L’entraîneur normand, pur produit du Stade Malherbe de Caen, évoque son caractère timide et réservé. Au fil des ans et au gré de ses expériences, il assure s’être amélioré, notamment en matière de communication, mais reconnaît qu’il doit encore progresser. L’ancien finaliste de la coupe de France avec Quevilly, qui sort d’une saison mouvementée, rêve de stabilité et pourquoi pas, de Ligue 3 un jour avec son club !
Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr
Photos : Philippe LE BRECH et Bernard MORVAN

Matthias Jouan n’est pas le plus grand des « communicants ». Timide, réservé, discret, sont les adjectifs qualificatifs qui reviennent le plus souvent à l’évocation de son nom lorsque l’on questionne des personnes qui l’ont côtoyé. L’entraîneur de l’US Granville en National 2 acquiesce mais, comme dans le célèbre film de la fin des années 70, il est timide, mais il se soigne ! Du moins, il fait des efforts. Il est bien obligé, maintenant qu’il est sur le devant de la scène : « Les causeries d’avant-match m’aident beaucoup » assure le Normand (41 ans) formé au Stade Malherbe de Caen, propulsé à la tête de l’équipe fanion de Granville après l’éviction de Sylvain Didot en février 2023.
L’ancien joueur de l’US Quevilly (finaliste de la coupe de France en 2012 tout de même !), du FC Rouen et de Carquefou notamment, en National, n’élude absolument pas ce trait de personnalité. Plus surprenant, il l’a évoqué assez facilement.
Face à nous, en visio, il a même semblé très à l’aise, n’a jamais cherché ses mots et s’est montré bavard durant l’entretien qui a duré une bonne heure ! Du coup, c’est nous qui avons été surpris !

Mais Matthias, qui fut d’abord joueur à l’US Granville, qu’il a rejoint en 2014 en CFA2 (accession en CFA en 2016) sous les ordres de Johan Gallon, avant de devenir éducateur en 2017, lorsqu’il raccrocha les crampons, explique que quand il s’agit de parler ballon, il est plus à l’aise : « C’est un sujet que j’aime, donc c’est plus facile. Je ne fuis pas les médias, et je vais même vous dire, j’aime ça, j’ai été capitaine aussi, ça me convenait, c’est juste le fait d’être en public, de parler devant des gens, qui m’a toujours dérangé. Ça va beaucoup mieux. Je pense que je m’améliore. Mais il faut encore que je travaille. »
Matthias Jouan évoque sa personnalité mais parle aussi de son club, l’US Granville, repêché cet été en National 2, des infrastructures, des ambitions et du voisin Avranches. Il convoque aussi ses souvenirs de joueur dans le traditionnel « tac au tac », où il livre une autre confidence qui a son importance, et qui explique, en partie, pourquoi il n’a pas pu franchir le cap en pro, alors qu’il venait de signer un contrat au Stade Malherbe de Caen, « son » club, où il a passé 13 saisons ! Et pour une fois, nous n’avons volontairement pas posé la question « Ton meilleur souvenir sportif » tant la réponse allait de soi. On ne dispute pas une finale de coupe tous les ans !
Interview
« J’avais toujours peur de faire chier le monde ! »

Matthias, commençons par ta personnalité… Tu es timide, réservé, ça vient d’où ?
C’est vrai. Cela vient de ma jeunesse. À l’école, pour me faire parler, c’était très compliqué. Au foot, je n’étais pas bon public non plus pour les médias. Mais moi, ça m’allait très bien, parce que je me suis protégé un peu de tout ça. Le meilleur exemple, c’est l’année de la finale de la coupe de France avec Quevilly (en 2012), il y avait beaucoup de reportages sur nous. Tout le monde me disait « Mais on ne te voit pas », alors que pourtant, j’étais présent, je jouais. Mais vous savez, une fois que tout retombe… Pour certains de mes coéquipiers, cela s’est mal passé ensuite. J’avais prévenu les gars ici à Granville quand on est allé en 1/4 de finale de la coupe de France (en 2016). Je leur ai dit « Faites attention, parce que là, vous allez avoir du monde chez vous, on vous verra partout en vidéo, il y aura des agents qui voudront vous envoyer en Roumanie, etc. », je les avais prévenus, mis en garde.
Aujourd’hui, en étant coach, tu ne peux plus te cacher…
Le fait d’être éducateur au départ, ça m’a beaucoup aidé, socialement, parce que moi, je n’abordais personne, j’avais toujours peur de faire chier le monde. C’est quelque chose que j’ai dû travailler et que je travaille encore, parce qu’on me fait des reproches par rapport à ça, notamment mes joueurs. Un joueur qui ne joue pas, parce que c’est mon choix, j’ai envie de lui parler mais, quoi que je lui explique, je me dis « Il ne va jamais comprendre ». Il va penser « Mais qu’est-ce qu’il me fait chier le coach, il ne me fait pas jouer ! ». Donc j’ai du mal encore aujourd’hui à aller vers eux. Grâce à ce rôle d’éducateur, je me suis quand même un peu ouvert, parce qu’il faut parler devant du public, chose que je ne maîtrisais pas. Et puis j’ai appris à me connaître, parce c’était du stress, je devenais tout rouge, et du coup, les messages ne passaient pas comme je le souhaitais. Là, la communication devient plus naturelle. Comme avec vous, aujourd’hui, on parle de foot, un sujet que j’aime, donc c’est plus facile.
« Les causeries m’ont aidé »
On a cherché des interviews de vous, des reportages, des vidéos, on n’a pas trouvé grand-chose…
Mais je ne fuis pas les médias. Je vais même vous dire, j’aime ça, j’ai été capitaine aussi parfois, ça me convenait. C’est juste le fait d’être en public, de communiquer devant des gens, qui m’a toujours dérangé. Mais ça va beaucoup mieux. Je pense que je m’améliore. Il faut encore que je travaille.

