Buteur courtisé en National dans les années 90 avant de s’asseoir sur les bancs des championnats nationaux avec la casquette de coach, le Havrais a souvent dû subir les choix, les décisions et les aléas du foot. Revenu de Saint-Pierre-et-Miquelon en 2022, il a posé ses valises dans les Deux-Sèvres, à Nueil-les-Aubiers, où il a découvert une autre approche, plus zen, sans pression. Pour un tas de raisons, il en avait bien besoin…

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos : Philippe LE BRECH, 13HF, FCNA, Footamicale 79, CVfoot et DR 

« Ce que fait Sébastien Cuvier à Nueillaubiers depuis son arrivée (en 2022), c’est franchement exceptionnel ! » On taira volontairement le nom de celui qui a lancé ce compliment lorsque nous lui avons confié que l’ancien joueur des années 90, buteur patenté et courtisé à l’époque de l’ancienne D3 puis de la création du National, serait le prochain « interviewé » de 13heuresfoot !

On taira d’autant plus son identité que son club de coeur et de sa ville natale, Bressuire, dont il est toujours très proche, est l’un des concurrents du FC Nueillaubiers (département des Deux-Sèvres) en Régional 1 (Ligue de Nouvelle-Aquitaine), distant d’une dizaine de kilomètres. Oui mais voilà : le FC Bressuire, qui rêvait de retrouver le National 3 quitté en 2022, et manqué l’an passé aux barrages, n’a terminé que 7e de sa poule (24 buts marqués en 24 matchs, idem la saison passée, mais en 22 matchs !), deux places derrière … le FC Nueillaubiers de Sébastien Cuvier (5e), dont l’attaque a fait parler la poudre dans sa poule (44 buts marqués, meilleur score du championnat). Une déception donc pour notre interlocuteur mystère, ancien grand reporter à LEquipe et dirigeant d’un club de National 2 dans l’Oise… Ah ça y est ? Vous avez trouvé ?

Terminer avec la première attaque, Sébastien Cuvier y était déjà parvenu avec le FC Dieppe en CFA2, l’année de la montée en CFA en 2013 (67 buts en 26 matchs). Un record qui tient toujours et auquel il tient, bien évidemment, même si les Harengs s’en sont rapprochés cette saison.

« Je n’étais pas un mercenaire »

Avec l’ASSP, à Saint-Pierre-et-Miquelon. Photo Philippe Le Brech.

Il est 8 heures, et comme prévu, « La Cuve », comme l’avait surnommé son ancien coéquipier au centre de formation du HAC à la fin des années 80, David Clapson, est sur notre écran, en visio ! Le natif du Havre, âgé de 54 ans, se souvient de tout. Les scores, les noms, les saisons … quelle mémoire ! L’homme a du caractère, qui masque une grande sensibilité. Cuvier dit ce qu’il pense et pense ce qu’il dit. Il ne joue pas un rôle. De toute façon, la comédie, ce n’est pas son truc. « Je suis entier ». On avait remarqué. Et bavard aussi, alors qu’il prétend être le contraire !

Et c’est peut-être aussi pour ça que l’ancien joueur d’Avranches, Bourges, Troyes, Istres, Valenciennes, Poitiers ou encore Pacy-sur-Eure, rien que des clubs fréquentés en National, n’a pas toujours arrondi les angles quand il aurait fallu, privilégiant son côté « cash » à la diplomatie. Le milieu du foot « semi-pro », l’ex-numéro 9, un chiffre prédestiné (il est né un 9/09 !), en a eu ras-le-bol. Marre de subir des décisions injustes voire injustifiées, d’écouter des discours sans queue ni tête, loin de l’idée qu’il s’est toujours fait du football et de ses valeurs.

Tout au long d’une carrière tout de même très riche, mais qui aurait pu l’être encore plus, rien n’a été simple pour l’avant-centre reconverti entraîneur.

Joueur, déjà, il était affublé de l’étiquette « attaquant de National », sans jamais pouvoir regrimper en Division 2, qu’il a tout juste côtoyée à ses débuts, quand il était stagiaire-pro 3 ans au Havre, prêté alors à Beauvais. Là, le joueur, qui changeait de clubs comme de chemise, ce qui lui a conféré une autre étiquette, qu’il réfute, celle d’un mercenaire plutôt bien payé à l’époque, plaide coupable : « J’étais trop juste pour jouer en D2. Et comme je voulais jouer… Donc je me suis fait ma carrière à l’étage en dessous. Quant à l’étiquette de mercenaire, je ne suis pas d’accord du tout. C’est juste qu’à chaque fois, ce sont les circonstances qui ont fait que je suis parti, avec des dépôts de bilan, des choix persos pas toujours très bons… »

Jura Sud, le décollage

Et l’entraîneur Cuvier ? Là encore, la vie ne fut pas toujours un long fleuve tranquille pour celui qui commence à embrasser cette seconde vie avec la réserve de Jura Sud, de 2002 à 2004 (DH), lorsqu’il était encore joueur. La suite le conduit en Bourgogne, à Imphy Decize en CFA2, où, en janvier 2005, il remplace le coach Christian Felci, évincé à Noël. Le tout en continuant de jouer et, bien sûr, de marquer ses 12 buts avec Imphy !

À Beauvais, de 2005 à 2007 (CFA puis National), il s’assoit sur le banc aux côtés de Bruno Roux, le coach, dans un rôle d’entraîneur des gardiens. Dans le staff, il y a aussi l’adjoint, un certain Patrick Vallée, son ancien coach à Pacy-sur-Eure, au sujet duquel il n’hésite pas à dire qu’il fut l’entraîneur « le plus complet » qu’il a connu !
Finalement, le décollage a lieu à Jura Sud, en CFA, où il retourne en 2008, pendant 4 saisons, cette fois dans le rôle de numéro 1. Et c’est après que ça se complique. On rembobine le film…

Interview
« Je ne suis pas un grand bavard »

Meilleur souvenir de joueur ?
J’hésite entre la victoire en coupe Gambardella avec Le Havre (en 1989) et la montée en Ligue 2 avec Troyes, la même saison que mon titre de meilleur buteur de National… Ah… Je dirais Troyes quand même !

Pire souvenir ?
Une élimination avec Poitiers, alors en National, en coupe de France au premier tour, contre Rilhac-Rancon. Pouahhh ! Ils étaient en DH ! Et sinon, toujours en coupe, je rate un penalty avec Fréjus, contre Canet-en-Roussillon.

Tu as marqué beaucoup de buts en National, mais sais-tu combien exactement ?
Je dirais 80 environ…

Non, 70 exactement ! Ton plus beau but, selon toi ?
C’était pour mon premier match à domicile avec Avranches contre Cherbourg, en National, l’année de sa création (en 1993). Un but pas du tout dans mon style, je pars du milieu de terrain, je drible tout le monde, dont Bruno Scipion (ex-Le Havre, Caen), et j’arrive devant Arnaud Lucas, le gardien, qui entraîne à Angers aujourd’hui, et je marque ! Dans le journal local, il parlait d’un but de Division 1 ! Il y en a un autre aussi, avec Poitiers, contre Noisy-le-Sec, en National, une volée sur un ballon en l’air. Avec Imphy-Decize, pour mon dernier match, j’ai lobé de 43 mètres le gardien Sy Mohamed, qui jouait en réserve à Gueugnon, entraîné par Jean Acedo !

« À Troyes où j’ai pris le plus de plaisir »

Ta saison la plus aboutie ?
Avec Troyes (saison 1995-1996).

La saison où tu as pris le plus de plaisir ?
Troyes également.

Celle où tu as pris le moins de plaisir ?
À Bourges, en National (1994/95). Le club descendait de D2. C’était compliqué. Je ne jouais pas forcément mais il y avait du lourd devant, Claude Rioust, Olivier Chavanon, Sébastien Imbert, Nicolas Le Bellec, et il y a eu le dépôt de bilan. Il y avait aussi Brahim Thiam et Lassina Diabaté dans l’effectif !

Un choix de carrière que tu regrettes ?
Oh oui ! D’avoir quitté Troyes après ma saison en National, je revois la scène avec l’agent. On est reçu par Alain Perrin et le président de Troyes, et mon agent se lève et dit en partant « Demain, Seb il est en D2 et avec un salaire décent, et pas ici ! ».

L’entraîneur qui t’a le plus marqué ?
Alain Perrin, forcément.

Celui que tu n’as pas envie de recroiser ?
Didier Ollé-Nicolle. Pourtant, c’est lui qui m’avait appelé quand j’étais au Havre avec les jeunes du centre de formation, pour le rejoindre à Colmar, pour être son adjoint et entraîneur de l’équipe B. Ce ne sont pas ses compétences que je remets en cause, mais l’humain.

Tes qualités et défauts de joueur ?
Finisseur, adroit, bon techniquement, intelligent dans les petits espaces et les déplacements, sinon, je manquais de vitesse, même si je n’étais pas lent, mais pour passer au-dessus, en D2, c’est ce qui m’a manqué je pense, avec la puissance, être costaud, quant au jeu de tête, les déviations, tout ça, c’était un peu plus compliqué.

« Je n’étais pas Pagis, même si j’avais un peu son profil »

Sous le maillot de Pacy en National.

Justement, c’était la question suivante, pourquoi n’as-tu pas passé le cap ?
Au tout début de ma carrière, j’ai joué en Division 2, à Beauvais, où j’étais prêté par Le Havre. J’ai même eu aussi la possibilité, après ma saison à Troyes, d’aller à Guingamp aussi en D1, mais c’était pour être le 4e attaquant, et moi, je voulais jouer. Je n’étais pas un Mickaël Pagis, que j’ai connu quand il jouait à Châtellerault, et qui était plus « tanké », plus « costaud » que moi : lui, c’est mon mentor au niveau du jeu. J’avais un peu son profil, toutes proportions gardées, mais il n’a pas eu la carrière qu’il aurait dû avoir.

David Clapson, ton ancien coéquipier au Havre, disait à ton sujet que tu préférais jouer en National où tu avais la cote et aussi… un bon salaire !
(Rires) C’est pas faux ! C’est vrai qu’avec Troyes, Poitiers, Istres, j’ai gagné pas mal, j’avais un statut, et c’était aussi lié au fait que je ne pouvais pas être titulaire en D2. Il fallait que je joue, et pour ça, il fallait que je descende d’un niveau. Quant à David Clapson, il a été mon premier artificier au Havre et m’a fait marquer plein de buts en minimes, en cadets, en juniors, en réserve en D3 : lui aussi, quel pied !

Un coéquipier marquant ?
Pas facile ! J’ai joué avec Stéphane Beyrac, Jean-Marc Droesch, Laurent Di Bernardo, Christophe Cottet… Ces mecs-là… Allez, Jean-Marc Droesh peut-être… Ou Stéphane Beyrac.. C’est trop dur ! Mais je ne vais pas répondre à ta question. Il n’a pas été mon coéquipier, on a joué l’un contre l’autre, joueur et entraîneur, c’est Franck Priou. On a créé des liens. Quelle gentillesse. Et quel joueur ! Voilà, ça c’est quelqu’un de marquant.

Le joueur avec lequel tu avais le meilleur feeling sur le terrain ?
Jean-Marc Droesch.

Le joueur le plus fort avec lequel tu as joué ?
Vikash Dhorasoo, même s’il était plus jeune, mais quand il est arrivé en D3, en réserve, même s’il avait 3 ans de moins que moi… Waouh ! On sentait déjà qu’il y avait du talent. Christophe Revault aussi. Et j’ai joué en sélection cadets de Normandie avec Emmanuel Petit, il était à Arcques-la-Bataille.

Un coéquipier que tu as perdu de vue et que tu aimerais bien revoir ?
Vincent Labarre, qui était gardien de but avec moi à Bourges et que j’ai retrouvé quelques années plus tard à Poitiers. Il était parti à Châtellerault, moi à Valenciennes, et je n’ai plus jamais eu de nouvelles. On en parle souvent avec « Lolo Diber » (Laurent Di Bernardo), un de mes anciens coéquipiers à Bourges et Poitiers, et avec qui je suis en contact, mais il ne sait pas non plus. On l’a perdu des radars. Je le cherche sur internet, mais aucune trace de lui.

