Pour sa deuxième expérience de coach après Amnéville, l’ex-joueur de Metz, passé aussi par Le Havre, Grenoble, Tours et le Gazelec Ajaccio, a conduit l’USTL du Régional 2 au National 2 en seulement trois saisons. Avec une recette simple : ambition, adaptation, exigence, rigueur et professionnalisme.
Par Augustin Thiéfaine / Photo Paul Collinet
Quelques heures avant de fêter l’accession historique en National 2 de son équipe et le titre de champion du groupe I de National 3 contre la réserve du Stade de Reims, Julien François, l’entraîneur de l’US Thionville Lusitanos, est revenu sur sa fabuleuse épopée avec l’entité mosellane.
De son antre de Guentrange (le nom du stade de Thionville) à deux pas du Luxembourg jusqu’aux confins de la Nouvelle-Calédonie en Coupe de France, en passant par un face-à-face historique avec l’Olympique de Marseille 0-1 en 32e de finale, le 7 janvier dernier), le jeune coach (44 ans) s’est confié sur les clés qui ont mené l’USTL à un niveau jamais atteint auparavant. Une réussite accomplie en seulement trois petites années, 36 mois après la fusion des deux clubs de la cité thionvilloise (le Thionville Football Club et l’AS Portugais Saint-François) alors en Régional 2.
FC Metz, GFC Ajaccio…
Julien François, c’est plus de 300 matchs de Ligue 2 comme joueur, des montées en Ligue 1 avec le FC Metz, son club formateur (il y a évolué dans toutes les catégories jeunes) et aussi le Gazélec Ajaccio, son club de coeur. Une riche et passionnante histoire d’amour entre lui et le ballon rond, des années au plus haut niveau et surtout une personnalité humble mais pas moins ambitieuse qui ne voue un culte qu’à la victoire.
Mosellan de naissance et fils d’un ancien conseiller technique du département, il a tapé dans ses premiers ballons à 5 ans. Il n’a ensuite jamais perdu cette petite flamme intérieure qui le lie au football, un sport dans lequel il le dit lui-même il a « toujours baigné ».
Une carrière de joueur réussie
Aujourd’hui, s’il a rangé les crampons, il ne s’est pour autant pas mis en retrait des terrains : désormais, c’est sur le banc que cet ancien rugueux milieu défensif officie. C’est d’ailleurs dans ses contrées originelles que le « jeune » entraîneur a fait ses gammes : à Amnéville, en National 3 déjà, entre décembre 2019 et avril 2021, puis 15 kilomètres plus au nord, dans la sous-préfecture mosellane, à Thionville, où il vient d’achever sa troisième saison. Trois années qui l’ont propulsé son équipe et lui du Régional 2 au National 2, un niveau qu’il (re)découvrira dans quelques semaines.
Du Régional 2 aux sommets du National 3, son groupe n’a finalement que très peu changé, avec à la baguette de joueurs du cru, régionaux, et dévoués au souhait de la Ville et de son maire, Pierre Cuny, de voir performer une équipe thionvilloise dans le petit monde du ballon rond français. A tel point que les entités locales ont été poussées à la fusion en 2021. Le FC Thionville et l’AS Portugais Saint-François donnèrent naissance à l’US Thionville Lusitanos, dont les rênes ont été confiées d’entrée à Julien François.
« Le seule chose qui compte, c’est de gagner des matchs »
Fort de son expérience, de sa connaissance et de la rigueur du plus haut niveau, le coach, passé aussi par Tours, Grenoble et Le Havre durant sa carrière de joueur, auparavant adjoint de Jean-Luc Vanucchi ou d’Albert Cartier notamment au Gazélec d’Ajaccio, voulait voir plus grand en arborant la casquette d’entraîneur principal.