Comment travaillez-vous cela ?
Déjà, les causeries m’ont aidé. Et avec ce qu’on a vécu toute la saison dernière, ce fut un apprentissage, parce que j’ai l’impression d’avoir pris 10 ans d’expérience dans la tête d’un seul coup. Depuis que je suis éducateur, je n’ai jamais connu de moments difficiles pendant mes sept premières années. Et là, la saison passée, j’ai vécu des choses très compliquées. Pendant ma formation au DES (Diplôme d’état supérieur, dont il est titulaire depuis peu), un coach m’a dit que sa meilleure expérience, du moins celle qui lui a le plus appris, c’est quand il a joué le maintien. Quand vous êtes dans le dur comme on l’a été toute la saison dernière, il y a d’autres choses à mettre en place, et cela passe par une communication différente aussi. Je pense même que j’ai peut-être manqué d’ambition dans mes causeries certaines fois l’an passé, et d’autres fois j’ai fait passer des messages pour aller gagner des matchs, comme l’importance du beau jeu, parce que j’aime ça. Mais au final, le beau jeu, c’est bien gentil, on entend dire « Granville, ça joue correctement au football », oui, sauf qu’à un moment donné, on ne parlait plus du jeu de l’équipe, mais de ses résultats, qui étaient insuffisants. C’est pour ça que j’ai évolué dans mes causeries en deuxième partie de saison, afin de faire passer des messages pour gagner des maths. Mais je sais que je dois encore progresser, notamment dans la communication interpersonnelle : peut-être faut-il que je fasse plus d’entretien avec mes joueurs de manière individuelle, de façon à tirer le meilleur d’eux ?
« Chez les jeunes, on a changé un peu de politique »

Tu prends des cours de communication ?
Non, mais j’ai lu beaucoup de livres sur le stress, le trac, et j’ai fait une formation sur la préparation mentale, ça m’a aidé sur certains aspects, comme la confiance en soi. On m’a dit de faire du théâtre, mais je ne suis pas le plus à l’aise pour ça. S’il faut être meilleur, s’il faut aller chercher encore d’autres choses, j’irai les chercher. C’est un travail au quotidien. Johan Gallon, mon coach quand je suis arrivé à Granville, était capable de se transcender en causerie. Philippe Clément, le coach de Dives-Cabourg, arrive à faire passer des messages. J’aurais aimé être capable d’avoir une communication beaucoup plus simple, d’aller vers les gens, sortir du cadre du terrain et du foot parce que moi, je ne voyais que ça. Si la communication n’avait pas été un frein quand j’étais jeune, peut-être que cela aurait été plus facile.
Parlons de l’US Granville : on connaît bien Avranches, moins ton club…
L’US Granville est un club de 500 licenciés, dont 350 jeunes, avec un projet de formation et une vraie identité de jeu, jusqu’à l’équipe de N2, en tenant compte des catégories bien sûr. On a des équipes qui jouent bien au ballon, du moins on a cette étiquette-là. Quand je suis arrivé, il y avait 17 joueurs qui encadraient. Maintenant, on a un vrai groupe d’éducateurs qui a été mis en place. Il y a eu une vraie évolution à ce niveau-là. L’équipe Une est en National 2 depuis 2017. La réserve, dont je m’occupais avant, vient de faire l’ascenseur et de remonter en Régional 1. Chez les jeunes, on est beaucoup en Régional 2. On espère atteindre le niveau R1, comme pour nos U16 qui y sont parvenus l’an passé, grâce à une très belle génération.
Avec Avranches, vraie rivalité ou vraie entente ?
Il y a une rivalité, forcément, parce que les gens l’ont créée, du fait de la proximité des deux villes (25 km). Après, c’est vrai que, parfois, quand vous formez des jeunes et qu’un jour vous voyez que c’est le voisin qui en profite, ça ne fait pas toujours plaisir. Avranches a des 17 ans et des 19 ans au niveau National, donc un très bon jeune chez nous ne reste pas très longtemps : il part chez le voisin mais on peut le récupérer ensuite en seniors. C’est pour ça que notre objectif, c’est d’avoir nos équipes de jeunes au plus haut niveau régional déjà. On change un peu de politique aussi parce qu’avant, on avait tendance à surclasser un peu nos jeunes. Je me souviens que, quand j’entraînais la réserve, on était monté en Régional 1 avec 4 ou 5 joueurs U18.
Maintenant, à titre personnel, je m’entends très bien avec les gens d’Avranches, on les a affrontés en National 2 cette saison. Ils ont des infrastructures que beaucoup de clubs envient, et qui donnent envie.
« Nos infrastructures sont limitantes »

