Promu en National 3, le club de la Drôme, qui a subi deux dépôts de bilan en 2005 et 2014 avant de devenir l’Olympique de Valence, s’est reconstruit autour d’une nouvelle équipe et d’un homme, Malik Vivant, chantre de l’éducation, de la jeunesse, de la formation et de la mixité.

Après la victoire 4 à 0 contre Velay FC, le 26 mai dernier, qui a scellé l’accession en National 3 de son équipe à une journée du terme, le téléphone de Malik Vivant n’a pas arrêté de sonner. Et ça a bien duré une semaine, le manège !

Bon, si vous voulez contacter le coach de l’Olympique de Valence, ce n’est pas bien compliqué : il suffit de se rendre sur le site officiel du club et de cliquer sur l’onglet « Régional 1 » et hop, le tour est joué : son 06 s’affiche en grand ! On n’ose même pas imaginer ce qu’il adviendrait si le club évoluait en pro : sans doute lui faudrait-il un secrétaire particulier !

« C’est vrai que la semaine qui a suivi la montée en National 3, je me suis retrouvé avec beaucoup d’appels et il a fallu filtrer, car je ne pouvais pas répondre à tout le monde, et en plus, on a eu plein de réunions, plein de dossiers administratifs à remplir » raconte l’homme du renouveau valentinois.

Les belles heures et les heures… sombres

Malik Vivant, le coach de l’Olympique de Valence.

Né dans le quartier de Valensolles, au sud de Valence, aux portes du soleil, comme on dit, Malik Vivant a tout vu dans la préfecture de la Drôme. Tout connu. Tout lu. Tout entendu. Tout vécu. Les belles heures. Les heures plus sombres.

Les belles heures, comme celles des années 80 et 90, quand la ville s’appuyait tout d’abord sur deux clubs pour rayonner. Une situation qui a duré jusqu’en 1992 avec la fusion du FC Valence (D3 et une saison en D2 lors en 1984-1985), et l’USJOA Valence (Union sportive de la jeunesse d’origine arménienne, D3 et accession en D2 en 1992), pour donner naissance à l’ASOA Valence.

C’était les années fastes. Avant celles, moins glorieuses, du milieu des années 2000 : deux rétrogradations en National (2000 et 2004) et nouvelle accession en 2005 en Ligue 2… refusée par la DNCG ! La fin du foot de haut niveau à Valence. Après un incroyable imbroglio juridique, l’ASOAV dépose le bilan. Retour en Division d’Honneur et création d’une nouvelle entité avec l’AS Valence, qui grimpera les échelons (accession en CFA2 en 2009 puis en CFA, l’équivalent du National 2, en 2011) avant un nouveau dépôt de bilan, en 2014… Cette fois, la chute est encore plus grande : c’est la Promotion d’Honneur qui attend les « Rouge et blanc ».

Didier Notheaux, le précurseur

De cette époque, le professeur agrégé d’éducation physique – son « vrai » métier -, au lycée Algoud-Laffemas, retient « les derbys entre le FC Valence et l’USJOA ! J’étais jeune ! Après, il y a eu Pierre Ferrazzi qui a structuré tout ça pour que ça monte en D2, et puis l’ère Didier Notheaux : lui, il fut un des précurseurs du jeu en zone. Il a apporté de la modernité dans le football ».

Le passé, c’est bien, mais Malik Vivant a un avis tranché sur cette période des années 80/90 : « Moi, je ne vis pas dans le passé. Je dis souvent aux gens, »Venez au stade », à tous les niveaux vous pouvez avoir une équipe qui mouille le maillot, qui produit du beau football, qui met de l’énergie… Vivre avec le passé, ça ne fait pas grandir un club, mais s’en souvenir, c’est bien. A l’Olympique de Valence, on a de belles pages à écrire et je préfère me projeter sur ça. »
Voilà pour le volet « historique ».

Mixité et formation

L’Olympique de Valence, le jour du match de la montée.

Pour beaucoup, si Valence a retrouvé, voilà quelques jours, le niveau « national », fut-il le 5e échelon, la ville et le club le doivent en partie à Malik.

Le coach – depuis 2016 – de l’OV, âgé de 49 ans, a permis de gravir trois marches en sept ans, depuis sa prise de fonction.

Surtout, il a relancé le ballon rond dans une ville où le rugby commençait à prendre beaucoup de place (avec Valence-Romans, qui retrouve la Pro D2). Il a structuré le nouveau club crée en 2014 au moment du dépôt de bilan de l’AS Valence et proposé un projet basé sur la formation et la mixité. Il ne pouvait, de toute façon, en être autrement.

De son enfance dans les quartiers, il en tire aussi une grande fierté et s’en sert au quotidien : « Etre né dans le quartier de Valensolles, et d’y avoir grandi, c’est une richesse que m’ont donné mes parents et dont je me nourris. Ce quartier a une belle mixité sociale, dans le sens noble du terme. Il regroupe 2 000 habitants et c’est là où, dans les années 60, il y a eu les premiers immeubles et où une association de quartier a été fondée et s’est ensuite bien développée. J’ai commencé le foot à Valensolles, qui jouissait d’une belle réputation en matière de formation et où il y avait de belles équipes de jeunes. »

Directeur sportif à l’AS Valence

L’homme idoine du football valentinois, qu’il connaît sur le bout des crampons, n’a fait que de courtes infidélités à sa ville, et pour la bonne cause ! « Je suis parti en sports-études au lycée Daudet à Nîmes puis j’ai intégré le centre de formation du Nîmes Olympique à l’époque de Pierre Barlaguet, Gérard Bernardet et René Girard. J’ai effectué ma formation là-bas, c’était durant la saison 91/92, quand Laurent Blanc et Eric Cantona y jouaient en Division 1 ! Je ne suis resté qu’un an, et ensuite, je suis revenu en 1992 au moment de la fusion entre l’USJOA et le FC Valence, pour jouer en CFA2 à l’ASOA Valence. Puis je suis allé à Villefranche-sur-Saône en CFA (1997) pour me rapprocher de Lyon où je faisais mes études de Staps. Enfin, j’ai joué au SC Abbeville en Picardie (1998) car j’ai été muté à Amiens nord, dans les quartiers sensibles, pour mon premier poste de prof ! Enfin, je suis revenu à Montélimar puis Valence. »

Voilà pour le CV sportif du Valentinois qui, avant son retour à la naissance de l’OV en 2014, était encore directeur sportif de l’AS Valence deux ans plus tôt, en CFA : « J’ai démissionné deux ans avant que ça ne coule… A la création de l’OV, on s’est servi de nos structures de formation que l’on avait mises en place avec Jean-Marie Vergnes, l’ancien président. Repartir en PHR, ça avait fait mal… Et avec une seule montée chaque saison, ça a rendu les choses difficiles, longues. Quand Jean-Marie (Vergnes) a repris le club en 2014, il n’y avait plus rien. Il a fallu tout reconstruire. Aujourd’hui, Alain Palacci a pris sa succession (en août 2022) et, avec le comité directeur (Eric Theobald, Jacques Diagana, Xavier Montala et Pierre-Jean Veyret), il va continuer de structurer le club, sur le plan sportif et administratif aussi ».

Un pôle d’excellence de foot amateur

Joueur amateur et professeur agrégé d’éducation physique et sportive, Malik a un penchant pour tout ce qui a trait à la jeunesse, à la formation.

Le coordinateur du Pefa (pôle d’excellence de football amateur) Briffaut raconte : « J’ai monté beaucoup de structures durant toute ma carrière. J’ai créé beaucoup de sections sportives dans les établissements où j’ai enseigné, dont une en 2004 à Valence, dans un collège en zone sensible, à Jean Zay, quartier du Polygone. En 2010, je voulais qu’il y ait une continuité après le collège et donc faire la même chose en lycée et c’est comme ça que j’ai lancé une section au lycée où j’enseigne, au lycée polyvalent Algoud-Laffemas, d’abord avec les garçons, ensuite avec les filles, puis avec le futsal. Et aujourd’hui, c’est devenu un gros pôle, le pôle Briffaut, avec plus de 200 sportifs, dont une centaine de footballeurs. Ce qui fait que, dès le plus jeune âge, en 6e, les enfants s’entraînent à raison de 4 séances par semaine. Et à partir de la classe de 4e, c’est-à-dire en pré-formation, ils s’entraînent tous les jours jusqu’au lycée, toujours dans le temps scolaire. Et à 18 h, ils ont fini le foot et les études ! C’est vraiment une section sportive d’excellence. »

Un pôle où le projet est clair : réussite scolaire, excellence sportive et réussite socio-éducative.
Les rugbymen professionnels du VRDR (Valence Romans Drome Rugby), de retour en Pro D2, les handballeuses féminines du pôle espoirs de la Ligue et les handballeurs masculins du VHB, complètent ce pôle stratégique chapeauté par Malik.

« On a fait les choses dans l’ordre »

Forcément, la passerelle entre l’OV et le pôle football est toute trouvée. « Quand on a reconstruit le club, l’Olympique de Valence, en 2014, on voulait vraiment que la formation soit son ADN, parce que j’entends souvent les discours « Une ville comme Valence, mériterait mieux… » Non, une ville comme Valence, elle a ce qu’elle mérite, c’est tout », poursuit Malik; c’est le travail qui fait que le club existe. Il y a eu deux dépôts de bilan, on n’en veut pas un troisième, donc il faut qu’on reconstruise par la formation des jeunes. C’est pour ça que l’on a consacré plus des 2/3 du budget du club à ça. Lors de la restructuration du club, on a fait les choses dans l’ordre. On a été labellisé par la FFF, on est le premier pôle d’excellence de foot amateur (Pefa) à l’avoir obtenu, en 2014, à l’initiative de François Blaquart (ex-DTN). On a les 4 composantes de la famille du foot dans le lycée : des garçons (depuis 2010), des filles (depuis 2011), du futsal (depuis 2013) et aussi 9 arbitres que l’on a formés avec Roland Viallet, le conseiller technique régional en arbitrage du district de Drôme-Ardèche. »

L’exemple de Montpellier

Cette saison, hormis le dernier match à domicile, celui de la montée, qui a tout de même attiré près de 2000 spectateurs à Montélier, à 10 kilomètres à l’est, l’Olympique de Valence a disputé toutes ses rencontres dans son antre, le stade Georges-Pompidou (14 000 places), partagé avec le rugby : « Je ne vois pas le VRDR comme une concurrence, mais plutôt comme une synergie entre les sports collectifs, poursuit Malik Vivant; On a mutualisé beaucoup de disciplines, mais je trouve qu’en France, on n’est pas assez développé comparé à d’autres pays en termes de structures que l’on peut mettre en oeuvre dans le temps scolaire pour les sportifs de bon niveau, voire de haut niveau. Il y a des synergies positives qui peuvent se créer entre les différents sports collectifs valentinois. Le tissu économique et la ville répondent présent, alors, un peu à l’image de Montpellier, une ville très sportive, Valence peut le devenir aussi. »

Pelouse partagée

Ambitieux pour sa ville, Malik l’est aussi pour son club, même s’il sait que la saison prochaine ne sera pas simple en National 3, une division dont le niveau sera automatiquement relevée avec les 22 descentes de National 2 (les 5 derniers de chacune des 4 poules et les deux moins bons 11es).

D’autant moins simple que l’équipe de rugby, qui retrouve la Pro D2, foulera elle aussi le stade : « On a besoin de jouer sur une pelouse de qualité tout de même, pour le projet de jeu que l’on met en place, affirme-t-il; parfois ça a été compliqué… Y’a 2 ans, je me souviens qu’en coupe de France, quand on avait affronté Paris FC (L2), la pelouse était dégradée, il y avait eu aussi des intempéries avant les matchs de rugby et ça… Bon, là, des travaux ont démarré, on nous remet une pelouse neuve. »

« Dommage que les filles ne montent pas en D3 »

Le club au logo semblable à celui de Croix-de-Savoie (devenu ensuite Evian Thonon Gaillard), – « On nous le dit souvent, parce qu’il y a du rouge et du blanc, nos couleurs historiques, mais il y a le kiosque Peynet dessus, qui est un des symboles de Valence », – visera le maintien, avant, plus tard, de rêver plus haut.

De là à revivre un jour le National (dernière saison à ce niveau en 2004-2005), voire la Ligue 2 (2003-2004), il y a beaucoup d’étapes à franchir. « Mais c’est carrément le projet, coupe toutefois Vivant; On a de bonnes structures et infrastructures, une formation reconnue, on fait partie des 4 ou 5 gros clubs de la Ligue Aura (Auvergne Rhône-Alpes), nos équipes de jeunes jouent au plus haut niveau régional partout, on a même nos U17 en Nationaux, on a deux équipes féminines en R1 et R2, bref, tout est mis en place pour que nos équipes fanions grimpent et suivent l’exemple de l’équipe de Régional 1 garçons, qui est montée en N3 avec 22 ans de moyenne d’âge, quelques cadres comme Rafik Boujedra (ex-GFC Ajaccio, Bourg-en-Bresse et Quevilly Rouen en Ligue 2) et Hassen Fellak (Ain Sud Foot et Bourgoin en N3), où 70 % des joueurs ont été formés au club. Je pense que peu d’équipes peuvent se targuer de cela et pour nous, ça récompense tout le travail que l’on a mis en place. Pour les filles, on a le même système de formation que chez les garçons, elles bénéficient des mêmes outils. Ces dernières saisons, elles ont échoué en barrage d’accession et cette saison, elle ne vont pas monter en D3 alors qu’elles sont 2es derrière l’OL et qu’elles ont une différence de buts de plus de 100 (+123 Ndlr) ! C’est dommage qu’il n’y ait qu’une seule accession; ça risque de mettre en péril notre structure féminine. C’est regrettable mais je mise sur un repêchage. »

« Avec humilité en National 3 »

Quant au National 3, faut-il en avoir peur ou est-ce un challenge excitant ? Vivant : « ça m’excite plus que cela ne me fait peur ! On ne se donne pas de limite. L’Olympique de Valence ressemble plus aujourd’hui, de par sa structuration et ses outils, à un club de N3. On utilise les GPS, la vidéo, le logiciel MyCoach pro, on se donne les moyens en matière d’optimisation de la performance d’essayer de réduire tout ce qui est aléatoire. On va rentrer dans ce championnat avec humilité. En N3, beaucoup d’équipes ont la moitié de leurs effectifs sous contrat. Nous, on devra continuer à structurer le club administrativement et financièrement pour avoir de l’ambition. On fera venir 4 ou 5 joueurs avec un peu d’expérience. Il ne faudra pas se tromper. D’autant qu’on reçoit beaucoup de CV. On gardera nos jeunes et on élargira le groupe fanion en intégrant deux ou trois jeunes à fort potentiel, qui sortent du groupe U18 ou Espoirs. On souhaite conserver ce projet de jeu qui pilote l’ensemble des équipes du club. Pour moi, le collectif est plus fort quand l’équipe est soudée et concentrée sur un objectif. On veut aussi conserver ce noyau dur de bénévoles et dirigeants que l’on a autour de l’équipe fanion et du staff, un noyau mobilisé autour d’eux. »

Un budget proche de 800 000 euros ?

« Enfin, on a envie de retrouver, à moyens termes, le National 2, avant, pourquoi pas, d’aller chercher encore au-dessus. Mais pour cela, il faut travailler dans la continuité, ne rien chambouler. C’est aussi ça, la force d’une équipe. Cette saison, je voulais que tout le monde s’entraîne quatre fois par semaine, contrairement à la saison passée, où on avait manqué le coche de peu à la dernière journée. Je veux garder ce rythme. »

Côté finances, le club, qui s’appuyait sur un budget proche de 650 000 euros, travaille pour le grossir et le faire passer à 800 000. « On espère que nos partenaires vont continuer à nous soutenir. Il faut que, économiquement, on soit solide. Il faut donner à l’OV les moyens de ses ambitions. On a développé les secteurs marketing et commercial. Maintenant, quand on vient au stade Pompidou, ça commence vraiment à ressembler à quelque chose ! On a une panneautique LED, on a fait une animations dans les loges, c’est positif. On a des anciens qui sont revenus comme Frédéric Tremblay, un ancien joueur dans les années 80 et ancien speaker aussi du temps de la D2 : il fait revenir les anciens et anime les loges. »

Alors, Valence, une ville de foot ? Là encore, Malik a son avis : « Oui ! Après, le stade se remplit souvent quand il y a des grosses affiches. Aujourd’hui, on se souvient surtout de ces moments-là, de ces gros matchs. Mais ça, c’est un peu pareil pour toutes les villes. Il y a de l’effervescence quand il y a de la réussite, quand ça tourne, comme avec le handball, qui a grandi, et le rugby bien sûr aussi. »

Pour Rafik Boujedra, la boucle est bouclée

« C’est un joueur emblématique qui était déjà revenu au club après ses années de formations à l’Olympique Lyonnais. Il a aussi été le premier contrat fédéral que l’on a pu faire à l’Olympique de Valence cette saison. Il apporte son expérience à un groupe jeune. » Voilà comment Malik Vivant parle de Rafik Boujedra, revenu à Valence, ou plutôt… rentré chez lui, à Valence, après dix saisons d’exil !

Flashback. C’est la saison 2012-2013, et l’Ardéchois – il est originaire de Tournon, à 10km de Valence, de l’autre côté du Rhône – dispute sa deuxième saison à l’AS Valence. Une saison pleine, en CFA, durant laquelle le joueur, arrivé à l’âge de 12 ans à l’Olympique Lyonnais, où il a côtoyé Nabil Fekir, s’était fait remarquer lors de sa deuxième saison en seniors, en 2012-2013.

« Je suis Ardéchois de naissance mais je me considère comme un Drômois, car mes parents ont déménagé à Valence quand j’étais petit, alors … Et puis, de Tournon pour rallier la Drôme, il n’y a qu’un pont à franchir ! », confiait-il lors de sa signature à QRM, en 2017.

En 2013, donc, il prend son envol et démarre une carrière professionnelle. D’abord au Gazelec Ajaccio, où il évolue en National puis trois saisons en Ligue 2, entrecoupées d’une autre saison à Bourg-en-Bresse, également en Ligue 2. Puis direction Quevilly-Rouen, toujours en Ligue 2 avant de revenir – visiblement, il aime bien les come back ! – à Bourg, pendant deux nouvelles saisons, en National.

Après un dernier crochet par Le Puy (N2, accession en National en 2022), Le milieu offensif franco-tunisien (il fut appelé en sélection U20 de Tunisie et également en U23), rentre au bercail, à Valence, l’été dernier : « Je reviens dans le club où j’ai explosé (sic), c’est le bon timing, les planètes sont alignées », confiait-il l’été dernier au Dauphiné, lors de sa signature à l’OV; « ça va me permettre de préparer ma reconversion. J’ai envie de devenir coach. »

Le pari valentinois est réussi ! Rafik, âgé aujourd’hui de 29 ans, a contribué à l’excellent parcours du club drômois cette saison, et à son retour dans les championnats nationaux, en National 3, neuf ans plus tard ! Et ce n’est peut-être pas terminé !

Rafik Boujedra du tac au tac

Meilleur souvenir sportif ?
La montée en ligue 2 avec le Gazelec Ajaccio en 2014.

Pire souvenir sportif ?
La descente de Ligue 2 en National avec Quevilly Rouen.

Plus beau but marqué ?
En sélection U23 avec la Tunisie, en match amical, je mets une reprise du pied gauche en pleine lucarne !

Plus beau loupé ?
Je n’ai pas de souvenir particulier, mais sans doute un face à face avec un gardien et je fais le mauvais geste, je pense.

Pourquoi as-tu choisi d’être footballeur ?
C’est ma passion depuis mon plus mon plus jeune âge et c’est le plus beau sport au monde.

Ton but le plus important ?
Mon premier but en ligue 2 avec Bourg-en-Bresse. Le club n’avait pas encore gagné en début de saison et j’arrive tard dans le groupe, à la fin du mercato; et pour mon premier match, c’est la première victoire de l’équipe (2-1 contre Dijon, 3e journée) et après ça, on a lancé une dynamique incroyable pour un club promu.

Ton geste technique préféré ?
La feinte de frappe, un geste sous-côté pour moi.

Combien de cartons rouges dans ta carrière ?
Pas beaucoup ! Je dirais 3 au maximum.

Si tu n’avais pas été footballeur, tu aurais fait quoi ?
Je voulais être journaliste sportif ou avocat.

Qualités et défauts sur un terrain, selon toi ?
Altruiste, au service de l’équipe, technique et très bonne vision de jeu comme qualités. Défauts ? Pas assez égoïste, pas assez « tueur » et trop perfectionniste par moments.

Le club ou l’équipe (ou la saison) où tu as pris le plus de plaisir sur le terrain ?
La première saison de Bourg-en-Bresse en Ligue 2, on pratiquait un football incroyable avec un groupe humainement incroyable. C’était huilé, on mettait pas mal d’équipes en difficulté avec notre 4-4-2 en losange. Mais la saison que l’on vient de vivre avec l’Olympique de Valence fut incroyable aussi, avec une équipe humainement incroyable, de supers personnes et en plus de ça, on monte en N3, chez moi !

Le club où tu n’aurais pas dû signer, l’erreur de casting de ta carrière ?
Je n’ai pas de regret. Je suis quelqu’un qui croit au destin donc toutes mes expériences ont forgé l’homme que je suis et le joueur.

Le club où tu as failli signer (tu peux le dire maintenant, il y a prescription) ?
L’AC Ajaccio en Ligue 2, c’était juste avant de resigner au Gazelec Ajaccio. J’ai vraiment hésité car le discours du coach Pantaloni et l’intérêt du club m’avaient touché : mais quand tu as été « gazier » un jour, tu ne peux pas jouer pour le club « ennemi »… Enfin, c’est ce que je pense bien que j’ai de très bons amis là-bas et je connais de très bonnes personnes.

Le club où tu aurais rêvé de jouer, dans tes rêves les plus fous ?
Comme j’ai été formé à l’Olympique Lyonnais, forcément, l’OL. J’ai souvent rêvé, jeune, le soir dans ma chambre au centre, que je jouais à Gerland, le stade de l’époque quand j’y étais… Mais ce n’était qu’un rêve ! La réalité, c’est qu’à ce moment-là, c’était vraiment le grand OL avec des joueurs incroyables qui accumulaient les titres de champions !

Un stade et un club mythique pour toi ?
Santiago Bernabeu où il y’a le plus grand club au monde et pour moi, il n’y a pas de débat : c’est le Real Madrid !

Un public qui t’a marqué ?
Celui du Gazelec Ajaccio ! Là-bas, c’est vraiment la ferveur quand tu joues pour eux… Il ne peut rien t’arriver, tu es porté par tout un stade. Ils supportent vraiment et même quand tu les croises dans la rue ou quand tu fais tes courses, ils veulent prendre des photos, discuter… Le Gazelec, c’était vraiment le kiffe !

Un coéquipier marquant (si tu devais n’en citer qu’un), mais tu as droit à deux ou trois ?
Jimmy Nirlo à Bourg-en-Bresse, même dans les moments difficiles, notamment quand je me suis blessé, il était toujours là pour moi. C’est devenu un frère. J’ai aussi beaucoup aimé Pablo Martinez au Gazelec Ajaccio et Stanislas Oliveira à Quevilly Rouen. Je pourrais en citer beaucoup d’autres bien sûr, mais comme je n’ai droit qu’à 3 !

Le coéquipier avec lequel tu avais ou tu as le meilleur feeling, avec lequel tu t’entendais le mieux sur le terrain ?
Mohamed Larbi au Gazelec, c’était le kiffe de jouer avec lui, il était vraiment fort et on se comprenait les yeux fermés. Sofiane Atik aussi à Bourg-en-Bresse : quand on jouait ensemble, c’était quelque chose ! Et enfin, Marvin Gakpa, le joueur le plus doué avec lequel j’ai joué en professionnel : lui, il te cassait les reins ! En fait, je m’entendais bien avec tous les joueurs de ballon, qui prônaient le jeu !

Le joueur adverse qui t’a le plus impressionné ?
Sofiane Boufal avec Angers en Ligue 2, c’était incroyable, il m’avait choqué, il était au-dessus techniquement et il dribblait avec facilité.

L’équipe qui t’a le plus impressionné ?
Metz en Ligue 2, avec les Bouna Sarr et Yeni Ngbakoto, et j’en passe ! Ils étaient au-dessus physiquement et dégageaient une force et une puissance incroyables.

Un coéquipier perdu de vue que tu aimerais revoir ?
Samuel Umtiti, avec qui j’étais à L’OL.

Un coach perdu de vue que tu aimerais revoir ?
Thierry Laurey, le premier coach qui m’a fait signer professionnel; il était au Paris FC cette saison, en L2.

Un coach que tu n’as pas forcément envie de revoir ?
Ouh là… Si j’en dis plus, je vais me fâcher avec eux alors j’utilise mes jokers, mdr !

