N2 / David Giguel (Angoulême) : « J’essaie de me contrôler »

Le coach charentais le dit lui-même : il est « impulsif et volcanique ». Sur le banc, il renvoie parfois une image éloignée de celle qu’il affiche au quotidien, et qu’il combat. Son expérience et son admission au BEPF, où il s’enrichit et revisite les outils de formation, doivent l’aider à progresser. Après tout, à 54 ans, il n’est jamais trop tard !

Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Photos : ACFC

David Giguel est né un vendredi 13. Mais cela n’a rien à voir avec le football et cela n’a eu aucune incidence chez lui en termes de malchance ! « Je considère même que ça m’a porté bonheur, et ma belle-mère est né un vendredi 13 aussi ! » Quand on lui demande son âge (54 ans, 55 le 13 novembre prochain), il aime bien raconter cette anecdote. Parce que ça l’amuse. D’ailleurs, au cours de cet entretien matinal de près d’une heure en visio – rendez-vous à 7h15 devant l’ordi, café à distance ! -, le natif de Louviers (Eure), une petite ville de 20 000 habitants située entre Rouen et Évreux, a semblé bien s’amuser.

Détendu, convivial, ouvert, cool, David Giguel a souvent rigolé, à la fin d’une question, ou à la fin d’une réponse. Un petit moins quand même lorsque l’on a abordé son caractère « impulsif et volcanique » – c’est lui qui le dit – notamment sur le banc, et l’image qu’il pouvait renvoyer.

Au fil de l’entretien, débuté par le « tac au tac », histoire de raviver ses souvenirs de joueur et aussi d’entraîneur (1), les membres de son staff technique sont arrivés et se sont installés dans le bureau pour préparer la séance du matin (2). Cela aurait pu rendre la suite de notre entretien moins « intime » mais leur présence n’a en fin de compte eu aucune incidence sur son côté naturel. Le coach d’Angoulême, qui répète souvent « C’est top », est resté tel qu’il est : cash. Jamais il n’a manipulé la langue de bois.

Angoumoisin jusqu’en 2028

En février dernier, le Normand, arrivé sur le banc de l’ACFC (Angoulême Charente Football-club) en 2021, a signé un nouveau bail qui le conduira – en principe – jusqu’en 2028 ! Ce qui ferait une belle longévité de 7 saisons au stade Lebon. Un septennat ! Et c’est déjà beaucoup, surtout dans le contexte actuel. Mais avec l’obtention de son diplôme professionnel en 2026 – il suit actuellement la formation du BEPF à Clairefontaine (3) -, qui dit qu’il n’aura pas des envies d’ailleurs ? Des envies de plus haut ? La question lui a été posée. Vous lirez sa réponse, plutôt surprenante.

Pour l’heure, le coach est focus sur sa mission : obtenir un maintien rapide en National 2 avec Angoulême, avant de viser mieux et pourquoi pas jouer les trouble-fêtes en haut du tableau. Le départ canon de son équipe, leader après 4 journées (10 points sur 12), a laissé entrevoir de réels espoirs, mais depuis, le rythme a quelque peu baissé (4 points sur 12), avec deux revers en quatre matchs, dont un à domicile contre Avranches. Franchement rien d’alarmant.

Interview : « Dès fois, ça sort tout seul ! »

David, dans un an, avec l’obtention du BEPF, vous serez éligible aux étages supérieurs au N2, et vous avez signé à Angoulême jusqu’en juin 2028… Y-a-t-il une ambition de votre part d’aller en pro avant la fin du contrat si l’occasion se présente ? Y-a-t-il un « gentleman agreement » avec Angoulême ?
En fait, quand j’ai signé ma prolongation de 3 ans à l’hiver dernier, le club voulait me donner 2 ans. C’est moi qui ai insisté pour avoir une 3e année. Si le club est satisfait de moi, si les résultats sont bons, si on a envie de continuer l’aventure ensemble, je ne vois pas pourquoi je quitterais Angoulême en cours de contrat. L’idée, c’est que l’on aille ensemble au bout, qu’on mette tout ce qu’il faut pour avoir les meilleurs résultats possibles.

Après, si je suis allé au BEPF, ce n’est pas uniquement pour entraîner une équipe professionnelle, c’est aussi pour chercher des contenus de formation, car cela faisait longtemps que je n’en avais pas suivis, même si au Qatar j’ai eu des possibilités de le faire, mais depuis mon retour en France (en 2014, à Dieppe, en CFA), je n’ai plus eu de formation. Et puis je pense que le BEPF sera un diplôme peut-être pas obligatoire mais nécessaire pour garder du boulot aussi en National 2, parce qu’on voit bien qu’il y a beaucoup d’entraîneurs qui sont allés au BEPF lors des dernières sessions et qui sont aujourd’hui en N2, en N3, voire sans club.

