L’ancien entraîneur du Havre, d’Amiens (Ligue 2), du Poiré-sur-Vie (National), et de La Vitréenne (de la DH au CFA) a bien roulé sa bosse ! « L’homme de l’ouest », âgé de 49 ans, a connu tous les niveaux et quasiment toutes les catégories d’âge tout au long de son parcours qui l’a même mené jusqu’en Grèce cet été.

Oswald, votre carrière débute avec une double participation en Gambardella, en 1992 et 1993, avec un certain Mickaël Pagis !
Ce sont des souvenirs sympas. On a commencé ensemble avec Micka Pagis, en jeunes, en sélection de Ligue, avant de se retrouver à Laval : lui était au Mans, moi à Mayenne. Il était numéro 9 et moi 10, on nous associait souvent au Stade Lavallois, on se trouvait bien, on avait une complicité sur et en-dehors du terrain.

Bernard Maligorne, le précurseur

Laval, ce sont d’ailleurs vos débuts en pro, en D2, vous qui êtes né pas loin, à Mayenne… Vous êtes un homme de l’ouest, quand on regarde votre parcours ! Racontez-nous vos débuts.
(Rires). Dans mon parcours, j’ai eu la chance de tomber sur un très bon formateur de joueurs, mais aussi de coaches, parce qu’il a eu la particularité d’avoir formé beaucoup de futurs entraineurs, c’est Bernard Maligorne, une référence en la matière, une référence nationale. Quelqu’un qui formait bien, beaucoup, qui était un précurseur dans le jeu. Je pense qu’il avait une bonne vingtaine d’années d’avance sur ce qui se faisait et ce qui se fait aujourd’hui. C’est une rencontre qui a marqué mon parcours. Laval, c’était un grand club formateur à l’époque, il faut le savoir, un des meilleurs de France. L’équipe qui jouait en première division avec Michel Le Milinaire, entraîneur emblématique, était composée d’une grande majorité de joueurs formés au club. La réussite du Stade Lavallois, c’était celle de ces deux hommes, très complémentaires. Donc voilà ce que je retiens, j’ai fait toute ma formation à Laval, ce qui aurait pu ne pas arriver, car pour l’anecdote j’avais signé deux contrats « ANS »’, un à Rennes, un à Laval ! Il y avait eu une bataille juridique entre les deux clubs, et j’avais été contraint par la Ligue d’honorer celui avec les Tangos, ce que je ne regrette pas, bien sûr !

On vient à peine de commencer l’interview côté joueur que vous évoquez déjà deux formateurs et coaches. Ce n’est pas anodin. On imagine que Maligorne a par exemple irrigué très tôt votre futur parcours, votre pensée d’entraîneur ?
Ah oui, ça c’est certain. Il avait le goût des jeunes, les lancer, les former, passer du temps sur les terrains à leur faire des entraînements complémentaires… ça marque. En plus, je l’ai retrouvé ensuite à Avranches, puis comme tuteur pour un de mes diplômes de coach. On parlait de football toute la journée avec lui, des séances d’entraînements notamment, de foot italien. Il est ensuite parti à l’Etoile Rouge de Belgrade, qui jouait la Champions League. Un passionné !

Pour revenir sur le côté joueur, après Laval, vous enchaînez Fécamp, Vitré, Avranches… Quel regard portez-vous sur votre parcours et une carrière « amateure », sans que cela ne soit négatif ?
De toute façon, les termes doivent être posés, parce que c’est la vérité ! J’ai eu la chance d’être tout le temps sous contrat fédéral dans tous mes clubs, donc j’ai vécu le football dans un contexte de National ou N2. Maintenant, mon parcours de jeune joueur, après Laval (D2, 14 matches), c’était plus compliqué, mais dans ma tête, j’ai très vite basculé sur autre chose. Les passerelles entre clubs pros ne se faisaient pas à l’époque. Ma génération, on était 13 sur la feuille de match en D2, tu ne pouvais signer ton premier contrat pro que dans ton club, s’il le proposait tu ne pouvais pas aller ailleurs. Il y a plein de choses qui ont évolué, quand tu ne franchissais pas réellement les portes de ton équipe, souvent c’était difficile de rebondir.

La Vitréenne, là où tout a commencé

D’où un passage au métier de coach, dans la foulée, ou en même temps que votre parcours de joueur, à La Vitréenne. Vous y avez pensé quand, à ce prolongement, à cette suite ? Est-ce que le Oswald Tanchot de 20 ans savait déjà qu’il voulait devenir entraîneur ?
J’ai eu la chance de passer très jeune mes premiers diplômes, comme le DEF, je crois à 25-26 ans. J’ai toujours entraîné les jeunes partout où je suis allé, j’ai toujours eu ce double-projet de jouer et d’entraîner. Je ne coachais pas en compétition, car je ne pouvais pas, je jouais, mais j’ai dirigé vraiment toutes les catégories, tous les âges, des débutants jusqu’aux seniors. Mais j’ai aimé jouer au foot, l’odeur des vestiaires comme joueur, j’étais un passionné, toujours un ballon dans les pieds depuis tout jeune. C’est pour ça que j’ai voulu prolonger le truc en tant que coach. J’ai su que je voulais coacher très vite; à un certain âge, on devient entraîneur dans sa tête. Moi je m’interrogeais sur les propositions du coach, le contenu, si c’était cohérent, comment j’aurais fait… Quand ce processus-là est enclenché, on sait qu’on bascule vers le rôle d’entraîneur et non plus de joueur. On m’a proposé d’être entraîneur-joueur à La Vitréenne, mais je n’ai pas voulu de la seconde casquette. Il était temps de passer à l’autre partie, celle de coach, celle que j’attendais impatiemment depuis longtemps, en fait.

La Vitréenne, justement, une première expérience à la tête d’une équipe, pendant 6 ans, quand même ! De sacrés souvenirs on imagine, avec deux montées, et un passage de la DH à la CFA…
Vitré, c’est la chance d’avoir démarré dans un environnement que je connaissais très bien. Et surtout, j’ai vite compris que c’était un club avec moins de moyens que d’autres, mais un état d’esprit qui régnait dans le club, son réseau de bénévoles, et la proximité avec l’Université de Rennes et d’autres clubs pros. Je me suis dit, « comment je puis-je avoir un avantage sur les autres clubs ? » En identifiant très vite les joueurs libérés par les clubs pros qui allaient faire leurs études à Rennes. C’est comme ça que j’ai construit mon projet, avec le socle de joueurs déjà là également bien sûr, et en allant récupérer des Lavallois, des Rennais, Guingampais, Lorientais, quelques Brestois, qui venaient faire leurs études, se retrouvaient dans un environnement idéal, pouvaient continuer leur projet scolaire, tout en jouant à un bon niveau, avec des copains.
Je mettais de l’exigence, c’était peut-être un peu excessif : j’étais à 5 entraînements par semaine, en DH, avec des séances supplémentaires pendant les vacances. Mais ça s’est bien passé, on a toujours des groupes WhatsApp en commun avec ces joueurs. J’avais aussi deux préparateurs physiques, on a bossé sur la récupération, les boissons, la nourriture. Tout ce que je pouvais mettre en œuvre, je le faisais. On a vraiment fait quelque chose de sympa. Les deux dernières années, on a eu de la malchance en N2 (ex-CFA), avec la dialectique des meilleurs 2emes, où on ne savait même pas si on devait gagner ou perdre pour monter par rapport aux poules et aux cinq meilleurs 2emes. En fait on était pros en amateur dans tout ce qu’on mettait. L’ambiance était super, une forme d’osmose, on est toujours tous en contact. Dans le lot, il y avait Vincent Le Goff (figure de Lorient, environ 300 matches pros) d’ailleurs, qui faisait ses études de droit à Rennes.

« Avec Le Poiré-sur-Vie, on aurait pu monter en L2 »

Photo ASC

Et puis il y a ces fameux quatre ans au Poiré-sur-Vie, en National, autre pic de votre seconde vie sportive !
Le Poiré, c’est alors un club en plein essor qui vient me chercher à Vitré. Un club avec une envie, une vision, une ambition; ça a été quatre années intenses, avec des belles rencontres, un beau groupe, avec Vincent Le Goff (FCL), Ernest Seka (ex-Nancy notamment), Arnaud Souquet (Dijon, Nice, Montpellier), Abdoulaye Touré (ex-Nantes, Genoa), Ludovic Ajorque (Strasbourg)… Le joueur marquant, c’est Moussa Marega, qui a joué à Porto, où il a remporté des titres de champions, a disputé la Ligue des Champions. Alors qu’à la base, il avait tout juste une licence, il a failli repartir sur le futsal en région parisienne ! Au Poiré-sur-Vie, la difficulté, c’était de garder nos jeunes joueurs qu’on allait chercher, et qui faisaient un an avant de s’en aller. C’était la même chose à Vitré. La souffrance de se dire « gardons notre équipe trois ans », alors qu’on ne pouvait pas. Au Poiré, j’étais en opposition sur les reconductions de contrat, pour moi ça ne marchait pas. Quand tu commences une saison avec un élément qui va partir à la fin de l’année… Alors qu’on aurait pu monter à un moment en Ligue 2. Je retiens aussi des matches de fou dans le Stade de l’Idonnière, avec une grosse ambiance, c’était aussi la première fois que je sortais de mon contexte vitréen, j’avais les joueurs rien que pour moi, ça me permettait de rajouter des séances (rires) ! Le Poiré, j’y ai des bons souvenirs.

Vous réalisez de belles performances au niveau « amateur », avec d’autres moyens. Vous passez le diplôme pour coacher en pro, et direction Le Havre (L2) en 2016 donc !
Je suis arrivé avec Bob Bradley, en tant qu’adjoint, même si j’avais eu des contacts avant avec le club et le président Vincent Volpe. C’était quelque chose d’intéressant, aller dans un grand club formateur, de rentrer de plein pied dans le monde pro dans un endroit où il y avait un rapport avec mon goût pour la formation. La première saison, on a failli monter, ça s’est joué à un but avec Metz. La 2e saison a failli être historique, avec une remontée au classement, un record de points depuis la dernière montée, et puis ce fameux match de barrage à Ajaccio – match qui devait se jouer initialement le vendredi, reporté deux jours plus tard après que le bus du HAC a été bloqué par certains supporters corses à son arrivée au stade. Le dimanche, la rencontre dure trois heures, et au bout d’un 2-2 volcanique, l’ACA gagne aux tirs au but, avec deux expulsés de chaque côté, dans une ambiance étouffante -… Je pense qu’à partir de ce moment-là, pour la 3e saison, il n’y a pas eu digestion de cet événement. On était aussi à la fin d’un cycle, tout simplement, pour tout le monde.

Le résumé d’Ajaccio-Le Havre (1-1, 2-2 en prolongations, 5 t.a.b à 3 pour l’ACA) :

https://www.youtube.com/watch?v=7tIzfrmh3nU&t=64s&ab_channel=Ligue2BKT

En parlant de cycles… Après votre expérience en Normandie, vous êtes parti entraîner Amiens. Un club où vous aviez pris la suite de Luka Elsner, aujourd’hui leader de Ligue 2 avec le HAC (9 points d’avance sur Bordeaux, 2e) ! La boucle est bouclée…
Je suis les résultats du Havre bien sûr ! C’est un club auquel je suis attaché, et qui est attachant. J’ai en plus encore des contacts avec le staff, et Luka, avec qui j’échange. Ils ont réussi à créer une dynamique, les pessimistes sont en train d’y croire ! Ils sont sur la bonne vague. Il y a une dynamique, du sang frais sur le terrain avec un bon recrutement, et dans les bureaux, avec Mathieu Bodmer. L’exemple le plus flagrant de la bonne santé du HAC, c’est Victor Lekhal, qui a retrouvé un super niveau. Déjà à mon époque, c’était une plaque tournante. Il faut se rendre compte que ce garçon fait ça alors qu’il a eu trois fois les croisés. Il aurait dû jouer en Ligue 1. Victor c’est simple, c’est Busquets, s’il avait été espagnol, il aurait joué en Liga à 17 ou 18 ans. Mais en France, on voulait des mecs méchants, costauds, qui taclent… Des fois, il faisait des semaines entières à l’entraînement en ne jouant que vers l’avant.

« A Amiens, il y avait trente joueurs et trois vestiaires ! »

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A Amiens, l’expérience aura été plus courte et difficile.
Le contexte était compliqué. Le club descendait de Ligue 1 avec la Covid, ça avait été vécu comme une injustice. J’ai remplacé Luka (Elsner) qui avait 5 points après 6 journées. Amiens est en train de digérer ça. Il fallait écrémer l’effectif. Philippe (Hinschberger) pourra le dire, il fallait trois vestiaires. On avait trente joueurs, ceux qui voulaient rester, ceux qui voulaient partir… J’ai vu des scènes, un joueur était là un jour, puis plus là le lendemain. Des mecs venaient, mais ne voulaient pas s’entraîner. Et quand je dis qu’ils ne voulaient pas s’entraîner, ils ne le faisaient pas. Ce n’est pas qu’ils traînaient les pieds sur la pelouse, ils ne s’entraînaient vraiment pas… Et après on parle de cohésion ! Mais ça se construit, il faut créer le contexte. Je ne suis pas resté là-dedans, je n’avais pas envie de venir déjà, pour être transparent avec vous. Le deal que j’ai accepté avec monsieur Joannin (Bernard, président de l’Amiens SC) était de maintenir le club. On s’est sauvés à 5 journées de la fin, limite trop facilement. On a disputé 7 matches en 21 jours, avec les reports dus au Covid. On a moins bien fini, alors qu’on aurait dû dépasser la barre des 50 points, on a fini 10es ex-aequo. Mais j’ai lancé des jeunes, ça a donné une base pour la saison d’après. On a eu des incompréhensions avec le directeur sportif, qui ont fait que le club n’a pas souhaité me conserver, sur la construction d’un effectif, comment on crée de la cohésion… Mais ça s’est bien terminé avec monsieur Joannin, j’ai une très bonne relation avec lui, comme avec monsieur Volpe au Havre. Ce sont deux personnes atypiques, Vincent Volpe est un ingénieur, un Américain, quelqu’un de très humain, qui a une vision différente des choses, une approche brillantissime, une autre façon de prendre et de voir les problèmes pour trouver des solutions. Le Havre mériterait de monter aussi par rapport à son investissement depuis longtemps, il a toujours su garder le cap. Bernard Joannin, c’est un autre style, quelqu’un de local, du sérail, qui a eu une réussite professionnelle, en étant à la tête du plus grand nombre de magasins Intersport franchisés, alors qu’il était encore prof de sport à 47 ans je crois. Mais c’est un autre style, un autre management. Être entraîneur permet de rencontrer des présidents et des personnes différentes, des réussites, des gens.

« En Grèce, quelle ferveur ! »

Pour conclure, vous avez fini avec un passage à Volos, en Grèce. Pendant trois mois, cet été… Comment ça s’est passé ?
Je n’en retire que du bon, comme de toutes mes expériences, mais c’est vrai que j’ai abrégé car je sentais que plus le temps passait, plus la relation allait devenir difficile. Il y avait des choses que j’attendais qui n’arrivaient pas, des trucs concrets, je n’avais pas de logement, j’ai fait quatre hôtels en quelques semaines, ma fille n’avait pas d’école alors que la rentrée était là, je ne pouvais pas avoir les joueurs que je voulais, des Français à intégrer à l’effectif, et chaque jour des éléments que je ne connaissais pas arrivaient. La relation avec le président était assez compliquée car il était très interventionniste. Je suis arrivé sans staff, eux étaient tous Grecs et allaient dans tous les cas rester après moi, donc je ne savais pas sur qui je pouvais compter par rapport à cette façon de faire. Mais c’était une bonne expérience, vraiment. J’ai adoré, le pays est magnifique, j’ai fait toute la préparation et un match. Il y a cinq grosses équipes dans le championnat, des play-offs. Ce sont des clubs omnisports, les ambiances sont folles, on a joué en amical au « Pana » (Panathinaïkos Athènes) et au « PAOK » (Salonique), il y a une ferveur… Ils sont chauds ! Quand je vois des fois, qu’en France, on fustige les deux-trois fumigènes qu’il peut y avoir… L’AEK Athènes inaugurait son stade cette année, et pendant 90 minutes il y a eu des fumigènes dans tout le stade ! Les autorités françaises auraient fait des arrêts cardiaques. C’est méditerranéen, ils vivent pour leur club, il y a une vraie appartenance. Il y a quatre grands médias, ils ne parlent que de ça. D’ailleurs, pour l’anecdote, les gros matches ne sont pas arbitrés par des Grecs mais pas des arbitres étrangers, pour qu’il n’y ait pas de polémique, et le manager des arbitres est toujours étranger, je crois que c’est un Anglais. Quand il y a une erreur d’arbitrage le dimanche, il y en a pour la semaine !

« On ne m’a rien donné, je suis allé chercher les choses »

Un mot sur votre carrière. Quel regard portez-vous dessus ?
Quand j’ai commencé à entraîner à 32 ans, je me disais que je voulais connaître tous les niveaux avant 50 (il en a 49). Bon, je n’ai pas fait la Ligue 1, j’en étais proche, j’espère que ça va arriver. Mais j’ai fait la 1ere division en Grèce après la DH, la N3, N2, N1 et Ligue 2 en France. La D1 grecque, je crois qu’on n’est pas tant que ça à l’avoir connue ! J’ai fait différents clubs, quand on rencontre plusieurs coaches, joueurs, présidents, c’est comme un long voyage, un parcours, une carrière, avec plusieurs étapes, différentes destinations. Des fois on pose l’encre pour une longue période, des fois pour des passages courts, et on repart. Ça donne des vies qui ne sont pas monotones ! Moi, partir de mon club, Mayenne, et me retrouver un jour entraîneur en première division en Grèce, c’est… Enfin voilà, il s’est passé plein de choses pour arriver jusque-là. Je suis plutôt un homme de projets, mais il faut trouver l’endroit où tout est réuni. On doit d’abord montrer pour obtenir derrière, c’est ma façon de faire, de voir les choses. Je suis allé chercher les choses, on ne m’a rien donné. Et je crois que c’est comme ça que je vais faire tout le temps.

Texte : Clément Maillard / Mail : contact@13heuresfoot.fr / Twitter : MaillardOZD

Photos ASC et DR

L’entraîneur de Plabennec (National 3) disputera samedi face à Grenoble (L2) un 16e de finale, le dixième de sa carrière ! Le Breton ouvre son livre de souvenirs et dévoile la recette !

Lorient, Clermont, Concarneau, La Montagne et Plabennec ne l’avaient pas attendu pour réussir de (très) jolis parcours en Coupe de France ! Mais Nicolas Cloarec, comme joueur à Lorient et à Clermont, puis comme entraîneur à Concarneau, la Montagne et Plabennec, a connu les grands frissons des exploits à répétition. Et l’aventure continue à Plabennec (N3) qui reçoit Grenoble (L2) samedi en 16es de finale. Le dixième 16e de « Nico »! Rencontre avec un spécialiste de la Coupe de France.

Nicolas Cloarec, le joueur

Il n’était pas sur le terrain pour la finale et la demi-finale mais le trophée figure à son palmarès : Nicolas Cloarec a gagné la Coupe de France avec le FC Lorient (L1) en 2002 contre le SC Bastia (1-0). Et en 2005, après avoir sorti Lyon en 8e de finale (1-1, 4-3 aux tab), il est allé jusqu’en quarts de finale, à Monaco (1-0), avec le Clermont Foot (L2), qui avait déjà connu un quart de finale, en 1997, contre Nice (1-2), après avoir éliminé le PSG (4-4) aux tirs au but (4-3) en 8es de finale.