Un président ou un dirigeant marquant ?
Fanfan Tagliaglioli, paix a son âme, l’ancien président du Gazelec Ajaccio; je n’ai jamais vu un président autant amoureux de son club. Après, j’ai souvent évolué dans des clubs familiaux dans ma carrière donc je dirais tous les présidents que j’ai eus, que ce soit Christophe Gauthier au Puy qui est un homme en or ou en encore Gilles Garnier le président de Bourg-en-Bresse, qui a permis au club de se professionnaliser. Et aussi mes dirigeants actuels à l’OV !

Une causerie de coach marquante ?
Les causeries de Karim Mokeddem à Bourg, c’était quelque chose ! C’est un grand tacticien et un super homme, avec des valeurs proches des miennes. Il mettait des extraits de films comme Gladiator ou d’autres films cultes, tout ça pour nous transcender avant les matchs ! Je trouvais ça bien.

Une consigne de coach que tu n’as jamais comprise ?
J’utilise beaucoup ma tête et j’essaie de comprendre à chaque fois. Je n’aime pas comprendre…

Une anecdote de vestiaire que tu n’as jamais racontée ?
Ce qui se passe dans le vestiaire reste dans le vestiaire, c’est la devise !

Le joueur le plus connu de ton répertoire ?
Alassane Plea : il joue a en Allemagne, au Borussia Monchengladbach.

Le stade qui t’a procuré le plus d’émotion (en dehors des clubs où tu as joués) ?
Le Racing-club de Lens : incroyable ! C’est la meilleure ambiance que j’ai vue ! Même en Ligue 2, le stade était toujours plein.

Des rituels, des tocs, des manies ?
Toujours la chaussette gauche avant la droite, comme Zizou, mdr !

Une devise, un dicton ?
Jouer au foot c’est très simple mais jouer un football simple est la chose la plus difficile qui soit.

Tes passions dans la vie ?
Ma famille et le foot.

Que t-a-t-il manqué pour jouer en Ligue 1 ?
Je dirais que physiquement, à l’époque, je n’étais pas prêt, j’étais tout frêle.

Termine la phrase en un adjectif ou deux : tu étais un joueur plutôt …
Technique.

Un modèle de joueur ?
Benzema. C’est un attaquant complet.

Une idole de jeunesse ?
Ronaldo Luis Nazario, le meilleur joueur de tous les temps pour moi !

Le match de légende, c’est lequel pour toi ?
Liverpool-Milan AC, finale 2005 de la Ligue des champions qui se termine aux penaltys : Milan AC mène 3 à 0 puis Liverpool revient à 3-3 et s’impose aux tirs au but !

Ta plus grande fierté ?
Mes trois enfants ! Et d’avoir pu rendre fier mes parents.

L’Olympique de Valence, c’est un club plutôt…
Ambitieux et travailleur.

Le milieu du foot, en deux mots ?
Compliqué et passionnant ! Deux mots contradictoires !

Textes : Anthony BOYER / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr et contact@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06 et @13heuresfoot

Photos : Olympique de Valence

Il a longtemps oeuvré au micro à Brest, à Rennes et aussi à Quimper, pendant les années 70/80, en première et en deuxième division; et il a même chanté et côtoyé le gratin du show-biz. A 84 ans, le Breton, ancien disquaire, est sorti de sa retraite pour rouvrir l’album des souvenirs et des photos.

Avec Zidane.

« J’ai eu plusieurs vies ». C’est Claude Dratel qui le dit lui-même en début d’entretien et c’est bien pour cela que l’on est venu le dénicher dans sa retraite de Guidel, à la « frontière » du Sud-Finistère et du Morbihan, à quelques plages de Lorient.
Toujours bon pied, bon oeil, à 84 ans, et surtout bonne voix… C’était son outil de travail quand il était le speaker du Stade Brestois (puis du Brest-Armorique) et du Stade Rennais en passant par le Stade Quimpérois de la belle époque (2e division).

Mais Claude Dratel n’a pas été « que » speaker. A Rennes, il a également été l’intendant du club et l’auteur de nombreuses interviews de joueurs pour le magazine « En rouge et noir ». Il a aussi été chanteur et l’ami d’artistes du music-hall et de stars du show-biz.

Et aujourd’hui, à micro ouvert pour 13 heures foot, ses souvenirs se ramassent à la pelle comme les feuilles mortes de Jacques Prévert que chantait si bien Yves Montand qu’il aurait pu croiser parmi toutes les autres vedettes figurant à son répertoire.

« Shababi Nonda avait ramené ses Doberman en stage ! « 

  • Stade Brestois, Brest Armorique (années 70-80) : le speaker fait reporter un match

J’avais une trentaine d’années et je travaillais à Brest dans un magasin de disques où je recevais d’ailleurs pas mal d’artistes. J’ai été sollicité par Michel Bannaire (un ancien président du Stade Brestois) et je me suis retrouvé avec un micro de speaker à la main. C’était inné sans doute et comme j’étais un mordu de foot, je baignais dans mon univers.

Au Stade Brestois, j’ai rencontré des joueurs extraordinaires comme le Paraguayen Roberto Cabanas, Drago Vabec, Bernard Pardo et Joël Henry, les deux compères, sur le terrain et en dehors, Yvon Le Roux, le colosse de Plouvorn comme on l’appelait, ou Patrick Martet, le goleador qui marquait des buts extraordinaires. Cabanas, avec l’orchestre Jean Valéry, on avait animé son mariage, et je me suis retrouvé sur la scène de Penfeld à faire le crooner en chantant du Sinatra et compagnie.

Avec Michel Denisot.

C’était une époque formidable avec des histoires qui ne pourraient plus arriver aujourd’hui. Par exemple, je me souviens d’un match contre le Stade Lavallois qui était entraîné à l’époque par Michel Le Millinaire. Brest jouait le maintien en première division et devait absolument gagner, Laval marque le premier but et moi je vais vers l’arbitre de touche pour lui faire signe qu’en raison du brouillard, il n’y avait plus assez de visibilité, d’un poteau de corner à l’autre, pour que le match puisse continuer. A la mi-temps, je vais vers le vestiaire des arbitres pour insister et je me fais logiquement rabrouer. La seconde période commence, j’avais mon micro HF qui dépassait de la poche, je retourne voir l’arbitre de touche que je harcèle un peu, l’arbitre principal intervient, et à un moment, il arrête le match en constatant qu’en effet il y avait du brouillard. D’où la fureur de Le Millinaire qui avait déclaré qu’en 40 ans de carrière il n’avait jamais vu un speaker arrêter un match! Il en a longtemps parlé après. Le match a donc été remis et on l’a gagné !

J’ai connu aussi François Yvinec (le président brestois qui était allé chercher Cabanas en Colombie à l’issue d’un transfert des plus rocambolesques) à l’époque de Raymond Kéruzoré. En 1988, lors d’un match contre Paris Saint-Germain, j’avais rencontré Francis Borelli, le président du PSG, qui m’avait dit que ce serait bien que je vienne à Paris.

  • Stade Quimpérois (1989-91) : le speaker à la double casquette

Le directeur du Leclerc Quimper m’avait dit que l’ambition était de créer un grand club à Quimper et de le faire monter en première division avec des grands joueurs comme Michel Ettore, Philippe Mahut, Robert Barraja ou Zivko Slijepcevic, et l’entraîneur Pierre Garcia. Je me suis retrouvé avec la double casquette de speaker à Brest et à Quimper mais ce n’était pas la bonne solution. Le club a failli monter en première division mais ça manquait de public à Quimper et après il y a eu malheureusement la dissolution. Et c’est triste ce qu’est devenu ensuite Quimper.

  • Stade Rennais (1991-2002) : le micro d’or du speaker

Avec Paul Le Guen.

Je suis né à Rennes et c’était donc un retour aux sources. J’avais toujours eu pour ambition de revenir au Stade Rennais. Avant, j’allais voir les matchs et j’avais vraiment été impressionné par les deux victoires finales en Coupe de France en 1965 et 1971. Et après, Bernard Lemoux, le président, avait fait venir un joueur exceptionnel, Laurent Pokou (1973-1977). Je me suis lié d’amitié avec lui. Il était extraordinaire.

Un jour, l’Olympique de Marseille vient jouer à Rennes, Pokou était au milieu du terrain, il avait fait passer le ballon au-dessus des têtes de Zvunka et de Trésor, et il était parti « le mettre » des six mètres hors de portée de Carnus.

Avec Yves Mourousi.

Bernard Lama (2001-02) aussi m’a marqué, Petr Cech (2002 à 2004) également, formidable, un des meilleurs gardiens du monde. A Rennes, contrairement à Brest et à Quimper, j’étais à temps complet : je n’étais pas seulement speaker, j’étais intendant des joueurs que je gérais de A à Z. Quand ils arrivaient, je m’occupais de leur logement et de leurs papiers, j’allais au moins deux fois par semaine à la préfecture de Rennes pour les visas et les APS (autorisations provisoires de séjour).

Shabani Nonda (1998 à 2000), je lui avais trouvé un super appartement à côté de TV Rennes, mais il avait acheté un rottweiler et un doberman qu’il ne sortait pas, alors il avait fallu lui trouver une maison mais là aussi ça avait posé d’énormes problèmes de voisinage et il avait fallu leur construire un chenil. Après, il voulait amener ses chiens partout. Une fois, on était parti en stage à Dinard, et il s’était ramené avec ses chiens dans une remorque.

Avec Gérard Depardieu.

C’est à Rennes, en 2000, que j’ai eu mon micro d’or qui récompensait le meilleur speaker de la saison en première division. C’est à l’époque où Dominique Arribagé était le capitaine. C’était une grande reconnaissance pour moi.

Au stade Rennais, je m’occupais aussi d’un petit journal, « En rouge et noir », avec des interviews de joueurs pour le programme des matchs. Et j’ai connu un grand moment avec Zinedine Zidane quand il était à la Juve. C’était lors du match de coupe Intertoto à Rennes (1999), ça a été tout un cirque car les dirigeants de la Juve ne voulaient pas que je l’interviewe, ils voulaient de l’argent. Alors je ne me suis pas dégonflé, j’ai pris mon micro, je suis allé sur le terrain où j’ai rencontré Zidane qui m’a sympathiquement répondu.

  • Le chanteur, les disques et le show-biz

Avec Jane Birkin.

J’étais allé faire un marathon de la chanson à Fougères et je l’avais gagné. Je travaillais alors chez un très grand disquaire, le plus grand en Bretagne, Monsieur Racine, rue Lafayette, à Rennes. Là-dessus, je reçois un courrier pour aller chanter au casino de Saint-Malo. J’ai fait la saison et je me suis retrouvé comme chanteur dans l’orchestre de Jean Valéry, on a fait le tour de Bretagne et on allait même un peu partout en France.

Je travaillais toujours chez Racine mais ce n’était pas facile à gérer avec mes tournées. J’avais un chauffeur qui venait me chercher. Et c’est là que j’ai été sollicité pour tenir un magasin de disques à Brest, « Radio Sell » , où j’ai vu défiler Jane Birkin, Mouloudji, Serge Reggiani, Gérard Jugnot, Yves Mourousi, Johnny Halliday, Serge Lama, Coluche et j’en passe… J’ai tenu trois magasins de disques à Brest.

J’ai fait du show mode aussi dans la galerie « Super-Ouest » à la sortie de Brest, avec Denise Fabre, les cocogirls aussi (troupe de danseuses et de chanteuses créée par Stéphane Collaro), et Natty, la compagne de Jean-Paul Belmondo.
A Rennes, j’avais aussi connu Jacques Brel en 67. Je m’occupais de spectacles et je le vois arriver tout embêté car il venait pour faire le « raccord » mais il n’avait pas de sono. Je lui avais trouvé ça avec un orchestre du coin. Au casino de Saint-Malo, j’ai aussi rencontré Barbara qui m’avait écrit en dédicace « Chante longtemps encore. Barbara ». Tu te rends compte !?

Claude Dratel, du tac au tac

« Ma voix ne m’a jamais lâché »

Votre top de speaker ?
Le centenaire du Stade Rennais et ma rencontre avec Zidane.

Un flop ?
Ah oui, avec Gérard Depardieu. Il était venu à Rennes avec Auxerre et Gérard Bourgoin (président), et on avait prévu une petite réaction de sa part à la mi-temps. Mais quand je suis retourné le voir en tribune officielle, il n’a pas pu me répondre. C’était le fiasco.

Le meilleur président ?
Monsieur Pinault.

Le pire ?
J’en connais un… mais non !

Le meilleur entraîneur ?
J’ai beaucoup sympathisé à Rennes avec Paul Le Guen et Christian Gourcuff.

Le meilleur joueur ?
Shabani Nonda.

Le plus sympa ?
Makhtar N’Diaye, Bernard Lama, mais tous ont été sympas dans l’ensemble.

Les meilleurs supporters ?
Le Roazhon celtik kop. Je dialoguais beaucoup avec eux avant les matchs.

La meilleure ambiance ?
A Rennes.

Le plus grand match ?
La Juventus à Rennes en coupe Intertoto. Les derbys contre Nantes, et les matchs contre le PSG.

La plus grande fierté ?
D’avoir eu le micro d’or en l’an 2000.

Un rituel avant les matchs ?
La concentration. Et j’observais beaucoup l’échauffement des joueurs. Et quand j’avais la feuille de match, je vérifiais aussi la prononciation des noms.

Le plus bel hommage ?
La fête pour mon départ du Stade Rennais.

La plus grosse critique ?
Sur les réseaux sociaux, certains disaient que j’étais venu à Rennes pour l’argent, les autres répliquaient que j’étais leur seul speaker à avoir eu le micro d’or.

Un match qui vous a laissé sans voix ?
Non jamais. Ma voix ne m’a jamais lâché.

Le plus beau stade ?
Rennes. Un vrai stade de foot avec 30 000 personnes.

Le plus beau souvenir ?
Mes débuts avec le Stade Rennais en 91. Car là c’est un vrai métier à plein-temps. Un autre beau souvenir, c’est quand Raymond Kéruzoré m’avait demandé avant un match de lire un petit texte expliquant que malgré les sollicitations de l’OM, il restait breton et donc fidèle au Stade Rennais.

Le pire souvenir ?
La descente de Rennes en deuxième division en 1992.

Un mot sur les speakers d’aujourd’hui ?
On les entend moins en fait. Il y a une discipline maintenant, ils sont obligés de rester corrects alors qu’avant, il y en avait qui allaient un peu trop loin. Il ne faut pas critiquer l’adversaire, il faut rester fair-play. Ce qui n’empêche pas une part de chauvinisme.

Avec Serge Lama.
Avec Johnny Halliday.
Avec Jean-Jacques Goldman.
Avec Denise Fabre.
Avec Coluche.
Avec Thierry Roland.

Texte : Denis Vergos / Mail : dvergos@13heuresfoot.fr et contact@13heuresfoot.fr / Twitter @2nivergos et @13heuresfoot

Photos : DR et D. V.

Revenu dans le club de sa ville l’été dernier, l’ex-coach de Roye et de Châlons vient d’assurer le maintien en National 3 de son équipe au terme d’une saison éprouvante, malgré par une belle campagne de coupe de France malheureusement achevée par le douloureux épisode face à Wasquehal.

Photo Philippe Le Brech

Un meneur d’hommes. Prêt à forger un groupe, façonner un état d’esprit et créer une âme de conquérant.
Depuis août 2022, Hervé Papavero est l’entraîneur en chef de l’équipe fanion de Reims Sainte-Anne, promue la saison dernière en national 3, et 8e de l’exercice 2022-2023, qui vient de livrer son verdict.

C’est dans la ville du sacre des Rois que l’ancien coach de Roye-Noyon et de Châlons-en-Champagne (54 ans) nous reçoit pour retracer sa carrière. Une carrière qui l’a longtemps vu porter les couleurs de Reims Sainte-Anne, en 1976, peu de temps après la création du club (1974). Un club qui a aussi vu passer un certain Robert Pires : le Rémois de naissance, futur international français, a effectué ses premiers pas sous la tunique rouge et blanche de … Reims Sainte-Anne (le Stade Rémois évolue sous les mêmes couleurs), connu et reconnu pour son travail et formation et aussi son stade, qui porte le nom de cet illustre champion du monde 1998 et champion d’Europe 2000 !

« Un vrai stoppeur à l’ancienne »

Photo Philippe Le Brech

Mais ne vous fiez pas aux apparences. Le stade Robert Pirès, en dépit de son nom prestigieux, reste une enceinte aux installations assez sommaires, peu en rapport avec le niveau où Reims Sainte-Anne évolue. Il faut dire qu’il est situé à Cormontreuil, une commune avoisinante, et qu’il fait l’objet d’une convention d’occupation privative du domaine public avec la ville de Reims.

Défenseur central droitier de métier, Hervé Papavero, lui aussi natif de Reims, a évolué jusqu’en national 2, et se qualifie de « très rugueux, fort sur l’homme, un vrai stoppeur à l’ancienne ! ».

Docteur en Droit du Sport et enseignant à la faculté de Reims, il a l’âme d’un « sachant » qui veut transmettre son savoir, y compris en matière de football.

Avant le début de la séance de 10 h, Hervé Papavero nous reçoit dans le vestiaire des arbitres. Entretien avec un entraîneur passionné et passionnant.

INTERVIEW

« Ce sont les joueurs qui rendent l’entraîneur intelligent »

Comment vous est venue cette vocation d’entraîneur ?

Photo Reims SA

C’est Franck Lorenzetti, entraîneur de l’équipe fanion de Châlons-en-Champagne, qui m’a demandé de prendre en charge la réserve et en même temps de devenir son adjoint en équipe première. Je voulais encore jouer, j’avais 33 ans, mais il m’a dit d’arrêter et de devenir entraîneur. C’est ce que j’ai fait. Cette expérience m’a tout de suite plu et les résultats positifs ont fait que j’ai eu plus de plaisir à entraîner qu’à jouer (pour sa première saison comme numéro 1, en 2003/2004, il obtient l’accession en National 2 avec Châlons-en-Champagne). Entraîneur, je sentais que j’étais un rouage important, alors que quand j’étais joueur, je ne me sentais pas décisif. En devenant entraîneur, je suis plus impactant sur le résultat d’un match. Je comprends aujourd’hui que certains deviennent entraîneur très jeune, prenez l’exemple de Will Still au Stade de Reims. Pour moi c’est un gain de temps pour plus tard.

Quel est justement pour vous le rôle d’un entraîneur ?

C’est avant tout le garant de la discipline collective. Il est un catalyseur d’énergie et le garant des valeurs du groupe. À partir du moment où on définit le cadre, le premier qui ne doit pas sortir du cadre, c’est l’entraîneur. Je ne peux pas exiger aux autres ce que je ne m’impose pas à moi-même. C’est le seul qui doit être complètement objectif. L’entraîneur n’a aucun intérêt, mis à part gagner, c’est l’objectivité incarnée. Au contraire, le joueur peut, par nature, être guidé par son intérêt personnel de vouloir marquer, faire la différence seul, briller pour se faire remarquer. Ce n’est pas le cas de l’entraîneur.

« Si je mets 4 défenseurs, ce n’est pas très bon signe… »

Quelles sont les qualités requises pour faire un bon entraîneur aujourd’hui ?

L’ex-pro Mickaël Tacalfred, 42 ans, capitaine de Reims Saint-Anne en N3. Photo RSA

Un bon entraîneur désormais c’est celui qui a un réseau, qui sait communiquer et se vendre. Pour ma part, je ne suis sur aucun réseau. Il y a 25 ans, ce n’était pas aussi important. C’est une des grandes compétences à posséder aujourd’hui quand on voit les entraîneurs qui ont des agents, qui prospectent auprès des clubs, qui savent se vendre. C’est tout sauf ma pratique. Cela devient primordial pourtant. Après, il y a le rôle des joueurs, forcément. Vous gagnez 1 à 0 sur un exploit individuel, vous n’y êtes pour rien. J’ai coutume de dire que ce sont les joueurs qui rendent l’entraîneur intelligent.

En parlant du football moderne, quelle place accordez-vous à la vidéo ?

Justement, je rentre d’un recyclage à l’INF Clairefontaine (durant la semaine du 1er mai) où j’ai opté pour le thème de l’analyse vidéo. Malheureusement, à Reims Saint-Anne, je ne bénéficie pas de caméra pour réaliser tout ce travail. C’est un vrai manque car c’est un outil sympa, apprécié des joueurs. On voit que même des équipes de Régional 2 sont dotées de ce type d’outil. C’est l’idéal en matière de débriefing pour adapter le discours à l’image et pouvoir corriger les attitudes, les positionnements avec des preuves à l’appui. Dans une société de l’image, ça paraît important d’adapter le discours à cette manière de faire. C’est toujours plus parlant.

Avez-vous un système tactique privilégié ?

Photo Philippe Le Brech

Je suis un adepte du 3-4-3 et du 3-5-2. J’ai toujours géré mes équipes sur ces deux systèmes tactiques. Le but est d’aller chercher haut l’adversaire, ne pas le laisser jouer et mettre beaucoup d’intensité. J’ai tout de suite eu la réputation d’un entraîneur qui faisait beaucoup courir. Avec le temps, on sait que la préparation physique a pris une place importante et c’est devenu normal. Le 3-5-2 est pour moi une machine à presser, très énergivore, alors que le 3-4-3 m’offre plus de possibilités sur l’animation offensive. L’objectif étant aussi que si l’adversaire est plus fort que nous, par le pressing, il aura moins de temps pour s’organiser et pourra être déstabilisé. Je reste au maximum à trois défenseurs car c’est tellement difficile d’avoir des repères dans ce système que lorsque les automatismes sont présents, on ne veut pas changer.

En plus, il y a quelques années, les équipes étaient assez perturbées d’affronter une équipe à trois défenseurs, ce n’était pas quelque chose d’aussi courant que ça ne l’est désormais. Si je mets 4 défenseurs, c’est jamais très bon signe dans un match, c’est que nous sommes menés. Cela fait d’ailleurs deux semaines que je passe à deux centraux et ce n’est pas bon (Reims Sainte-Anne restait sur deux défaites consécutives au moment de l’entrevue, début mai).

« On est passé pour un club de voyous »

Pensez-vous avoir évolué sur votre manière d’entraîner depuis vos débuts à Châlons-en-Champagne ?

Forcément on évolue avec les années et les expériences. Au début, j’étais davantage dans le rapport de force avec mes joueurs. Aujourd’hui je ne le suis plus du tout. Je suis davantage mesuré dans mes propos. Je suis presque plus comme un père, moins directif dans ma façon de conduire mes séances. J’axe davantage sur la transmission de valeurs qui s’appliquent d’ailleurs en dehors du sport, donner du sens à ce que je demande à mes joueurs. Le résultat est important, mais il ne faut surtout pas se focaliser uniquement sur cet aspect.

Quelle analyse faites-vous de la saison actuelle avec Reims Sainte-Anne (quand l’entretien a été réalisé, samedi 6 mai, avant un déplacement au Racing Club de Strasbourg B), le club possédait un point d’avance sur le premier relégable à 5 matches de la fin) ?

Photo Reims SA

La saison peut encore être une belle saison si nous nous maintenons en national 3. On a réalisé un parcours exceptionnel en Coupe de France en éliminant Sedan (National) et Fleury, leader de son groupe de N2, chez eux (Fleury a terminé 2e de sa poule derrière Epinal). On est resté invaincu durant toute la compétition (élimination aux tirs au but contre Wasquehal). Cette élimination nous a fait énormément de mal, surtout le scenario (match arrêté le 20 novembre à la 60e minute après des échauffourées alors que Reims Sainte-Anne, à domicile, menait 3 à 0 et qui a été rejoué à Clairefontaine, à huis clos, le 11 janvier 2023). Personnellement, je ne souhaitais pas rejouer. Pour vous remémorer le contexte, quand on rejoue, on sait que si on passe, c’est le Pays de Cassel au prochain tour et ensuite ce serait le PSG. C’était le match le plus compliqué à préparer dans ma carrière. Beaucoup de procédures, beaucoup d’attentes, de déplacements pour les différentes auditions, on pense qu’on ne va pas rejouer, on n’est pas prêts athlétiquement… On perd finalement aux tirs au but alors que nous avons l’occasion de marquer à cinq minutes de la fin, avec une énorme occasion aux 5 mètres 50. On a manqué d’efficacité contrairement au premier match où nous menions 3-0. Cet épisode a marqué le groupe, a marqué le président, a marqué le club, surtout parce que nous sommes passés pour des voyous. C’est ça le pire. C’est un énorme sentiment d’injustice. Un sentiment double, d’une part par rapport à l’issue de la rencontre et d’autre part rapport à l’image donnée.