Un défenseur que tu n’aimais pas trop affronter ?
Oui, Farid Bououden, il jouait à Aubervilliers et au Paris FC en National. Méchant sur le terrain. Il m’a cassé la clavicule. Mais il est très gentil dans la vie, on s’était revu après. Et aussi Karim Benhamou, à Fécamp et Créteil.

Un adversaire marquant ?
A mon époque, il y avait des gros joueurs quand même en National, Rouxel, Guivarc’h, Le Saux, le défenseur Eduardo Oliveira qui commençait, Rouve, c’était peut-être un peu plus « rentre dedans »… Un joueur qui m’a marqué, c’est Costa : à Sète. Je me suis dit « Celui-là, ouh la la, quel joueur ! ». Et aussi le petit attaquant qui était à Vannes, Sammaritano.

« J’étais très superstitieux »

Un modèle d’attaquant ?
Marco Van Basten. Jean-Pierre Papin, pour ses gestes d’instinct. Et Mickaël Pagis, un très bon et très beau joueur. Toutes proportions gardées, j’étais un peu un Pagis en National. Et le jour ou Jordan, mon fils, passé au centre de formation de Rennes, m’a dit « Papa, j’ai Mickaël Pagis en spécifique attaquant », je lui ai dit « Waouh ! profite » !

Des manies, des tocs, des rituels ?
Avant un match, j’étais très superstitieux. J’avais des habitudes, je mettais le même slip, le même sous-pull… Après, j’en ai souvent parlé, je suis né un 9/09, en 1970, alors j’avais le numéro 9. À Troyes, j’habitais au numéro 23, et j’ai marqué 23 buts cette saison, même si 22 seulement ont été comptabilisés parce que Roubaix avait déposé le bilan et mon but contre eux n’a pas été comptabilisé. À Istres, j’ai mis 13 buts, dans le département des Bouches-du-Rhône, le 13, et j’habitais au numéro 13, allée des Ferrières, à Martigues ! À Bourges, j’habitais au 13 chemin de la Rotée… À Pacy, je ne trouvais pas de baraque, j’ai habité au 2 rue des Folies à Jouy-sur-Eure, et j’ai mis 2 buts… J’ai déménagé, j’ai habité au 8 rue du vin bas à Ménilles, et quand je suis parti, j’étais à 8 buts… C’est un truc de fou ! J’en ai plein des histoires comme ça. À Troyes, j’avais l’orteil droit un peu usé, et une fois, Alain Perrin me l’a massé avant un match, au Dolpic, et j’ai marqué ! Alors après ça, il avait pris l’habitude de me masser l’orteil avant les matchs ! J’étais tellement superstitieux que j’en étais devenu débile parfois. Je me souviens que, par exemple, je garais ma voiture toujours à la même place. Aujourd’hui, je le suis beaucoup moins. Mais sinon, j’ai toujours mon petit rituel le matin. J’arrive toujours à la même heure, je prépare mes trucs, etc.

Avec l’AS Beauvais Oise, en D2, en 1991-92 (au milieu, en bas, accroupi).

Une devise ?
Bien mal acquis ne profite jamais.

C’est quoi le vrai derby normand ?
Le Havre- Rouen ! J’en ai fait quelques-uns, en minimes, cadets, juniors, Gambardella, tournoi des centres de formation, j’en ai gagné !

Ton meilleur souvenir de coach à ce jour ?
Dieppe, mais sportivement hein (rires).

Ton moins bon souvenir de coach ?
Forcément Colmar, ça s’est mal fini, il y a eu un dépôt de bilan. Quel gâchis.

« Quand je vois des potes entraîneurs galérer… »

Avec l’ASSP, à Saint-Pierre-et-Miquelon. Photo Philippe Le Brech.

Un entraîneur qui t’a inspiré ?
Alain Perrin par rapport à ce qu’il m’a apporté quand j’étais joueur mais j’ai pris de tout le monde, René Le Lamer à Istres, Denis Devaux, malheureusement décédé il y a peu, à Poitiers, Laurent Hatton et Patrick Vallée à Pacy-sur-Eure, Bruno Roux à Beauvais, mais pour moi, un des plus complets, c’est Patrick Vallée, qui n’a pourtant pas une carrière de L2 ou L1. C’est lui qui m’a marqué, sur les contenus de séances, sur les analyses. Il était parti à Singapour. Mais il n’est pas trop « sorti » en France, où il n’est pas trop réputé. Idem avec Jean-Michel Prieur à Fréjus, qui avait une grosse connaissance du foot, une vraie réflexion, une vraie analyse; avec lui, on avait des échanges qui duraient des heures.

Et sur la scène internationale, qui sont tes coachs références ?
Guardiola (rires) ! J’étais beaucoup axé sur la possession, et après, j’ai beaucoup aimé Klopp, pour les transitions rapides. Et ce que fait Franck Haise depuis quelques années, chapeau ! J’aime beaucoup. Je n’ai pas la prétention d’entraîner à son niveau bien sûr mais quand je vois tous les leviers qu’il a actionnés pour en arriver là, waouh ! Attention, entraîneur, c’est un vrai métier, et ce n’est pas un métier pour tout le monde. Il y a des classes : tu as le niveau amateur, le niveau semi-pro et le niveau pro. Bien sûr, Haise, il a un staff avec lui, mais les idées, ce sont les siennes.

Tu n’as pas la prétention d’entraîner au haut-niveau, mais tu as déjà entraîné en N2 et N3, et tu avais la cote : tu as tiré un trait sur ces échelons ?
Un trait, non, mais j’ai bientôt 55 ans, il faudrait … Mais le métier d’entraîneur est précaire. Je suis en CDI ici, à Nueillaubiers, dans un club de Régional 1, j’ai le confort, je fais beaucoup de choses au club, et quand je vois des potes qui galèrent aux étages au-dessus, je pense par exemple à Xavier Collin, qui a eu le BEPF pour entraîner en pro, et qui n’a pas de club ni en National ni en N2… Je sais bien que les places sont chères, mais par rapport à son diplôme, il aspirait à aller plus haut quand même. Je l’ai fait avant, j’étais à Colmar, adjoint en National, entraîneur de la réserve, mais il y a eu un dépôt de bilan. J’étais à Dieppe, en National 2, où j’ai subi une décision injuste de la part d’un président, puis à Saint-Louis/Neuweg en N2, où il y a eu un licenciement économique : tout ça, au bout d’un moment, ça pèse.

Pourquoi ne pas essayer d’aller dans un staff pro ?
Oui, pourquoi pas… Pour être dans un staff, il faut aussi que j’ai des affinités avec le coach. J’avais des contacts avec Philippe Hinschberger quand il était en haut de tableau il y a deux ans avec Niort, en National, mais il me disait que, même s’il montait en Ligue 2, financièrement, c’était compliqué. Une fois, Philippe (Hinschberger) m’avait appelé pour être son adjoint en D2 à Laval, mais je venais de donner ma parole à un petit club de l’Oise, l’US Mouy, pour jouer en Promotion d’Honneur, c’était juste après l’éviction avec le staff à Beauvais. Sur le coup, il n’a pas compris ma décision !

À un moment donné, tu étais consultant en National pour FFF TV …
Oui, quand j’étais à Colmar, et j’avais bien aimé l’expérience ! Je commentais les matchs de Belfort avec Maxime Chevrier. Aujourd’hui, Maxime le fait toujours avec Maurice Goldman, l’ex-coach de Belfort. Je me souviens, Maurice, avant les matchs, il se plaignait tout le temps (rires). Avec lui, c’est un peu comme avec Noël Tosi, qu’est-ce que tu rigoles !

« Le foot a cassé des choses… »

A Poitiers, avec Jean-Marc Droesch (à gauche), qu’il cite dans les coéquipiers marquants.

Un choix de carrière que tu regrettes ?
Non, aucun, parce que ça n’a pas toujours été dépendant de moi, comme je t’ai dit, à Colmar, le club fait dépôt de bilan, à Saint-Louis/Neuweg, il y a eu ce licenciement économique, à Dieppe, c’est le président qui a estimé que je devais porter le chapeau parce qu’on avait mis le gardien remplaçant en coupe de France sur la feuille de match alors qu’il était suspendu… Dieppe, c’est une cicatrice, parce que, humainement, ce qu’on m’a fait, c’est dégueulasse; ça a pris une dimension politique. Je me suis fait avoir… Honnêtement, j’ai morflé. Aux prud’hommes, on a dit des choses sur moi… que ceci, que cela. Là, je suis tombé bas. J’ai fait une dépression. C’est là que je suis retourné au Havre. Heureusement, les jeunes du centre de formation du HAC, de la réserve et des U19 Nationaux, dont je m’occupais lors de séances spécifiques attaquants, c’était ma bouffée d’oxygène. Les équipes avaient un déficit dans ce secteur, on a discuté sur le projet de les accompagner sur le spécifique attaquants, ce que j’ai fait après Dieppe jusqu’en mai 2014. Mais cela n’a pas été pérennisé. Et puis le club de Colmar m’a appelé, et j’y suis allé seul. Et après, Colmar, Saint-Louis, là, ça n’allait plus, je suis parti à Saint-Pierre-et-Miquelon, ça m’a fait vraiment beaucoup de bien, j’ai rencontré des gens bienveillants, il n’y avait pas de covid, pas de stress, c’était zen… Et quand Jordan (son premier fils) a eu sa petite fille et que ma maman est partie, sans que je ne puisse aller aux obsèques… Il y a aussi Fabio, le frère de Jordan, que je n’ai pas vu depuis cinq ans… Fabio est artisan cirier, il fabrique ses bougies, il habite près de Mulhouse. Le foot a cassé des choses. Là je me suis dit qu’il fallait rentrer, que la priorité, c’était la famille. J’en ai eu des embûches. Mais je suis content de voir que le club de Dieppe est remonté en N2, j’ai d’ailleurs félicité le coach, Djilalli Bekkar.

Question utopique : si tu devais être l’adjoint de quelqu’un en pro, tu aimerais que ce soit qui ?
Franck Haise. Je veux bien être 2e ou 3e adjoint de Luis Enrique aussi ou même lui porter les bouteilles d’eau (rires) ! Je ne suis pas supporter du PSG, mais ce que fait Luis Enrique, ce que dégage cette équipe, t’es obligé de dire que c’est extraordinaire.

« J’aime mes joueurs »

Tu es un coach plutôt comment ?
Je ne suis pas un grand bavard, mais si j’ai quelque chose à dire, je le dis. Je peux être excessif dans les mots, jamais sur les hommes. J’aime mes joueurs, je pense être cohérent. Je ne justifie pas mes choix forcément, je ne rentre pas comme ça dans le vestiaire des joueurs, c’est leur lieu de vie, je respecte ça. Par contre, je ne suis pas le dernier à déconner, à chambrer, je suis assez ouvert contrairement à ce que l’on peut penser de prime abord. Je suis perché ; parfois, on dirait que je fais la gueule, mais non, c’est juste que je suis dans mon monde, et je sais que dans le milieu amateur, cela peut être mal perçu. Les gens disent « Oh la la, le coach, il dit à peine bonjour »… Non, c’est parce que je pense à quelque chose, je suis concentré sur autre chose.

Tu peux péter un plomb ?
Oui, ça m’est arrivé. Il y a quelques mois, avec Nueillaubiers, j’ai pété une table à la mi-temps : on était à 0-0 contre une équipe… Pfff…. Bon, bah, je me faisais chier sur le terrain. Je leur ai dit, « Les gars, non mais vous rigolez… » Je suis resté compétiteur, et je sais bien que ce sont des amateurs, que ce n’est pas leur boulot, qu’ils ne trichent pas. Il faut avoir une relation saine entraîneur-joueur. J’ai eu du mal au début, mais là, maintenant, ça va, j’accepte que l’on puisse rater un entraînement, je fais des compromis. On est obligé.