Les infrastructures, justement, c’est là que le bas blesse à Granville ?
Elle sont limitantes. A Granville, avant, il y avait le terrain de rugby avec une belle piste autour, mais cela a été détruit. On pouvait utiliser ces installations mais la municipalité a construit une piscine à la place et donc, le rugby a voulu récupérer des terrains : ils ont pris un terrain de foot, puis un deuxième. Du coup on s’est retrouvé avec nos quatre terrains, mais éparpillés dans tous les sens. On est limité par rapport à ça. Je dispose d’un terrain d’entraînement qui était déjà catastrophique avant et là, il a été refait, mais mal refait : ça aussi c’est un problème. Il nous est arrivé d’aller nous entraîner sur un petit stade à 25 minutes de Granville, près d’Avranches, dans un club de Départemental 2… On va aussi régulièrement dans le club de Donville-les-Bains, vers chez nous. Ce n’est pas normal; ça bouffe de l’énergie. Finalement, on a pris la décision de rester sur notre terrain d’entraînement, mais c’était tout ou rien : soit c’était inondé, soit c’était du béton. On a fini la saison dernière comme ça, car on en avait marre de prendre les minibus pour aller s’entraîner. On s’est serré les dents.
C’est sûr qu’Avranches, eux, ont grandi, ont bien avancé et pris de l’avance, alors que chez nous, ça prend plus de temps. Ils ont construit pas mal de choses et puis la présence du lycée Littré pour la formation est quelque chose d’important, cela leur a permis d’attirer pas mal de jeunes, des garçons qui ont pu rejoindre l’équipe en National. A Granville, J’étais responsable de la section lycée chez nous, mais cela n’a pas fonctionné de la même manière. Franchement, je suis émerveillé quand je vois leurs terrains d’entraînement. Des clubs de National et de Ligue 2 n’ont pas ça. J’envie ces entraîneurs qui ont la chance de pouvoir être sur leur lieu de travail et en même temps de voir tous les jeunes sur place. J’en ai discuté avec Tony Théault, le coach de Vire (N3) : quand il arrive au club house, s’il veut voir les jeunes, il a juste quelques pas à faire, alors que nous, on doit prendre la voiture. Si un joueur est contacté par Granville et Avranches, il va voir les installations à Avranches et il va signer à Avranches. Je comprends. Même si on essaie de faire progresser les choses. Mais on aura toujours un petit temps de retard sur eux.
Revenons à la saison passée : quel fut ton sentiment, ton état d’esprit, au coup de sifflet finale de la dernière journée (relégation sportive en N3) ?
Je me suis dit que les gars avaient fait le travail, parce qu’on avait gagné ce dernier match (3-1 contre Saumur). Mais j’avais vu cinq minutes avant la fin que Poitiers, avec qui on était à la lutte pour le maintien, menait au score. J’étais déçu et triste de descendre. On a rendu des gens tristes et j’ai vu des bénévoles très touchés. Mais ce n’est pas l’équipe que j’avais devant moi ce soir-là qui est descendue. J’étais content de ce que j’avais vu. Les joueurs avaient tout donné. On savait très bien que, ce qu’on avait loupé, c’était l’été dernier et une période jusqu’au mois de novembre.
Sur la 2e partie de saison, Granville fait 6 victoires, 5 nuls et seulement 4 défaites, un bilan d’une équipe de top 8…
On a fini 7es sur la deuxième partie de saison.
« Cette fois, on a gagné du temps »

À l’issue de votre première saison complète, achevée à la 3e place, meilleur classement de l’histoire du club, l’effectif a énormément changé. Pourtant, dans vos interviews, vous parliez beaucoup de stabilité…
C’est vrai, on finit 3e, puis quelques mois plus tard, on est dernier à 9 points du maintien et à 16 points de Poitiers… Bien sûr, j’aime avoir de la stabilité dans un groupe. C’est beaucoup plus facile de travailler ensuite, parce qu’après, on n’a plus cas rajouter des choses dans notre effectif, dans le jeu, pour avancer. La saison où on finit 3e (2024/25), j’avais déjà dit six mois avant, en décembre, « Attention, si on ne travaille pas sur l’avenir, ça peut devenir très compliqué », et on m’a répondu « Mais non, ça va le faire, avec ce que l’on pratique en termes de football, avec le projet de jeu… », etc. Mais un joueur, ce qu’il voit, c’est ce qu’il a à la fin du mois sur sa feuille de salaire. Résultat, on eu 14 départs dont 7 titulaires. C’est trop. (il répète) C’est trop. L’aspect financier y a fait, mais pas que. En plus, à la trêve, on récupère deux joueurs qui étaient partis six mois plus tôt : Félix Ley, de Fréjus/Saint-Raphaël, et Vincent Créhin, notre attaquant, de Saint-Malo. C’est ça qui est dérangeant. On aurait pu faire mieux pour garder un maximum de joueurs.

