A 36 ans, l’ancien défenseur central de Dijon (L2, L1) est de retour dans sa ville et dans son club de toujours, à l’AS Cannes, où il est éducateur chez les jeunes. Il évoque sa carrière, sa nouvelle vie et son expérience en Indonésie, où il se mettait en transe avant de jouer.

Photo Kevin Mesa / AS Cannes

Dix ans. Loin des palmiers. Loin des paillettes. Loin de La Croisette et de la rue d’Antibes. Loin du palais des Festivals. Loin des plages du midi et du kiosque numéro 19, où il aimait bien traîner plus jeune. Loin de l’hôtel Belle Plage, que ses parents ont vendu. Loin du soleil.

Dix ans d’exil. Loin de Cannes. Loin de chez lui.

Pour Steven Paulle, l’enfant du stade Coubertin à La Bocca, il a fallu quitter sa ville natale pour grandir, s’épanouir et vivre à fond sa carrière de footballeur professionnel. Loin des Dragons avec lesquels il a effectué ses débuts en National en 2006, lancé par Michel Troin, au milieu d’une pléïade de « noms » venus porter le maillot rouge et blanc avec l’ambition de retrouver la Ligue 2.

La Ligue 2, l’AS Cannes ne l’a jamais revue (ça dure depuis 2001), contrairement à Steven, parti découvrir le niveau supérieur en 2010, appelé par le mentor Patrice Carteron, son ancien coach à Cannes La Bocca.

Travail mental et psychologique

Sous le maillot de l’AS Cannes, en National, à la fin des années 2000.

Le grand défenseur (1,87m et 82kg) sort alors de quatre saisons pleines en National, où il a finalement réussi à se faire sa place, non sans mal. Steven a aussi joué au club du Suquet dans sa jeunesse, à Cannes, où il est un peu le chouchou du public qui ne lui a pourtant rien épargné, notamment à ses débuts à Coubertin, où il n’était pas forcément jugé à sa propre valeur. Comme s’il devait en faire toujours plus que ses coéquipiers. Comme s’il était sans cesse épié. Sans doute parce qu’il était … cannois.

A cette époque, on aurait dit « Steven jouera en Ligue 1 un jour », pas sûr qu’on l’aurait cru. Et pourtant, c’est ce qu’il s’est passé ! A force de sérieux, de travail mental et psychologique.

Dès sa première saison à Dijon, en Ligue 2, en 2010-2011 (34 maths disputés), le DFCO gagne son billet pour l’élite, pour la première fois de l’histoire du club (il connaîtra une deuxième accession en 2016) ! Steven dispute ensuite 22 matchs en Ligue 1. La consécration. Et pourtant, il n’en garde pas un souvenir immense. Le grand blond, rentré chez lui depuis 2 ans et demi, éducateur à l’AS Cannes (il s’occupe des U18.U20), vous raconte tout ça !

« J’ai toujours joué comme si c’était mon dernier match »

Steven, tout n’a pas été simple, mais tu es arrivé à jouer en Ligue 1, quatorze mois seulement après ton départ de Cannes et du National en 2010…
Mais oui, c’est fou, je le sais ! Honnêtement, à mes débuts, à Cannes, je n’avais déjà pas forcément le niveau pour jouer en National, mais j’y suis arrivé parce que je m’étais fixé un objectif et c’était celui-là. Je n’en avais pas d’autre. Je voulais jouer en équipe première à Cannes, peu importe le niveau où était le club.

Photo Kevin Mesa / AS Cannes

Qu’est-ce qui a fait la différence ?
Je me suis donné les moyens d’y arriver. Là où j’ai été meilleur que certains à ce moment-là, à Cannes, c’est au niveau mental. Je ne lâchais pas. On pouvait faire appel à moi, mentalement, je ne lâchais rien, même quand j’avais des coups de mou. Et quand je suis parti de Cannes, où j’avais réussi à faire mon trou après des débuts difficiles, je ne voulais même pas aller en Ligue 2, j’étais bien là où j’étais. Et puis, la première année avec Dijon se passe très bien. Mais la saison d’après, en Ligue 1, il a fallu re-batailler.
C’est comme si, durant toute ta carrière, il a toujours fallu batailler… Quand je me retourne, je me dis « Je suis allé en Ligue 1 », ok, mais je sais très bien que je le dois à mon mental. Je me suis accroché, je me suis donné les moyens, alors que techniquement et footballistiquement, je n’avais pas forcément le niveau. A Cannes, je me suis contenté de jouer dans un certain registre, parce qu’on me disait que j’étais un boucher, que je « rentrais dedans », alors je me complaisais là-dedans, même à Dijon au début. Pourtant, j’ai vu à l’entraînement, au fur et à mesure de ma carrière, que j’étais capable de mettre des supers bons ballons, de jouer. Alors, je me suis dit « il faut que j’arrête de jouer que là-dessus, j’ai d’autres qualités ». J’ai appris ça sur le tard.

Le football est fait de rencontre : celle avec Patrice Carteron a beaucoup compté…
Avec Patrice Carteron, ça a marché oui, y’avait plus de communication avec lui, il me faisait plus confiance même si y a eu aussi des moments où il ne me faisait pas jouer. Avec lui, c’était une nouvelle méthode de coaching, basée sur la relation avec les joueurs.

Avec les supporters de Dijon aussi, ça a marché : on t’a vu poser avec eux, en tribunes, derrière une bâche à ton effigie.
Déjà, à Cannes, j’accordais beaucoup d’importance dans ma relation avec les supporters. J’avais des potes qui étaient supporters, ils me disaient sans cesse, « Il faut venir nous voir, même si vous avez perdu ».

C’est important cette relation, on est encore dans la communication là, et ça, je l’ai vite compris. Quand je suis arrivé à Dijon, un supporter est venu me voir à la fin d’un match et m’a dit, « Bien joué, la prochaine fois on se boit une bière », j’ai dit « ok ok », du coup ça s’est fait et on a sympathisé. Et après, j’ai eu de bonnes relations avec les supporters de Dijon, certains sont devenus des amis et sont même venus quand Cannes a reçu Dijon en Coupe de France la saison passée.

En 2020, dix ans après ton départ, retour à la case départ, à Cannes…
Je suis revenu pendant la Covid, mais je ne voulais pas rentrer, je voulais rester en Indonésie, où je jouais depuis janvier 2017 (Makassar puis Jakarta). J’étais super bien en Asie, mais la Covid est arrivée, je suis rentré en France, on ne savait pas combien de temps allait durer la situation, j’ai continué de m’entraîner, et c’est là que je me suis dit « Si je peux aider l’AS Cannes… » J’ai postulé, j’ai fait 4 matches en National 3, et le championnat s’est arrêté en mars 2020. »

Tu disais pourtant ne pas vouloir partir de Jakarta …
Mais je me suis blessé, j’ai eu une déchirure de l’adducteur, j’ai été écarté deux mois. J’ai essayé de revenir, sauf que la saison allait recommencer, et on ne savait pas comment ma blessure allait évoluer. Je leur ai demandé d’attendre, mais ils ont pris quelqu’un , ils m’ont enlevé de la liste et au bout de quelques temps, alors que je m’entraînais quand même avec eux, on a trouvé un accord pour que je puisse partir.

Parles-nous de ton expérience en Indonésie ?
J’y suis resté 3 ans. Quand je suis arrivé, je me suis dit « ça va être galère », c’est pauvre, mais les gens son tellement gentils, tellement adorables, tellement ouverts d’esprit. J’ai vécu tellement de situations… Les stades sont pleins à craquer. En fait, je regrette de ne pas y être allé avant. J’ai passé deux saisons à Makassar, et quand je suis parti… Le jour de mon dernier match, c’était dur… J’ai tout fait pour renégocier mais le club voulait absolument un attaquant, alors qu’on avait terminé 2e, qu’on avait fait une super-saison. J’ai eu un gros coup de blues dans ma voiture, je savais que c’était fini, que je ne revivrais plus jamais ce que j’avais vécu là. Je m’en souviendrai toute ma vie. J’ai senti qu’une grosse page s’était tournée. C’était dur. Mais je me suis régalé, j’ai kiffé chaque minute que je jouais.

Photo Kevin Mesa / AS Cannes

Ta nouvelle vie d’éducateur à l’AS Cannes ?
Quand je suis revenu au club, en 2020, un ami coach, Taoufik Harris, m’a demandé de lui donner un coup de main, une fois par semaine, avec les U14, ça me plaisait, même si ce n’était pas beaucoup. L’année suivante, en 2021-22, le club m’a confié les U17, et cette année, j’ai les U20/U18, on joue en Régional, c’est la réserve des U19 nationaux, entraînés par Ludovic Pollet. Je prends beaucoup de plaisir à faire éducateur, mais je ne sais pas où ça va m’amener. J’aime me remettre en question, avoir des problèmes, trouver des solutions tactiquement sur le terrain. J’aime la vie sociale avec les joueurs. Mon épouse Mathilde et mes amis ne voient pas forcément là-dedans, mais pour l’instant, j’ai envie de continuer. D’avancer. Y’a encore un an, parler devant un groupe, cela n’était pas possible. Je prends sur moi. Je me surprends aussi : j’essaie d’aller chercher cette sensation comme quand j’étais sur le terrain, pour me mettre dans le match comme mes joueurs. J’ai beaucoup appris avec les stagiaires que j’ai côtoyés en formation. Les échanges me font avancer. Je demande souvent d’avis extérieurs, je pioche à gauche à droite pour m’améliorer, après, je l’analyse à ma façon, je fais comme je l’entends.

Voir l’AS Cannes en National 3, ça ne te fait pas mal au cœur ?
Si, un peu, quand tu vois ce stade, avec pas beaucoup de public… Je vais voir les matchs, du moins j’essaie. Mais on n’a pas le choix, il faut être derrière le club pour qu’il remonte au plus vite. Mon premier souvenir de Coubertin, c’est Cannes – Fenerbahçe en coupe d’Europe de l’UEFA (1994-1995), j’avais 8 ans, mais que c’est loin ! Même mes matchs, quand je jouais en National, me paraissent loin, c’était y a 12 ans ! Des pages ont été écrites et se sont tournées depuis !

Et Dijon, tu y retournes ?
Assez souvent, oui. La dernière fois que je suis allé voir un match, j’étais en tribune avec les supporters. Je vais essayer d’y retourner, j’aimerais bien voir le nouveau centre de formation. Et puis je suis toujours en contact avec le président, j’ai de bonnes relations avec le club. J’essaie de ne pas louper leur match à la télé.

Steven Paulle du tac au tac
« J’aurais bien aimé être journaliste sportif »

Kevin Mesa / AS Cannes

Le joueur le plus connu de ton répertoire ?
Eric Bauthéac.

Le joueur le plus fort avec lequel tu as joué ?
Gaël Kakuta.

Le plus fort que tu as affronté ?
Olivier Giroud.

Un coéquipier ?
Cédric Varrault.

Le stade qui t’a procuré la plus grande émotion ?
Lens.

Le joueur avec qui tu t’entendais le mieux sur le terrain ?
Chaher Zarour.

Un modèle de défenseur ?
J’aimais bien Maldini et le Ramos de l’époque Real Madrid, mais je n’ai jamais vraiment eu de modèle.

Meilleur souvenir sportif ?
La montée en L1 avec Dijon en 2011.

Le pire souvenir sportif ?
La descente en L2, la saison suivante.

Fin de saison 2015-2016, Olivier Dall’ Oglio lui remet son cadeau d’adieu pour son départ du DFCO, après une deuxième accession en L1. Photo Vincent Poyer – DFCO

Un match référence ?
Il n’y en a pas un en particulier. De tout façon, après un match, je sais si j ai été bon ou mauvais. J’ai découvert quelque chose, qui s’appelle le flow, c’est un état que l’on a sur le terrain : quand tu vois les choses avant, que tu es dans le bon tempo, que tu réussis tout ce que tu fais. J’ai appris, en discutant avec une coache mentale, à garder ce flow le plus longtemps possible pendant un match. Si tu « enfonces » ton attaquant dès le premier duel, 90 % de ton match est réussi en général, et ça, tu le sens des le début du match si t’as le flow, si t’as les jambes. J’ai compris en vieillissant qu’il fallait que je sois agressif dès le début du match et qu il fallait beaucoup parler. Le fait d’en rajouter, d’en faire des tonnes, de faire du cinéma, ça me mettait bien, j’avais besoin de me transcender. C’est venu à Dijon, car à Cannes, j’étais introverti. Quand je ne jouais pas trop à Dijon, il a fallu que j’aille chercher autre chose, que j’aille puiser dans mon énergie et dans mon mental, c’est ce qui fait que, du coup, tous les matchs, je les jouais un peu comme si c’était mon dernier. J’avais besoin de ça, de jouer tout à fond.

Ton pire match ?
En Ligue 1 à Caen, avec Dijon, je n’avais pas été bon, ça m’avait mis une claque. Sur un corner, j’étais bien, concentré sur mon marquage, et un coéquipier me dit « change », malheureusement, l’adversaire que j’ai pris au marquage marque, et là, j’ai sombré mentalement. Mais j’ai appris après que ce n’était pas grave, qu’il fallait relever la tête, qu il fallait passer à autre chose.

As-tu des rituels ?
Oui, des tocs même ! Le caleçon, le Red bull à la maison avant de partir, au point de faire une crise si je n’en avais pas, j’allais aux toilettes passer un moment avant les matchs, et aussi je me « rentrais dedans », je me mettais des coups, jusqu’à ce qu’un de mes coéquipiers, en Indonésie, me propose de me mettre des coups. Je lui ai dit « bonne idée », et du coup il me frappait, pas trop fort, avant les matchs. C’était un rôle aussi un peu que je me donnais.

Un geste technique ?
Le tacle, ou le retourné.

Combien de cartons rouges ?
Je crois que je n’en ai pas pris de direct, sinon, deux jaunes d’affilée, j ai dû quatre ou cinq fois.

Combien de vrais amis dans le foot ?
Très peu. J’ai beaucoup de potes dans le foot, mais de vrais amis, très peu. Dans le foot, on se croise. Après, ça matche un peu plus avec certains qu’avec d’autres, comme avec Florent Ogier, mon témoin de mariage, ou Cédric Varrault.

Premier match avec Cannes en National ?
C’était à Romorantin, ou à Yzeure, je ne suis pas sûr, en 2005, et je me suis dit ce jour-là que je ne bougerais plus, que je ne sortirais plus de l’équipe. J’avais fait un bon match. Mais j’avais remplacé le titulaire du poste, plus jeune que moi, c’était Jacques Salze, il était très fort, il est ensuite parti à Clermont.

NDLR : après vérification, c’était à … Châtellerault, le 18 mars 2006, victoire 1 à 0 de l’AS Cannes ! « Mais oui, bien sûr Anto ! Bien joué le journaliste ! »

Un coach qui t’a marqué ?
Patrice Carteron et Olivier Dall’ Oglio aussi, même s’il ne me faisait pas forcément jouer, mais j’appréciais ses séances.

Le coach dont tu ne gardes pas un bon souvenir ?
Il est décédé, c’était Stéphane Paille.

Le club où tu as failli signer ?
Quand j’étais à Dijon en Ligue 1, Patrice Carteron me dit que je vais peut-être avoir moins de temps de jeu en 2e partie de saison, et veut m’envoyer à Southampton en Premiership (D2 anglaise), j’avais dit non. Je lui avais dit que je voulais m’imposer à Dijon.

Une ville ?
Cannes.

Un plat, une boisson ?
La San Pellegrino ou le Coca zéro. Le Nasi goreng, c’est du riz frit avec des morceaux de poulets, des crevettes et une omelette dessus.

Une appli mobile ?
TikTok.

Ton film culte ?
Les affranchis.