Hervé Papavero, du tac au tac

Meilleur souvenir sportif ?
La montée en National 2 pour ma première saison en tant qu’entraîneur principal, à Châlons-en-Champagne (2003-2004).

Pire souvenir ?
La rencontre contre Wasquehal pour le compte du 8e tour de coupe de France le 20 novembre 2022 (Reims-Sainte Anne menait 3 à 0 avant que le match ne soit interrompu et finalement à rejouer sur terrain neutre, à huis clos, où Wasquehal l’a emporté aux tirs au but).

Le club où tu as pris le plus de plaisir ?
L’US Laon (saison 2021-2022, avec une 5e place acquise en Régional 1, ligue des Hauts de France).

La saison où vous avez pris le plus de plaisir ?
La saison 2003/2004 avec Châlons-en-Champagne.

Le club où tu n’aurais pas dû signer, l’erreur de casting ?
La Chapelle Saint-Luc (2011/2012)

Le club où tu as failli signer ?
Deux ans avant de signer à Roye, j’étais déjà proche de signer en National 2 dans ce club, quand ils avaient conservé Jean-Guy Wallemme. Finalement ça a juste été retardé deux saisons.

Le club que tu rêverais d’entraîner ?
Le Racing Club de Lens, pour leur système de jeu et le public.

Un modèle de coach ?
Pep Guardiola

Meilleur joueur entraîné ?
Steve Vétier. Il a été le plus impactant sur les résultats de son équipe, il a un pied gauche exceptionnel, comme j’en ai rarement vu à ce niveau là. Il a mis 20 buts en Régional 1 avec l’US Laon lors de la saison 2021/2022. Et aussi Anatole N’Gamukol et Gary Ambroise, très impressionnants. J’ai eu la chance de voir des très bons joueurs.

Pourquoi avez-vous choisi d’être entraîneur ?
Pour rester dans le monde du foot et l’envie de manager.

Un coach marquant ?
Jean-Claude Parage, que j’ai eu en coach jeune et plus tard.

Un coach perdu de vue que tu aimerais revoir ?
Franck Lorenzetti (qui a été notamment été l’adjoint à l’ESTAC d’Alain Perrin). Il a commencé très jeune à entraîner, de 23 ans jusqu’à 47 ans.

Un coach que tu n’as pas forcément envie de croiser ?
Mehdi Izeghouine (entraîneur de Wasquehal)

L’adversaire qui t’a le plus impressionné ?
Récemment, c’est Thaon-les-Vosges, qui au match aller nous a baladé toute une mi-temps en réalisant des enchaînements offensifs parfaits sur l’animation du jeu.

Un président ?
Le Président Philippe Lépine à Roye.

Le coach le plus connu de ton répertoire ?
Hubert Fournier (actuellement DTN à la FFF)

Une devise ?
Si tu veux être respecté, soit respectable

Tu es un coach plutôt …
Dans l’échange, rigoureux, comme s’il n’y avait rien de plus important que le match ou la séance d’entraînement du jour, même si on sait pertinemment qu’il y a plus important en réalité dans la vie.

Ta philosophie de jeu ? Ton style ?
Beaucoup d’intensité, un pressing haut et la verticalité. Le 3-4-3 ou le 3-5-2

Ton match référence avec toi sur le banc ?
La victoire 5-1 en coupe de France contre Sedan (National) au 6e tour de la coupe de France (16/10/2022).

Ton pire match avec toi sur le banc ?
Avec Château-Thierry, une défaite à domicile contre l’US Laon sur le score de 5 à 0.

Un match de légende ?
En 2003, contre Créteil, on joue le match de la montée et nous sommes menés sur le score de 1 à 0. Si on ne gagne pas, on ne monte pas. Et au bout de 15 minutes en deuxième mi-temps, on mène 3 à 1.

Un modèle de joueur ?
Michel Platini à l’époque de l’Euro 84

Une idole de jeunesse ?
Michael Jordan

Ta plus grande fierté ?
Mes trois enfants

Le milieu du foot, en deux mots ?
Passion du foot et prenant

  • Hervé Papavero (né le 18 février 1969 à Reims)

Parcours d’entraîneur :

– Châlons football club Olympique : 2003-2006
– Reims Sainte-Anne : 2006-2007
– US Roye : 2008-2011
– La Chapelle Saint-Luc : 2011-2012
– Prix les Mézières : 2014-2015
– Château-Thierry : 2016-2019
– Reims Sainte-Anne (Directeur Général) : 2020-2021
– US Laon : 2021-2022
– Reims Sainte-Anne : 2022-2023

Texte : Marc-Antoine Goulieux / Mail : contact@13heuresfoot.fr

Photos : Philippe Le Brech et Reims Sainte-Anne

Le « Grand Ouest Association Lyonnaise Football-club », né en 2020 d’un regroupement de sept villages, a gagné son billet pour le National. Fabien Pujo, le coach, et Jocelyn Fontanel, le coprésident, expliquent les particularités et le côté atypique de GOAL FC, un club qui va détonner dans l’antichambre du monde professionnel !

Photo 13heuresfoot

Du noir. Du doré. Du brillant. Du clinquant. Un logo dynamique, jeune et « qui pète ». Identifiable entre tous. Un logo créé en 2020 par la société « Octobo Lyon », en même temps que la naissance de GOAL FC.

GOAL pour Grand Ouest Association Lyonnaise. Pour le choix du logo, c’est réussi ! Très classe. Pour le choix du nom de la nouvelle entité, là encore, chapeau ! C’est très bien joué de la part des « inventeurs ».

Au GOAL FC, vu de l’extérieur, tout est très beau. Mais êtes-vous déjà allé à Chasselay, au stade Ludovic Giuly, à 15 kilomètres au nord de Lyon ? Parce que, comment dire, quand vous empruntez la petite route qui mène au complexe, que vous traversez les champs, que vous ne pouvez pas vous croiser à deux voitures, que vous cherchez un café ouvert un samedi, jour de concours de pétanque sur l’unique petite place de ce village de près de 3000 âmes, et que la bouse de vache trône sur le bitume, on est très loin du bling-bling !

Photo 13heuresfoot

Il est là le paradoxe. Et c’est ce qui peut décontenancer un adversaire, un supporter, un partenaire… D’ailleurs, le coach Fabien Pujo lui même, l’artisan de la montée historique en National, répète souvent cette anecdote : quand il est venu en août 2018 à Chasselay pour la première fois avec Toulon, il se demandait bien comment le bus allait pouvoir se garer !

GOAL FC a fait de tout ça une force. Sa force. Il a su fédérer, unir, inventer, innover, séduire. Pour entrer aujourd’hui dans la cour des 54 meilleurs clubs de l’Hexagone. Car la saison prochaine, le club au terrain champêtre, fondé en 2000 sous le nom de Beaujolais Mont-d’Or, avant de devenir Mont d’Or Azergues Foot (2005 à 2017) puis Mont d’Or Anse Foot (en 2017), se frottera à Dijon, Niort, Nîmes, Le Mans, Orléans, Châteauroux, Sedan, Red Star, Martigues, pour ne citer qu’eux, en National. Un autre monde.

Des villages d’irréductibles « Goalois »

Photo 13heuresfoot

Des clubs comme GOAL, il en reste très peu dans l’antichambre du monde professionnel. Et il y en aura forcément de moins en moins avec la refonte des championnats et la volonté, à la fois de la LFP et de la FFF, de tirer le football vers le haut. Quelle erreur !

Ce n’est pas pour rien si la coupe de France est l’épreuve préférée des passionnés et vrais amoureux du foot, celle où « les petits », comme on les appelle, font des exploits, prennent la lumière et écrivent de nouvelles pages de leur histoire. Celle où le football de village sort parfois vainqueur.

Photo Sebastien RICOU

A GOAL, l’histoire raconte celle de plusieurs villages. Chasselay donc, où Dominique Giuly, le papa de Ludovic, l’ex-international, 41 années de présence – il a quitté le club en 2000 alors qu’il était encore vice-président du MDA, avant le grand chamboulement -, fut une des figures emblématiques. Anse. Tassin-la-Demi-Lune. et Champagne-au-Mont-Or. Quatre villages d’irréductibles « goalois » auxquels se sont greffés les clubs de « Futsal Saône Mont d’Or », qui accède au plus haut niveau (Divison 1), avec Neuville-sur-Saône et aussi Saint-Germain-au-Mont-d’Or (en plus de Champagne et Anse). Et enfin celui de Chazay-d’Azergues pour la section féminine, pour devenir Goal Féminines Chazay. Vous suivez ?

C’est un peu compliqué, mais après tout, qui a dit que le foot était simple ?

Devant près de 2000 spectateurs !

Photo Sebastien RICOU

Samedi, il y avait près de 2000 supporters – deux habitants sur trois ! – pour l’événement de la saison : le match de la montée historique en National, face au Stade Bordelais. « C’est incroyable » dira avant la rencontre un Pujo assez relax – du moins en apparence -, au moment d’évoquer son adversaire du jour, un club qu’il connaît très bien pour y avoir évolué et où joue Anthony Loustalot, son ancien gardien de but du temps de Bergerac : « Je ne sais pas s’il est titulaire ou pas aujourd’hui ! »

C’est d’autant plus incroyable que, en mai 2018, Pujo avait permis au Sporting-club de Toulon d’accéder en National en battant… Chasselay 3 à 0 !

Un signe de plus du destin après celui, déterminant, du week-end précédent aux Herbiers : en s’imposant 3 à 1 en Vendée, sur le terrain du leader, et en lui chipant la première place, GOAL FC s’était justement donné les moyens de maîtriser le sien, de destin, pour cette ultime journée de National 2.

Avec ce nouveau succès 3-1 samedi dernier face au Stade Bordelais (buts de Julien Kouadio, Thibaut Le Maître et Alexis Gonçalves), les coéquipiers d’Antoine Philippon, le gardien qui avait déjà vécu une accession en National avec Villefranche en 2018, et du capitaine Loïc Dufau (troisième accession en 5 ans de N2 en National après les deux précédentes au Puy Foot 43 ! ) le rêve est atteint. Les « irréductibles Goalois » verront le National !

INTERVIEW

Interview / Fabien Pujo : « Ici, ça me ressemble ! »

Photo Sebastien RICOU

L’entraîneur de GOAL FC, arrivé l’été dernier après deux expériences contrastées à Toulon et à Saint-Malo (une accession tout de même en National en 2018 avec le club Varois, mais deux « limogeages »), était ému au moment de prendre le micro sur la pelouse du stade Ludo Giuly. Il l’était encore un peu au moment d’évoquer cette accession avec son nouveau club.

Fabien, c’est quoi, là, vos premières pensées…
Cette accession, c’est du travail. C’est beaucoup d’investissement, sur le plan familial aussi avec une famille qui déménage… Et puis je sortais de deux projets difficiles, à Toulon et à Saint-Malo. Finalement, je me dis que j’ai peut-être quelques compétences, parce que vous savez, on perd vite confiance en soi. Là, ce qui m’envahit, maintenant, c’est… On est un club très atypique. Faire une montée en National, ici, dans ce village, ça me ressemble. Je vois les joueurs et les gens heureux et ça, c’est au-dessus de tout.

Photo 13heuresfoot

Vous avez douté ?
J’ai vécu des moments difficiles professionnellement, il a fallu se reconstruire, trouver le bon projet, et quand je suis arrivé l’été dernier à GOAL, y’a eu aussi 17 nouveaux joueurs… Mais bon, les bases du club étaient déjà là quand même.

On dit souvent que les moments de bonheur sont très rares dans le foot : vous allez profiter, tout de même ?
Pour le moment, je ne veux pas penser à la suite. La semaine dernière, quand je suis allé à ma première session du BEPF, à Clairefontaine, on nous a expliqués qu’il fallait lâcher prise parce que nous, les coachs, on ne lâche pas assez prise. Donc ce soir (samedi), je vais lâcher prise totalement !

J’ai peut-être passé une de mes meilleures années de coach ici, avec un groupe exceptionnel, un capitaine, Loïc… J’ai jamais vu un capitaine pareil (Loïc Dufau). J’ai eu très peu de moments où je me suis dis que je n’avais pas pris de plaisir en allant en séance. Je n’ai quasiment pas eu de problématique de management. C’est une année exceptionnelle avec un président, Jocelyn Fontanel, qui a été solidaire au moment où il fallait l’être, des dirigeants et des bénévoles exceptionnels. C’est une vraie bonne saison qui, à titre personnel, se termine avec une admission au BPEF à Clairefontaine où j’ai les yeux d’un enfant quand je m’y rends, et aussi avec ma 2e montée en National en 4 ans après Toulon.

Justement, cette accession avec GOAL, elle est comment si l’on compare avec Toulon en 2018 ?

Photo 13HF

D’abord, je pense que cette accession de N2 en National est la plus dure de toute, on n’est pas nombreux à en avoir fait deux, y’a Roland (Vieira, avec le Puy), Richard (Deziré, trois fois même avec Le Mans, Avranches et Raon-l’Etape), Maxime (D’Ornano, avec Saint-Brieuc et Rouen)… Voilà, on va redécouvrir le grand monde, en espérant cette fois que… Non mais bon, ici ce n’est pas pareil qu’à Toulon, il n’y a pas de problème contractuel. Là-bas, j’avais crée des liens forts avec les supporters, on avait une relation vraiment affective, mais la montée n’avait pas été aussi intense avec le groupe, ça avait été très difficile avec la direction… Mais il y avait 6000 personnes quand même au stade de Bon Rencontre et ça… ! Ici, c’est plus la récompense du travail. On est vraiment allé la chercher.

En National, GOAL fera forcément figure de « petit »…
Quand les clubs vont venir ici, ils vont dire « ah ouaip… quand même… ! » Parce que, de l’extérieur, on imagine que GOAL FC est une grosse structure. Rien que le nom, « GOAL », ça pète, mais quand on est à l’intérieur, ce n’est pas la même chose, mais c’est ce qui fait son charme. C’est un club très atypique. Mais là, pour le moment, on va apprécier, on va vivre le moment, on va faire une bonne fête et ensuite on va se pencher très vite sur la suite !

INTERVIEW

Jocelyn Fontanel (président) : « On va changer de monde ! »

Photo Maxifooto

Président, présentez-nous votre club, comme si vous l’expliquiez à un néophyte ?
GOAL FC regroupe plusieurs communes. Le club est né à Chasselay. Il s’est étendu avec Anse, Champagne-au-Mont-d’Or et Tassin pour le foot libre, et on a intégré le futsal avec Saint-Germain-au-Mont-d’Or et Neuville-sur-Saône. Pour les filles, c’est Chazay-d’Azergues; ça fait 7 communes en tout, mais c’est le club de Chasselay on va dire…

Ce regroupement, c’est forcément pour avoir plus de moyens ?
C’était aussi pour avoir plus de moyens mais, il faut le dire, pour le moment, on n’a pas plus de moyens. C’était surtout pour rentrer dans la Métropole. L’idée, c’était d’occuper le territoire entre Villefranche-sur-Saône et Lyon.

Bon, il reste Limonest à côté, mais ils ne veulent pas se joindre à nous (sourires), tant pis, c’est comme ça, pourtant, ça serait naturel que l’on fasse des choses ensemble car on est à côté mais bon, ça fait 20 ans que c’est comme ça… C’est pas grave, c’est un très bon club, ils ont un très bon maire. Nous, on va poursuivre notre bonhomme de chemin tranquillement. On a des bases solides. Avec Olivier Delorme (coprésident depuis six mois), on connaît un peu de monde. En National, ça sera compliqué, mais j’espère qu’on va nous aider. On a aussi le futsal qui accède au plus haut niveau : c’est pas mal, non ?

Et la section féminines ?
Pour l’instant, chez les filles, on fait du volume. On a entre 130 et 140 filles, on a des U18 filles qui marchent bien et chez les plus jeunes, ça se met bien en place.

Photo 13heuresfoot

Depuis quand êtes-vous à la tête du club ?
Je suis président depuis le décès de l’ancien président, Gérard Leroy, en février 2012. Mais je suis arrivé au club en 1994… Donc j’ai 29 ans de présence au club ! J’ai été joueur et capitaine de l’équipe, j’ai participé à la première montée en DH (Régional 1) et au premier 32e de finale de coupe de France de l’histoire du club, et puis à la fin de ma carrière, le président m’a demandé de devenir vice-président : de par mon métier dans le bâtiment, on va dire que j’attire quelques partenaires et puis il y a eu son décès, malheureusement… Cela m’aurait plu de vivre une coprésidence avec Gérard Leroy.

Après sa disparition, on a travaillé à trois avec Dominique Giuly, qui est parti il y a 3 ans, et Mickaël Mendez, actuel manager général. Olivier Delorme nous a rejoints en 2000 en tant que président délégué d’abord, et depuis 6 mois il est coprésident. Tous les trois, on travaille beaucoup, on essaie de fédérer. GOAL FC , c’est un projet sportif mais c’est avant tout un projet humain. Regardez autour de vous…. Vous voyez où on est, c’est tout un village, c’est le Val-de-Saône, c’est le Grand Ouest Lyonnais … Quand on a joué une fois dans notre club, même si historiquement c’était MDA, Mont-d’Or-Anse Foot, les gens reviennent toujours, car ils y passent toujours de bons moments, car on respecte les gens et on gère le club en bon père de famille.

En fait, il fallait que le club se fasse une place…

Photo Sebastien RICOU

Oui, il fallait qu’on se fasse connaître. Le FC Villefranche Beaujolais fait du très bon travail, pour Lyon Duchère et Saint-Priest c’est un peu plus difficile en ce moment, et nous, il fallait qu’on existe autour de ces clubs.

Si on n’était resté que Chasselay, cela aurait compliqué, c’est pour ça qu’on a étendu le club dans la métropole. L’ancien président de Tassin m’avait contacté, et pour Champagne, le club allait mourir, c’est pour ça qu’on a créé ce nouveau club, et il y a d’autres communes encore qui ont des difficultés aux alentours de chez nous. On a notre centre d’entraînement à Parcieux, ex-FC Bords de Saône, où la tribune va être démolie mais il y aura toujours les deux terrains, l’un en herbe et l’autre en synthétique. On va faire, du moins pendant un an encore, notre centre d entraînement là bas.

Et ici, à Chasselay, comment allez-vous faire pour accueillir des matchs de National ?

Photo Sebastien RICOU

On a des travaux à faire au stade Ludovic Giuly pour qu’il soit homologué en National : l’éclairage, les vestiaires, que l’on doit refaire car ils ne sont pas assez grands donc on va pousser un peu les murs. On va mettre un tunnel de sécurité pour l’entrée des joueurs, les bancs de touche ne sont pas assez longs, il faudra mettre un tableau d’affichage aussi, des choses comme ça. On va commencer les travaux le 15 juin. De toute façon, tout cela était prévu même si on n’était pas monté, sauf l’éclairage, pour lequel on aurait attendu.

Quid du budget 2023-2024 ?
On aura besoin de l’aide de la Région, du Département, des mairies. On aura le fonds d’aide au club de la Fédération : c’était 230 000 euros et 7 euros du kilomètres pour les déplacements cette année. On aura aussi un peu de droit TV, donc au total, ça tournera peut-être autour de 300 000 euros pour l’aide fédérale, quand on avait 50 ou 60 000 euros en National 2.

Mais il n’y a pas que ça : on va changer de monde ! On essaie de construire un budget au dessus de 2,5 millions. Cette saison, on était autour de 2,1 millions, mais on est 1100 licenciés. Si nous étions 500 ou 600 licenciés, on serait à 1,8 millions.

Le nom du club « GOAL », ça « pète », c’est cliquant, et quand on arrive au stade, ça « pète » tout de suite déjà moins…

Photo Sebastien RICOU

C’est exactement ce que m’a dit le président de Grasse (Jean-Philippe Cheton) quand il est venu la première fois. Oui, mais on est les Gaulois aussi, c’est le stade Ludovic Giuly hein, c’est Astérix ! On est atypique, on le sait. Ce n’est pas que l’on cultive ça, c’est naturel, c’est comme ça.

J’ai regardé, en National, y’a beaucoup de clubs qui ont joué en Ligue 2, voire en Ligue 1… Mais cette saison en National, on va la vivre, on va défendre chèrement notre peau. Notre stade ? Faudra venir chez nous, hein…

Quand on jouait le maintien en CFA, des clubs comme Strasbourg ou d’autres, on les a tapés ici !

Des aménagements sont-ils prévus ?

Photo Sebastien RICOU

On va essayer de moderniser le site : ça prendra du temps, on va faire avec nos moyens, on va se débrouiller. A Auxerre, il n’y avait rien au départ et quand Guy Roux vendait un joueur, le club construisait une tribune…

Je ne sais pas si un jour cela nous arrivera mais il faut s’en inspirer. Le monde économique du foot est en train de changer, on voit de gros investisseurs arriver, on sera toujours en association pour le moment. On va travailler sur les partenaires et aussi sur le public : les matchs vont avoir lieu le vendredi soir, en afterwork, donc ce sont des choses nouvelles sur lesquelles on va devoir travailler. Il faudra cultiver ça. Et peut-être mettre une petite tribune en face.

Vous aurez un joli derby avec le voisin Villefranche…
Oui, avec le FCVB, ca va faire un beau derby entre amis, on s’entend bien avec Philippe Terrier, le président. J’aimerais aussi que Bourg-en-Bresse (le FBBP01) soit repêché, afin que l’on ait un maximum de clubs de la région dans le championnat, parce que ça draine du public et ça fait passer des bons moments. J’aimerais aussi que Nancy soit repêché, c’est mon ancien club (Jocelyn Fontanel a également évolué à l’Olympique Lyonnais).

  • Lire aussi / Fabien PUJO : « Quand je quitte un club après je deviens socios ! »

https://13heuresfoot.fr/actualites/fabien-pujo-quand-je-quitte-un-club-apres-je-deviens-socios/

Texte : Anthony Boyer / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr et contact@13heuresfoot.fr / Twitter : @Boyeranthony06 et @13heuresfoot

Photos : Sébastien Ricou, Maxifooto et 13HF

Photo Sébastien Ricou
Photo Sébastien Ricou
Photo Sébastien Ricou
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L’entraîneur de Quevilly Rouen Métropole (Ligue 2 BKT) revient sur ses expériences et ses souvenirs. Il évoque aussi quelques pistes de travail pour son club, dont il a assuré un maintien historique cette saison avec une 11e place.

Photo QRM

Coup de sifflet final face à Caen, au stade Robert Diochon, samedi 8 avril. Alexandre Mendy, l’attaquant du Stade Malherbe, se dirige vers Olivier Echouafni, et lui donne son maillot. « Je vous ai tenu la main quand j’étais petit à l’entrée du stade du Ray, à Nice, quand vous étiez capitaine… »

L’on sent l’entraîneur de Quevilly Rouen touché lorsqu’il raconte cette anecdote dans l’immense salle de presse du stade Diochon, quelques instants après ce derby remporté 2-1. D’autant plus touché que, Mendy et lui ont porté le maillot de l’OGC Nice, un club qui l’a marqué comme il l’expliquera plus loin dans ce long entretien accordé à la veille de recevoir Bordeaux, le 13 mai dernier (0-0).

Se poser (en visio) face à « Chouf » – son surnom lorsqu’il était joueur (OM, Rennes, Strasbourg, Nice) -, c’est l’assurance d’avoir une discussion réfléchie et constructive, avec, bien sûr, quelques tics de langages. Du moins un seul. Le sien ? « Faut être honnête », répété à l’envi mais qui dit tout de sa personnalité justement. Honnête. Droit.

Photo QRM

Pendant plus d’une heure, l’entraîneur en poste à QRM depuis un an, qui dispute ce soir à Niort le dernier match de la saison 2022-23 de Ligue 2, a retracé son parcours et livré une réflexion sur le métier d’entraîneur. « Je ne connaissais pas 13heuresfoot, je suis allé voir, j’ai lu quelques articles, notamment celui sur mon DG à QRM, Arnaud Saint-André. Et aussi sur Malik Tchokounté, lui aussi passé par Nice. J’ai vu son parcours qui est quand même assez incroyable… J’ai connu des coéquipiers qui ont eu des parcours similaires, qui sont arrivés sur le tard dans le milieu pro, je pense à Stéphane Grégoire, qui était avec moi à Rennes; il arrivait de Thouars en National et a signé pro à 28 ou 29 ans, en Ligue 1, et il a fait une carrière de 10 ans. »

L’entretien a commencé par le désormais célèbre « Du tac au tac », le genre d’exercice où il est demandé à l’interlocuteur de répondre ce qui lui vient à l’esprit : « Laisse moi un peu de réflexion quand même ! » réclame Olivier. Le natif de Menton, à deux plages de la frontière italienne, dans les Alpes-Maritimes, aujourd’hui âgé de 50 ans, a ensuite refait le film d’une carrière très riche (près de 400 matchs en Division 1) et passionnante.