Voilà, quelque part, c’est comme d’aller au bout du process, j’ai passé tous les diplômes, à partir du « formateur ». Je sais aussi que quand on arrive à mon âge, même si je considère que je suis encore jeune, des opportunités pour aller en Ligue 1 ou en Ligue 2, si ce n’est pas adjoint, il va falloir que je me dépêche, que j’ai beaucoup de réussite, que les planètes s’alignent rapidement, parce que c’est compliqué d’aller dans ce monde-là. Je suis bien à Angoulême. Après, dans le foot, vous savez très bien que ce sont les résultats qui conditionnent tout. Donc demain, si on est amené à avoir de mauvais résultats, on verra ce que décide le club ou ce que l’on décide peut-être ensemble ou alors ce que je décide tout seul si je sens qu’il y a eu une usure. Mais aujourd’hui, ce n’est pas d’actualité. Je viens chaque matin au club avec autant d’envie et de passion.

Et de très bonne heure apparemment…
J’arrive toujours entre 7h et 7h30. On démarre à 7h30 / 7h45. On a des journées denses. Le soir, selon les gars, selon les emplois du temps, on part entre 17h30 et 19h30.

Comment ça se passe avec les collègues au BEPF ? En connaissiez-vous certains déjà ?
Je connaissais Stef’ Dief (Le Puy, National) et Stef’ Masala (Chambly, N2, ex-entraîneur des Herbiers et finaliste de la coupe de France en 2018), que j’avais croisés en National 2. Je connaissais de nom ceux qui étaient dans les clubs pros. Je suis souvent avec Gueïda (Fofana) qui est Normand comme moi, on s’est un peu plus rapproché, je ne le connaissais pas, on est souvent l’un à côté de l’autre. Mais tout le monde est très ouvert, désireux d’apprendre, que ce soient ceux qui viennent du monde amateur ou du monde pro comme Damien Perinelle, Jordan Galtier ou Gueïda. En fait, dans cette session, tout le monde a envie.

Débuts d’entraîneur à Marmande

Ce métier d’entraîneur, c’est venu comment ?
En fin de carrière, j’ai joué en CFA (N2) à Dieppe mais j’avais envie d’autre chose, et le club de Marmande cherchait un responsable technique des jeunes et aussi un entraîneur pour sa réserve, qui était en DSR (Régional 3) à l’époque. J’ai passé deux entretiens, j’ai été pris, et c’est là que j’ai pu me consacrer à l’encadrement, même si au départ j’avais la double casquette d’entraîneur-joueur en réserve. On est monté de R3 en R2 (DHR).

C’est donc là qu’est vraiment venue cette envie d’entraîner ?
J’ai passé le Brevet d’État à 23 ans quand j’étais joueur au FC Rouen, et puis Daniel Zorzetto, le coach, avait imposé que les joueurs du centre de formation encadrent des équipes de jeunes. Je me suis pris au jeu, ça m’a plu. Et dans les clubs où je suis passé ensuite, j’ai continué. C’était naturel pour moi ensuite de me diriger dans cette voie.

Vous avez connu pas mal de coachs, certains vous ont forcément marqué…
Il y a toujours des choses bien à prendre chez tous les entraîneurs et d’autres choses que je ne ferais pas non plus, mais celui qui m’a vraiment marqué, parce que je l’ai eu au centre de formation puis en pro, à Rouen, c’est Daniel Zorzetto. D’autres aussi m’ont marqué, comme René Le Lamer, Nasser Larguet, un formateur exceptionnel et un mec top aussi. Même quand j’étais à Doha, j’ai rencontré des top coachs, des Hollandais, des Portugais. J’ai pris des choses chez chacun d’eux et j’essaie de les remettre à ma sauce. Je ne me suis pas quelqu’un qui se dit, « Le foot c’est comme ça et pas autrement, pour réussir, il faut prendre cette voie-là », non…

« J’aime ce que fait Franck Haise »

Qui sont vos inspirateurs aujourd’hui ?
J’aime ce que fait Franck Haise (Nice), ce que fait le coach de Strasbourg Liam Rosenior aussi, ce que fait Gasperini à Rome et déjà ce qu’il faisait à l’Atalanta Bergame, Guardiola, Klopp… C’est ça qui est bien dans le foot, il y a plusieurs moyens de réussir, d’obtenir des résultats. Je m’inspire de tous les mouvements, je les remets à ma sauce, avec l’idée que mon équipe soit la plus performante possible dans le plus de domaines possibles afin d’être le plus imprévisible possible.