Ta plus grande fierté ?
Mes enfants, Alexandre et William, ils ont 6 et 7 ans.

Kevin Mesa / AS Cannes

Tu n’as joué qu’une saison en Ligue 1 : qu’est ce qu’il t’a manqué pour durer à ce niveau ?
Déjà, si on s’était maintenu avec Dijon, cela aurait changé la donné. On a vraiment été à deux doigts de rester en Ligue 1. Après, je ne sais pas si j’avais vraiment le niveau de la Ligue 1, peut-être pas forcément, mais je m’étais mis trop de pression, celle de bien faire de réussir.

Je jouais, non pas avec la peur au ventre, mais avec une pression négative, que j’ai ensuite appris à transformer en pression positive. C’était peut-être aussi un problème de confiance.

A Cannes ça allait, parce que je jouais, mais on était en National, à Dijon aussi, en Ligue 2, mais après, quand on est monté en Ligue 1, il y a eu beaucoup de recrues qui sont arrivées, je n’étais pas dans les plans, je devais me battre, l’année est passée très vite. Ce n’est pas forcément une saison que j’ai apprécié, même si j’ai joué dans des grands stades.

Qualités et défauts ?
Je suis un peu introverti, dans ma bulle, réservé, pas forcément sociable de prime abord. Ce n’est pas moi qui vais prendre la parole par exemple. Je suis très sensible dans le sens ou je vais faire mes choix par rapport à l’affect. On en revient à ce que je disais : si tu n’as pas la confiance du coach, il faut être très fort mentalement. Sinon, je suis très gentil dans la vie.

Tu étais un joueur plutôt…
Athlétique.

Un chiffre ?
Toujours le 25, parce que j’ai été le 25e à être pris au centre de formation à Cannes.

Une anecdote de vestiaire que tu n’as jamais racontée ?
Une bagarre entre un joueur et un entraîneur, dans les vestiaires. Le joueur l’attendait, parce que le coach ne le faisait pas jouer. Y’a eu des insultes. Je ne dirais pas où c’était mais ce n’était pas à Cannes et c’était en France, oui !

Ton coéquipier le plus professionnel ?
Sebastian Ribas, l’attaquant de Dijon, qui nous a portés l’année de la montée de L2 en L1 (23 buts en 38 matchs !).

Une couleur ?
Rouge.

Souvenir de vacances ?
A Bali, où je passais souvent des week-ends, dès que j’avais deux jours off. Quand j’étais à Makassar, où j’ai mes meilleurs souvenirs, et à Jakarta, j’y allais souvent.

Si tu n’avais pas été dans le foot…
Je n’avais pas de plan B, juste le plan A, le foot ! J’aurais aimé faire ce que toi tu fais… Journaliste sportif.

Texte : Anthony BOYER / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06

Photo de couverture : Kevin Mesa / AS Cannes

Photos : Kevin Mesa / AS Cannes (sauf mentions spéciales)

L’entraîneur des Thoniers, « doyen » des coachs en National (il vient d’entamer sa 13e saison à cet échelon), a trouvé son port d’attache dans le Finistère, à 100km de chez lui et de son Morbihan natal, où il s’était révélé en hissant Vannes en Ligue 2 et en finale de la coupe de la Ligue. Rencontre.

Photo Fanch Hemery

C’était le plan A (il n’avait pas de plan B) du président Jacques Piriou en fin de saison dernière : « Ma priorité c’est de conserver Stéphane comme coach. C’est la pierre angulaire du système depuis deux ans. Avec un peu plus de budget, ce qui nous a manqué cette saison pour avoir deux joueurs supplémentaires, on peut être capable de renverser pas mal de choses. Bien qu’on lui ait donné peu de moyens techniques et financiers, Stéphane a fait une super saison, ce qui attire forcément les convoitises, comme pour certains joueurs, et c’est naturel. Maintenant, c’est à moi de lui vendre un bon projet », avait-il confié au Télégramme en mai dernier, après un exercice achevé à la 4e place (5e la saison précédente). Le tout avec un effectif limité en quantité. Et un budget modeste (un peu plus de 2 millions d’euros) qui n’a pas empêché l’US Concarneau de se mêler à la lutte pour la montée. Mais Le Mignan a une recette qui fonctionne : relancer des joueurs en manque de temps de jeu. C’est ça, sa méthode !

Trois joueurs de l’équipe-type de National à Concarneau !

Aux côtés du président Jacques Piriou. Photo Fanch Hemery

Jacques Piriou avait trouvé les arguments car Stéphane Le Mignan (48 ans) s’est engagé à bord des Thoniers jusqu’en 2025. Sauf que, cet été, son effectif a été chamboulé. Cinq joueurs majeurs, dont trois figuraient dans l’équipe-type de National en fin de saison dernière, sont partis : l’attaquant Fahd El Khoumisti (deuxième meilleur buteur avec 20 buts, meilleur joueur de la saison et des mois d’août et octobre), le gardien Vincent Viot et le défenseur Donatien Gomis, ainsi que Tristan Boubaya (meilleur joueur en mars 2021) et Félix Ley, le jeune joueur polyvalent de l’équipe. Quant à Landry Nomel, il vient lui aussi de quitter le navire pour signer en Ligue 2 à Valenciennes.

L’entraîneur breton a donc remis son ouvrage sur le métier avec les recrues Maxime Pattier (Stade Briochin), Issouf Paro (ex-Niort), Mamadou Sylla (Sète), Alec Georgen (Auxerre) Gaoussou Traoré (Amiens), Tom Lebeau (Niort), Ambroise Gboho (Laval), Pierre Jouan et Kylian Le Her (Brest B), Axel Urie (Créteil), plus ceux qui sont restés (Maitre, Julloux, Jannez, Etuin, Sinquin, Mannaï, Gope-Fenepej, Rabillard et Boutrah qui vient dêtre sacré meilleur joueur de National au mois d’août).

Le discours de la méthode

Photo Philippe Le Brech

« On a perdu cinq ou six titulaires mais c’est normal car les joueurs arrivent avec des conditions assez basses au niveau contractuel et quand il y a performance sportive, ils partent à des conditions plus avantageuses. Je suis content pour eux. Mais après, dans le recrutement, il y a une part de réussite et je n’ai rien inventé », se défend Stéphane Le Mignan, qui est parvenu à reconstruire une équipe tout aussi compétitive. L’entraîneur concarnois s’explique sur sa méthode.

« Il n’y a ni directeur sportif ni cellule de recrutement à l’US Concarneau. On doit être un cas un peu unique mais je ne suis pas contre. Comme ça, je suis en contact direct avec les joueurs et je pense qu’ils le ressentent. Il y a aussi un suivi direct et quotidien avec le président, Jacques Piriou, qui valide sur le plan financier. On ne peut pas faire n’importe quoi et aller au-delà de certaines limites budgétaires. Par exemple, à quelques exceptions près, comme Pattier (contexte breton) ou Sylla (descente du FC Sète), on ne peut pas recruter des joueurs qui ont fait une très bonne saison en National. Le fait de fonctionner en binôme avec le président, c’est bien sûr plus de travail et d’énergie, mais il faut avoir des idées et bien s’entourer. Depuis vingt ans que je suis entraîneur, j’ai aussi un réseau qui me permet de dégrossir le travail avec des techniciens qui connaissent mon fonctionnement. Il faut repérer les joueurs qui ont du potentiel et qui sont sous-utilisés ou en situation d’échec. Trouver ceux qui peuvent être moyens ailleurs et bons chez nous. Il y a une phase d’observation, la vidéo nous aide bien, et ensuite des rencontres, au téléphone ou en direct. Il y a une question de feeling aussi. Le risque, comme on a des joueurs qui ont moins joué, c’est la blessure. Mais je suis content quand on avance avec le club et le joueur grâce à notre fonctionnement. »

Cloarec, Cauet, Laguillier…

Photo Fanch Hemery

Il convient aussi de rendre hommage aux entraîneurs qui ont précédé Stéphane Le Mignan pour tout ce qu’ils ont apporté à l’US Concarneau. Nicolas Cloarec, sur le banc de l’équipe A de 2009 à 2018, a fait monter les Thoniers de CFA 2 (N3) en National et leur a permis de surfer sur la vague porteuse de la Coupe de France (1/4 de finale contre Guingamp en 2015). Benoît Cauet (janvier 2019 à février 2020) a fait en sorte que le club change de dimension : il a mis fin aux entraînements du soir, après la journée de boulot, pour passer aux footballeurs à plein-temps.

Il ne faudrait pas non plus oublier Pascal Laguillier, l’actuel adjoint de Le Mignan, qui a toujours été la bouée de sauvetage quand le bateau prenait l’eau, comme lorsqu’il a remplacé Michel Jarnigon (démissionnaire) en février 2007, ou assuré l’intérim après l’arrêt de Nicolas Cloarec (novembre 2018) et l’arrivée de Benoît Cauet (janvier 2019). Il était là aussi pour recoller les morceaux (quatre victoires en quatre matchs) après le départ de Benoît Cauet et avant l’arrêt des championnats (mars 2020). « Pascal, c’est le couteau suisse du club », apprécie le président Jacques Piriou qui l’avait, pour l’occasion, ressorti du placard du secrétariat où il se trouvait depuis un an.

Entraîneur à 26 ans

Sous le maillot de Vannes. Photo Philippe Le Brech

Après un parcours de joueur amateur dans le Morbihan, d’abord à Plouharnel à côté de Carnac, puis à l’US Montagnarde, au Stade Pontivyen, à la Saint-Colomban Locminé et au Vannes OC, Stéphane Le Mignan a basculé à 26 ans dans la carrière d’entraîneur. « J’avais commencé à passer mes diplômes d’entraîneur au lycée du Gros-Chêne à Pontivy où j’étais scolarisé. »

D’abord entraîneur de la réserve du VOC, il s’est retrouvé à 28 ans à la tête de l’équipe première en CFA (N2). « On est monté au bout de trois ans en National et en Ligue 2 après trois saisons aussi. » Avec, au passage, une finale de la Coupe de la Ligue dès la première année en L2 (2009) et donc, dès la première participation, un coup d’essai qu’il transforme en coup de maître : « C’était du rêve à cette époque-là. »
Le rêve durera trois ans en Ligue 2. Puis c’est la grosse déception : « Une descente avec un total de points (44) jamais atteint pour un relégué. »

Stéphane Le Mignan reste encore deux saison à Vannes en National. Un championnat qu’il continue à fréquenter à Boulogne (2013 à 2016) et à Créteil (2016 à 18). Puis vient la parenthèse Qatar, à Al-Gharafa, avec Christian Gourcuff (2018-19). « Je l’ai suivi pour mon plaisir personnel. »

Enfin, c’est l’arrivée à l’US Concarneau, en 2019, « un club qui me ressemble et qui me va bien. » Pour un « remake » du Voc ? « A Concarneau, on veut continuer à avancer mais il y a un sacré changement par rapport à la réforme du foot français. Et il y a aussi de grands écarts financiers entre les clubs, qui n’existaient pas quand j’étais au Voc. »

Un coach-adjoint (Laguillier) qui sait d’où il vient. Un entraîneur en chef, Stéphane Le Mignan, qui sait où il veut aller. Les Thoniers peuvent naviguer car ils sont bien barrés.

Stéphane Le Mignan du tac au tac
« Le plus beau championnat ? Le National ! »

Le top de votre carrière d’entraîneur ?
La finale de la Coupe de la Ligue avec Vannes contre les Girondins de Bordeaux en 2009.

Le flop ?
La finale de la Coupe de la Ligue aussi car on perdait 3-0 après 13 minutes de jeu (score final 4-0).

Votre plus belle victoire d’entraîneur ?
Un 1/8e de finale de Coupe de France avec Vannes à Montpellier (2007): on gagne 0-2 après prolongation. Et la 1/2 finale de la Coupe de la Ligue gagnée à Nice aux tirs au but (1-1, 3-4).

La pire défaite ?
Le premier match de la saison 2017-18 avec Créteil contre Cholet. On perd 5-0 à domicile.

Votre plus belle émotion d’amateur de football ?
La victoire 3-0 de l’équipe de France contre l’Ukraine en barrage retour des éliminatoires de la Coupe du Monde après une défaite 2-0 à l’aller (2013). J’ai vécu ça au coeur du Stade de France.

La plus grande déception ?
La descente en National avec Vannes (2011). J’avais dit à mes joueurs qu’on se maintiendrait si on gagnait nos quatre derniers matchs. On les gagne et on descend avec un total de points (44) jamais atteint pour un relégué.

Le meilleur joueur que vous ayez entraîné ?
Frédéric Sammaritano à Vannes. On jouait en L2 et il part en cours de saison (2010-11) à l’ AJ Auxerre pour se retrouver en Ligue des Champions contre le Real Madrid, le Milan AC et l’Ajax Amsterdam ! Et il y a eu Wesley Sneijder (le Néerlandais aux 134 sélections) quand j’étais au Qatar, à Al-Gharafa, avec Christian Gourcuff.

Votre stade préféré ?
Geoffroy-Guichard, à Saint-Etienne, même s’il y faisait un peu froid quand on y a joué en Coupe de France avec Vannes (défaite 2-0 en 1/8es de finale en février 2010). La Beaujoire à Nantes aussi.

Le plus beau championnat ?
Le National.

Le dernier match que vous ayez regardé à la télé ?
Le Stade Rennais, hier (jeudi dernier), en Ligue Europa contre Fenerbahçe (entretien réalisé la semaine dernière).

L’entraîneur qui vous a le plus marqué ?
Christian Gourcuff.

Celui que vous admirez ?
Christian Gourcuff également. Ce n’est pas de l’admiration mais une source d’inspiration.

La plus grande qualité d’un entraîneur ?
La passion.

Votre plus grande qualité d’entraîneur ?
La passion de l’entraînement. J’aime mon métier.

Votre plus gros défaut d’entraîneur ?
J’en ai trop pour n’en citer qu’un.

Si vous pouviez changer quelque chose au championnat de National ?
Les règlements pour que toutes les équipes soient au même niveau.

Le président avec lequel vous partiriez en vacances ?
Jacques Piriou. Et je sais où ! A Collioure, dans ses vignes.

Les présidents avec lesquels vous ne partiriez pas ?
Il y en a quelques uns…

Votre souvenir le plus marquant de joueur ?
J’ai passé de très bons moments à la Montagnarde, au Stade Pontivyen et à Locminé et j’y ai gardé de très bons copains.

Texte : Denis Vergos / Mail : dvergos@13heuresfoot.fr / Twitter : @2nivergos

Photo de présentation : Philippe Le Brech

Autres photos : Philippe Le Brech et Fanch Hemery

C’est dimanche ! Bon dimanche… non pas sous vos applaudissements, mais en lecture !

Vous avez manqué un épisode de 13heuresfoot cette semaine ou ces dernière semaines (le site est en ligne depuis mercredi 10 août, et oui, déjà !) ?

Alors voici une séance de rattrapage et le récapitulatif !

Au passage, merci à notre partenaire, footamateur.fr, pour sa (nouvelle) mise en lumière hier sur son site (dorénavant, chaque samedi, vous pourrez également trouver le « récap » de la semaine sur le site www.footamateur.fr ! Merci à Jérôme Bouchacourt et à son équipe d’avoir consacré une double page dans le dernier numéro de « Foot Amateur Le Mag » !

A demain 13 heures pour une nouvelle semaine en ballon !

Le récapitulatif de la semaine

Samedi 17 septembre

  • Pascal Moulin : « Certains dirigeants sont frileux »

Le lien : https://13heuresfoot.fr/actualites/pascal-moulin-beaucoup-de-dirigeants-sont-frileux/

L’ex-coach de Jura Sud et de Moulins, où il a respectivement passé neuf et cinq saisons, retrace son parcours et se livre même à quelques confidences personnelles sur son court et récent passage à Epinal. Il réfute l’idée d’être étiqueté « coach de N2 » et aspire, à 56 ans, à intégrer le milieu pro. Entretien long format.