Interview : « Je n’ai pas de plan de carrière ! »

Olivier, on commence par la carrière de coach…

Photo QRM

J’ai arrêté de jouer en 2010. A ce moment-là, on ne sait pas trop où et comment se positionner. J’avais un contrat de reconversion à l’OGC Nice où j’ai passé 2 ans à plusieurs postes. j’ai aidé au niveau du recrutement, j’allais rencontrer des futures recrues, observer des joueurs, voir des matchs, et en même temps je passais mon BEPF pour entraîner chez les pros. J’avais déjà passé les autres diplômes quand j’étais joueur. Pour mon BEPF, il fallait que j’entraîne une équipe alors j’ai été adjoint de la réserve de Nice en CFA avec Olivier Jannuzzi. C’est là que j’ai réellement commencé à entraîner.

Au BEPF, tu étais avec une promotion incroyable …
Oui, il y avait Olivier Pantaloni, le regretté René Marsiglia, Christophe Galtier, quand je les vois tous, avec le recul… Ils sont tous devenus des entraîneurs de haut niveau, Bruno Genesio, Michel Estevan, Régis Brouard, Laurent Huard, Lionel Rouxel, Sabri Lamouchi, pour ne citer qu’eux, Jean-Luc Vannuchi, Arnaud Cormier aussi, ça a crée des liens forts. On n’est pas en contact régulièrement mais on se croise sur les terrains. On n’était que deux anciens joueurs avec Sabri (Lamouchi) à ne jamais avoir entraîné. On était dans le dur, car il y avait beaucoup de travail, et le diplôme durait 2 ans à l’époque; ça a été très difficile pendant la première année.

Après Nice, tu as eu ta première expérience sur le banc à Amiens, en National…
D’abord, il y a cette grosse cicatrice : mon départ de Nice. Je ne la refermerai jamais. Ce qui s’est passé… Quand Jean-Pierre Rivère et surtout Julien Fournier sont arrivés, ils ont tout fait pour que je parte. Je ne rentrais en aucun cas dans leur projet. C’est ça que je n’ai pas aimé… J’ai donné pour ce club. Je suis quelqu’un de transparent, je pense que je suis honnête, et je ne me suis pas retrouvé dans leur discours; j’ai pris ça en pleine face. Je ne comptais pas mes heures. J’étais au service du club, je travaillais… Après, peut-être que l’on ne s’est pas forcément bien compris, mais au bout du compte, ils n’ont rien fait pour que cela continue ensemble et ils ont été malhonnêtes. C’était la volonté du directeur du football (Fournier). Je trouvais qu’il y avait une façon de faire et la leur n’était pas la bonne à mes yeux. Il a fallu digérer tout ça, ça a été très dur.

« Etre consultant m’a permis de former mon oeil »

Nice, ça te manque ?

Avec l’un de ses adjoints, Alain Wathelet, ancien directeur du centre de formation de Nice. Photo QRM

Oui, l’OGC Nice me manque ! J’ai quelque chose avec ce club, qui n’est pas refermé… Mais il faut être honnête, tout ce que nous, les joueurs, attentions à l’époque, est arrivé. Et je suis très content de l’évolution du club. Je me souviens de mon dernier match au Ray le 17 mai 2010, contre Saint-Etienne… En fait, il n’y a pas un seul joueur qui ne me parle pas de cette époque là, de cette ambiance au Ray !

Juste avant d’aller à Amiens, tu deviens consultant…
Charles Biétry m’a demandé si j’étais intéressé par un poste de consultant à la création de la chaîne BeIN sports, et là, j’ai passé une année incroyable ! J’ai travaillé à la télé et grâce à ça, j’ai vu l’envers du décor, ça m’a permis de comprendre aussi pourquoi les droits TV étaient aussi chers ! J’ai dû commenter 150 matchs, L1, L2, Europa league, Ligue des champions, j ai voyagé, j’ai revu du monde, j’ai vu des stades que je ne connaissais pas comme Tottenham, Chelsea en Angleterre, en Espagne aussi. A chaque fois, j’essayais de rester plusieurs jours pour voir comment ces clubs et ces entraîneurs travaillaient, ça me permettait de voir les structures.

Cela t’a aidé pour la carrière de coach ?
Oui, ça m’a permis d’emmagasiner de l’expérience, au niveau des systèmes mis en place, et surtout de former mon oeil. Ce que l’on nous apprenait au BEPF, je l’ai mis en pratique au travers de ce métier de consultant.

C’est ça qui t’a conforté dans l’idée de devenir coach ?
Le terrain me manquait. Quand on est consultant et qu’on n’a jamais entraîné, on dit certaines choses, après, quand on arrive sur le terrain, et bien on revoit un peu sa copie… Attention, je n’étais pas dans la critique, j’apportais juste des compléments d’informations, par rapport à mon ressenti, à ce que je percevais. Aujourd’hui, quand j’écoute certains consultants, ils ne savent pas, ils ne peuvent pas imaginer… parce qu’ils n’ont pas entraîné. La télé, ça a été une vraie belle formation. Avoir commenté différents matchs, différents styles, différentes équipes, dans différents pays, ça m’a encore plus renforcé dans l’idée de mettre des choses en place, après, en tant qu’entraîneur.

« Au début, à Amiens, je ne prenais aucun plaisir »

Donc, ensuite, tu arrives à Amiens, en septembre 2013, pour ta première expérience sur le banc, en National…

Avec le président Michel Mallet. Photo QRM

Je n’avais rien fait avant, et là, je prends un risque énorme. Je prends le risque de reprendre une équipe relégable, en cours de saison, et en plus j’arrive tout seul. Du coup, quand je me suis retrouvé là, je me suis dit « waouh »… En plus je ne connaissais pas le Nord. J’avais déjà fait l’Est, l’Ouest, pas le Nord. Je découvre le métier (rires), je repars de zéro, et ça n’a rien à voir avec ma carrière de joueur. Il fallait sauver le club et en même temps je débutais, je n’avais pas de repère, je ne connaissais pas bien le National, je ne connaissais pas le staff, mais le club était structuré, avec de bonnes installations. Au début, on n’a pas les résultats escomptés. Après deux mois et demi, j’appelle mon épouse et je lui dis « je ne prends aucun plaisir ». J’avais toujours cette image des entraîneurs qui disaient, et ça résonnait dans ma tête, qu’ils prenaient beaucoup de plaisir. Je me demandais comment c’était possible, parce que j’avais l’impression qu’être entraîneur, ce n’était que des emmerdes… Je n’imaginais pas l’envers du décor et la difficulté du métier. Je savais que je ne retrouverais pas les émotions que j’avais connues comme joueur.

Pourtant, cela s’est bien passé ensuite…

Photo QRM

La coupure de Décembre m’a fait beaucoup de bien, ça m’a permis de me poser, de redescendre chez moi dans le Sud, de recharger les batteries (il souffle) et là, après, on a vécu cinq mois incroyables, sans perdre un match, on finit 6e (à 1 point du 4e). Là, je m’y suis retrouvé. Bien sûr, il faut être honnête, le plaisir on le prend aussi à travers les résultats. Mais je ne connaissais pas tout ça encore, c’était les prémices de ma carrière, j’étais un jeune entraîneur. J’ai envie de dire que, aujourd’hui, je suis encore un jeune entraîneur.

A Amiens, tu as vu les bons et les mauvais côtés du métier en quelques mois…
Les 3 ou 4 premiers mois, cela a été une forme d’adaptation. J’ai observé, analysé. Et à partir de janvier, j’ai mis des choses en place qui ont fonctionné, avec un staff qui m’a suivi, qui a été très bien. Le terrain me manquait, il fallait bien se lancer ! J’avais besoin de m’épanouir dans un environnement différent, c’était le National, dans un club au statut pro, c’était déjà très bien. Certains mettent un temps fou avant d’entraîner à ce niveau.

« Leonardo a cassé tout ce que l’on avait construit au PSG »

Tu suis toujours le National ?
Oui, cette année, je regarde beaucoup de matchs. Le championnat est toujours aussi athlétique, y’a ces notions d’engagement, mais ça a perdu un peu sur la qualité technique je trouve, et encore, je suis allé voir le Red Star, ça joue, ça construit, et puis nous, à QRM, on regarde, ça nous intéresse, par rapport à notre recrutement bien entendu !

Après Amiens, tu as entraîné à Sochaux, en Ligue 2 : là-encore, tu trouves que le championnat a évolué ?
Cela a été une vraie « culbute » aussi d’aller à Sochaux ! J’étais programmé pour faire une deuxième année à Amiens et puis Sochaux, qui n’était pas prévu, est arrivé, comme ça ! La différence est abyssale. Sochaux, c’est un club historique, qui venait de descendre de Ligue 1. En fait, j’ai fait un triple saut, là ! Mais ce fut difficile avec le rachat du club, en plus, quand j’arrive, on ne sait même pas si on va rester en L1 ou reprendre en L2 avec l’histoire de la rétrogradation de Lens. Donc on ne pouvait pas recruter tout de suite, il a fallu attendre les 10 derniers jours. J’ai encore pris de l’expérience mais multiplié par 20 !

Ton expérience de 3 ans au PSG chez les filles a tout de même été très bénéfique…
J’ai pris beaucoup de plaisir à prendre de l’expérience, à mettre en place ma méthode, j’ai pu le faire et avec du temps. On a réussi à devenir champion de France et à battre Lyon qui était clairement la meilleure équipe du monde. On les a battues aussi en coupe d’Europe alors qu’elles étaient invaincues depuis 5 ans. Aujourd’hui, avec le recul, je me dis qu’ils (les dirigeants du PSG) ont fait n’importe quoi. Je n’ai pas apprécié et je n’ai pas accepté que Leonardo casse tout ça, tout ce qu’on avait construit. J’ai été déçu de quitter le PSG. On aurait pu aller chercher l’Europe et finalement ça s’est arrêté là. Mais je suis passé à autre chose.

« Avoir du temps, cela a de la valeur »

Du coup, aucune chance de te retrouver un jour à la tête d’une équipe féminine ou d’une sélection féminine ?

Photo QRM

Je ne sais. Je ne ferme aucun porte. Quand j’ai signé en équipe de France féminine, au poste de sélectionneur (en 2016), l’objectif est d’aller chercher un titre. J’ai eu 10 mois pour aller chercher un championnat d’Europe, bon, trop court, impossible… On a atteint les 1/4 de finale et on a été éliminés par l’Angleterre, ma seule défaite. En 10 mois ce n’était pas possible. Mais on a battu les Américaines chez elles à la « SheBelieves Cup » aux États-Unis, le tournoi le plus relevé du monde, que l’on a remporté. Mais je n’ai pas eu assez de temps. Quand je signe au PSG, on m’a laissé du temps pour construire des choses, malgré la Covid au milieu, qui nous a peut-être empêché de devenir championnes de France avant. Avoir du temps, ça a de la valeur à mes yeux.

Peux-tu raconter comment tu es arrivé à QRM ?
Déjà, j’aurais pu signer à QRM six mois avant, le club m’avait contacté*, je venais d’arrêter chez les filles, mais j’avais dit que prendre un club en cours de saison, ça ne m’intéressait pas, c’était difficile, je l’avais déjà vécu. Après, je ne faisais pas la fine bouche non plus. Mais j’avais aussi besoin de récupérer. Le terrain, ça manque vite. Arrive l’été dernier. Malgré des propositions alléchantes, des sollicitations chez les filles, comme celle du Real Madrid, qui me demandait d’aller battre Barcelone, ou encore celles de la Juve, de Chelsea, du Bayern, de la Fiorentina, eh bien j’estimais que j’avais fait le tour. Trois clubs de Ligue 2 se sont intéressés à moi, dont QRM. En fait, je n’ai pas de plan de carrière. J’aurais pu aller dans un club avec un plus gros budget, plus huppé, qui m’aurait donné plus d’argent, mais ma volonté, c’était peut-être de trouver ce que je recherchais, c’est à dire des valeurs humaines, ce qui manque un peu aujourd’hui dans le football. Les dirigeants de QRM, avec qui on a beaucoup échangé, ont réussi à me convaincre de poursuivre ce qui a été mis en place depuis 2 ans. QRM, c’est un club où y’a tout à construire de A à Z, ça me plaisait.

*Bruno Irles, l’entraîneur, est parti à Troyes à la trêve, finalement remplacé par Fabien Mercadal.

Comment décrirais-tu Quevilly Rouen pour quelqu’un qui ne connaît pas le club ?
C’est un club qui part de très très loin, avec des spécificités, des valeurs humaines exceptionnelles, qui sont son ADN. Tous les joueurs que l’on a pris, on les a pris pour leurs qualités sur le terrain, certes, mais aussi pour leur état d’esprit.

« On sait qu’on est la dernière roue du carrosse à Rouen »

Photo QRM

Et les infrastructures, on entend souvent dire que c’est un frein…
Les infrastructures, parlons-en. Qu’est-ce qu’on a aujourd’hui à QRM ? On a deux salles qui correspondent au monde professionnel : le bureau des coachs et la salle de presse ! Ce sont les deux seuls lieux qui ressemblent à quelque chose de professionnel, mais pour le reste… On a un terrain d’entraînement qui n’est pas aux normes et quand il pleut, on ne peut pas s’entraîner dessus car il y a trop d’eau, on est obligé de délocaliser les séances sur des terrains en synthétique qui ne sont pas en bon état. On a aussi le FC Rouen et le rugby en Pro D2 qui jouent au stade Diochon. Pour le rugby, c’est même la veille parfois… Il y a plus de 60 matchs par an à Diochon, donc automatiquement la qualité de jeu, elle s’en ressent. On est tributaire de ça. On sait qu’on est la dernière roue du carrosse à Rouen, où tout le monde nous met derrière les autres. Et bien malgré tout, on montre qu’on peut travailler. Mais on ne pourra pas continuer sur la durée. C’est impossible. Il faut un centre d’entraînement. C’est vital. Je suis exigeant et ambitieux. Je suis venu pour construire des choses et améliorer le quotidien de chaque personne, de l’intendant à l’ensemble de mon staff. On est parti à Pau le vendredi, on a joué le samedi soir et on est rentré le dimanche à 18h, ça va qu’on a gagné (4-3), mais la fatigue s’accumule, 8 heures de voyage, tout ça, ça coûte des points. Il y a des choses à améliorer, mais la principale, c’est le centre d’entraînement. Dans un second temps, il faut un gros stade : on ne peut pas avoir trois entités sur le même terrain. Il faut séparer le foot du rugby, voilà, c’est aussi important, parce que ça nous pénalise. Cet hiver, j’ai dû adapter mes principes de jeu et mon plan de jeu, car le ballon ne fait que sauter, à cause des matchs de rugby notamment.

Pendant de nombreuses semaines, QRM a figuré dans le top 8, et a même titillé le top 5 : c’est presque inespéré, non (11e aujourd’hui) ?
Déjà, c’est historique, parce que, quand on regarde les équipes sur la ligne de départ, il faut être honnête, on fait partie des quatre clubs qui vont descendre, mais justement, pour nous, c’est une source de motivation énorme. On a mal commencé la saison : 70 % de l’effectif a été renouvelé, avec 14 départs et 14 arrivées. Il faut du temps pour trouver le bon équilibre, trouver des automatismes. Et puis l’écoute des mecs a fait qu’aujourd’hui on en est là. On fait une très belle 2e partie de saison (l’entretien a été réalisé avant la réception de Bordeaux, le 13 mai). En termes de qualité de jeu aussi on a franchi une étape aussi.

« Parfois, on a du mal à me suivre ! »

Le stade Diochon. Photo QRM

Tu connaissais le contexte avec le FC Rouen ?
Oui ! Je n’avais pas vu les installations mais on m’en avait parlé. Mais ce qui est positif, c’est que j’ai un président et des dirigeants qui me laissent travailler et me font confiance, et Dieu sait si je suis exigeant avec moi-même, avec mes joueurs. J’ai tendance à être exigeant avec mes dirigeants aussi, et parfois, je vais trop vite, on a du mal à me suivre, mais je suis comme ça… Je savais que l’environnement était difficile, mais peut-être pas autant que ça. Par exemple, une fois, il a fallu aller jouer un match de championnat à Caen alors que l’on recevait Niort, c’était dans les accords, ce qui fait que l’on a joué un match de plus que les autres à l’extérieur. S’il n’y avait que le FC Rouen, cela irait, et en plus, franchement, nos relations sont très bonnes : le FCR est un club historique, avec 50 saisons en pro. Le FCR, c’est le club de la ville de Rouen et QRM, c’est le club de la métropole. Ce sont deux entités différentes et nous on a tout à écrire. On a commencé, avec de belles pages. On a la volonté de se pérenniser en Ligue 2 mais pour ça, il faut ce centre d’entraînement. Notre modèle économique, celui que l’on doit avoir, c’est celui de Lorient, Auxerre ou Guingamp. Ces clubs doivent être nos modèles.

Le maintien est acquis depuis quelques semaines, du coup, tu peux préparer la saison prochaine…
Oui, je travaille depuis des semaines pour la saison prochaine, pour avancer. On sait qu’on va perdre du monde, qu’on a aussi des joueurs prêtés qui vont partir. Avec Julien Converso, le directeur sportif, Arnaud Saint-André, le directeur général, Michel Mallet, le président, et les dirigeants, on travaille là-dessus, pour gagner du temps, contrairement à la saison passée. Quand j’ai signé en juin, franchement, ce n’était pas facile, avec 14 départs et 14 arrivées.

« A QRM, on ne vend pas du rêve »

L’équipe possède aussi la particularité de ne pas avoir de « vedettes »…
Non, non, on n’en a pas. On met en valeur certains joueurs, qui ont besoin de se relancer. D’autres, très jeunes, qui ont besoin de découvrir comme Mamady Bangré. D’autres qui ont besoin de se relancer. Il faut qu’il y ait un amalgame, une alchimie, mais ce qui est primordial, c’est l’état d’esprit : ici, on ne vend pas du rêve, par contre on a une méthode, on leur vend du travail, d ‘autres aspects, des valeurs humaines.

Le soleil du sud ne te manque pas trop ?
Le soleil ? Non, ça va encore. J’habite pas loin de Préfecture, pas loin de la Seine, c’est un peu la Méditerranée (rires) ! Je n’ai pas trop le temps d’aller en ville, je fais plutôt « stade – maison – stade », mais le centre de Rouen est sympa, joli, les gens sont gentils. La mer me manque oui, alors quand je redescends chez moi, quand je vois mes parents, ma famille, mes tantes, mes oncles, mes cousins, je prends encore plus de plaisir, je l’apprécie encore plus, la mer, comme je la vois moins souvent ! A Sochaux, j’avais pris un appartement dans lequel je ne me sentais pas bien : à Rouen, je n’ai pas fait cette erreur; je voulais de la hauteur et de la lumière ! Là, je suis au 5e étage, j’ai une vue dégagé. Au moins, même quand il ne fait pas très beau, j’ai de la lumière !

Olivier Echouafni, du tac au tac

« J’étais prédestiné à devenir prof de gym »

Meilleur souvenir sportif de joueur ?

Photo QRM

(Rires) J’en ai deux. La montée avec l’OM en Division 1 (en 1996). Quand je reviens à Marseille, on m’en parle toujours. On a fait partie de la deuxième génération des Minots, celle qui a fait remonter le club après l’affaire OM-Valenciennes. Certains me remercient encore ! C’est une grande fierté, un grand moment.

L’autre, c’est d’avoir permis d’emmener tous les Niçois à Paris pour la finale de la coupe de la Ligue (contre Nancy, en 2006, défaite 2-1), et aussi la demi-finale juste avant, à Monaco, qui reste un grand souvenir. Il y a aussi ce match, le 4-3 à Monaco, avec Nice, alors que l’on perdait 3 à 0 (en 2004). Y’a souvent Monaco dans les souvenirs !

Meilleur souvenir d’entraîneur ?
Le titre de champion de France avec les filles du PSG (en 2021), après une saison incroyable… Pas une seule défaite… Et puis c’est quelque chose que l’on a construit. Le titre était l’objectif du club et en plus on a battu Lyon. Mais ce que je vis avec QRM cette saison, c’est super fort aussi.

Pire souvenir sportif de joueur ?
(Il réfléchit). Ma blessure aux croisés, avec le Stade Rennais à Louis-II (en 2001)… Quand je vous dis que ce stade à Monaco est incroyable pour moi ! J’y ai quand même passé beaucoup de saisons (13), il m’a donné des émotions incroyables, j’y ai vécu des moments de déception et de tristesse, comme cette blessure, qui m’a coupé dans mon élan, alors que j’étais dans une bonne période.

Pire souvenir sportif d’entraîneur ?
Je n’utiliserais pas le mot « pire », je dirais plutôt ma plus grande déception d’entraîneur, c’est que le PSG ait cassé tout ce que l’on a construit. Et aussi la vente du club à Sochaux qui ne nous a pas permis de poursuivre le projet quand j’y étais l’entraîneur.

Ton plus beau but ?
A Monaco ! C’est fou hein (rires), c’est pour ça, je te dis, j’ai une histoire incroyable avec ce stade ! C’était sur un coup franc, avec le stade Rennais, je mets une tête plongeant qui finit dans la lucarne.

Tu détenais un record justement, celui du nombre de buts marqués en première division de la tête, et consécutivement : 8 ! Tient-il toujours ?
On m en a parlé y’a 2 ou 3 ans, France Football avait fait un sujet là-dessus, et à ce moment-là, je le détenais toujours, oui, et je sais que Cavani s’était rapproché mais finalement il a marqué du pied et voilà (rires) !

Photo QRM

Pourquoi as-tu choisi de devenir entraîneur ?
C’était ma destinée (rires). C’était un rêve caché de gamin comme plein de gamins ont, et qui est devenu réalité. Il a fallu faire un choix de carrière important, celui de quitter l’AS Monaco, où j’ai passé 13 ans, de l’âge de 5 ans à 18 ans, pour aller jouer en amateur à Roquebrune-Cap-Martin, en Promotion d’Honneur. C’est Gérard Proscelli, que j’ai encore au téléphone, et avec qui on échange beaucoup sur l’approche du métier d’entraîneur, qui m’a convaincu de venir en amateur, de faire une saison, puis une deuxième. Je lui dois beaucoup aussi. Car j’étais prédestiné à devenir professeur de sport. Je poursuivais mes études à l’UFR Staps de Nice, il fallait bien avoir un bagage pour travailler. Et il y a eu un concours de circonstances qui a fait que j’ai signé à l’Olympique de Marseille. En fait, j’ai marqué plus de 30 buts en deux saisons à Roquebrune, pour un milieu défensif… J’ai vraiment fait deux saisons exceptionnelles là-bas. J’ai pris confiance, je marquais dejà pas mal de la tête, je me projetais beaucoup sur le terrain, j’avais 18/19 ans, je jouais avec des adultes dont le beau-frère, à l’époque, de Jean Castaneda, responsable du Centre de formation de l’OM : il trouvait que j’avais des qualités pour aller un peu plus haut, ce qui m’a permis d’effectuer deux essais en avril 1993 et mai 1993 à Marseille, qui se sont avérés payants. Je me souviens que lors du premier essai, à Marseille, en 1993, on a fait un match contre les futurs champions d’Europe, alors que quelques jours avant, je m’entraînais en PHA ! Finalement je signe stagiaire à l’OM. Etre arrivé sur le tard, ça a été un mal pour un bien, ça m’a structuré, ça m’a permis de prendre du recul et ça m’aide aujourd’hui dans mon métier, j’ai l impression d’avoir une méthode.

« J’étais dans la notion de passe et d’espace »

Qualités et défauts selon toi sur un terrain ?
Je n’allais pas très vite, alors je jouais sur le sens du placement, la qualité de passe, l’intelligence de jeu qui me permettait d’avoir un temps d’avance, le jeu aérien bien sûr, notamment sur les coups de pied arrêtés. Je ne portais pas le ballon, j’étais dans la notion de passe et d’espace. C’est toujours difficile de parler de soi ! Je ne lâchais rien, j’étais un vrai combattant, fidèle, loyal, je pensais toujours au collectif avant de penser à moi. J’étais aussi un éternel insatisfait. J’avais une force mentale. Mes valeurs, honneur, fidélité, collaient bien par exemple avec celles de l’OGC Nice. Quand je vois ma carrière, je me dis que j’ai toujours été fidèle. Il n’y a pas un seul moment où je n’ai pas profité.

La saison où tu as pris le plus de plaisir ?
En termes de statistiques, c’est l’année à Strasbourg (1999-2000), où je mets 12 buts, dont 9 en championnat (et les fameux 8 de la tête !), ce qui m‘a permis de franchir une étape, et en plus, il y a eu la naissance de ma fille aussi cette saison là. D’un point de vue régularité, c’est à Nice, quand j’avais 35 ou 36 ans, je faisais presque tous les matchs, c’est pour ça, quand je vois Danté, je me dis « Waouh… » Mais c’est une hygiène de vie, on n’arrive pas là par hasard.

