposait d’un accord de principe avec Amiens, a renoncé à l’opération. Il se retrouve donc pris en otage malgré lui. « J’ai dit au président que c’était normal qu’il défende ses intérêts. S’il avait dit non dès le départ, cela ne m’aurait pas dérangé. Mais là, tout était finalisé. C’est un moment dur à vivre. J’ai dû rentrer à Amiens. »

Jusqu’à la fin du mercato, Sangare s’entraîne avec la réserve. Il retrouve le groupe pro le 1er septembre. Ses quelques contacts (Dunkerque, Versailles) n’aboutissent pas. Il n’est pas, non plus, conservé à l’issue de son essai à Laval (L2) pendant la trêve internationale fin septembre. Le 3 octobre, il rejoint la Corse et le FC Borgo.

Enchaîner les matchs et maintenir Borgo en National

A Borgo, Mustapha a trouvé un cadre idéal. « Je ne connaissais pas la Corse et c’est vraiment top, sourit-il. Je suis venu seul avec mon chat (sourire) mais j’ai déjà trouvé une maison à quelques minutes de notre complexe sportif. Le cadre de vie est agréable. C’est un club familial, c’est vraiment ce que je cherchais. J’étais éducateur, j’aime aller vers les gens et les vrais rapports humains. Bien sûr, les conditions ne sont pas les mêmes qu’à Amiens ou ce que j’aurais pu connaître à Nancy ou Dunkerque. Mais moi, je viens de tout en bas. Donc, ça ne me dérange pas. Ce serait peut-être plus dur pour quelqu’un qui vient d’un gros club. »

Sur le terrain, il a marqué à Cholet (défaite 2-1) le 12 octobre dernier pour son premier match avec Borgo. Contre Châteauroux (2-1), il a été aussi très précieux. « Il nous apporte beaucoup d’éléments qui nous manquaient », estime le coach Alexandre Torres. « Venir à Borgo est un beau défi pour moi, conclut Sangaré. Ça va me redonner de la visibilité. J’espère surtout enchaîner les matchs. Je suis un protocole quotidien avec des exercices de renforcement pour mon dos. Si physiquement ça va, je sais que je pouvais rendre des services sur le terrain pour contribuer à aller chercher le maintien. Se maintenir en National avec Borgo équivaudrait à un titre de champion dans un autre club. »

Mustapha Sangaré, du tac au tac

Première fois dans un stade ?
Le Stade de France pour la finale de la Coupe de France Lyon – Quevilly en 2012. J’étais sur le terrain en train de tenir l’écusson de l’OL !

Meilleur souvenir de joueur ?
Ma saison en U17 D1 à La Camilienne. On finit premier à égalité de points. Une superbe année.

Pire souvenir de joueur ?
Ma blessure au dos quelques mois après mon arrivé à Amiens.

Ton plus beau but ?
Lors d’un Brétigny – Racing en N3. Après un centre en retrait dans la surface, je fais contrôle aile de pigeon puis demi-volée en lucarne. On gagne 4-2 ce jour là !

Une manie, une superstition ?
J’évite de marcher sur la ligne de touche avant chaque match, titulaire comme remplaçant !

Le geste technique préféré ?
La feinte, simple mais très efficace.

Le joueur le plus fort que tu as affronté ?
Wissam Ben Yedder

Le joueur le plus fort avec qui tu as joué ?
Arnaud Lusamba à Amiens.

Les entraîneurs qui t’ont marqué ?
Oswald Tanchot (Amiens), Guillaume Norbert (Racing), Olivier Debert (Vincennes).

Ton club préféré ?
L’OM.

Ton joueur ou tes joueurs préférés ? Un modèle ?
Ronaldo (R9) comme joueur préféré, et comme modèle, Olivier Giroud. Son mental m’inspire beaucoup.

Un stade mythique ?
Le Stade Yves-du-Manoir de Colombes. Celui du Racing.

Un pays ?
Sénégal et Mali vu que je partage les deux nationalités (rires)…

Tes amis dans le milieu du foot ?
J’en ai beaucoup. Après, à Amiens, j’ai eu une relation particulière avec Mathis Lachuer, que ce soit au foot ou en dehors.

Activités pratiquées en dehors du foot ?
Énormément de tennis. Dès que je peux j’en fais régulièrement.

L’interview de Mustapha lors de sa signature à Amiens.

Texte : Laurent Pruneta / Mail : lpruneta@13heuresfoot.fr / Twitter : @PrunetaLaurent

Photos : Philippe Le Brech / DR / Amiens SC et Vic. Joly

L’équipe de la banlieue nancéienne, chantre de la stabilité, a dit adieu à la coupe de France ce week-end, éliminé par Epinal au 7e tour, et va pouvoir se concentrer sur son objectif : l’accession en R1.