Nicolas Cloarec, l’entraîneur

Photo Philippe Le Brech

Son intronisation au poste d’entraîneur de l’équipe A de l’US Concarneau (CFA 2), en 2009, a précédé de quelques mois l’élimination du FC Nantes (L2) à Guy-Piriou (3-0 ) ! Ce n’était qu’un 7e tour, avant l’élimination au 8e tour à… Plabennec (2-0), mais c’était déjà un exploit qui en appellera d’autres après la montée en CFA : quatre 16es de finale quasi à suivre, contre Guingamp (L1) en 2014 (élimination 2-3 après prolongation), Dijon (L2) en 2015 (qualification 1-0), Troyes (L1) en 2016 (élimination 1-3), et Granville (N2) en 2018 (élimination 3-2 après prolongation). L’US Concarneau avait déjà connu deux 16es de finale de Coupe de France (Brest en 1982 et Limoges en 1986), mais Nicolas Cloarec va exploser le record en menant ses troupes jusqu’en quarts, en 2015, lors d’un final héroïque, au Moustoir à Lorient, contre Guingamp (L1, à nouveau élimination 1-2).

A l’US Montagnarde (R1), où deux équipes de National (le Stade Briochin et… l’US Concarneau) sont tombées aux tirs au but en 2020-21, le natif de Concarneau a pris la suite de Pierrick Le Bert et accroché un nouveau 16e de finale, contre Saumur (N3) : 3-3, élimination aux tirs au but… Le record du club (deux 8es de finale contre Rouen en 1999 et contre Monaco en 2002) n’était pas loin. A Plabennec (N3) depuis le début de cette saison, Nicolas Cloarec (il est titulaire du BEPF) approche désormais aussi le record de son nouveau club qui, lors de son épopée de 2009-10, avait poussé le curseur jusqu’en 8e de finale (élimination 4-0 à Auxerre) après avoir sorti deux équipes de Ligue 1 : Nice en 32es (2-1) et Nancy en 16es (0-2). Si, à l’occasion de son dixième 16e de finale, ce samedi, le Breton (45 ans) égale le record plabennécois en éliminant Grenoble (L2), il visera ensuite celui qu’il détient avec Concarneau.

C’est quoi le truc en plus en coupe ?

A la question « c’est quoi le truc en plus en Coupe de France », Nicolas Cloarec explique son expérience personnelle. « Quand tu es joueur, en coupe, il y a un cap à passer, et souvent c’est l’envie de ne pas avoir la honte de te faire sortir par une équipe inférieure qui te booste. Quand tu as connu ça, pas seulement des éliminations, mais des humiliations, et pour moi c’était en 2007 à Scaër (DHR, l’équivalent de la R3), au 4e tour avec l’US Concarneau (CFA 2 = N3), et que tu deviens ensuite coach, c’est cette envie, cette force pour ne pas revivre ça, et pour te mettre à la place du petit, que tu dois transmettre à tes joueurs. Il a fallu détester perdre ces matchs pour adorer les gagner ». Et contre les clubs hiérarchiquement supérieurs ? La réponse de Jacques Piriou, le président de l’US Concarneau : « Notre ancien entraîneur, Nicolas Cloarec, est très très fort pour ça dans ses causeries d’avant-match ».

« L’histoire de Plabennec en coupe doit nous pousser ! »

Son dixième 16e de finale !

VAINQUEUR FINAL AVEC LORIENT (L1). « Pour moi, 2001, c’est une année particulière, je viens de perdre mon père en août, je suis meurtri, Christian Gourcuff, qui me donnait beaucoup de temps de jeu, est parti, Angel Marcos est arrivé, je joue moins alors que c’est ça qui m’aurait fait du bien. J’avais pris la décision de partir, mais c’est là qu’ Yvon Pouliquen arrive et décide de garder tout le monde. Il y a le maintien à essayer d’aller chercher, la Coupe de la Ligue, la Coupe de France, quand on est dedans, on lutte. En Coupe de France, je n’ai joué ni la finale ni la demi-finale mais j’étais dans les tribunes au stade de France. C’était fantastique. C’est là que, trois semaines plus tôt, on venait de perdre en finale de la Coupe de la Ligue contre Bordeaux (3-0), et c’est pour ça qu’on a gagné la finale de la Coupe de France contre le SC Bastia (1-0). On avait identifié le truc, on s’était familiarisé avec le stade de France. Bastia perd contre nous pour les mêmes raisons qu’on avait perdu contre Bordeaux ».

1/4 DE FINALE AVEC CLERMONT-FOOT (L2). « J’ai connu trois belles saisons à Clermont mais la première a été difficile car j’arrive seul. C’est à Clermont que j’ai connu ma femme (Béatrice Osty, la championne de cross -country, qui a repris une pharmacie à Clohars-Carnoët, dans le Sud-Finistère, en 2009). Au début, j’ai poussé un corps qui n’était pas prêt à lutter et j’ai accumulé beaucoup de pépins musculaires. Les deux autres saisons, c’est mieux. Et il y a ce parcours en Coupe de France pour finir en 2005. En 32es, on se qualifie aux tirs au but sur synthétique à Vesoul (CFA), après on élimine le Sporting Toulon Var (CFA). Et il y a surtout la qualification en 8es de finale aux tirs au but contre Lyon (1-1, 4-3 aux tab). Et après, on sort en quarts à Monaco (défaite 1-0). Là, c’est vraiment la Coupe de France. Ici ça ressemble plutôt souvent à la Coupe de Bretagne ».

Christian Rose Cornouaille Photo

JUSQU’EN 1/4 AVEC CONCARNEAU (CFA). « Les trois premiers 16es à Concarneau, contre Guingamp (L1) en 2014 (défaite 2-3, ap), contre Dijon (L2) en 2015 (victoire 1-0), et contre Troyes (L1) en 2016 (défaite 1-3), alors qu’on est en CFA (N2), l’objectif, en plus de la qualification, c’est de mettre dans la tête des joueurs, à travers ces matchs, que l’on peut aller chercher le National. On y arrive en 2016, et derrière, en 2018, on perd le quatrième 16e à Granville (N2) qui venait d’éliminer Bordeaux (L1). On était alors plus centré sur l’objectif maintien, c’était la priorité. Il y a bien sûr eu aussi le quart de finale contre Guingamp (L1) à Lorient, en 2015 (défaite 1-2), mais le plus beau match de coupe, sous la casaque concarnoise, c’est la première rencontre contre Guingamp en 2014. Il y a tout de ce que représente la coupe dans ce match. Il y a un temps de merde, il pleut, il fait froid, le terrain est lourd, et le stade déborde tellement il est plein. Je me rappelle être sorti des vestiaires et voir de la fumée qui s’élevait du public. C’était la chaleur humaine. Comme je savais que le terrain allait se dégrader, j’avais choisi de garder Killian Gargam et Stephen Quemper sur le banc et de les faire rentrer façon dragsters. Et Killian nous met deux buts : une frappe digne de la Champions League et une tête qui nous met en transes car on mène durant la prolongation. Finalement, on est éliminé 3 à 2 mais le scénario était incroyable ».

Photo Philippe Le Brech

JUSQU’EN 16ES AVEC L’US MONTAGNARDE (R1). « C’est Pierrick Le Bert qui a commencé cette aventure de la Coupe 2020-21, au poste de coach, avec la Montagne. Moi je n’ai pris que le train en marche et il était sur les bons rails jusqu’aux 16es de finale. Après avoir sorti deux équipes de National aux tirs au but, l’US Concarneau (5e tour) et le Stade Briochin (32es de finale), plus Dinan-Léhon (N3) au 8e tour (1-0), aller à Saumur, c’était le tirage que l’on craignait. C’est à l’extérieur et contre un adversaire qui est sur une bonne dynamique en championnat de N3. On fait match nul (3-3) et on perd aux tirs au but (4-3), mais même si on passe ce n’est pas un exploit. En coupe, à ce niveau, ce que l’on espère c’est aller assez loin pour se frotter aux pros et, au pire, sortir avec les honneurs ».

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JUSQU’EN 16ES (POUR L’INSTANT) AVEC PLABENNEC (N3). A l’occasion de Plabennec (N3) – Grenoble (L2), samedi prochain (18h), Nicolas Cloarec va donc connaître le dixième 16e de finale de sa carrière de joueur et d’entraîneur. Le nouveau coach de Plabennec pourrait en profiter pour égaler le record du club (8e de finale à Auxerre en 2010)… « Sur un malentendu, on prend. C’est chez nous, dans un stade plein, et Grenoble peut avoir la tête à sa course à l’accession en Ligue 1. En tout cas, le calendrier de Ligue 2 nous a offert la chance de pouvoir aller superviser l’adversaire à Guingamp (vendredi dernier). On n’est pas au mieux en championnat mais la coupe et l’histoire de Plabennec doivent nous pousser. Pour moi, Plab’ a été un très grand club de National en coupe et, avec Jérémy Pinvidic, on a dans notre équipe le dernier très grand joueur amateur en activité en Bretagne. Jérémy c’est 15 ans à Plab’, trois 16es de finale avec le club (Nancy, Lille et Cannes), un 8e de finale (à Auxerre), cinq matchs de coupe contre des pros de Ligue 1 ! C’est ce que je vais dire à mes gars dans les vestiaires et ça doit leur mettre la bave aux lèvres. S’ils n’ont pas envie de jouer ce genre de match, il faut qu’ils aillent faire autre chose ».

Nicolas Cloarec du tac au tac

« La frappe de Gargam avait retourné le stade à Concarneau »

Sur le banc de l’AS Vitré. Photo Philippe Le Brech

Votre plus belle qualification en Coupe de France ?
Contre Lyon avec Clermont en 1/8e de finale en 2004-05 (1-1, 4-3 aux tab).

L’élimination la plus dure ?
A Scaër (4e tour), comme joueur, en 2007, avec l’US Concarneau.

La plus grande émotion ?
Le 16e de finale avec Concarneau contre Guingamp (L1), dans un stade Guy-Piriou plein comme un oeuf (6200 spectateurs). C’est une élimination (2-3, ap) mais il y avait tout dans ce match.

La plus grande fierté ?
Avoir gagné la Coupe de France avec Lorient.

Le match de Coupe de France que vous voudriez refaire ?
Scaër (DHR) – Concarneau (CFA 2) : 3-1. Une humiliation après laquelle j’ai décidé d’arrêter de jouer au foot. J’arrivais à un carrefour et c’est l’élément déclencheur.

Votre plus grande troisième mi-temps après une qualification ?
Sûrement dans les années concarnoises. Mais il y en avait eu aussi une belle à Clermont… A tel point que l’on avait été bien soulagé quand on avait appris que le match suivant était reporté.

Votre plus grand coup de gueule en Coupe de France ?
Sûrement à la mi-temps d’un match où tu sens que ton équipe va au tas.

Votre joueur le plus marquant en Coupe de France ?
Le plus fort, quand je jouais, Seydou Keita, et le plus talentueux, Pascal Feindouno. Tous les deux à Lorient. Et en tant qu’entraîneur, à Concarneau, Christophe Gourmelon, devant, pour ses qualités de tueur devant le but, et derrière, Guillaume Jannez, pour ses qualités pour défendre son but.

Le plus beau but marqué ?
La frappe de Killian Gargam qui retourne le stade Guy-Priou en 16es de finale contre Guingamp (L1) en 2014 à Concarneau (2-3, ap).

Le pire but encaissé ?
Avec Concarneau (CFA) en 2015, le premier but de Guingamp (L1), en quarts de finale au Moustoir à Lorient (1-2), alors qu’on était bien dans le match.

Sur le banc de l’AS Vitré. Photo Philippe Le Brech

Le plus bel arrêt de gardien ?
Avec Concarneau aussi, avant ce quart de finale contre Guingamp, le péno qu’Ivan Seznec arrête lors de la séance des tirs au but à Croix (0-0, 1-4 aux tab). Une panenka. Je vois encore sa main qui va chercher le ballon.

Le plus beau stade en Coupe de France ?
Comme joueur, le Stade de France, et comme entraîneur, le stade Guy-Piriou à Concarneau.

Le plus beau déplacement ?
A Croix avec Concarneau. Le premier déplacement en avion privé : 15 000 € pour vingt personnes. Il ne faut pas avoir la main qui tremble pour signer le chèque.

L’avant-match le plus problématique ?
Je ne sais pas mais s’il y a quelque chose qui cloche dans l’organisation avant le match c’est sûrement la faute de Marcel (Marzin), comme on disait en rigolant à Concarneau.

L’après-match le plus jouissif ?
Croix. C’était tellement particulier. C’est un match que l’on ne pouvait pas gagner et que l’on a réussi à ne pas perdre pour aller aux tirs au but et se qualifier. Et derrière, il y a un quart de finale quand même.

La plus grosse prime en Coupe de France ?
Pas une prime de match, une prime pour un parcours. A Lorient, le président Jégouzo avait décidé de diviser en deux la dotation Coupe de France. Une moitié pour le club, l’autre pour les joueurs, en répartissant au prorata du nombre du matchs joués.

Le plus beau message d’encouragement avant un match de Coupe de France ?
Loïc Féry, le président du FC Lorient, avant notre 16e de finale avec la Montagne à Saumur (2021). Pour un club de R1 à l’époque, c’est beau.

Et le plus beau message de félicitations ?
Didier Deschamps, après la qualification pour les 16es de finale de Concarneau (CFA) à Poissy, en 2014. Jacques Piriou, le président, m’avait lu le texto qu’il avait reçu.

Votre joueur, actuel ou ancien, qui serait dans votre équipe-type en Coupe de France ?
On a beaucoup parlé de Concarneau, et pour Plabennec je ne sais pas encore, donc le duo Barry-Tison à la Montagne. Parfaits tous les deux pour relayer le coach sur le terrain.

Une anecdote en Coupe de France ?
La causerie d’avant-match d’Yvon Pouliquen à Paris (0-1), en quarts de finale, l’année où on gagne la Coupe (2002) avec Lorient. Il nous avait expliqué que la priorité était à la tentative de maintien en Ligue 1, et qu’en raison aussi de l’absence de joueurs retenus par la Coupe d’Afrique, il avait convoqué une équipe de seconds couteaux dont je faisais partie. Il avait gagné le match à la causerie.

Samedi 21 janvier 2022, 16e de finale de la coupe de France : Stade Plabennécois (N3) – Grenoble Foot 38 (Ligue 2), à 18h, au stade de Kervéguen.

Textes : Denis VERGOS / Mail : dvergos@13heuresfoot.fr / Twitter : @2nivergos

Photos de couverture : Philippe Le Brech

Photos : Philippe Le Brech et Christian Rose Cornouaille Photo

Le président de Bourg-en-Bresse (National) revient sur son arrivée en 2021 et se montre offensif à l’égard de l’ancienne direction qui a, selon lui, « caché des choses ». Il porte un regard lucide sur son ancien métier, et assure avoir tourné la page, et aussi sur de nombreux sujets qu’il évoque avec un certain recul.

C’est peut-être l’âge qui veut ça. Quand on a 50 ans, on fait le bilan ! David Venditelli (il en a 52 aujourd’hui) est devenu l’actionnaire majoritaire du FBBP01 en juillet 2021, à tout juste 51 ans, un âge où certains se posent des questions ou veulent changer d’activité. Non pas que son ancienne activité ne fonctionnait pas, loin de là – il a fondé à l’âge de 29 ans la société Score Agencies, dont il était à la fois actionnaire majoritaire, président et « acteur » avec son métier d’agent de joueurs dans le milieu du football -, simplement, il a vu l’évolution du milieu qui, conjuguée aux sollicitations et au désir d’apporter quelque chose, de se servir de cette expérience, lui ont fait franchir le pas.

Extrêmement discret dans les médias, une caractéristique née sans doute de son ancienne profession qui l’obligeait à oeuvrer de cette manière, dans l’ombre (il fut notamment l’agent d’Eric Abidal, Kurt Zouma, Christophe Galtier ou encore Alexandre Lacazette, pour ne citer que les plus connus), David Venditelli a accepté de se livrer comme sans doute il ne l’a jamais fait auparavant.

Administrateur de plusieurs entreprises, David Venditelli évoque son arrivée à Bourg en juillet 2021 où, dit-il, « Si j’avais su, je ne serais pas venu », ou tout du moins, « j’aurais procédé différemment ». Et bing !

Des regrets ? Aucun. Juste des constats. Et là, le Lyonnais, qui a fréquenté le centre de formation de l’OL dans ses jeunes années avant d’embrasser une carrière amateur en National et en CFA (Lyon-Duchère, Besançon, Saint-Priest et aussi Chasselay en DH), est sans concession.

Photo FBBP01

Comment passe-t-on du métier d’agent à celui de président d’un club de National ?

C’est une succession d’opportunités et de sollicitations. J’avais déjà été sollicité en 2019 avant la Covid. On m’avait sondé pour voir si j’étais ouvert ou disposé à entrer dans un club, et c’est vrai qu’à partir de ce moment-là, ça a suscité une interrogation chez moi. Même quand j’exerçais mon métier d’agent, avec la société que j’avais créée en 1999 avec un associé, et dans laquelle j’étais actionnaire majoritaire, j’avais toujours voulu fonctionner en entreprise. On avait été à l’époque la première agence française à apporter tous les services dont pouvaient avoir besoin les joueurs pendant et après leur carrière. En 1999, il y avait une certaine mentalité, une certaine idée aussi de l’approche sportive autour des joueurs de football, mais au fur et à mesure, on a vu que la valeur ajoutée qu’il pouvait y avoir entre un conseiller par rapport à un autre n’était plus le critère numéro 1 du choix, mais plutôt une course à la surenchère économique. Je suis parti de cette réflexion-là, de cette interrogation qui m’a amené à me dire « pourquoi pas ». Et j’ai eu l’opportunité avec Bourg-en-Bresse, après la Covid, d’intégrer le capital du club.

« Il y a des choses surprenantes en France liées au métier d’agent »

Au départ, président, ce n’était pas forcément votre volonté…

Ce qui m’intéressait, ce n’était pas tant de prendre la présidence, en effet, mais de mettre un place un projet sportif, de voir aussi si toutes mes années passées sur les terrains – J’ai été joueur, je suis passé par le centre de formation de l’OL, j’ai eu des sélections nationales de jeunes -, si tout ce que j’avais pu emmagasiner dans le football, pouvait servir, si j’avais des idées intéressantes à mettre en place. La présidence est venue naturellement, mais ce n’était pas une ambition chez moi. A Bourg, je suis arrivé avec un partenaire économique mais il est reparti immédiatement… Parfois, les gens qui ne connaissent pas l’environnement du foot commencent à avoir des paillettes dans les yeux, et se disent qu’avec quelqu’un comme moi, qui a côtoyé le haut voire le très haut niveau grâce aux joueurs et aux clubs avec lesquels j’ai collaborés, et qui m’ont fait confiance, eh bien ils vont pouvoir manger une part du gâteau plus grande que la mienne. Sur le principe, ça ne me dérange pas, sauf que ce n’était pas convenu comme ça au départ, dans les accords écrits. Du coup, on a dû mettre fin à notre collaboration avant même qu’elle ne démarre, et c’est comme ça que je me suis retrouvé à la tête du club. Donc voilà. C’est un constat sur mon métier d’agent et une opportunité qui m’ont conduit à Bourg.

Photo FBBP01

Vous évoquez l’évolution du métier d’agent, de l’entourage, mais il a changé à ce point ?

Oui, et ce n’est pas de la faute des joueurs ou des familles, c’est juste que les générations ont changé. J’ai pris de l’âge aussi. Quand j’ai commencé, j’avais 29 ans, et quand je m’adressais à des joueurs de 16 ou 17 ans pour leur parler de football, on était axé sur leur évolution sportive. Ce n’est pas pareil lorsque l’on a 49 ou 50 ans, car forcément, il y a un décalage générationnel. Donc oui, j’ai eu envie de faire autre chose, même s’il y a encore des familles très intéressantes dans le football, qui accompagnent bien leurs enfants. Il ne faut pas faire de généralités, mais il y a tout de même des choses surprenantes liées au métier d’agent, surtout en France.

Vous disiez avoir été sollicité en 2019, avant la Covid : c’était déjà pour entrer au capital d’un club ?