Une erreur de casting ?
On peut toujours avoir des regrets, je préfère parler de chance, celle qui m’a été donné de vivre de ma passion. On s’en rend compte bien plus tard, plus en tout cas que sur le moment. C’est vrai qu’après Strasbourg, j’aurais pu signer à Lyon, à Fulham en Angleterre, à Valence en Espagne, à Bologne en Italie, j’avais beaucoup de clubs qui s’étaient renseignés sur moi, même le Bayern Munich ! Finalement j’ai choisi la stabilité, avec le projet du Stade Rennais et de Monsieur Pinault. Si j’ai un regret, un seul, c’est celui de ne pas avoir connu certains entraîneurs dans ma carrière.

Le club où tu as failli signer ?
Lyon. A l’époque en 1999/2000, les trois clubs qui sont allés loin dans les négociations étaient Lyon, Rennes et le Fulham de Jean Tigana. Le Bayern était venu superviser Willy Sagnol lors d’un Strasbourg-Monaco, et ce jour-là, j’avais fait un très bon match, j’avais marqué 2 buts. Je leur avais tapé dans l’oeil et ils étaient venus me voir une vingtaine de fois. C’était l’époque où il fallait être supervisé 40 ou 50 fois avant de signer ! C’était déjà beau.

Un club où tu aurais rêvé de jouer ?
Vivre une expérience à l’étranger déjà ; en Italie peut-être, un club comme la Sampdoria de Gênes car je suis né à côté de l’Italie, c’était un club incroyable, avec de sacrés joueurs, qui faisait partie des équipes que je suivais, et aussi dans un club de Londres, mais il n y avait pas autant d ouvertures qu’aujourd’hui. Il faut remercier les Cantona, Ginola, Deschamps, Zidane et d’autres, qui ont permis d’ouvrir ces marchés qui étaient complètement fermés.

Un stade mythique ?
Joueur, Olympiakos Le Pirée, en Coupe d’Europe avec Marseille. J’y étais retourné avec Strasbourg. Quel stade ! Je n’ai pas eu la chance de jouer à Madrid mais c’est un stade incroyable aussi. Je citerais aussi le stade de Boca Juniors en Argentine, la Bombonera, c’est fabuleux. Ah, et aussi San Siro aussi, le vaisseau, à Milan !

Un coéquipier marquant ?
(rires) Un seul ? Attend j ‘essaie de me remémorer mes clubs… Pas un coéquipier mais une triplette, celle que l’on formait à Nice avec Flo Balmont et Cyril Rool, on se trouvait les yeux fermés, et devant nous on avait Ederson. La grinta faisait notre grande force. Et aussi à Strasbourg, David Zitelli et Corentin Martins : alors eux, sur coups de pied arrêtés… !

Un coéquipier perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?
C’est dur… On a tellement perdu le fil les uns les autres… On se revoit pour certains… On parlait d’Ederson, qui a eu des ennuis de santé, c’était un très bon garçon. A Rennes, Fabiano, qui est arrivé à 18 ans.

Le coach perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?
J’en ai connu 17 donc… je les ai pratiquement tous revus ou eux au téléphone. On ne se rend pas compte quand on est joueur de la difficulté du métier d’entraîneur. Il faut être honnête, y’en a avec qui ça ne s’est pas bien passé, mais je ne leur en veux pas pour autant. J’ai envie de dire Gérard Gili à Marseille, parce qu’il m’a lancé réellement, il m’a donné cette chance de devenir pro, avec Jean-Louis Gasset. Bien sûr, il y a eu aussi Raymond Goethals au départ, mais c’est surtout Gérard sans oublier Jean-Louis.

Un président marquant ?
Bernard Tapie. Y’a pas débat ! Aujourd’hui encore, il reste la personnalité la plus marquante que j’ai rencontré.

Une causerie de coach marquante ?

Photo QRM

Les plus fortes, c’est celles de Gérard (Gili). Il avait toujours ce sens de la motivation de par les mots, les émotions, l’intonation… Tout ce qu’il transmettait aux joueurs, c’était sa plus grande force. J’essaie de m’inspirer de ça, bien sûr, dans l’approche, dans le timing, dans la durée, afin de ne pas être trop long et d’être impactant. J’essaie de séparer la stratégie de l’aspect mental par exemple. Je m’inspire aussi de ce que j’ai appris sur les bancs de touche, avant. La causerie, c’est un exercice difficile, car on joue tellement de matchs, il faut toujours trouver des idées, des choses marquantes. Quand j’ai commencé mon métier d’entraîneur, je passais un temps fou à les préparer ! Quand on est joueur, on ne se rend pas compte du temps que peut passer l’entraîneur à préparer son match pour un résultat quel qu’il soit … parfois… et là on se dit « Tout ça pour ça ! ». Moi, la causerie, ça me prenait des heures voire des jours. Maintenant, ça commence à être de mieux en mieux mais j’ai ce besoin de préparer les choses. Certains entraîneurs n’ont pas besoin de la préparer, ils sont bons à l’instant T. Pas moi.

Une idole de jeunesse ?
Glen Hoddle. Le Platini anglais. Je l’ai vu de près à Monaco ! Je me suis même entraîné une ou deux fois avec lui et aussi George Weah, j’avais 17 ou 18 ans et j’avais complété le groupe pro, y’avait aussi Lilian Thuram, Manu Dos Santos mon ami d’enfance, Kelvin Sebwe, Cyril Granon, Bruno Rodriguez… Il me semble que Mark Hateley était là aussi.

Une devise ?
On n’a rien sans rien.

Ligue 2 BKT – 38e et dernière journée – vendredi 2 juin 2023, à 20h45, au stade René-Gaillard : Chamois Niortais (20e, 28 points) – Quevilly Rouen (11e, 49 points).

  • Vidéo : les meilleurs moments d’Olivier Echouafni à l’OGC Nice

Texte : Anthony Boyer / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr et contact@13heuresfoot.fr / Twitter : @Boyeranthony06 et @13heuresfoot

Photos : Quevilly Rouen Métropole

C’est l’entraîneur de la remontada dunkerquoise ! Grâce à un parcours exceptionnel après son arrivée sur le banc (31 points sur 36 !), l’USLD a retrouvé la Ligue 2, un an après l’avoir quittée. Le Biterrois de 44 ans est devenu le spécialiste des montées après celles vécues à Béziers (2018) et Bastia (2021). Entretien exclusif.

Photos USL Dunkerque

Lorsque Mathieu Chabert a signé le 2 mars, Dunkerque était alors 7e de National avec 9 points de retard sur Martigues et 8 sur Concarneau. Grâce à une extraordinaire série (10 victoires, 1 nul, 1 défaite soit 31 points sur 36), le club nordiste, vainqueur (3-2) au Mans lors de la dernière journée, a gagné sa place en Ligue 2, un an après l’avoir quitté.

Successeur de Romain Revelli, Mathieu Chabert, 44 ans, qui avait lui-même été écarté de son poste à Châteauroux début décembre, a transformé cette équipe de Dunkerque.

C’est sa 4e montée en six saisons après celle en Ligue 2 avec Béziers en 2018 avec déjà une série exceptionnelle (9 victoires sur les 12 derniers matchs) et les deux avec le SC Bastia, de N2 en National (2020) alors que son équipe était largement distancée par Sedan lors de son arrivée en octobre 2019 puis de National en L2 (2021).

L’ancien conseiller à Pole Emploi, au parcours atypique, est passé maître dans l’art d’emmener son groupe vers le haut lors des fin de saisons. Après avoir fêté la montée des Maritimes et commencé à rencontrer ses joueurs, Mathieu Chabert, malgré un emploi du temps très chargé, est revenu en longueur sur cette montée pour 13HeuresFoot.

C’est votre 3e montée en Ligue 2 avec trois clubs différents. Parvenez-vous à établir une hiérarchie entre elles ?
La dernière est forcément la plus belle. C’est celle en tout cas dont je suis le plus fier par rapport à ce qu’on est arrivé à mettre en place dans un laps de temps aussi court. C’est la première fois que des joueurs me pleurent dans les bras. Ça, je m’en souviendrai toute ma vie. Sur les trois montées en L2, aucune n’est pareille. Avec Bastia, c’était la fin du Covid et on est monté en regardant le match de QRM à la télé dans un salon du stade Furiani… Attention, c’était magnifique mais il manquait quelque chose. Avec Béziers, on était sur le terrain, on a regardé la fin du match Grenoble – Entente Sannois Saint-Gratien sur nos téléphones et on a explosé ensuite. C’était très fort. Celle-là, avec Dunkerque, c’était différent car on savait que si on gagnait, on ne dépendrait de personne. Tiens, je vais vous raconter ma causerie…

Allez-y…
On leur a montré une vidéo sur les réactions à la fin des équipes qui gagnaient une finale ou montaient… Il y avait La Rochelle en Coupe d’Europe de rugby, la fin du match et la montée d’Amiens en L1 en 2017 avec ce but à la 96e minute, celle de l’AC Ajaccio l’an dernier ou celles d’Annecy et Laval en L2 la saison dernière. C’était des caméras fixes sur les bancs de touche où on voyait de la tension sur les visages car la libération était proche, puis l’explosion. Les joueurs ont vu tout ça une heure avant le match. Trois heures après, c’est nous qui vivions les mêmes scènes. C’est ça qui est le plus beau émotionnellement. A Dunkerque, c’est la première fois que je fais douze causeries motivationnelles. A la fin, c’était devenu un jeu pour les joueurs. Ils disaient : « qu’est-ce que le coach nous a préparé cette fois ? » Ce qui est sûr, c’est qu’on a aussi bien rigolé. J’ai fait des causeries vidéos sur des combats de boxe, de MMA, sur des loups qui chassaient des buffles, le parcours de Benzema avec le Real Madrid en Ligue des Champions la saison dernière ou la compilation de leurs plus beaux buts. Mais j’ai déjà prévenu les joueurs : en Ligue 2, je n’aurai pas la capacité à en faire 38 comme ça.

Quatre montée en six ans, ce n’est plus une question de chance ou de hasard. C’est quoi le secret de Mathieu Chabert ?
Dans la vie et le sport de haut-niveau, il n’y a jamais de hasard. Le Mathieu Chabert de la montée de Béziers n’est plus le Mathieu Chabert de la montée de Dunkerque. Je n’ai pas changé. Je suis toujours le même. J’avais des facilités dans le management. C’est primordial et c’est un aspect que j’aime beaucoup.

Mais j’ai surtout beaucoup progressé tactiquement. J’ai un projet de jeu plus clair. Ce qui me fait plaisir, c’est que les joueurs ont apprécié. Le rôle et la fonction de chaque joueur étaient bien définis et étaient clairs. Les joueurs s’y sont retrouvés, ils ont eu un cadre dans lequel évoluer et ça a marché. Je suis fier bien sûr d’avoir réussi cette 4e montée en six ans avec Dunkerque. Mais ma plus grosse fierté, c’est de l’avoir réussi en proposant un jeu qui n’était pas celui que j’avais avec Béziers.

A Châteauroux, vous avez été beaucoup critiqué. Cette montée six mois après votre éviction est-elle une revanche ?
Je préfère profiter des moments que je suis en train de vivre plutôt que d’avoir de la rancœur. Ça ne sert à rien. Je n’ai de revanche à prendre sur quiconque. C’est le foot. Je trace ma route avec les gens qui ont envie de me connaître. Ceux qui n’ont pas envie, je ne m’en occupe pas. Chacun peut penser ce qu’il veut de moi, ça ne m’atteint pas. Je n’ai plus de problèmes avec ça. Avant, j’étais plus jeune. Je suis toujours un jeune entraîneur mais il m’a fallu un temps d’apprentissage pour savoir désormais me concentrer sur l’essentiel. Après, je vais vous dire une chose : si je suis monté avec Dunkerque, je suis persuadé que c’est aussi grâce à mon expérience à Châteauroux.

Expliquez-nous…
Tout simplement, j’ai beaucoup appris là-bas. Sportivement, ça a été le premier échec de ma carrière. Mais j’en ai tiré du positif. Je suis très content que Châteauroux se soit maintenu en National. Je suis content pour Maxence Flachez qui est quelqu’un que j’apprécie humainement, pour Michel Denisot, Patrick Trotignon et tous les gens de United World (le propriétaire saoudien). Après le match, j’ai reçu des messages de United World. Ils m’ont félicité pour la montée et ça m’a fait très plaisir. Je suis aussi content pour certains joueurs mais pas forcément pour tous les joueurs car certains ne sont pas des bonnes personnes… Je suis content pour tous les gens qui m’aimaient à Châteauroux. Et même pour ceux qui ne m’aimaient pas car leur club s’est maintenu.

Petit retour en arrière. Lors de votre départ de Châteauroux, vous nous aviez déjà accordé une interview exclusive dans laquelle vous expliquiez que vous ne vous voyiez pas replonger cette saison. Pourtant, le 2 mars vous arrivez à Dunkerque…
Reprenez mes propos… J’avais dit que si jamais il y avait un projet intéressant et que j’estimais qu’il ne pouvait pas se refuser, je ne m’interdisais pas de retenter le coup. Ça a été le cas à Dunkerque pour plusieurs raisons. D’abord car le terrain me manquait déjà beaucoup.

Contrairement à ce que j’avais vécu entre Bastia et Châteauroux, cette période a été plus longue, du 6 décembre au 1er mars. J’avais bien digéré, j’avais bien profité, je m’étais bien ressourcé. Je commençais à tourner en rond. J’avais cette sensation de manque et quand on a ce manque-là, ça créé une envie. J’ai eu Edwin (Pindi, le président) au téléphone et entre nous, ça a matché de suite.

C’est important de sentir qu’il y a des dirigeants qui vous veulent et que moi j’avais envie d’y aller. Entre nous, c’était gagnant-gagnant. Moi, je n’avais rien à perdre. Et sincèrement, j’avais quand même une idée derrière la tête car on veut toujours faire le maximum…

Ça veut dire que vous pensiez pouvoir revenir sur le haut de tableau malgré vos 9 points de retard ?
J’avais joué Dunkerque avec Châteauroux. J’avais trouvé que c’était une équipe très cohérente, bien structurée, avec un effectif de qualité. Je pensais que si on enclenchait une série, il pouvait y avoir une belle surprise. Mais la priorité réelle quand je suis arrivé était déjà d’assurer le maintien rapidement. On a débuté cette série et c’est parti !

Vous êtes rentré dans le cerveau de vos joueurs en leur disant « On va monter » dès votre arrivée. Certains ont avoué qu’il s’étaient dits « il est fou »…
Oui, c’est comme ça que ça s’est passé. Je leur ai dit : « La priorité, c’est de gagner rapidement trois matchs. Ensuite si on gagne ces trois matchs rapidement, je suis persuadé qu’on peut faire une série et gagner les 12 matchs. Et si on gagne les 12 matchs on va monter… ». Quand j’arrive, on est 7e avec 31 points en 22 matchs. Ça veut dire qu’en 12 matchs, on a doublé ce capital en prenant également 31 matchs. C’est juste exceptionnel.

L’acte fondateur, c’est cette victoire (3-2) contre Villefranche avec deux buts inscrits lors du temps additionnel le 17 mars pour votre 3e match avec l’USLD ?
On venait de gagner contre Châteauroux et Saint-Brieuc. Le club n’avait jamais remporté trois victoires de suite. Mais ce match contre Villefranche est effectivement fondateur pour plein de choses. Il valide notre projet de jeu, il valide le fait que cette équipe est mentalement capable de retourner des situations très très mal embarquées et il valide mon discours auprès des joueurs.

Que leur avez-vous dit à la mi-temps alors que vous étiez menés 2-0 ?
Ils pensaient que j’allais les pourrir. Mais je leur ai dit : « Bon les gars, qui a le plus d’occasions ? » Les joueurs me regardent et me répondent : « C’est nous, coach ». Je leur répond : « On est d’accord ». Je leur demande ensuite : « Depuis que vous jouez au foot, même en poussins ou pupilles, avez-vous déjà remonté deux buts et gagné 3-2 ? ». Tous me répondent « oui ».

Et là, j’enchaine par une dernière question : « Selon vous, combien de temps il faut pour marquer un but en moyenne, que ce soit en phase de récupération, en attaque placée ou en transition ? » Ils me regardent tous, ils ne comprennent pas trop… Je leur dit alors : « Il faut 30 secondes en moyenne. Il reste 45 minutes, potentiellement on peut donc marquer 90 buts. Ce n’est pas 3 buts qui vont nous faire peur…»

Visiblement, vos mots ont fait mouche…
Les mecs s’attendaient à ce que je les pourrisse et je leur tiens ce discours. Il fallait juste que ce soit nous qui marquions le 3e but du match. A partir du moment où on arrivait à le marquer, cela pouvait faire basculer le match. Freddy Mbemba marque vers la 55e minute et ça bascule. Sur le moment, je ne me dis pas que c’est un match fondateur. Mais avec le recul, je m’en suis rendu compte. Car derrière, on gagne notre 4e et 5e victoires de suite à Sedan et face au Red Star. Mais pour moi, il y a un autre match qui a compté dans notre parcours.

Lequel ?
Contre Le Puy lors de la 31e journée. C’est celui qui vient après notre défaite à Martigues (1-0), qui arrivait après sept victoires consécutives. Le Puy, c’est certainement notre plus mauvais match, on n’a pas beaucoup d’occasions. Mais on le gagne 1-0 à la 75e minute. Ce match est très important car beaucoup de personnes pensaient qu’à partir du moment où on allait subir notre première défaite, on aurait du mal à s’en remettre et à rebondir. Mais cette victoire 1-0, elle nous a relancé. Elle nous a permis de remettre un coup et de finir comme on a fini. Personnellement, elle m’a rassuré sur la capacité de réaction du groupe. J’avais fait 7 matchs, 7 victoires avant Martigues. Je ne connaissais pas l’attitude de mes joueurs dans la défaite.

Lors de votre arrivée, vous avez effectué un choix fort en titularisant dans les buts Arnaud Balijon, presque 40 ans, à la place de Sullivan Péan ?
On sait que pour faire une saison exceptionnelle comme ça et réussir à monter, le gardien doit être une pièce maîtresse.

On ne peut pas monter si notre gardien ne nous gagne pas de points. Arnaud, il nous gagne les trois points contre le Red Star (1-0) et il a souvent été décisif.

Oui, c’était un choix fort. Mais il n’était pas évident. J’arrive le 1er mars. Le jeudi, je dirige mon premier entraînement. La première chose que je dis à Sullivan, qui était juste irréprochable jusque-là, c’est qu’il n’allait pas jouer le lendemain. Quand on est entraîneur, ce sont des moments qu’on n’aime pas trop sur le plan humain. Car on sait qu’on va faire du mal à un de ses joueurs.

Mais les faits vous ont donné raison…
Aujourd’hui, je suis content d’avoir effectué ce choix car ça a marché. Mais ce qui me rend encore plus content, c’est de voir Sullivan, qui a mis du temps à comprendre ma décision et c’est normal, partir en courant et célébrer avec ses coéquipiers nos buts lors des derniers matchs. Quand on réussit à emmener tout le monde, même des joueurs à qui on a fait beaucoup de mal sportivement, c’est ça la plus belle réussite d’un entraîneur.

Après cette montée, on imagine que vous allez continuer avec Dunkerque ?
J’avais une clause d’un an, elle est donc activée. Donc pour l’instant, oui je continue. Mais il faudra aussi que si le futur repreneur arrive, il veuille bien travailler avec moi. J’apprécie beaucoup la manière de travailler d’Edwin Pindi et de Jocelyn Blanchard. Quand on sent la confiance de ses dirigeants, c’est important.

On entend beaucoup parler des problèmes financiers de Dunkerque, de plaintes. Avez-vous des craintes ?
Moi, je profite de l’instant présent et je me projette pour préparer la saison en L2. Le reste n’est pas de mon ressort. Je n’ai pas fondamentalement de craintes pour la suite. C’est juste mon avis, mais déjà avec la manne des droits TV en L2, cela permettra au club de faire les choses de manière cohérente.

Votre derrière expérience en L2 a été écourtée avec un limogeage au SC Bastia en septembre 2021, cinq mois après votre montée. Y a-t-il chez vous une volonté de montrer ce que vous êtes capable de réaliser à ce niveau ?
Ma carrière, je l’ai toujours construite étape par étape. Je pense avoir prouvé ce que je sais faire dans le championnat National avec ces trois montées. Donc oui bien sûr, j’ai beaucoup de détermination et de motivation pour prouver ce que je sais faire à un niveau dessus. Parce que je pense que je le mérite, c’est tout.. Je mérite d’avoir cette opportunité de travailler sereinement en L2.

Texte : Laurent Pruneta / Mail : lpruneta@13heuresfoot.fr et contact@13heuresfoot.fr / Twitter : @PrunetaLaurent et @13heuresfoot

Photos : USL Dunkerque

  • Lire aussi – Edwin Pindi : « à Dunkerque, on a une identité forte ! »

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  • Lire aussi – Jean-Pierre Scouarnec : « Si on remonte, on sera mieux préparé » :

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  • Lire aussi – Mathieu Chabert : « Châtearoux, le premier échec de ma carrière » :

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L’entraîneur du récent champion de National et promu en Ligue 2 BKT revient sur la formidable montée historique de son club ! Le président Jacques Piriou et l’attaquant Antoine Rabillard refont eux aussi le fil d’une saison aux superlatifs inépuisables.

Au hit-parade des mots les plus entendus, samedi dernier à Guy-Piriou, à l’occasion de la fiesta organisée pour la montée en Ligue 2 de l’US Concarneau et, cerise sur le gâteau, pour l’officialisation de son titre de champion de National 2023, il y avait une grosse concurrence entre « historique », « incroyable », « magnifique », « extraordinaire » et « formidable ». Mais ça c’était au début. Parce qu’après, on n’entendait plus rien. Trop de bruit, trop de musique, trop d’ambiance. Trop… Trop bien !

Et franchement, il n’y avait plus non plus de grands mots pour le dire. A la place, le ressenti. Plus fort : des regards complices, des sourires qui s’étirent, du bonheur et de la joie qui débordent, du temps qui passe, ensemble, et du temps qui dépasse l’instant présent, des souvenirs de la saison qu’on se raconte, des matchs que l’on refaits, des mains qu’on serre très fort, des joues qu’on embrasse passionnément, des buts qu’on raconte et que l’on revoit : Antoine Rabillard à la 94e contre Bourg (victoire 2-1, journée 33) et à la 86e à Orléans (victoire 2-1, 34e et dernière journée) ! Des talents que l’on découvre : Amine Boutrah, le meilleur joueur du National et « petit prince » de Guy-Piriou ! Ou que l’on redécouvre : Fahd El Khoumisti, le meilleur buteur (16 buts) malgré son faux départ au Mans… Avec eux, Alec Georgen et Gaoussou Traoré forment le carré d’as de l’équipe-type de National dans laquelle Mamadou Sylla avait largement sa place. La fête ne l’oublie pas et les verres s’entrechoquent à la santé de l’USC en Ligue 2. La soirée ne faisait que commencer. Avec quelques rencontres au passage d’une division à l’autre (du monde « amateur » au professionnel)… Jacques Piriou, l’heureux président emblématique d’un petit club qui monte; Stéphane Le Mignan (Trophée du meilleur entraîneur), le coach aux deux accessions du National à la Ligue 2 (Vannes en 2008 et Concarneau en 2023) et au style de jeu (reconnu par ses pairs) qui a défrayé la chronique durant toute la saison. Et, pour conclure, Antoine Rabillard, « Rabi » la classe, qui a marqué l’histoire des Thoniers en ajoutant finalement deux buts décisifs dans un rôle de joker de luxe. Merci pour ce moment. C’était bien. Vraiment bien.

Le cap de bonne espérance pour les Thoniers !

La Ligue 2 ne fait pas peur à Jacques Piriou. « Quand on est monté en National en 2016 (avec l’entraîneur Nicolas Cloarec aux commandes), certains nous disaient que c’était trop haut pour Concarneau ! Résultat, on avait tout de suite été champion d’automne », rappelle le président de l’US Concarneau. Mais avec finalement une place de 11e, la poule retour de la saison 2016-17 avait été plus difficile pour les Thoniers qui ont ensuite trouvé leurs marques à ce niveau en se classant 13e (2017-18 et 2018-19) puis 11e (2019-20, saison interrompue en raison de la Covi-19) avant l’arrivée de Stéphane Le Mignan au poste d’entraîneur.
Depuis, les Concarnois se sont classés 5es (2020-21) et 4es (2021-22). Une montée en puissance qui les avait même laissés sur leur faim car, avant « d’échouer » au pied du podium la saison passée, après avoir longtemps trusté le podium, voire la place de leader… Exactement comme cette saison qu’ils ont finalement terminée en apothéose en décrochant la médaille d’or.
Après sept saisons consécutives en National, les Thoniers franchissent donc leur cap de bonne espérance en basculant pour la première fois de leur histoire dans le monde du football professionnel !