« Mon envie d’entraîner est arrivée de manière plutôt naturelle. Quand j’étais sur mes dernières années de joueur, je ne m’étais pas trop posé de questions. J’ai été capitaine pratiquement dans tous les clubs dans lesquels je suis passé. J’ai le tempérament pour coacher, ce leadership que j’ai envie de communiquer, d’imprégner à mes joueurs. Quand vous êtes sur le terrain, on ne vous donne jamais le brassard par hasard. Donc quand vous êtes entraîneur et que vous choisissez votre capitaine, c’est que vous voyez en lui un relais, une personne de confiance capable de passer des messages en interne et de diffuser une énergie, une force sur la pelouse. Être entraîneur c’est aussi ça, c’est être entraînant. Au plus haut niveau, c’est être un manager et on nous forme aussi à ça. C’est un métier où il faut être curieux et passionné. Je le suis. Il faut aussi lire, écouter. Il faut regarder, changer et savoir se remettre en cause. Il y a toujours une différence entre avoir des certitudes et être trop sûr de soi. Les garçons attendent que vous soyez juste avec eux, qu’ils aient 18 ou 33 ans. Dans tous les cas, il faut donner un cadre, des aspects et des tactiques dans lesquels croire et dans lesquels on sent les joueurs capables de restituer le meilleur chaque semaine. Se présenter comme un apôtre du beau jeu, oui pourquoi pas… mais aujourd’hui, la seule chose qui compte c’est de gagner des matchs et ça reste l’essence de notre projet. »
« Mon ambition est de retrouver le plus haut niveau »
« Au départ, sur les deux premières années, on était un peu surdimensionné : la première année, en R2, on termine avec 18 points d’avance, on marque 100 buts, on n’en concède même pas 15. L’année suivante en R1, on monte encore avec 15 points d’avance. Cette année, en N3, c’était peut-être moins évident, mais au final on a été leader de la première à la dernière journée et on a fait un parcours en Coupe de France assez énergivore qui a été autant un tremplin que des difficultés supplémentaires à gérer. »
En point d’orgue, ce périlleux déplacement au 7e tour, à 16 000 kilomètres, en Nouvelle-Calédonie, couronné de succès face à Hienghène Sport (4-0). Ce souvenir est à jamais gravé dans les esprits thionvillois.
Les Mosellans seront ensuite renversants à domicile où ils se hissent en 32e de finale en éliminant le demi-finaliste de l’édition précédente, le FC Annecy (Ligue 2). Leur parcours s’achèvera face à l’Olympique de Marseille, contre qui ils auront fait plus que résister (élimination 1-0). Ces embûches et ces états de forme ou de fraîcheur (allant jusqu’au décalage horaire !) auront poussé Julien François hors de sa zone de confort pour trouver les bonnes formules et ainsi préserver les Thionvillois vers leur véritable objectif : la montée en National 2.
« Finalement ce ne sont pas trois ans de perdu tant le club grandit, même si d’un point de vue plus personnel, j’en ai perdu deux dans les échelons régionaux par rapport à mes pré-requis pour le BEPF (brevet d’entraîneur professionnel), ce qui reste aujourd’hui mon objectif personnel ultime. »
Car s’il a côtoyé le milieu du football professionnel pendant près de deux décennies, Julien ne songe qu’à une chose : pouvoir le retrouver. « Je vais le dire sans prétention, mais mon ambition est de pouvoir retrouver le plus haut niveau. Atteindre le National 2, c’est déjà très bien, c’est la dernière étape avec le diplôme que j’ai actuellement. »
« On joue pour la gagne »
« Compte tenu de l’effectif à ma disposition pendant les deux premières saisons – une équipe dotée d’une supériorité technique et physique, joueuse, qui aime avoir le ballon, qui a toujours beaucoup marqué -, c’était forcément plus simple. Cette année en National 3 on termine 2e meilleure attaque (53 réalisations derrière le Stade de Reims II et ses 64 buts) et meilleure défense (28 buts encaissés). J’ai toujours plaidé pour un jeu de possession efficace en étant bon dans les transitions. Aujourd’hui, le football moderne se joue beaucoup sur ces axes, avec du pressing et du contre-pressing notamment mais à la fin les qualités individuelles des joueurs font la différence. Quand on a des bons joueurs sans avoir trop de principes de jeu, vous arrivez quand même à vous en sortir. En l’occurrence, à Thionville Lusitanos, on a les deux. On ne concède pas qu’un seul but à l’Olympique de Marseille sans ça ! Contre Annecy c’est pareil, on était mené 1 à 0 et on est revenu avant de passer devant. Aujourd’hui je n’ai aucune prétention à dire qu’on joue comme ci ou comme ça. On joue pour la gagne. »