Vendredi 16 septembre

  • Saïd Ennjimi : « Les arbitres jouent leur tête à chaque match »

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L’ancien arbitre international n’a pas manqué sa reconversion. Le président de la Ligue de la Nouvelle-Aquitaine (depuis janvier 2017) revient sur son parcours et livre sa pensée sur l’évolution de l’arbitrage. L’ancien maître du jeu confesse aussi ses craintes quant à l’avenir du football amateur.

Jeudi 15 septembre

  • Dorian Waymel (MaLigue2) : « En Ligue 2, on ne s’ennuie jamais ! »

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Le rédacteur en chef de MaLigue2, média référence qui met en valeur la 2e division française (interviews, résumés, lives, multiplex, mercato, exclus, dossiers, etc.), évoque la belle aventure qui dure depuis près de 9 ans déjà.

Mercredi 14 septembre

  • La nouvelle vie de Faneva Andriatsima

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L’ex-attaquant et capitaine de Madagascar a rangé les crampons et endossé le costume d’entraîneur avec les U18 R1 du Clermont Foot. Il est aussi très impliqué dans le développement de son île où il oeuvre pour la jeunesse.

Mardi 13 septembre

  • Olivier Miannay : « Au Puy, je me régale ! »

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Incontournable dans le monde amateur qui lui a collé l’étiquette de spécialiste du National et du National 2, niveau où il pense avoir fait ses preuves, le manager général du Puy-en-Velay aspire, un jour, à retrouver un club pro et pourquoi pas la Ligue 1, qu’il a déjà connue à Dijon.

Lundi 12 septembre

  • Amine Boutrah (Concarneau) : « Je n’ai pas toujours eu le bon comportement »

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Lancé en équipe première à Bastia à l’âge de 16 ans avant de vivre des saisons difficiles, le lauréat du trophée de meilleur joueur de National du mois d’août, âgé de 21 ans, s’est totalement relancé depuis son arrivée à Concarneau l’an passé. Portrait.

Dimanche 11 septembre

  • Mélanie Durot : le Stade Briochin, le National et les podcasts

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A 37 ans, cette Bretonne a lancé un podcast sur le National, dans lequel elle met en avant les acteurs du championnat, et pas seulement ceux de Saint-Brieuc, sa ville et son club de coeur !

Samedi 10 septembre

  • Jean-Pierre Scouarnec : « Si on remonte, on sera mieux préparé »

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Le président de l’USL Dunkerque (National) revient sur la descente de Ligue 2 en National et évoque une remontée dans les deux ans, avec la certitude que, cette fois, son club sera mieux armé structurellement.

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L’ex-coach de Jura Sud et de Moulins, où il a respectivement passé neuf et cinq saisons, retrace son parcours et se livre même à quelques confidences personnelles sur son court et récent passage à Epinal. Il réfute l’idée d’être étiqueté « coach de N2 » et aspire, à 56 ans, à intégrer le milieu pro. Entretien long format.

Photo Philippe Le Brech

Pour Pascal Moulin, les vacances, c’est toujours en juin ! Sauf que, cette année, celles-ci sont prolongées. Pour la première fois depuis près de vingt ans, le Breton, natif de Lorient, est sans club depuis son départ d’Epinal, où il n’est resté qu’une saison à la tête de l’équipe (N2), après un très long bail de 9 ans à Jura Sud (N2, de 2012 à 2021) et un autre de 5 ans à Moulins (N2 et National, de 2007 à 2012). Des vacances, oui, mais contraint et forcé.

Du coup, l’ancien avant-centre formé à Auxerre, passé par la D3, la D2 et le National à la fin des années 80 et au début des années 90, a du temps. Beaucoup de temps. Qu’il met à profit pour bricoler dans sa nouvelle maison : « Avec ma compagne, on vient d’acheter à Vaux-lès-Saint-Claude, juste à côte du centre d’entraînement de Jura Sud à Molinges, et y’a beaucoup de choses à faire, comme la peinture ».

Consultant sur FFF TV à Bourg

Il l’avoue à demi-mots, le bricolage, ce n’est pas trop son truc. Le football, en revanche, est viscéral chez lui. Alors, il regarde beaucoup de matchs sur les plateformes, passe beaucoup de coups de téléphone ou se rend au stade : « Ce soir (entretien réalisé hier), je vais voir Bourg-en-Bresse – Saint-Brieuc en National. Cette année, j’ai commenté des matchs de National de Bourg pour FFF TV, c’est bien, cela me permet de découvrir une autre facette du football. Et demain (aujourd’hui), j’hésite entre un match de N3 à Jura Dolois ou à Jura Sud contre l’Olympique Lyonnais en N2. C’est toujours intéressant ».
C’est drôle, quelque chose nous dit que son choix se portera sur Jura Sud !

La dernière fois que l’ancien joueur d’Epinal et de Dijon avait vécu une telle situation (le chômage, ce ne sont pas des vacances, hein !), c’était en 2003, après sa première expérience d’entraîneur, à Montceau-les-Mines (DH puis accession en CFA2), juste après avoir mis un terme à sa carrière de joueur à Lons-le-Saunier en N3. « J’étais resté sans club pendant quelques mois. Je supervisais des matchs pour Sylvain Matrisciano, et il m’a demandé de le rejoindre à Louhans-Cuiseaux, en National, comme adjoint, ce que j’ai fait, bénévolement. C’était pour me remettre dans le circuit. J’étais jeune, j’avais 37 ans, j’étais en quête d’apprentissage, même encore aujourd’hui à 56 ans ! Puis Sylvain a eu des soucis de santé et j’ai coaché l’équipe pendant quatre matchs en National, et cette fois le club m’a fait un contrat. Cela m’a permis de continuer à apprendre. »

Avec Louhans, l’histoire se poursuit en CFA la saison suivante puis s’arrête. « Le club a pris quelqu’un d’autre la saison suivante alors que j’avais déjà commencé le recrutement. J’avais attiré Alexandre Licata, Alexis Romao et Loïc Chavériat, dont c’était le retour. J’étais en fin de contrat, je ne suis pas parti en très bons termes avec les dirigeants mais bon… J’ai rejoint Orléans et Bruno Steck, qui était mon entraîneur à Dijon en National. J’étais adjoint et je m’occupais de la réserve, avec laquelle on est passé de DH en CFA2 avec des résultats exceptionnels (25 victoires et 1 nul). »

Titulaire du BE2 à 29 ans

La saison suivante, les dirigeants du club du Loiret ne renouvellent pas Bruno Steck, en fin de contrat, et propose à Pascal, titulaire du BE2, d’être n°1 : « J’ai passé mon diplôme tôt, à 29 ans, car pour moi, c’était dans la lignée de ce que je voulais faire. C’était du sport car cette année-là, en 1995, je jouais à Dijon en National, j’avais le tronc commun la journée, les entraînements le soir, les matchs le week-end et ma fille est née ! Et en plus, je signe en D2 à Epinal la même année. »

A Orléans, ils se sent bien, mais les dirigeants veulent prendre un directeur sportif. Bruno Germain arrive. Dans le foot, c’est un nom. « On ne partageait pas forcément la même vision, y’a eu des incompréhensions. Le président a tranché : il l’a conservé, mais pas moi. J’ai pris mon premier shoot ! Il me restait un an de contrat. En coupe de France, après avoir gagné 3 à 0 au 8e tour sur le terrain de l’AC Ajaccio, on a fait un 32e de finale, ce qui n’était pas arrivé à l’USO depuis 19 ans, et même un 16e de finale ! On avait ramené Lens au stade de la Source (défaite 1-3). »

Jura Sud, 20 ans de N2 dont 9 avec lui !

La suite de son parcours le mène à Moulins (CFA), en 2007, club qu’il a éliminé en 32e de finale de la coupe avec Orléans. Il passe cinq saisons dans l’Allier et connaît une accession en National puis une relégation la saison suivante, toujours pas digérée (lire plus bas). « Après la saison 2011-2012, il me restait un an de contrat, mais il y a eu un changement de direction. Pour la nouvelle équipe qui avait viré le président, avec qui je suis toujours en contact, j’étais la deuxième cible. C’est comme ça. »

Arrive ensuite Jura Sud. « Quand on sait que cela fait 20 ans que le club est en N2 et que j’en ai fait 9… C’est énorme et en même temps paradoxal car je suis Breton et Jurassien d’adoption. Mes parents se sont installés en 1979 à Lons-le-Saunier, où j’ai joué gamin. Or je n’ai jamais joué à Jura Sud. Après Moulins, c’est moi qui suis allé vers eux, j’ai pris mon téléphone, j’ai fait mon commercial ! Je connaissais quelques personnes au club, comme Hervé Saclier, actuel entraîneur de Jura Dolois en N3, on était en formation ensemble à l’AJ Auxerre, et aussi Michel Pinto, avec qui j’ai joué à Lons en CFA2. »

Souvent placé, jamais gagnant, Jura Sud ne parvient pas à passer le cap et à gravir la marche vers le National. Le club aux quatre clochers, qui renvoie une image de ruralité (ce n’est pas péjoratif), y parviendra-t-il un jour ? « En fait, Jura a un avantage et un inconvénient. L’avantage, c’est qu’il n’a pas de ville, puisque c’est le recoupement de quatre villages avec un centre d’entraînement à Molinges et un stade à Moirans-en-Montagne. Cette particularité a fédéré beaucoup de personnes au départ, moins maintenant. Le désavantage, c’est justement de ne pas être au moins une ville moyenne, et de se situer entre Saint-Claude et ses 10 000 habitants, et Oyonnax, qui est tourné vers le rugby et qui n’est pas dans le même département (Ain). Automatiquement, ça n’attire pas de gros partenaires. On en a déjà parlé avec le club lorsque j’y étais : il faudrait faire de Jura Sud LE gros club du Jura, en se rapprochant de Lons-le-Saunier, préfecture du département, qui joue en R1 et qui est plus une ville de football, avec de grosses entreprises. Je connais bien ce club car mon père fut président dans les années 80. Cette mutualisation permettrait de développer le club et d’envisager dans la durée une accession au niveau supérieur. Mais il faut une volonté sportive et politique. »

« Le National 2 s’est professionnalisé »

Quand on a passé 9 ans de sa vie dans un endroit, des liens étroits se créent : « Je suis toujours en relation avec Jura Sud, j’ai vu un des mes présidents, Edmond Perrier, très récemment, et je suis retourné au match y’a 15 jours, cela faisait quasiment 2 ans que je n’avais pas remis les pieds au stade, très exactement depuis que les championnats avaient été arrêtés en octobre 2020 à cause du Covid. On s’est fait la bise avec Valentin Guichard, le coach de Jura Sud, qui a été un de mes joueurs, c’était sympa. Ils ont pris un bon départ, je suis vraiment content pour eux. »

Neuf ans en N2, et quatre autres avec Moulins, donc (entrecoupés d’une saison en National), de quoi vous forger une réputation de spécialiste de ce championnat, qu’il a vu évoluer : « le National 2 s’est professionnalisé. Les staffs ont été élargis, ce qui a permis de mieux répartir les tâches et d’être plus précis. De plus, dans la plupart des clubs, tout le monde ne fait plus que du football, soit sous forme de contrat d’apprentissage, soit sous forme de contrats fédéraux. Après, il y juste a les moyens qui diffèrent selon les clubs. Quand je suis arrivé à Jura Sud, la plupart des joueurs travaillaient, et là, depuis 5 ou 6 ans, ils ne font que du foot. Automatiquement, les entraîneurs et les dirigeants sont plus exigeants en termes de résultats. Surtout qu’avec la réforme, il va y avoir de la casse. D’ailleurs, je constate qu’il y a beaucoup plus de cartons rouges cette année, de tension. Il y a moins de maîtrise car il y a plus d’enjeu. »

Epinal, un retour et des contrariétés

Pascal Moulin, en 1995, sous le maillot d’Epinal, félicité par le maire de l’époque, Philippe Seguin. Photo DR

Après Jura Sud, arrive l’épisode Epinal. Pascal Moulin a « planté » quelques buts au stade de La Colombière en Division 2 (1995-1997), où il a joué, et où il a toujours la côte. Pourtant, l’expérience ne dure qu’un an. L’histoire s’achève avec ce sentiment que les deux parties, dirigeants et entraîneur, ne se sont pas comprises. « Il y a plusieurs éléments. D’abord, on n’était pas d’accord au départ avec le président sur la durée de contrat. Je n’ai signé qu’un an, je pense que c’est une erreur. Il avait annoncé qu’il voulait jouer la montée en National. Or je suis arrivé tardivement, il n’y avait quasiment plus de joueurs offensifs, je ne connaissais pas l’effectif, et rapidement, à la trêve, on a vu que Paris 13 Atletico faisait un parcours exceptionnel, et que donc, pour la montée, ça allait être compliqué. Pour jouer une montée rapidement, en un an, comme ça, soit vous avez des moyens colossaux, soit vous la programmez dans le temps. Je n’aurais pas dû accepter de ne signer qu’un an. En 2e partie de saison, on revient dans les 4 premiers, on fait une série de 8 ou 9 matchs sans défaite, mais mes dirigeants ne reviennent pas vers moi… Je ne suis pas né de la dernière pluie, je me suis dit « ils n’ont pas envie » et j’ai pris la décision de partir en fin de saison. En fait, eux n’avaient pas de vraies raisons, juste des impressions, ils pensaient que je n’étais pas bien au club. Il y a aussi un truc très personnel. En août 2020, j’ai perdu mon papa. En novembre 2020 j’ai perdu un frère (Stéphane, ancien arbitre). Au mois de juillet 2021, à mon arrivée à Epinal, j’ai dû m’absenter dix jours car mon ex-épouse et maman de mes deux enfants est décedée, il a fallu que je sois proches de ma famille. Et en décembre, j’ai perdu ma belle-mère. En seize mois, j’ai perdu quatre personnes très proches… C’est vrai que les six premiers mois à Epinal, mentalement, j’étais sous une chape de plomb. C’était lourd à porter, même si j’ai réussi à me libérer de cela en deuxième partie de saison. »

« A part tracer le terrain et signer des chèques, j’ai tout fait ! »

Aujourd’hui, le récent titulaire du BEPF (obtenu en 2020) est sur le marché. Et aimerait bien, enfin, intégrer une structure professionnelle. Le problème, et il se pose pour bon nombre de ses collègues, c’est qu’il n’est pas un grand nom du football. Pénalisant car les clubs aiment bien recruter « sécurité » : « Quand on vient du monde amateur, et qu’on a n’a pas entraîné en pro ou dans un centre de formation, c’est difficile d’y mettre un pied. Beaucoup de dirigeants sont frileux. Mais regardez ce que font Franck Haise à Lens et Régis Le Bris à Lorient, on voit qu’ils ont les capacités pour entraîner en Ligue 1. Ce n’est pas seulement une question d’âge ou du niveau où vous avez évolué, c’est aussi une question de management. Pour moi, c’est ça qui fait le football et qui change avec le niveau. Sébastien Desabre, qui coachait Niort en Ligue 2 il n’y a pas longtemps et qui n’avait jamais entraîné plus haut qu’en CFA2 en France (au Cannet-Rocheville, à côté de Cannes), est aussi un exemple, de même que Laurent Batlles, qui avait la réserve de Saint-Etienne, et à qui on a donné sa chance; il a su la saisir. J’ai une expérience de 22 ans quand même : à part tracer le terrain et signer les chèques, je crois que j’ai tout fait ! J’ai lavé les maillots et les chasubles, j’ai géré des masses salariales, j’ai conduit des mini-bus, j’ai l’expérience des joueurs, du foot. Je connais tous les rouages du foot amateur. Après, un coach doit aussi améliorer son image et sa communication quand il va plus haut, il faut le savoir ça aussi. »

Alors, Pascal Moulin ne souffre-t-il pas d’être étiqueté « coach de N2 » ? « C’est bien français ça de mettre des étiquettes ! Mais je n’en souffre pas. Peut-être qu’il faut aller à l’étranger pour montrer que l’on est capable de manager des joueurs professionnels de haut niveau. En 2019, quand j’ai été retenu au BEPF, j’ai peut-être été le premier coach de plus de 50 ans à figurer dans la liste. Pour que Guy Lacombe ait envie de me prendre et de défendre mon dossier devant le jury, c’est que, peut-être, il a décelé ma motivation, mon envie et ma curiosité. Bien sûr, ça me motive pour la suite. C’est aussi un défi personnel, j’ai envie de me prouver que j’en suis capable. On verra. Il faut attendre les opportunités, les offres. »

Pascal Moulin, du tac au tac
« A Thouars, Bertrand Marchand m’a donné envie d’être entraîneur »

Meilleur souvenir de joueur ?
Quand signé pro en D2 à Epinal en 1995.