Stéphane Le Mignan : « Des moments très forts »

« En début de saison, on était parti avec un peu de déception par rapport à ce qu’il s’était passé quelques mois avant malgré un très bon championnat (l’US Concarneau avait fini 4e après avoir longtemps été leader). On savait qu’il y avait un gros danger en raison des nombreuses descentes. Alors vivre ce que l’on a vécu jusqu’au bout, jusqu’à la 34e journée et jusqu’à la 86e minute car on finit le championnat sur le but de « Rabi » (Antoine Rabillard), ce sont des moments très très forts, uniques, imprévisibles. C’est la beauté du foot. J’avais dit aux joueurs avant le match à Orléans qu’ils devaient être fiers de ce qu’ils avaient déjà fait, quelque soit l’issue de la soirée, fiers d’avoir joué à l’US Concarneau durant cette saison 2022-2023. Mais je voulais qu’ils soient fiers aussi après le match et ils l’ont été en donnant ce qu’il fallait. Je suis très content d’avoir eu ces joueurs-là qui ont adhéré à ce que l’on a mis en place. Même quand ça a été plus difficile durant l’hiver, on n’a pas lâché, on est resté sur les mêmes idées et ça c’est une grande fierté. »

« Le tournant du Puy »

« On savait qu’on arrivait au bout et ce n’est pas là qu’on est le mieux car on est gêné mentalement avec tout ce qui se passe dans l’environnement, ça se joue au mental plus qu’au niveau technique, on est tous un peu perturbé. Mais un des tournants de la saison, c’est quand on rentre au vestiaire après la défaite au Puy (2-1, 32e journée) et que l’on apprend que nos concurrents n’en ont pas profité, que les autres résultats nous sont même favorables et qu’on est toujours deuxièmes ! Là, ça nous a donné un coup d’énergie et je pense même que l’on ne serait jamais revenu si on avait perdu la 2e place ce soir-là. Les joueurs ont été formidables et l’un des exemples c’est Antoine (Rabillard), un joueur expérimenté qui a déjà connu une montée en Ligue 2 avec Béziers et qui jouait moins en fin de saison en raison de mes choix. Et quand je fais appel à lui en fin de matchs, il rentre en jeu avec une attitude formidable (double buteur sur les deux derniers matchs). »

« C’est l’attitude des joueurs qui nous a fait passer »

« Je crois que ce qui nous a fait passer cette année, c’est l’attitude des joueurs qui jouaient moins. Je pense à « Rabi » parce qu’il a été le plus visible en étant décisif et je suis très content qu’il rentre dans l’histoire du club avec ces buts-là. On a Fahd (El Khoumisti) qui est meilleur buteur, Amine (Boutrah) qui est meilleur joueur, mais derrière on a une attitude extraordinaire avec Ambroise Gboho, Georges Gope-Fenepej, Adrien Julloux, tous ces joueurs qui ont moins joué parce que l’équipe performait. Mais ils ont eu une attitude exceptionnelle jusqu’au dernier match. Tout le monde a compris le message : malgré les déceptions il fallait que l’on reste unis comme jamais. Quand on sent que les joueurs qui jouent moins vous soutiennent, ça crée beaucoup de choses, et je pense aussi aux jeunes qui étaient avec la Régional 1 et qui ont apporté leur touche technique et hissé le niveau des entraînements. On n’avait pas pas ça l’année précédente parce qu’on avait un groupe moins nombreux et je pense que c’est aussi une pierre importante à l’édifice de notre réussite. »

« Les travaux du stade ? Un énorme point noir »

« Maintenant, on sait très bien que c’est une histoire qui se finit quoi qu’il arrive parce qu’il y aura des modifications, mais il faut savourer et profiter pleinement de ce groupe qui a été exceptionnel et qui rend fier tous les Concarnois. Mais ce que l’on peut déjà dire c’est que d’attaquer la Ligue 2 sans pouvoir jouer chez nous en raison des travaux nécessaires à la mise aux normes de notre stade c’est un énorme point noir. »

Jacques Piriou : « Ce n’est pas volé ! »

Le président de l’US Concarneau s’est lui aussi confié après cette accession tant attendue : « On ne pouvait pas rêver mieux! Même si le final a été extrêmement stressant et angoissant, tout est bien qui finit bien. Quand on fait l’analyse de la saison, ça me semble mérité et je ne suis pas le seul apparemment à le penser car de nombreux présidents de club m’ont envoyé des messages pour nous féliciter et dire que cette première place était méritée. Ce n’est pas volé en tout cas. Il y avait beaucoup de tension chez les joueurs, on a essayé de détendre tout ça, de les mettre dans les meilleures conditions possibles, les encadrer, leur expliquer ce qu’était le club. On a fait des interventions avec les bénévoles, avec les éducateurs, moi-même je suis intervenu pour essayer de relativiser les choses… Mais il y avait un tel enjeu que ce n’était pas facile, on a essayé de faire le mieux possible et ça n’a pas trop mal marché. »

« Mon coeur a pris des coups »

« Au mois d’août, on était davantage dans la configuration de se demander comment on allait faire pour s’en sortir avec six descentes, mais au fur et à mesure de l’avancement du championnat, on croit de plus en plus en notre effectif, on croit en ce que l’on voit, et on s’aperçoit que l’on peut rivaliser avec n’importe quelle équipe de ce championnat. Une fois qu’on a compris ça, ça donne le résultat d’aujourd’hui. Mais à Orléans, mon coeur a pris des coups pendant une heure et demie, avec des hauts et des bas, j’avais hâte que ça se termine. »

« Boutrah ne sera plus là »

« On va savourer, se reposer, et se remettre vite à bosser avec le coach, sachant qu’Amine Boutrah ne sera plus là. Il a des clubs de Ligue 1, je m’en réjouis pour lui, je lui souhaite que ça aille dans le bon sens pour sa carrière, je pense que ça va le faire et qu’il montrera que son passage par Concarneau a été plus que bénéfique et qu’il retiendra tous ces moments d’émotion qu’il a vécus ici. »

Antoine Rabillard : « Personne n’a boudé dans cette équipe »

« Il faut profiter au maximum, ce sont des moments à vivre, des moments rares dans une carrière (il est déjà monté en Ligue 2 avec Béziers en 2018). J’ai moins joué en fin de saison, ce sont des choix du coach. Que l’on ne soit pas content c’est une chose, mais si on boude et que l’on ne fait pas le travail derrière, ça ne sert à rien. Il faut continuer à y croire, à espérer. Personne n’a boudé dans cette équipe, c’est ça qui est extraordinaire, il y a un groupe qui est vraiment uni depuis le début. On l’a senti. Que le groupe vive bien, c’est facile quand on gagne, mais même quand on a eu des moments plus difficiles, on est resté soudés et unis. Le coach a su créer un groupe et on y a toujours cru. C’est la récompense d’un travail de longue haleine qui avait débuté en juin. »

Texte : Denis Vergos / Mail : dvergos@13heuresfoot.fr et contact@13heuresfoot.fr / Twitter @2nivergos et @13heuresfoot

Photos : US Concarneau

A deux journées du baisser de rideau, le suspense reste entier pour l’accession en National dans trois des quatre poules. Les coachs des Herbiers et de GOAL Fc se livrent avant leur duel qui promet, demain.

Anthony Soubervie (BPFC 24). Photo Raccon’s Colors

« Quand tu as un mental de chips, tu peux éventuellement jouer les accessits mais pas la première place…. ». « J’ai compris qui a envie de monter ou pas! ». « Je suis dans une colère noire » (…) « On ne mérite rien ».

Ces propos, tenus sur Twitter à l’issue de la 28e journée de National 2, voilà quinze jours, émanent de Christophe Fauvel, le président de Bergerac, extrêmement déçu, c’est peu de le dire, après le match nul concédé à Moulins (2-2), alors que ses joueurs menaient 2 à 0 chez la lanterne rouge.

Une expulsion à la 70e et deux buts concédés ensuite ont fait reculer les joueurs d’Erwan Lannuzel à la 3e place, deux points derrières Les Herbiers et un point derrière GOAL FC, au pire moment.

Encore que, en matière de pire moment, le BPFC 24 en connaît un rayon pour avoir vécu la saison passée un scénario cruel et irrationnel, avec une accession en National qui s’est envolée à la 90’+7 de la dernière journée, sur le terrain du Puy-en-Velay, avec ce but ponot inscrit sur penalty de Mamadou N’Diaye face à Colomiers, qui envoyait les joueurs de Roland Vieira en National.

Revivra-t-on ce type de scénario cette saison ?

A Bergerac, l’accession s’est éloignée pour les joueurs d’Erwan Lannuzel mais tout est encore possible. Photo Raccon’s Colors

Rien n’est impossible. Surtout dans cette poule D où l’on assiste, depuis le début de l’année 2023, à un chassé-croisé entre GOAL FC, leader tout au long de la première partie de saison mais victime d’un gros trou d’air en mars, Bergerac, dont on ne compte plus le nombre d’occasions manquées au printemps, et Les Herbiers, que l’on a cru un temps sur la voie royale avant, eux aussi, de ralentir la cadence. Ce qui donne à l’arrivée un superbe sprint final.

A deux journées de la fin, donc, ce sont Les Herbiers qui ont les cartes en mains : deux succès et ils retrouveront le National, quitté en 2018 dans les conditions que l’on sait… Une finale de coupe de France le mardi perdue 2 à 0 au SDF face au PSG puis, trois jours après, une défaite 4-1 à Béziers, qui jouait sa montée en Ligue 2, et qui plongeait les Vendéens, jamais relégables, en N2, à l’issue d’incroyables concours de circonstances.

Il devrait donc y avoir beaucoup de monde demain au stade Massabielle pour cette « demi-finale » du championnat entre le leader et son dauphin. Une victoire des hommes de Laurent David, conjuguée à un nul ou une défaite du BPFC 24 à Andrézieux, les propulseraient en National.

Epinal-Fleury-Bobigny : l’autre match à 3 !

GOAL FC livrera une demi-finale demain aux Herbiers. Photo @maxifooto

A quelques jours de cette 29e journée qui sera peut-être décisive, nous avons demandé au trois coachs concernés par la montée de répondre à quelques questions. Si Laurent David (Les Herbiers) et Fabien Pujo (GOAL) ont joué le jeu, ce n’est malheureusement pas le cas d’Erwan Lannuzel, qui, d’accord sur le principe dans un premier temps, s’est ensuite excusé par texto de ne pouvoir répondre favorablement à notre requête : « La direction du BPFC 24 a décidé que le timing de communication n’était pas bon, et donc de laisser le club et les joueurs tranquilles durant cette période ». Dont acte…

Dans les trois autres poules, l’ont connaît déjà un promu en National : le FC Rouen (poule A). Dans la poule B, celle que l’on appelle communément la poule Sud, le MGCB (Marignane Gignac Côte Bleue) a lui aussi les cartes en mains : avec 5 points d’avance sur Lyon-Duchère, un succès demain au stade Saint-Exupéry face à Toulon enverrait les Aviateurs en National, eux qui ont déjà connu une première et courte expérience à ce niveau lors de la saison 2018-19. En cas de match nul ou de défaite, les Provençaux resteraient sous la menace des Lyonnais qui, dans le même temps, accueilleront Louhans-Cuiseaux.

Et si les deux équipes venaient à terminer ex-aequo en fin de saison (un nul et une défaite de Marignane, deux succès de Lyon Duchère), le goal-average serait favorable aux Rhodaniens, vainqueurs 2 à 0 à l’aller à Balmont et auteur d’un 0-0 au retour.

Enfin, dans la poule B, la situation est un peu comparable à celle de la poule D, avec trois équipes à la lutte pour l’accession et un chassé-croisé permanent. Et, comble du hasard là encore, un duel va opposer demain deux des trois candidats : Epinal, l’actuel leader, se déplacera à Bobigny; ça promet !!

Voilà, faites vos jeux, et n’écoutez pas ceux qui disent qu’à l’instar de la saison passée, ce n’est pas la bonne année pour accéder en National, avec encore 6 descentes l’an prochain ! Vous refuseriez, vous, de vous frotter à l’étage au dessus ?

Poule B

  • J29 – Samedi 27 mai : FC 93 Bobigny-Bagnolet-Gagny (3e, 52 points) – Epinal (1er, 54 points); Saint-Geneviève – Fleury 91 (2e, 54 points).
  • J30 – Samedi 3 juin : Epinal – Lusitanos-Saint-Maur; Fleury 91 – Boulogne et Colmar – Bobigny.
  • Confrontations directes
    Fleury – Epinal 0-0 et Epinal – Fleury 2-1
    Fleury – Bobigny 2-0 et Bobigny – Fleury 5-0
    Epinal – Bobigny 1-4

Poule D

  • J29 – Samedi 27 mai : Les Herbiers (1er, 49 points) – GOAL FC (2e, 48 points) et Andrézieux (12e, 34 points) – Bergerac (3e, 47 points).
  • J30 – Samedi 3 juin : GOAL FC – Stade Bordelais ; Bergerac – Vierzon; Moulins-Yzeure – Les Herbiers.
  • Confrontations directes
    Les Herbiers – Bergerac 1-1 et Bergerac – Les Herbiers 0-1
    Bergerac – GOAL FC 2-2 et GOAL FC – Bergerac 0-0
    GOAL FC – Les Herbiers 0-2

INTERVIEWS

Fabien Pujo (GOAL FC) :

« Le favori, c’est Les Herbiers »

Trois équipes en 2 points à deux journées de la fin : sincèrement, vous attendiez-vous à ce scénario ?

Fabien Pujo, le coach de GOAL FC. Photo @maxifooto

Non, et ce malgré notre très bonne première partie de saison. Je pensais que Les Herbiers allaient faire cavalier seul quand, début 2023, ils sont venus gagner chez nous 2 à 0 puis à Bergerac 1 à 0 juste après. Cette équipe a réalisé une série de victoires et a montré qu’elle était la plus forte, donc je pensais qu’elle allait faire cavalier seul sur la phase retour mais l’irrationalité du football en a décidé autrement même si, au final, à 2 matchs de la fin, ils sont leaders… donc les meilleurs.

Des quatre poules de National, la vôtre est celle où le leader, et plus globalement les trois premiers, ont le plus petit nombre de points, et d’assez loin : est-ce que cela a une signification particulière ?

La réforme de la FFF a accentué la volonté de ne pas perdre. J’ai connu trois groupes de N2 : ce groupe « centre » est très homogène avec des équipes très bien organisés, des blocs très compacts. Les équipes ont décidé de placer la notion d’équilibre, la notion de protection de son but, la notion d’exploitation des espaces, la notion d’exploitation des erreurs au cœur de leur projet de jeu. On l’a vu en coupe de France, Les Herbiers, Vierzon, Chamalières, trois équipes de notre poule, ont brillé : ça montre la difficulté de gagner les matchs dans cette poule avec peu d’écart entre les équipes, et des matchs qui se jouent sur des détails.

A deux journées de la fin, quels peuvent être les (nouveaux) leviers à actionner au sein de l’équipe pour aller chercher cette première place ?

A deux journées de la fin nous sommes des chanceux car sur les 16 équipes au départ, on fait partie des 3 équipes qui jouent encore un match pour accéder en National donc ce n’est que du bonheur. Il n’y a plus de leviers si ce n’est profiter tous ensemble, être acteurs de cette fin de saison. Les joueurs, par leur mentalité, leur travail, leur performance, se sont donné le droit de vivre des émotions incroyables. Avec 17 nouveaux à l’intersaison, revivre ça dès la première année, c’est leur récompense et la récompense pour tout un club qui progresse.

Ne pas monter cette saison, serait-ce vécu comme un terrible échec ?
Non. Pas du tout. Déjà, en N2, il n’y a qu’une seule équipe qui monte, c’est très très dur. Donc quand on vit la saison que l’on réalise, le mot échec n’est pas approprié. Ce serait plutôt une déception. Le club progresse et si on ne monte pas cette saison, il poursuivra sa progression et fidélisera un groupe, ce qui n’a pas été le cas ces dernières années. On va essayer de bonifier tout ça. Je le répète, n’oublions pas qu’on a commencé la saison avec 17 nouveaux joueurs. Le club va améliorer ses infrastructures (stade, conditions d’entrainement). La réussite demande de la méthode et du temps. Le National 2, c’est très complexe. Regardez par exemple Toulon ou Andrézieux, qui luttent pour ne pas descendre. Donc non, ça ne serait pas du tout un échec de ne pas monter.

GOAL FC peut-il se servir de son expérience malheureuse de la saison passée (même si des joueurs ont changé, même si le staff a changé…) ?

Oui, je pense que ce que le club as vécu la saison passée permet de mieux appréhender les événements. On a eu une période très complexe sur cette phase retour et le club a montré une vraie solidarité envers le staff et le groupe pour trouver des solutions. Il y a eu un climat de grande sérénité qui a permis de toujours croire en nous et sûrement que la fin de saison dernière a permis à l’institution de gérer différemment cette période. De plus, le choix de mon profil et du profil de certains joueurs allait aussi dans ce sens car nous avons connu des montées par le passé, donc on peut mieux appréhender ce moment de la saison qui n’ a rien avoir avec le reste de la saison.

8 victoires, 5 nuls et 2 défaites lors de la phase aller (29 points), 5 victoires, 4 nuls et 4 défaites (dont 3 d affilée en mars) lors de la phase retour (19 points) : comment expliquer cette baisse de régime à l’approche du printemps ? Comment expliquer ce passage à vide en mars ?

C’est multi-factoriel, des absences de joueurs plus-value comme Camelo ou Reale, des blessures, des suspensions, des erreurs individuelles plus présentes, moins d’efficacité, des adversaires plus performants, une période hivernale plus longue avec des terrains de mauvaise qualité ce qui a compliqué la tâche de nos profils « type espagnol » et ce qu’on appelle le principe de progression qui n’est pas linéaire… L’Endurance de la performance collective, c’est un apprentissage qui demande du temps. Regardez Bergerac, qui a un groupe avec une durée de vie de 3 ans, l’an dernier ils se construisent dans le sprint final avec une énorme déception à l’arrivée et cette année peut-être que ce qu’ils ont vécu ensemble ne suffira pas… Il faut être très performant dans ce money time. Alors qu’après notre confrontation ils étaient leaders à 5 matchs de la fin, là ils restent sur 3 nuls… Tout ne s’explique pas dans le football. J’aime bien quand Michel Platini dit que le football est irrationnel.

Sachant qu’une défaite aux Herbiers serait éliminatoire, et qu’un nul peut faire l’affaire de Bergerac si ils s’imposent, doit-on s’attendre à une partie « ouverte » en Vendée (J29) ? Quel souvenir du match aller ?

Avec la meilleure attaque à domicile, Les Herbiers, marquent 1 but toutes les 46 minutes chez eux donc oui il y aura des buts car leur modèle de jeu est remarquable, basé sur la volonté de marquer 1 but de plus que l’adversaire : ça tombe bien, nous aussi on est sur cette philosophie de jeu ! De plus, notre position nous oblige à gagner pour continuer à croire que le rêve peut devenir réalité. Au match aller, cette équipe a démontré qu’elle était plus forte que nous (2 à 0 pour Les Herbiers) donc ce n’est pas un « super » souvenir, notamment avec ces 2 penaltys sifflés en 20 minutes : j’espère que le match retour ne se jouera pas sur un penalty.

De l’extérieur, on a vraiment l’impression que tout est possible, que tous les scénarios sont possibles, en même temps, la lutte pour la 1re place peut aussi s’arrêter samedi : avez-vous des convictions sur cette fin de saison, comment la voyez-vous, comment l’imaginez ?

Je suis entraîneur, pas voyant ni magicien ! Nous voulions jouer le sprint final nous y sommes et cerise sur le gâteau, nous jouons un super match aux Herbiers à deux matchs de la fin, sur une terre de football, sur une magnifique pelouse, avec, je l’espère, du monde au stade contre la meilleure équipe de la poule ! C’est incroyable ! Nous aurions signé tout de suite en début de saison pour vivre tous ensemble cette story !

Qu’est-ce qui peut faire la différence ?

Ce qui peut faire la différence c’est que l’arbitre nous aide (sic) et que l’on se retrouve pas à 10 comme à Chamalières car cela deviendrait mission impossible, et aussi que Les Herbiers décident de déjouer et de défendre leur point d’avance et de nous donner de la force en nous laissant le ballon … Ce sera très compliqué, car à ce moment de la saison dans un stade plein totalement acquis à la cause du leader, réaliser un exploit serait une sorte de miracle pour nous.

Le favori, c’est Les Herbiers ?

Oui, comme je te l’ai déjà dit, quand une équipe va gagner à Bergerac et à Goal FC, eh bien elle a démontré que c’est elle la plus forte.

Vous avez été absent durant cette semaine de préparation avant Les Herbiers : est-ce un handicap dans le money time ?

C’est vrai que je suis à Clairefontaine pour ma semaine 1 du BEPF. Ce n’est pas idéal mais d’un autre côté, cela peut casser la routine. J’ai une totale confiance dans tout mon staff, dans mon groupe de joueur et dans mon club sur ce sprint final.

Allez-vous changer vos habitudes ?

Nous avons modifié certaines semaines avec des séances plus courtes en volume tout en gardant l’intensité, moins de complexité pour retrouver de la fraîcheur psychologique. Nous avons passé une soirée à Lyon tous ensemble autour d’un match de Ligue des champions renforcer la cohésion. Nous avons aussi effectué deux séances à 6h du matin dont une sur une forme de méditation pour prendre conscience de la chance que nous avions de vivre de notre passion et que seul le travail, l’implication, la persévérance, la discipline, la rigueur, la confiance, une mentalité collective commune conduit vers la réussite …

Laurent David (Les Herbiers) :

« Favoris nous ? Oui et non… »

Trois équipes en 2 points à deux journées de la fin : sincèrement, vous attendiez-vous à ce scénario ?

Laurent David, le coach des Herbiers. Photo Philippe Le Brech

Non. Mais voir Goal FC et Bergerac en haut oui car en termes de vécu et de moyens, ils ont les arguments pour prétendre à jouer la montée. Aux Herbiers, on est parti d’une page blanche avec 16 nouveaux joueurs et un nouveau staff. 80% du groupe a été renouvelé. Mais depuis décembre, on a su intégrer les premières places donc pour répondre à la question je dirais « oui » depuis décembre.

N’est-ce pas « miraculeux » ou plutôt inespéré de retrouver Les Herbiers en position d’accession à deux journées de la fin alors que votre équipe n’a remporté qu’un seul match entre la J19 et J26 (1v 4n et 3d) ?

Miraculeux ? Chaque équipe a connu un trou d’air dans la saison. Dans notre mauvaise période de la Journée 19 à la Journée 26, on a connu 3 défaites sur nos 5 de cette saison. Le groupe D est très homogène et on n’a pu avoir la chance que personne ne s’échappe.

A deux journées de la fin, quels peuvent être les (nouveaux) leviers à actionner au sein de l’équipe pour aller chercher cette première place ?

Des nouveaux leviers ? Non… On ne doit rien changer à notre philosophie de jeu, à nos principes très précis depuis le début de saison. On doit continuer sur cette voie-là.

Comment allez-vous préparez ces deux derniers matchs de la saison ? Allez-vous changer des choses ?

La préparation de nos deux derniers matchs ne change pas. Pourquoi tenter des choses alors que l’on a nos certitudes ?

Des quatre poules de National 2, la vôtre est celle où le leader, et plus globalement les trois premiers, ont le plus petit nombre de points, et d’assez loin : est-ce que cela a une signification particulière ?

Je n’en ai aucune idée ! La différence se fait au niveau des victoires (3 en moyenne de plus pour les autres groupes). Dans notre groupe D, tout le monde peut battre tout le monde. C’est peut-être une explication quant au nombre de points.

Les Herbiers a eu plusieurs occasions de creuser un petit écart sur ses deux principaux poursuivants, de faire un petit break : pourquoi n’y est-elle pas parvenue ?
On a eu l’occasion de creuser l’écart, oui, mais on a connu beaucoup de blessures et de suspensions pendant cette période. Et l’on a affronté des adversaires de qualité qui nous ont empêché d’y arriver.

Ne pas monter cette saison, serait-ce vécu comme un terrible échec ?
Non car ce n’est pas programmé, contrairement à nos adversaires. Ce serait plutôt une déception si on échouait si proche du but.

Sachant qu’une victoire des Herbiers à la J29 face à GOAL FC éliminerait les Lyonnais de la course, un nul suffirait alors à la J30 : est-ce le tableau de marche envisagé ?
On n’a pas de tableau de marche non. Il reste deux matchs que l’on va essayer de gagner. Il n’y a pas de calcul à faire. Chaque match aura sa vérité.