« Signer à Bressuire aurait été mal perçu »

Le meilleur joueur que tu as entraîné ?
Marcel Essombé. Je l’ai récupéré à Jura Sud, il sortait du centre de formation de Sochaux. Il a fait un essai catastrophique avec nous, mais j’ai dit « Je le prends »… Et il nous a fait une saison, waouh ! Mathieu Decamps aussi, Rolamellah Nouar. J’ai sorti quelques joueurs aussi comme Kalen Damessi, qui a joué en pro à Lille.

Un style de jeu ?
Jusqu’à mon passage à Dieppe, je prônais beaucoup le 4-2-3-1, mais aujourd’hui, je m’adapte, je suis plus dans un 4-3-3 avec une sentinelle basse, deux milieux relayeurs voire box-to-box, et je suis un peu plus axé sur les transitions rapides. C’est aussi le niveau Régional 1 qui veut ça, il n’y a pas non plus beaucoup de grands techniciens, et à notre niveau, la transition rapide, ça fait mal, parce que les lignes s’élargissent sur la durée du match. Les équipes ont du mal à rester structurées sur 90 minutes.

Tu as été en contact avec Bressuire récemment…
Oui, j’ai été reçu par le président. Mais… Ils ont pris Damien Charron, qui était à Niort et qui est un très-très bon coach. Et puis cela aurait été mal perçu que je parte de Nueil pour aller à Bressuire. C’est à 10 minutes, hein…

« J’ai une dent contre Le Havre »

Ton club de coeur, c’est lequel ?
Marseille !

Pas Le Havre ?
Moins…

Tu as une dent contre Le Havre, ton club formateur ?
Ouep.

Avec Fréjus, aux côtés de Jean-Charles Desnoyers, lui aussi passé par Le Havre, et Vikash Dhorasoo, lors d’un Fréjus-Bordeaux en coupe.

C’est vrai que les anciens Havrais, on n’en voit pas beaucoup dans l’organigramme…
Le Havre a été un club très fermé pendant des années. Et même de ne pas voir joué en pro là-bas, c’est un grand regret. J’habitais à 50 mètres du stade Deschaseaux, j’y ai joué en réserve en Division 3, j’ai gagné la Gambardella en 1989 avec Le Havre. Certains de mes coéquipiers ont joué en pro, je pense à David Clapson, Hubert Castets le défenseur, plus tard, Raphaël Clapson, le frère de David, a aussi joué en pro au Havre. Une fois, avec le coach Pierre Mankowski, j’ai été dans le groupe D1, dans les 15, mais il n’y avait que 14 places, et finalement, il ne m’a pas pris et je suis allé en réserve. J’ai été prêté à Beauvais en D2 l’année où Le Havre fait une année exceptionnelle pour sa remontée en Division 1 (7e) avec Mankowski, et je n’ai pas signer pro au bout de ma troisième saison de stagiaire-pro, en réserve. Au Havre, j’y ai encore mon papa et mon frère du côté de Caen, pas loin.

Le Havre, c’est tout de même 21 ans de ta vie…
Oui, c’est ça, j’en suis parti quand j’avais 21 ans. Je suis assez nostalgique des années 80 et 90. Et pas que pour le foot.

Tu n’as plus aucune attache avec le club ?
Non. Je suis allé au stade Océane pour l’inauguration, le 12 juillet 2012 il me semble, j’étais encore à Dieppe, on avait joué avec les anciens de la Gambardella. Et Le Havre avait joué contre le Real Madrid de Zidane (2-4) ! J’ai dû y retourner une ou deux fois, en spectateur. Même quand je faisais les entraînements spécifiques pour les attaquants du centre, bénévolement, et bien rien, même si j’étais très bien avec Bruno Rohart, qui était entraîneur des U19 Nationaux.

« J’ai fait un projet spécifique-attaquants »

Après la victoire en coupe Gambardella en 1989 avec Le Havre.

Serais-tu capable, comme ça, de citer le 11 de la victoire en Gambardella en 1989 ?
Les 13 même ! Revault, Castets, Amelot, Poirier, Piffre, Bretot, Lelong, Savoye, Guénni, Faye, Clapson, Chagnaud et moi, qui était remplaçant. Le 14e, c’était Malonga. Le coach, bien sûr, Abdel Djaadaoui. En face, au PSG, il y avait Kokkinis, Nouma, Llacer, De Vasconcelos, Rinçon, De Percin, pour les plus connus. On a joué à Geoffroy-Guichard, en lever de rideau de Saint-Etienne / Nice, un match de la dernière journée de D1, le 31 mai 1989 (0-0). À Geoffroy-Guichard, tu te rends compte ! Mais aujourd’hui, ça n’a rien à voir, ne serait-ce qu’au niveau de la médiatisation, tu fais une Gambardella, tu sors pro, et encore, y’en a déjà qui sont pros ! Tiens tu me demandais quels joueurs j’aimerais bien revoir, Benoît Chagnaud et Dimitri Piffre, je ne sais pas non plus ce qu’ils sont devenus. J’aimerais bien savoir.

Pourquoi n’as-tu pas persévéré à ce poste d’entraîneur des attaquants, dans un centre de formation par exemple ?
En 2013, j’ai écrit un projet sur les entraînements spécifiques attaquants, que j’ai envoyé dans quelques clubs et partagé sur les réseaux, parce que c’est vrai que dans un staff, on a un entraîneur des gardiens, mais il y a très peu d’entraîneur des attaquants. Je n’ai pas trouvé de poste, sauf au Havre donc, mais l’expérience n’a pas été pérennisée, parce qu’il fallait créer un poste, mais mon projet allait des tout-petits aux seniors. C’est un regret, oui, de ne pas avoir intégré un staff, peut-être pas de Ligue 2, mais de National par exemple. C’est vrai qu’en France, on n’en voit pas beaucoup. Et puis financièrement, c’est un poste en plus. Tu te rends compte que la réserve du Havre est tombée en Régional 1. Un club formateur comme ça… J’aurais bien aimé coacher au Havre oui, à défaut d’y avoir joué en pro.

« Les gamins ne jouent plus au foot dans la rue… »

A Pacy, en spectateur, à son retour de Saint-Pierre-et-Miquelon. Photo Philippe Le Brech.

Stade Océane ou stade Jules-Deschaseaux ?
Deschaseaux ! Comme pour beaucoup d’anciens de ma génération ! C’est un stade qui a une histoire, à l’anglaise, qui a connu beaucoup de montées et a vu tellement de grands joueurs. Mais le stade Océane est beau, surtout quand il est plein !

Combien d’amis dans foot ?
Des vrais amis, que j’appelle demain si jamais j’ai besoin d’eux, j’en ai 4 ou 5.

Une ville, un pays ?
J’aimerais bien aller au Canada, ce pays m’attire, me fascine, l’Australie aussi. Le Canada était fermé quand j’étais à Saint-Pierre-et-Miquelon, je n’ai pas pu y aller.

Meilleur souvenir de vacances ?
Je n’en ai pas pris tant que ça… Après Dieppe, il y a plus de 10 ans, j’étais parti à Canet-en-Roussillon. J’ai bien aimé. Biscarosse aussi, dans les Landes. Quand on a gagné la Gambardella, en 1989, on est parti aux îles Baléares avec toute l’équipe, un voyage payé par le président Jean-Pierre Hureau, une semaine, mais malheureusement, moi, mes vacances, elles n’ont duré que deux jours, les deux derniers…

« J’ai un casier aux Baléares ! »

Ah bon ? Raconte l’anecdote…
En fait, on était quatre joueurs à être sorti et puis on était rentré assez tôt le matin, on était parti loin, et on avait volé une mobylette et une moto-bécane plus puissante, pour rentrer, on s’est fait « gauler », on a fait 4 jours de prison… Je peux te dire que ça fait drôle quand le juge vient te chercher ou quand le coach Abdel Djaadaoui vient te voir derrière les barreaux et te dit « Mais la Cuve, pas toi, c’est pas possible… » En plus je n’avais rien fait, j’étais juste assis à l’arrière sur le porte-bagages ! On avait fait les cons. Et là-bas, ça ne rigolait pas. Donc, quand on est sorti de taule, on est vite allé à la plage pour profiter un peu. Après, quand tu rentres chez toi et que ton père te dit « Bah tu n’as pas beaucoup bronzé toi… ! » Alors que tous les autres coéquipiers étaient bien bronzés ! Je n’étais pas fier. Tu te rends compte, j’ai un casier aux Baléares !

Comment as-tu atterri à Nueil-les-Aubiers ?
Quand j’ai décidé de partir de Saint-Pierre, j’ai mis une annonce sur le site CVsports, j’ai été contacté, dès le mois d’avril, et ça s’est fait facilement. Je me suis rapproché de Jordan (son fils, qui évolue au Poiré-sur-Vie), qui était à une heure de route, et qui venait d’être papa. Quand je suis arrivé au club, je ne connaissais pas du tout la région, la poule, les équipes, les coachs… Je ne connaissais personne.

Le FC Nueillaubiers en quelques mots ?
Convivial, amateur, sain. Ici, je n’ai pas de pression. Compte tenu de nos moyens, ça fonctionne bien sportivement. C’est un petit club. Cela va faire 8 ans qu’ils évoluent en Régional 1, et je termine ma 3e saison. On arrive à se structurer petit à petit. On a des infrastructures, on peut s’entraîner très correctement, on a eu un terrain en synthétique tout neuf, et aussi un terrain tout neuf en herbe avec éclairage, c’est top ! En N3, il y a des clubs qui n’ont pas nos ça.

Le niveau du Régional 1 dans l’Ouest ?
C’est homogène je trouve, avec des belles équipes, Perigny, qui n’est pas monté alors qu’ils ont fini derrière Angoulême B qui eux, ne pouvaient de toute façon pas monter, Bressuire aussi, c’est une bonne poule de Régional 1 : quand je suis arrivé il y a 3 ans, il y avait 5 descentes, waouh, on a fini 7es ! La deuxième année aussi, encore 5 descentes, on a fini 4es, et là, on a fini 5es. Le niveau est quand même assez relevé. Et nous, franchement, par rapport à nos moyens, on a vraiment des bons résultats, ce n’est pas pour nous jeter des fleurs, mais bon… Il faut continuer, ce n’est pas évident, on a Bressuire à côté… On n’a pas les moyens de rivaliser, on a maximum 200 000 euros de budget pour le club, un salarié, deux apprentis, et en face, ils ont 500 000 euros. Et ils ont fini 7es derrière nous, comme Thouars aussi (6e)…

As-tu le temps d’aller voir des matchs dans ta région ?
De temps en temps je vais voir Bressuire ou Thouars si on ne joue pas en même temps, ou bien alors je vais voir Jordan (son fils, qui évoluait au Poiré-sur-Vie) quand je peux. Mais ce n’est pas facile, parce que depuis cette saison, on joue le samedi après-midi. Avant on jouait le dimanche, pendant mes deux premières saisons, mais on a changé, pour faire un petit peu plus de recette, par rapport aux descentes en réserve aussi le lendemain. Et puis on fait un tout petit peu plus de monde le samedi.

Le milieu du foot ?
Le pouvoir de l’argent, toujours plus… Ce n’est pas que ce soit malsain, mais je ne suis pas sûr que certains soient là par passion. On parlait de nostalgie tout à l’heure : 30 ans après, quelle différence, notamment chez les gamins. On ne joue plus au foot dans la rue, quel dommage ! L’argent a pris le pouvoir, le résultat aussi, et tu es obligé de faire avec, même au niveau amateur. On n’a plus le droit à l’échec. C’est pour ça, quand je vois mes collègues, qui durent un an ou même pas un an et demi dans un club, je me dis que je ne sais pas si j’y retournerais, ça use.

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  • Texte : Anthony BOYER / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : Philippe Le Brech, 13HF, FCNA, Footmaicale 79, CVfoot et DR
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Le coach qui a permis au FC Dieppe, 8 ans après, de retrouver le National 2, s’est nourri de ses nombreuses frustrations et déceptions, mais aussi de ses multiples expériences dans les championnats amateurs, pour se façonner et affirmer sa personnalité et ses ambitions.