Non, c’était des sollicitations pour intégrer une cellule de recrutement ou en prendre la direction. L’idée que j’avais, si je n’avais pas fait cette opération-là avec Bourg, c’était de rester dans mon agence et de proposer de nouveaux services aux clubs de L1 et surtout de L2, afin d’externaliser une grande partie de leur recrutement, avec un interlocuteur propre aux clubs.

« La fibre entrepreneuriale, c’est familial »

Photo FBBP01

Cette fibre entrepreneuriale, peut-on dire que c’est une vocation chez vous ? Vous avez de qui tenir…

Avant le football, j’ai travaillé dans le monde de l’entreprise, notamment dans le groupe familial, les transports Venditelli. C’est vrai que je suis issu d’une famille d’entrepreneurs, mon grand-père et mon père ont commencé comme chauffeur-routier, puis la société s’est développée, mon frère y a travaillé aussi avant moi. On y a vécu une aventure professionnelle et familiale extraordinaire. Cela m’a permis de voir autre chose que le foot et de découvrir le monde de l’entreprise de l’intérieur; ça m’a aussi beaucoup apporté dans l’accompagnement des joueurs : par exemple, ça permet de relativiser certains de leurs problèmes et d’avoir un recul nécessaire sur la qualité des contrats qui sont proposés, parce que la vraie vie, je la connais, alors que quand j’étais au centre de formation de l’OL, je ne la connaissais pas. Donc voilà, je pense que la valeur ajoutée que l’on apportait aux joueurs avec ma société d’agents, c’était celle-ci.

Au FBBP01, vous êtes venu avec votre frère Philippe : c’est important de l’avoir à vos côtés ?

Au travers de ma société DV Invest, on est rentré, avec mon frère, dans le capital du FBBP01. Alors oui, c’est important de l’avoir avec moi, car il a encore plus de recul sur nos opérations; de plus, il siège au Conseil d’administration de beaucoup d’entreprises, donc il a une vraie expertise là-dedans, c’est une sécurité pour moi, notamment dans la réflexion stratégique que j’ai à mener. On a 5 ans d’écart. C’est mon aîné. On a déchargé les camions ensemble, on a livré ensemble, on est allé voir les entraînements à Gerland à vélo ensemble quand on était gamins. Et on a la fibre entrepreneuriale, c’est dans nos gênes, dans notre ADN.

« Si j’avais voulu faire ce que certains ont pensé que j’allais faire… »

Photo FBBP01

L’image de l’agent n’est pas très bonne, vous le savez…

L’image de « l’ancien agent » n’est pas forcément valorisante, c’est vrai. Mais j’étais actionnaire majoritaire et Directeur général de la société d’agents, et effectivement, j’avais cette « connotation » d’agent, c’est là que j’en reviens à l’image de la profession : à juste titre en France, et j’insiste sur le « à juste titre », son image n’est pas bonne, qu’il soit en activité ou qu’il ne le soit plus. Je ne sais pas si c’est culturel mais à l’étranger, on voit bien que les regards ne sont pas les mêmes, que les relations avec les structures qui accompagnent les joueurs sont différentes. L’image de l’agent fait peur en France parce que ça travaille mal. Le métier a été décrié, mais ce qui me pose un problème, c’est lorsque les médias mettent en avant certains agents qui n’ont pas de joueur ou pour certains qui ont un casier judiciaire… Donc à partir de là, on ne peut pas parler de valorisation de l’image du métier en mettant en avant des personnages comme ça.

Ne souffrez-vous pas de l’image de « président-agent », ou de « l’ancien agent devenu président » ?

Dans mon nouveau métier, dans ma nouvelle fonction au FBBP01, je n’en souffre pas, non, mais je sais par la Fédération que des confrères ont envoyé des courriers pour savoir si ce que j’étais en train de faire à Bourg-en-Bresse était bien légal. Cela m’a valu une convocation à la FFF avec mon avocat, pour expliquer ce que j’étais en train de faire, sachant qu’en amont, j’avais déjà écrit au service juridique de l’instance en leur exposant ma situation et mon projet. Le plus décevant, c’est de s’apercevoir que ces courriers émanent de certaines personnes que l’on croise le vendredi soir en match et qui vous serrent la main. Je le dis, tous les joueurs que l’on a accompagnés avec mon agence ne viennent pas au FBBP01 et ne viendront pas au FBBP01. Même si j’aurais aimé voir Alexandre Lacazette en attaque et Christophe Galtier sur le banc (sourire…). Il ne faut pas tout mélanger. J’ai tourné la page, mais vous avez raison, l’image de « l’ancien agent », ça interpelle les gens. Vous savez, sur l’aspect économique, j’ai plus perdu que gagné pour l’instant : si j’avais voulu faire ce que certains ont pensé que j’allais faire, je serais resté dans mon agence, j’aurais mis en place, comme font beaucoup de clubs mal intentionnés, un président et des actionnaires, comme ça j’aurais pu faire les deux activités, j’aurais pu conseiller de prendre des joueurs de mon agence, mais là, je n’aurais pas été dans la légalité, alors que j ai tout fait pour l’être. Mais voilà, il y a toujours des interrogations et des délations. Pendant 20 ans, la FFF m’a questionné. Aujourd’hui, cela me coûte beaucoup d’argent, parce que c’est le modèle économique des clubs de National qui veut ça; je ne suis pas le seul président dans ce cas-là. Je prends plus de coups qu’autre chose, mais je ne m’arrête pas à ça.

« Mon arrivée à Bourg a été mal préparée »

Crédit : Vorillon Photography

Vous êtes à la tête du FBBP01 depuis un an et demi : qu’est-ce que cela vous inspire ?

Si c’était à refaire, et je ne dis pas ça par rapport à Bourg-en-Bresse, je n’irais pas. Parce que mon arrivée à été mal préparée, mais là, c’est de ma responsabilité. En tout cas, je n’irais pas comme ça, aussi peu accompagné, sans structurer mon arrivée. Il existe une deuxième raison : on nous a cachés tout ce qui était possible de cacher, à tel point qu’aujourd’hui nous sommes en réflexion avec nos avocats, parce qu’il s’est passé des choses inadmissibles avant notre arrivée, mais ça, malheureusement, je ne pouvais pas le savoir avant. Nous sommes en train de travailler pour réparer les erreurs du passé alors que je suis venu pour un projet futur. C’est ça qui est très difficile. Donc, si je devais refaire quelque chose un jour, ailleurs, je ne le referais pas comme ça. Je mettrais un point d’honneur à être meilleur dans la préparation de mon arrivée, parce que, encore une fois, c’est moi le responsable. L’audit que nous avons réalisé serait beaucoup plus pertinent. J’ai aussi appris…

Qu’avez-vous appris ?

On apprend énormément quand on est à la tête d’un club. Il y a autre chose qui est difficile dans l’appréhension d’un projet comme celui-ci, c’est le domaine sportif, qui représente seulement 10 ou 15 % du boulot; le reste, ce ne sont que des ennuis, des soucis, mais tous les présidents ont ce même problème. Tout cela ne m’empêche pas de mettre en place mon projet. A Bourg-en-Bresse, on est en train de faire un travail remarquable au niveau de la partie commerciale pour repartir au contact des acteurs économiques, de la communauté d’agglomération, du département, car ils ont été snobés quand le club était en Ligue 2, lorsque le club vivait sous perfusion des droits TV. Nous, on veut se rapprocher des acteurs économiques, regagner leur confiance : on sait que ce sera long, c’est un gros travail. Mais nous avons des satisfactions tout de même, je pense à nos 17 ans Nationaux, 3es de leur poule, ou à nos 19 ans Nationaux, qualifiés pour les 32es de finale de Gambardella (l’entretien a été réalisé juste avant l’élimination aux tirs au but contre Torcy, Ndlr). Avoir ces deux équipes au niveau « national », ce n’est pas rien : c’est un petit pan de mon projet qui est d’intégrer des jeunes dans le groupe de l’équipe première. Regardez Amine El Ouazzani qui est parti à Guingamp en L2 : quand on est arrivé au club, il s’entraînait le soir avec la réserve; c’est une vraie satisfaction. On a d’autres jeunes dans le groupe de l’équipe première, que l’on a fait grimper l’été dernier.

Photo LPP Sport

Vous attentiez-vous à ce que ce soit aussi difficile pour l’équipe en National ?

Le National… Tous disent la même chose : on n’a pas les moyens économiques de tout assumer et pourtant on a les mêmes frais qu’en Ligue 1 ou qu’en Ligue 2. On va à Borgo, on va à Dunkerque, on traverse la France. Tout le monde dit « Oui, c’est vrai, on n’est pas assez aidé », ok, mais personne n’appuie sur le bouton. Il faut que l’on se mette autour de la table pour essayer d’aider ce championnat. Des cinq grands pays européens de football, la France est la seule à ne pas reconnaître le National comme professionnel ! Pour autant, quasiment la moitié des clubs sont professionnels et affrontent des clubs amateurs où il y a aussi des joueurs salariés. Ensuite, et ça c’est de notre responsabilité, on doit se battre sur les droits TV du championnat National. Aujourd’hui, il n’y a pas de valorisation à faire sur le National, car il y a une telle commercialisation du football, une telle offre, que les gens ne vont pas se battre pour regarder du National à la télé; sauf peut-être des matchs à enjeu en fin de saison. Donc l’approche doit être différente : est-ce que le football français a intérêt à avoir un National très fort ? Je pense que oui. On l’a vu en coupe du Monde, avec beaucoup de joueurs dans des sélections nationales qui sont passés par le National. On en voit d’autres en France, qui sont venus alimenter des clubs de Ligue 1 et Ligue 2. Aujourd’hui, les clubs de L1 et de L2 préfèrent que leurs jeunes aillent jouer en National plutôt qu’en N2 voire en N3. Le football français doit soutenir ce championnat. Pour ces jeunes joueurs et pour alimenter le football professionnel. Encore faut-il que tous les acteurs aient envie de le faire.

Vous dîtes cela, parce que vous êtes en National : mais tiendriez-vous le même discours si vous étiez à la tête d’un club de L1 ou de L2 ? Auriez-vous envie d’aider le National ?

Justement, oui. Lorsque je suis arrivé ici, voilà ce qu’on m’a dit « tout est prêt pour avoir un centre de formation à Bourg-en-Bresse, il faut juste remonter en L2 et reprendre le statut pro », etc. Sauf que c’est une aberration pour un club comme Bourg-en-Bresse d’avoir un centre de formation avec 35 ou 40 stagiaires, parce que ça coûte beaucoup trop d’argent. Et sans manquer de respect pour eux ou leurs familles, ceux qui viendront à Bourg seront là parce qu’ils n’auront pas été pris à Lyon ou à Saint-Etienne, Grenoble, Annecy ou Clermont, ça veut dire qu’on serait le 5e ou 6e choix. Et vendre du rêve à des jeunes pendant des années, pour qu’à 18 ou 19 ans ils aillent faire un autre métier, ce n’est pas ce que je veux. Je ne veux pas vendre du rêve. Mais je veux les accompagner. C’est pour cela que si j’étais en Ligue 2, je me tournerais plus vers le National, qui est un championnat nettement supérieur au N2, de par son intensité ou la qualité des joueurs. J’irais vraiment recruter en National, je prêterais des joueurs ou j’en recruterais, plutôt que de mettre en place un centre de formation qui, de toute façon, coût trop cher au club.

Vous n’êtes pas né de la dernière pluie pourtant… Toutes ces difficultés, vous saviez que vous alliez les rencontrer…

Si je vous ai dit OK pour cet entretien, c’est pour parler, et sans langue de bois. Quand je fais réaliser un audit et qu’on me cache que, en cas de perte du statut professionnel, le bail emphytéotique que l’on a devient caduque, et que je le découvre il y a seulement quelques mois, alors que ni la société mandatée pour réaliser l’audit, ni les avocats du club, ni la ville, ni l’agglo, ni l’ancien président n’étaient au courant… Pourtant, comme vous dites, j’ai le sentiment de ne pas être né de la dernière pluie. Et quand je découvre aussi qu’au niveau social, il s’est passé certaines de choses, et là pour le coup je vais faire de la langue de bois pour protéger les anciens salariés, je ne peux pas le savoir. Il se passera ce qu’il se passera après ma déclaration, et il y a énormément de choses… Quand on nous présente dans l’audit une activité commerciale avec un chiffre d’affaire « sponsoring » mélangé avec de l’échange de partenariat, il y a un vrai impact sur la trésorerie. Alors oui, on a signé une garantie d’actif et de passif (GAC) que l’on va certainement actionner, voilà, encore une fois, j’ai une grande part de responsabilité, mais je pense que l’on nous a cachés des choses volontairement, et je pense très franchement que cela ne vient pas de l’ancien président, mais plutôt de l’ancien directeur général, et là, j’ai des preuves à l’appui. Cette personne a fait du mal au club. mais ce n’est pas le moment de régler les problèmes avec lui.

Le stade Marcel Verchère, un outil magnifique. Photo FBBP01

Aujourd’hui, selon vous, quelle est la réelle place du FBBP 01 ? Doit-il devenir un club pro ou rester un bon club amateur ?

C’est également la question que je me pose, que l’on se pose avec les collectivités : qu’est ce que l’on veut faire du FBBP01 et du football dans l’Ain ? Je n’ai pas la réponse. Est-ce que je me suis trompé de cible ? Cela voudrait dire qu’il n’y a pas la place pour le football professionnel à Bourg et mettre en place nos idées : c’est possible, je ne le sais pas. Je ne sais pas si le FBBP01 est un très joli club amateur ou si il peut devenir un club référent dans le monde professionnel. On a aussi un problème, c’est le stade Verchère, qui est le terrain du rugby, car vous le savez, Bourg est une terre de rugby et ça, il faut le respecter. Néanmoins, l’évolution du stade Verchère a été faite grâce au foot, qui a dû s’adapter au cahier des charges de la Ligue de football professionnel quand il est monté en Ligue 2, et là, la ville de Bourg-en-Bresse, la communauté d’agglomération ont joué le jeu en le réhabilitant. Aujourd’hui, effectivement, le rugby fait plus de monde que le foot et parvient mieux à valoriser et optimiser le stade Verchère, qui est un très beau stade. On a vraiment de belles installations avec Péronnas aussi, où on a un joli centre d’entraînement, qui coûte cher, certes, mais qui n a rien à envier à des clubs de Ligue 2. C’est évident, à Bourg, on a l’outil pour être en Ligue 2, mais après, est-ce qu’on a la mentalité, tous ensemble, pour y être ? Je ne sais pas.

Géographiquement, le club souffre-t-il de sa position excentrée à l’Est ?

Non, quand on dit que Bourg est entre Lyon et Genève, ça parle tout de suite aux gens, d’ailleurs, on est en train de discuter avec des partenaires étrangers qui situent le club, voilà, après, on est dans une région qui bouge sportivement : dans l’Ain, il y a quatre clubs professionnels, très proches les uns des autres, avec Oyonnax et Bourg en rugby, la JLB basket et nous. Cela fait une grosse concurrence tout de même.

Sportivement, quand vous regardez le classement du National, n’avez-vous pas peur (*) ?

Si, mais toutes les équipes, tous les présidents vont répondre la même chose : on se projette sur le money-time, et il faudra voir à quel niveau de fraîcheur on sera à ce moment là, sauf que cette année, tout le monde joue quelque chose, alors évidemment, si on regarde derrière, la peur du vide peut devenir paralysante, donc il faut faire attention à ça. On regarde toujours devant, du moins c’est ce que l’on essaie de faire. En fait, il y a deux façons de voir les choses, deux politiques : pendant deux ans, on fait le strict minimum pour assurer le maintien en espérant que ce championnat devienne professionnel avec la Ligue 3, sachant que ce sont deux saisons à 6 descentes. Ou bien c’est de se dire que c’est justement le moment de monter en Ligue 2 parce que, après, avec seulement deux descentes de Ligue 2 en National, on aura plus de chance de se maintenir. C’est aussi pour ça que je suis agréablement surpris en National de voir les investissements que les clubs ont consenti cette saison pour construire leur effectif : ça donne un championnat avec de belles équipes. L’objectif, de toute façon, c’est de redevenir un club pro, soit en accédant en L2, soit en misant sur l’espoir de voir le National se transformer en L3. Si le professionnalisme passe par la Ligue 3, et même si je ne suis pas venu pour ça, on prendra aussi !

Alain Pochat, le coach du FBBP 01. Photo LPP Sport

Vous avez vu, je ne vous ai pas parlé du coach Alain Pochat…

J’ai répondu à vos questions ! C’est vous qui avez choisi les sujets (rire) !

Vous l’avez conforté à Noël, donc le sujet est clos…

Exactement. Vous savez, la difficulté quand on arrête avec un entraîneur, au delà de l’aspect humain – ce n’est jamais un plaisir d’arrêter une collaboration avec un entraîneur -, c’est de savoir qui peut le remplacer et si on a des certitudes que ça ira mieux avec un autre ? On sait ce qu’on a, on connaît Alain Pochat, on va continuer ensemble. Après, cela m’amène à une vraie réflexion sur le statut de l’entraîneur qui, à mon sens, est aussi à repenser. Aujourd’hui, un entraîneur, il pense à sa carrière, à juste titre, il a des contrats de très courte durée, ce qui amène de la précarité. C’est donc difficile pour lui de s’inscrire dans un projet club car il a son propre projet à l’intérieur d’un autre projet. Il y a une grande réflexion à mener : les CDD sont-ils une bonne chose ou pas ? Est-ce que ce n’est pas mieux de les sécuriser au niveau contractuel ? Peut-être alors qu’ils intégreraient un peu plus le travail en collaboration avec la direction sportive et générale, car il y aurait cette garantie contractuelle. Je ne dis pas qu’il faille le faire systématiquement, mais c’est à étudier.

(*) Avant la 17e et dernière journée de la phase aller ce soir, le FBBP 01, qui recevra le leader Concarneau lundi 16 janvier au stade Marcel-Verchère, à 21h (en direct sur Canl + Sport), est 9e au classement avec 20 points et un match en retard à Dunkerque, à seulement 2 points devant le premier relégable, Villefranche.

Texte : Anthony BOYER / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06 (et aussi @13heuresfoot)

Photo de couverture : LPP Sport

Photos : FBBP01, LPP Sport, Vorillon photography,

Après s’être offert le scalp de Sochaux (L2), l’ES Thaonnaise, invaincue en National 3, poursuit son conte de fée : en 32e de finale, les Vosgiens ont éliminé Amiens (L2) au stade Robert-Sayer. Ils affronteront Nantes, tenant du titre, en 16e. Magique !

Raphaël Rodriguez, le portier vosgien, décisif lors de la séance des tirs au but. Photo Blue Army – Jérôme Paradis

C’est une histoire incroyable comme seule Dame coupe peut offrir. Déjà 1/16e de finaliste l’année dernière, l’ES Thaon est de retour à ce stade de la compétition. Invaincus dans leur championnat en National 3, les hommes de Romain Chouleur sont en train de placer leur club, en plein développement, sur la carte de France ! Tout sauf un hasard.

Contre Amiens (Ligue 2), et pourtant réduits à 10 d’entrée de deuxième période après le gros coup dur et l’expulsion du défenseur central et capitaine Wilfried Rother; les Vosgiens, poussés par la Blue Army Fans et les 2000 supporters, ont fait le dos rond et profité de la maladresse des Picards pour laisser passer l’orage.

Lors de la séance des tirs au but, Raphaël Rodriguez, le gardien, a fini le travail ! « Rapha, Rapha”, scande le public qui ne cesse d’encourager son portier : dès la deuxième série, il stoppe la tentative de son adversaire, puis une autre ! Théo Gazagnes ne tremble pas et d’un tir sous la barre transversale, propulse son équipe en 16e de finale, comme l’an passé !

Interrogé sur sa réussite, Raphaël Rodriguez évoque celle qui a accompagné son remplaçant Antonin Parisot, très performant lors de l’édition précédente.

Un club familial

Photo Blue Army – Jérôme Paradis

Décidément tout sourit à Thaon et ce n’est pas dû au hasard, tant le travail abattu est colossal pour ce club de National 3, qui développe un projet sportif cohérent, humble, mais aussi ambitieux.