Meilleur souvenir d’entraîneur ?
La montée en National avec Moulins en 2009. Et ma première saison de coach avec Montceau aussi, on est monté de DH en CFA2. Je suis resté en contact avec pas mal de joueurs de cette époque-là. J’étais arrivé pour être entraîneur, j’avais 34 ans, et puis, un jour, pour un match de coupe de France, mon capitaine et défenseur central est blessé, et comme je m’entraînais encore un peu avec mes joueurs, je décide de le remplacer ! Je me suis dépouillé pour les gars et je pense qu’ils l’ont ressenti, que ça a facilité le relationnel avec eux. Je me souviens que, sur le banc, Lionel Large, entraîneur de la réserve et adjoint, me disait qu’il restait un 1/4 d’heure de match alors qu’il restait une demi-heure ! Je n’en pouvais plus, j’étais cuit !! En plus, on fait 32es de finale derrière.

Pire souvenir sportif ?
La première fois que je me suis fait les ligaments croisés, j’étais à Châtellerault, en D3, début 1989. En novembre 1988, juste avant, Guy Roux m’avait appelé pour me proposer 4 ans de contrat à Auxerre, où j’avais été formé et où j’avais déjà joué en réserve. En plus, je sortais d’une saison 1987-88 à Thouars, en D3, où j’avais terminé deuxième meilleur buteurs des six poules de D3 en marquant 19 buts. Malheureusement… Cela aurait pu être un tremplin. J’aurais pu revenir à Auxerre, où je n’avais pas percé avant. Et quand on connaît la maison… C’est dommage, si ma blessure était arrivée 7 mois plus tard, j’aurais eu 4 ans de contrat et pour la rééducation, la ré-athlétisation et la remise en route, cela aurait été moins difficile dans un club pro ! Mais cela m’a forgé un mental, car un an après, au mois de mars, je me suis refait les croisés, au genou droit cette fois, alors que j’étais déjà à 10 buts en 20 matchs. Je ne regrette pas mes choix mais c’est vrai qu’après Thouars, j’avais donné ma parole à Châtellerault qui était en D2 et à qui il manquait un point pour se maintenir à deux journées de la fin… Ils n’ont pas pris ce point et le club est descendu en D3. C’est comme ça. Mais j’avais donné ma parole, et j’y suis allé. Je n’ai pas de regret, sauf celui de ne pas savoir jusqu’où j’aurais pu aller sans mes blessures.

Un coéquipier ?
En équipe de France militaire, j’ai joué avec Pascal Vahirua à gauche et Roger Boli à droite, et comme j’étais avant-centre… Je peux vous dire que c’était un régal, à chaque fois qu’ils faisaient un centre, je leur disais merci ! Y’en a plein d’autres, je pense aussi à Lionel Charbonnier, on est arrivé ensemble à Auxerre.

Un coach ?
C’est dur comme question. Même si je ne l’ai pas eu comme coach car j’étais en formation, je dirais Guy Roux car on sentait sa patte à l’AJA, le 4-3-3, tout le club jouait de la même façon et ensuite, j’ai souvent adopté ce système dans ma carrière d’entraîneur, car il peut être très offensif, et ça me correspond bien. Après, depuis tout gamin, mes entraîneurs m’ont marqué. Je citerais aussi Bertrand Marchand, que j’ai eu à Thouars, et qui m’a donné envie d’être entraîneur. Il m’a remis en confiance. Il m’a permis d’éclore. Il m’a mis le pied à l’étrier en tant qu’éducateur, m’a conseillé, ça m’a plu tout de suite.

Des amis joueurs de l’époque ?
Oui beaucoup, je suis régulièrement en contact avec des joueurs de Montceau qui a été mon premier club, et avec des joueurs aussi que j’ai côtoyés à Dijon comme Stéphane Jobard, à Besançon, à Epinal, etc. J’ai gardé des contacts partout. ça fait des vieux souvenirs mais c’est sympa !

Une anecdote de vestiaire ?
(Rires) Avec Châtellerault, on joue un match très important, pour le haut de tableau, et le coach, Dominique Carlier (ex-Wasquehal en D2) entre dans le vestiaire avant le match alors qu’on est en train de faire la java, de chanter, et moi, qui n’étais jamais le dernier pour faire le pitre, j’étais debout sur la table de massage, et lui, il était dans un état de stress !!! On avait fait un gros match et on avait gagné, on en reparlé y’a quelques années avec les amis de Châtellerault avec qui on a fêté les 50 ans.
Un stade marquant ?
Geoffroy-Guichard. Le stade, l’ambiance, le poids du passé, les souvenirs d’enfance…

Un match référence ?
Joueur, en Division 2 avec Epinal contre Caen, on avait gagné 4 à 0 alors qu’ils étaient leaders et j’étais dans le « trombinoscope » après le match, à l’époque ça s’appelait comme ça, c’était le joueur qui ressortait de la journée de championnat.

Le club ou vous avez failli signer ?
A l’AJA en pro. Quand j’étais à Thouars, j’aurais pu signer en D2 à Angers aussi mais j’avais choisi Châtellerault.

Meilleur joueur coaché ?
Boulaye Dia, qui joue à Salernitana après être passé à Reims et Villareal. Et aussi Greg Thil. Je les ai eus tous les deux à Jura Sud.

Un coach avec qui tu pourrais partir en vacances ?
Je partirais bien avec ceux de la promotion quand j’ai passé le BEPF. Cela a vraiment été une année particulière ensemble, on a tissé des liens forts. Comme familiaux. Je avais aller voir Franck Haise à Lens pour passer quelques jours en immersion, voir comment il travaille. Son parcours me stimule. Franck, il n’est pas formaté comme certains, il arrive avec sa fraîcheur d’esprit et de réflexion, sa spontanéité, son envie de créer un foot plaisant, un foot pour faire plaisir aux autres, aux supporters, aux joueurs. Ceux qui le connaissent savent que c’est quelqu’un qui s’occupe des autres et qui est généreux. C’est un peu ce qui nous caractérisait d’ailleurs avec tous les autres entraîneurs du BEPF.

Un club d’enfance ?
L’Ajax d’Amsterdam. Ce foot a transpiré chez moi en tant que fan, joueur puis entraîneur. Ce club m’a fait rêver. Je n’oublie pas non plus l’épopée de Saint-Etienne.

L’info en +

Dans le CV de joueur de Pascal Moulin, une ligne : Saint-Leu en D3, mais aucune trace de match… L’explication ?

« Oui, j’ai joué à Saint-Leu-la-Forêt, mais pas longtemps ! J’ai signé en 1992, en D3, juste après Châtellerault, et rapidement, au mois d’août, j’ai eu un grave accident de voiture. Je ne pouvais plus jouer après ça. Du coup, j’ai dû jouer une demi-heure en match officiel là-bas, où j’ai croisé Alain Pascalou, le coach, que j’ai retrouvé dans les jurys d’entrée au BEPF ! Il était très déçu car il comptait sur moi, le club venait de perdre leur meilleur buteur, Rémi Perche. Il m’a toujours défendu car à Saint-Leu on disait que j’étais arrivé blessé. »

Texte : Anthony BOYER / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06

Photos : Philippe Le Brech et DR

L’ex-arbitre international n’a pas manqué sa reconversion. Le président de la Ligue de la Nouvelle-Aquitaine (depuis janvier 2017) revient sur son parcours et livre sa pensée sur l’évolution de l’arbitrage. L’ancien maître du jeu confesse aussi ses craintes quant à l’avenir du football amateur.

6 août 2005, le FC Metz et le Mans s’affrontent pour la 2e journée de Ligue 1 sous le contrôle d’un certain Saïd Ennjimi, qui effectue ses premières foulées sur les pelouses de l’élite, juste après avoir reçu le titre de 3e meilleur arbitre de Ligue 2.

C’est le début des choses sérieuses pour celui qui deviendra arbitre international en 2008, grade qui permet d’accéder à la Ligue des Champions et aux matchs de qualification pour les sélections nationales. Une carrière très riche qui a démarré dans le quartier Pierre-de-Coubertin à Limoges, ville qui a vu naître quelques beaux noms du football français comme Loic Guillon, Sébastien Puygrenier ou plus récemment Benoît Badiashile, tout juste appelé par Didier Deschamps pour le prochain rassemblement de l’équipe de France.

Pour 13heuresfoot, le natif de Limoges (Haute-Vienne) a accepté de faire un large tour d’horizon de l’actualité liée … au sifflet bien évidemment !

« Je suis un puriste »

« J’ai démarré ma carrière en 1991, lorsque j’avais 17 ans. J’ai grandi dans un quartier où une équipe de football s’est créée. Il y avait des amis et mon frère, que je suivais à pratiquement tous les matchs. Il y avait souvent besoin d’arbitres bénévoles pour faire la touche. On m’a demandé si je pouvais devenir officiel puisque ce sont les clubs qui recrutent les arbitres afin qu’ils puissent officier dans tout le district. J’ai passé mon diplôme et puis j’ai voulu aller jusqu’au bout du raisonnement parce que ça me plaisait beaucoup. Avec beaucoup d’humilité, il m’a fallu énormément de travail. »

« On ne fait pas le point devant 24 caméras »

L’ancien arbitre, aujourd’hui âgé de 49 ans, est un aussi un homme pointilleux et rationnel. « J’ai toujours été en recherche de pouvoir faire les choses de la meilleure manière possible. Quand il y a une équipe qui perd et qui vous serre la main… C’est un moment unique que je souhaite à tous les arbitres. Les joueurs viennent vous voir après une défaite en disant « bon voilà on a perdu mais il n’y a rien pour vous ». Quand vous arrivez à ce stade, c’est que justice a été rendue. Après, arbitrer, c’est aussi une activité de précision. Parfois, j’étais en colère contre moi, comme après avoir oublié un corner, alors je vous laisse imaginer les soirées que j’ai pu passer quand je n’ai pas sifflé des pénaltys évidents, en tout cas aux yeux de tout le monde. Mais on ne fait pas le poids contre 24 caméras. J’étais le premier malheureux et je comprenais aussi le dépit des dirigeants, des joueurs, des spectateurs qui aujourd’hui exigent un rendu à 100%, ce qui est très difficile pour une activité humaine. Le joueur, qu’il s’agisse de Lewandowski ou d’un autre, il lui arrive de tirer à côté. Les erreurs sont tolérées et tolérables pour les joueurs, beaucoup moins pour l’arbitrage dont on pense que ce n’est pas une activité foot mais une activité support juste là pour réguler le système. »

« La Var ? Je préférais la glorieuse incertitude du sport. »

Dans un monde où la nuance et l’interprétation de chacun laisse de plus en plus de place au binaire, il était impossible de ne pas évoquer la VAR, mère de tous débats sur l’arbitrage et source de conflits sur et en dehors du terrain. Un dispositif qui ne fait pas le bonheur des puristes de football et de sport.
« Je ne suis pas fan de la VAR, elle portait des espoirs de 100% de réussite, du moins c’est comme ça qu’elle a été vendue. Je pense que l’aspect économique a pris le pas sur le sportif. Et à partir de là… Moi je suis un puriste. Vouloir mécaniser le sportif, ce n’est pas la meilleure méthode. Je pense que tout est fait pour améliorer la pertinence des décisions arbitrales et que, malheureusement, il y aura toujours des erreurs et la VAR rend fou, encore plus qu’hier. Avant, les gens se disaient « bon ce n’est qu’un homme, il s’est trompé, ça arrive », maintenant avec la vidéo, quand l’erreur est commise et qu’elle n’est pas corrigée, les gens ont tendance à croire que c’est volontaire ; c’est ça pour moi le mauvais côté de la vidéo. En toutes circonstances, les arbitres se trompent toujours de bonne foi. Surtout qu’avec le professionnalisme, qui est monté encore un cran au-dessus, les arbitres jouent leur tête à chaque match. Donc si demain ils sont rétrogradés en Ligue 2, ils passent de 10 ou 12 000 euros à 5000 euros par mois. Je ne pense pas que les arbitres se trompent volontairement. Par contre, à partir du moment où ceux qui sont derrière les écrans ne sont que des hommes aussi, il arrive que l’interprétation ne soit pas la bonne. Ce que je veux dire, c’est que l’erreur perdurera, qu’on améliore le système de vidéo ou pas. C’est pour ça que j’aurais préféré qu’on s’en tienne à la glorieuse incertitude du sport. Dans l’imaginaire des gens, c’est « on a la vidéo donc normalement il ne peut plus y avoir d’erreurs », mais il faut accepter que ce n’est pas possible. C’est plus difficile pour les joueurs, dirigeants et les spectateurs. Par contre, c’est vrai que les arbitres pourraient faire un peu plus d’effort en termes de communication, de proximité. »

L’expérimentation du micro lors de PSG-Brest

A propos d’efforts de communication et de proximité, l’utilisation de micros a été testée le week-end dernier lors de la rencontre de la 7e journée de Ligue 1 entre le PSG et Brest. Une bonne idée pour le président de la Ligue de la Nouvelle-Aquitaine.