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos : FC Dieppe / Clémence HEDIN

Djilalli Bekkar n’a jamais raconté cette histoire. Un essai, quand il avait une petite vingtaine d’années, avec la réserve du Paris Saint-Germain alors entraînée par un Antoine Kombouaré sur le point d’enfiler son nouveau costume de coach de Ligue 1.

Ce qui s’est passé ce jour-là l’a tellement marqué qu’il s’en est servi, qu’il s’en sert et qu’il s’en servira encore pour sa progression personnelle. Cet épisode en particulier, et de nombreux autres tout au long d’une carrière de joueur essentiellement menée sur les stades de N2, N3 et DH, ont fini de façonner l’entraîneur qu’il est devenu, exigeant, travailleur, passionné, mais surtout juste et droit. Il sait trop bien ce qui est bon et ce qui ne l’est pas pour le joueur, pour avoir lui-même vécu toutes les situations. Vous connaissez le dicton : « Ne fais pas à autrui… »

Djilalli Bekkar ne s’en cache pas : c’est aussi parce qu’il n’a pas pu embrasser une carrière de joueur professionnel qu’il a faim et soif d’y parvenir sur un banc avec le costume de coach pro. C’est pour cela que sa motivation, son ambition, sa rage, sont décuplées.

Deux accessions en N2 en 3 ans

À 44 ans, le natif de Sarcelles (Val d’Oise) vient de vivre une deuxième accession en National 2 en trois ans après Compiègne (en 2021/2022), cette fois à la tête du FC Dieppe, qu’il a rejoint l’été dernier, après un exercice très réussi à Saint-Lô (4e en N3 en 2024). Ces résultats lui ont donné un certain crédit en Normandie, où il a été élu meilleur entraîneur amateur en 2024 par le média « Foot Normand ». Pas de quoi pavoiser : sur le compte LinkedIn qu’il a créé, il n’a cependant pas fait mention de cette distinction. Cela viendra peut-être. Il n’éprouve pas non plus le besoin de raconter systématiquement sa vie footballistique de manière virtuelle, quand bien même le ballon est toute sa vie. Quand bien même le ballon est son obsession, et génère chez lui un mélange d’orgueil, d’ambition, de passion et d’envie de réussir.

Côté pile, côté face

Mardi, avant de se rendre au club, et après avoir déposé ses enfants à l’école, celui qui vient de fêter ses 44 ans s’est confié pendant une bonne heure. L’ancien attaquant de Sannois/Saint-Gratien, La Vitréenne, Changé, Compiègne, Le Poiré-sur-Vie, Mantes ou encore Grand Quevilly, s’est montré très loquace. Ce n’est pas toujours le cas dans la vie de tous les jours, où il peut parfois être froid, fermé à double tour, telle une porte de prison. Aurait-il une double personnalité ? « Quand on parle foot, ça pourrait durer des heures, sinon, je suis réservé de base » lance-t-il.

C’est vrai qu’il y a le Djilalli côté pile, ce garçon au sourire éclatant qui illumine son visage, et le Djilalli côté face, les mâchoires serrés, le regard sombre. « C’est peut-être une carapace… Quand j’arrive quelque part, dans un stade, je peux tracer tout droit, sans calculer personne, ou alors juste dire bonjour, mais voilà… » tente-t-il d’expliquer, avant d’ajouter : « C’est quelque chose que je ne sais pas faire dans la vie de tous les jours, je ne sais pas pourquoi. Même avec mes beaux-parents, je reste dans mon coin… J’essaie, mais je n’y arrive pas… » Parlons de ballon alors, Djilalli sera beaucoup plus ouvert !

Interview

« Quand il y a une difficulté, j’ai envie de la surmonter »

Djilalli, commençons par cette anecdote, avec la réserve du PSG…
J’avais 19 ans, je jouais à Sarcelles, dans mon club, et je vais faire un essai au PSG, avec la réserve, entraînée par Antoine Kombouaré. Cela m’a marqué, parce que personne ne m’a adressé la parole. Le match, on joue avec la réserve, donc, contre les Parisiens qui préparaient la coupe Gambardella. Les quatre ou cinq joueurs comme moi, venus faire un essai, on avait été boycottés. Je faisais des appels, je ne recevais jamais le ballon… et à la fin du match, Kombouaré avait réuni tout le monde, il avait bien vu ce qui s’était passé. Il a dit aux joueurs de la réserve « J’espère, pour tous ceux qui sont en fin de contrat, que vous allez vivre ce que vous venez de faire vivre à ceux qui sont venus jouer »… Il avait vu que cela avait été dur pour nous, les joueurs à l’essai. Et il m’avait reconvoqué à un autre essai. C’est pour ça que, dans le foot, j’essaie de mettre les gens le plus possible à l’aise. Mais c’est quelque chose que je ne sais pas faire dans la vie de tous les jours.

« J’arrive à voir le joueur égoïste »

On sent que cette épisode t’a marqué…
Oui. C’était la première fois que j’effectuais un essai. J’ai vécu et grandi au club de l’AAS Sarcelles avec toutes ces pépites qui partaient dans des clubs pros, je pense à Philippe Cristanval par exemple, qui est né en 78 (Djilalli est né en 1981), j’étais là avant qu’il ne parte à Monaco… Je rêvais que cela puisse m’arriver. Là, je vais au PSG, le grand club à l’époque avec le Racing et le Red Star, et puis il arrive ça… Antoine Kombouaré n’avait pas encore fait la carrière de coach qu’il a eue ensuite, et ce qu’il a dit, ce qui s’est passé, forcément, ce sont des choses qui ont été impactantes et qui m’ont façonnées. Je n’ai jamais oublié. Il a vu que des joueurs nous boycottaient. On a joué avec des joueurs du PSG qui allaient quitter le club et au lieu de nous mettre à l’aise, ils ont fait tout l’inverse, ils ne nous ont pas calculés. C’était ça le message… Ils ne voulaient pas que l’on signe au PSG. Bon, c’est peut-être ça aussi qui a renforcé ma rage du PSG (rires), non, non ! Aujourd’hui, c’est le genre de comportement que je décèle tout de suite. J’arrive à voir le joueur égoïste. Parce que moi, j’étais un joueur très collectif, et pourtant j’étais attaquant. J’allais vers l’autre l’autre, je donnais le ballon à l’autre s’il était en meilleure position, je faisais l’effort pour l’autre… C’est pour ça que je fais très peu de mise à l’essai aujourd’hui. D’ailleurs, quand je contacte un joueur, je ne lui dis pas « Viens faire un essai », mais « viens faire une séance d’entraînement », pour ressentir l’ambiance, pour voir le club. Ce n’est pas du tout comme une détection.

Justement, tu étais un attaquant plutôt comment ?
J’étais un attaquant buteur, généreux, et comme j’étais généreux, eh bien des coachs aimaient bien m’utiliser dans les couloirs, pour travailler, pour défendre, sauf que moi, ce n’était pas mes postes. Là où j’étais le plus efficace, c’était dans la surface. Alors je n’hésitais pas à leur demander « Coach, mais pourquoi vous me mettez sur le côté ? Je suis capable de jouer dans l’axe et de marquer des buts… » C’est aussi quelque chose qui m’a marqué. Le joueur, il faut qu’il soit bien.

« J’y arriverai coûte que coûte »

Tu as beaucoup fréquenté les championnats amateurs quand tu étais joueur : que t’a t-il manqué pour être pro ?
Mon gabarit peut-être, je suis grand mais fin. Un peu de réussite aussi : avec La Vitréenne, on finit 2e en CFA, on rate la montée en National de peu; avec Sannois, on monte en National, mais je pars… Peut-être que j’aurais dû rester, même dans un rôle secondaire, puisque c’est ce que le club me proposait. Donc il y a aussi des questions de choix. Une année, j’aurais pu aller au Red Star mais je suis allé à Compiègne, en CFA… Je n’ai pas de regret. Je dis souvent à mes joueurs « Donnez le maximum, pour ne pas avoir de regret ». J’avais dit la même chose un jour à Yoann Salmier, que j’ai entraîné chez les petits à Saint-Brice, et qui joue aujourd’hui à Clermont (L2). Il était en difficulté chez les pros, en Ligue 1, il ne jouait pas toujours en équipe une, il a bien fait de s’accrocher ! Je pense qu’il m’a aussi manqué quelqu’un qui croit en moi. Qui me donne une chance. J’ai joué six mois avec Pierre Deblock (ex-Sedan, Auxerre, Bastia, Laval), quand il était en fin de carrière, à La Vitréenne : à ce moment-là, j’étais un peu en tension avec le coach, et Pierre avait discuté avec lui, il me disait de faire profil bas, et que pour le coach, je ne pesais peut-être pas assez dans le jeu. C’est vrai que je ne payais pas de mine mais je marquais des buts sur le terrain. En fait, le fait que je sois un joueur de surface, à la Inzaghi ou Trézeguet, toutes proportions gardées, ça m’a peut-être freiné.

C’est peut-être parce que tu n’as pas été joueur pro que tu as envie de devenir coach pro, non ? Es-tu animé par ce sentiment de revanche ?
Complètement. J’y arriverai coûte que coûte. Si ce n’est pas par la porte, ce sera par la fenêtre, et si ce n’est pas par la fenêtre, ça sera par le grenier (rires). Mon rêve, ce serait d’entraîner au stade Vélodrome, mais bien sûr, ce n’est qu’un rêve ! Je me souviens, avec des amis, on n’avait même pas 20 ans, on se fixait des challenges, on se disait « à la coupe du Monde 2010, on sera coach ! » Si je ne arrive pas à être joueur professionnel, il faut que je sois coach professionnel. Et si je n’y arrive pas, il faudra que ce soit mes enfants (rires). Mais on ira sur le terrain quoi qu’il arrive (rires) !

« J’ai appris à faire la part des choses »

C’est quoi qui te guide ?
La passion. C’est vraiment ça. Mais j’ai appris à m’en détacher, à faire la part des choses, grâce aussi au travail que j’ai fait avec un ami psychologue, François Basset, avec qui j’ai joué à La Vitréenne. En fait, entraîner en pro, c’est une motivation plus qu’une obsession. Je veux repousser mes limites. Si ça doit être en N2, ça sera en N2, si demain c’est en National, à Dieppe ou ailleurs, ce sera là. Je prends les choses comme elles viennent. Je me fixe des paliers. Je me dis, « C’est bien, mais voyons si on ne peut pas faire plus ». J’ai le même discours avec mes joueurs. Simplement, je sais que j’ai le mental et la capacité pour aller au haut niveau. Comme on ne m’a pas donné ma chance en tant que joueur, peut-être qu’en tant qu’entraîneur, on me la donnera. J’apprends à me faire connaître aussi, ce n’est pas évident, parce que je suis quelqu’un de discret. Mais je vois bien qu’il faut communiquer. J’espère que quelqu’un verra que j’ai faim, que j’ai des capacités, et que l’on me donnera ma chance. L’idée de créer un compte LinkedIn, c’est Christophe Pélissier (coach de l’AJ Auxerre) qui me l’a donnée; il met des petits mots de temps temps, ça m’a inspiré. J’essaie de regarder ce qui se fait, mais j’essaie de rester celui que je suis. Mon élection au titre de « meilleur entraîneur amateur en Normandie » par Foot-Normand ? Je ne l’ai pas encore relayée. Pourtant, je sais que c’est important de le faire. Il faut bien se vendre un peu !

« J’ai toujours été un peu organisateur »

En préparant l’interview, on a découvert que tu étais fan de l’OM… Surprenant pour quelqu’un qui est né à Sarcelles, et qui y a grandi jusqu’à ses 21 ans…
J’ai commencé à regarder les matchs de l’OM à la fin des années 80, quand le PSG n’existait pas à l’époque. C’est vrai que j’aime bien chambrer les Parisiens avec ça… Quand j’étais petit, je me souviens que l’on parlait surtout du Matra Racing. Avec l’OM, cela a été le coup de foudre. La finale à Bari, en 1991, on a pleuré… Mais je n’ai jamais été anti-parisien. Et puisque l’on parlait d’Antoine Kombouaré tout à l’heure, j’ai encore en mémoire le but qu’il marque en coupe d’Europe, son fameux coup de tête, contre le Real Madrid : dans ces moments-là, on est pour le football français.