Avant le match, Mickaël Ruez, manager général du club et entraîneur adjoint de Romain Chouleur, avait parlé de la qualification face à Amiens comme d’une certitude, et non d’un vœu. Il avait vu juste !

Le club, qui se définit comme familial, avec une équipe d’éducateurs fidèles, reste ambitieux. Il dispose d’un budget de 400 000 euros (dont 150 000 euros de partenariat et de subventions) : pas énorme pour le niveau, selon lui.

L’ES Thaonnaise compte une cinquantaine de bénévoles fidèles et six salariés, mise sur l’insertion par le sport et accueille des apprentis éducateurs à temps plein, ainsi que des services civiques qui organisent des événements de sensibilisation dans le cadre du programme éducatif fédéral.

Les pieds sur terre

Nicolas Clasadonte, le président, à la tête du club depuis 32 ans. Photo Blue Army – Jérôme Paradis

Celui qui est à l’origine de cette structure solide, c’est le président Nicolas Clasadonte. Quand il est arrivé à la tête du club, il y a 32 ans, l’équipe fanion végétait en district; dès la saison 2001/2002, elle a atteint le CFA2 (National 3). Elle a bien refait quelques passages en Régional 1 (DH) avant de se stabiliser en N3, plus haut niveau qu’elle ait jamais atteint. “C’est un président qui a les pieds sur terre et qui ne s’enflamme pas”, indique Mickaël Ruez à propose de Nicols Clasadonte.

Les différents parcours de Thaon en Coupe ont également apporté une manne financière, comme lors de la saison 2021-2022, qui a permis, par exemple, d’acquérir un minibus. Et malgré des sollicitations d’agent pour « placer » des joueurs, le manager général n’a pas cédé ! Ce n’est pas l’esprit thaonnais, dont la volonté est de s’appuyer sur un effectif local et fidèle.

Et puis, Thaon a connu ses heures de gloire avec un 32e de finale face à l’OM devant 8000 spectateurs au stade de la Colombière, à Epinal, en 2000-2001 (0-4), ou encore un 64e face à Gueugnon (L2), en 2006-2007 (1-3 ap).

Dans la foulée de l’engouement né des récents parcours en Coupe de France, une association de supporters a été créée en septembre 2021. “Le président est un fan de l’Olympique de Marseille donc il voulait s’inspirer de ce qu’il se fait là-bas. On y retrouve essentiellement des jeunes du club.”, poursuit Mickaël Ruez.

En Coupe, les affluences sont bien sûr beaucoup plus élevées qu’en championnat où 200 à 300 spectateurs viennent assister aux matchs. Ces rendez-vous, comme ceux d’Amiens et Sochaux, sont l’occasion de belles fêtes et surtout de fédérer autour d’un même objectif : la qualification !

Le National 2 envisageable ?

Photo Blue Army – Jérôme Paradis

Ces épopées donnent forcément des “étoiles dans les yeux” aux jeunes du club qui s’identifient à ces exploits et ont envie d’être à la place de leurs aînés. Les jeunes du club évoluent d’ailleurs à un bon niveau régional : les U17 et les U19 sont en Régional 2.

Mais cela n’a pas toujours été simple de les attirer, surtout avec un voisin comme le SAS Epinal à seulement 10 kilomètres.
Aujourd’hui, entre les deux clubs, les relations sont devenues “plus courtoises”, parce qu’une réelle rivalité sportive existait lorsque Epinal jouait dans la poule de Thaon.

La fidélisation de ces jeunes fut matérialisée par la création d’un section sportive au collège et d’un emploi grâce au soutien des nombreux partenaires. “Lorsque les jeunes de la région cherchent à s’orienter vers un club organisé et structuré, ils choisissent Thaon, plutôt qu’Epinal”, avance Mickaël Ruez avec fierté, précisant toutefois que cette démarche s’effectue sans dénigrer le travail du voisin spinalien.

Photo Blue Army – Jérôme Paradis

Invaincue dans sa poule de N3 (2e à 6 points du leader, Biesheim, mais avec un match en moins), l’équipe thaonnaise réalise une belle saison. « Il faut faire mieux que la saison dernière (7e), poursuit Ruez. Avec notre parcours en coupe (élimination 1 à 0 contre Reims en 16e), on avait délaissé le championnat parce qu’on s’était vite maintenus. En plus, on avait gagné la coupe du Grand-Est contre la réserve de Troyes.”

La montée en National 2, si elle paraît sportivement envisageable, s’accompagnerait d’un changement de dimension évident pour les Vosgiens. “Si l’occasion de monter vient à se présenter, on la prendra, sans dénaturer nos bases et en gardant les pieds sur terre. »

Enfin, bien que Thaon ait réussi l’exploit d’atteindre les 16es de finale deux fois consécutivement, il faudra gérer le moment où cette aventure s’arrêtera. Les dirigeants et joueurs en sont bien conscients.

Romain Chouleur : une vie 100% foot

Romain Chouleur, le coach. Photo Blue Army – Jérôme Paradis

Romain Chouleur, l’entraîneur thaonnais – depuis 2017 -, qui a fêté ses 37 ans hier (le 10 janvier), a réalisé un parcours entièrement lorrain par choix. Attaché à sa famille et ses amis, le meneur de jeu technique a été formé à Nancy, club pour lequel il a joué jusqu’en 2008 (trois matchs en Ligue 1 !). Il a ensuite rejoint Raon-l’Etape en CFA avant de jouer en National pendant 5 ans à Epinal. En manque de temps de jeu, il rejoint l’ES Thaon en 2016, où il devient ensuite entraîneur, avec la réussite qu’on lui connaît. Une évidence pour lui : dès l’âge de 19 ans, il entraîne ses amis au FC Dombasle en U18, en parallèle de sa carrière de footballeur professionnel. Joueur la journée, entraîneur le soir, le Dombaslois vit une vie “100% foot”. Il raconte son parcours, ainsi que son travail à Thaon qui ne cesse de porter ses fruits.

Romain, vous avez eu cette double carrière de joueur professionnel et d’entraîneur à Dombasle. Ce n’était pas trop dur à gérer ?

Ce sont des semaines chargées, il y avait match le samedi avec les seniors et le dimanche comme entraîneur, et des entraînements la journée et aussi le soir à Dombasle. Donc il fallait s’organiser. C’est sûr que c’était du 100% foot. Ca me plaisait, et même si j’y suis allé sur la pointe des pieds au début, avec les résultats, ça m’a motivé à poursuivre. On a connu la montée de nombreuses fois pour passer de D1 à R2. J’ai la particularité d’avoir connu toutes les divisions, du District au National.

Photo Blue Army – Jérôme Paradis

Vous avez toujours eu cette appétence pour le coaching et l’encadrement des joueurs ?

Je suis quelqu’un de réservé, donc je n’étais pas un meneur d’hommes, plutôt un meneur technique sur le terrain. Je n’étais pas quelqu’un qui parlait beaucoup. C’est venu au fil des années aussi. Quand j’étais joueur, je faisais attention aux choix des coachs, je me demandais pourquoi ils mettaient en place telle ou telle séance. Je cherchais toujours à comprendre pourquoi on faisait telle ou telle chose. Quand il y a des choix à faire, notamment sur les convocations, il faut que ce soit le plus juste possible parce que j’ai connu ça en tant que joueur. Je me suis toujours intéressé et inspiré de ma carrière de joueur aussi : ça m’aide à comprendre ce que les joueurs peuvent aimer ou non. J’ai vraiment apprécié cette double casquette, même si c’était prenant au niveau temps et énergie, mais c’était enrichissant.

Pas de regrets de ne pas avoir continué au haut niveau ?

Je suis toujours vice-président à Dombasle, je suis très attaché à mon club de cœur, à ma famille aussi. C’est pour ça que je suis encore à Thaon aujourd’hui. On m’avait proposé des challenges loin de la France et ça ne me tentait alors pas du tout. Il y a eu des opportunités avec Raon et Epinal, je savais qu’il y avait un gros niveau et que c’était tout proche.

Pourquoi être passé de joueur à entraîneur si tôt, à l’âge de 31 ans ?

Le regret, c’est peut-être d’avoir arrêté trop tôt. Après quand j’étais entraîneur-joueur, je pouvais continuer, mais on se rend vite compte que si l’on veut faire les choses bien, on ne peut pas cumuler les deux. Les règlements m’interdisent d’entraîner en National 3 et de jouer en niveau ligue à Dombasle par exemple. C’est vraiment le gros regret, mais bon, quand je vois ce que je vis en tant qu’entraîneur, ça fait un peu passer la pilule.

« Pour Nantes, ça va être bizarre de jouer à Thaon avant d’aller à la Juve ! »

Photo Blue Army – Jérôme Paradis

Samedi contre Amiens, on a vu vos joueurs physiquement prêts à « encaisser » un match contre une équipe professionnelle. Sur quoi mettez-vous l’accent à l’entraînement ?

Ouais, alors qu’on avait fait une coupure de deux semaines, et qu’on avait repris il y a douze jours ! Même moi j’ai été surpris et impressionné qu’on ait autant de jus. On ne s’entraîne que sur synthétique donc avec le terrain gras, ça aurait pu être compliqué, les efforts ne sont pas les mêmes et la fatigue arrive plus vite. Je ne travaille pas du tout sur le physique, parce que je n’aimais pas ça en tant que joueur. Il y a une séance de travail athlétique, toutes les deux, trois semaines. Par contre je demande beaucoup d’intensité et de compétition dans les petits jeux qu’on fait donc ça permet de travailler physiquement mais plus sous forme de jeu. Beaucoup de technique, beaucoup de circuits techniques et la partie athlétique arrive derrière. On est sur trois séances par semaine. Le lundi c’est plutôt récup’, le mercredi c’est la grosse séance avec du jeu et le vendredi, travail technique et tactique, et du jeu aussi.

Vous jouez à 3 derrière. Comment définissez-vous votre philosophie de jeu ?

La première fois que j’ai vu ce système, c’était avec le Mexique en 1998; l’Argentine jouait aussi comme ça et j’aimais bien. Quand j’ai commencé à entraîner à 19 ans, j’utilisais ce système, depuis, ça a bien pris. Donc ça va faire 15 ans que je joue à 3 derrière, que ce soit en 3-5-2 ou en 3-4-3. J’ai des joueurs qui l’appliquent parfaitement aussi. A partir du moment où ça fonctionne, pourquoi le changer ? Donc on reste là dessus. Quand j’ai pas mal de blessés, d’absents, pour les matchs de coupe ou quand on doit amener plus de renforts offensifs, on peut bien sûr passer à 4. Mais globalement, c’est surtout à 3 derrière.

Photo Blue Army – Jérôme Paradis

Que vous apportent, à titre personnel, les parcours en coupe de France ?

Quand on est joueur ou entraîneur, on vit pour ça. Le club prend un peu la lumière. On est très fiers d’accueillir des clubs professionnels. Ce sont des moments très rares pour des amateurs, même si on l’a fait deux années de suite. C’étaient des premières fois pour le club. Il faut donc savourer, jouer sans pression et sans regret. Sur ce genre de matchs, il n’ y a pas à en avoir.

Vous allez recevoir le FC Nantes, le tenant de titre de la compétition. Votre première réaction ?

Il y a deux façons de voir les choses. Les joueurs sont des fans de Paris, Marseille, Lyon. Deux années qu’on va loin, qu’on a la possibilité de les rencontrer. Et d’un autre côté, on se dit que l’on a la possibilité de rencontrer une National, à l’extérieur ou des choses comme ça, donc on aurait été dégoûtés de faire un parcours comme ça pour se faire sortir contre une équipe comme ça. Donc là, tirer le FC Nantes, on est très content, c’est un grand club français, tenant du titre et qui va surtout aller défier la Juventus dans quelques semaines. Ça va leur faire bizarre de jouer Thaon, puis d’aller défier la Juventus. (rires) On est très contents et très fiers de pouvoir les accueillir dans les Vosges.

Textes : Emile Pawilk / Mail : contact@13heuresfoot.fr  / Twitter : @EmilePawlik

Photos : Blue Army – Jérôme Paradis

En 32e de finale de la coupe de France, le club promu en National s’est offert le scalp d’un « gros » de Ligue 1, l’OGC Nice (1-0), moins de 2 ans après avoir éliminé Lorient (L1). Mais en championnat, alors que six équipes descendront en fin de saison, il a pris du retard dans son projet de maintien.

Photo Sebastien Ricou / LPF43

La joie. Mesurée. Contenue. Mais une joie immense tout de même. Samedi, peu avant 20 heures, au coup de sifflet final, les joueurs du Puy Foot 43 n’ont pas exulté. Ils n’ont pas célébré de manière exagérée ou exubérante leur victoire logique et méritée 1 à 0 face à l’OGC Nice (but de Mohamed Ben Fredj dès la 4e minute), qui les propulse en 16e de finale de la coupe de France pour la deuxième fois en trois ans, après avoir atteint les 8es de finale en avril 2021, record historique du club.

Peut-être parce qu’inconsciemment, ils savent que leur travail, leur pain quotidien, c’est le championnat National, où ils n’ont pas eu les résultats escomptés pendant les cinq premiers mois de la compétition (seulement 3 victoires en 16 matchs).

En faire des tonnes après avoir éliminé une formation de Ligue 1 ? Pas le style de la maison. Pas forcément le moment de jouer au malin non plus quand on est 16e sur 18 en championnat, à 4 points du premier non-relégable, Nancy, 12e… prochain visiteur à Massot vendredi ! L’histoire dira si elle fait bien les choses.

Un petit claping et au vestiaire !

Photo Sebastien Ricou / LPF43

Contre Nice, les Ponots ont eu le triomphe modeste dans un stade Charles-Massot rempli (près de 4000 spectateurs) et ne se sont pas attardés sur la pelouse : tout juste se sont-ils fendus d’un bref claping devant la tribune Honneur avant de se lâcher un peu plus, dans l’intimité du vestiaire.

Mais on était loin, très loin des scènes de liesse qui avaient accompagné la victoire au bout du temps additionnel de la dernière journée de National 2, en mai 2022, face à Colomiers, quand un penalty inscrit par Mamadou N’Diaye à la 90’+7 avait propulsé le club du président Christophe Gauthier en National. Du moins, à nouveau propulsé en National, trois ans après une première accession qui s’était terminée en eau de boudin avec l’arrêt des championnats à 9 journées du terme.

En fin de saison 2019-2020, Le Puy Foot, alors 15e (sur 18) et premier relégable, à seulement un point du maintien en National (quatre descentes à ce moment-là), avait été rétrogradé sans pouvoir défendre ses chances jusqu’au bout. Un épisode vécu comme une terrible injustice dans le chef lieu de Haute-Loire.

Bouriaud, Guyot et N’Diaye, les rescapés

Mamadou N’Diaye, l’un des rescapés de la saison 2020-21, a été excellent face à Nice. Photo Sebastien Ricou / LPF43

Pour expliquer cette sobriété dans la victoire face à Nice, l’argument de dire que le club l’a déjà fait – victoire 1 à 0 contre Lorient (L1) en 16e de finale de la coupe en mars 2021, lors d’une deuxième saison d’affilée à nouveau écourtée par la Covid ! – pourrait tenir la route.

Sauf qu’à l’époque, Le Puy Foot n’avait que la coupe de France pour s’exprimer après un nouvel arrêt des les championnats nationaux décrété par la FFF, après seulement neuf journées de championnat (huit pour les Ponots, qui comptaient un match en moins).

Sauf qu’aussi, le visage de l’équipe était bien différent avec les Oberhauser, Camara, Bosetti, Dufau, Perrot, Boujedra, Fadiga, Trabelsi, Taïpa, Pellegrini, Labissière, pour ne citer qu’eux.

Samedi, face à Nice, Teddy Bouriaud et Baptiste Guyot étaient les seuls titulaires rescapés de ce premier exploit historique 22 mois auparavant face aux Merlus de Christophe Pelissier (Mamadou Ndiaye, le héros de Colomiers, était là lui aussi, mais n’avait pas disputé le 16e de finale face aux Bretons, et Tim Jabol était blessé).

Peut-être pas un hasard si, justement, Bouriaud, l’ancien capitaine de la réserve du FC Nantes, et Guyot, le « roc » infranchissable de la défense, furent les deux meilleurs joueurs sur le terrain face aux Aiglons d’un Lucien Favre touchant de tristesse et de désolation, complètement dépité et désemparé en conférence de presse d’après match (l’entraîneur niçois a finalement été débarqué ce lundi soir).

Vierzon en 16e, « remember » Rumilly

Habituellement 2e gardien, Jonathan Millieras a parfaitement suppléé Yan Marillat dans les cages, comme il l’avait déjà fait à Sedan et Concarneau. Photo Sebastien Ricou / LPF43.

Bien sûr, le succès du Puy Foot 43 Auvergne ne saurait se résumer à ces deux garçons. C’est bien la victoire de tout un groupe, qui s’est dépouillé pendant 90 minutes pour tenir ce 1 à 0. Une victoire qui devra impérativement servir en championnat, la priorité des priorités.

Le coach Roland Vieira, arrivé comme joueur en 2012, puis propulsé sur le banc en 2013 (dixième saison d’affilée), l’a d’ailleurs répété. Savourer la qualification, oui, mais pas trop longtemps.

L’adversaire du prochain tour, en 16e de finale, on en parle ? OK, oui, mais : « Moi, ce qui m’intéresse, c’est de gagner notre prochain match de championnat contre Nancy vendredi, prévient Vieira; Alors, comme on ne sera pas européen en fin de saison, le tirage, on verra bien… Maintenant, si j’avais un souhait, ce serait de vivre un nouveau match à Massot, afin de partager l’événement avec notre public, nos partenaires, nos salariés et nos 80 bénévoles qui ont été mobilisés pour ce match face à Nice et qui ont fait un boulot remarquable, parce que contre Lorient, en 2021, on avait gagné, oui, mais à huis-clos. »

Bon, pour le 16e de finale, ce sera bien à Massot, et face à Vierzon, un club promu en National 2. « Remember Rumilly » : après l’exploit face à Lorient, les Auvergnats étaient tombés de très haut un mois plus tard à Rumilly, en 8e de finale, où ils étaient complètement passés au travers (4-0). Une leçon à retenir.

Nancy vendredi à Massot

La joie de Mohamed Ben Fredj, unique buteur face à Nice. Photo Sebastien Ricou / LPF43

Mais avant Vierzon, il y a Nancy, un club qui frôle la catastrophe industrielle. Et avant Nancy, il y a donc eu cet indiscutable succès face à Nice, un moment rare pour un club amateur du 3e échelon (Le Puy Foot n’a pas le statu pro, contrairement à d’autres clubs de la poule).

On n’élimine pas tous les jours une équipe européenne ! Alors il faut savourer. Mais pas trop longtemps quand même, donc ! Au Puy, la joie ne dure pas plus de 24 heures. Le temps d’un dimanche. Car vendredi, c’est déjà Nancy qui vient à Massot, et le contexte sera complètement différent : retour au championnat face à un adversaire devenu un concurrent direct pour le maintien, l’objectif avoué des Ponots.

Et nouvelle équation à résoudre pour le coach Roland Vieira, suspendu face à Nice et perché en face de la tribune, sur l’échafaudage réservé aux caméras du diffuseur. Un Vieira pour qui la joie » ne dure que 20 minutes », et qui sait bien que les espaces seront moins larges que lors de ce 32e de finale face à Nice, typiquement le genre de match plus « facile », entre guillemets, à préparer, à aborder.