Du coup, interdiction de répéter deux fois la même erreur cette saison…
Là, clairement, alors que l’on n’était même pas certain d’être repêché en National 2, même si les signaux étaient bons, on avait déjà ciblé tous nos joueurs. Du coup, à la reprise, j’avais 19 joueurs et 3 gardiens, alors que l’été dernier, on était 14 ! On a gagné du temps. Et puis, le fait d’avoir pris cet été un conseiller sportif, Clevid Dikamona, c’est beaucoup plus facile. Parce que pour moi, c’est très prenant.
Du coup, c’est un nouveau départ, après les nombreux chamboulements de l’intersaison…
Oui. On repart avec 14 nouveaux joueurs. Il en manque encore. On a mieux recruté derrière, parce que selon moi, c’est ce qui nous faisait défaut. L’an passé, j’ai changé ma défense centrale beaucoup trop souvent, dès les premiers matchs. Or là, cette année, ça tient la route défensivement, avec des joueurs de qualité, comme Mathis Lemeray qui était à Avranches en National (2021-2024), Diakari Diarra mon capitaine qui était parti à Fleury la saison passée (ex-Avranches en National) et que j’ai récupéré. J’ai pris aussi Pierrick Mouniama (ex-Caen B en N3, Blois en N2) parce que Pierrick, à Blois, c’est 90 matchs en 3 saisons à 24 ans, une valeur sûre. On a gagné du temps mais il manque encore deux joueurs et il faudra tenir compte de la suspension pour 5 matchs de Sofiane Hamard, un élément important du groupe. C’est à prendre en compte. Il faut compenser son absence.
Forcément, l’objectif sera de stabiliser l’équipe cette saison et aussi les suivantes…
Le but, c’est que l’on puisse avancer et que la saison prochaine, on n’ait pas à tout reconstruire. Mais il faut aussi avancer sur nos infrastructures et stabiliser le club.
« La Ligue 3 un jour ? C’est possible mais… »

Granville un jour en Ligue 3, une utopie ?
Je pense que c’est possible, maintenant, il manque pas mal de choses. Ce qui est positif, c’est que l’on a 230 partenaires, c’est du mécénat, et on a deux personnes, François Bégué Fléché et Guy Lefèvre, qui s’occupent de ça et s’investissent beaucoup. Ils font tout pour nous. Ils vont voir les commerçants, ils aiment le contact. Je leur tire mon chapeau. Cela permet à Jouan Matthias d’être payé pour entraîner en National 2. Est-ce que ça peut suffire si on monte un jour ? Même si on est amené à avancer, il nous faudra plus d’infrastructures, comme je l’ai déjà évoqué.
Il y a un an, j’ai demandé des Algeco pour être au plus proche du terrain d’entraînement avec une salle de muscu, afin de mettre des choses en place avant les séances et d’enchaîner sur le terrain ensuite. Je les ai obtenus, mais en mars cette année. Cela a tardé. Je trouve que les relations avec le service des sports de la commune ne sont pas au maximum de ce qu’elles pourraient être, elles ne sont pas suffisantes. Un autre exemple : le terrain d’entraînement est catastrophique, pas arrosé, pas tracé, on met encore des coupelles autour ! Lundi, on est autorisé à s’entraîner sur le terrain d’honneur, mais au lieu de tondre ce terrain en priorité, c’est celui d’à côté qui est tondu ! Et puis quand on a fini de poser nos coupelles, on nous dit « Bah maintenant, il faut que je tonde le terrain d’honneur… » ! Du coup, seule la moitié de terrain est tondue, pas l’autre moitié, et ça, pour moi, ce sont des conditions de travail dérangeantes, ça « bouffe » la tête.
On a l’impression de toujours se battre et à l’arrivée, on dit « Jouan il nous fait chier ». Bah ouep, mais mon outil de travail, c’est le terrain, et je demande qu’on le respecte, que l’on fasse au mieux. Je sais bien que ce sont les vacances, qu’il y a des personnes dévouées, mais bon, le traçage du terrain… Il faut presque le demander constamment. C’est énervant. Et après, ce sont les joueurs qui vous en mettent plein la gueule parce que le terrain n’est pas de qualité, ils veulent moins en faire, et donc ils sont moins performants. Ce secteur doit être amélioré. Après, pour en revenir à la Ligue 3, on sait que c’est très difficile de monter : Saint-Malo souhaitait y arriver cette année et puis voilà, ils sont malheureusement resté trop longtemps sans gagner ce qui a fait que Saint-Brieuc est passé, mais quand je vois les conditions dans lesquelles jouaient Saint-Brieuc l’an passé, pour en avoir discuté avec le président-coach (Guillaume Allanou), ils n’avaient pas de terrain et c’était aussi le bordel (sic), ils ont réussi quand même, c’est donc que c’est possible.