Quand as-tu su que tu voulais devenir coach ?
Très tôt. À 17 ans, j’entraînais des gamins à Sarcelles. J’ai toujours été un peu « organisateur », tu vois, c’est moi qui composait les équipes quand on faisait des matchs. J’ai toujours eu ce truc en moi de diriger, de coacher. Et puis il y a une personne, Eric-Luc Odry, au club de Sarcelles, formateur au District du Val d’Oise, qui m’a orienté vers les diplômes. C’est comme ça que j’ai passé mon initiateur 1 et 2, ensuite mon Brevet d’État en 2007, j’avais 26 ans, je n’avais même pas commencé à entraîner en seniors. Sauf qu’ensuite, cela a mis 8 ans avant de pouvoir passer le DES qui permet d’entraîner jusqu’en N2, j’ai postulé 8 fois ! Ça m’a freiné dans mon évolution mais je ne me plains pas. J’espère que ça ira plus vite pour le BEPF (rires). C’est le dernier sésame. Je pourrai me présenter la saison prochaine. C’est l’objectif.

« J’étais un vrai baroudeur ! »

C’est à Saint-Brice que tu as fait tes armes de coach en seniors ?
Oui. L’opportunité s’est présentée en 2010, je sortais d’une dernière expérience de joueur à Mantes-la-Jolie mais ça ne me convenait plus. J’avais 30 ans, je voulais me diriger vers l’entraînement. Je suis resté entraîneur pendant deux ans, on est monté en DSR (Régional 2), puis je devenu manager et enfin directeur sportif. En tout, j’ ai passé 9 ans à Saint-Brice, de 2010 à 2019. Tout ce que je faisais à côté, adjoint de Thierry Bocquet à Poissy, éducateur en jeunes au FC Rouen, c’était en parallèle de mes fonctions à Saint-Brice. Quand j’ai repris pour le plaisir une licence de joueur en 2014 à Grand Quevilly, à côté de Rouen, où j’ai joué 2 ans, le matin j’allais aux entraînements à Poissy, ensuite j’allais à Saint-Brice l’après-midi et quand il y avait entraînement, le soir, j’allais à « Grand Q ». J’étais un vrai baroudeur ! Et en plus, je jouais aussi en équipe de foot entreprises avec le Nike FC ! Tu sais, c’est dur, il faut trouver sa place, son équilibre. Même si je n’étais pas pro, je vivais du foot. Je suis un mordu de ballon : avec moi, c’est du matin au soir. Et puis, dans mon parcours, j’ai eu des opportunités, ça c’est toujours passé comme ça. Je n’avais pas prévu d’aller à Poissy par exemple, ni au FC Rouen, c’est juste que, à chaque fois, il y a eu des amis qui ont fait que… À Rouen, j’y suis resté de 2014 à 2018. C’est Chérif Cheikh, le coach des U16, que je connaissais de la région parisienne, qui me présente à Thomas Leyssales, responsable de la formation du FCR à l’époque (et qui vient de remporter le titre de champion de France U17 avec PSG), pour coacher la génération des 2002 en U14. Même là, au FC Dieppe, je n’avais pas prévu de venir, c’est juste que l’ancien coach, Guillaume Gonel, est parti. En fait, je prends les choses comme elles se présentent.

« La tâche me stimule »

Dans ton parcours de coach, ce qui frappe, c’est cette « liberté » de décider du moment de partir d’un club, on pense à Saint-Lô ou Compiègne par exemple…
Je suis un homme de challenge. J’aime construire, laisser une trace. Quand il y a une difficulté, j’ai envie de la surmonter. Pour moi, rien n’est impossible. Quand je regarde mon parcours, jusqu’ici, je suis arrivé dans des clubs qui n’arrivaient pas à passer un cap. Au Saint-Brice FC, pareil : le club avait toujours joué en district, le coach a changé de casquette, j’ai pris la suite, on est monté en DH, ce sont toujours des histoires comme ça … À Saint-Lô, ils jouaient le maintien, je leur ai dit qu’on avait de bons jeunes, qu’on pouvait peut-être monter, et à l’arrivée, on fait une très belle saison; à Poissy, le club stagnait, et avec Thierry Bocquet, on est monté en CFA (saison 2014/2015). J’aime me fixer des challenges. Même avec mon grand frère, Farid, on était toujours en train de se « chercher » quand on jouait en bas de la maison : « Tu vas voir, je vais te marquer… » La tâche me stimule. À Dieppe, personne n’a jamais amené le club en National, et depuis que je suis là, on ne me parle que de l’épopée, quand ils ont failli monter (en 2003/2004, le FC Dieppe avait fini à un point de l’US Roye, promue en National). J’ai envie d’être celui qui va emmener Dieppe en National.

Tu dirais que tu es un coach plutôt comment…
Je suis audacieux, ambitieux dans ce que j’aime proposer. Je n’aime pas subir. J’aime provoquer les choses sur le terrain. J’étais comme ça joueur. Un peu moins dans la vie.

« Il faut beaucoup s’adapter »

As-tu des modèles de coach ?
Non, même si je regarde, forcément, ce qui se fait, notamment Bielsa et Klopp, parce que c’est le jeu que j’aime, un mélange de possession, de verticalité, de jeu rapide. Je m’inspire de ce que fait Bielsa défensivement, dans le « press » tout terrain. Tous les deux, ils ont ce feu intérieur, cela me ressemble beaucoup. Je me suis surtout construit par rapport au coach que j’ai eus, je pense à Oswald Tanchot, un coach rigoureux, passionné, que j’ai eu à La Vitréenne. Je pense à mes coachs en Ile de France, qui ne sont pas connus, comme celui que j’ai eu en juniors à Sarcelles, et qui invitait quelques joueurs « cadres » à manger avant les matchs pour leur dire ce qu’il attendait de nous et donner les directives…

Avec le FC Dieppe, tu es passé du 3-4-3 au 3-5-2 : c’est quoi, ton système de jeu préférentiel ?
J’ai une préférence pour un système à deux joueurs devant. Je ne sais pas si cela vient de ma sensibilité d’attaquant ou pas… J’ai beaucoup évolué en 4-4-2 à plat, en losange, en 4-3-1-2, en 3-4-3 ou en 3-5-2. Je n’ai jamais été un grand fan du 4-3-3, parce que je le trouve stéréotypé dans l’animation, trop basé sur les percussions individuelles. Or moi, j’aime bien la proximité, les connections entre les joueurs. Avec le coordinateur sportif Vincent Guiard, on avait essayé l’été dernier de construire une équipe hybride, capable de jouer en 3-4-3, mais ensuite on a trouvé notre équilibre en évoluant en 3-5-2.
À Saint-Lô, on avait commencé avec un 4-4-2 losange qui s’est finalement transformé en 3-4-3 toute l’année. Il faut dire aussi qu’à notre niveau, on a ce luxe de pouvoir choisir les joueurs. Le 3-5-2 et le 3-4-3 sont des systèmes bien équilibrés, ça permet de bien mettre de la pression, de jouer en bloc haut, d’avancer, on a du monde derrière pour sortir les ballons, on a des sécurités défensives, on a du monde à l’intérieur, de la présence devant le but. Après il faut trouver des profils qui ont du cardio’ pour jouer dans les couloirs. Et puis on récupère aujourd’hui des anciens ailiers, recyclés pistons/latéraux, capables de prendre tout le couloir. J’ai des convictions, mais je pense qu’il faut beaucoup s’adapter. Je me soucie de mettre le joueur dans les meilleures conditions.
Au FC Dieppe, en début de saison, avec la défense à 5, j’entendais les gens dire « C’est quoi ce système défensif ? », parce qu’ici, les gens sont … Je les appelle des « spectateurs exigeants » ! Je leur ai répondu, « Laissez-nous le temps », parce que le plus difficile, c’est le domaine offensif. Laissez-nous nous mettre en place. Je suis un entraîneur offensif à la base. Je crois que le record de buts marqués au club, c’est 68 buts (67 en réalité), l’année de la montée en CFA avec Sébastien Cuvier (saison 2012-2013). On n’a pas été très loin de le battre finalement (60) ! On a fait une saison remarquable en tout point. On a gagné 10 fois à l’extérieur, c’est énorme.

« C’est bien, mais ça peut être mieux ! »

On dit que tu aimes avoir des joueurs qui te correspondent…
(Sourire) Quand je jouais, j’ai rencontré des tas de coéquipiers qui avaient un talent incroyable, mais qui ne bossaient pas. Ils étaient fainéants. J’ai toujours eu du mal avec ça. Comme j’ai souvent été capitaine dans mes équipes, je les haranguais, je les poussais à l’effort, à être dans la cohésion. Moi, j’ai besoin de joueurs qui ont cette détermination. Dans mon recrutement, c’est fondamental, parce que je suis tellement passionné, que le moindre détail est important. Je dis souvent aux joueurs, « C’est bien, mais ça peut être mieux ». Quand on sort de 7 ou 8 victoires d’affilée avec Dieppe cette saison, malgré la victoire, je tire la gueule, et les joueurs me disent « Mais vous n’êtes pas content, coach ? », je leur réponds « Non, parce que si on peut faire plus, on doit faire plus, et à la fin, quand le championnat sera terminé, là, je pourrai être content ». J’arrive humblement à leur transmettre ça. Le meilleur exemple, c’est le match contre Charleville chez nous fin avril, on le perd mais on monte quand même en National 2 ! On n’avait plus perdu depuis 15 ou 16 matchs je crois (16 en réalité). Bien sûr, au départ, ce qui prédomine chez moi, c’est la joie, et je vois des joueurs qui ne sont pas contents… Là, je me dis que j’ai réussi à les impacter, à les emmener dans cette dynamique qui consiste à dire « Il faut gagner, il faut travailler ». Je suis comme ça pour tout, même dans la vie !

« J’ai tellement grandi dans la frustration… »

Accéder en National 2 sur une défaite à domicile, ça doit faire bizarre, non ?
Franchement, j’ai vécu tellement de sentiments contraires dans mon parcours que j’apprends à profiter de ces moments-là, parce que je sais que c’est dur. En 2017, avec Saint-Brice, on joue la finale de la Coupe de Paris, l’équivalent de la Coupe de Normandie, et le même jour, il y a un match en retard de notre championnat, entre le Red Star et Saint-Denis. Il fallait que Saint-Denis gagne pour que l’on monte en DH (Régional 1). J’avais envoyé quelqu’un au match. On gagne la coupe avec Saint-Brice mais je sais dans le même temps qu’on ne va pas monter parce que le Red Star a gagné… J’étais heureux mais… Les joueurs me demandaient le résultat, je leur disais de profiter de cette victoire en coupe. C’est une sensation, un sentiment difficile. Tout le monde attendait cette montée pour Saint-Brice. J’ai tellement grandi dans la frustration que j’apprends aujourd’hui à prendre du plaisir dans la victoire. Donc malgré cette défaite contre Charleville, j’étais heureux du dénouement.

Parle-nous de la jeunesse de ton effectif à Dieppe ?
On tournait cette saison autour des 23 ans de moyenne d’âge. C’est très jeune. J’ai une âme de formateur mais j’aime aussi que mes équipes courent. Même si je supporte l’OM, je vais citer Luis Enrique, qui aime que ses joueurs fassent les efforts, soient dynamiques. Je suis dans cet esprit. J’ai eu des équipes plus expérimentées, mais c’est une autre approche. Quand on a construit l’équipe la saison passée, je ne voulais pas d’une équipe mixte, parce que pour moi, c’est toujours délicat, avec d’un côté ceux qui vont mettre beaucoup d’énergie et de l’autre ceux qui vont plutôt être dans la gestion. Je pense qu’il faut aller dans une direction ou dans une autre. Et comme on ne pouvait pas avoir une équipe à 100 % expérimentée, comme l’avait Dieppe la saison dernière par exemple, et aussi parce que l’expérience, ça coûte plus cher, eh bien on a pris le parti de rajeunir énormément.