L’ES Heillecourt jouit d’une belle image en Meurthe-et-Moselle, celle d’un club stable, convivial et humble de près de 400 licenciés. Trois ans après, les Bleus et Blancs retrouvaient le 7e tour de la Coupe de France dans un contexte particulier, après les regrettables incidents qui ont émaillé le tour précédent lors de la réception d’Uckange. Invaincue dans leur poule de Régional 2, l’équipe vise la montée. La réception d’Epinal (N2) à Dombasle, en coupe, était une bonne occasion d’offrir une vraie fête du football à ses supporters.

Au stade Pavageau de Dombasle, où ce 7e tour a été délocalisé, les banderoles sont déployées dans les tribunes. Ce sont les mêmes qu’en 2018, lors de la dernière épopée du club, qui s’était achevée contre Saint-Louis Neuweg (N3). Superficie du terrain, des vestiaires, tout est scruté au millimètre pour assurer la réception d’Epinal (National 2).

Après plus de sept ans passés au deuxième échelon régional, l’ES Heillecourt et son président Loïc Bouger regardent aujourd’hui plus haut et vise la montée en R1. Mais dimanche, les esprits étaient à la Coupe. Récit d’une journée forcément pas comme les autres.

La marche était trop haute pour l’ESH

Les banderoles étaient là, comme en 2018. Photo Emile Pawlik.

Les tribunes se remplissent petit à petit. Ils seront un peu plus de 500 spectateurs au plus fort de l’affluence. « Meilleurs supporters » lance un jeune du club ! L’esprit de la coupe règne : convivialité et envie de partager un beau moment autour d’un match de football, peu importe le résultat.

Munie d’un porte-voix, la responsable animation du club entonne le nom de tous les Heillecourtois du jour. La tribune reprend en cœur les patronymes de ses héros. Le match peut enfin commencer.

La première période est assez terne, avec peu d’occasions à se mettre sous la dent. Jusqu’au moment où Antoine Gachenot est lancé en profondeur et voit sa frappe du bout du pied fuir le poteau gauche ! La déception est immense. Ce sera la seule occasion vraiment franche de la rencontre pour les Heillecourtois.

L’écart des divisions se fait ressentir dans l’impact physique et la maîtrise technique, domaines dans lesquels les Vosgiens, pensionnaires de National 2, sont largement supérieurs. Et puis, après un corner mal dégagé, les Spinaliens ouvrent le score, au grand dam du public. Au pire moment. Juste avant la pause. Cruel. Sébastien Habillon, entraîneur des locaux, sent le moral de ses joueurs touché. Il continue d’encourager ses protégés.

Les supporters de l’ESH ont donné de la voix. Photo Emile Pawlik.

Deuxième période. Les Spinaliens reviennent avec une plus grande envie sur le terrain. Ils acculent les Blancs sur leur but et font plier les locaux par deux fois pour porter le score à 3-0. Dans les tribunes, ça chambre un peu avec les jeunes Dombaslois, qui scandent le fameux slogan de France-Brésil “Et 1, et 2, et 3-0”. Facile de supporter la meilleure équipe sur le terrain, mais c’est de bonne guerre !

Le score n’en reste pas là. Un éclair de génie signé du capitaine spinalien : Jérémy Colin arme une frappe de 25 mètres qui vient se loger dans la lucarne de Jérémy Perouf. Le portier ne peut que constater les dégâts (0-4). C’est terminé. Les joueurs de Heillecourt vont féliciter les jeunes du club qui ont donné de la voix tout au long de la rencontre. “Il n’y a aucune honte à sortir contre un adversaire nettement plus fort que nous.”, affirme l’entraîneur de l’ESH.

Cette fois, la fête est complète contrairement au tour précédent, contre Uckange. Les locaux ont droit à la traditionnelle haie d’honneur des Jaunes d’Epinal qui ont rendu hommage à leur parcours commencé deux mois plus tôt.

La fête gâchée du 6e tour

On joue le 6e tour de la coupe de France. Heillecourt reçoit Uckange (R2) sur ses installations de l’Embanie. Cela se passe merveilleusement bien sur le terrain et dans les tribunes. Les Meurthe-et-Mosellans mènent 3-1 et se dirigent vers une qualification tranquille, avant qu’un groupe d’une vingtaine d’énergumènes détenteurs de fumigènes, aux chants agressifs, n’en décide autrement. Ils veulent aller à l’affrontement… et pas uniquement avec les mains. Les forces de l’ordre interviennent. Ils interpellent deux des fauteurs de trouble. Dans la foulée de ces incidents malheureux, une cellule psychologique est ouverte pour les jeunes d’Heillecourt qui ont assisté à cette scène.

Après leur passage en commission, les Mosellans sont sanctionnés d’une interdiction d’inscription à la coupe de France l’année prochaine. Heillecourt est bien qualifié, mais n’a pas fêté sa victoire, terrible double peine pour les hommes de Loic Bouger.