« On mérite ce qu’il nous arrive »
C’est aussi pour cela que la réussite est totale : à l’USTL, et même si tout va très vite, il y a de véritables ambitions de succès à court terme. « On joue dans un projet dans lequel on est attendu où en terme de résultats on doit répondre de manière rapide. Tout s’est passé très vite mais pour autant nous n’avons rien volé. Forcément, cette montée va s’accompagner avec des niveaux d’exigences et de performances encore plus élevés. J’ai un staff restreint mais j’ai la chance d’avoir avec moi mon adjoint, Stéphane Borbiconi qui est aussi un ancien professionnel (FC Metz) et qui connaît aussi très bien les rouages du foot. On est un peu en décalage avec le monde amateur et avec le niveau de discipline que l’on voudrait insuffler à tout le groupe. Enfin, c’est surtout valable pour moi ! Mais je crois que c’était l’un des souhaits du président (François Ventrici) lorsqu’il nous a incorporés au projet : de vouloir faire les choses de façon très carré, avec une certaine rigueur. Il ne faut quand même pas oublier qu’on entraîne des joueurs amateurs : c’est difficile de demander à des mecs qui arrivent à 19h30 à l’entraînement, qui ont eu une journée de travail avant, d’être aussi performants que ce que l’on aimerait. Finalement, on ne s’en est pas si mal sorti et chacun a donné le meilleur de soi pour réussir. Je me souviens, à mon arrivée à Amnéville, on jouait en 4-3-3 avec un bloc bas pour pouvoir contrer parce qu’on n’était pas dominants et que devant, on avait des joueurs plutôt rapides. Le changement de stratégie s’est très vite opéré dans ce nouveau projet à Thionville où à l’inverse, il fallait prendre notre destin en mains et rentrer dans un rapport de force où on devait être dominateurs. Donc même si on était promu et qu’on arrivait avec plein d’humilité, on avait une belle pancarte dans le dos vu les moyens utilisés. Après le parcours en Coupe de France, on ne pouvait plus se cacher. On a assumé. On perd contre Marseille puis à Reims et Troyes. On a redressé la tête et on a renoué avec une nouvelle série de victoires et plus de régularité. On mérite ce qu’il nous arrive. »
Continuité et compréhension
Évidemment, pour s’extirper de sa poule de National 3, Julien François n’a pas pu compter que sur 11 joueurs toute l’année. Il a du trouver les bons équilibres, les bons ajustements pour réussir ce qui peut presque s’apparenter à un exploit tant le cinquième échelon hexagonal est piégeux. Parce que terminer en tête dès la première saison dans un groupe comptant cinq réserves professionnelles (Troyes, Reims, Strasbourg, Nancy et Metz) et des gros morceaux comme Reims Sainte-Anne et Belfort, est un sacré tour de force ! « C’est plus du management mais ça fait partie du métier. Il faut construire en fonction des uns et des autres, s’adapter sans cesse mais la façon dont on cadre notre groupe est forcément la même pour chaque joueur. Ils acceptent de rentrer dans ce moule et doivent faire avec, malgré les impondérables de leurs vies personnelles. C’est pas mal d’organisation. Par contre, pour la semaine en Nouvelle-Calédonie, tout le monde était assez motivé pour se libérer de son travail ! »
Une partie de son groupe a aussi une vie en-dehors du cuir et de l’USTL. « Dans l’effectif, on a un kiné, un professeur de sport, un chauffagiste ou des garçons qui travaillent dans les bureaux, il faut composer avec. C’est le lot quotidien de pas mal d’équipes et quand on est entraîneur, ça demande des capacités d’adaptation et de compréhension afin de faire les bons choix en fonction de ce que l’on voit et de ce que l’on ressent. Il a fallu constituer et forger ce groupe, étudier les complémentarités. On a 24 joueurs avec 3 gardiens et des postes doublés. Avec certains, on travaille ensemble depuis 4 ans et demie (pour ceux qui étaient déjà à Amnéville avec lui), ils connaissent mon fonctionnement. Un tiers de l’effectif de cette année est là depuis la R2, deux tiers depuis la R1, donc ça permet une certaine forme de continuité. Ce sont des joueurs qui se connaissent depuis longtemps, qui sont de la région et qui ont beaucoup d’affinités; ça a aidé à la qualité de ce qu’on a mis en place, c’est un accélérateur de réussite. On surfait sur une dynamique de victoires avant de perdre contre Marseille. On était invaincu depuis la pré-saison. On s’est mis en tête cette exigence et ce principe de gagne. Tous nos attaquants marquent des buts et on n’est dépendant de personne, c’est le collectif qui est mis en avant.»