Le FC Dieppe a survolé sa poule de N3 mais le début de saison avait été moyen… C’est quoi le déclic ?
Mais le début n’est pas si mauvais que ça, juste moyen (1 victoire, 3 nuls et 2 défaites après 6 journées). Quand je suis arrivé, la situation au club n’était pas idéale non plus, parce que je suis choisi pour prendre l’équipe de N3 alors qu’au club, un éducateur voulait le poste, donc il y a un peu de tension, des conflits en interne, qui amenaient un peu d’instabilité. Et puis on est éliminé en coupe de France (1-0 à Neufchâtel, au 3e tour, le 15 septembre) et dans la foulée on perd à Drancy en championnat (3-2, journée 5). J’avais même dit à ce moment-là au président que, si le problème c’était moi… Parce que je suis quelqu’un de direct. Et c’est vrai qu’à Dieppe, quand je suis arrivé, il y avait des joueurs qui étaient dans le confort, j’ai beaucoup secoué le cocotier. Forcément, quand tu ne gagnes pas, c’est la faute du coach. J’entendais dire que j’étais trop dur, trop exigeant, trop ceci, trop cela… Oui, c’est souvent ce qui ressort, mais au final, les joueurs adhèrent, parce que si, avec moi, cela passe par le travail, cela passe aussi par l’honnêteté. Moi, je voyais quand même le travail que l’on fournissait. Derrière, après Drancy, on égalise dans le temps additionnel contre Sannois, à la maison (1-1, journée 6). Et là, le club me prolonge… C’est un signe de confiance. Cela a consolidé mon discours. Les choses se mettaient en place, mais il manquait cette conviction, et là, ça validait le projet. Parce qu’un projet sur un an, ce n’est pas l’idéal. Du coup, les joueurs, du moins ceux qui n’avaient pas cette conviction, se sont dit « le coach, il est là, il ne va pas bouger », et derrière, on a cartonné. On a gagné 3 à 0 à Pays de Cassel, et on a décollé (16 matchs sans défaite, 14 victoires et 2 nuls).

« Dieppe, c’est une terre de foot ! »

Du coup, avec cette accession en National 2, tu as redonné goût au foot à ton président, Patrick Coquelet, qui avait pourtant annoncé son départ dans un premier temps ?
Quand j’ai eu mon entretien avec lui avant de venir, j’ai vu qu’il était déçu parce qu’il voulait finir son mandat avec son ancien coach, Guillaume Bonel. Il m’explique qu’il veut un coach une saison pour jouer le maintien. Immédiatement, je lui dis que le club doit jouer la montée, parce qu’avec la ferveur qu’il y a ici… Dieppe, c’est une place forte en Normandie après Caen, Le Havre, Rouen, QRM et Avranches. On ne peut pas ne pas avoir d’ambition. Finalement, il me dit banco. Quant à sa décision d’arrêter en fin de saison, je lui ai dit de garder 5% de réflexion au cas où on monte, de ne pas me laisser…Et en janvier, il a commencé à dire qu’il allait être obligé de rester si on montait. En mars, il a dit qu’il continuait. Là, il est reparti pour 4 ans, avec une transition, qui est déjà effective, puisqu’il a annoncé que, dans 2 ans, il céderait sa place à Stéphane Novick.

Cette ferveur autour du FC Dieppe, ce monde au stade, c’est rare en N3…
Il y a toujours eu du monde à Dieppe ! Je me souviens être allé voir en spectateur un match Dieppe – Alençon en N3 il y a 3 ans, et il y avait plus de 1000 personnes… Franchement, ici, c’est une terre de foot. Le FC Dieppe rassemble. J’ai vu des gens faire la queue sur 40 ou 50 mètres pour entrer au stade ! En N3, à part le FC Rouen à l’époque, je n’avais jamais vu ça en Normandie. Cela faisait 8 ans que le club attendait cette montée en N2. En coupe de France, Dieppe a fait 4500 spectateurs contre Laval l’an passé. On est top 4 en Normandie au niveau des affluences, après Caen, Le Havre et le FC Rouen. En N2, on serait juste derrière Bordeaux, Saint-Malo et Chambly.

Pour terminer, une question que nous posons généralement en premier : tes débuts au foot ?
J’ai commencé comme beaucoup, au quartier, en bas de la maison, à Sarcelles. Il y avait un terrain, je descendais avec mon grand frère faire des « goal à goal », et puis il y avait les matchs de quartiers et inter-quartiers. Je me suis inscrit très tôt au club de l’AA Sarcelles, où j’ai fait toutes mes classes, j’ai joué dans toutes les catégories. J’y suis resté jusqu’à mes 21 ans. Quand j’avais 18 ans, je me souviens que beaucoup de joueurs seniors étaient partis et le club avait propulsé les juniors, dont moi, pour évoluer en seniors. Là, j’ai fait de belles saisons, j’ai marqué des buts et ça attiré l’attention de Sannois/Saint-Gratien, qui évoluait en CFA, et qui m’a recruté. Avec Sannois, on est monté en National avec Didier Caignard (en 2002/2003). Pendant les vacances, un ami m’appelle et me dit qu’en Bretagne, La Vitréenne (DH) cherche un attaquant. Je me suis dit « Pourquoi pas ? ». J’ai fait un match d’essai, et le coach, Oswald Tanchot, qui démarrait sa carrière, me recrute. On est monté en CFA2 puis en CFA. On a failli monter en National une saison. Ensuite, je suis allé au Poiré sur-Vie (CFA2), on avait affronté le PSG en 16e de finale de la Coupe de France (1-3, le 2 février 2008 à la Beaujoire, à Nantes) ! Après, j’ai joué à Changé (CFA2) avec le coach Laurent Tomczyk, et Oswald Tanchot m’a rappelé à La Vitréenne, où je suis retourné, en CFA. On a failli monter en National. Là, j’arrivais à 29 ans, je voulais rentrer en région parisienne. Je réfléchissais déjà à l’après carrière. En parallèle, j’avais obtenu ma licence STAPS. C’est là que je signe à l’AFC Compiègne comme joueur, avant d’y retourner plus tard comme entraîneur, après des expériences chez les jeunes au FC Rouen donc, et en seniors comme adjoint de Thierry Bocquet, à Poissy, en 2015 : on était monté en CFA. En parallèle de tout ça, de 2010 à 2019, j’avais mes fonctions au club de Saint-Brice, qui a bien grandi au fil des années, passant de PH en DH. Mais au bout d’un moment, je ne pouvais plus tout concilier. Après Compiègne (2019-2023), je suis parti à Saint-Lô un an et me voilà à Dieppe !

  • Texte : Anthony BOYER / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : FC Dieppe / Clémence Hedin
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Le deuxième meilleur buteur de l’histoire de la Division 2 s’était éloigné du foot pro pendant 10 ans pour travailler dans le monde de la banque et des assurances, avant de replonger dans un rôle d’entraîneur des attaquants au FC Annecy, en Ligue 2, pendant 15 mois. Convaincu de l’utilité de son poste, il a repris goût au haut niveau.

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr

Photos Philippe LE BRECH

Photo FC Annecy

À Niort, il y a deux monuments. Les Chamois et la MAIF ! Samuel Michel (54 ans) connaît bien ces deux entités : Il a porté les maillots de chacune de ces entreprises qui font la renommée et la fierté de la préfecture des Deux-Sèvres. Et tant pis si l’une d’elles a disparu des championnats professionnels l’été dernier – l’association des Chamois Niortais (Régional 3) a fusionné avec l’UA Niort-Saint-Florent le mois dernier pour devenir « Chamois Niortais Saint-Flo », où évolue Hugo, l’un de ses deux fils, en R2 -, il reste toujours la reine des assurances pour faire rayonner Niort à l’échelle hexagonale.

Que le natif d’Amiens, dans la Somme – « Mais je n’y suis pas resté longtemps, j’ai grandi à Paris dès l’âge de 2 ans, à Garges-lès-Gonesse (Val d’Oise), rectifie-t-il » – ait bossé dans les assurances n’a à vrai rien dire de surprenant, tant avant cette seconde vie, il avait déjà « assuré » sur les terrains de Division 2 (devenue la Ligue 2 en 2002), ses clubs successifs n’ayant jamais eu à se plaindre de son rendement offensif. C’est simple, avec « Sam », comme on l’appelle dans le milieu (« Sammy, c’est plus pour la famille et les amis ! »), c’était … l’assurance de marquer des buts ! Beaucoup du buts ! 135 au total en 398 matchs dans l’antichambre de la première division, un chiffre qui en fait tout simplement le 2e meilleur buteur de l’histoire derrière Jean-Pierre Orts et ses 163 buts.

Une autre époque…

Bien sûr, c’était un autre temps ! Celui où il fallait passer 10 ans en D2 et marquer 100 buts avant de pouvoir goûter au Graal, la première division, « Alors qu’aujourd’hui, un jeune qui marque 10 buts en Ligue 2 file direct en Ligue1 ! A mon époque, on durait, c’était différent; pour signer pro, il fallait faire 15 ou 20 matchs sur la feuille, or aujourd’hui, un jeune signe pro même s’il a fait zéro match parfois ! », constate-t-il sans aucun regret ! Une autre époque… encore que, elle n’est pas si lointaine : Samuel Michel a stoppé sa carrière pro il y a 20 ans tout juste, en 2005, aux Chamois Niortais, avant d’en entamer une autre sur le banc. Pas toujours avec la reconnaissance du milieu.

Ses principaux faits d’armes ? Un intérim aux Chamois Niortais en Ligue 2 et des postes d’adjoint, et un poste de numéro 1 à Amiens en National. Aux Chamois Niortais, il fut propulsé entraîneur en chef en janvier 2008 par le président Joël Coué, avec Angel Marcos dans le rôle du superviseur en chef : « Avec Angel, on formait un binôme mais c’était lui le coach quand même, il avait beaucoup d’expérience, il prenait les décisions, il me drivait ».

La cicatrice amiénoise

Sur le banc de l’Amiens SC, en National. Photo Philippe Le Brech

Avant cela, il avait été l’adjoint de Faruk Hadzibegic et de Jacky Bonnevay, qu’il remplaça, puis retrouva son poste d’adjoint quand Denis Troch a été nommé. Ensuite, il s’occupa des U17 Nationaux. En novembre 2013, il devint l’adjoint de Sébastien Robert au Red Star, en National. Dans la foulée, il fut nommé entraîneur principal d’Amiens, en National, en juin 2014, avant d’être limogé six mois plus tard, juste après Noël, remplacé par un certain… Christophe Pélissier. Ce dernier venait juste de « faire monter » Luzenac en Ligue 2 (le club ariégeois fut interdit d’accession) avant de prendre son envol définitif au stade de Licorne, en 2016, avec le retour des Picards en L2, puis l’accession « Historique » en Ligue 1 à la dernière seconde de la saison 2016-2017 !