Tu es un entraîneur plutôt…
J’aime le jeu. On veut maîtriser les choses. Ce qui ne veut pas dire « garder le ballon », « conserver » ou « faire tant ou tant de passes », que cela soit défensivement ou offensivement, on doit être les acteurs, ne pas attendre que l’adversaire nous donne le ballon pour faire de la transition, non, on a des systèmes de jeu de manière à ressortir le ballon, avec des supériorités, des choses comme ça, pour avoir le maximum de possession, de maîtrise. Et défensivement, on opte pour des choix tactiques pour mettre à mal nos adversaires, pour récupérer le ballon le plus vite possible : on essaie de mettre ça en place sur toutes nos catégories. On est catalogué aussi comme une équipe « gentille », cela se ressent sur le jeu, on essaie d’amener d’autres billes : je suis impressionné par les joueurs excentrés, qui sont très vifs, même en National 2, et on essaie d’apporter ça aussi, même dans nos catégories de jeunes, pour les préparer pourquoi pas au plus haut niveau. Après on veut que le maximum de jeunes puisque intégrer le niveau seniors, en N2 ou en R1.
« Plus on a de monde dans le staff, mieux c’est ! »
Tu dois être satisfait car ton staff (1) s’est élargi cet été…
Oui. Quand je suis arrivé à la tête de l’équipe en février 2023, on n’était pas nombreux. On avait un entraîneur des gardiens et un adjoint qui préparait son BPJEPS donc il n’était pas toujours présent. J’ai rajouté un préparateur physique puis un adjoint la saison passée, mais comme j’étais aussi en formation pour mon DES et que mon adjoint était en formation pour le BEF, on était parfois amené à partir en même temps et cela n’a pas rendu les choses faciles. Cet été, on a recruté quelqu’un pour le rôle d’analyste vidéo, un stagiaire, et quelqu’un va arriver, c’était mon binôme en Régional 1, pour être adjoint, cela entre aussi dans le cadre de la formation en interne : il va garder l’équipe de Régional 1 en parallèle et s’aguerrir en N2, parce qu’il souhaite aller plus tard jusqu’au DES. On ouvre nos séances aux autres éducateurs, je pense au jeune éducateur : l’an passé, il y en avait un qui venait sur son temps libre avec nous sur le terrain, alors qu’il passait le bac. Ce sont des éducateurs qui ont envie, qui ont faim, il va faire un service civique chez nous cette année. Plus on a de monde, mieux c’est. C’est bien pour les joueurs, on sera plus précis dans nos demandes, dans ce que l’on va mettre en place, parce que les joueurs sont aussi de plus en plus pointilleux. Plus on sera précis, mieux les joueurs travailleront.
(1) Le staff
Entraîneur adjoint et préparateur physique : Arthur Marie
Adjoint et analyste vidéo : Hugo Pêcher
Adjoint et entraîneur des gardiens : Simon Houivet
Adjoint : Arnaud Jérôme
Analyste vidéo : Brandon Beduneau

Le BEPF, qui permet d’entraîner en pro, est-il un objectif à long terme pour toi ?
On m’a dit de ne pas dire ça… Bien sûr, j’ai envie d’aller plus haut un jour, par le travail que l’on met en place ici, j’ai envie que mon équipe, que mes joueurs m’emmènent plus haut, mais je n’ai pas envie de passer le diplôme. Parce que je ne vois pas l’intérêt. De plus en plus d’entraîneurs le passent, malheureusement pour eux, ils n’ont pas cette chance d’aller dans le monde pro, où j’ai l’impression que c’est assez fermé. Ceux qui y parviennent sont souvent ceux qui montent avec leurs équipes. Comme Patrick Videira qui a fait monter Le Mans en L2 : il arrive à bien faire jouer ses équipes, et c’était déjà le cas quand il entraînait à Furiani.
Il y a Maxime d’Ornano aussi, quelqu’un que, déjà, j’apprécie; dans le jeu, quand j’ai joué contre lui, j’adorais ce qu’il mettait en place et tant mieux qu’il soit en poste à Caen, je suis bien content que ce soit une personne comme lui à la tête de ce club où j’ai passé 13 ans. J’ai connu Johan Gallon et Sylvain Didot à Granville, deux coachs qui ont le BEPF : aujourd’hui, Gallon n’entraîne plus, et Didot est à Vannes en N3… Mais ce n’est pas parce que je n’ai pas envie de passer le diplôme que je manque d’ambition, non. J’aimerais évoluer en National un jour avec mon club. Et puis je viens juste de terminer ma formation pour le DEF, alors… Je sais qu’un jour, on m’obligera à passer le BEPF, mais je ne sais même pas si j’ai les compétences…
Matthias Jouan, du tac au tac

Qu’est-ce qui t’a manqué pour franchir le cap et jouer en Ligue 2 ?
J’avais des manques. Je n’allais pas vite. J’avais de la qualité de jeu, ok, mais j’avais besoin de mes coéquipiers pour pouvoir exister. Dans le travail, je n’étais pas le plus… J’avais du mal à me faire mal. Je n’étais pas assez méchant pour récupérer des ballons à des postes bien précis. Quand j’avais 15 ans, je m’entraînais avec les 17 ans, quand j’avais 16 ans, je jouais déjà en 17 ans Nationaux, quand j’avais 17 ans, j’étais surclassé, ça m’arrivait de jouer en CFA2, avec dix pros titulaires et moi au poste de latéral droit, parce que le coach me disait qu’il fallait à tout prix que je joue, peu importe le poste. Tout le monde me disait que c’était bien. Mais peut-être que ce qu’il fallait pour passer le cap, je ne l’ai pas fait. Je me souviens de Reynald Lemaître, avec qui j’étais à l’école : chez les jeunes, c’était très compliqué pour lui, il était souvent blessé, il avait du mal à grandir, mais en match, avec Malherbe, waouh, il défonçait tout le monde, il courait partout, il avait faim, alors que moi… Je ne suis pas allé chercher plus loin, je n’ai pas forcément voulu améliorer mes défauts.
C’est venu après mon passage à Caen. Je me suis endurci quand j’ai commencé à taper dans les murs, à essayer un métier, quand j’ai fait maçon pendant un mois, en décembre, avant d’aller à Jura Sud… Et puis je me suis peut-être trop reposé sur mes qualités. On ne m’a pas repoussé dans mes derniers retranchements pour travailler ce qui n’allait pas. Ily a le facteur chance aussi. Vous plaisez ou vous ne plaisez pas à un entraîneur. Peut-être que mes qualités auraient plu à un autre entraîneur, comme dans un système en 3-2-4-1, que l’on voit beaucoup aujourd’hui, mais à l’époque, c’était différent. Mais mon heure n’est jamais venue et j’ai commencé à penser à mon après-carrière.