« Cette expérience va peut-être améliorer les rapports. Si vous arrivez à être proche des joueurs et leur donner confiance, ce qui n’est pas simple, vous vous évitez les ennuis car les joueurs sont parfaitement conscients que vous pouvez vous tromper. Je pense qu’il faut vivre avec son temps. Aujourd’hui, avec l’ultra médiatisation, les diffuseurs, les spectateurs en veulent toujours un peu plus. Le deuxième aspect, c’est de pouvoir faire prendre conscience aux arbitres comme aux joueurs que les gens écoutent, ça va apaiser les relations. Mais avec beaucoup de sincérité, tout ce que j’ai vécu moi, il n’y avait pas de problèmes particuliers, c’étaient des rapports d’hommes qui étaient forts et avec tout l’enjeu et la pression qui existe, je ne m’attendais pas à ce qu’on me dise « Bonjour Mr Ennjimi, comment allez-vous ? Vous avez bien dormi, est ce que le petit déj, était bon ? ». Ce que je veux dire par là c’est que les propos parfois étaient un peu durs mais jamais d’insultes, auquel cas ce serait une expulsion immédiate. Il faut dire les choses telles qu’elles sont et il ne faut pas que les gens s’attendent à entendre des insultes, ça n’existe pas. Ce qui existe aujourd’hui, c’est plutôt « vous verrez à la vidéo que vous vous êtes trompés », c’est plus une forme de pression qu’une forme d’insulte. A mon époque, on avait déjà évolué, il y a le vouvoiement de rigueur, parfois un tutoiement partait mais ce n’était jamais méchant et quand on voit les propos de Presnel Kimpembe (face à Brest la semaine dernière), c’est tous les jours, à tous les matchs. Certains joueurs font plus attention que d’autres mais je ne vois pas ce qu’il y a de problématique à dire « Ne me touche pas frère ». Ce n’est pas parce qu’il dit « frère » que c’est une insulte, certainement pas et d’ailleurs de vous à moi, il n’est pas autorisé aux arbitres de toucher les joueurs aussi. Dans ce cas, ce qui est dur et ça m’est déjà arrivé, c’est que quand je touchais un joueur et qu’il me répondait par « ne me touche pas » ou « ne me touchez pas », à part acquiescer et accepter, je ne vois pas ce que j’aurais pu faire d’autre. En gros, je touche un joueur, il me repousse et je lui mets un carton ? ça n’existe pas, ce n’est pas possible. Sur cette action, Monsieur Pignard (arbitre de PSG-Brest) a joué la proximité en espérant apaiser un peu Presnel Kimpembe. Malheureusement parfois ça marche, parfois ça ne marche pas. Là ça n’a pas marché. Ça n’a pas marché pour moi non plus des dizaines de fois et ce serait dramatique de sanctionner un joueur qui nous repousse. Le carton, on le met quand un joueur vous bouscule volontairement. »

« Au niveau amateur, ce n’est pas de la mise en scène »

Et en amateur ? Le travail d’arbitre est vraiment le même ? « Au niveau amateur, nous n’avons pas trop le choix. Il n’y a pas la vidéo. Il nous arrive d’avoir des sujets un peu délirants où des spectateurs prennent des vidéos et font une mini VAR, mais c’est très anecdotique. Après malheureusement et de tous temps, le football amateur s’est toujours identifié au foot pro donc quand vous voyez les joueurs entourer les arbitres, ça se reproduit sur les terrains amateurs. Quand vous avez des comportements agressifs, les joueurs amateurs reproduisent aussi. Il y a une similitude, une envie de ressembler aux grands. Et pendant que nous, en élite, on était totalement protégés et que ça ne restait que du bluff, qu’entourer l’arbitre était une tactique, au niveau amateur ce n’est pas de la mise en scène et il arrive que cela se termine parfois en bagarre. Il y a une vraie déconnexion entre la réalité du sport pro (avec tous les enjeux, toutes les tactiques comme tomber dans la surface, entourer l’arbitre) et le sport amateur où les conséquences ne sont pas les mêmes pour les arbitres. Ils prennent cher. »

« Le foot amateur est pleine mutation »

Si le football est le sport le plus populaire et le plus médiatisé, il y en a toujours pour les professionnels et rien ou quasiment rien pour les amateurs. « Premièrement, le foot amateur est en pleine mutation et on manque cruellement d’infrastructures et de moyens. Ensuite, on manque terriblement d’arbitres et au moment où je vous parle il n’y a que 12 000 arbitres qui sont recensés au niveau national alors qu’on était à 17 000 l’année dernière à la même époque. L’érosion continue. Dans notre Ligue, on fait ce qu’on peut et continuera de le faire mais ça devient extrêmement difficile de motiver des arbitres qui ne gagnent pas grand-chose pour se faire secouer trop souvent sur les terrains. On doit continuer à se battre pour donner envie, recruter, etc. Le troisième sujet important, c’est la mutation du bénévolat. On a aujourd’hui de plus en plus de contraintes administratives et gérer un club devient quasiment un métier. Les bénévoles sont au taquet du lundi au dimanche, ils font ce qu’ils peuvent. Aujourd’hui, il y a tellement de complications, de responsabilités qui pèsent sur les dirigeants que ça devient très difficile de les motiver. Il y en a beaucoup qui jettent l’éponge parce qu’ils n’en peuvent plus et ceux qu’on a encore et qui restent fidèles aux postes, ce sont ceux qui ont un certain âge et qui ont déjà tout donné. Voilà les 3 sujets principaux qui nécessitent de tenir le coup pour maintenir le niveau du football amateur en France, sinon ce ne sera pas simple. »

L’arrêt de sa carrière : « la petite mort »

Comme tous les sportifs de haut-niveau, il a fallu un jour mettre un terme à sa carrière. C’était en 2017 pour Saïd Ennjimi. « Avant la fin de ma carrière, je me suis dit qu’il fallait que je réfléchisse à une forme de reconversion pour bien vivre ce qu’on appelle dans le milieu sportif « la petite mort ». Quand votre vie est organisée et orchestrée autour du foot, que vous allez vous entraîner régulièrement, c’est votre vie. Il faut accepter que ça s’arrête. C’est dur ensuite de gérer ça. Quand j’ai fait mon dernier match à Rennes, que j’ai lâché ma petite larme, le lendemain, de ne plus aller m’entraîner, de ne plus recevoir de mails, d’appels… C’était dur. Donc je me suis dit que la bonne façon de faire était de s’intégrer dans un contexte d’élu au niveau territorial, plus précisément dans ma région natale et donc dans l’ex-Ligue du Centre-Ouest qui est maintenant la Ligue de la Nouvelle Aquitaine, après une grande fusion. Ça m’a permis de faire autre chose, en pensant un peu moins à l’arbitrage mais toujours dans le contexte du foot. Ce qu’il y a de bien, c’est que j’ai été élu en janvier 2017 et que j’ai arrêté ma carrière en juin 2017. Dans la foulée, j’ai pu vivre de l’intérieur ce que je regardais de l’extérieur avec tous les soucis d’arbitrages amateurs, la gestion des salariés, le contexte politique, etc. Cela m’a permis de vite passer à autre chose et j’ai bien vécu ma fin de carrière dans l’arbitrage. Je n’ai pas de regret, je suis très content de ce que j’ai pu faire même si ça aurait pu être meilleur mais je vis aujourd’hui sans regret et je suis très heureux de mon parcours, de le raconter avec passion. Je voulais aussi essayer de faire des choses, évidemment »

Texte : Melvin Brun / Mail : mbrun@13heuresfoot.fr / Twitter : @Melv1br1

Le rédacteur en chef de MaLigue2, média référence qui met en valeur la 2e division française (interviews, résumés, lives, multiplex, mercato, exclus, dossiers, etc.), évoque la belle aventure qui dure depuis près de 9 ans déjà.

La passion. Une notion qui habite bien des journalistes de sport et aficionados de football, quel que soit le championnat, la division, le pays. Peut-être plus qu’ailleurs, cette passion est un fil rouge, un leitmotiv, qui a toujours suivi les pas de l’équipe de MaLigue2.

Aujourd’hui, le site spécialisé est l’endroit de référence pour trouver une information pour tous les fadas de la deuxième division, qu’ils soient supporters d’un club ou simples découvreurs de la L2. Le projet est né de manière un peu anonyme, avec la réunion de plusieurs passionnés, justement !

« MaLigue2 a été créé à la fin de l’année 2013 par Philippe Dejter, qui est plutôt supporter du RC Lens, ouvre Dorian Waymel, l’actuel rédacteur en chef du site. En Ligue 2, il ne trouvait tout simplement pas beaucoup d’infos sur les adversaires de Lens. Il s’est rendu compte que L’Equipe ou RMC, les gros médias, ne parlaient pas trop de Ligue 2. Il s’est lancé là-dedans avec un blog, sans trop d’ambitions au début, juste pour partager, auprès des supporters de Lens et d’autres clubs, du contenu pour présenter chaque semaine des joueurs à suivre, des coaches, etc ».

L’ouverture de la Ligue 2 au trio

Dorian Waymel.

Très vite, Philippe Dejter est rejoint par deux étudiants, également « suiveurs » du Racing, qui avaient entendu parler du projet. Ils se nomment Laurent Mazure (qui couvre aujourd’hui Lens pour l’AFP) et donc Dorian, qui a aussi été journaliste pour RMC Sport.

Le trio commence à se faire connaître, porté par l’envie de « mettre en avant ce championnat ». L’histoire est en marche, comme le narre Dorian : « Philippe s’est rendu compte que même en étant un tout petit média, les clubs de Ligue 2 étaient hyper ouverts et très contents qu’on s’intéresse à eux. Ils ont tout de suite été disponibles. Petit à petit on a eu de plus en plus accès aux clubs. Encore aujourd’hui, certains nous disent qu’ils continuent de nous suivre. C’est une motivation ! ».

En juin 2014, l’équipe historique de ML2 est formée, la mission, parler d’un championnat peu médiatisé, connue. « C’était une super idée, et comme la L2 était ouverte, on a pu tout de suite travailler en bonne collaboration avec les clubs. On s’est tout de suite senti bien. ».

Depuis, si le site a évolué, l’ouverture du monde pro de la deuxième division envers ML2 n’a pas bougé d’un iota. « Ces neuf ans sont passés super vite, enchaîne le rédac’ chef. Au début, on était à un article par jour, un peu comme 13heuresfoot. Mais au bout de trois-quatre ans, on a vu sur les réseaux sociaux que ça commençait à prendre de l’ampleur. On avait vraiment réussi à créer une communauté. A notre échelle, modestement, notre avis commençait à compter, on avait du poids ! Aujourd’hui, les accès des clubs sont restés les mêmes. Ce qui est beau aussi, c’est de voir que les promus et les relégués jouent le jeu, car nous sommes reconnus comme un vrai média, même Saint-Etienne ou Bordeaux cet été ont été dispos ». 

D’un blog passion à un média référence

Un succès qui s’explique par la qualité et la quantité de boulot abattu par MaLigue2. Car si les journaux locaux suivent les clubs de leur région, seul le site spécialisé traitait de toute l’actualité du championnat, du but du soyeux gaucher Jean-Michel Lesage pour Le Havre à la signature d’un contrat pro à Guingamp, en passant par la décla chic et choc d’un Thierry Laurey.

« On a réussi à apporter une vision globale sur tous les clubs, tout le temps. Hormis nous, peu de journalistes suivaient tous les matches. Avec le temps disponible qu’on avait en tant qu’étudiants, cela a évolué naturellement, on a pu développer le site. De blog, on est passés à média. Ce n’étaient plus un ou deux articles par jour, mais le relais de toute l’actualité, des vingt clubs. Et on parle de toutes les équipes, car il y a des belles histoires à raconter partout. Quand on fait le tour pour des interviews, on demande aussi bien un attaquant à QRM qu’un défenseur de Saint-Etienne ».

Ainsi, ML2 a pu grandir « tranquillou », à son rythme. Couvrant chaque multiplex, chaque match décalé du lundi soir, brossant le portrait d’un joueur, relayant l’actu au quotidien de chaque club. « Notre point fort, c’est d’être le plus réactif et exhaustif possible. Un joueur qui se blesse gravement à Laval, c’est aussi important qu’un élément qui se blesse à Bordeaux. C’est comme ça qu’on fonctionne ».

Car la Ligue 2 le vaut bien, comme l’a rappelé l’incroyable tornade Metz-Guingamp lundi dernier (3-6, trois cartons rouges, une interruption de match, un scénario et des buts hollywoodiens version Saint-Symphorien).

Un championnat en évolution constante, comme ML2 !

« Si la Ligue 2 était ennuyante et inintéressante, on n’aurait jamais eu le courage et la passion de continuer avant de pouvoir en vivre, rappelle Dorian. Car pendant six-sept ans, c’était du bénévolat pur. On n’aurait pas sacrifié des centaines d’heures, voire plus, si ce n’était pas palpitant. Le niveau n’est pas toujours incroyable, je ne vais pas mentir, la L2 étant forcément moins élevée que la Ligue 1. Mais on ne s’ennuie jamais. Il se passe toujours des choses. Moi, c’est ce qui me plaît dans la Ligue 2. Elle est « impronostiquable », homogène, il y a beaucoup, beaucoup de suspense, de surprises. Combien de fois on a vu des double-montées, comme avec le Gazélec Ajaccio ? Ça arrive moins maintenant, car la L2 se structure de plus en plus. Mais c’est cool, on voit qu’il y a une grosse prise de conscience sur la qualité du spectacle. Cela se ressent au niveau des entraîneurs. De plus en plus de coaches font du jeu, comme à Pau, qui a des petits moyens, avec Didier Tholot. Tous ont envie de produire ».

Ce kiffe pour la L2 contaminent même les supporters : « Sur les réseaux, je vois ceux de Sainté, de Bordeaux, qui ‘’pleurent’’ car ils sont relégués. Toulouse est un super exemple : relégation, dépression. Et puis, les supporters se rendent compte qu’un nouveau projet se met en place, que chaque semaine c’est une bataille, c’est dur de remonter, ce n’est pas facile. Du coup, quand tu es devant au classement, avec un public retrouvé, des joueurs qui se révèlent… Je pense que c’est le meilleur résumé. Je vois que les supporters se disent au bout de quelques journées : ‘’Pu***, on n’avait jamais regardé un match de Ligue 2 de notre vie, bah c’est pas si nul que ça finalement, on prend du plaisir !’’. Et moi je suis content, parce que je me dis qu’il y a encore plein de beau travail à faire sur ce championnat ».

« Se rapprocher encore plus de notre communauté »

Près de neuf ans après ses débuts, la rédaction est solidement installée, et le site bien ancré. Depuis plusieurs saisons, des nouveaux formats, un peu plus dans l’ère du temps, sont proposés. Des lives, les mercredis, vendredis, et samedis soirs, pour évoquer l’actu, présenter les matches du week-end, les débriefer. De quoi interagir encore plus avec les « suiveurs » de ML2. « C’est une vraie volonté de notre part, les lives. Ça nous permet de nous rapprocher encore plus de notre communauté, recueillir leurs avis, leurs impressions, garder ce lien, et même le renforcer. Car sans eux on ne serait rien, détaille avec bonheur Dorian Waymel. La Ligue 2 intéresse de plus en plus. Je ne sais pas si c’est grâce à nous, mais elle était tombée vraiment bas à un moment, niveau exposition. Aujourd’hui, un média comme RMC a repris les multiplex, les podcasts, et il faut aussi citer de beIN Sports, qui a fait un travail monumental sur la Ligue 2 ».

« Nous, on garde notre développement, on essaie d’apporter notre touche, quelques idées. En revanche, et c’est un peu le piège du web, on peut s’éparpiller. Il ne faut pas perdre notre âme. D’ailleurs chaque année, on nous pose la question, « Est-ce que vous allez faire MaLigue1 ? »’. Ce n’est pas prévu pour l’instant. On adore la Ligue 2. Quand des dirigeants de gros clubs envoient des mails pour dire qu’ils suivent ML2, même après l’avoir quittée, ou que des joueurs nous remercient de parler du championnat, qu’ils disent que tous les jours ils vont sur le site pour suivre l’actu de leurs copains qui évoluent dans d’autres clubs, là, on a le sentiment de faire un taff utile, et ça sert tout l’écosystème de la Ligue 2. Ça donne une force incroyable. Le but du site, c’est de mettre la Ligue 2 en avant ».

Tout un programme. Beau, simple, passionnant, à l’image de la belle histoire que vit MaLigue2, blog d’étudiants ou presque au départ, média de référence aujourd’hui. Parfait reflet d’un championnat décidément captivant. Le cercle vertueux est bouclé. Rendez-vous au prochain multiplex !

Texte : Clément Maillard / Mail : contact@13heuresfoot.fr / Twitter : @MaillardOZD

L’ex-attaquant et capitaine de Madagascar a rangé les crampons et endossé le costume d’entraîneur avec les U18 R1 du Clermont Foot. Il est aussi très impliqué dans le développement de son île où il oeuvre pour la jeunesse.

Faneva (à gauche), ici avec son homologue d’Issoire, l’ex-pro Kevin Das Neves, pour son premier match avec les U18 R1 de Clermont.