En National, dans un championnat aussi homogène, avec des blocs très resserrés, où les espaces sont plus rares, ce n’est vraiment pas la même limonade. « Il n’y a pas d ‘euphorie, parce que je le répète, on a des enjeux beaucoup plus importants, poursuit Vieira, rejoint cette saison sur le banc par un de ses anciens coéquipiers en jeunes à Lyon, Florent Balmont (tous deux ont gagné, ensemble, la coupe Gambardella en 1997, en lever de rideau de Montpellier-Nice au Parc des Princes; on doit juste de servir de ce match pour avancer, progresser. »

Mise en lumière

Depuis qu’ils collaborent ensemble, le manager Olivier Miannay (à gauche) et l’entraîneur Roland Vieira (à droite) ont connu de nombreuses émotions. Photo Sebastien Ricou / LPF43

Voilà, la coupe de France est repassée en Haute-Loire, et elle a encore accouché d’un exploit retentissant comme seule cette épreuve est capable d’en offrir (on a encore vu une Régional 1, le FCO Strasbourg, « taper » une Ligue 1, Clermont !).

Un exploit qui fera date, bien sûr, et trouvera une jolie place dans le livre d’or de ce club familial encore méconnu et que l’on confond souvent avec le site touristique du Puy du fou, en Vendée !

Non, le Puy Foot 43 n’a rien à voir avec les spectacles médiévaux chers à Philippe de Villiers, mais est capable d’assurer le spectacle 90 minutes durant comme cela a été le cas face aux Azuréens. Cela va servir sa promotion et, bien entendu, celle du staff et des joueurs. Car tout le monde le sait, la coupe de France est un tremplin pour moult coachs et joueurs.

Le stade Massot a fait le plein. Photo Sebastien Ricou / LPF43

« Oui, la coupe permet de se mettre en lumière individuellement et même si cela ne fait pas partie de ma philosophie, c’est tout de même une réalité, acquiesce Roland Vieira. On l’avait vu contre Lorient y’a deux ans où j’avais titularisé Lenny (Joseph) en attaque, qui n’avait disputé que 3 matchs de N2 avec nous cette saison-là, et qui dans la foulée de l’exploit et de son but, a signé à Metz en Ligue 1. Par exemple, pour nos joueurs prêtés cette saison, je pense à Yanis (Mbemba, FC Nantes), Momo (Mohamed Ben Fredj, Auxerre) ou Max (Maxence Rivera, Saint-Etienne), ce sont des matchs importants, mais ils le sont aussi pour tous les autres de mon équipe dont le National est le gagne-pain. Donc bien, sûr en Coupe de France, y’a vraiment une mise en lumière et un aspect individuel. »

Maintenant, avec cette performance de haute volée dans l’épreuve reine du football français, qui raconte chaque année de belles histoires et met en avant le travail des clubs amateurs et de ses acteurs, les Ponots ne doivent plus se cacher.

Christophe Gauthier, un président confiant

Christophe Gauthier, un président confiant. Photo Sebastien Ricou / LPF43

Croisé dans les allées du stade Massot dont la vue imprenable sur les monuments de la ville confère au lieu un charme dingue, et ce malgré la présence d’une piste d’athlétisme, le président Christophe Gauthier, chef d’entreprise apprécié et reconnu dans la région, réputé pour laisser travailler son staff, avait le sourire. Pas mécontent non plus de voir la manne financière représentée par une participation en 16e de finale (le club, qui dispose d’un budget d’environ 2,5 millions d’euros, est déjà assuré de toucher 102 500 euros de la FFF au titre de la dotation), il se voulait résolument optimiste quant au maintien en National.

D’abord parce que cette inter-saison a permis de procéder à quelques réajustements : le manager du club, Olivier Miannay, présent au club depuis 2018 et présenté comme un spécialiste de la division, s’active pour améliorer  et retoucher son effectif. D’ailleurs, quelques jours avant son 32e de finale, le club a enrôlé le milieu de terrain d’Annecy, Ligue 2, Alexandre Fillon. Et ce n’est peut-être pas fini.

Ensuite parce que, hormis une claque reçue au Mans (5-1), l’équipe tourne mieux et reste sur des résultats intéressants et prometteurs, notamment à l’extérieur, où lors des six derniers matchs, elle a signé deux nuls à Concarneau et Martigues, et engrangé un succès à Orléans.

Depuis cette saison, Florent Balmont est devenu l’adjoint de Roland Vieira. Photo Sebastien Ricou / LPF43

Invaincue à domicile tout au long de la saison passée en National 2, l’équipe de Roland Vieira pèche cette fois chez elle. Pourtant, hormis face au Red Star, elle a toujours rivalisé avec l’adversaire mais a manqué d’efficacité pour concrétiser ses occasions. Si bien qu’elle traîne ce boulet qui lui vaut aujourd’hui de figurer dans le wagon des relégables. Avec 11 buts inscrits, plus mauvaise attaque du National, c’est clairement insuffisant. Mais elle est aussi l’équipe qui a pris le plus de points (5 sur 9) face aux trois premiers du classement, Concarneau (0-0 à Guy-Piriou), Martigues (1-1 à Francis-Turcan) et Versailles (2-0 à Massot).

Maintenant, si elle réédite ce type de prestation en championnat, il est évident qu’elle prendra des points et se rapprochera de son objectif : « J’ai aimé nos sorties de balles, notamment lors de notre première mi-temps très aboutie, analysait le coach après Nice; j’ai aimé aussi la débauche d’énergie, la solidarité, l’envie de ne pas prendre de but. »

Enchaîner en championnat, voilà ce qui importe à l’entraîneur et à son staff – qui a également enregistré le retour à Noël de son préparateur physique Bertrand Dupuis -, conscients que le chemin non pas de Compostelle, mais celui qui conduit au maintien, est encore très long.

Texte : Anthony BOYER / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06

Photos : Sébastien Ricou / Le Puy Foot 43

Photo Sébastien Ricou / LPF43

A 31 ans, Adama Sidibé découvre le National pour la première fois sous les couleurs du Paris 13 Atletico. Un défi personnel qu’il a abordé sans complexe. Attaquant au profil atypique avec ses 95 kilos, il a marqué ses deux premiers buts au mois de décembre et est prêt à relever le challenge du maintien.

Photo Paris 13 Atletico

Comme beaucoup de ses coéquipiers du Paris 13 Atletico qui reprendra le championnat le vendredi 13 janvier face à Cholet, l’avant-centre Adama Sidibé, 31 ans, découvre le National pour la première fois de sa carrière.

Avec Eu, Oissel, Grand-Quevilly (N3), Beauvais et Rouen (N3 puis N2) ou Chartres (N2), il s’est construit une jolie réputation de buteur.

Attaquant puissant au physique imposant (1,91 mètres, 95 kg), il flirte avec la centaine de buts inscrits dans sa carrière. Après une belle saison à Chartres (8 buts), il a choisi de « se mettre en danger » en signant au mois de juin dernier avec le promu en National, le Paris 13 Atletico.

Depuis l’arrivée de Vincent Bordot sur le banc, il a enchaîné les titularisations et inscrit ses premiers buts avant la trêve face à Borgo (4-0) le 9 décembre. Aussi généreux sur le terrain que dans la vie, Adama Sidibé, qui a grandi en Normandie et écumé plusieurs clubs de sa région, évoque son parcours et sa fierté d’avoir relancé le FC Canteleu, le club de son enfance, dont il a été président pendant deux ans. Entretien avec un homme attachant et de conviction.

« Je n’ai jamais fait de complexe d’infériorité »

Photo Bernard Morvan

A 31 ans, c’était inespéré pour vous de jouer en National…
Il y a quelques années, j’avais eu une proposition d’Avranches mais on n’avait pas pu trouver d’accord financier. J’étais bien à Chartres, le coach Jean-Pierre Papin m’a appris des choses dans le placement et la finition. Mais en quittant Chartres, le N2 où ça marchait bien pour moi, j’ai voulu me mettre en danger. Honnêtement, j’aurais certainement gagné plus d’argent en restant en N2 qu’en signant au Paris 13 Atletico. Mais j’ai voulu relever ce challenge. C’est un défi personnel. Je ne dis pas que c’était inespéré pour moi de jouer en National mais à 31 ans, c’était ma dernière chance. Il y a un gros palier entre la N2 et le National, mais je n’ai pas pris ça comme un truc inaccessible. Je savais que cela ne serait pas simple, que je devrais prouver des choses pour répondre aux interrogations à mon sujet. Mais je suis un bosseur, j’ai confiance en moi et je n’ai jamais fait de complexe d’infériorité.

Avec le Paris 13 Atletico, vous avez disputé 12 matchs sur 16 et vous avez été titulaire lors des cinq derniers. Cela veut dire que votre apprentissage s’est bien passé ?
J’ai quand même dû faire ma place. Je savais que je n’étais pas l’attaquant numéro 1. J’ai aussi eu un carton rouge contre Le Puy (le 12 octobre lors de la 9e journée). Mais je me suis accroché. J’avais vraiment hâte de pouvoir enchaîner les matchs et de débloquer enfin mon compteur. C’est arrivé avant la trêve contre Borgo (4-0, le 9 décembre) avec un doublé et une passe décisive. Je suis content mais je ne suis pas du genre à m’endormir sur ça. L’objectif du Paris 13 Atletico, c’est le maintien et je vais tout faire pour y apporter ma contribution. J’ai un profil un peu atypique, je dois être présent dans l’impact et le jeu aérien.

« En France, on aime bien mettre les gens dans des cases »

Photo Grégoire Placca

Depuis les tribunes, votre silhouette, un peu enveloppée en apparence, interpelle souvent…
(éclats de rires).. Les gens pensent toujours que je suis en surpoids, c’est comme ça depuis que je joue au foot. Je fais 95 kg, je n’ai pas un profil qu’on voit souvent. Mais dans le foot français, on aime bien mettre les gens dans des cases. J’entends ce qu’on dit de moi dans les tribunes. Ceux qui ne me connaissent pas pensent que je ne peux pas courir, ni me déplacer à cause de mon poids. Les défenseurs, c’est pareil. Mais je leur mets d’entrée une accélération et ils comprennent à qui ils ont affaire… Toutes proportions gardées car je n’ai pas son talent, je joue un peu comme Lukaku (rires) !

Photo Bernard Morvan

Vous avez été formé à Cannes et même effectué un essai à West Ham quand vous étiez plus jeune…
Je suis resté trois ans à Cannes. J’ai eu David Bettoni, l’adjoint de Zidane, comme coach en U19, puis des coachs très expérimentés, Albert Emon et Victor Zvunka quand je suis monté avec le groupe National. Mais à mon poste, il y avait le Tchèque Jan Koller, un monstre (2,02 m). Je n’ai pu faire que quelques bancs en National sans jamais rentrer en jeu. Il y a eu des soucis financiers à Cannes. Je suis donc rentré chez moi en Normandie, j’ai signé à Eu-Le Tréport, puis Oissel. J’ai ensuite rejoint Beauvais, toujours en N3. Après un premier passage à Rouen, je suis retourné à Beauvais où j’ai joué pour la première fois en National 2 à 26 ans. Je n’ai pas brûlé les étapes. J’ai pris mon temps : N2 à 26 ans, National à 31 ans…

Avez-vous des regrets sur votre parcours ?
Aucun. Je suis content de mon parcours. J’ai pu marquer des buts dans tous les clubs où je suis passé. Je pense avoir laissé une belle image partout car je ne triche jamais. Sur un terrain, je donne tout. Quand j’étais jeune, on me prédisait un avenir au mieux en DH (R1) et à d’autres une carrière au-dessus. Mais au final, c’est moi qui aie le mieux réussi. J’ai la satisfaction d’avoir presque toujours vécu du foot. Ce n’est pas donné à tout le monde.

Cela veut dire que n’avez donc jamais travaillé en dehors du foot ?
Si, juste quelques mois à l’époque de Oissel en N3. C’était une courte expérience. J’ai le permis D donc j’ai été conducteur de bus et chauffeur-livreur. Je suis toujours resté connecté avec la vraie vie.

« Le National demande beaucoup plus d’exigences »

Photo Grégoire Placca

Chose rare pour un footballeur en activité, vous êtes en effet devenu en 2020 président d’un club, le FC Canteleu, dans la banlieue rouennaise…
C’est le club de mon enfance, j’y ai grandi et c’est là-bas que j’ai commencé le foot. Quand j’étais à Rouen, je venais le mercredi sur des séances de jeunes. Malheureusement, il y a eu des soucis au niveau de l’équipe première qui a été suspendue plusieurs années et est repartie du plus bas niveau départemental. On m’a sollicité pour prendre la présidence, j’ai hésité car je ne voyais pas président à 30 ans. Mais j’ai cédé et j’y suis allé car j’étais accompagné d’amis dans cette aventure. J’ai été bien entouré. On a essayé de structurer le club au niveau des jeunes. Il y avait du potentiel, cela me faisait mal de les voir galérer. Le bilan est positif, on a passé deux belles saisons. On a fait remonter l’équipe première en D3, on a fait monter les jeunes et on est arrivé en quarts de finale de la Coupe de Normandie. On a bien relancé le FC Canteleu, ce qui me tenait vraiment à cœur. Je suis encore très proche du club. Mais j’ai dû démissionner de mon poste de président cet été.

Pour quelles raisons ?
Quand tu es président, tu es sans cesse sollicité pour X ou Y… C’est un poste qui demande beaucoup de temps. Je devais aussi penser à moi. J’ai donc décidé de démissionner pour me consacrer à 100 % au challenge du Paris 13 Atletico. J’habite désormais à Créteil (Val-de-Marne), je n’avais pas envie de m’éparpiller et causer du tort au final à Canteleu et à moi-même. Le National demande beaucoup plus d’exigences donc je devais mettre tous les atouts de mon côté pour être performant face à des équipes qui ont pour certaines des anciens joueurs de L 1. Les Lemoine, Dossevi que j’ai affronté lors du match contre Versailles, ou des stades comme à Nancy et Jean Bouin, avant je ne les voyais qu’à la télé. Maintenant, je joue sur ces terrains et je peux regarder de tels joueurs droit dans les yeux. C’est vraiment kiffant ! Je ne fais aucun complexe mais je donne tout pour être à la hauteur de tout ça.

Adama Sidibé, du Tac au Tac

Photo Bernard Morvan

Première fois dans un stade ?
L’ancien stade du Havre, le stade Jules-Deschaseaux lors d’un match de L1 contre Auxerre. J’avais 11 ans.

Meilleur souvenir de joueur ?
Le premier triplé de ma carrière avec le FC Rouen en National 3.

Pire souvenir de joueur ?
Un carton rouge qui me suspend 7 matchs lorsque que j’étais au CMS Oissel en National 3.

Une manie, une superstition ?
Non, aucune.

Le geste technique préféré ?
La feinte de frappe. C’est magique quand elle passe.

Qualités et défauts sur un terrain ?
Pour mes qualités, je ne lâche rien et je ne triche jamais. Je donne tout quoi qu’il arrive. Mais je suis un peu grincheux avec mes partenaires par moment. C’est mon défaut. Je devrais plus encourager, j’y travaille au quotidien.

Photo Grégoire Placca

Votre plus beau but ?
Avec le FC Rouen en N3. Je suis dos au but, je contrôle de la poitrine et j’enchaîne une volée sans qu’elle touche le sol à l’extérieur de la surface. Un but zlatanesque !

Le joueur le plus fort que vous avez affronté ?
Le dernier en date : Amine Boutrah de Concarneau. C’est très fort.

Le joueur le plus fort avec qui vous avez joué ?
Aziz Kebbal qui a été formé avec moi à l’AS Cannes. Un numéro 10 très très fort techniquement. Il était incroyable.

L’entraineur qui vous a marqué ?
David Bettoni, en U19 à Cannes. Un très bon coach devenu l’entraîneur adjoint de Zidane.

Le président qui vous a marqué ?
Mr Fabrice Tardy, l’ancien président du FC Rouen.

Photo Bernard Morvan

Le club où vous vous êtes senti le mieux ?
L’AS Beauvais.

Le club que vous avez refusé et que vous avez regretté ?
Je n’ai aucun regret.

Le club où vous n’auriez jamais dû signer ?
Aucun. Toutes mes expériences ont été différentes et enrichissantes au final.

Un joueur préféré ou un modèle ?
Ronaldo le Brésilien. Incontestablement le meilleur attaquant de tous les temps.

Photo Bernard Morvan

Un stade mythique ?
Santiago Bernabeau.

Vos amis dans le foot ?
J’en ai pas mal… Je ne pourrais pas tous les citer.

Vos occupations en dehors du foot ?
Ma famille et la lecture.

 

Propos recueillis par Laurent Pruneta / Twitter : @PrunetaLaurent / Mail : lpruneta@13heuresfoot.fr

Photo de couverture : Grégoire Placca

Photos : Bernard Morvan – Grégoire Placca  – Paris 13 Atletico

Le tout nouveau président de l’USLD (National), arrivé comme défenseur central en 2010, et nommé en décembre dernier en remplacement de Jean-Pierre Scouarnec, évoque son parcours, la vente du club et son attractivité, et la vision de son poste. Il se veut rassembleur, ambitieux et déterminé.

Edwin Pindi n’y pense pas tous les jours en se rasant mais l’anecdote qu’il nous a racontés mérite quand même d’être relevée. Vous en connaissez beaucoup, vous, des présidents de Ligue 1, Ligue 2 ou National qui, avant d’occuper cette fonction suprême, lançait la page Facebook de leur club ?

C’est pourtant ce qu’a fait le Lillois de naissance, âgé de 37 ans, dont la carrière ne saurait, évidemment, être résumée à cela !

Car Edwin Pindi a quasiment tout fait à l’USL Dunkerque, où il est arrivé en 2010 comme joueur en CFA2, après avoir porté les maillots de Calais (CFA2), Wasquehal (CFA) et Lesquin (CFA). Tout fait… Ou presque : il n’a pas vendu les délicieuses frites au pied de l’ancienne tribune d’Honneur du « vieux » stade Tribut qui, depuis, s’est fait un lifting complet. Mais il aurait pu !

Pensionnaire du centre de formation du LOSC

Le nouveau PDG des Maritimes avait un bon prétexte pour lancer cette page officielle Facebook à son arrivée : un stage de fin d’études, passé dans le cadre de la son Master en Management et gestion du sport; à ce moment-là, les réseaux sociaux des clubs amateurs commençaient seulement à émerger et l’ancien pensionnaire du centre de formation du LOSC (1995-2004) ne se doutait pas qu’il occuperait un jour le poste de président. Son poste, à l’époque, c’était défenseur. Un défenseur et aussi un capitaine respecté, charismatique, jamais sur la défensive lorsqu’il s’agit d’évoquer son nouveau costume – il a de toute façon toujours porté un costume ! – mais plutôt réaliste, mesuré, calme, pondéré, et aussi ambitieux.

A l’USLD, Edwin Pindi, qui possède une licence d’anglais, a aussi connu l’accession en CFA, dès sa première saison (2011) puis en National (2013), avant de mettre un terme à sa carrière en 2016 et d’intégrer l’équipe administrative, d’abord comme secrétaire général, puis comme directeur général.

Il a également vécu l’accession en Ligue 2 en 2020, cette fois depuis les bureaux. Et puis, le mois dernier, les actionnaires du club l’ont promu au poste de président, toujours avec la casquette de directeur général, après la démission de l’emblématique Jean-Pierre Scouarnec, en place depuis 2014.

C’est vrai que, depuis de nombreux mois, les rumeurs faisaient état de la vente des parts de deux des quatre actionnaires (Douglas Broucke et Eddy Dobbelaere, 52 % à eux deux), sachant que sur les quatre, trois sont des personnes physiques (le troisième étant Jean-Pierre Scouarnec, à hauteur de 26 %), la quatrième une personne morale (l’association USLD, représentée par son président, le même Eddy Dobbelaere).

Un club qui a pris de la valeur

Mais avant d’être un club à vendre, l’USL Dunkerque est surtout un club qui se porte bien, qui a pris de la valeur, qui possède encore le statut professionnel malgré une descente de Ligue 2 en National en mai dernier et s’appuie sur un budget confortable de l’ordre de 5 millions d’euros.

Surtout, il s’est doté d’un magnifique outil, le nouveau « Tribut », avec 5000 places. Un outil moderne, fonctionnel et modulable. Le stade devrait d’ailleurs attirer la foule des grands jours dimanche, à 18h, pour le 32e de finale de la coupe de France face à l’AJ Auxerre (Ligue 1). Une superbe affiche, pour bien lancer l’année 2023 et préparer cette deuxième partie de saison que les joueurs de Romain Revelli, un temps leaders en début d’exercice, entendent bien poursuivre en haut de tableau (l’USLD est actuellement 5e, avec un match en retard à domicile face à Bourg-en-Bresse, à 5 points du leader Concarneau et à 4 points du second, Versailles).