Loïc Bouger et le “traité du lavoir”

Loïc Bouger, le président de l’ESH. Photo Emile Pawlik.

Le président, âgé de 57 ans, est arrivé à la tête du club en 2002 et a trouvé une structure chancelante. Les vétérans décident de faire scission et de créer l’US Heillecourt. Lors du “Traité du Lavoir”, du nom d’une place jouxtant le stade de Heillecourt, Loic Bouger, déjà membre du comité directeur, est nommé président pour rétablir la situation. Il se donne trois ans pour rétablir la situation sportive, économique et aussi apaiser les velléités indépendantistes.

Avec son caractère, l’ancien gardien de but y parvient. Arrivé en 1994, en tant que joueur, Bouger n’a plus quitté l’ESH et y dédie sa vie. De nombreux chantiers sont sur la table, et ils ont globalement été menés d’une main de maître, avec un grand soutien de la mairie, qui aide financièrement le club en contribuant, pour moitié aux subventions reçues par l’ESH. L’autre moitié est assurée par des partenaires locaux pour porter le total à 30 000 euros de subventions. Le budget du club, lui, est en-deçà des 100 000 euros.

Le président sait bien s’entourer et répartir les tâches. “Il y a toujours des bénévoles. Ce ne sont juste plus le pépère ou la mémère qui vont passer leur journée”, explique-t-il. A cet effet, il organise ses cinquante bénévoles pour “faire en sorte que ces micro-tâches s’additionnent pour que la machine tourne.”

Formation et féminisation

Au 6e tour, la joie face à Uckange… avant les incidents en tribunes. Photo Kevin Clement.

Quand le président reprend l’affaire, il porte une grande attention aux équipes jeunes et à l’école de foot, labéllisée depuis quelques années. Contrairement à certains clubs qui ne concentrent que sur leur équipe fanion, l’ESH souhaite que toutes ses catégories soient performantes.

Depuis trois / quatre ans, l’école de foot tourne un peu au ralenti : l’objectif est donc de “mettre le paquet” cette année pour lui redonner de sa superbe. Le club va chercher des éducateurs expérimentés et investit aussi afin d’équiper les enfants aux couleurs d’Heillecourt, afin de créer un esprit d’équipe et une identité.

Avec les voisins de Fléville-devant-Nancy, Heillecourt a bâti une entente dans certaines catégories : un partenariat « gagnant-gagnant », qui concerne également le matériel : “Un coup c’est le barbecue, l’autre coup la tonnelle”, indique Loic Bouger. Ces jeunes joueurs, qui apprennent les rudiments du football, pourront, plus tard, porter le maillot de l’équipe de R2 ou de R3. D’ailleurs, à Heillecourt, beaucoup de seniors sont des joueurs du cru. Ce qui explique aussi sa grande stabilité.

Loïc Bouger est aussi un homme de conviction. Son combat pour la féminisation du club tant au niveau des instances, que du terrain en est une preuve. Voilà une dizaine d’années qu’il tente de “percuter ce monde de machos” en installant des femmes dans les commissions « animation » et « communication » de l’ESH. Il a aussi mis en place une équipe seniors féminines et une école de foot en 2015, aujourd’hui labellisée. Heillecourt a compté jusqu’à 70 filles en tout. L’équipe première a joué l’année dernière en R1 mais a choisi de repartir en R2 après de nombreux départs : pour l’entraîneur Gérald Constant, c’est “reculer pour mieux sauter.”

Un objectif clair : jouer la montée en R1

Au 5e tour, la joie à l’issue de la qualification contre Bar-le-Duc. Photo Kevin Clement.

Avec une stabilité qui ferait rougir beaucoup d’équipes, la formation fanion entame sa huitième saison au deuxième échelon régional, et affirme viser la montée cette année. Un projet qui s’est bâti dans le temps, avec très peu de changements d’une année sur l’autre.

Heillecourt renvoie l’image d’un club bien structuré dans la région, parfois trop même, comme Loïc Bouger l’explique : “Pensant qu’on est blindé, les éducateurs ne nous appellent pas, alors qu’on a des besoins”. La rançon de la gloire sûrement. Les Bleus et Blancs avancent sereinement vers leurs objectifs, sans brûler les étapes, mais avec de l’ambition tout de même.

Le coach des seniors, Sébastien Habillon, est un “vrai Heillecourtois”. Cela fait plus de 20 ans qu’il donne de son temps à l’ESH. La fidélité du responsable du service jeunesse, éducation et sports de la ville au sein du club est aussi un gage de stabilité.