Le Gazélec Ajaccio : amour et désillusion
Si tout le rattache à la Moselle, Julien François s’est trouvé une patrie d’adoption : la Corse. Où il fut joueur au Gazélec Ajaccio entre 2000 et 2002 (il était prêté par Metz) puis de 2013 à 2015. Il y a, dans les faits, commencé et terminé sa carrière de joueur. C’est aussi chez les Gaziers qu’il a débuté en tant qu’adjoint. « J’ai eu une grande chance, celle d’avoir commencé mes carrières de joueur et d’entraîneur dans un club comme ça. Le Gazélec d’Ajaccio, c’est une leçon de vie, une leçon d’humilité et une leçon du tout est possible, dans le bon comme dans le moins bon. C’est un club qui a forgé mes valeurs, qui m’a appris sur moi et sur les autres, qui m’a montré ce que j’aurais pu ou dû faire à certains moments. La descente à l’issue des barrages de Ligue 2 contre Le Mans en 2019 est et restera une cicatrice qui ne se refermera jamais (ndlr : les Corses s’étaient inclinés 2-0 à domicile alors qu’ils avaient remporté le match aller 2-1, avant d’être finalement relégués en National). Quand je rentre tous les étés en Corse, chez moi, j’avoue que 5 ans après, j’ai du mal à relever la tête quand je me balade en ville. Pour moi, ce club est une référence dans le sens où avec peu de moyens, on peut faire des choses extraordinaires. Je me souviens quand j’y suis retournée comme joueur en National là-bas (2013-2014), on était le plus petit budget et on est monté en Ligue 2 ! On n’avait pas de terrain d’entraînement. Une fois que vous êtes passé là-bas, vous ne vous plaignez de pas grand chose. Si vous avez bien compris l’état d’esprit de ce club, vous êtes armés pour tout ce qui « valeurs dans la combativité ». J’avais déjà ce tempérament là et il s’est encore plus affirmé. C’est une expérience qui me sert parce-que je suis très exigeant avec mes joueurs, comme je le suis d’ailleurs avec moi. Je crois que notre réussite actuelle à Thionville, au-delà des qualités du groupe, est aussi dû à ces valeurs là qui sont la base de nos succès. »
Entre élan populaire et nouveau défi
« Je suis un entraîneur qui laisse toujours assez de distance avec les joueurs. Je ne suis pas l’entraîneur copain. Je suis rigoureux et exigeant mais j’ai besoin de cette complémentarité avec mon adjoint. Lui est justement plus dans l’humain. L’autre clé, c’est de pouvoir repérer des joueurs qui nous correspondent. Je vais prendre l’exemple d’un Chafik Gourichy que j’ai connu il y a quatre ans à Amnéville qui est un joueur sur lequel j’avais insisté auprès du club pour qu’on le recrute car je connaissais son énorme potentiel. Quand on fait le tour de la région, le tour des matchs, le tour des adversaires, on peut vite cerner les capacités des uns et des autres. Finalement, on a réussi à créer un lien avec les joueurs et les nouveaux se mettent vite au diapason. Ils sont encouragés dans le vestiaire grâce à des relais comme mon adjoint ou mon capitaine. »
La découverte du National 2
C’est un échelon où il n’a pas encore évolué en tant qu’entraîneur. Un championnat réputé pour son exigence et sa difficulté. Le quatrième échelon hexagonal est un peu l’antichambre du monde professionnel, un tremplin pour certains, une seconde chance pour d’autres. Dans tous les cas, pour un bon nombre d’acteurs du National 2, cette division peut être un accélérateur de carrière. Alors que le championnat National se professionnalise de plus en plus, la N2 s’apparente comme le dernier palier avant d’être un peu plus en vue dans le monde du football français. « La réalité c’est qu’on ne connaît pas trop la N2. C’est un championnat dans lequel j’ai joué il y a 25 ans, donc ça a forcément dû évoluer depuis. On ira sans se prendre la tête et avec la conviction que derrière on va avoir une ville, car cette année on était à plus de 1 000 spectateurs de moyenne à Guentrange. Ça veut dire que le projet a pris et que les gens sont derrière nous. Il y a un élan populaire. »
« On tend vers une forme de professionnalisation »
« J’entraîne à temps-plein et je voulais un groupe de qualité en capacité de répondre à ces exigences même si on ne s’entraînait que jusqu’à trois fois par semaine jusqu’à l’année dernière. Les niveaux d’entraînement et d’exigence ont progressé année après année. On abordera le N2 de la même manière que les précédentes promotions. Globalement, il y aura un petit tiers de départs et un petit tiers d’arrivées. A ceci près que, comme dit, on va basculer dans un fonctionnement plus « professionnel » avec des entraînements tous les jours, tous les matins. Je sais que cela va condamner certains joueurs qui travaillent mais pour eux, il y aura une ouverture avec l’équipe réserve, même si ce n’est vraiment pas de gaieté de coeur que je vais me séparer d’eux. Ils ont porté le club et mériteraient de continuer. C’est par exemple le cas de mon capitaine, Adrien Ferino, mais c’est quelque chose que j’assume. J’estime qu’on rentre dans un niveau assez supérieur à ce qu’on a pu connaître. La pyramide s’affine et c’est de plus en plus compétitif. On n’a pas de garanties qu’en faisant cela ça va forcément bien se passer, mais on tend vers une forme de professionnalisation. Comme les joueurs, je me suis battu pour qu’on arrive à ce niveau. Désormais, on y est ! Il faut tout mettre en oeuvre à tous les niveaux du club pour être plus compétitif. Cette fois, on sera plutôt sur une moitié de changement plutôt qu’un tiers. »
Julien François, du tac au tac
Une devise ?