De l’extérieur, on a vraiment l’impression que tout est possible, que tous les scénarios sont possibles, en même temps, la lutte pour la 1re place peut aussi s’arrêter à la J29 : avez-vous des convictions sur cette fin de saison, comment la voyez-vous, comment l’imaginez ?

Oui, c’est vrai que tout est possible sur cette fin de saison. Mais je n’ai pas de convictions. La seule certitude que j’ai, c’est qu’il faut gagner nos deux derniers matchs pour parvenir à monter.

Dans un mini-championnat à 3, Les Herbiers est pour l’heure devant GOAL FC et Bergerac : les plus forts, les favoris, ce sont Les Herbiers ?

Si on est favori ? Oui et non. Oui car aujourd’hui on est leader et non car face a Goal et son budget et Bergerac et son expérience, on en est loin.

Concrètement, qu’est-ce qui peut faire la différence ?

La différence ? Honnêtement, je sais pas !!! On doit se concentrer sur notre jeu et être le plus performant possible.

Allez-vous changer des habitudes ou vos habitudes pour ce sprint final ?
Non, aucun changement de prévu.

Textes : Anthony BOYER

Mails : aboyer@13heuresfoot.fr / contact@13heuresfoot.fr

Twitter : @13heuresfoot et @BOYERANTHONY06

Photos : GOAL FC / Maxifooto ; BPFC 24 / Raccon’s Colors ; Philippe Le Brech

Après trois saisons en Ligue 2 au Paris FC et à Dunkerque, le milieu de terrain de 27 ans a connu le chômage pendant six mois, avant de finir la saison au Paris 13 Atletico, 17e de National et relégué N2. Il espère rebondir en L2 ou à l’étranger.

Au Paris 13 Atletico. Photo Philippe Le Brech

« Personne ne m’a jamais fait de cadeau, mais je suis le genre de personne qui, lorsqu’elle prend un coup, n’abandonne jamais, se relève et repart au combat. » La carrière de Mario-Jason Kikonda, milieu de terrain du Paris 13 Atletico (National) a été jalonné d’embûches.

Après avoir quitté la Seine-Saint-Denis et sa famille à 16 ans pour aller jouer dans des clubs amateurs en province (Montceau, Vannes), il a explosé en 2019 à Concarneau en National.

Cette demi-saison lui a permis de signer, à 23 ans, un premier contrat professionnel au Paris FC. Mais après trois bonnes saisons en L2 (PFC puis Dunkerque), le natif du Mans a connu le chômage pendant six mois. En janvier dernier, il a rejoint le Paris 13 Atletico (National) pour se relancer. Un club qu’il va quitter après sa relégation en National 2 et qui ne jouera plus rien vendredi soir, lors de la 34e et dernière journée de championnat, contrairement à son adversaire, Châteauroux, à la lutte pour le maintien. Il espère retrouver le monde professionnel en France ou à l’étranger. Pour 13HeuresFoot, il s’est longuement confié sur son parcours, plutôt inspirant.

« Je suis parti à 16 ans du 93 pour aller à Montceau, un club amateur »

Au Paris 13 Atletico. Photo Philippe Le Brech

Mario-Jason Kikonda a grandi dans une famille nombreuse congolaise-angolaise en Seine-Saint-Denis. Il a effectué ses débuts au Blanc-Mesnil puis a signé au Bourget en U14. Mais sans attirer des clubs professionnels. « À un moment, j’avais complètement décroché du foot, avoue-t-il. Je voyais mes amis avec qui je jouais partir dans des clubs pros mais moi, je n’avais rien. Avec le recul, j’ai compris que dans la vie, on avait chacun son propre chemin à tracer. Finalement, si j’étais moi aussi parti en centre de formation à 15 ans, est-ce que j’aurais été le même homme aujourd’hui ? Je ne le pense pas. J’ai transformé tout le négatif qui m’est arrivé en force positive. »

A 16 ans, Kikonda n’avait pas hésité à quitter la Seine-Saint-Denis pour un club amateur, à Montceau-les-Mines, en Saône-et-Loire. « Montceau, ça m’est tombé dessus un peu par hasard. J’avais la volonté de quitter la région parisienne mais je ne pensais plus trop au monde pro. Montceau, c’était dur mais je n’avais pas le choix. Ça m’a fait quand même un choc par rapport à la région parisienne. Je jouais en U17 nationaux, c’était bien, mais le club n’était pas structuré pour accueillir un jeune comme moi de 16 ans. C’était bancal. Je dormais chez des joueurs en attendant d’être logé par rapport à l’école. »

« A Vannes et Concarneau, je me suis senti comme chez moi en Bretagne »

Avec le Martégal Mohamed Mara. Photo Philippe Le Brech

Après à peine deux mois à Montceau, il décide donc de quitter le club. Il rejoint Vannes où vit l’un de ses frères. Le club breton, ancien pensionnaire de Ligue 2 et finaliste de la Coupe de la Ligue en 2009 face à Bordeaux, vient de déposer le bilan et est reparti en DSE (en dessous de la DH).

« Mais il avait gardé de bonnes structures et aussi des U17 et des U19 nationaux », explique Kikonda qui va ensuite participer à la remontée du club. « J’étais capitaine en U19 puis j’ai vite intégré l’équipe première. Tout s’est passé merveilleusement bien. Il y avait beaucoup d’anciens qui avaient connu la L2 ou le National avec Vannes et qui étaient restés comme Franck Dufrennes, Erwan Quintin, Pierre Talmont, Jean-François Bédénik ou Florent Besnard. Ils nous ont vraiment bien encadrés, nous les jeunes. Grâce à eux, j’ai beaucoup appris et grandi. Je reste un Parisien mais au fil des années, je me suis senti comme chez moi en Bretagne. »

Au Paris FC. Photo Philippe Le Brech

Après plusieurs montées, il quitte Vannes, alors en National 2, pour Concarneau, en National en décembre 2018 : « Je l’ai remarqué lors d’un PSG – Vannes en National 2. Je n’étais pas venu pour lui mais pour voir Diego Michel dont je m’occupais. Mais je l’ai vite remarqué. Il avait la maturité, la vision du jeu, la qualité technique. Pour moi, il était bien meilleur que certains qui jouent en Ligue 2. Il n’avait rien à faire en N2 », nous expliquait Jean-Charles Parot son ancien agent.

Kikonda n’a eu besoin que de quelques matchs pour totalement éclater en National. « Mon objectif était de tout cartonner pendant 6 mois à Concarneau puis de partir, avoue-t-il. Le National est davantage regardé et ça m’a donné plus de visibilité. »

« Une fierté de revenir chez moi à Paris pour un contrat professionnel »

Au Paris 13 Atletico. Photo Philippe Le Brech

A la fin de la saison 2018-2019, les sollicitations affluent : Ligue 2, Angleterre, Belgique, etc. Mais il est freiné par une blessure. « Ca a fait fuir plusieurs clubs. J’ai commencé la saison en National en jouant les deux premiers matchs puis je me suis encore blessé. J’étais assez nerveux car je voulais partir. Concarneau a aussi repoussé plusieurs offres de clubs. »

C’est le Paris FC qui parvient à arracher la décision à la fin du mois d’août pour un transfert de 120 000 € (plus bonus) et un contrat de 3 ans. Après six ans en Province, Mario-Jason rentre chez lui en région parisienne.

« J’avais bien aimé le parcours du Paris FC la saison précédente (barragiste), je ne voulais pas aller trop vite dans un club plus huppé et c’était Paris. C’était le meilleur choix car ça m’a rapproché de ma famille même si j’ai toujours eu l’habitude de me débrouiller seul. Je suis revenu à Paris pour un contrat pro. C’était aussi une fierté. Après, pouvoir jouer devant sa famille, ses proches, ce n’était que du bonheur. Mes parents pouvaient enfin venir me voir jouer au stade alors que c’était forcément plus compliqué quand j’étais en Bretagne. »

A Dunkerque la saison passée. Photo USLD.

Au Paris FC, Kikonda va disputer 39 matchs de L2 lors de ses deux premières saisons. Mais sans pouvoir s’imposer comme un titulaire indiscutable et sans passer le cap attendu malgré plusieurs prestations convaincantes. « Je suis un joueur qui a besoin d’enchainer les matchs pour garder le rythme, plaide-t-il. Au Paris FC, j’étais à chaque fois dans le groupe mais je ne débutais pas toujours. Ça m’a un peu freiné. J’ai des regrets de ne pas avoir joué plus. Il m’a manqué ce petit déclic. Mais je ne rejette la faute sur personne. Certainement que j’aurais pu faire mieux. »

tAu Paris FC, Thierry Laurey a remplacé René Girard au début de la saison 2021-2022. Mais lors des deux premiers matchs à Grenoble, puis face à Dunkerque, il ne rentre que pour 16 puis 5 minutes. « Là, j’ai compris que ça allait être compliqué pour moi. La saison ne partait pas très bien. Je me suis dit qu’il valait mieux partir. »

« Le chômage, c’est comme si tu prenais une balle… »

Avec Paris 13 Atletico. Photo Philippe Le Brech

Le 30 août 2021, dans les derniers jours du mercato, il signe un contrat d’un an (plus une autre année en option) à Dunkerque (L2). Il dispute 28 matchs dont 20 comme titulaire. « Sur le plan personnel, je pense avoir rendu une copie correcte. J’étais bien à Dunkerque. Malheureusement, on est descendu en National. Mon option d’un an ne marchait qu’en cas de maintien. »

Au mercato, son entourage et lui étaient davantage focalisés sur un départ à l’étranger. Il est tout près de signer au Manisa FK (Division 2 Turque) où évolue son ancien coéquipier du PFC, Marvin Gakpa. Mais le dossier capote au dernier moment.

Avec Vannes. Photo Philippe Le Brech

« Ca m’a desservi de regarder davantage vers l’étranger. J’ai perdu du temps, ça m’a fermé des portes en France. J’ai eu des discussions mais les effectifs étaient déjà complets presque partout. J’ai compris que j’allais entrer dans une grosse galère. »

Pour la première fois de sa carrière, il connaît donc le chômage. « C’est un peu chaud. Tu te prends une balle dans la tête (sic)… Ce n’est pas que j’avais un très grand train de vie avant, mais tout change… Sur le plan financier, on est obligé de faire davantage attention. Tu réalises mieux la valeur des choses. C’était une période assez difficile. Mais comme souvent, j’ai réussi à transformer cette période sombre en positif. Je me suis marié en décembre, mon frère aussi s’est marié. Les préparatifs, ça m’a permis de penser à autre chose. »

« Je suis déjà content d’avoir pu jouer avec le Paris 13 Atletico »

Au Paris FC. Photo Philippe Le Brech

Niveau football, il est approché par le Paris 13 Atletico. « Au départ, ils voulaient me faire signer. Je n’étais pas trop pour. Mais ils m’ont dit, viens t’entraîner avec nous, pour connaître le club et le groupe. J’ai apprécié leur proposition. Ils m’ont tendu la main. Au final, j’ai signé au mois de janvier. J’ai fait des sacrifices financiers. Mais c’était la meilleure option pour me relancer cinq mois. L’étranger, c’était encore le bazar (sic) et c’était compliqué de m’organiser pour un départ. Il valait mieux que je reste sur Paris. »

Au Paris 13 Atletico, l’impossible pari du maintien n’a pas été atteint. Mais lui a pu enchainer les matchs, marquant même deux buts. « J’ai eu du mal au début car je n’avais pas fait de préparation. Je me sens de mieux en mieux, j’ai retrouvé les jambes. Mais je suis déjà content d’avoir pu rejouer. Au Paris 13, les conditions sont un peu spéciales mais il faut savoir s’adapter. Avec une vraie préparation, cela aurait été un autre Kikonda ! Mais j’ai pris conscience que, sans préparation, je ne pourrais pas réaliser de grosses performances sur le terrain. »

« Ce qui m’a permis d’avancer, c’est mon caractère »

Avec Vannes. Photo Philippe Le Brech

Les prochaines semaines seront cruciales pour lui. « Le mercato de l’an dernier va me servir de leçon. Je veux rester dans une certaine logique. Certains coachs me connaissent déjà après mes trois saisons en L2 avec le Paris FC et Dunkerque. Le fait d’avoir rejoué avec le Paris 13 Atletico à un certain niveau peut les conforter dans l’idée que je suis toujours là et pas fini… Il y a déjà quelques discussions. On verra bien. Mais j’espère pouvoir être fixé rapidement pour ne pas connaitre encore ce que j’ai vécu l’an dernier. »

Comme à son habitude, il ne lâchera rien. « Quand je me retourne sur mon parcours, je suis assez content. Je suis parti de très loin mais j’ai réussi à faire ma carrière. Le foot, c’est un milieu spécial. Il y a des hauts et des bas. Il faut savoir profiter des bons moments et toujours se battre. Je ne regrette rien. Ce qui m’a toujours permis d’avancer, c’est mon caractère. Je suis solide dans ma tête et je me suis toujours accroché. »

Mario-Jason Kikonda, du tac au tac

Avec Vannes. Photo Philippe Le Brech

Votre meilleur souvenir ?
Les montées avec Vannes. C’était exceptionnel. Après, mes meilleurs souvenirs sont aussi liés à des ambiances, des stades pleins. C’est ça qui rend le foot magnifique. J’ai bien aimé l’ambiance à Guy Piriou quand je jouais à Concarneau. En Ligue 2, je me souviens que lors de certains déplacements, à l’échauffement, il m’arrivait juste de regarder les tribunes et de sourire bêtement en voyant les gens chanter. Jouer à Bollaert par exemple, c’est quelque chose…

Votre pire souvenir ?
Pas de match en particulier. Mais forcément la situation que j’ai vécue lors des six premiers mois de cette saison. Quand tu es au chômage, ça fait quand même réfléchir.

Vos qualités et défauts ?
Ma qualité, c’est mon énorme mental. Dans ma tête, je suis solide. C’est ce qui m’a permis de surmonter ce que j’ai traversé lors de mon parcours qui n’a pas toujours été facile. Quant à mes défauts, ce n’est pas à moi de les juger.

Avec Vannes. Photo Philippe Le Brech

Votre geste préféré ?
La passe cachée. Celle qui casse bien les lignes. Je trouve ça trop magnifique.

Votre plus beau but ?
Je ne marque pas beaucoup mais l’un est resté dans ma tête. C’était avec Vannes, le lendemain de mon 22e anniversaire, le 21 avril 2018. Si on gagnait, on était champion et on montait en N2. Je suis à 30 mètres Je reçois une passe en retrait de Franck Dufrennes . Je crochète un défenseur, puis je trébuche sur la balle. Mais j’arrive à me redresser et j’envoie une frappe de loin en lucarne. J’avais ouvert le score et on gagne 5-0 face à Dinan-Léon.

Votre geste défensif le plus mémorable ?
C’était lors d’un Lens – Paris FC à Bollaert le 28 septembre 2019. C’est mon 4e match avec le Paris FC. On n’est pas très bien classé. J’ai récupéré le ballon in-extremis face à un Lensois. Je tacle, je mets mon corps en opposition puis je récupère le ballon. Ça se finit en jeu long pour mon attaquant Romain Armand qui réduit le score. Mais on perd 2-1.

A Concarneau. Photo Philippe Le Brech

Le joueur le plus fort avec qui vous avez joué ?
A mon échelle à l’époque, c’est Franck Dufrennes à Vannes. C’était un ancien pro (Dunkerque, Raon, Colmar, PSG). Tout ce qu’il faisait sur le terrain, ça paraissait trop facile, il avait des gestes incroyables. Moi, j’étais jeune, je ne connaissais pas grand-chose au milieu du foot, il m’a tout expliqué.

L’entraîneur qui vous a marqué ?
Laurent Hervé à Vannes. Je l’ai eu en U19 puis en équipe première. Il a fait énormément pour moi.

L’entraîneur que vous ne voulez pas recroiser ?
Moi je suis quelqu’un de tranquille et pas prise de tête. J’ai toujours accepté ce que me disaient mes entraîneurs et respecté leur choix. Je n’ai jamais eu de souci avec eux.

Le président qui vous a marqué ?
Ceux que j’ai connu à Vannes et Concarneau. Ils ont toujours été là pour moi.

Au Concarneau. Photo Philippe Le Brech

Vos amis dans le football ?
J’en ai énormément. J’ai gardé beaucoup de contacts avec mes anciens coéquipiers. Notamment ceux du Paris FC. On était une vraie famille.

Le joueur le plus connu de votre répertoire ?
Il y en a quelques-uns de très connus…

Mais par rapport à la Coupe du monde et à sa saison en Allemagne, je dirais Randal Kolo Muani. On vient tous les deux de la région parisienne et on avait même joué l’un contre l’autre en N2 lors d’un Vannes – Nantes.

Vos occupations en dehors de foot ?
Je suis quelqu’un de très casanier et posé. J’aime bien rester tranquillement à la maison pour me reposer.

J’aime bien les lendemain de match où il n’y a pas d’obligation. Priorité à la récupération ! Je regarde la TV, du foot mais pas seulement.

Avec Vannes. Photo Philippe Le Brech

Si vous n’aviez pas été footballeur pro ?
J’aurais continué dans la branche de mes études, électricien. J’ai gardé quelques bases. Mais je ne suis pas apte pour faire un chantier.

La région parisienne, la Bretagne ou le Nord ?
Paris, c’est chez moi. Le Nord, Dunkerque, ça a été rapide, moins d’une saison. J’ai bien aimé la Bretagne. J’étais bien là-bas. Ils ont l’accueil dans le sang. Ils m’ont vraiment mis bien.

Texte : Laurent Pruneta

Mail : lpruneta@13heuresfoot.fr et contact@13heuresfoot.fr

Twitter : @PrunetaLaurent et @13heuresfoot

Photos : Philippe Le Brech

Avec Vannes. Photo Philippe Le Brech

 

L’ex-gardien de but professionnel (National, Ligue 2, Ligue 1) a bien géré son après-carrière. Reconverti dans la gestion de patrimoine, il est aussi arbitre central en National 2 ou 4e arbitre en Ligue 2 le week-end ! Entretien.

Sous le maillot du FBBP01, en Ligue 2. Photo Philippe Le Brech

Riche, atypique, à son image. Voilà comment on peut résumer la carrière de Gaëtan Deneuve. Le gardien de but baigne depuis tout petit dans le football. Formé au Havre, il a connu 8 clubs, du Régional 3 à la Ligue 1 en passant par les deux championnats qu’il connaît le mieux : le National et la Ligue 2.

Freiné par les blessures, embêté par la concurrence à son poste si particulier, le natif de Harfleur (à côté du Havre), âgé de 38 ans, s’est toujours frayé un chemin pour atteindre ses objectifs et s’imposer dans la majorité des clubs où il est passé.

Le Normand s’est longuement confié sur sa grande passion pour le ballon rond, son parcours, sa reconversion professionnelle et… l’arbitrage, un autre volet qu’il a découvert après avoir raccroché les gants ! Du coup, c’est lui qui siffle le top départ de l’entretien !

Sous le maillot du FBBP01, en Ligue 2. Photo Philippe Le Brech

Dans votre carrière, il y a ce passage singulier où vous quittez un club de Ligue 1 pour rejoindre Goderville en… Régional 3 ! Comment expliquer ce cheminement ?
Le cheminement est fou. Je fais mon année à Brest en Ligue 1 où je suis doublure. Le lendemain d’un match en fin de saison à Marseille, on fait un décrassage et je ressens une douleur au dos intense qui me pousse en dehors des terrains jusqu’à la saison suivante.

Pendant les vacances, Brest recrute un 2e et un 3e gardien alors que je suis toujours absent à cause de ma blessure. En revenant, je serai potentiellement 4e dans la hiérarchie. Brest estime que l’opération n’est pas nécessaire mais je souffre toujours. Je fais un gros programme de musculation, des infiltrations, on essaye tout, sans succès. Je demande alors au président de résilier. Je connaissais très bien le docteur du HAC qui avait vu mes IRM et disait qu’il fallait que je sois opéré.

Avec le FBBP01, en Ligue 2, en août 2017. Photo Philippe Le Brech

Alors je retourne sur Le Havre, je me fais opérer à Paris et je reviens assez vite. Michel Courel était toujours l’entraîneur des gardiens du centre de formation, le président était également le même. Ils décident de m’accueillir pour que je puisse m’entraîner avec la réserve. On était en cours de saison, j’étais libre de tout contrat et je savais que je ne pourrais pas retrouver un club tout de suite. Je pouvais alors signer dans un club de Ligue (niveau « régional ») en sachant que le plus important était de pouvoir m’entraîner normalement avec la réserve tous les jours et jouer le week-end pour reprendre des repères, même si c’est à un plus bas niveau.
Alors je suis parti retrouver tous mes amis d’enfance qui jouaient à Goderville, près de Fécamp. J’ai retrouvé une vie normale, une vie d’adolescent que je n’avais jamais eu. J’ai décidé de signer avec eux en R3, en plus ils jouaient la montée ! Je suis passé de la Ligue 1 à la R3 ! J’étais un petit peu l’attraction du week-end. En tout cas, je regrette pas du tout. Je ne pense pas que beaucoup de joueurs l’auraient fait.

« J’aurais aimé être pro au Havre »

Sous le maillot de Fréjus/Saint-Raphaël, en National. Photo Philippe Le Brech

Vous auriez aimé jouer au Havre en pro, dans le club formateur ?
Oui j’aurais aimé être professionnel au Havre. Malheureusement, il n’y avait pas de place pour moi à l’époque : il y avait Douchez, Kaméni, Mandanda, c’était très compliqué.

Vous avez envisagé un retour ?
Le retour aurait pu être possible quand je m’entraînais avec la réserve du Havre et que je jouais à Goderville. En fin de saison, Christophe Revault, le directeur sportif (Revault est décédé en mai 2021 à l’âge de 49 ans, Ndlr) me propose de prendre une licence amateur pour jouer en réserve et l’encadrer. Au final, je signe à Fréjus en National mais s’il n’y avait pas eu cette proposition, je serais resté au Havre. En plus, derrière, il y a eu une hécatombe chez les gardiens, Brice Samba, Johnny Placide, ils sont tous partis d’un coup. Je suis persuadé que j’aurais pu « enquiller » avec les pros, mais ça on ne le saura jamais.

Un pré-contrat à Amiens mais pas de contrat !

Photo Philippe Le Brech

Vous avez ensuite joué contre Le Havre, en Ligue 2, avec Châteauroux…
Châteauroux… où je ne devais pas venir ! J’avais signé un pré-contrat à Amiens (L2). C’était lors de ma dernière année à Cherbourg, en 2007, j’avais 21 ans, j’étais jeune et ça faisait déjà 3 ans que je jouais en National, donc j’étais scruté.

Je signe à Amiens et deux semaines après je me casse le scaphoïde lors d’un match à Cannes avec Cherbourg, en février (3-1). Amiens me dit de me soigner et de faire un bilan en fin d’année avec eux. Quand j’y vais pour signer mon contrat, ils me font une nouvelle radio et voient que le poignet est encore un peu fracturé. Ils commencent à « chipoter », à avoir peur pour le début de saison. Ils hésitent à prendre un autre gardien. Mon agent leur dit qu’on a d’autres clubs qui me veulent donc on ne va pas signer. Finalement, je pars 5 jours plus tard à Châteauroux (L2), où ils regardent la radio et décident de me faire confiance malgré le trait de fracture visible car je leur indique que je n’ai plus de douleurs.

Là, à Châteauroux, vous faites de belles saisons…
J’ai 3 ans de contrat, je fais les 3 ans. Des choses bonnes, d’autres moins. Parfois titulaire, parfois remplaçant. J’étais avec un gardien d’expérience, Vincent Fernandez, qui a joué au PSG. Ce n’était pas facile tous les jours car il fallait gagner sa place mais j’ai tout de même pris beaucoup de plaisir.

« Pour un gardien, c’est plus compliqué de changer de club »

Photo Philippe Le Brech

Le marché des gardiens, c’est très particulier d’ailleurs…
C’est très compliqué. C’est pour ça qu’on voit beaucoup de gardiens qui restent longtemps dans des clubs. Par exemple, Anthony Lopes à Lyon pourrait jouer plus haut mais c’est compliqué de changer. Parfois, il vaut mieux ne pas prendre de risques et rester dans son club où on sait que l’on va jouer. Mandanda, quand il part de Marseille pour l’Angleterre, un an après il revient. Des gardiens français qui arrivent à s’imposer à l’étranger, mis à part Lloris ou Barthez, je n’en vois pas beaucoup.