Fanéva Andriatsima a fait ses premiers pas de footballeur sur son île de Madagascar, à Antananarivo, sa ville natale, mais c’est à l’école nantaise, après avoir été repéré par les recruteurs du club de Loire-Atlantique lorsqu’il évoluait à l’USCA Foot (Union sportive de la commune urbaine d’Antananarivo), qu’il a appris les ficelles du métier.

Avant des expériences en Arabie Saoudite (2019-2020), puis aux Emirats arabes unis (2020-2021), « Fané », comme on le surnomme, a porté le maillot de nombreux clubs en France : Nantes bien sûr (7 matches avec les pros), Cannes (National, Janvier à mai 2008, prêté par Nantes), Boulogne (Ligue 2, 2008-09), Amiens (National, 2009-2010), Beauvais (National, 2010-12), Créteil (National et L2, 2012-2016), Sochaux (L2, 2016-17) ou encore Le Havre (L2, 2017-18) et Clermont (Ligue 2, 2018-2019).

Sous le maillot de l’AS Cannes.

Sélectionné à 42 reprises avec Madagascar, l’attaquant aux 14 buts pour les « Baréas » avait été l’une des révélations de la Coupe d’Afrique des Nations 2019. Invités surprises de la compétition, les Malgaches s’étaient hissés en quart de finale avec une défaite logique contre la Tunisie (0-3).

Retraité des terrains depuis peu, après une dernière saison pour le plaisir à Riom (Puy-de-Dôme) en Régional 1, Fanéva Andriatsima endosse aujourd’hui, à 38 ans, le costume d’entraîneur. Et alors que certains rêvent de prendre immédiatement les commandes du PSG, du Milan AC ou de Manchester City, il a décidé de partir du bas de l’échelle avec les U18 R1 du Clermont Foot. Ses débuts ont été victorieux mais folkloriques samedi dernier pour la première journée de championnat, à Issoire.

« Coup de chapeau aux éducateurs et aux entraîneurs du foot amateur »

Sous le maillot d’Amiens.

Qu’est-ce-qui t’a poussé à endosser le costume d’entraîneur ?
Lorsque la fin de carrière approche, il faut forcément penser à sa reconversion. Pendant mon passage en Arabie-Saoudite, j’étais seul puisque ma femme et mes enfants étaient restés en France. Du coup j’avais du temps pour moi, pour réfléchir à la suite. Avec l’aide de l’UNFP, je me suis lancé dans la préparation du DUGOS (Diplôme Universitaire Gestionnaire des Organisations Sportives). C’est une idée que j’avais en tête depuis un moment, mais il fallait que je trouve le moment idéal. Je savais que ça me serait utile pour le futur et puis c’était l’occasion de reprendre des études. Je l’ai validé en juin dernier. J’espère pouvoir passer le BEF en 2023.

« Développer le foot à Madagascar »

Tu commences tout juste ton expérience de coach avec les U18 de Clermont. Quel bilan fais-tu de ces premières semaines ?
Que c’est un métier bien plus difficile qu’on ne le pense. Et encore plus avec des jeunes, même si pour la plupart ils ont déjà dix ans de foot derrière eux et que cela facilite un peu les choses. Je dis bien un peu. Je tire mon chapeau aux éducateurs et aux entraîneurs du monde amateur car le quotidien n’est jamais simple. L’an dernier encore, je jouais à Riom en R1 et je me suis rendu compte qu’en amateur ce n’est vraiment pas facile. Il faut organiser une ou deux séances dans la semaine avec des horaires qui conviennent à tout le monde, avoir du matériel… Là avec les U18, le plus compliqué est de trouver les mots justes pour leur donner confiance, les guider, créer un déclic dans leur tête et leur faire comprendre que les U19 sont accessibles.

Comment s’est passé ce premier match ?
On a gagné 1-0 à la 85e contre Issoire, donc bien du point de vue du résultat. Mais que ce fut difficile comme début ! Au bout de vingt minutes, mon gardien a pris un carton rouge direct. En U18, je n’ai que quatorze joueurs sur le banc, donc pas de gardien remplaçant. J’ai dû réfléchir très vite à quoi faire. Dans un premier temps, je me suis mis en retrait des joueurs, j’ai attendu que mon gardien sorte. Ils se connaissent depuis longtemps et ce n’était pas forcément à moi de désigner le gardien remplaçant. Un de mes joueurs y est allé de lui-même et ça c’est bien passé. À la mi-temps j’ai fait quelques réajustements pour jouer en 4-4-1 avec deux 6 et deux 10 pour nous donner un peu plus d’équilibre sur les côtés.

En plus de ton rôle d’entraîneur et de consultant avec Canal + Afrique, tu es très impliqué dans une école de football à Madagascar…
Ça fait un an et demi que je gère l’école de foot 67City FC. Dans l’idée, avec deux gros partenaires, Havana Resort & Spa et NIM (Nouvelle Institut de Micro Finance), nous voudrions faire un centre de formation pour d

Faneva Andriatsima du tac au tac

« Avec Créteil, je savais qu’on allait monter en L2 ! »

Premier match en pro ?
C’était à la Beaujoire contre Amiens je crois. J’étais entré en fin de match. J’arrive de Madagascar en juillet 2007 et trois mois plus tard, Michel Der Zakarian m’appelle dans le groupe. Je venais de mettre un quadruplé avec la sélection. J’ai dû disputer vingt minutes mais j’étais cuit au coup de sifflet final. Je courrais dans tous les sens, je voulais me jeter sur chaque ballon. J’étais comme un fou sur une pelouse et un stade que je découvrais.

Premier but en pro ?
Avec le FC Nantes, toujours en 2007. On dispute un tour de Coupe de France à Saran. J’ai encore la vidéo à la maison. Je me souviens que je fais une feinte de passe avant de marquer du plat du pied. C’est mon premier but avec les Canaris en pro. Avant ça, je claque six buts en trois mois en réserve avec la CFA, je fais des passes décisives et je porte le brassard de capitaine. C’était incroyable.

Le joueur le plus fort avec qui tu as joué ?
A Nantes, il y avait des gros calibres quand même. Alors si je dois en retenir deux, ce serait Dimitri Payet et Fabien Barthez. D’ailleurs, l’année de la montée de Luzenac en Ligue 2 – alors que j’étais à Créteil – le club de l’Ariège m’avait appelé pour prendre la température. J’avais un peu réfléchi et puis l’interdiction de monter pour le club Luzenac avait vite réglé le problème.

Le joueur le plus fort contre qui tu as joué ?
Bernardo Silva quand j’étais à Sochaux. Fin techniquement, impossible à rattraper. Avinel – Da Silva à Clermont aussi : c’était la meilleure paire de la Ligue 2 à ce moment là. Et je n’ai pas revu ça. C’était quelque chose. Et puis Ekobo devant c’était costaud. C’était chiant de les jouer. Là, il y avait deux costauds hyper rapide. Impossible d’aller au combat.

Le stade qui t’a procuré la plus grande émotion ?
À Sochaux. C’est un club historique avec une vraie ferveur et j’ai pris du plaisir à jouer à Bonal. Je n’ai pas connu une si belle ambiance dans les autres équipes par lesquelles je suis passé. Hormis La Beaujoire à Nantes, mais je n’y étais pas un acteur principal. Donc c’est différent.

Le stade que tu n’aimes pas ?
Ce n’est en tout cas pas un souvenir agréable. J’avais 20 ans et je jouais à Madagascar avec l’USCA Foot. En 2005, on dispute un match aller/retour en 1/4 de finale de qualification pour la Coupe des Confédérations face à Al Merreikh, une équipe de Khartoum au Soudan. On gagne 3-1 chez nous à l’aller et on prend 3-0 au retour. Mais c’est surtout le contexte qui m’a marqué. On reconnaît le stade la veille du match et les gens nous crachent dessus, caillassent le bus. On ne voulait pas jouer. J’avais peur. Vraiment. Je n’avais jamais vu ça. On perd 3-0 avec deux pénos…

Avec le brassard de capitaine sous le maillot de la sélection de Madagascar.

Ta plus grande joie ?
Assurément la Coupe d’Afrique des Nations en 2019. Ce fut une délivrance incroyable pour tout un pays. J’avais beaucoup de responsabilités dans l’équipe, je faisais en sorte que nous ayons le plus d’aide possible pour préparer la compétition et les matchs.

Les dirigeants n’aimaient pas je sois si présent et via la presse, ils faisaient en sorte que le public soit contre moi.

La Fédération cherchait une sorte de bouc émissaire. Alors aller en 1/8e de finale, marquer et nous qualifier en ¼ de finale fut un moment magique.

Il fallait être fort dans la tête pour ne pas lâcher. Ça a été un grand soulagement pour ma famille et mes ami(e)s.

Ta plus grande déception ?
Lors de ma première saison en Arabie-Saoudite. Je jouais à Abha, je marque 12 buts et la veille de la fermeture du mercato, je comprends que je ne vais pas être prolongé alors que je suis en fin de contrat. Je voulais rester dans l’équipe, j’étais très bien là-bas et je l’ai vécu comme une injustice. Le soir même, nous jouons contre le Al Hilal de Bafé Gomis et je pense que j’inscris le plus beau but de ma carrière. J’avais la rage, je voulais montrer à mes dirigeants qu’ils avaient torts.

Sous le maillot de Beauvais.

Un transfert improbable ?
Créteil, sans l’ombre d’un doute. En 2012, je suis à Beauvais et pour aider à sauver l’équipe, je termine latéral gauche. On descend quand même en CFA et je refuse de prolonger. Je me retrouve donc au chômage avec ma femme et mon fils qui débarquent en France. Je contacte un copain malgache sur Paris pour savoir s’il n’y a pas moyen de passer un test à Créteil. Et coup de chance, le club cherche un attaquant…et un latéral gauche. Je dis que je peux occuper les deux postes (rires). Finalement, ils font rapidement signer Cordoval sur le côté et me voilà à faire un test pendant deux jours avec Jean-Luc Vasseur pour un poste de buteur. On joue un amical contre Sedan, je marque et Jean-Luc me demande de rester une semaine de plus. Je remarque contre Le Mans, je continue le test, puis je marque encore contre le Red Star. En tout l’essai a duré trois semaines parce que les dirigeants étaient en vacances et il n’y avait personne pour me faire signer. Mais je voulais vraiment jouer pour Créteil. Il y avait une équipe complète avec Cheikh (Ndoye), Jean-Mi’ (Lesage), Boris (Mahon De Monaghan), Baga (Bagalyi Dabo) et je savais que nous monterions en Ligue 2. Et c’est ce qu’il s’est passé avec 15 buts pour moi cette saison-là.

Sous le maillot de Créteil.

Texte : Julien Leduc / Mail : @jleduc@13heuresfoot.fr / Twitter : @juleduc

Photos : Philippe Le Brech et DR

Incontournable dans le monde amateur qui lui a collé l’étiquette de spécialiste du National et du National 2, niveau où il pense avoir fait ses preuves, le manager général du Puy-en-Velay aspire, un jour, à retrouver un club pro et pourquoi pas la Ligue 1, qu’il a déjà connue à Dijon.

Scène de ménage au Puy-en-Velay, où le manager général du club, Olivier Miannay, n’est pas d’accord avec Sandrine, sa compagne. La raison ? Le temps passé quotidiennement au téléphone par le natif des Lilas, en Seine-Saint-Denis.

Lui répond 10 heures. Elle n’est pas convaincue : « Sachant qu’une journée dure 24 heures et qu’Olivier dort en moyenne 8 heures par nuit, ça fait 24 moins 8 = 16 ! 16 heures par jour ! » Olivier : « Tu exagères chérie, je passe, allez, peut-être 12 heures au téléphone ! »

Si Miannay garde constamment son kit dans l’oreille, c’est parce que son métier veut ça. C’est parce qu’en football, ça ne s’arrête jamais, tout va très vite, et il faut être… à l’écoute, évidemment. A l’affût, aussi.

Deux accessions en National avec Le Puy !

Vingt ans maintenant qu’il écume les stades, qu’il entretient et développe ses réseaux, qu’il déniche des joueurs, qu’il accumule les expériences. Souvent avec bonheur et réussite.

Son aventure au Puy Foot 43, club phare du département de Haute-Loire, entre Saint-Etienne et Clermont, est en tout cas couronnée de succès.

Depuis son arrivée, en 2018, à chaque fois que l’exercice est allé à son terme (ce qui ne fut pas le cas des saisons 2019-20 et 2020-21 stoppées en raison de la Covid), le club est monté en National (2019 et 2022) ! Un exploit rare, que Roland Vieira, le coach du Puy Foot 43 et artisan de ces accessions (trois en neuf ans si l’on y ajoute celle de CFA2 en CFA pour l’ancien vainqueur de la Gambardella avec l’OL), et Olivier Miannay aiment bien mettre en avant.

Ce touche à tout, qui a tâté du banc à Beauvais comme adjoint en National et porté différentes casquettes (directeur général, responsable du recrutement, manager, etc.), s’est forgé une sacrée réputation dans les plus hautes divisions amateurs du championnat de France, en National 2 et surtout en National, « son » championnat, qu’il connaît mieux que quiconque. Au point d’être incontournable, respecté, écouté, consulté et régulièrement sollicité.

Contacté par Angers l’an passé

Cette image de « spécialiste » du foot amateur, il n’en tire pas de gloriole particulière. Simplement, il aimerait prouver qu’il connaît aussi le foot professionnel, en L1 – un niveau qu’il a connu une saison à Dijon – ou en L2 : « C’est juste une étiquette que je prends volontiers car aujourd’hui, en L1 et en L2, je ne pense pas qu’il y ait beaucoup de gens qui ont la même connaissance des championnats amateurs que la mienne, dit-il sans prétention. C’est selon moi un « plus », un atout, au contraire. Le foot pro, français ou étranger, je le connais aussi, j’ai des réseaux partout. »

Le garçon hyperactif de 43 ans, fan du PSG (bizarre quand on porte les initiales OM, non ?!), qui n’a jamais passé autant de temps dans un club, et qui ne s’est jamais fait virer, –  » Pas encore ! » – savoure chaque instant au Puy-en-Velay, où il vient d’entamer sa cinquième saison. Et attend son heure.

A deux reprises, l’an passé, celle-ci a failli arriver : « Mon club le sait, j’ai été sollicité par Angers en Ligue 1 et aussi par Le Havre, mais pour un poste dans le secteur féminin. C’est vrai que j’aimerais un jour que l’on me fasse autant confiance dans un club pro, avec les moyens qui vont avec. J’aspire à retrouver ce monde-là, pour montrer que j’en suis capable. En amateur,  j’estime avoir fait mes preuves. Mais je me prends pas du tout la tête avec ça. »

S’il a beaucoup bougé avant de se poser en Auvergne, il affirme que ses choix n’ont jamais été guidés par l’argent. Simplement, c’est parce que les opportunités se sont présentées : « Je ne suis pas instable, mais c’est le foot ! A Beauvais j’étais super bien mais je ne pouvais pas refuser Cannes, un club historique. Dans mon cursus et pour ma progression, j’étais obligé d’y aller. Dijon et la Ligue 1, je ne pouvais pas refuser non plus. Sedan, j’y serais bien resté, mais… Et à Boulogne aussi mais là ce n’était pas le bon timing. »

Dans son parcours, qu’il retrace pour 13heuresfoot, il reconnaît cependant une erreur : Créteil. « Ce n’est pas le club où j’aurais dû aller, mais l’expérience m’a beaucoup apporté ».

Et aujourd’hui , c’est Le Puy qui en profite !