Ce n’est pas tant le fait de voir que son successeur a accompli de si belles choses qui a été difficile à vivre pour Samuel Michel, mais la manière dont il a été remercié par le président Bernard Joannin. Une décision qu’il n’a jamais vraiment digérée : « Ça m a un peu dégouté du foot pro, raconte-t-il aujourd’hui, plus de 10 après; en fait, l’injustice me révolte. Quand je suis remercié en milieu de saison à Amiens pour d’autres arguments que des résultats sportifs, bon ben là… C’est compliqué. J’étais investi à 300 %. J’étais venu seul sans ma famille. C’est vrai que Christophe Pélissier a fait quelque chose de très bien derrière moi, donc il n’y a rien à dire là-dessus. Mais j’aurais bien voulu voir la deuxième partie de saison à Amiens, aller jusqu’au bout, parce qu’on était en embuscade. Dans le foot, il faut toujours être en embuscade. »

Le goût de l’entreprise

Avec le FC Annecy. Photo Philippe Le Brech

Ce dégoût du foot pro a eu pour effet de le pousser à … pousser d’autres portes, celles du monde de l’entreprise. « J’ai des diplômes, assez diversifiés, J’avais fait une validation des acquis, j’ai fait un Master II à Rouen en marketing / management, sciences humaines / sciences sociales, j’ai une licence « banque assurance » et un BTS assistant manager. Je voulais voir autre chose. La MAIF, c’est une boîte connue et reconnue, et la banque, ça m’intéressait ! J’ai travaillé dans ces deux entreprises. En fait, chaque fois que j’ai une envie, je veux l’assouvir ! Mon épouse me dit souvent que j’ai eu la chance, jusqu’à présent, de toujours faire ce que j’avais envie de faire. Elle et mes enfants m’ont toujours laissé faire. »

Ces deux nouvelles expériences – il a continué aussi à entraîner en amateur, au niveau régional (à Aiffres et Saint-Liguaire), et même parfois à jouer pour le plaisir – lui ont permis de constater que, justement, les similitudes avec le foot professionnel étaient évidentes : « Notamment pour ce qui est du management, poursuit celui qui avait effectué ses débuts en pro à 18 ans au Red Star, en Division 2; pour moi, le management des grandes entreprises n’est vraiment pas loin de celui d’une équipe de football. C’est lié. On peut transposer le management d’une équipe de sport de haut niveau au monde de l’entreprise sans problème, les leviers peuvent être les mêmes, comme les objectifs, par exemple. D’ailleurs, certains anciens pros ont fait du management une activité de « consulting », comme Denis Troch et plus récemment Patrice Garande. Parce que la passerelle avec le foot est évidente ».

Ce goût pour l’entreprise, Samuel l’a eu dès que la fin de sa carrière a sonné : « Là, à 35 ans, il y a eu une révolution chez moi, comme une explosion intellectuelle dans mon cerveau, c’était incroyable ! En fait, je me suis aperçu que, quand j’étais joueur pro, j’étais uniquement centré sur moi-même. Je pensais qu’il n’y avait que le foot qui existait. Et là, quand j’ai arrêté, ça a été Hiroshima dans mon cerveau (sic), et j’ai compris que le monde, ce n’était pas moi. Du coup, j’ai eu envie de découvrir le milieu de l’entreprise ».

Saint-Pierre-et-Miquelon, quelle aventure !

A Saint-Pierre-et-Miquelon, en 2023. Photo @SPM La 1re

Parallèlement à son travail dans le « vrai » monde, Samuel Michel cherchait toujours à faire du football son métier. Quand la passion est là, elle ne vous quitte jamais ! « Quand on a passé autant d’années sur les terrains, l’envie est toujours là » explique-t-il. Du coup, il restait en alerte, comme on dit. Un peu comme un avant-centre qui ne touche pas beaucoup de ballons et qui attend, seul, devant les cages, la bonne occasion !

Et puis, un jour, dans le journal local, à Niort, un article l’intéresse : « C’était dans le courrier de l’Ouest ! L’article parlait de Sébastien Cuvier, qui revenait d’une expérience de 3 ans à Saint-Pierre-et-Miquelon, et il n’en disait que du bien. Il parlait d’une superbe aventure humaine et comme j’avais envie de m’échapper un peu… J’ai quand même une épouse et des enfants fantastiques ! L’article m’a donné envie, un club là-bas, l’ASIA Foot, cherchait un entraîneur, j’ai postulé et ça c’est fait ! Depuis quelques mois, la présidente du club, Ludivine Quédinet, qui est aussi présidente de la Ligue de Saint-Pierre-et-Miquelon, est membre du ComEx à la FFF avec Philippe Diallo. Elle est brillante. Elle fut la première femme présidente de Ligue en France. Saint-Pierre-et-Miquelon, c’est un caillou de 8 km sur 5 km, en plein milieu du grand nord, près du Canada ! Là-bas, tu as besoin de quelque chose, tu l’as dans la journée ou le lendemain ! Ils essaient vraiment de se développer. Les gens y sont fantastiques ! »

Samuel a remis un pied dans le foot, mais il ne le sait pas encore, il va bientôt poser le deuxième, et en Ligue 2 ! Dire qu’il avait tiré un trait sur le monde pro… « Quelques mois après mon retour et ma mission de six mois à Saint-Pierre-et-Miquelon, je reçois un appel de Laurent (Guyot), qui entraîne Annecy en Ligue 2. Je l’avais connu à Guingamp, on avait joué ensemble, j’avais été son adjoint aussi à Sedan en Ligue 2. Il me dit « On est avant-dernier, on est à 7 ou 8 points du premier non-relégable, on ne marque pas de buts, est-ce que tu veux nous aider, nous donner un coup de main » ? Il restait 12 matchs au FC Annecy pour se maintenir en Ligue 2. C’était chaud, compliqué. J’en parle à mon épouse, et puis à la base, c’est juste pour 12 matchs, juste pour 3 mois… Par amitié, j’ai dit oui. Je ne faisais pas grand-chose à ce moment là. Je dis à Laurent, « Allez, banco ! » On a fini avec 24 buts marqués lors des 12 derniers matchs. C’est peut-être une coïncidence… Il y a beaucoup de coïncidences avec Annecy (ironique). »

Son CDD pas renouvelé à Annecy

Sur le banc de l’Amiens SC, en National. Photo Philippe Le Brech

Pour son premier match dans son nouveau rôle, Samuel se déplace à Saint-Etienne avec le FC Annecy : « Et là, je tombe sur Robert Malm qui commente le match ! Avec Robert, on était un peu concurrent à l’époque ! Je retrouve Olivier Dall’Oglio aussi, avec qui j’avais joué à Rennes, j’ai revu plein de copains comme ça, je pense à Christophe Marichez aussi, entraîneur des gardiens au FC Metz, qui fut mon coéquipier à Niort ! »

Le club haut-savoyard, satisfait de son apport dans un rôle « d’entraîneur chargé des attaquants », lui propose un CDD d’un an supplémentaire. Un an durant lequel le FC Annecy « surperforme », au point de terminer la saison à la meilleure place de son histoire (6e), avec un nombre de points jamais atteint en Ligue 2 (51). Mais l’aventure s’arrête. Samuel n’est pas reconduit. « Mon contrat n’a pas été renouvelé, je n’en dirai pas plus ».

Samuel ne souhaite pas polémiquer, mais il en a gros sur la patate. Il s’était replongé « à 300 % » dans le foot pro, et ça lui plaisait. « J’aime le lien avec les joueurs, j’étais proche d’eux. Je suis dans l’échange, mais surtout, j’essaie de connaitre l’homme avant le joueur, afin de voir quel levier activer avec lui. C’est important de créer une proximité, de voir comment est le joueur dans sa vie, comment il fonctionne, s’il est marié, s’il a des enfants, comme ça derrière tu peux inter-agir. »

« Entraîneur des attaquants, je pense que ça marche ! »

Avec le FC Annecy, l’éte dernier, au sommet du Roc de Chère, à Talloires, pour une sortie cohésion en Haute-Savoie. Photo FC Annecy

Si avoir un entraîneur chargé spécifiquement des attaquants est un luxe aujourd’hui en Ligue 2, compte tenu de la crise financière des clubs et d’une certaine réticence de leur part à élargir des staffs, a fortiori quand ils sont français, Samuel est cependant convaincu que ce rôle est utile. « C’est Guy Lacombe qui m’en avait parlé, qui m’avait dit que c’était important. Il y en a quelques-uns, on entend parler de Djibril Cissé à Auxerre en L1, il y a Grenoble en L2, et quelques autres. En Europe, il y a beaucoup d’entraîneur des attaquants, en France, ça commence aussi, mais là, avec la crise, parce que c’est aussi une question de moyens et de budget, on en verra de moins en moins. C’est dommage, parce que je pense que ça marche. On va être obligé de faire marche arrière. »

Une chose est certaine, Samuel a adoré ce nouveau rôle, qui lui correspond mieux. Il l’a d’autant plus apprécié qu’il n’avait pas toutes les contraintes du coach principal, mais seulement à gérer « la réussite » des attaquants. « Cette année, on fait éclore le petit Quentin Paris, 18 ans, qui a 4 buts (en 15 matchs), et un joueur comme Yohan Demoncy, qui n’avait jamais mis plus d’un but par saison, en a marqués 7 cette année ! C’est pour ça, quand je dis que ça marche, je le pense vraiment, après… »

« C’est tout un travail, un conditionnement, une mise en confiance… »

Avec les Chamois Niortais, en Ligue 2, en 2003-2004. Photo Philippe Le Brech

Évidemment, après avoir passé 10 ans loin du foot pro, il a fallu se replonger dans les exercices, « mais je je les ai toujours dans ma tête », dans le travail chronophage d’un staff pro : « Quand je suis arrivé, en février de la saison passée, j’ai regardé tous les matchs de la saison du FC Annecy avec le logiciel Wyscout, sur une tablette que j’avais à disposition, et j’ai aussi regardé tous les buts qui étaient marqués dans tous les championnats, la manière dont ils étaient marqués. Je faisais beaucoup de vidéos et après je m’inspirais de la façon dont ils étaient marqués pour adapter mes exercices, basés sur les angles de frappe, sur les situations de frappe, etc. Je travaillais beaucoup dans les 18 mètres : en fait, pour moi, cela ne sert à rien de faire frapper un attaquant de 20 mètres quand tu sais que 90 % des buts sont marqués entre le point de penalty et la surface de but. Entraîneur des attaquants, c’est aussi faire des retours aux joueurs à partir de la vidéo, sur les déplacements par exemple, avoir des discussions informelles, gérer l’activation le matin quand ils sont sur le vélo, sur le terrain, en dehors, mettre en confiance, parler, c’est tout un travail, un conditionnement, une mise en confiance. En fait, c’est un peu une partie du rôle de coach, sauf que tu n’es pas coach. Je ne donnais pas mon avis, je ne disais pas « Il faut sélectionner tel ou tel joueur », même si je pouvais donner mon ressenti si on me le demandait. Mais j’étais là avant tout pour travailler la réussite. »

« C’est la passion du foot qui m’anime ! »

Aujourd’hui, Samuel est rentré chez lui, près de Niort, à La Crèche. Il avoue avoir repris goût au foot de haut niveau. Mais s’il se verrait replonger à nouveau, ce serait toujours dans un staff : « C’est la passion du foot qui m’anime ! Je n’ai jamais recherché la lumière. J’aime partager. Là, aujourd’hui, je digère, parce que tu t’attaches. Forcément, je me suis repiqué au truc. La fin de saison 2024, on s’est serré les fesses les 12 derniers matchs mais cette année, c’était différent, parce que ça a roulé de suite, même si on a eu un coup de moins bien en janvier/février. Mais le club n’avait jamais marqué autant de points (51) ni fini aussi haut (6e en Ligue 2). Bon, quand tu vois que ça prend, qu’il y a des résultats au bout, c’est prenant, et tu te dis que tu ne sers pas à rien, et en plus, Annecy, c’est un bon club, une belle région, avec des joueurs cools. En fait, le foot n’a pas changé par rapport à mon époque, c’est juste que, avant, il n y avait pas de réseaux sociaux, donc quand on faisait des conneries, ça ne sortait pas. Et on en a fait des conneries aussi, on n’était pas mieux qu’eux ! »

Et le foot amateur dans tout ça ? « Avec mon diplôme, je peux entraîner jusqu’en Régional 1. Je ne sais pas si je vais passer le DES en VAE (validation des acquis), je vais réfléchir, ça me permettrait d’entraîner en National 2 ou National 3 ».

Samuel Michel, du tac au tac

« Je suis toujours un peu gamin dans ma tête »

Avec le Red Star, en D2, en 1998-1999. Photo Philippe Le Brech

Meilleur souvenir de joueur ?
Les montées ! J’ai eu la chance d’en faire deux en Ligue 1, l’une avec le Stade Malherbe de Caen, et l’autre avec En Avant Guingamp, donc forcément, ce sont des souvenirs dont on se souvient.