Cette expérience te sert aujourd’hui avec tes joueurs ?
Oui. En fait, mon manque d’investissement chez les jeunes, je l’ai eu ensuite, sur le tard. À Quevilly, je n’étais plus le même qu’à Caen. Quand j’ai entraîné les jeunes, je leur ai dit « les gars, je trouve que vous loupez quelque chose, votre carrière, elle n’est pas faite… Ce n’est pas parce que tu as fait 8 rentrées en National 2 que ça y est ! » Dans l’investissement, je n’ai jamais triché, mais j’aurais peut-être pu faire encore plus dans le travail quand j’étais chez les jeunes. J’ai côtoyé pas mal de joueurs, dont certains qui avaient peut-être moins de qualité que moi au départ, seulement voilà, ils ont fait quinze ans de carrière pro.
Pire souvenir de ta carrière ?
Le plus dur, c’est la fin au Stade Malherbe de Caen, après 13 ans de formation. Je ne m’attendais pas à ce que cela finisse comme ça, je n’étais prêt, et ça a été compliqué derrière, même si cela m’a permis de découvrir autre chose. Je suis passé par le club de Mondeville, à côté de Caen, on était dernier en CFA, c’était assez compliqué, on s’entraînait le soir, on n’était pas dans un format de club que l’on peut trouver aujourd’hui en National 2. Je me suis posé la question d’arrêter le foot, ce que j’ai fait pendant 6 mois, pour faire un autre métier.

Après Mondeville, tu rebondis à Jura Sud…
Quand on sort de Caen, on s’attend toujours à avoir quelques clubs, mais j’ai connu le chômage, et Jura Sud (CFA) me relance. Je m’en souviens bien, parce que je suis allé rejoindre le club le 1er janvier, et j’ai fait la route la veille, donc pas de réveillon du 31 décembre, alors que mes copains faisaient la fête ! Et puis là, j’ai eu un mois très dur sur le plan physique, parce que je n’avais rien fait pendant les six mois précédents.
Tes débuts au foot ?
J’ai commencé très jeune à Saint-Pierre-sur-Dives (Calvados), notre village familial, entre Lisieux et Caen. J’ai été vite surclassé. J’avais joué en pupilles contre Malherbe, et j’avais marqué 4 buts. Après, j’ai fait une détection et voilà ! J’ai été repéré et je suis allé à Caen, c’était du foot à 7. C’était l’époque où j’allais au foot à vélo, pas sûr que maintenant je laisserais ma fille y aller en vélo ! J’avais commencé par le basket, parce que mon père faisait du basket, mais tout de suite, mon pied cherchait à viser le panier avec le ballon !
Combien de buts marqués dans ta carrière ?
Je ne sais pas, mais quand j’étais jeune, je marquais beaucoup, parce que je jouais devant, et avec les années, j’ai reculé. A Jura Sud, en jouant 8, j’ai pris plaisir à marquer : après mes deux premiers mois difficiles, j’ai quand même terminé la demi-saison avec 7 passes décisives et 3 buts. Et après, je signe à Quevilly : je joue encore 8 et je termine meilleur buteur de l’équipe en CFA, avec 10 buts. Et même l’année en National avec Quevilly, Régis Brouard joue avec deux numéros 6, moi et Zanké Diarra, le frère d’Alou Diarra, et je mets 6 buts quand même. Le coach me laissait la liberté de monter. J’y ai pris goût. J’étais jeune. Je ne me posais moins de question. Je me souviens que je n’avais pas peur, par exemple, de tenter des gestes, un retourné acrobatique…
Pourquoi ne pas avoir joué à un poste plus offensif alors ?
J’étais gaucher, il n’y en avait pas beaucoup à Caen, donc on m’a mis côté gauche, je faisais beaucoup de centres, une de mes qualités, mais je manquais de vitesse, j’avais besoin de mes partenaires, et quand je vois le foot d’aujourd’hui, avec beaucoup de « un contre un », de vitesse… Petit à petit, j’ai reculé, je jouais à l’intérieur, et j’ai même joué défenseur central. J’ai connu Bernard Mendy au centre à Caen, il a commencé attaquant et il a fait sa carrière latéral droit. Tout le monde se souvient du grand pont qu’il a fait à Roberto Carlos !