Je vais reprendre la devise du club que j’avais d’ailleurs utilisé lors de mon passage au DES (Diplôme d’Etat Supérieur) : « Seul on va plus vite, ensemble on va plus loin ». C’est très bateau, mais ça veut aussi dire beaucoup. Sur le long terme, le collectif reste toujours le plus fort. Notre réussite est collective.
Un sportif admiré ?
J’aime bien la course à pied, je cours beaucoup aussi. Il n’y a pas un coureur en particulier que j’admire mais j’aime tout ce qui a trait à l’endurance, la résilience. Ils ont cette capacité à tomber mais à savoir se relever et c’est ce que j’admire chez ce genre de sportifs.
Un match de légende ?
Je fais un peu partie de la génération 98, donc la première coupe du monde était marquante. Je suis de 1979, on avait 18-19 ans, donc le France-Brésil renvoie à tout ça.
En tant que joueur ?
Globalement les bons moments sont les années où on monte. Je suis monté avec Metz, je suis monté deux fois avec le GFC Ajaccio. Mais le match plus marquant, c’est Gazélec – Red Star de 2014, qui nous permet de monter de National en Ligue 2.
Et avec Thionville ?
Pour le coup j’en vois deux ! Il y a le déplacement en Coupe de France cette année en Nouvelle-Calédonie. C’était des conditions de fou, avec un hôtel de malade. On était parti une semaine avant le match. C’était une semaine hors du temps. En plus on a fait un super match (victoire 4-0) contre une équipe qui peut paraître plus petite, mais je n’avais surtout pas envie qu’on aille se faire « rétamer ». J’ai déjà vu des clubs de N2 ou de N3 partir en Martinique ou à La Réunion et revenir avec des souvenirs dans les valises mais sans la qualification. Je retiens la liesse des joueurs à la fin du match. On avait l’impression d’avoir gagné une grande compétition ! Le second, c’est le tour suivant contre Annecy (L2) où cette fois on est chez nous et ce jour-là on fait un match énorme. A la fin on avait l’impression de ne pas avoir fait un exploit tellement les joueurs ont été bons. Beaucoup parleraient du match de Marseille avec le folklore autour, mais en terme de performance sportive, c’était dix fois mieux contre Annecy.
Un joueur marquant que vous avez côtoyé ?
Miralem Pjanic à Metz. Il est rentré dans le groupe pro à 17 ans, on était en train de galérer en Ligue 1 dans une saison horrible où on termine avec 24 points. Quand il jouait avec nous, c’était quand même hallucinant de voir la maturité et la qualité qu’il avait. A l’époque je devais avoir 27 ans, donc 10 ans de plus et on se retrouve assez bête quand on joue à côté d’un joueur, d’un gamin comme ça. C’est un joueur dont je n’ai pas forcément de nouvelles aujourd’hui, mais c’était assez intéressant à observer et quand on voit la carrière qu’il a eue… C’est vraiment quelqu’un qui m’a marqué dans sa qualité d’homme et de joueur.
Même question, mais à Thionville ?