« Je ne savais pas où était situé Le Puy sur la carte ! »

Viry-Châtillon (2002-2003, National) : « C’est de là que tout est parti ! »

J’étais éducateur à Draveil et avec les U15, on va en finale de la coupe de l’Essonne, on gagne notre championnat. J’avais pris contact avec Jean-Marc Pilorget qui était alors manager/entraîneur de Viry-Châtillon en CFA, parce que je voulais lui présenter un joueur, Kenny Vigier. Comme j’ai eu des résultats avec Draveil, je lui ai tapé dans l’oeil. Jean-Marc vient me débaucher et me donne les U15 de Viry. La saison d’après, il me prend dans son staff, me demande d’aller superviser des matchs, puis après j’ai fait son recrutement. C’est de là que tout est parti. Malgré la descente, on est resté, mais Jean-Marc s’est ensuite fait limoger plus tard pour être remplacé par Jean-Pierre Orts. J’ai été solidaire, je suis parti aussi.

Marmande (2004, N2) : « Je voulais me lancer »

Je suis allé donner un coup de main à David Giguel à Marmande en National 2, pendant six mois. Je ne le connaissais pas, on s’était juste appelé pour des joueurs, et il m’a demandé de le rejoindre. J’étais jeune, je voulais me lancer.

Sète (2004 – Déc. 2005, National, L2) : « Ma première réussite sportive »

Claude Calabuig, le coach de Sète, m’a contacté : j’ai fait le recrutement, et on est monté de National en Ligue 2. Et quand il s’est fait virer en décembre 2005 (remplacé par Ludovic Batelli), pareil, je suis parti, par solidarité. Sète, j’en garde un excellent souvenir, parce que c’est ma première réussite sportive. Le groupe étaot exceptionnel, on était sans cesse les uns avec les autres, on allait souvent au resto ensemble. Je suis toujours en contact avec le président Anfosso, Calabuig, Dufresnnes, Kharbouchi, Kharrazi, etc. Mais il n’y a plus personne au club de cette époque, sauf Christophe Rouve, qui vient de revenir comme éducateur chez les jeunes.

Pau (2006-janvier 2008, National) : « Je n’ai pas trop trouvé ma place »

Je suis nommé coordinateur sportif, on fait venir des joueurs incroyables comme Tino Costa ou André-Pierre Gignac, prêté par Lorient, on a eu de la réussite sportive là encore, mais je ne reste qu’un an, car je décide de rentrer chez moi, sur Paris. Je n’arrive pas trop à trouver ma place, mais bon, j’en garde un bon souvenir, ça s’est bien passé avec Joël Lopez, le président délégué, et aussi Bernard Laporte-Frey, qu était déjà au club comme actionnaire, mais je n’étais pas au top (sic). Je retourne dans ma région, où je deviens éducateur sportif à Montgeron (Essonne), et en parallèle je travaille dans les ambulances.

Beauvais (2008-2010, National) : « Là où ma carrière décolle »

Je connaissais Laurent Strzelczak qui était adjoint à Beauvais. Il savait que je connaissais beaucoup de joueurs et me demande si je peux organiser une détection avec des joueurs que j’ai vus sur Paris, et les emmener à Beauvais. Je rencontre Bruno Roux, le coach à l’époque, et Alexandre Clément, avec qui ça matche. Ensuite, Hubert Velud remplace Bruno Roux et Alex me demande de développer une cellule de recrutement pour eux, en continuant à travailler comme ambulancier. Je m’occupe donc du recrutement pour Hubert Velud puis Alex Clément est nommé entraîneur-général et manager, et me demande d’arrêter les ambulances, de devenir coordinateur sportif et d’être sur le banc avec lui et Christophe Raymond aussi, l’actuel coach de Boulogne. C’est là que je reviens dans le foot à plein temps. La saison d’après, on fait une bonne année, on sort pas mal de joueurs, Brice Jovial, Joffrey Cuffaut, que l’on vend, Parfait Mandanda, et d’autres. Beauvais est un club qui compte beaucoup pour moi car on m’a laissé travailler, et c’est là que ma carrière a décollé. Alexandre Clément me faisait confiance. Et puis l’AS Cannes vient me débaucher.

Cannes (2010 – oct 2011, National) : « J’ai des regrets »

Le premier contact, je l’ai avec Xavier Nielsen, le directeur du club. En fait, Cannes vient jouer à Beauvais la saison d’avant, et après le match, l’adjoint d’Albert Emon à Cannes, Philippe Cuervo, que je considère comme un frère et que je connais depuis son époque de joueur à Laval, me parle du club. Et me dit que les dirigeants aimeraient que je vienne les rencontrer à leur hôtel. J’y vais après le match. On peut le dire maintenant, il y a prescription ! C’est là que je rencontre le président, Ziad Fakhri. Et voilà ! Cannes, je ne pouvais pas refuser, même si j’étais très bien à Beauvais. Sportivement, malheureusement, on finit au pied du podium, alors qu’on est en tête jusqu’à Noël. J’ai des regrets car il y avait la place pour monter en Ligue 2. Et puis il y a eu cette rétrogradation en CFA, que le club n’avait pas prévu. On recrute un coach, David Guion, et en octobre 2011 , j’ai l’opportunité de partir à Dijon, en Ligue 1, où Patrice Carteron, avec qui j’étais proche, me sollicite. Je leur avais déjà donné un coup de main sur le recrutement, et puis Patrice me demande d’être le responsable du recrutement. Cannes, ça reste une expérience exceptionnelle.

Dijon (oct 2011 – 2012, Ligue 1) : « Un autre monde »
Une bonne expérience en Ligue 1 ! C’est vraiment un autre monde. Je me suis régalé mais un grain de sable est venu enrailler la machine, entre Patrice Carteron et le président Bernard Gnecchi, et je me suis retrouvé au milieu de ça. Quand ils ont limogé Patrice, je me suis séparé du club d’un commun accord.

Cannes II (2012-2014, CFA) : « 2014, une année très spéciale… »

Après Dijon, je suis retourné à Cannes en CFA (National 2), et je retrouve Jean-Marc Pilorget. Ils m’ont demandé de leur donner un coup de main car ils voulaient remonter en National. On fait 1/4 de finale de la Coupe de France en éliminant Troyes, Saint-Etienne et Montpellier, mais ça s’est mal fini avec le décès de Saïd Fakhri, le papa de Ziad, et je perds mon père deux jours après. 2014, ça reste une saison très spéciale. Et le club dépose le bilan. C’est dommage que l’histoire se soit mal terminée.

Sedan (2014-2015, CFA) : « Je voulais rester mais… »
Farid Fouzari, l’entraîneur, me contacte, et me dit que Jean-Claude Medot, le responsable du recrutement, a besoin de quelqu’un pour l’épauler. Je rencontre le président Marc Dubois à Fréjus, car il habite à Saint-Raphaël et je suis encore installé à Cannes à ce moment-là. Et me voilà directeur sportif adjoint à Sedan. On fait une saison exceptionnelle. Je recrute Bakaye Dibassy, Rudy Camacho, Romain Armand et d’autres. On ne perd que deux matchs de toute la saison et on accède en National. Après l’épisode cannois, il fallait que je montre mes compétences. L’idée, c’était que, la deuxième année, je prenne la suite de Jean-Claude Medot, mais les discussions traînent, je voulais rester, et en fait, j’ai senti que rien n’allait changer.

Boulogne-sur-Mer (2015-2016, National) : « Une saison riche en émotion »

Je suis encore à Sedan et je reçois LE coup de fil de Jacques Wattez, le président de Boulogne, et là, c’est LA vraie belle rencontre. Il me demande si je veux devenir directeur sportif. Il me donne les pleins pouvoirs. Je ne fais qu’une année à l’USBCO mais elle est riche en émotion. Il a des qualités humaines exceptionnelles. Il a une grande gueule certes mais c’est un mec comme j’en ai peu connus. On me laisse travailler et je fais la découverte de jeunes joueurs comme Mercier, Teuma, Mauricio ou Leautey. On ne récolte pas les fruits tout de suite, on fait une saison moyenne, mais ces joueurs vont faire carrière après. Et puis arrive l’opportunité cristolienne.

Créteil (2016-2018, National) : « Je n’ai jamais eu le contrôle »

C’est un coup d’arrêt dans ma carrière mais j’y vais parce que le club descend de Ligue 2, que c’est pas loin de chez moi, et je me rapproche de mes filles, alors que je suis en plein divorce. Et puis je tente le pari de prendre le poste de directeur général, que je n’avais jamais occupé, même si j’avais des notions administratives. Je rencontre le coach Laurent Fournier, un super mec, mais il est limogé assez vite. On se maintient de justesse et lors de la deuxième saison, c’est catastrophique. Je perds le contrôle mais en gros, je ne l’ai jamais eu. Je n’ai pas pu mettre en place mes idées, ma manière de travailler, parce qu’il y avait un comité directeur omniprésent, avec des personnes très interventionnistes, et je n’ai pas trouvé ma place, y’a trop de dysfonctionnements. C’est dommage parce que le président, Armand Lopez, est un homme attachant, intelligent, mais je pense qu’il était coincé entre le comité et moi. Je n’avais pas vraiment les pleins pouvoirs.

Le Puy Foot 43 (depuis 2018, N2, Nat., N2 puis re-Nat.) : « J’ai repris goût au foot ! »

J’étais prêt, après Créteil, à rester sans club, à faire une année de chômage, et puis j’ai le coup de téléphone de Julien Converso, qui est directeur sportif à Romorantin et qui connaît bien Roland Vieira, le coach du Puy. Moi, Roland, je ne le connaissais pas, mais je sais qu’il sollicite ses dirigeants pour prendre un manager général, parce qu’il pense que, tout seul, il n’arrivera pas à tout gérer, à accompagner la progression du club. Du coup, Julien nous met en relation et Roland m’appelle. Moi, je ne savais même pas où c’était Le Puy sur la carte (rires) ! Je viens le rencontrer, puis je fais la connaissance du président Christophe Gauthier et du directeur financier Philippe Thiebault. Le président me demande « Pourquoi vous venez au Puy ? » et je lui réponds « Pourquoi pas Le Puy ? ». Et voilà ! Après, sportivement, c’est l’apothéose ! On monte en National, la réserve accède en N3, les jeunes montent U19 en Nationaux. Ma carrière redémarre après un petit creux. Je me refais une santé. Je reprends goût au foot. On essaie de structurer le club, je me régale, je tombe dans un club très familial, on me fait confiance. Malheureusement, arrive cette année COVID… et on descend, on essaie de repartir la tête à l’endroit, en N2, et la saison s’arrête encore… Mais là, j’ai vraiment très mal vécu l’injustice de la montée de Sedan en National à l’été 2021, même sur ma santé cela a eu des effets. J’ai eu du mal à m’en remettre. Mais on est reparti au combat, et puis pour ma deuxième saison pleine avec Le Puy, on monte encore ! On a relancé des joueurs, on en a découverts, on en a vendus, on se régale.

Olivier Miannay du tac au tac

Ta plus belle trouvaille ?
Tino Costa à Pau

Le joueur que tu as raté ?
Umut Bozok

Le club le plus familial ?
Le Puy

Le club le plus compliqué ?
Créteil

Le challenge le plus difficile ?
Le Puy la saison passée : redémarrer après deux ans de Covid et deux saisons tronquées, arrêtées, et après les injustices… C’était vraiment un challenge difficile mais on l’a réussi !

Ton meilleur souvenir ?
Y’en a beaucoup ! Je dirais la montée en mai dernier avec Le Puy, car c’est une revanche sur plein de choses.

Ton pire souvenir ?
C’est l’annonce de l’arrêt du championnat National, en mars 2020, la veille de recevoir Quevilly Rouen, alors qu’on est à 1 point d’eux et du maintien, et qu’on s’était relancé depuis décembre.

Combien de contacts téléphoniques « football » as-tu dans ton répertoire ?
(Il vérifie) J’en ai 997 !

Un regret ?
Mon départ de Boulogne.

Une fierté ?
Mes enfants.

La ville où tu as préféré travailler ?
Ah… J’ai bien aimé Cannes quand même !

Ton club préféré ?
Paris Saint-Germain (Ndlr, on l’a écrit plus haut, bizarre quand on porte les initiales OM !!!)

Un match de légende ?
PSG – Real Madrid en 1993 (1/4 de finale de la coupe UEFA).

Un match de légende avec un de tes clubs ?
L’élimination de Lorient en 16e de finale de la Coupe de France l’an passé avec Le Puy (1-0), elle est belle celle-là !

Un modèle de directeur sportif ?
J’aime beaucoup Loïc Désiré à Strasbourg, parce qu’on a un peu le même parcours, on vient tous les deux du monde amateur. J’aimerais bien avoir la même trajectoire que la sienne.

Un président ?
C’est trop dur… J’en ai vraiment deux… Jacques Wattez (Boulogne) et Christophe Gauthier (Le Puy). Je les aime beaucoup tous les deux.

Un coach ?
Jean-Marc Pilorget. Tout ce qui m’est arrivé et qui m’arrive, c’est grâce à lui. C’est un monsieur exceptionnel, comme un père pour moi. Je rajouterais René Marsiglia que j’ai connu à 17 ans au centre de formation à Amiens, il a beaucoup compté pour moi aussi.

Texte : Anthony BOYER / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06

Photos : Sébastien Ricou

Lancé en équipe première à Bastia à l’âge de 16 ans avant de vivre des saisons difficiles, le lauréat du trophée de meilleur joueur de National du mois d’août, âgé de 21 ans, s’est totalement relancé depuis son arrivée à Concarneau l’an passé. Portrait .

Visuel FFF / Photo Tony Esnault – US Concarneau

Avec 49, 05 % des voix (journalistes, entraîneurs, capitaines et le public sur les réseaux sociaux), Amine Boutrah a été élu meilleur joueur du mois d’août de National. L’attaquant de Concarneau (21 ans) a devancé Karim Tlili (Martigues, 19,86 %), Anthony Beuve (Avranches, 16,84 %) et Damien Durand (Red Star, 14,16 %).

Percutant, explosif, ce petit gabarit (1, 70 m) semble avoir passé un cap depuis le début de cette saison. Vendredi soir lors de la 5e journée de National, Amine a été l’un des artisans du succès de Concarneau sur le synthétique de Borgo (4-2). Devant sa famille et ses proches, il a inscrit le 3e but de son équipe portant son total à 3 buts. « J’ai déjà dépassé mon total (2) de la saison dernière », sourit le Corse qui a grandi à Porto-Vecchio.

Posé, sans concession sur ses erreurs passées et avec un discours où transparait sa grande maturité, il a pris le temps de revenir sur sa jeune carrière qui avait débuté très fort à 16 ans avec le SC Bastia en National 3 avant de connaitre un gros coup d’arrêt. Mais sa signature à Concarneau à l’été 2021 l’a relancé et « l’a fait grandir à tous les niveaux ».

« Après le dépôt de bilan de Bastia, je me suis retrouvé sans rien »

Photo Tony Esnault – US Concarneau

Tout a commencé pour lui à l’AS Porto-Vecchio. « Tout petit, je jouais en bas de chez moi. J’ai grandi dans une famille de footballeurs. Mon père, mes frères jouaient aussi. Mon beau-frère a, lui, joué à Orléans en L2. »

Après avoir intégré le club de sa ville à l’âge de 9 ans, il est repéré en U13 par le Sporting Club de Bastia. Le centre de formation était alors dirigé par Ghislain Printant. « Mes parents faisaient la route de Porto-Vecchio à Bastia (143 km) deux fois par semaine pour m’emmener aux entraînements. Ils ont toujours été derrière moi. Le week-end, je restais au centre pour les matchs. »

A 15 ans, Amine intègre le centre de formation du SC Bastia comme stagiaire. Mais en juillet 2017, le club, déjà relégué sportivement en L2, doit déposer le bilan, plombé par une dette colossale et la légèreté de ses neuf actionnaires. Une catastrophe sportive, économique mais aussi humaine.