« En National, on tourne entre 1500 et 2000 spectateurs, commente Edwin Pindi. On a vraiment un bel outil, qui mérite d’être plus rempli. On sait que si on fait un beau début d’année, et une belle 2e partie de saison, le stade se remplira encore plus et on a besoin de cela; ça commence contre Auxerre, c’est une belle affiche, c’est bien pour repartir, et en plus, cela faisait 5 ans que l’on n’était pas allé en 32e de finale ». Paroles de président.

« J’ai toujours aimé manager, être au coeur des décisions »

On doit dire « président » ou « Edwin » ?
Edwin !

Edwin, que de chemin parcouru depuis votre arrivée à Dunkerque, en 2010…
Quand j’y repense… Je suis arrivé comme joueur, et dès la saison suivante, en 2011, j’ai travaillé au club comme administratif. A l’époque, je touchais un peu à tout, et puis c’était aussi un peu les débuts de la com’. Dans ce domaine, il n’y avait pas grand chose, et pour tout dire, donc, la page Facebook actuelle, c’est moi qui l’ai lancée, ça fait drôle ! Ensuite il y a eu le compte Twitter, la refonte du site web; en fait, j’ai commencé par là. J’ai aussi fait du marketing, du commercial, j’ai touché un peu à tout. J’ai proposé à ce moment-là aux dirigeants en place, le président Jean-Christophe Géhin et le manager Nicolas Huysman, d’ouvrir un service communication. Et c’est comme ça que ça a commencé, ça m’a permis de clôturer mon stage de fin d’études, et finalement, dans la foulée, même si j’étais employé comme joueur, j’ai développé d’autres activités administratives, c’est allé crescendo au fil des années.

« En arrivant à Dunkerque, je me suis inscrit dans un projet sportif et associatif »

Vous aviez l’idée de préparer votre reconversion, c’est cela ?
Quand j’arrive à Dunkerque comme joueur, j’ai 25 ans et aussi 7 saisons de CFA derrière moi. Entre l’âge de 22 et 25 ans, j’avais décidé de tirer mes dernières cartouches pour signer un contrat professionnel, mais, voyant à 25 ans que je n’arrivais pas à franchir le cap, que je stagnais en CFA, j’ai décidé de préparer ma reconversion, tout en continuant à jouer. C’est vraiment là que je me suis mis cette idée en tête.

Vous aviez déjà des appétences pour prendre des responsabilités…
J’avais envie de manager, j’ai toujours aimé ça, être au coeur des décisions, même quand j’étais joueur. J’étais capitaine, un peu le relais, et c’est vrai que j’avais envie de prendre des responsabilités dans une organisation sportive, surtout dans un club. Pour la petite histoire, dans le dernier contrat fédéral que je signe, il est convenu que si on monte en Ligue 2, j’obtienne un poste de cadre administratif. C’était prévu comme ça avec l’ancienne direction.

Romain Revelli, l’entraîneur de l’équipe de National.

Juste avant de signer à Dunkerque, vous étiez à Calais…
Oui, c’était en 2009, le club venait de descendre de National, malheureusement, il a été rétrogradé administrativement en CFA2 durant l’été qui a suivi. On est monté en CFA, mais, là encore, le club a été recalé par la DNCG. Pour moi, comme je le disais, c’était mon dernier défi, ma dernière chance d’espérer décrocher un contrat pro, dans un club avec un passé, une histoire : à ce moment-là, Calais pesait plus lourd que Dunkerque sur l’échelle du football, même si Dunkerque avait connu la Ligue 2, mais c’était à une autre époque, dans les années 90. Quand je signe à Dunkerque en CFA2, le club voulait monter, et moi je pensais déjà à ma reconversion. Je me suis tout de suite inscrit dans un projet sportif et associatif. Je me revois en train de monter un dossier pour la communauté urbaine de Dunkerque dans le cadre de l’attribution des subventions, ou de faire le rapport d activités. En fait, je prends du plaisir à faire les deux, à jouer et à commencer à travailler à côté. Parce que, rapidement, le fait de jouer ne me suffisait plus. Comme nous n’étions pas nombreux à l’époque dans les bureaux, j’ai touché à pas mal de choses, d’autant plus que le manager général, lui, était très tourné vers le terrain, vers le sportif. J’ai une autre anecdote : en 2015, quand nous avions reçu Rennes en coupe de France, le matin du match, je gérais les plans de table du salon VIP, la com’ du match aussi, et l’après-midi, je jouais ! Les autres joueurs ne le savaient même pas !

« J’ai un devoir de mémoire »

Quand vous vous retournez sur ces 12 ans et demi, à quoi pensez-vous ?
C’est une fierté ! J’ai eu le bonheur d’être monté en National puis en Ligue 2 avec le club, comme joueur, comme administratif ou comme directeur général. Je trouve que les gens ne se rendent pas assez compte de tout ce que l’on a fait ces 12 dernières années, où il s’est vraiment passé beaucoup de choses : on a réussi à transformer l’USL Dunkerque en club solide de National et même à le professionnaliser en accédant en Ligue 2 pendant deux saisons avec une équipe au statut pro et de nouvelles infrastructures. Aujourd’hui, là où j’ai un rôle important, c’est que j’ai un devoir de mémoire. Il y a eu une transformation qui s’est opérée en même temps que la professionnalisation, et je me dois de représenter cette passerelle entre le côté amateur que l’on a connu, avec toutes les personnes qui ont travaillé au club ou qui ont oeuvré bénévolement, dont certaines sont décédées, et ce qu’on a mis en place au niveau professionnel.

« Je suis un président dont c’est le métier, cela va dans le sens de l’évolution du foot »

Ce poste de Président directeur général, finalement, il a l’air de bien vous convenir…
Oui ça me convient bien je pense, j’ai conservé la casquette de DG. En fait, je suis un président qui a des actionnaires, et dont c’est le métier. Cela va dans le sens de l’évolution du football, qui est en perpétuelle transformation, et du club, qui s’inscrit dans une vraie professionnalisation. Après le départ de Jean-Pierre (Scouarnec), les actionnaires ont jugé qu’il fallait un professionnel du métier, un professionnel du football, pour gérer la structure au quotidien. En faisant ce choix-là, ils ont fait un pas vers l’avenir : les actionnaires attendent des résultats, ils sont plus dans le projet financier et confient la responsabilité de l’entreprise à une personne dont c’est le métier : c’est ce que l’on voit de plus en plus en L1 et en L2, avec beaucoup de présidents ou présidents délégués salariés; on le voit moins en National mais je pense que ça va arriver de plus en plus. DG, mon rôle était déjà de porter le projet du club; là, j’ai une responsabilité supplémentaire, celle de président, et j’ai été honoré de la proposition, mais finalement, il y a une vraie continuité. Jean-Pierre, lui, n’était pas là tous les jours, il avait d’autres activités à coté, il est chef d’entreprise, il met de l’argent dans le club aussi, il s’appuyait sur un DG. Ce qui ne change pas, c’est mon rôle : je reste un élément moteur, je continue d’animer le projet au quotidien, sachant que l’on ne fait rien tout seul, car j’englobe avec moi mes équipes, que je suis chargé de faire bosser. C’est juste que, maintenant, je dois rendre des comptes à mes actionnaires.

Avec Jocelyn Blanchard le directeur sportif et Jean-Pierre Scouarnec, le président qui a démissionné en novembre dernier.

Après votre nomination, on a lu des commentaires plutôt moqueurs, vous comparant au « fils de Jean-Pierre Scouarnec »…
C’est normal que les gens pensent ça, car on a une très grosse relation avec « JP ». On a tissé des liens importants. Je l’ai connu quand il n’était encore que partenaire du club, à mon arrivée. Cette comparaison, elle se comprend, on a travaillé très longtemps ensemble. Après, la décision de me nommer à ce poste, elle n’est pas seulement le fait de « JP », mais de l’ensemble des actionnaires. Maintenant, j’ai ma personnalité à moi, je ne suis pas comme « JP », je ne le serai jamais, j’essaierai d’apporter ma touche, qui est celle de quelqu’un de terrain, c’est un mode de fonctionnement différent. Mais je suis le président de l’USLD, pas celui de Jean-Pierre Scouarnec, d’ailleurs, j’ai connu un autre président avant lui, on l’oublie ça, et d’autres dirigeants aussi, cela fait quand même 12 ans que je suis là, je connais l’environnement local, toutes les particularités du club, j’ai connu aussi l’ancienne équipe municipale, je connais la nouvelle…

« La vente du club peut prendre des mois et des mois… »

Cette nomination au poste de président, vous l’avez vu venir ?
Non, cela s’est fait progressivement. La démission de « JP » est arrivée assez subitement même si la semaine qui a précédé, les actionnaires l’ont évoquée. Dans la mesure où « JP » n’est pas actionnaire majoritaire, et à partir du moment où certains actionnaires ont décidé de mettre leur part en vente, il ne pouvait plus décider de l’avenir du club, et il a donc estimé qu’il n’avait plus la légitimité de gouverner, donc à partir de là, des discussions ont commencé.

Vous êtes toujours en contact avec lui ?
On est resté en contact, on s’est vu avec l’ensemble des actionnaires. Il souhaite prendre du recul. Il s’est énormément investi dans le club alors qu’il a des activités professionnelles, une vie familiale. Après, je ne peux pas parler à sa place, mais il a dit qu’il souhaitait rester dans l actionnariat.

Ces derniers mois, on a beaucoup entendu parler de la vente du club…
Et c’est justement ça qui change pour Dunkerque et son environnement : ce sont des choses que l’on n’avait jamais entendu auparavant, que le club puisse être racheté. Le club a pris de valeur, on a de belles installations et il y a du potentiel, donc forcément il y a des intérêts. Il y a des discussions, cela peut prendre des mois et des mois, car il y a des choses que l’on ne maîtrise pas, il y a plein de critères qui entrent en ligne de compte, comme s’assurer que la personne respecte l’identité du club, l’environnement local, les relations avec les collectivités. C’est un processus qui peut prendre énormément de temps, même si c’est assumé de la part de nos actionnaires, qui savent que pour pérenniser le club dans le monde pro, il faut l’aide de personnes extérieures qui auront une surface financières plus importante. Mon rôle est de faire en sorte que tout se passe bien, qu’on ait la meilleure équipe possible et le meilleur fonctionnement possible, tout en sachant que le club peut évoluer dans son actionnariat et dans sa propriété, car c’est une réalité du foot pro.

Quelle a été votre première décision de président ?
Cela a été de voir les parties prenantes en local, déjà, avant que l’on ne communique sur ma nomination. J’ai aussi tenu à voir le staff technique, mes collaborateurs, les joueurs. Ensuite, cela a été de voir les politiques, les supporters, et on devait voir les partenaires pendant le match de Bourg avant Noël mais il a été annulé. Aujourd’hui, si on veut avancer, on a besoin, dans notre microcosme local, d’être vraiment fort : c’est ça la priorité. Il n’y a que comme ça qu’on existera, parce que nous, à Dunkerque, on a une identité forte, et c’est avec cette identité-là que l’on continuera d’avancer.

« On ne fait rien tout seul »

Vous serez un président plutôt…
Un président rassembleur et déterminé. Ambitieux aussi. Qui veut rassurer. Je veux que ma détermination, celle que j’ai et qui fait partie de moi, pour faire grandir le club et aller haut, soit partagée avec tout le monde. Ce n’est pas de la démagogie, mais on ne fait rien tout seul, on ne fait rien si l’on n’a pas l’adhésion des collaborateurs ou de l’environnement local. C’est ce que j’ai dit aux supporters, aux spectateurs, car parfois, un but, celui que l’on va inscrire à la dernière minute car le public a poussé, peut tout changer. On doit faire sentir que c’est dur de venir jouer à Dunkerque.

Un mot sur la première partie de saison en National ?
C’est positif ! Il ne faut pas oublier que l’on descend de Ligue 2, que l’on a intégré 18 nouveaux joueurs. L’été dernier, on a fait le choix de conserver notre entraîneur principal, Romain Revelli, car on a estimé que les responsabilités de la relégation étaient partagées par la direction, le staff et les joueurs. Mais on était en fin de cycle et on a pris le parti de bouleverser l’effectif; ça prend bien et vite. Il y a 6 mois, si on avait dit qu’on serait 5e avec un match en retard, à 5 points du premier, on aurait signé tout de suite (entretien réalisé début janvier). Ce que j’attends, maintenant, c ‘est une progression. Si on veut exister, il faut rester bien placé. L’objectif, c’est d’être là pour le sprint final. Mais le championnat est compliqué. Pendant deux saisons, on aura quatre clubs qui vont descendre de Ligue 2 en National… Ce que l’on veut, c’est retrouver la Ligue 2 dans les deux ans. Quand elle passera à 18, il faudra que l’on y soit. Et plus vite on y sera, mieux ce sera ! Donc il faudra être placé en avril. On a une équipe qui a du talent, des individualités intéressantes, avec plusieurs joueurs qui ont brillé offensivement à tour de rôle. On est capable de faire de gros résultats, on a de la ressource, mais on a manqué de régularité, de constance, et aussi de maturité.

Quelles équipes vous ont fait la meilleure impression ?
Concarneau a une dynamique collective hyper bien huilée, c’est une grosse force. En termes de puissance d’équipe, je les ai trouvés bons. J’ai aussi trouvé le Red Star intéressant même s’ils n’ont pas fait le début de saison attendu. Pour moi, ce sont deux grosses équipes, sans oublier le talent individuel des joueurs de Versailles aussi.

Edwin Pindi, du tac au tac

Meilleur souvenir sportif ?
La montée en National en 2012/13 avec l’USL Dunkerque.

Pire souvenir sportif ?
La montée en CFA obtenue sur le terrain avec Calais (CRUFC) en 2010 qui est invalidée par la DNCG.

Combien de buts marqués dans ta carrière de joueur ?
Précisément, je ne suis pas sûr, mais une trentaine.

Plus beau but ?
Le but de la victoire contre Chambly lors de la saison 2011/2012. Ma spécialité : coup de tête puissant en pleine lucarne sur un coup-franc excentré !

Pourquoi avais-tu choisi d’être défenseur ?
J’étais grand et costaud et mon idole de l’époque était Basile Boli. Je suis défenseur central depuis mes débuts !

Ta première fois dans un stade de foot ?
Au LOSC à Grimonprez-Jooris, j’avais 10 ans mais impossible de me souvenir de l’affiche du match !

Ton geste technique préféré ?
Le coup de tête défensif, on ne le voit plus assez à mon goût !

Qualités et défauts sur un terrain, selon toi ?
Qualités : puissance, détente, jeu de tête, leadership, jeu long pied gauche.
Défauts : vitesse d’exécution, vivacité, créativité.

Le club ou l’équipe où tu as pris le plus de plaisir ?
Dunkerque !

Le club où tu as failli signer ?
Il y en a eu deux : le Bayer Lerverkusen (la réserve en D3) en 2005. Le contrat était négocié et au dernier moment ils ont gardé le joueur que je devais remplacer. Et Guingamp, en 2007 pour mon 1er contrat pro à la trêve hivernale. J’ai été appelé par le responsable du recrutement qui m’avait observé pendant 6 mois. Je devais signer après un super essai avec la L2. Mais la grave blessure de l’attaquant David Suarez change leurs priorités car ils devaient verser une indemnité à mon club (j’étais à Lesquin sous contrat fédéral).

Le club où tu aurais rêvé de jouer, dans tes rêves les plus fous ?
Liverpool.

Un stade et un club mythique pour toi ?
Liverpool et Anfield Road !

Un coéquipier marquant (si tu devais n’en citer qu’un, mais tu as droit à 2 ou 3) ?
Je ne peux pas en citer quelques uns, j’en ai trop !

Le coéquipier avec lequel tu avais le meilleur feeling (entente dans le jeu) ?
Frédéric Gaillard à Calais. Grosse complémentarité en charnière centrale.

Le joueur adverse qui t’a le plus impressionné dans ta carrière ?
Sylvain Wiltord.

Une causerie de coach marquante ?
Les causeries de Régis Bogaert à Lesquin.

Une anecdote de vestiaire que tu n’as jamais racontée ?
Ça restera dans le vestiaire !

Les joueurs et les présidents les plus connus de ton répertoire ?
Joueurs ou présidents, j’en ai des très connus mais je ne dis rien !

Un modèle de président ?
Pape Diouf.

Combien de véritables amis dans le foot ?
J’ai de vraies amitiés avec mon parcours, une dizaine.

Combien de cartons rouges ?
3, il me semble.

Des rituels, des tocs (avant un match ou dans la vie de tous les jours) ?
Me regarder dans le miroir avant d’entrer sur le terrain quand je jouais !

Une devise ?
« Contre vents et marées » (la devise de l’USLD) et « Toujours plus haut ».

Un chiffre ?
Le 4, le numéro du vrai « stoppeur ». Mon chiffre à moi.

Un plat, une boisson ?
Le saka saka (plat congolais à base de feuilles de manioc), et un bon Chablis.

Termine la phrase en un mot ou deux : tu étais un défenseur plutôt …
Dur sur l’homme.

Un match de légende pour toi ?
France/Italie en finale de l’Euro 2000.

Un modèle de défenseur ?
Marcel Desailly.

Une idole de jeunesse ?
Desailly, Thuram et Boli.

Ta plus grande fierté ?
Mes enfants.

Tes passions en dehors du foot ?
Ma famille, pas le temps pour une autre passion !

Si tu n’avais pas été footballeur…. qu’aurais-tu aimé faire ?
Avocat.

Le milieu du foot, en deux mots ?
Passionnant et fou.

Dimanche 8 janvier 2023, 32e de finale de la coupe de France : USL Dunkerque (National) – AJ Auxerre (L1) à 18h au stade Marcel-Tribut. 

 

Textes : Anthony BOYER

Photos : USLD

Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06

Le coach de l’Amiens SC (Ligue 2) évoque les difficultés, les caractéristiques et l’évolution de son métier, qu’il a embrassé en 1997 à Louhans-Cuiseaux après une longue carrière de joueur dans son club de coeur, le FC Metz.

L’entraîneur d’Amiens, Philippe Hinschberger, est un enfant de Metz. Unique club fréquenté pendant sa carrière de joueur, le coach de 63 ans a aussi été à la tête de la formation messine comme tacticien, glanant une montée en Ligue 1, en 2016. Mais son parcours ne se conjugue pas qu’en grenat. Grenoble (2018-21), Laval (2007-14), Le Havre (2004-05) ou Niort (2001-04 puis 2005-07), ce sont de nombreuses équipes que le Lorrain, qui a commencé sa carrière de coach à Louhans-Cuiseaux en Division 2, a dirigées, souvent avec réussite. Entretien avec un entraîneur pas tout à fait comme les autres, disponible et sans langue de bois.

Photo Amiens SC

Quand on dit Philippe Hinschberger, souvent, on associe votre nom au FC Metz…
Je suis arrivé à Metz à 15 ans, j’en suis parti à 36 ans. 21 ans dont douze-treize ans en professionnel, puis comme responsable du centre de formation. Et j’y suis revenu après pour les faire monter en Ligue 1, et les maintenir en finissant 14e, comme entraîneur de 2015 à 2017. Ce n’est qu’après que je me suis fait virer à la 10e journée (saison 2017-18), ce n’est qu’à ce moment que ça a été difficile. Mais, oui, c’est mon club. C’est mon club. Je jouais beaucoup contre le FC Metz en jeunes, mon père vient du basket, mais il était sportif avant tout, et plutôt pour le FC Metz.