J’ai une affection particulière pour Chafik (Gourichy), ce n’est sans doute pas à moi de le dire, je préférerais que ce soit lui, mais quand je l’avais dans mon groupe il y a quatre ans à Amnéville, on était en N3 et il devait avoir 18-19 ans et je me vois un jour lui dire : « soit tu prends un jour conscience de tes qualités et dans 2 ans t’es en Ligue 2, soit tu ne le fais pas et dans deux ans t’es en Régional 2 à Woippy avec tes potes. » Quatre ans plus tard, il signe en Division 3 allemande à Sarrebruck. J’espère que c’est une étape pour lui et qu’il continuera d’évoluer et prouver qu’il a les qualités nécessaires. Dans notre rôle d’entraîneur, il y a aussi une casquette d’éducateur, surtout à ce niveau. C’est important d’accompagner et de pouvoir révéler des jeunes. C’est valorisant. Chafik est un « petit jeune » bien entouré; s’il continue comme ça, il peut aller loin.
Des passions en dehors du football ?
Comme je l’ai dit, j’aime beaucoup la course à pied. Mais en dehors du sport, je suis aussi papa d’une grande fille et d’un petit garçon et c’est aussi une passion. Passer du temps avec ses enfants c’est quelque chose d’équilibrant. Sinon avec, mon adjoint, Stéphane Borbiconi (un ancien joueur du FC Metz également), on pêche, c’est un plaisir simple mais efficace pour décompresser et prendre des temps calmes.
Choisissez un stade : Saint-Symphorien, Ange-Casanova, Guentrange ou Jules-Deschaseaux ?
On va rester dans la lignée de tout ce qui a été dit précédemment et de ce match contre le Red Star, donc Ange-Casanova à Ajaccio ! C’est très identitaire comme club donc c’est un stade très particulier avec forcément une atmosphère très particulière. C’est pas un grand stade, c’est pas un stade moderne, mais j’adorais les échauffements avec la musique corse ; c’était quelque chose de très porteur pour moi. Les Corses sont un peuple qui défendent leurs idées, leurs valeurs, comme les Bretons ou les Basques. C’est un environnement particulier, c’est sûr que parfois ça déborde un peu et il n’y a pas que des bons exemples. On ne peut pas le cacher. Quand on va là-bas, on s’invente un peu une vie. J’ai vu des joueurs très gentils sur le continent devenir un peu plus agressifs à Ajaccio. J’ai toujours été un peu comme ça aussi (rires). Pour être honnête, j’ai même le regret de ne pas avoir essayé de jouer en deuxième ou troisième division anglaise pour être dans ce tempérament, dans ce type de football là, à l’étranger.
Complétez la phrase suivante : l’US Thionville est un club…
En devenir. C’est un club en pleine croissance, il faut faire attention à ne pas grandir trop vite non plus mais c’est un club moderne, humble, ambitieux et qui donne la part belle aux jeunes comme aux seniors. A nous de développer tout ça.
Avez-vous des qualités dans vos défauts ?
Je suis de nature plutôt impatiente mais j’ai fait un choix dans ma carrière il y a trois ans et cela peut être un bon apprentissage pour moi dans le sens où en reculant un peu, en prenant le temps, on arrive à bâtir des choses. C’est sûr que je suis plus épanoui et à ma place en tant que numéro 1. Quand vous êtes joueur, vous pouvez faire deux bons matchs et votre carrière change du tout au tout. Être entraîneur, c’est différent. Aujourd’hui, on vit des bons moments, et peut-être, sûrement même, qu’il faudra en absorber des plus compliqués. Être entraîneur c’est un métier de passion et de patience et le projet thionvillois m’a fait du bien aussi.
Le milieu du football en deux mots ?
Ma vie.
Texte : Augustin Thiéfaine / Twitter : @gus_tfn
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Un jour, quelqu’un a dit, « Si Chambly était en Corse, j’y aurais fait toute ma carrière de footballeur ! » Mais Chambly n’est pas en Corse, cette île que Benjamin Santelli, l’attaquant du Sporting-club de Bastia, chérit plus que tout. Cette île qu’il ne quitte que pour effectuer les déplacements sur le continent avec son club, le Sporting-club de Bastia, avec lequel il entretient une relation fusionnelle.
Et comme dans « routard », il y a « tard », c’est sur le tard, à 27 ans, après dix ans passés entre la Division d’Honneur (Régional 1 aujourd’hui) et le National, que le natif de Bastia a découvert la Ligue 2. Non pas qu’au CA Bastia, ce ne fut pas « pro », mais à l’époque, le club voisin sortait à peine d’une saison en Ligue 2 (2013-2014), ce qui lui avait permis de conserver le statut en National.