Après une carrière de joueur passée en grande partie au niveau régional (avec un crochet par la Belgique à Athus au plus haut niveau régional belge), Sébastien Habillon est revenu à ses premières amours en Meurthe-et-Moselle. Il permet la remontée au niveau régional de l’ESH qui végétait alors en district. Depuis, l’ES Heillecourt n’est ni descendue, ni montée. Entretien avec celui qui rêve de vivre de sa passion et de devenir entraîneur professionnel.

Sébastien Habillon (entraîneur) :

« J’ai vraiment le sang bleu et blanc ! »

Sébastien, comment es-tu devenu entraîneur de l’ESH ?

L’entraîneur de l’ESH. Photo Emile Pawlik.

J’ai eu cette espèce de double carrière puisqu’à l’époque où j’étais joueur, j’entraînais aussi des catégories de jeunes. Je suis au club depuis plus de 20 ans. J’ai eu toutes les catégories. D’ailleurs, plein de joueurs qui étaient sur le terrain aujourd’hui face à Epinal, je les ai eus en U11, U13 donc c’est vraiment sympa. Il y a à peu près 9 ans, on m’a proposé de reprendre l’équipe première, mais par contre j’étais jeune, j’avais à peine 30 ans, donc j’ai dit oui mais à condition d’avoir la possibilité d’être entraîneur-joueur. Donc pendant plusieurs années, c’est ce qui s’est passé, et ça m’arrive encore parfois de jouer avec l’équipe première; l’an passé, j’ai disputé 6 ou 7 matchs ! Cette année, j’ai un groupe plus étoffé donc j’ai moins besoin de jouer. En fait, en jouant, je satisfaisais une envie, j’alliais l’utile à l’agréable. Aujourd’hui, dans tous les cas, mes jeunes restent prioritaires.

Cela fait maintenant près de 10 ans que tu es à la tête de l’équipe fanion du club : quelle est ta source de motivation ?

Je suis un vrai passionné de foot. J’adore ça, que ce soit avec Heillecourt ou bien en regardant les matchs au plus haut niveau. La tactique, moi, ça me passionne. Cette épopée en Coupe de France a contribué à construire ce groupe. Ce que j’aime, c’est ce club avec ses bonnes personnes. Il y a énormément de valeurs humaines. J’ai un groupe en or, y’a que des bons mecs. C’est un plaisir de les retrouver la semaine à l’entraînement, humainement et sportivement, parce qu’ils sont ambitieux et que j’ai de bons joueurs de niveau régional. C’est très agréable. Même si cela fait plusieurs années que je suis là, il n’y a aucune perte de motivation.

Quel est ton modèle de coach ?

Mon idole, c’est Pep Guardiola avec son jeu de possession. Après, c’est pas ce qu’on a essayé de mettre en place aujourd’hui. J’admire aussi justement des coachs plus pragmatiques comme Carlo Ancelotti ou Didier Deschamps qui sont capables d’être moins dans l’esthétique, mais tout autant dans l’efficacité.

L’objectif affiché par le club est la montée en R1 : qu’est-ce que cela représenterait pour le club et toi de l’atteindre ?

Photo Kevin Clément.

On est au même niveau, en R2, depuis sept ans. J’interprète cela comme de la stabilité. On voit des clubs qui montent rapidement et qui s’écroulent parce qu’ils mettent de l’argent et qu’à un moment il n’y en a plus. Nous, ce n’est pas notre philosophie. On sait qu’on ne vas pas s’écrouler. On a bien stabilisé la situation avec l’équipe B aussi qui est en R3. Il n’y a pas beaucoup de clubs dans le coin qui peuvent bénéficier de deux équipes comme ça. Par contre, c’est un objectif de monter en R1. Déjà, ça serait historique pour le club et pour moi. J’ai envie d’écrire cette histoire. C’est un objectif très important. On a envie d’être au plus haut niveau régional et d’y représenter le club.

Loic Bouger t’a encensé en disant que le socle du club, c’était toi : comment collaborez-vous ?

C’est gentil de la part de Loic. J’ai ce club dans la peau, je dis de temps en temps à mes joueurs : “Moi j’ai vraiment le sang bleu et blanc” ! J’ai tellement de souvenirs donc pour moi ce club est très important. Je me suis très bien entendu avec Loic dès le début. Depuis des années, on est sur la même longueur d’onde. Il m’a laissé les pleins pouvoirs au niveau sportif. Il ne m’a jamais embêté sur quoi que ce soit. De mon côté, à chaque fois que je lui demande quelque chose nécessaire à notre progression, il essaie toujours de répondre favorablement. C’est pas facile parce que ça dépend des moyens financiers et on ne les a pas forcément. Mais on s’entend super bien, c’est un président idéal pour moi.

Texte : Emile Pawlik / Mail : emile.pawlik@gmail.com – contact@13heuresfoot.fr / Twitter : @EmilePawlik

Photos : Kévin Clément, Emile Pawlik.