Vous semblez être hyperactif, dynamique. C’est quelque chose qui rejaillissait sur le terrain ? Est-ce compatible avec le rôle de gardien ?
Les jours de match, j’étais plutôt posé et concentré. Par contre, la semaine, mon hyperactivité pouvait me faire dégoupiller. Je n’acceptais pas de perdre des jeux, de ne pas être bon de temps en temps, même à l’entraînement. Parfois, les fils pouvaient se toucher mais je me calmais vite. Je me suis aussi calmé avec l’âge. Jeune, j’ai tapé plusieurs fois dans les poteaux, ce qui m’a valu de me blesser d’ailleurs.

« Ma plus grande fierté c’est d’avoir fait carrière. »

Photo Philippe Le Brech

Votre plus grande fierté de footballeur ?
C’est d’avoir fait carrière. Je n’étais pas prédestiné pour ça. Au centre de formation du Havre, j’étais un bon gardien mais pas un grand gardien, pas un gardien sûr de devenir professionnel. J’étais avec Mandanda, toujours derrière lui. Je n’ai jamais lâché, j’ai toujours travaillé très dur. Je suis assez fier de ça. Je suis parti jeune de chez moi, à l’âge de 10 ans. A 14 ans j’ai perdu mon papa, ça a été difficile. Il m’a toujours suivi parce qu’il adorait le foot. Je me suis alors juré de tout faire pour réussir quoi qu’il arrive.

A partir de ce jour-là j’ai bossé deux fois plus. Je restais deux fois plus sur le terrain, le soir je faisais de la musculation jusqu’à tard le soir. Ma fierté, c’est ça : avec mon petit niveau, d’avoir fait une carrière correcte où j’ai duré 14 ans. Ce n’est pas donné à tout le monde.

Et vous avez fait le choix d’arrêter votre carrière à la fin de ces 14 ans…
Oui j’ai décidé moi-même d’arrêter après ma dernière année à Bourg-en-Bresse (Ligue 2, saison 2017-18) pour plusieurs raisons. Déjà, physiquement, ça devenait compliqué. J’ai fait deux insertions du quadriceps et j’avais régulièrement des problèmes de dos. Aussi, je voulais prendre cette passerelle de l’arbitrage qui m’intriguait et qui était limitée à l’âge de 33 ans. Donc tout correspondait. Ma dernière année de Ligue 2, on est descendu. J’étais en fin de contrat. Je savais que ça serait compliqué de retrouver un club. Puis il y a aussi eu les enfants, j’en ai eu deux très rapprochés, on était fatigués avec ma femme. J’ai senti que c’était le moment d’arrêter. Je ne regrette absolument pas cette décision aujourd’hui. J’ai bien vécu l’arrêt de ma carrière qui est pourtant très difficile pour beaucoup.

Photo Philippe Le Brech

Vous semblez satisfait de la façon dont les pièces se sont complétées, d’un point de vue professionnel et personnel.
Au niveau personnel oui. Je suis avec mon épouse depuis 20 ans, elle m’a toujours rendu heureux et c’est toujours le cas aujourd’hui. Elle m’a suivi partout et a été extraordinaire dans ma carrière. J’ai 3 beaux enfants, tout le monde est en bonne santé donc je suis le plus épanoui des papas.

Professionnellement, j’aurais aimé faire mieux car on peut toujours faire mieux. Ce match de National au Red Star, avec Fréjus, à la dernière journée, en mai 2013, pour l’accession en Ligue 2, j’aimerais le refaire 10 fois ! J’aurais aimé ne pas avoir autant de blessures, que mon corps me laisse tranquille, notamment à Bourg-en-Bresse lors de ma dernière année où ça été galère. Malheureusement, vous pouvez bien vous étirer, bien faire les choses, ne pas fumer, ne pas boire, ne pas faire n’importe quoi, vous avez quand même des blessures. Il y a plein de choses sur lesquels j’aimerais revenir en arrière pour que ça passe différemment mais c’est comme tout le monde. Par contre je n’ai pas de regret et je vis bien vis-à-vis de tout ça.

Sa reconversion : « J’avais déjà commencé à la préparer quand j’étais encore joueur. »

Cinq ans déjà que Gaëtan Deneuve a pris sa retraite de footballeur professionnel ! Pourtant, on peut toujours l’apercevoir sur les pelouses en Ligue 2 ou en National 2, chaque week-end. Le sifflet d’arbitre a remplacé les gants de gardien.
Sa détermination, son goût de l’effort et le plaisir sont intacts, voire renforcés.

« Je ne voulais pas être qu’un simple footballeur »

Avec Cherbourg, en National, où il a évolué de 2004 à 2007. Photo Philippe Le Brech

On parle souvent pour des sportifs professionnels de petite mort. D’autres rebondissent très vite. On cerne très vite de quel côté vous êtes. C’est quelque chose auquel vous aviez déjà réfléchi en amont, avant la fin de votre carrière de joueur alors ?
Oui car dès le départ de ma carrière professionnelle, je savais que chaque année qui passait pouvait être l’une des dernières. Je m’étais préparé et mon seul objectif, c’était de donner le maximum, de ne pas gaspiller l’argent gagné grâce au foot parce que je savais que ça allait être difficile quand ça allait s’arrêter.

Donc il y a cette première petite mort d’arrêt sportif, cette adrénaline que tu as tous les jours. Puis certains ont également la mort du financier. Quand les deux arrivent ensemble, tout vient s’emmêler : la dépression due à l’arrêt de la pratique du football et liée aux difficultés financières, au retour à une vie plus classique où il faut chercher du travail, les problèmes de famille, etc. En plus de cela, beaucoup de footballeurs ont l’impression de ne rien savoir faire en dehors du foot alors que ce n’est pas vrai. Ça devient alors très compliqué.

Avec Cherbourg., en National. Photo Philippe Le Brech

Donc aujourd’hui je suis content parce que j’ai construit mon après-carrière comme je le souhaitais et ça s’est passé comme je voulais. Mon train de vie n’a jamais changé, ma façon de vivre non plus. Ma femme, mes enfants sont toujours là. J’avais déjà commencé à préparer ça pendant ma carrière. Je savais ce que j’allais faire.
Surtout, j’ai toujours été ouvert à d’autres choses. Je ne voulais pas être qu’un simple footballeur et voulais m’intéresser à d’autres choses.

Justement venons-en à votre reconversion. Vous êtes gestionnaire de patrimoine. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Mon beau-frère est gestionnaire de patrimoine depuis 15 ans. J’étais son client au départ, il gérait mon patrimoine. Pendant ma carrière, j’ai trouvé dans un premier temps des joueurs qui étaient intéressés par cet aspect et je les ai dirigés vers lui. Puis je m’y suis intéressé de plus en plus. Je voulais toujours savoir ce qu’il faisait, pourquoi il le faisait. Alors je me suis formé sur le tas et suis devenu apporteur d’affaire. Je trouvais des clients pour lui. Il sentait que j’étais fait pour ça et voulait me former à l’issue de ma carrière. Quand je prends ma retraite, il décide de racheter tout son portefeuille et de créer son propre cabinet et donc de m’intégrer dans cette aventure. Aujourd’hui je suis commercial au sein de cette entreprise, j’ai 7 apporteurs qui travaillent pour moi. Le cabinet marche très bien. Aujourd’hui c’est mon boulot à plein temps, c’est quelque chose qui va m’amener jusqu’à la retraite j’espère.

« Grâce au foot, j’ai développé plein d’éléments pour mon après-carrière »

Votre carrière de joueur vous a aidé à vous propulser vers ce type de métier selon vous ?

Photo Philippe Le Brech

Peut-être que j’aurais fait les études pour le réaliser. En tout cas, je suis sûr d’une chose : cette carrière de footballeur ouvre des portes sur autre chose. Par exemple, j’ai été gardien, un poste qui requiert des qualités de leader.

J’étais pendant très longtemps capitaine à Fréjus, j’étais un joueur de vestiaire, quelqu’un qui prend la parole. Cette carrière me permet alors de ne pas avoir de pression dans mon nouveau métier. Devant mes clients, il faut être très relâché, être sûr de ce qu’on dit. Être un leader, avoir du charisme, de la prestance, ce sont des éléments que j’ai développé grâce au football. Les études ne vont pas forcément vous amener à développer ces qualités-là.

Ça se concilie bien avec la fonction d’arbitre ?

Très bien même car je suis indépendant, j’ai ma propre société. Je gère mes journées comme bon me semble. J’essaye de toujours trouver mon petit créneau pour faire mon entraînement, mes rendez-vous et le match le week-end. Par contre, je ne suis pas beaucoup à la maison parce que j’ai des déplacements avec le travail et aussi avec la fonction d’arbitre car je peux arbitrer partout en France.

Ça diffère de la carrière de footballeur qui est très cadrée…

Les horaires, les matchs, les vacances, tout est cadré oui. Là c’est l’opposé.

« Je prends autant voire plus de plaisir à arbitrer qu’à jouer »

Et donc vous arbitrez principalement en National 2 ?

Gardien hier, arbitre en N2 aujourd’hui (et 4e arbitre en Ligue 2). Photo Philippe Le Brech

National 2 au centre et 4e arbitre de Ligue 2. Généralement, c’est un match par mois en Ligue 2 et 20 rencontres en centre s’il n’y a pas de blessures. Ça représente environ entre 28 et 30 matchs à l’année.

Vous avez l’ambition d’arbitrer encore plus haut ?

On a toujours l’ambition d’arbitrer plus haut. Après, c’est dur, car dans cette poule de F4 (Fédéral 4), on est 17 et un seul va monter, donc il faut vraiment sortir du lot. Il y a aussi des critères d’âge qui peuvent entrer en compte et c’est normal : les très bons jeunes ont plus de temps pour devenir les futurs internationaux. Quoi qu’il arrive, même si je reste à ce niveau-là un bon nombre d’années, je prends énormément plaisir. De nombreux arbitres aimeraient être à ma place parce que c’est déjà bien d’être à la Fédération et à ce niveau-là.

Comment êtes-vous arrivé vers cette vocation d’arbitre ?

A sa signature à Brest en Ligue 1. Photo SB29

Durant ma carrière j’étais capitaine donc j’avais des relations avec les arbitres, j’allais dans leur vestiaire pour signer les feuilles de match notamment. J’ai beaucoup discuté avec certains d’entre eux dont Bastien Dechépy qui est actuellement en Ligue 1. J’ai adoré son discours, les discussions avec lui; je demandais comment ça se passait puis au moment où j’ai voulu franchir cette passerelle, il y a eu Gaël Angoula qui l’a fait et qui est devenu arbitre après sa carrière de joueur pro (Bastia, Angers, Nîmes). Il m’a incité à le réaliser également. A partir du moment où j’ai donné mes premiers coups de sifflet, c’était parti et aujourd’hui je prends autant voire plus de plaisir que quand j’étais joueur. Je suis tout seul, je n’ai pas les contraintes des coéquipiers, les contraintes des horaires, des entraînements collectifs, etc.

Aux yeux du grand public, on voit une barrière entre l’arbitrage et les joueurs parfois. Vous qui avez été dans les deux camps, comment vous l’expliquez ? C’est un ressenti que vous avez aussi eu en tant que joueur ?

Gardien hier, arbitre en N2 aujourd’hui (et 4e arbitre en Ligue 2). Photo Philippe Le Brech

Il y a deux éléments. Certains joueurs se font toujours passer pour des victimes et disent qu’on ne peut pas parler aux arbitres, je le vois aujourd’hui. C’est complètement faux. Moi je peux parler avec n’importe quel joueur, je parle avec tout le monde. Avec d’autres joueurs tu peux parler librement et ils ont très bien compris que l’on peut discuter. Il n’y avait pas vraiment de barrière mais c’est vrai que ça a été compliqué. J’ai l’impression que c’est vraiment en train d’évoluer ces derniers temps depuis que la direction de l’arbitrage a changé.

On voit des choses qu’on ne voyait pas avant : les arbitres parlent au micro par exemple. Le grand public adore et on va vraiment dans le bon sens, vers de très bonnes choses.
Au final c’est plutôt une non-connaissance. Le fait que l’arbitre vienne s’expliquer, c’est hyper important. On a eu Gaël Angoula et Benoît Millot qui ont eu des micros récemment. Les gens ont vu comment les arbitres communiquaient et il n’y a que des retours positifs. Ça va aider l’arbitrage, notamment en France. J’espère que ça va continuer dans ce sens-là mais en tout cas j’ai l’impression que les nouvelles instances de l’arbitrage ont envie de ça.

Gaëtan Deneuve, du tac au tac

« Le jeu au pied chez les gardiens amène plus d’erreurs »

Photo Patricia Lafabrie / Fréjus-Saint-Raphaël

Meilleur souvenir sportif ?
Le quart-de-finale de Coupe de France avec Fréjus en 2016/2017. On était en N2 et on affronte Guingamp, club de Ligue 1. Je pense que c’est le meilleur souvenir parce je n’ai pas connu de montées, au contraire des descentes.

Pire souvenir sportif ?
C’est le dernier match de la saison 2012-2013 en National avec Fréjus, au Red Star. On joue la montée en Ligue 2, il nous faut un match nul mais on perd 2-1 alors qu’on mène 1-0 jusqu’à la 75e minute. On loupe la montée en Ligue 2 de peu. C’était le pire du pire.

Est-ce que vous avez déjà marqué un but ?
Je n’ai pas eu cette chance contrairement au gardien de Versailles Sébastien Renault qui a marqué il y a peu !

Un arrêt marquant ?
Des arrêts, il y en a pas mal dans une carrière. Je me souviens d’un en particulier avec Fréjus contre Rouen, face à Pape M’boup. Il fait une tête à bout portant et c’était vraiment un bel arrêt.

Avec Fréjus/Saint-Raphaël en National. Photo Philippe Le Brech

La plus belle boulette ?
J’ai fait une « Arconada » avec Cherbourg contre Louhans-Cuiseaux sur un coup franc de Licata. J’étais jeune mais je m’en souviendrai toujours. J’en ai fait une deuxième aussi à Montpellier en Ligue 2 avec Châteauroux où je sors en dehors de la surface, je veux dégager et je loupe le ballon. Camara, l’attaquant emblématique du MHSC va marquer dans le but vide. Je m’en souviens car elle m’a coûté ma place.

Ce type d’erreurs peut influencer le choix de l’entraîneur ?
C’est une grossière erreur, on perd le match 3-0, on est sur une mauvaise dynamique et donc le coach décide de changer, ça fait partie de la carrière.

Des cartons rouges en carrière ?
J’en ai pris un. Ça n’arriverait plus maintenant mais à l’époque il y avait la double peine, penalty et carton rouge. Je ne suis même pas certain de toucher le joueur. C’est le seul que j’ai pris. Ça ne pouvait être que dans le jeu car je ne parlais pas avec les arbitres ni avec les joueurs adverses, j’étais quelqu’un de très calme.

Sous le maillot de La Berrichonne en Ligue 2. Photo Philippe Le Brech

Si vous n’aviez pas été footballeur vous vous seriez orienté plutôt vers quelle voie ? Vers quel métier ?
J’aimais bien déjà à l’époque ce que je fais aujourd’hui, la finance. Quand j’étais tout petit je voulais être agriculteur parce que je suis issu d’une famille d’agriculteurs. Mes cousins, mes grands-parents, tout le monde était dans l’agriculture. Jusqu’à l’âge de 10 ans, j’allais à la ferme chez ma mamie et je voulais faire ce métier et après je suis passé à autre chose.

Vos qualités et défauts principaux sur le terrain ?
J’étais très bon sur ma ligne. J’avais un bon jeu au pied à une période où ce n’était pas la priorité. Pour le défaut, c’était dû à ma taille mais je ne rayonnais pas dans le domaine aérien. Je n’étais pas en grande difficulté mais ce n’était pas l’un de mes points forts.

Le jeu au pied prend en effet de plus en plus d’importance chez les gardiens…
Oui c’est indispensable, mais je trouve que c’est même devenu exagéré. On voit énormément de boulettes tous les week-ends parce que les gardiens cherchent à relancer d’une trop grande propreté, à prendre des risques énormes. Il faudrait faire une étude pour voir si ça amène plus de buts, plus de jeu vers l’avant. En tout cas, ça amène plus d’erreurs ça c’est certain.

Photo Philippe Le Brech

Le club ou l’équipe dans laquelle vous avez pris le plus de plaisir ?
Fréjus l’année où on a failli monter. On fait une deuxième partie de saison extraordinaire avec une quinzaine de matchs sans défaite. On avait un groupe exceptionnel avec une belle alchimie. Ça été ma meilleure année avec en plus un coach (Michel Estevan) et un staff que j’adorais.

En plus d’Amiens, un autre club où vous avez failli signer ?
A Rouen l’année où on est proche de monter avec Fréjus et qu’eux finissent 5e. Ils avaient une très belle équipe. Le lendemain du match où l’on ne monte pas, Didier Ollé-Nicole, le coach du FCR m’appelle pour que je signe à Rouen en expliquant qu’une bonne équipe va être construite. Moi, ça pouvait m’intéresser Rouen, je connaissais la ferveur du club, je savais que le club pouvait monter donc je leur dis de me faire une proposition, ce qu’ils font. Fréjus me fait une très belle proposition derrière et j’ai préféré rester à Fréjus. Deux semaines après, Rouen dépose le bilan… J’ai le souvenir d’Isaac Koné qui jouait avec nous. Il signe à Rouen juste avant que le club ne dépose le bilan. En étant gardien, derrière, je me serais retrouvé en grosse difficulté pour retrouver un club.

Photo Philippe Le Brech

Un coéquipier, un joueur avec lequel vous avez joué qui vous a marqué plus qu’un autre ?
J’ai eu la chance d’être au centre de formation du Havre déjà avec des Steve Mandanda, Lassana Diarra, Didier Digard, Florent Sinama-Pongolle… Une génération extraordinaire. Au niveau professionnel, Kevin Constant à Châteauroux avait des qualités énormes. A Brest, il y avait Bruno Grougi ou Nolan Roux qui marchait sur l’eau à l’époque. J’ai joué avec Henri Bedimo qui a explosé derrière.

Un joueur avec lequel vous vous entendiez particulièrement bien ?
J’en ai beaucoup. Mathieu Scarpelli par exemple que j’ai connu à Châteauroux où on arrive en même temps. On a joué ensemble à Fréjus aussi et on avait une relation particulière. Bruno Grougi, j’ai joué avec lui à Cherbourg et à Brest, Julien Outrebon à Cherbourg et à Fréjus. Et aussi Papiss Cissé à Cherbourg et à Châteauroux.

Sous le maillot de Cherbourg. Photo Philippe Le Brech

Un adversaire que vous avez rencontré sur le terrain qui vous a le plus impressionné ?
J’ai le souvenir de Valbuena à Libourne où je me suis dit « C’est quoi ce joueur ? » Il était très fort.

Une équipe injouable ?
Metz, une année en National. Le Havre aussi la dernière année où ils sont montés en Ligue 1, avec Guillaume Hoarau, ils étaient injouables. En National, c’était le cas de Créteil avec Jean-Michel Lesage et un milieu de terrain très fort composé de deux sénégalais, Ibrahima Seck et Cheick Ndoye.

Un coach marquant ?
Celui avec qui j’ai eu le plus d’affinités et que je ne remercierai jamais assez, c’est Michel Estevan à Fréjus. C’est lui qui m’a fait venir puis m’a fait confiance dès le départ. Je pense lui avoir bien rendu. C’était comme un père. On avait une relation fusionnelle. Hervé Renard aussi m’a marqué à Cherbourg. J’étais jeune et il m’a beaucoup appris, notamment mentalement. J’ai adoré Jean-Pierre Papin que j’ai eu 6 mois à Châteauroux. Il a quand même été ballon d’or mais est d’une simplicité et d’une humilité remarquable. J’aurais aimé travailler plus longtemps avec lui. Globalement, j’ai toujours eu de bonnes relations avec les coachs. Même ma dernière année à Bourg-en-Bresse où malheureusement on descend, j’avais une très bonne relation avec Hervé Della Maggiore qui est quelqu’un de très bien aussi.

Pour vous, il doit y avoir aussi la proximité avec l’entraîneur des gardiens, non ?
Oui, vous êtes très proche d’eux. J’en retiens deux qui étaient comme des pères pour moi : mon entraîneur des gardiens au centre de formation du Havre, Michel Courel, qui a sorti énormément de gardiens. C’est le premier, c’est lui qui m’a formé. Le deuxième, qui m’a permis d’aller au niveau professionnel, c’est Ludovic Poutrel. Je l’ai eu à Cherbourg et j’ai réussi à le faire venir à Châteauroux ensuite. Je les ai encore très régulièrement au téléphone. Ils m’ont fait évoluer en tant qu’homme et en tant que gardien.

Gardien hier, arbitre en N2 aujourd’hui (et 4e arbitre en Ligue 2). Photo Philippe Le Brech

Des dirigeants marquants ?
Les deux présidents de Fréjus-/Saint-Raphaël : Alexandre Barbero et Marcel Sabbah. Ils m’ont fait confiance aussi et étaient prêts à tout pour que l’on soit dans de bonnes conditions. C’est mon plus gros regret, ne pas être monté pour donner à ces deux présidents-là cette satisfaction. On était à 15 minutes de le faire. Je n’imagine pas la folie que ça aurait pu être car Alexandre Barbero c’est un président fou !

Une causerie d’un entraîneur ?
Je n’en ai pas une en particulier mais toutes celles du coach Estevan étaient fortes. Chaque causerie, je sortais et j’avais la chair de poule. C’était toujours différent mais à chaque fois il arrivait à transmettre quelque chose. C’est ce qui a fait sa force. C’est pour ça qu’il a eu autant de résultats. On ne se rend pas compte mais il a fait énormément de montées et c’était grâce à ça. Hervé Renard savait aussi bien le faire.

Une consigne que vous n’avez jamais comprise ?
J’ai le souvenir d’une causerie où on joue contre Créteil l’année où ils sont injouables. L’entraîneur Estevan me dit « le premier ballon tu le mets précisément sur Ndoye ». Il dit aussi à un de mes coéquipiers d’arriver très fort sur ce ballon pour gêner le joueur et ajoute « Après vous n’allez pas le voir du match ». On met en place cette action et ça fonctionne : Ndoye, on ne le voit plus du match !Ce match on le gagne 1-0 contre Créteil, leader invaincu depuis longtemps. Faut être fou pour penser à ça mais ce fut gagnant. C’était fort.

Une anecdote secrète ?
On joue un match important pour la montée à 4 journées de la fin contre Carquefou. On avait un joueur qui s’appelait « Charlie » Cirilli. Il a fait une belle carrière, c’était un soldat de Michel Estevan. Il me parle du meilleur joueur adverse, Florian Martin, en disant qu’il faut faire quelque chose sur lui. Avant de rentrer dans le tunnel, il prend toutes les pommades qui existent et me dit que leur pièce maîtresse, Martin, on ne va pas le voir de toute la rencontre. Il étale les crèmes sur le visage et les yeux de Florian Martin juste avant de rentrer sur le terrain. Je n’avais jamais vu ça. Au final, son influence sur le jeu est bien moins élevée qu’à l’accoutumée. Ça ne nous empêche pas de faire match nul en se faisant égaliser à la 96e minute.

Le joueur le plus connu de votre répertoire ?
Steve Mandanda.

Des tocs de gardien ?
Si je ne prenais pas de but le match d’avant, j’aimais bien remettre le même maillot, les mêmes gants, mais rien de plus.

C’est très important de garder sa cage inviolée pour un gardien ?
C’est le sentiment du devoir accompli. A partir du moment où vous n’avez pas pris de but, vous avez été bon et vous n’avez pas perdu. Je suis rarement sorti fâché d’un match où je n’ai pas pris de but. A l’inverse, quand j’en prenais, c’était rare que je passe un bon week-end.

Et vous comptiez les séries ?
Bien sûr, même si je n’ai jamais fait de séries fantastiques.

Des passions en dehors du football ?
Il y a d’abord mes 3 enfants qui occupent une grande partie de mon temps. Ensuite, j’aime bien la pêche. J’aime bien le poker aussi : j’y ai beaucoup joué à une époque quand j’avais du temps libre avec le foot. Après j’aime tous les sports; j’en pratique régulièrement.

Votre profil de gardien en un mot ?
Simple. Simple et efficace.

Un modèle de gardien ?
Gregory Coupet. Je me suis énormément inspiré de lui quand j’étais jeune. C’était vraiment le gardien le plus fort et le plus complet selon moi.

Un match en particulier ?
J’ai le souvenir d’un match sans enjeu mais qui m’a marqué car on gagnait 3-1 à la 90e et on a perdu 4-3. Sinon le 8e de finale contre Auxerre avec Fréjus. Il ne pouvait rien m’arriver ce jour-là, j’ai dû faire 7 ou 8 arrêts. Ça faisait partie des très bons soirs.

Texte : Timothée Coufourier / Mail : contact@13heuresfoot.fr / Twitter : @13heuresfoot

Photos : Philippe Le Brech (sauf mentions)