Il y en a deux. Ce sont deux épopées en coupe de France avec L’Île Rousse et avec le Sporting-club de Bastia. Les deux clubs étaient en National 3 à ce moment-là. Avec Bastia, on avait été éliminés en 8e de finale contre Caen qui était en Ligue 1, j’avais égalisé (élimination aux tirs au but), ça reste un très bon souvenir. Et avec l’Île Rousse, on avait également atteint les 8es de finale après avoir éliminé Bordeaux, en 2014. On avait perdu contre Guingamp (0-2) sur le terrain d’Ajaccio (François-Coty).
Si, si, je les compte, mais en pros, depuis quelques années, depuis que je suis à Bastia, mais dans le monde amateur, je ne sais pas, ce n’était pas forcément comptabilisé au début.
J’avais déjà joué piston gauche avant les années à Chambly, c’était au CA Bastia, avec Stéphane Rossi, parce que j’avais déjà cette polyvalence; le coach me faisait jouer un peu piston, un peu attaquant. Piston, c’est un poste que j’aime bien aussi même si ce n’est pas du tout le même registre que numéro 9, mais je m’adapte, ça ne m’a jamais dérangé.
Non, ça ne me dérange pas, même si mon poste de prédilection, c’est numéro 9. Mais je peux jouer côté, je peux dépanner, même si ne n’ai plus 20 ans et que je ne peux plus enchaîner les matchs pour jouer sur le côté, comme en étant ailier par exemple, encore que, cette année, j’ai beaucoup joué sur le côté. Piston ou ailier, c’est différent, même si beaucoup pensent que c’est pareil. Piston, offensivement, tu apportes, mais tu défends beaucoup plus. Ma polyvalence, c’est un avantage, mais cela peut aussi être un inconvénient dans une carrière.
Avant, c’était le grand pont (rires), quand j’étais devant, je faisais quasiment tout le temps ça, mais aujourd’hui, je n’ai pas un geste technique particulier, je ne suis pas un joueur technique, ce n’est pas mon point fort.
Je suis un mec cool, ouvert, bon vivant, j’ai toujours le sourire, mais je ronchonne un peu pour rien. Mais sans prétention, je rigole tout le temps, je fais souvent des blagues.
Sincèrement, je n’ai pas de regret. Je n’ai pas non plus fait beaucoup de clubs non plus. Je suis parti deux fois à Chambly où je me suis fait deux grosses blessures mais de quitter la Corse et le cocon familial, ça m’a fait découvrir beaucoup de choses. J’ai appris et ça m’a fait grandir sur certains aspects. Et puis, à Chambly, j’ai connu de bonnes personnes. Et aujourd’hui, ce sont des personnes avec lesquelles je suis encore en contact. Donc aucun regret.
Oui, c’est vrai, c’est vrai ! J’avais dit ça dans un article ! Nous, on est très famille, après, je ne sais pas trop comment ça se passe ailleurs, car hormis Chambly, je n’ai pas beaucoup bougé de l’île, et là-bas, quand je suis arrivé, je m’y suis tout de suite retrouvé, car c’est familial. Le club était en construction. J’ai kiffé la mentalité là-bas, même si au niveau du cadre de vie, on est à l’opposé de la Corse. J’ai aimé la mentalité des gens là-haut, et je suis encore en contact avec beaucoup de personnes.
Oui, on reste toujours un club famille car on connaît beaucoup de monde ici, on côtoie beaucoup de gens, tous les jours, mais c’est sur que c’est plus professionnel, c’est logique, sinon, on n’y arrive pas, on n’avance pas. Bien sûr, ce n’est pas la même chose que lorsque je jouais en amateur ou même à Chambly, qui venait de gravir les échelons, et qui découvrait le monde pro. C’est ça la grande différence avec le Sporting : je ne vais pas vous le dire, mais Bastia, c’est un club historique. Il faut que ça soit professionnel et avec un esprit un peu famille.
Oui, j’ai un parcours très atypique, je sais. J’ai commencé dans mon club de village, puis j’ai fait 3 ans en jeunes à Bastia, en 14 ans et 16 ans Nationaux, mais ça ne passait pas : quand j’avais 15 ans, le club ne m’a pas gardé. J’ai rebondi pendant un an en 16 ans Nationaux, au Gazelec Ajaccio, parce que je voulais encore jouer à ce niveau. Puis je suis retourné chez moi, à Ghisonaccia. Et là, à 18 ans, j’ai commencé à jouer en amateur, à l’Ile Rousse, en DH puis en CFA2, puis au CA Bastia en National… Tous les ans, j’ai un peu évolué, je suis parti à Chambly en National, et puis je suis revenu en Corse quand je me suis blessé la première fois là-bas (pubalgie). Avec le Sporting, on fait une super saison en N3 et je repars à Chambly, qui me rappelle, en Ligue 2 ! Le tremplin était important : j’avais 28 ans et je passais du National 3 à la Ligue 2, et là, je me fais les croisés… Je ne vous cache pas que j’ai eu des moments difficiles… Partir, revenir, partir, ça a été dur, mais je ne regrette rien. Je n’avais jamais joué en pro en Ligue 2, j’avais juste été pro au CA Bastia mais en National. Je ne pouvais pas refuser ! Ma carrière, c’est les montagnes russes.