Ton plus beau but ?
J’en ai mis des beaux mais je me souviens surtout de celui que j’ai raté et qui aurait pu être mon plus beau ! C’était avec Quevilly, contre Plabennec, en National : je pars de ma partie de terrain, je veux jouer en profondeur et là, je vois la défense adverse qui monte à fond, je ne sais pas ce qui me passe par la tête, je pousse le ballon pour moi et je pars au but, je dribble deux joueurs, je me retrouve face au gardien, je vois « Flo » Coquio à côté de moi, et comme je suis quelqu’un d’altruiste et pas d’égoïste, je fixe le gardien et je fais la passe, au lieu de tirer, mais le défenseur a sorti le ballon en corner !
Sinon, je me souviens de mon premier but de la tête, parce que ce n’était pas mon point fort. Avec le FC Rouen, contre Fréjus, en National, je reçois un centre et je mets le but de la victoire (2-1) : même mon père, en tribune, a demandé qui avait marqué, il n’en revenait pas que ce soit moi ! Toutes les veilles de match, avec Eric Garcin, on travaillait le jeu de tête sous forme de jeu, c’est aussi pour ça que je m’en souviens bien. Je n’ai mis que 2 buts de la tête !

La saison où tu as pris le plus de plaisir ?
J’en ai quelques unes ! J’ai kiffé ma première saison à Quevilly, c’est là que je me suis construit et découvert, avec des buts et des passes décisives. On a vécu une montée aussi, il y a eu la coupe de France bien sûr ! J’ai aimé aussi ma saison à Carquefou en National, même si je n’ai pas fait un championnat de qualité. Je sortais de la saison de coupe de France avec Quevilly qui a bouffé beaucoup de jus et d’énergie. Mon rendement n’était pas celui auquel j’aspirais. Le club voulait me prolonger mais j’estimais que je n’avais pas rendu ce qu’il fallait. J’étais cuit. Je l’ai regretté ensuite. Par contre, j’ai vécu avec un groupe extraordinaire, avec des joueurs extraordinaires comme Florian Martin (Niort, Sochaux, Paris FC, Valenciennes), qui a affolé tous les clubs, Romain Thomas (Angers, Caen), des joueurs qui sont passés pros après, une super ambiance. Je retiens souvent un groupe : à Quevilly on avait un groupe de copains, on était des frères, on a encore un groupe WhatsApp, et à Carquefou pareil. On se retrouvait au PMU à côté. On créait des choses. Il y avait une ambiance. On sortait ensemble après les matchs. On se voyait le samedi. Et quand je suis arrivé à Granville en CFA2, pareil ! On était une vingtaine à sortir ensemble, c’est ça qui m’a le plus marqué. À Rouen, par exemple, j’ai vécu une saison très compliquée. J’ai été pris en grippe par les supporters très exigeants et durs. J’en ai pris plein la gueule. Je jouais à un poste qui n’étais pas le mien. Qui nécessitait des qualités que je n’avais pas. j’avais d’autre qualités à apporter mais qui étaient moins voyantes, comme sur le plan tactique. Mais excentré gauche… bah non, je ne vais pas vite, et le supporter, ça, il le voit, même si j’étais capable de centrer.

Pourquoi tu n’es pas resté à Quevilly après la finale de la coupe de France ?
Je voulais rester. J’ai demandé au président de me faire signer deux ans, c’était une façon de montrer que je voulais m’installer. Et parce qu’on fonctionnait toujours sur des contrats d’un an. Le club a refusé. Du coup j’ai demandé un an et une petite augmentation, on était en National, je venais de faire 37 matchs sur 38, tous titulaire, jamais remplacé, et j’ai disputé tous les matchs de coupe, et on m’a dit non. Là, j’ai pris la décision après une entrevue de 10 minutes de partir, de changer de club, sans avoir aucun contact. Jean-Marie David, ancien coéquipier au FC Rouen, signait à Carquefou et il a parlé de moi là-bas. Et quand je vais là-bas, quinze jours après mon entrevue avec les dirigeants de Quevilly, sur le trajet, pendant les trois heures de route, je vois mon téléphone qui sonne plusieurs fois : c’était Quevilly, ils voulaient que je revienne au club… Je n’ai répondu à personne. J’avais fait mon choix. Je trouvais ça dommage que l’on ne m’appelle que maintenant alors que, pendant quinze jours, personne ne l’avait fait. J’ai bien eu ensuite quelques contacts, Vannes, Amiens, Orléans, mais à chaque fois, il fallait que j’attende qu’un joueur s’en aille pour que j’arrive… Je me vendais tout seul. Et comme j’avais déjà connu cette galère, le chômage, je ne voulais pas revivre ça, et à Carquefou, j’ai adoré le club, on était bien à Nantes, je vivais dans un endroit franchement… c’était super ! J’étais presque comme dans une famille.
Le coéquipier avec lequel tu as pris le plus de plaisir sur le terrain ?
A Quevilly, je m’entendais très bien avec Bigide Ouahbi, qui jouait excentré gauche, et moi j’étais dans l’axe. On avait toujours tendance, avec le coach Régis Brouard, de jouer en appui, de remiser, pour que le joueur soit face au jeu, et par rapport à ça, on s’entendait bien. Mais j’ai connu beaucoup de joueurs… A Granville par exemple, j’ai joué avec Tommy Untereiner, passé chez les pros à Istres, un garçon qui, balle aux pieds, c’était du haut niveau, malheureusement, il avait des genoux trop fragiles.