Le SC Bastia repart en National 3 et perd son statut professionnel. Le centre de formation ferme ses portes. « Comme beaucoup, du jour au lendemain, je me suis presque retrouvé sans rien. Je n’avais plus de club, plus trop de perspectives, donc je suis rentré chez mes parents à Porto-Vecchio. J’avais 16 ans et c’était très dur à vivre. »

« Je marque à 16 ans à Furiani devant 8 000 personnes contre l’ACA ! »

En septembre 2017, Amine reçoit néanmoins un coup de téléphone des dirigeants du Sporting. « Bastia m’a proposé de me reprendre. J’avais un contrat et un appartement. »

En National 3, le club corse est en totale reconstruction. L’équipe est composée de quelques anciens (Coulibaly, Cioni, Mary, Manset) et de nombreux jeunes corses.

Le 30 septembre 2017, Stéphane Rossi le lance lors des vingt dernières minutes sur le terrain de l’ES Cannet Rocheville (1-1). Deux semaines plus tard, c’est lui, à quelques jours de son 17e anniversaire, qui embrase le stade Furiani rempli par 8 000 spectateurs en égalisant face à la réserve de l’AC Ajaccio. Un but somptueux, plein de culot. Parti de son camp, il traverse tout le terrain, mettant dans le vent plusieurs défenseurs avant d’adresser une frappe aux vingt mètres. « Un moment magique ! Ce but, on m’en parle encore. Il a fait le tour des réseaux sociaux. Quand j’ai signé à Concarneau, la vidéo est ressortie. »

Voir le but d’Amine :

Pour sa première saison en équipe première, il participe à 9 matchs et inscrit 2 buts. En parallèle, il brille avec les U19. « J’ai marqué plus de 20 buts. On est monté en U19 nationaux. C’est moi qui marque le but de la montée à la 94e minute face à l’Etoile Filante de Bastia. Un grand souvenir aussi. »

« Plus jeune, je me suis comporté comme un petit merdeux »

La saison suivante, le SC Bastia a musclé son effectif avec plusieurs joueurs corses expérimentés : Poggi, Bocognano, Santelli, Vincent… Le club s’offre un cavalier seul dans la poule Corse-Méditerranée en championnat.

En sports-études au lycée Jean Nicoli de Bastia, Amine joue surtout avec les U19 Nationaux et moins en N3 (5 matchs, 2 buts). Mais le 5 février 2019, il rentre en jeu lors du 8e de finale de Coupe de France face à Caen, alors en Ligue 1. Auteur d’un match magnifique, Bastia s’incline aux tirs aux buts (3-5, 2-2 lors du temps réglementaire. « Le stade était plein et c’était la première fois que je jouais un match retransmis en direct à la télévision. »

Mais alors que le staff bastiais souhaite le conserver pour le National 2, il n’arrive pas à se mettre d’accord avec les dirigeants. « Je n’avais pas un bon comportement à l’époque, j’étais assez petit merdeux (sic), avoue-t-il. Je voulais que ça aille très vite, je ne contrôlais rien, je marchais de travers. »

Il effectue quelques essais, notamment à Guingamp et Brest. « Mais ça ne s’est pas très bien passé. Avec Bastia, le contrat que me proposait le président ne me convenait pas. Ce n’étais pas une question d’argent mais il ne voulait plus me donner de contrat fédéral. Je l’ai pris comme un manque de confiance à mon égard. J’étais têtu, je n’ai pas écouté mes parents et Pierrick (Antonetti, son conseiller). J’ai vraiment eu un comportement merdique. Mais j’ai décidé d’arrêter avec Bastia. »

Une fois de plus, il retourne chez lui à Porto-Vecchio. « Vous savez comme c’est l’été, la plage et tout ça… J’étais bien avec mes proches. Niveau foot, je n’avais rien du tout. »

« Au Gallia Lucciana, je me suis forgé un caractère »

Ses conseillers, Pierrick Antonetti et Loïc Bensaïd (agence ASSIST & GOAL) activent leurs réseaux et lui propose de signer au Gallia Lucciana, un club corse évoluant en National 3. « Pierrick connaissait bien le directeur sportif, Jean Lorenzi. Il m’a dit : « Amine, tu vas faire des sacrifices mais tu n’as beaucoup d’autres choix »…»

Club familial, le Gallia est entrainé par une figure en Corse, Tchouki Corlija, un Serbe passé par l’Etoile Rouge de Belgrade arrivé sur l’Ile de Beauté il y a déjà une trentaine d’années où il a joué et coaché de nombreux clubs. Mais le fonctionnement du Gallia reste très amateur par rapport au SC Bastia. « En arrivant de Bastia, j’ai pris une grosse claque, reconnaît Amine. Même en N3, le Sporting avait gardé un fonctionnement pro avec des entrainements le matin et des personnes qui s’occupaient de nos équipements. Au Gallia, la plupart des joueurs travaillaient et ils venaient s’entraîner le soir après leur journée de boulot. Mais tout ça, ça m’a forgé un caractère. Je traînais avec des hommes (sic) qui bossaient dans la journée, j’ai compris ce que c’était la vraie vie. J’ai arrêté de faire mon petit merdeux. Cette aventure au Gallia m’a fait murir. »

Sur le terrain, tout se passe bien. Il est titulaire et inscrit 6 buts en 16 matchs. Mais le Covid et le confinement stoppent la saison en mars 2020. « Même si j’avais effectué une belle saison avant l’arrêt, cela n’a pas suffi. Je n’ai pas eu de contacts pour partir au-dessus. »

S’il était reparti sur des belles bases (2 buts en 4 matchs), la saison 2020-2021 s’arrête en octobre.

« Heureusement, on a continué à s’entraîner au club. Moi, j’ai aussi pris un préparateur physique. Même si tout le monde m’avait oublié, j’étais déterminé. Il n’y a rien qui pouvait m’arrêter. J’avais mangé mon pain noir et j’attendais juste la bonne opportunité pour le prouver. »

« Rendre à Concarneau ce qu’il m’a donné »

Photo Tony Esnault – US Concarneau

C’est donc en Bretagne qu’il va trouver le rebond. « Pierrick Antonetti connaissait l’ancien entraineur adjoint de Concarneau. Le staff a accepté de me voir. Je savais que c’était un peu ma dernière chance mais c’était de la bonne pression. »

S’il se montre convaincant lors des matchs amicaux, son essai a duré au total trois semaines.

« Concarneau n’avait plus que deux contrats fédéraux à donner, c’était au départ réservé à des joueurs plus expérimentés donc ils ne voulaient pas se tromper avec moi. Au bout de deux semaines à Concarneau, Bastia-Borgo m’a aussi proposé de venir faire un essai. Stéphane Le Mignan, le coach de Concarneau, m’a dit : « reste faire encore une semaine avec nous mais je ne te garantis rien ». Donc, j’ai pris le risque de perdre à la fois Concarneau et Bastia-Borgo. Mais au final, j’ai pu signer à Concarneau. »

Avec le club du Finistère, Boutrah, qui marche à la confiance, a trouvé un cadre idéal pour s’épanouir. Sur le terrain, il s’est rapidement imposé (31 matchs dont 25 comme titulaire). « Ça m’a fait du bien de sortir de la Corse et de mon cocon familial. On a fait une belle saison et on a failli monter en Ligue 2 (4e). Personnellement, j’étais plutôt satisfait de moi, même si j’aurais dû avoir davantage de stats (2 buts marqués). »

Il était d’ailleurs nommé parmi les révélations de la saison aux Trophées du National. A l’intersaison, quelques clubs recommencent à s’intéresser à lui. Un retour au SC Bastia est même évoqué. « Moi, je n’ai jamais eu de contacts directs mais je sais que ça a parlé entre mes conseillers et les dirigeants. Je sais que Bastia continue à me suivre. Bien sûr que ça me plairait d’y retourner. Mais je suis d’abord focus sur cette saison avec Concarneau. Je compte bien rendre à ce club ce qu’il m’a donné. Je n’avais rien et ils m’ont accueilli en me permettant de me relancer. Je suis encore jeune mais je sens que mon statut a changé. Je ne vais pas dire que je suis un cadre mais je ne suis plus le petit qui arrive de N3. »

Son investissement a donc été récompensé par le trophée de meilleur joueur de National. « C’est magnifique, surtout d’où je viens. Ceux qui me connaissent savent ce que j’ai traversé… J’ai travaillé tous les jours pour ça. Mais ce n’est qu’une étape. La saison est encore longue. L’important sera d’être régulier et constant jusqu’au bout. »

Amine Boutrah, du tac au tac

Son meilleur souvenir ?
Mon but à 16 ans avec Bastia contre la réserve de l’AC Ajaccio à Furiani. Rien que de vous en parler, j’en ai encore des frissons. Il y a aussi ma signature à Concarneau. Mes proches savent combien j’avais galéré avant ça.

Son pire souvenir ?
Attendez, je réfléchis… Mais en fait, je n’en ai pas. J’essaye de ne retenir que le positif dans chaque situation.

Un stade ?
Furiani, bien sûr !

Un entraîneur ?
Il y en a deux. Stéphane Rossi qui m’a lancé et m’a fait confiance alors que je n’avais que 16 ans, alors qu’il avait la pression de faire remonter Bastia. Et Stéphane Le Mignan qui m’a fait beaucoup progresser depuis que je suis arrivé à Concarneau.

Le geste technique préféré ?
Le contrôle semelle… Je sais que certains vont rigoler.

Un modèle ?
Neymar

Une équipe ?
Ca va faire parler et rigoler mais j’assume… Le PSG (éclats de rire).

Le joueur le plus fort avec lequel il a joué ?
Lenny Pintor (aujourd’hui à Saint-Etienne) à Bastia. Et à Concarneau, Gaoussou Traoré (prêté par Amiens) qui a beaucoup progressé.

Ses amis dans le foot ?
Je suis resté proche d’Anthony Roncaglia que j’ai connu à Bastia. A Concarneau, je suis toujours avec Gaoussou Traoré et Faissal Mannaï.

Corse ou Bretagne ?
Corse et Bretagne (rires). J’aime bien Concarneau. Il y a la mer comme en Corse et c’est une ville tranquille qui a son charme. Je m’y sens bien.

Texte : Laurent PRUNETA / Twitter : @PrunetaLaurent / Mail : lpruneta@13heuresfoot.fr

Photos : Tony Esnault – US Concarneau

A 37 ans, cette Bretonne a lancé un podcast sur le National, dans lequel elle met en avant les acteurs du championnat, et pas seulement ceux de Saint-Brieuc, sa ville et son club de coeur !

« Ici on parle plus de Didier Santini que de Lionel Messi ! ». Le slogan de « 100% Foot National », un nouveau podcast, est évocateur. Il est la promesse de retrouver des sujets sur le foot amateur, des sujets différents. Imaginé et lancé par Mélanie Durot, animatrice radio à France Bleu (groupe Radio France), ce podcast, que l’on peut écouter sur Facebook (lien ci-dessous), est consacré au Stade Briochin, son club de coeur (elle est née à Saint-Brieuc, dans les Côtes d’Armor), mais pas seulement. Il parle du championnat National.

Mélanie, âgée de 37 ans, ne manque pas de rendre hommage à SON club dans ses podcats, qu’elle enregistre deux fois par mois, et dont certains ont été consacrés à des joueurs de l’équipe entraînée par Didier Santini ou encore le président du Stade Briochin, Guillaume Allanou. « Le football a toujours été une passion. Des premières « frappes » dans un ballon à mon premier match dans un stade, cette passion n’a cessé d’augmenter au fil de mon enfance. Les premières émotions sont venues du stade Fred Aubert à Saint-Brieuc ! Entre les buts de Yannick Le Saux, les passes magistrales de Dario Brose aux arrêts venus d’ailleurs de Franck Mantaux, j’en prenais plein les yeux, même si ceux-ci avaient parfois du mal à tout voir ! La faute à un grillage un peu trop grand du haut de mes 7 ans ! »

Passion et bénévolat

Mélanie a donc grandi avec les années « Division 2 » des Griffons (1993-1995 et 1996-1997) , et a connu la descente aux enfers du club, liquidé en 1997 et rétrogradé en CFA2 : « J’ai vite compris que le football pouvait faire pleurer de joie comme de tristesse. Définitivement mordue, je me suis intéressée à différents championnats, français comme étrangers, avec une appétence plus élevée pour la Série A, et encore plus pour le Stade Rennais, club phare de ma région. » Club phare dont elle a d’ailleurs commenté le match de Ligue Europa en studio, jeudi soir, à Larnaca, pour France Bleu !

Tout au long de son parcours, Mélanie n’a eu de cesse de parler de football – breton – par le biais de sites internet, d’émissions de radio ou encore de podcasts. Le plus souvent bénévolement. Par passion. Exactement comme les protagonistes de 13heuresfoot ! A une différence près : pour parler du National, Mélanie utilise le terme « 3e division » ! Mais non, le National n’est pas la 3e division. Enfin, si ! Enfin, non ! C’est une Ligue 2 bis ! Intercalée entre la Ligue 2 et le National 2 qui lui est l’ancêtre de la Division 3 avec plusieurs poules et les réserves pros. « J’ai connu la D3 quand le Stade Briochin est monté en D2 en 1993, puis j’ai découvert le National après l’accession du club en 2020. Au début, je n’ai suivi que les Griffons, et puis, la saison 2021-2022 de National a été celle de la révélation ! »

« Je parle de tous les acteurs qui font vivre le National »

Animatrice d’une émission de foot sur France Bleu Breizh Izel à Quimper (Finistère), Mélanie suit également l’US Concarneau. C’est là, au travers des matchs des Briochins et des Concarnois, qu’elle apprend à découvrir ce championnat. Surtout, elle écoute et pioche des idées : « J’ai découvert, grâce aux différents commentateurs de FFF TV, la chaîne qui retransmet les matchs le vendredi soir, des histoires de clubs et de joueurs. C’est ça qui m’intéresse. Ça m’a donné envie d’aller plus loin dans mes connaissances mais malheureusement, le National n’est pas le championnat le plus médiatisé ! J’ai eu envie de le mettre en valeur. L’idée d’un podcast s’est rapidement imposé à moi. J’ai peaufiné mon projet et au mois de juillet, le podcast 100% Foot National est né ! »

La semaine dernière, Mélanie a publié son sixième podcast, consacré à celui qu’il n’est pas exagéré de qualifier de « commentateur vedette » du National sur FFF TV. On veut parler d’Emmanuel Moine qui, avec son compère Vincent Magniez, forme une doublette de choc et de choix. Une doublette respectée, très appréciée sur les terrains du championnat, qui ne cesse de valoriser, elle aussi, cette compétition trop peu médiatisée, via de nombreuses anecdotes et une grande connaissance de tous ses acteurs. « L’objectif de mon podcast n’est pas de faire de l’actu mais plutôt de découvrir celles et ceux qui portent un club, les joueurs, les entraîneurs, les dirigeants, etc. Et aussi ceux qui sont dans l’ombre, les préparateurs physiques, les chargés de communication, les administratifs, conclut Mélanie. »

En résumé, Mélanie s’intéresse à tous ceux et toutes celles qui font vivre leur club en les interrogeant sur les spécificités de leur travail, leur quotidien et leur parcours. Des entretiens riches et passionnants. A découvrir.

Branchez vos casques, 13heuresfoot s’associe à « 100% Foot National » et vous propose d’écouter le podcast consacré à Emmanuel Moine (cliquer sur le lien ci-dessous).

Ecouter le podcast : https://bit.ly/3RysAXV

  • Il est également possible de réécouter les autres podcasts en vous rendant sur la page Facebook de « 100 % National » :

La page Facebook : https://www.facebook.com/100FootNational

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