Pire souvenir de joueur ?
Quand je me suis fait les croisés, avec les Chamois Niortais, à Strasbourg, dans un choc avec Jean-Christophe Devaux, c’était dans le jeu. J’avais 30 ans, je me suis posé plein de questions à ce moment-là, est-ce que je vais rejouer, tout ça…

Ton premier match en pro ?
Je crois que c’était contre Nîmes, il y avait Jean-Louis Zanon… Non, contre Avignon, il y avait Patrick Cubaynes, un sacré joueur ! C’était avec le Red Star. Je me souviens qu’un joueur m’avait mis une tarte ! C’est rigolo, parce qu’on en parlait récemment avec un joueur à Annecy, qui me demandait si, à mon époque, il y avait de la tactique ! Non mais comme si avant, le foot, ce n’était que des duels physiques !

Avec EA Guingamp, en Division 2, en 1999-2000. Photo Philippe Le Brech

Ton plus beau but ?
C’est marrant parce que sur l’application mobile que vient de concevoir l’En Avant de Guingamp, d’ailleurs très bien faite, il y est dessus ! Du coup, ce but, je l’ai revu ! C’était avec Guingamp donc, contre Châteauroux je crois, un ballon que je reprends de volée, qui va en lucarne opposé ! Mais pour moi, dès que le filet tremblait, c’était un super but (rires) !

Ton plus beau loupé ?
Il y a une action qui m’a marqué, je ne sais pas pourquoi, c’était en U17 Nationaux avec le Red Star : il n’y a plus personne devant le but, je n’ai plus qu’à la pousser, et là, je ne sais pas ce que je fais, je la mets à côté ! Et il y en a une autre aussi avec Sochaux, sous la neige : après une frappe de loin, le ballon tape la transversale, le gardien recule et tombe dans le but, moi j’arrive à fond, tout seul, je mets plat du pied et ça part au-dessus ! Un raté incroyable !

Ton geste technique préféré ?
J’aimais bien crocheter et enrouler, un peu à la Thierry Henry, je maîtrisais bien ce geste. Dans les entraînements spécifiques à Annecy, je disais aux attaquants d’arrêter de frapper fort, mais de croiser au sol, d’enrouler côté opposé.

Avec le Stade Rennais FC, en 1997-1998. Photo Philippe Le Brech.

Tes qualités et des défauts sur un terrain ?
J’avais un temps d’avance sur les autres, je lisais bien le jeu. J’avais une très bonne technique mais pas de grosses qualités athlétiques, malheureusement. Mes qualités m’ont quand même permis d’avoir une petite carrière un peu sympa en Ligue 2. Mes défauts, c’est que je n’avais pas un gros volume de jeu, même si je courais quand même, hein, mais quand je vois les garçons aujourd’hui…

La saison où tu as pris le plus de plaisir ?
Au Stade Malherbe de Caen, même si avec Guingamp c’était très sympa aussi ! Mais à Caen, il y avait tout, Luc Borelli dans les cages, on avait une grosse équipe, on s’entendait bien, on se retrouvait le dimanche au décrassage, quand ça existait encore (rires), on mangeait des huitres, c’était génial ! Je faisais du foot un peu pour ça, pour être avec les copains. Je me suis d’ailleurs marié en fin de saison à Caen cette saison-là.

Une erreur de casting ?
Sûrement que j’en ai fait, mais comme je le dis toujours, quand tu prends une décision, tu penses que c’est la bonne, et ce n’est qu’après que tu sais si c’était la bonne ou pas, donc ça ne sert à rien de se dire que c’était une erreur de casting.

Un coach marquant ?
J’en ai eu quelques-uns quand même, Robert Herbin, alias le Sphinx, au Red Star, à mes débuts : c’est lui qui m’a lancé quand même ! J’ai eu Patrice Le Cornu, mon formateur, malheureusement décédé, Pierre Mankowski, Guy Lacombe, j’ai eu beaucoup de « noms », ce qui fait d’ailleurs peut-être de moi ce que je suis aujourd’hui, en tant qu’éducateur. Je me suis inspiré de tous, de ce qu’ils faisaient de bien et de pas bien. J’ai eu aussi Philippe Hinschberger aussi, qui habite dans le coin, pas loin de Niort, où je viens de revenir aussi, donc on est en contact, comme avec d’autres aussi.

Un club où tu as failli signer à l’époque mais cela ne s’est pas fait au dernier moment ?
Oui et c’est un énorme regret ! J’ai failli signer à l’AS Saint-Etienne quand je suis revenu au Red Star après un passage à Rennes qui ne s’était pas très bien passé. Le Red Star ne veut pas me lâcher, ou demandait peut-être un peu trop d’argent, bref, ça ne se fait pas, et je décide bêtement de ne plus aller à l’entraînement ! Quinze jours après, Guingamp se présente, et le club me laisse partir à Guingamp. Mais quel regret de ne pas être allé à Saint-Etienne, ce club mythique !

« J’ai failli signer à Saint-Etienne ! »

L’équipe du Red Star, en 1998-1999. Photo Philippe Le Brech

Le club où tu aurais rêvé de jouer, dans tes rêves les plus fous ?
Le PSG. Je suis Parisien à la base, même si je suis né à Amiens, mais de l’âge de 2 ans jusqu’à mes 23 ans, j’étais à Paris, à Garges-lès-Gonesse, en banlieue, et je jouais au Red Star.

Pourquoi as-tu pratiqué le football quand tu étais petit ?
Mes parents m’ont mis dans le foot pour ne pas que je traîne dans la rue le mercredi après midi et le week-end, parce que voilà, on était en banlieue parisienne, même si à mon époque, on n’avait aucun problème de « vivre ensemble ». Et puis parce que j’étais passionné. Tout petit, j’avais un ballon avec moi. Mes parents étaient rassurés de me savoir au foot.

Pourquoi attaquant ?
Je voulais être gardien de but au début, j’avais effectué des essais, et mon père m’a dit « non, non, non…!  » il m’a mis devant, et je suis resté devant, voilà, c’est tout simple ! Parfois, les histoires, comme ça, c’est tout bête !

Tes débuts ?
Au FCM Garges-lès-Gonesse, j’y ai fait toute ma formation. Mon papa entraînait au club. J’y ai joué en cadets nationaux première année. J’avais terminé meilleur buteur d’un tournoi international cadets. C’est comme ça que le Red Star m’a repéré j’y ai signé en cadets 2e année et après, ça a décollé ! Je suis resté au Red star de 16 à 22 ans ! C’est un super club et de voir la manière dont il a rebondi aujourd’hui, je suis vraiment content ! On ne jouait pas à Bauer mais à Marville à mon époque, et on voit bien la différence depuis qu’ils rejouent à Bauer. D’ailleurs, comme disent les supporters dans leurs chants, le Red Star, c’est à Bauer ! Il y avait un joueur à Annecy, Yohan Demoncy, qui me chambrait avec ça et me chantait cette chanson ! Mais c’est tellement vrai.

« Un club mythique, c’est une certaine philosophie »

Avec l’Amiens SC, en National, en 1994. Photo Philippe Le Brech

Le club mythique en France selon toi ?
Le Red Star, Le Havre, Paris. Un club mythique, pour moi, c’est une certaine philosophie.

Un coéquipier marquant ?
J’ai eu de supers coéquipiers, je ne voudrais pas les blesser mais c’est vrai qu’il y a un joueur… Il m’a recontacté d’ailleurs il n’y a pas longtemps sur Messenger, c’est Éric Stéfanini, quand j’ai démarré au Red Star. Il avait un pied gauche magique. Il jouait derrière moi et à l’entraînement, ce qu’il faisait était incroyable, des centres, des reprises, des volées… Il me disait toujours, « Quand tu es aux abords des 18 mètres, tombe, et je m’occupe du reste ». Et derrière, il mettait des coups francs incroyables ! C’est une anecdote qui me revient mais j’en ai plein d’autres, j’ai joué avec de tels joueurs, je pense à Safet Susic, Steve Marlet, William Gallas, notamment…

Dans le jeu, tu avais des affinités avec un joueur en particulier ?
Frédéric Garny à Sochaux ! Sur les 23 buts que j’ai mis cette saison-là, il m’en a donnés beaucoup ! On était amis, nos femmes, nos enfants, se voyaient. On est toujours amis d’ailleurs, il est au Montpellier Hérault SC.

Le coach marquant ?
Guy Lacombe, tactiquement. Et le Sphinx, c’était mythique : un jour, on va jouer à Rouen, et Herbin, au bout d’un quart d’heure, me lance « Sammy, bouge toi, cours » et cinq minutes après, je marque un but, et là, je cours vers lui, et je lui fait « Alors, y’a rien là ? » et l’équipe se replace pour l’engagement. Et puis là, il fait un changement : je me dis « tiens, mais il sort qui ? » et je vois que c’est moi qui sors… Évidemment, je n’étais pas content. Il vient à ma rencontre, il me sert la main et me dit « Je crois Sammy que tu voulais me dire quelque chose, viens t’asseoir à côté de moi sur le banc, on va discuter » ! Je peux te dire que je n’ai plus jamais fait ça de ma vie après un but ! Il m’avait calmé direct !

Un coéquipier perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?
J’essaie depuis un moment d’entrer en contact avec Edwin van Ankeren, un « golgoth », très gentil, un super gars, j’ai joué avec lui à Guingamp. On arrive un peu tous à se contacter grâce aux réseaux quand même, d’ailleurs, récemment, j’ai retrouvé un de mes anciens partenaires à Garges-lès-Gonesse, Bruno Pasqualini, un Antillais, qui est en Guadeloupe maintenant.

Un président ?
Jacques Prévost, des Chamois Niortais, qui étaient proches de nous. Même Serge Viard à l’époque au SM Caen. Et puis, bien sûr, Noël Le Graët à Guingamp, même si ce n’était pas lui le président à l’époque.

Une causerie marquante ?
Celles de Guy Lacombe, c’était quelque chose ! On avait vraiment l’impression d’un acteur, il haussait le ton, il venait, il nous parlait…

« Je préférais être titulaire en Ligue 2… »

Avec le FC Annecy (au fond à gauche), en Ligue 2, au poste d’entraîneur adjoint chargé des attaquants. Photo FC Annecy.

Que t’a-t-il manqué pour être un bon joueur de Division 1 ?
Un volume de jeu plus conséquent peut-être. Je n’avais pas forcément beaucoup confiance en moi. En fait, je préférais jouer titulaire en Division 2 plutôt que remplaçant en Division 1. J’étais un peu un gamin dans ma tête, je le suis toujours d’ailleurs ! Peu importe le niveau, je voulais jouer au foot. Je n’ai pas beaucoup joué en Ligue 1, je n’ai dû faire qu’une petite cinquantaine de matchs (2 buts).

Une consigne de coach jamais comprise ?
Quand j’étais à Sochaux, Faruk Hadzibedjic voulait me faire jouer milieu droit, mais ce n’était pas mon poste, je n’avais pas de vitesse, même si je n’étais pas lent, alors je rentrais à l’intérieur, mais il fallait que ça marche, et il me l’a fait comprendre, en me disant « Ok, mais sinon, tu retournes sur le côté » !

Ton poste de prédilection ?
9 et demi, il me fallait un mec devant moi, j’ai eu la chance de jouer avec des supers 9, je pense à Fabrice Fiorèse, à Guingamp, avec qui j’avais aussi un super feeling sur le terrain. On a dû mettre une trentaine de buts ensemble, c’est pas mal. « Fio » avait le sens de l’appel en profondeur on se trouvait les yeux fermés.

Des rituels, des tocs, des manies avant de jouer ?
Non, plutôt la routine, les gestes habituels, qui m’aidaient à me concentrer, à rentrer dans ma bulle.

Une devise ?
Tout seul on va plus vite, ensemble on va plus loin.

Tu étais un attaquant plutôt comment ?
Opportuniste, technique et qui avait un coup d’avance.

Tu es un entraîneur plutôt comment ?
Proche de mes joueurs, à l’écoute, déterminé.

Un modèle d’attaquant quand tu étais petit ?
Marco Van Basten. Lui, vraiment, c’était la classe.

Le milieu du foot ?
Compliqué, génial et tendu.

  • Texte : Anthony BOYER / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : Philippe LE BRECH
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