Le coéquipier qui t’a le plus marqué ?
A Jura Sud, Bertrand Ferro, le papa de Nolan, qui joue à Strasbourg. Bertrand avait été formé à Auxerre, il était maçon, il avait du mal à marcher, il avait les cheveux en vrac, mais par contre, sur un terrain, c’était royal, il avait des qualités hors-normes. Il passait ses journées à travailler, il venait s’entraîner le soir avec nous et le week-end, c’était incroyable. A Quevilly, je citerais « Nico » Pallois : tout le monde disait « c’est un boeuf, ceci, cela », alors ouep, c’est un boeuf, il y avait toujours du monde devant lui dans l’effectif, mais à la fin de la saison, c’est lui qui avait fait le plus de matchs ! Il déboulait sur son couloir gauche et enrhumait tout le monde. Mais avant d’être un boucher, comme on le cataloguait, il avait vraiment de la qualité technique. Il était loin d’être maladroit avec ses pieds ! C’est un joueur qui m’a marqué. Pareil pour Florian Martin à Carquefou. Le coach voulait que je tire les coups de pied arrêtés et là je tombe sur ce joueur, qui avait une main à la place du pied, une force de la nature incroyable, qui frappe fort, qui est précis. Il faisait ce qu’il voulait avec son pied gauche. Ce n’était peut-être pas Rothen, mais pas loin. Il fait 17 passes décisives cette année-là. Suite à une blessure, et des complications, il n’a pas eu la carrière qu’il aurait dû avoir, c’est dommage, c’est un super-mec. Et aussi Jérémy Aymes, passé pro sur le tard avec Le Mans, lui, c’est un mec, dans le travail… Je comprends pourquoi il en est arrivé là. J’ai joué avec lui à Granville. Pierre Lemonnier aussi, il est au Red Star (ex-Le Mans, Guingamp), il était avec moi en CFA2 et en CFA à l’époque à Granville.
Tu es resté proche de Jérémy Aymes, l’actuel gardien de Cannes ?
Oui, on échange régulièrement, quand je cherche à recruter, je regarde d’abord dans ma poule, malheureusement, à Granville, on n’est pas le premier choix, il y a d’autres clubs comme Saint-Malo ou d’autres qui passent toujours avant nous, du coup, cela nous oblige à « taper » dans d’autres poules, et c’est vrai que Jérémy me donne des infos sur des joueurs « en bas », ou des contacts.
Un coéquipier perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?
Bertrand Ferro. Quand je suis arrivé à Jura Sud, tout seul, sans ma famille, et qu’il s’est mis à neiger, ce qui nous a obligés à nous entraîner en salle pendant 15 jours ou trois semaines, c’était difficile… Je suis même écarté du groupe en février après un match contre Montpellier et là je me dis « Putain, mais je ne suis plus fait pour ça », je me retrouve en B, et Bertrand, lui, il m’a accueilli les bras ouverts, on partait ensemble en déplacement dans les Renault Espace, on roulait vite, tellement vite qu’on s’arrêtait sur l’autoroute 20 minutes pour boire du vin jaune et manger des petites pâtes de poulet, et quand on voyait les autres véhicules du groupe passer, on repartait ! Voilà, ce dont des petites choses comme ça qui m’ont marqué. Il m’a accueilli chez lui. J’ai perdu sa trace mais je regarde ce que fait Nolan, son fils, alors que je ne le connais même pas. J’avais accroché avec lui.

Il va peut-être lire l’article et vous allez peut-être renouer le contact !
Avec les autres joueurs, c’est différent, parce qu’il y a les réseaux sociaux, mais Bertrand, je ne suis pas certain qu’il soit sur les réseaux. J’avais 22 ou 23 ans, il avait déjà la trentaine. J’aimerais bien le revoir.
Un coach qui t’a marqué ?
Régis Brouard m’a fait évoluer, par rapport à ce qu’il mettait en place. Cela me correspondait. Sur la recherche dans le jeu. Mes qualités ressortaient. J’ai pris énormément de plaisir avec lui. Je n’ai pas forcément été très performant au départ, et puis, petit à petit, jusqu’à la montée en National et la finale de la coupe de France, c’était de mieux en mieux. J’étais à une heure de ma famille, tout était réuni. Il y a eu aussi Johan Gallon, mon entraîneur à Granville : là, c’était tout autre chose. C’est quelqu’un de très exigeant dans sa recherche, il est très pointilleux, très tactique, très précis, très exigeant à l’entraînement, il savait comment il fallait défendre face à tel adversaire, comment il fallait se déplacer.
Inversement, un entraîneur qui ne t’a pas marqué…
Forcément, Patrick Remy, à Caen. Je faisais des bonne choses en réserve. C’est le seul qui n’a pas voulu que je passe pro. Et je suis quand même passé pro. J’ai été trop con pour accepter, parce que je pensais que j’allais inverser la tendance. Alors que l’on n’inverse jamais la tendance. J’étais jeune. Malheureusement, avec lui, ça ne s’est pas bien passé, ça ne basculait jamais dans mon sens. Heureusement, il y avait l’adjoint, Stéphane Roche, qui lui était axé sur la formation du joueur, et me disait que, parfois, j’aurais mérité d’être appelé, qu’il fallait que je travaille pour moi, par exemple, que je travaille mon pied droit, il m’emmenait vers des choses comme ça, pour que je trouve encore un intérêt à venir m’entraîner.

- Texte : Anthony Boyer / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
- Photos : Philippe Le Brech / Bernard Morvan
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