Après les croisés, mentalement, c’était dur, j’avais 28 ans. Aujourd’hui, je suis bien physiquement et, je vais vous dire, sincèrement, je pense que je suis mieux aujourd’hui physiquement qu’à 28 ans. Par contre, à 28 ans, je me demandais comment j’allais revenir de cette grosse blessure, je n’avais jamais connu ça. Mentalement, c’était dur. Et c’est vrai que le fait de revenir en Corse, en N3, la première fois, après ma pubalgie, et d’être dans ce projet de faire remonter le club, ça m’a aidé.
Il y en a quelques-uns ! Dernièrement, je dirais Sébastien Salles-Lamonge (parti au Mexique l’été dernier) : pendant 2 ans, j’ai joué avec lui, et pour un attaquant, avoir un numéro 10 comme ça… C’est le joueur qui m’a fait le plus de passes décisives je pense. Quand je faisais un appel, je savais que j’allais recevoir le ballon dans de bonnes conditions, dans les pieds. Chaouki Ben Saada aussi, même s’il a moins joué.
Je n’ai pas eu beaucoup de coachs, mais je sais où ils sont, comme Stéphane Rossi, qui est à Bourges, Bruno Luzi, avec qui j’ai eu une très bonne relation à Chambly, et qui a démissionné de Compiègne, j’ai eu Benoît Tavenot aussi pendant 6 mois à Bastia-Borgo. Récemment, j’ai revu Christian Graziani, l’ex-coach de l’Ile Rousse, ça reste un ami, je l’ai connu grâce au foot.
La causerie de Stéphane Rossi avant Caen, en coupe de France.
Être un peu plus sérieux, plus professionnel, même quand je jouais en amateur. Plus jeune, je jouais au foot pour m’amuser, même si je voulais réussir et être pro, mais je ne mettais pas de pression. Je me disais que si je ne réussissais pas, j’irais travailler. Je me disais que ce n’était pas grave. En fait, j’aurais dû me donner plus les moyens à cette époque, et peut-être que j’aurais signé pro plus tôt. J’aurais peut-être dû partir sur le continent plus tôt. Mais j’aimais trop la Corse, je n’avais pas envie de partir. Si j’étais parti plus tôt, ma carrière aurait peut-être été différente.
J’aime la chasse, la pêche… ma famille, mes familles, au village, pratiquent ces activités. Je suis né là-dedans. J’aime bien la montagne. Je suis proche de la nature. Les balades, les randonnées… On a l’impression d’être libre, d’être seul au monde. On a la montagne et la mer dix minutes après ici, donc c’est cool, mais je préfère la montagne.
































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Actuel deuxième buteur de National (14 réalisations) derrière Alan Kérouédan (Avranches, 15 buts) et élu meilleur joueur du championnat en mars, Diawoye Diarra est en train de réaliser la meilleure saison de sa carrière. Mais à 29 ans, l’attaquant malien de Marignane Gignac Côte Bleue n’est plus une révélation. Son premier match de National, il l’avait en effet disputé… en septembre 2012 avec le Paris FC, alors qu’il n’était âgé que de 17 ans. « Après, j’ai un peu traîné en route », avoue Diarra, qui a essentiellement évolué en National 2 (Entente Sannois Saint-Gratien, Montceau-les-Mines, Martigues, Louhans-Cuiseaux) avant donc d’éclater cette saison. « Je n’ai pas eu un parcours très facile », poursuit-il, toujours très réservé et pudique. « Quand vous m’avez connu au Paris FC, j’étais vraiment timide. Je ne parlais pas beaucoup. Je me méfiais. Mais à l’époque, je ne comprenais pas et je ne parlais pas encore bien le français. Au Mali, je n’étais pas allé à l’école. Mais maintenant, je suis plus à l’aise. »