Et puis il y a Laval également, et forcément, sept saisons de 2007 à 2014, une montée en L2, plusieurs maintiens, deux nominations comme meilleur entraîneur de Ligue 2. Un autre club phare de votre carrière.
Je suis arrivé à Laval après Niort. Ils m’ont appelé, ils venaient de descendre en National un an auparavant, et j’y ai travaillé pendant 7 ans. Avec Philippe Jan comme président, un modèle de relation entraîneur-président, avec du respect, de l’amitié, mais sans jamais partager d’autre chose qu’un verre ou qu’un resto. A mon arrivée, on a mis deux ans pour monter, et puis on s’est maintenus pendant cinq ans. C’est un moment très riche de ma vie, d’autant plus que j’y ai rencontré ma seconde femme, avec qui je suis toujours.

Rester longtemps dans un club, ce n’est pas si fréquent pour un coach. Pourtant, on retrouve ça quasiment à chacun de vos passages…
En général, quand je suis dans un club, j’y suis bien, les gens m’apprécient plutôt, je suis quelqu’un de sympa, d’ouvert, de rond, pas chiant, je reste dans mon rôle. J’ai fait quatre ans à Louhans-Cuiseaux à mes débuts d’entraîneur, cinq ans à Niort (en deux fois ndlr), avec une montée en Ligue 2, où j’ai apprécié la région, et Grenoble, j’y suis resté trois ans, et j’y serais peut-être encore si Amiens n’était pas venu me chercher. J’ai l’habitude de rester assez longtemps dans un club. Pour bien travailler, on a besoin de deux, trois ans. Quand on arrive, le temps de comprendre l’effectif, comment le club marche, la saison est déjà passée. Pour moi, c’est aussi une fierté. Quand vous rester sept ans à Laval, ça veut dire que vous prolongez trois fois. Partout où je suis passé, j’ai prolongé, ça veut dire que les gens ne se lassaient pas de moi. J’en retire une certaine fierté.

Photo Amiens SC

Comment faire pour durer dans un même club et dans un même environnement, se réinventer de saison en saison, pendant aussi longtemps parfois ?
Quand je suis quelque part, je me donne à fond. Déjà, je n’ai pas du tout envie de repartir tout de suite à chaque fois. Je suis aussi passé par des plus petits clubs, où on a moins la pression des premières places, à Laval ou Niort. On est dans la difficulté en tant que coach, c’est vrai, on est toujours dans la machine à laver. Mais quand vous renouvelez un tiers de l’effectif chaque année, ce ne sont pas les mêmes saisons, la 3e année, vous avez changé tout l’effectif. La nouveauté crée aussi de la surprise, de l’émulation, des choses nouvelles. On a besoin de se renouveler en termes d’effectifs, sur les séances d’entraînement. Moi, avec mes adjoints, Francis De Percin à Amiens, je me libère presque complètement avec les années et je fais de moins en moins de séances, les joueurs se disent « tiens c’est quelqu’un d’autre qui dirige ». On évolue aussi. Aujourd’hui, on a aussi des gens autour de nous qui nous permettent de nous renouveler, avec des compétences, quand ce n’est pas toujours vous en première ligne, quand ensuite vous prenez la parole, ça a peut-être un peu plus d’impact.

En tout cas, la méthode a fait ses preuves ! On a évoqué Metz, Laval, Amiens, mais vos lettres de noblesse ont commencé à s’écrire avant ça, à Niort, avec un titre France Football de coach de l’année de L2 en 2003. Et puis il y a Grenoble dernièrement, avec qui vous jouiez la montée…
Niort ce n’est pas compliqué. J’y suis resté trois ans, trois ans pour avoir l’effectif que je voulais. A Grenoble, avec Max Marty qui s’occupait du recrutement, j’avais un groupe de joueurs exceptionnels, que des bons mecs, avec qui on n’a jamais eu d’anicroches, des gars qui pouvaient presque s’auto-gérer. Quand vous avez des Monfray, des Nestor, des Maubleu, Mombris, Ravet, Benet… C’étaient des crèmes. Donc voilà.
Après, comment on se renouvelle, qu’est-ce qu’on fait… Chaque expérience est différente. Regardez à Amiens, l’année passée, saison difficile, vestiaire difficile, on a tout changé, la moitié du vestiaire, on n’a mis que des jeunes, et cette année à la 11e journée on était premiers. Il n’y a pas non plus de mystère, il faut que l’entraîneur puisse avoir les conditions dont il a envie. Moi, je n’aime pas avoir trente joueurs à l’entraînement, je ne suis pas bon. Vous me filez 24 joueurs, je suis meilleur, vous ne vous perdez pas en organisation, en choses qui ne devraient pas exister. L’an passé on avait beaucoup plus de talent que cette année, mais un groupe merdique. Il faut aussi que les planètes soient alignées. Elles l’étaient à Grenoble, sur la dernière année. La réussite, elle s’auto-crée, à vrai dire.

Photo Amiens SC

On se souvient d’une séquence « frissons » dans les vestiaires, en avant-match, lors des play-off d’accession contre le Paris FC (2-0, mai 2018), où l’un de vos adjoints avait apostrophé le groupe avant le combat, enjoignant les « Narvalos » à la chasse : « Allez les Narvalos, en chasse messieurs, bonne chasse ! »…
Oui, c’était Michaël Diaferia (préparateur physique), ça vient d’un stage de préparation, et on avait fait un jeu du loup-garou avec les joueurs, le jeu de rôles. Mika s’est mis cette routine de réunir les joueurs avant le match pour leur dire quelques mots, et on ne sait pas pourquoi, à la suite de cette histoire du loup-garou, c’est parti autour de ça, la meute, les loups, on a faim, on va leur mordre les mollets, et après les « Narvalos », c’est venu sur la fin de la saison, c’est un terme de Grenoble. C’était une super équipe, un groupe exceptionnel. Plus globalement sur ma venue, le GF38 m’avait appelé car ils sortaient de plusieurs années de disette. Je connais la région, Voiron, une très, très belle région. J’étais content que le club fasse appel à moi. On a fini deux fois 9e, et puis la dernière année a été une apothéose… Encore une fois, quand on laisse aux entraîneurs le temps de travailler, il n’y a pas de mystère, on peut faire les choses plus facilement. Aujourd’hui, tous les clubs marchent différemment par rapport à il y a vingt ans.

Quel est votre regard sur l’évolution du football et de la Ligue 2 depuis vos débuts en 1977 ?
L’évolution est énorme. Les clubs, les stades, les joueurs qui y évoluent, c’est extraordinaire, vous regardez les pelouses, certaines sont équivalentes à la Ligue 1, à Amiens on a un billard. On parle de clubs moins « reluisants » comme Pau, Rodez, mais attendez, les attaquants de Pau, on parle de mecs forts. Le spectacle est vraiment au rendez-vous, et il y a tellement de clubs aujourd’hui qui prétendent à monter ou le veulent, les Caen, les Le Havre, les Sochaux, et puis je ne parle même pas de Saint-Etienne, Bordeaux ou Metz. D’ailleurs l’un d’entre eux ne montera pas, mais bon c’est tant pis pour eux, ils n’avaient qu’à pas voter pour un championnat à 18 clubs ! (rires). Quand on voit les effectifs, non, c’est fantastique. Combien de joueurs de Ligue 2 vont grossir les clubs de Ligue 1. Quand vous vous dites qu’un joueur comme Gaëtan Weissbeck, qui est pour moi le meilleur joueur de Ligue 2, est à Sochaux, ça vous donne une idée de la Ligue 2.

Photo Amiens SC

Pour en revenir à vous, vous êtes donc passé de joueur à dirigeant du centre de formation à Metz. Vraiment le parcours d’une autre époque…
On était quatre ou cinq je pense, à avoir fait toute notre carrière dans un seul club, comme Claude Puel, on n’avait pas d’agents, pas de raison de changer. Chez les entraîneurs c’est la même chose, des Guy Roux, des Jean-Claude Suaudeau, c’est fini. Aujourd’hui vous restez quatre-cinq saisons, c’est un miracle. Obligatoirement il y a des coups de moins bien, vous perdez des matches, vous voyez le truc. Quand j’ai arrêté ma carrière de joueur, j’ai été directeur du centre de formation, mais je ne me voyais jamais partir ! Mais quand vous embrassez la carrière d’entraîneur, vous êtes obligés de bouger, si vous voulez trouver du boulot. Mon premier départ de Metz, ça a été un crève-cœur, je ne pensais jamais m’en remettre. Mais aujourd’hui j’ai une maison sur L’île de Ré, j’ai connu Grenoble avec ses montagnes, sa neige et son soleil, je suis allé à Laval, dans l’ouest, alors que je n’avais jamais été plus loin que Troyes, mes enfants sont à Niort et à Poitiers et nés à Metz, c’est une grande richesse je pense.

Avec le recul, maintenant que vous êtes également coach, quel regard portez-vous sur votre carrière de joueur, globalement ?
Incroyable. Je n’étais pas forcément programmé pour être footballeur professionnel, j’ai passé mon bac, j’ai fait une école, des études, j’ai signé pro à 21 ans. La longévité, c’est le fait d’avoir fait chaque année 30-35 matches, d’avoir toujours eu la confiance des coaches, voilà. J’ai fait quelques matches sur le banc jeune, mais après j’étais toujours titulaire, chaque jour de l’année, il fallait être présent, répondre aux exigences du coach, du public, et c’est ça ma grande fierté. J’ai fait presque 500 matches pour le FC Metz, ce qui est quand même énorme. Cette longévité, c’était une autre époque. J’ai commencé à jouer, on était un effectif de quinze joueurs et deux gardiens, j’ai revu une photo d’effectif l’autre jour, avec quatorze joueurs pour la saison (rires) ! A Metz, on était un effectif, allez, de vingt, avec dix-huit Lorrains. C’était une autre mentalité, un autre jeu. Quand j’ai commencé, notre entraîneur, c’était Marcel Husson, l’entraîneur adjoint c’était René Moura, lui était prof de sport au lycée sport études, et donc il n’était pas là tous les jours là, car il avait cours, et notre entraîneur des gardiens, il travaillait à la boucherie du supermarché, non, mais je ne déconne pas ! Quand je vous dis que ça a évolué… Quand on jouait contre le Paris Saint-Germain, on s’échauffait à Metz, vous n’avez pas connu, mais sur le terrain rouge, en schiste, car les terrains étaient fragiles, on n’avait pas le droit avant le match. Quand on jouait contre Marseille avec Jean-Pierre Papin ou Chris Waddle, non mais écoutez-moi, j’allais taper une bise à mes parents qui étaient au bord de la courante, pendant l’échauffement, entre deux passes ! Les gens étaient sur le terrain, pas de sécurité, ils nous parlaient, ils nous regardaient, aujourd’hui ce ne serait pas possible. On est trop cons dans le foot !

Rassurez-moi, vous prenez encore du plaisir dans le football, même sans ce charme-là ?!
La carrière de joueur, c’était vraiment un grand plaisir. Celle d’entraîneur, c’est dur. Il faut une passion de tous les jours, avoir la foi, le feu, l’étincelle, la moelle à transmettre à vos joueurs quand vous avez perdu plusieurs matches. Ce métier est très sympa quand on gagne, mais il est horrible quand vous perdez. Horrible. Horrible. Tout le monde donne son avis, le machin, le bidule, le joueur qui tire la gueule, il faut savoir se détacher tous les matins de la victoire comme de la défaite, mais dès fois, ce métier, ce n’est pas possible. Les gens qui expliquent comment faire jouer l’équipe, alors que pas un seul n’est entraîneur; et alors, ils ne veulent pas passer le diplôme ?! Bosser les samedis, les dimanches, rentrer tard le soir ? Par contre ils veulent bien votre salaire !

Philippe Hinschberger, du tac au tac – le joueur

Photo Amiens SC

Quel est le meilleur souvenir de votre carrière de joueur ?
Il y en a beaucoup, mais forcément, la coupe de France 1988 avec Metz, qu’on remporte contre Sochaux aux pénaltys, avec le péno de Madar, et où j’étais capitaine.

Votre pire souvenir ?
Il y a un 9-2 encaissé à Saint-Etienne, pour le dernier match de Michel Platini avec les Verts. Mais il y a aussi deux 7-0 contre Monaco, là-bas et à Saint-Symphorien (Metz), bizarrement en tant que joueur, puis comme entraîneur plusieurs années après… Ce n’est quand même pas commun, je ne suis pas sûr que cela soit déjà arrivé à quelqu’un d’autre !

Joueur le plus fort affronté ?
Alors il y en a pas mal, j’ai joué le Marseille de Waddle, Papin… Mais sans aucun doute, Georges Weah, il était impressionnant, très impressionnant.

Le coéquipier le plus fort fréquenté ?
Bernard Zénier, meilleur buteur avec 17 ou 18 buts en 1987, pendant longtemps le plus petit total pour un meilleur buteur. Il était très fort, un sens du jeu et du but énormes.

Le coéquipier perdu de vue que vous aimeriez revoir ?
Il y en a plusieurs, pas forcément un en particulier, c’est plus un groupe, la bande de l’épopée de 1988 avec Metz. Michel Ettorre, Frédéric Pons, Jean-Louis Zanon… Toute la clique de 88 ! Carlos Lopez, Vincent Bracigliano…

Un président marquant ?
Carlo Molinari, un deuxième père pour moi, un père sportif.

Un entraîneur marquant ?
Chaque entraîneur. Mais il y a ceux qui donnent une direction, comme Marcel Husson, le coach de la coupe de France 88. Il y a Joël Müller aussi.

Un souvenir de causerie mémorable ?
Les plus remarquables étaient celles d’Henryk Kasperczak. Henri était Polonais ne parlait pas très bien français, donc il donnait des consignes avec son accent, on éclatait de rire, il ne comprenait pas pourquoi. Un jour il a dit « aujourd’hui il faut jouer comme monolithe », on s’est dit « mais putain qu’est-ce qu’il raconte ? », il a sorti « Pourquoi vous rire, pourquoi vous rire ?? ». Quelqu’un a regardé dans un dico, en polonais monolithe veut dire bloc, il voulait dire qu’on devait jouer en bloc. On était explosés de rire, mais ce n’était jamais méchant, il ne maîtrisait juste pas la langue.

Le club où vous avez failli signer ?
Aucun. Nantes s’était renseigné plusieurs fois sur moi je crois, mais non, pas du tout, il n’y a pas de club où j’aurais pu signer.

Un stade marquant dans votre carrière ?
Il y a Saint-Symphorien à Metz, logiquement, mon stade de cœur. J’ai vu son évolution depuis toutes ces années, les tribunes construites ou reconstruites. Et puis même si j’adore Le Parc des Princes, il y a Le Vélodrome. C’est un stade, woaw, il y a une ambiance avec ces 60 000 personnes.

Du tac au tac – L’entraîneur

Votre meilleur souvenir en tant que coach ?
La montée en Ligue 1 avec Metz, à Lens en 2016, alors que j’avais 57 ans. Mais c’est aussi mon pire souvenir ! Car sur ce match je fais un mini-ulcère, avec des ennuis gastriques les jours suivants.

Le meilleur joueur entraîné ?
Sans hésitation Robert Pires quand j’étais au centre de formation de Metz, il arrivait de Reims. Et aussi Romain Hamouma.

Un collègue entraîneur qui vous a impressionné ?
C’est plus une idée, mais j’ai toujours été impressionné par ces coaches qui s’adaptent à mon équipe. Je ne sais pas faire ça personnellement, mais voilà, un entraîneur adverse qui arrive et sait changer son système pour contrer son adversaire, ça m’impressionne. C’est aussi quelque part une fierté, qu’un autre change ses plans pour me contrer.

Un modèle de coach ?
Le Lorient de Christian Gourcuff, en 4-4-2.

Quelle est votre philosophie de jeu ?
Un jeu à une touche au sol, basé sur un jeu de passes, avec une philosophie offensive.

Le match où tout a roulé pour vous (performance, consignes, plan de jeu…) ?
Il y a plusieurs matches où il y a eu l’aboutissement de ce qu’on veut faire. Peut-être Laval-Beauvais il y a plusieurs années. On perd 3-0 au bout de 20 minutes, je fais plusieurs changements avant la mi-temps. En seconde mi-temps, tout se passe bien, on gagne 4-3 avec un dernier but à la 94e minute.

Vous êtes un coach plutôt ?…
Posé, avec de l’expérience maintenant.

Vos passions en-dehors du foot ?!
La guitare, que je pratique depuis que j’ai 15 ans. La musique et la guitare c’est une des passions de ma vie. Je la sors quand je fais des soirées entre potes, je joue et je chante, un répertoire français principalement, du Francis Cabrel, etc… Et puis j’aime la cuisine aussi, les bonnes choses, le pinard, les planchas en été. Alors attention, je cuisine des choses simples, sans prétention.

Texte : Clément Maillard / Mail : contact@13heuresfoot.fr / Twitter : @MaillardOZD

Photos : Amiens SC

Après 24 ans à Schiltigheim, l’ancien pro du RC Strasbourg a posé ses valises en 2016 à Colmar, après le dépôt de bilan. Depuis, l’Alsacien a redoré l’image du club qui est passé de Régional 2 à National 2 sous sa direction. Cette saison, il a laissé les commandes à Arnaud Bey pour se consacrer à un rôle de manager général.

Photo Jean-Marc Hedoin

Après avoir tout connu sous les couleurs de Schiltigheim, José Guerra (58 ans), l’un des coachs les plus connus (et reconnus) en Alsace prend désormais une part prépondérante dans la reconstruction du défunt Sports Réunis Colmar, qui revient peu à peu sur l’échiquier du football national sous le nom – et avec les mêmes initiales ! – de Stadium Racing Colmar depuis 2016.

Avant de devenir le nouvel homme fort du secteur sportif de Colmar, José Guerra n’avait connu qu’un seul banc, celui du SC Schiltigheim. Une aventure sportive, mais surtout une aventure humaine qui aura duré plus de 24 ans du coté du stade de l’AAR.

Arrivée sur la pointe des pieds en Avril 1995 pour mettre un terme à sa carrière de joueur professionnel et entamer une reconversion de cadre commercial, il n’imaginait surement pas le destin qui allait être le sien dans la banlieue de Strasbourg.

Valeurs et développement humain

Photo Jean-Marc Hedoin

José Guerra est un homme de caractère mais c’est surtout un homme de parole, un homme fidèle qui aura construit lui-même sa réussite personnelle et sportive à force de travail et de pugnacité.

Avant de signer son premier contrat de joueur professionnel à 26 ans au Racing Club de Strasbourg, José Guerra a connu l’usine dès l’âge de 16 ans.
Il n’a pas hésité aussi à retourner sur les bancs de l’école à 29 ans pour valider ses acquis et pouvoir emprunter une belle et longue carrière de cadre commercial au Grand moulin de Strasbourg.

Ce parcours tumultueux lui a beaucoup servi dans sa carrière de coach. Un coach qui se définit comme « très paternaliste » et qui « attache énormément d’importance aux valeurs et au développement humain ».

José Guerra a autant de bonheur à raconter ses exploits footballistiques qu’à expliquer les parcours professionnels qu’il a pu faire vivre à ses joueurs : « Gregory Spiewak, je suis allé le chercher à la sortie du centre de formation de Strasbourg, il ne savait pas ce qu’il allait faire de sa vie, nous avons cherché des solutions ensemble et nous l’avons fait rentrer dans un garage comme mécanicien. Aujourd’hui il est toujours dans ce garage et il a été de nombreuses années un joueur très important de mon effectif »

Un exemple qui en dit long. Si José Guerra peut paraître sévère et dur sur son banc de touche, c’est avant tout un coach qui fait passer l’humain avant tout. « Aujourd’hui je peux croiser n’importe quel joueur que j’ai eu sous mes ordres, aucun ne me tournera le dos, même ceux que j’ai eus pendant des périodes compliquées et ça, c’est la plus belle des récompenses ».

« En 2002/2003, j’avais des hommes ordinaires qui ont fait des choses extraordinaires »

Photo Ligue du Grand Est de Football

24 ans au club de Schiltigheim, forcément ça marque. Qu’en gardez-vous aujourd’hui ?

Je suis arrivé à Schiltigheim après une saison en D2 à La Roche-sur-Yon. J’avais signé pour 3 ans là-bas mais au bout d’une saison, j’ai décidé de revenir en Alsace et de me consacrer à mon après-carrière. Schiltigheim m’a offert cette opportunité par l’intermédiaire de Jacky Duguépéroux. Je suis arrivé en 1995, j’ai été joueur, capitaine puis coach adjoint en 1998 et ensuite entraineur/joueur. J’ai vraiment débuté en tant que coach principal lors de la saison 2001/2002. J’ai été lancé dans le grand bain et ce fut une vraie découverte. La saison a été très compliquée mais j’ai énormément appris.

Vous avez appris rapidement car l’année suivante vous réalisez une saison exceptionnelle…
Oui cette première saison m’a beaucoup apporté surtout dans la gestion des hommes. La saison suivante, j’ai pu construire mon effectif en fonction de mes convictions et des valeurs des hommes avec lesquels j’avais envie de travailler. La saison 2002/2003 a été exceptionnelle avec cette accession en CFA et ce magnifique parcours en coupe de France où nous éliminons deux équipes de Ligue 2 (Beauvais et Troyes) et une équipe de L1 (Toulouse) alors que nous étions en CFA2 ! J’ai gardé l’équipe en CFA jusqu’en 2007 puis j’ai souhaité prendre du recul. Malheureusement lors des deux saisons suivantes, le club pour diverses raisons a été relégué et s’est retrouvé en DH. Après deux saisons d’arrêt, j’ai donc repris le club en DH. La première saison, nous échouons à une place de l’accession mais nous avons fait notre retour en CFA2 l’année suivante au terme d’une saison très aboutie. Après 7 saisons en CFA2, j’ai laissé ma place à Stéphane Crucet lors de l’accession en National 2 en 2017. Je devais rester, à un poste de manager général, mais rapidement, je n’étais plus en phase avec les décisions des dirigeants donc j’ai préféré m’effacer.

Après cette très longue aventure à Schiltigheim, vous vous retrouvez à Colmar : comment ça s’est passé ?

Alors déjà, il faut savoir que je m’étais dit que je n’entraînerais pas à 20 kilomètres au-delà de Strasbourg car j’ai des obligations professionnelles assez importantes. En Novembre 2017, le club de Colmar enchaînait une seconde saison en Régional 2 avec des résultats décevants et je suis contacté dans un premier temps par le service des sports de la Mairie. Rapidement, je rencontre le président Guy Meyer qui avait repris le club après le dépôt de bilan de 2016 (Colmar a évolué en National de 2010 à 2016 avant de repartir au niveau départemental, Ndlr). On se met d’accord pour que je prenne le rôle de Manager général pendant six mois afin de mener un audit complet du club. A la fin de ces six mois, à l’été 2018, j’ai donc présenté au président un projet sur trois ans avec certaines conditions.

Quelles étaient ces conditions ?

Je voulais venir avec un adjoint qui soit employé à plein temps au club pour avoir également un rôle de coordinateur des équipes de jeunes. Lorsque j’étais à Schiltigheim, j’avais reçu le CV d’Arnaud Bey que je ne connaissais pas du tout mais qui avait un parcours très intéressant. Quand le projet Colmar s’est présenté je l’ai contacté et après dix minutes d’échanges téléphoniques, nous avons décidé de travailler ensemble. Dans les conditions aussi, je voulais gérer moi-même le budget qui allait m’être alloué pour l’équipe première.

« Un dépôt de bilan,  c’est dévastateur pour un club »

Photo Stadium Racing Colmar

La tâche devait être compliquée qui plus est dans un club historique comme Colmar où l’attente doit-être importante ?
Un dépôt de bilan, c’est dévastateur pour un club. Vous repartez de zéro, beaucoup d’éducateurs et de joueurs des années National 1 n’étaient plus là. Franchement, je me suis dit… « Tu vas avoir du boulot ». D’autant plus que, effectivement, l’attente est très importante à Colmar et les gens sont très exigeants, voire très dur parfois.

Malgré l’ampleur de la tâche, la première saison est réussie…
Oui, alors la première saison en R2, nous sommes montés assez facilement. Je me suis appuyé sur des jeunes du club et plusieurs joueurs que j’avais eus à Schilik’ n’ont pas hésité à me suivre, à l’image de Yannick Imbs. J’ai également eu la chance de pouvoir m’appuyer sur des joueurs d’expérience comme l’ancien pro Romain Gasmi qui revenait de Thaïlande et Loïc Meyer qui avait connu le National pendant 5 saisons à Colmar avant de partir 2 ans à Epinal suite au dépôt de bilan. Mais au-delà de l’accession de l’équipe fanion en Régional 1, il était important aussi de restructurer le club à tous les niveaux.

Vous enchaînez ensuite avec une nouvelle accession en National 3…
Après cette montée en R1, nous réalisons un bon de début de saison et quand les championnats s’arrêtent pour cause de Covid, nous sommes leaders donc nous accédons directement au National 3. La saison suivante a été vite arrêtée avec la pandémie.

N’avez-vous pas eu peur justement que cette période Covid casse la belle dynamique que vous aviez enclenchée ?
Pour notre retour en N3, le championnat est arrêté au bout de 7 journées mais je n’étais pas du tout satisfait ce que nous proposions. J’ai donc profité de cet arrêt pour faire une remise en question total sur mon fonctionnement et notamment mon approche tactique. Tous les week-ends de cette période Covid, nous nous sommes entrainés le samedi matin et le dimanche matin. Chaque week-end, j’organisais une opposition pour travailler inlassablement un nouveau dispositif tactique. J’ai beaucoup changé ma façon de jouer pour passer en 3-4-3 et nous l’avons énormément rodé pendant cette période.

Le travail a porté ces fruits avec une saison dernière exceptionnelle et une accession en National 2.
Effectivement, la saison a été exceptionnelle, nous sommes restés invaincus pendant 22 journées et nous avons décroché notre accession rapidement.

« Quand je suis arrivé à Colmar, on m’a dit « On veut vite rejouer le vendredi soir » ! »

Photo Stadium Racing Colmar

Après cette accession, de nombreux observateurs ont été très surpris de vous voir quitter votre poste d’entraineur. Quelle en a été la raison ?
La raison elle est très simple. Je suis un homme de parole et j’avais fait un deal avec Arnaud Bey lorsque nous sommes arrivés à la tête de l’équipe en 2018. Je lui avais promis que je lui laisserais l’équipe quand je le sentirais prêt. L’été dernier, après l’accession en N2, l’objectif était de monter un effectif capable de jouer la montée en N1. Si j’étais resté à la tête de l’équipe et si nous étions montés en National 1, je n’aurais pas pu respecter ma parole car Arnaud BEY a le diplôme pour entraîner en National 2 mais pas en National 1. Aujourd’hui, je reste malgré tout très proche de lui en ayant un rôle de manager général du club.

Aujourd’hui, quasiment à mi-saison, quel regard portez-vous sur le parcours de votre équipe ?
Pour plusieurs raisons nous n’avons pas pu constituer l’effectif que nous aurions souhaité. Le club de Colmar par l’intermédiaire de ses nouveaux dirigeants a appris de ses erreurs. On ne dépense pas l’argent que l’on a pas.
Ensuite, notre recrue phare de l’inter-saison, Ibou Faye, s’est gravement blessé dès le premier match amical.
A cela s’ajoute plusieurs blessures qui fait qu’aujourd’hui tous nos attaquants (Pape Ibou Kebe, Abdelhak Belahmeur, Lenny Stoltz) sont sur le flan. Il faut également prendre en compte que sur les 11 premiers matchs, nous n’en avons joué que 4 à domicile. C’est plusieurs facteurs qui font que le début de saison est compliqué dans un championnat très exigeant.

Quel est donc l’objectif fixé par le club ?
L’urgence immédiate c’est d’assurer notre maintien. Nous sommes tous focus sur le maintien mais nous avons des joueurs qui ne sont pas forcément conditionnés pour ça car la plupart était avec moi depuis la R2/R1. Il faut donc vraiment jouer sur cet aspect psychologique mais je suis plutôt confiant car nous avons un staff et un groupe de joueurs de qualité.

Sur le long terme, l’objectif est quand même de retrouver le National ?
Quand je suis arrivé, alors que le club était en R2, on m’a dit « On veut vite rejouer le vendredi soir… » Sous entendu, on veut vite retrouver le National. Mais je pense qu’il faut déjà savoir apprécier à sa juste valeur et digérer nos trois montées consécutives. Le club doit rester souder et continuer à se structurer à tous les niveaux. Il y a un vrai beau projet ici à Colmar.

José Guerra du tac au tac

Schiltigheim, Colmar : vous entrainez que les équipes qui jouent en vert ?
Oui… (Rire), le vert, c’est la couleur de l’espoir.

Retrouver José Guerra coach principal sur un banc, c’est possible ?
Pourquoi pas…

Meilleur souvenir de joueur ?
La montée en Ligue 1 avec le Racing Club de Strasbourg en 1991/1992.

Meilleur souvenir de coach ?
La saison 2002/2003 avec Schiltigheim. C’était ma seconde saison en tant que coach et nous réalisons une saison exceptionnelle. Montée en CFA et ¼ de finale de coupe de France dans un stade de la Meinau plein à craquer. Cumuler accession et épopée en coupe de France la même année c’est très rare.

Pire souvenir de coach ?
Une défaite au 7e tour de coupe de France avec Schiltigheim (CFA) 7-0 à domicile contre le club de Tampon (DH Réunion). Celle là on ne l’avait pas vu venir. Elle nous avait fait très mal.

L’équipe où vous avez pris le plus de plaisir à entraîner ?
J’ai pris du plaisir dans toutes les équipes que j’ai dirigées.

Le joueur le plus fort que vous ayez eu sous vos ordres ?
Stéphane Le Marchand à Schiltigheim. C’était un ancien joueur pro qui était dans la région de Strasbourg car il travaillait chez Adidas. Je vais le faire signer chez lui, dans son appartement, le dernier jour où il était encore possible de faire une licence. Un très bon joueur qui a grandement participé à l’aventure en coupe de France de 2002/2003.

Un joueur coup de coeur ?
Je vais faire des jaloux… (Rires). Cédric Hoffmann… Il fait partie de la famille. C’est mon fils spirituel !

Votre plus grosse colère ?
Il y en a eu beaucoup donc je n’en retiens pas une en particulier. Une colère, en tant que coach, c’est avant tout stratégique. C’est pour faire réagir les joueurs.

Votre style, c’est plutôt Guardiola ou Mourinho ?
Je dirais ni l’un ni l’autre. Je ne suis pas adepte de la possession pour la possession. J’aime bien avoir le ballon mais j’aime bien aussi trouver de la verticalité quand il le faut.

Qui va gagner la coupe du Monde ?
Je dirais la France ou le Portugal. Mon cœur balance car je suis né au Portugal (entretien réalisé la veille des ¼ de finale, Ndlr).

Texte : Aurélien Triboulet / Mail : contact@13heuresfoot.fr / Twitter : @Aurelref

Photo de couverture : Ligue du Grand Est de Football

Photos : Jean-Marc Hedoin, Ligue du Grand Est de Football et Stadium Racing Colmar.

EXCLU – Pour la première fois depuis qu’il a été écarté de son poste d’entraîneur de Châteauroux (National) le 29 novembre dernier, Mathieu Chabert s’exprime ! Et il a choisi 13heuresFoot pour dire ce qu’il a sur le coeur.

Photo Philippe Le Brech

« Je ne suis pas un entraîneur classique. Je boite, je suis tatoué et je viens presque de nulle part… » nous disait Mathieu Chabert en 2019 lorsqu’il entraînait encore Béziers, le club de sa ville, qu’il avait emmené jusqu’en Ligue 2. Après avoir vu sa carrière pro brisée par une tumeur à la moelle épinière, il s’est lancé dans le coaching tout en devenant conseiller à Pole-Emploi. Un parcours atypique qui lui a donné « une certaine hauteur sur les événements. »

Après Béziers, Mathieu Chabert a participé à la reconstruction du Sporting-club de Bastia avec deux montées en deux ans, en National (2020) puis en L2 (2021). Ecarté de son poste en septembre 2021, il a ensuite rejoint Châteauroux (National). Mais le 29 novembre dernier, au lendemain d’une défaite (0-3) à domicile contre Le Mans, les dirigeants de la Berrichonne ont choisi de se séparer du coach âgé de 44 ans.

Après avoir réglé les modalités de cette séparation et juste avant de s’envoler pour retrouver sa famille en Corse, Mathieu a choisi 13heuresFoot pour s’exprimer en exclusivité pour la première fois depuis son départ de La Berri.

« C’est dans ces moments-là qu’on apprend le plus »

Photo Philippe Le Brech

Quel est votre sentiment après ce départ de Châteauroux ?
Je suis déçu car ce ne sont jamais des moments très agréables à vivre. Mais je ne suis pas aigri. Je n’en veux à personne. Je pars en bon termes avec le groupe United, Michel Denisot (président), Patrick Trotignon (directeur général), Julien Cordonnier (directeur sportif). On a essayé de trouver des solutions jusqu’au bout.

Après trois montées en quatre saisons avec Béziers et Bastia, c’est votre deuxième limogeage en quatorze mois. Comment le vivez-vous ?
Ce qui s’est passé à Bastia, je ne le considère pas comme un échec. On va donc dire que Châteauroux, c’est le premier échec de ma carrière car on n’a pas atteint les objectifs fixés. Mais c’est dans ces moments-là que tu apprends le plus. Châteauroux, c’est une bonne expérience qui me servira à être encore meilleur dans certaines situations futures. Je pense avoir été dans le vrai mais j’aurais pu faire encore mieux. Il y a une expression qui dit « soit je gagne, soit j’apprends ». Donc, j’ai appris… Je n’ai que quelques années d’expérience en Ligue 2 et National. J’espère donc être comme le bon vin en me bonifiant avec le temps.

Photo Philippe Le Brech

Pensez-vous avoir commis des erreurs ?
La première, c’est déjà de ne pas avoir effectué une pause plus longue entre Bastia et Châteauroux. Je n’ai pas pris le temps qu’il fallait pour digérer mon départ de Bastia. Mais c’est la première fois que cela m’arrivait d’être limogé. J’ai eu peur de ne rien trouver et je me suis un peu affolé… Ça a été trop vite. Après, pour un jeune entraîneur comme moi, c’est difficile de refuser la proposition d’un club comme la Berrichonne de Châteauroux. Un jour avant, le Red Star m’avait aussi appelé. Tout ça, ça s’est fait dans la précipitation. C’était une erreur de ma part.

A votre arrivée, vous avez appelé votre ami Karim Mokeddem comme adjoint. Pourtant, les choses ne se sont pas très bien terminées avec lui…
Je regrette vraiment d’être un peu brouillé maintenant avec Karim… Quand j’ai signé, j’ai eu un ou deux jours pour choisir un adjoint. Comme on en avait discuté tous les deux un peu avant, j’ai choisi Karim. Avec le recul, j’ai compris que je n’étais pas forcément prêt à replonger tout de suite. Je savais que Karim allait m’épauler et me soulager, ça été le cas. Mais j’aurais dû prendre le temps de mieux cadrer tout ça avant qu’on ne commence à travailler ensemble. J’étais trop éloigné du groupe, j’ai laissé beaucoup de place à Karim, qui a pris le relais, au point de ne pas trouver la mienne. Mais ce n’est pas de la faute de Karim, c’est de la mienne. J’ai beaucoup appris à ses côtés comme avec Maxence (Flachez, son adjoint cette saison qui a pris sa succession). J’ai eu zéro souci avec Maxence qui est un mec au top humainement. J’espère qu’il aura l’opportunité de continuer comme numéro 1 et qu’il réussira.

Photo Philippe Le Brech

On a évoqué la saison dernière. Mais depuis le mois d’août, Châteauroux n’a jamais décollé non plus…
Sur cette saison, je n’ai aucun regret. Je me suis investi à 2000 %. C’est durant cette période où j’ai pris conscience de beaucoup choses qui sont nécessaires pour être un entraîneur de haut-niveau. Mais ça n’a pas marché.

Pour quelles raisons ?
Je pense que le projet de jeu était cohérent. Mais on ne concluait pas nos actions. Il nous a manqué l’efficacité dans les deux surfaces. Aux « expected goals » (pourcentage de chances qu’une occasion se termine en but), on était pas loin de la tête. Je sais, c’est virtuel mais sur une saison, ça joue… Après, je suis d’accord. Si on n’a pas eu les points qu’on aurait dû avoir, c’est qu’il nous manquait quand même quelque chose.

Avec le maillot de l’AS Béziers. Photo Philippe Le Brech

Un buteur peut-être ?… De l’extérieur, le choix de vendre votre meilleur buteur Thomas Robinet à un concurrent direct (Nancy via Ostende) semble difficilement compréhensible…
C’était une volonté de dégraisser l’effectif. On a perdu beaucoup de joueurs, ce qui était un désir. Mais peut-être qu’on en a perdu trop… Mais j’ai validé ça. C’était un choix du groupe United, du club et je le savais dès le départ. Je devais faire avec ce que j’avais. A partir du moment où je l’ai accepté, je ne peux pas me plaindre après.

On a aussi l’impression que Châteauroux a souvent raté les matchs importants qui lui auraient permis de basculer sur le podium. Comment l’expliquez-vous ?
C’est difficile à dire. Mais c’est la réalité. On n’a jamais réussi à enchainer une série. Il a manqué ce déclic qui nous aurait permis de basculer et de rester durablement sur le podium. J’ai un match en tête. En décembre 2021, on est sur trois victoires consécutives et on va à Annecy qui est juste devant nous. On fait 0-0 ce qui n’est pas un mauvais résultat sur le fond. Mais on a eu une énorme occasion avec Thibaut Vargas. Si on marque, on gagne, on passe devant Annecy et on est sur le podium à la trêve. Je pense que si on avait gagné là-bas, c’est nous qui serions en L2 aujourd’hui.

Avec le maillot du SC Bastia. Photo Philippe Le Brech

Le style Mathieu Chabert, c’est aussi une communication souvent sans filtre. A Châteauroux, certaines de vos déclarations ont parfois été mal comprises par l’environnement …
On ne peut pas me reprocher de ne pas être resté moi-même. Mais ce qui s’est passé va aussi me servir de leçon. La communication externe , c’est l’un des secteurs où je dois peut-être évoluer. Ça fait partie des choses où j’ai beaucoup appris. Je ne vais pas me renier, je ne suis pas du style à faire de la langue de bois mais peut-être que parfois, je dois arriver à dire les choses différemment. J’ai compris qu’on doit adapter sa communication au club où l’on est.

Avec le maillot du SC Bastia. Photo Philippe Le Brech

Quel est votre programme pour les prochaines semaines. N’avez-vous pas peur de ressentir un vide, un manque ?
Déjà passer les fêtes de fin d’année en famille ! Ensuite, me reposer. Cela fait 18 ans que j’entraîne et je n’ai jamais eu plus d’un mois de repos. Après, j’irai visiter des clubs. Je vais aller voir comment Lens travaille, comment Nice travaille, comment Toulouse travaille, comment Concarneau travaille. J’ai eu Stéphane Le Mignan (entraîneur de Concarneau) au téléphone. Je suis admiratif de ce qu’il fait. Chaque année, on le dépouille de ses meilleurs éléments. Mais il arrive toujours à mettre en place un vrai projet de jeu. Je vais aller voir où ça gagne; ça va me permettre de me perfectionner pour progresser et évoluer.

Cela veut-dire que vous n’allez pas vous remettre immédiatement sur le marché ?
Non, je ne commettrai pas la même erreur qu’après Bastia. Sauf si je me sens prêt et qu’un projet que l’on ne peut pas refuser se présente à moi, je ne replongerai pas… Il y a donc plus de chance qu’on me revoit la saison prochaine.

Propos recueillis par Laurent PRUNETA / Mail : lpruneta@13heuresfoot.fr / Twitter : @PrunetaLaurent

Photos : Philippe Le Brech