C’est pour ça que vous aimez bien surprendre vos adversaires, que vous n’êtes pas figé sur un système ?
C’est vrai que je ne joue pas tout le temps avec les mêmes systèmes (rires). Après, on peut mettre un système sur le papier et ensuite, tout dépend comment on l’anime. Il ne faut jamais oublier que ceux qui font les résultats, ce sont les joueurs. Pas le coach. Les joueurs sont les plus importants. J’avais un débat justement avec Francky (Haise) quand on était joueur à Rouen (lire le « Tac au tac » plus loin), il me disait qu’il fallait que l’entraîneur soit bon, qu’il soit pour 40 % dans les résultats de son équipe, et je lui disais qu’avec 20 %, déjà, c’était bien. Je crois que depuis, il est d’accord là-dessus. Si tu n’as pas les joueurs, tu peux être Garcimore (un magicien dans les années 70 célèbre à la TV, Ndlr), il faut être capable de développer et de tirer la quintessence de ton groupe de joueurs, mais au bout d’un moment, il y a des limites quand même.

Vous n’auriez donc pas de système préférentiel ?
J’aime bien le 4-3-3 quand même, avec une pointe basse, mais parfois, je fais autre chose, par rapport à ce que j’ai vu dans la semaine aux séances, ou par rapport à l’adversaire. On a beaucoup joué comme ça cette année, mais j’ai le souvenir aussi que, la saison passée, au Puy, on a joué avec six défenseurs (rires), quatre dans l’axes et deux sur les côtés, et ça avait beaucoup énervé Stef’ Dief, le coach (camarade de promotion cette année au BEPF). On avait eu beaucoup de réussite et un grand gardien ce soir-là, on avait gagné 1 à 0 à la dernière minute sur penalty !

« Ce n’est pas l’image que je veux renvoyer »

Soir de victoire de l’équipe de National 2 !

La transition est trouvée : vous aviez énervé le coach adverse mais parfois, c’est vous qui êtes énervé, excité sur le banc… Avez-vous conscience que l’image renvoyée au bord du terrain n’est pas forcément toujours bonne, que votre réputation en pâtit ?
Oui, et ce n’est pas ce que je voudrais… J’essaie de m’améliorer. Je pense que ça va mieux quand même aujourd’hui, mais je ne peux pas vous dire l’inverse, je suis quelqu’un d’assez impulsif, volcanique parfois. J’essaie avec l’expérience de mieux me maîtriser parce que ce n’est pas l’image que je veux renvoyer non plus, d’autant que ce n’est pas comme ça que je suis à l’extérieur. Vous me parliez de l’entraîneur de Grasse (Loïc Chabas), contre qui on a joué la saison passée, eh bien avant le match, on a discuté, ça s’est très bien passé, et pendant le match, c’était beaucoup moins bien (rires).

D’où vient ce côté « impulsif et volcanique » ?
J’étais déjà comme ça quand j’étais joueur, hargneux, avec un caractère pas facile, donc c’est un trait de mon caractère. Est-ce que c’est inné ou est-ce que c’est mon enfance qui a fait que je suis devenu comme ça ? Je ne sais pas. En tout cas, quand je vois le résultat, c’est sûr que je n’ai pas envie de donner cette image. J’essaie de prendre sur moi, d’être beaucoup moins impulsif, de prendre du recul par rapport aux événements qui se produisent sur le terrain. Ce n’est vraiment pas l’image que je veux renvoyer aux autres, aux éducateurs du club, aux gens qui viennent nous voir au stade. J’essaie vraiment de diminuer ce trait de mon caractère. J’aimerais que cela n’arrive plus.

« On doit avoir ce devoir d’exemplarité »

À la formation du BEPF, c’est quelque chose qui est évoqué ?
Oui, on en discute aussi, on a Chloé Leprince, de la FFF (psychologue et chercheure en sciences du sport), qui intervient avec nous, nous responsabilise, nous amène des outils pour que l’on puisse mieux gérer ça, mieux contrôler nos émotions, d’autant qu’on demande la même chose aux joueurs, de contrôler leurs émotions. Et si on veut qu’ils répondent, on doit avoir ce devoir d’exemplarité qui est important, et qui devrait nous caractériser plutôt que d’avoir ces attitudes comme celles évoquées.

Avez-vous déjà vu des images de vous en train de vous énerver ?
Ah oui, oui, plein de fois… En fait, les coachs que tu rencontres avant le match, ce sont des gars comme moi, souvent cool, sympas, alors ça ne sert à rien de s’insulter pendant 95 minutes, de s’invectiver, alors que l’on fait le même boulot, que l’on a les mêmes contraintes, les mêmes problèmes. Quelque part, c’est vraiment con. Par contre, moi, après le match, c’est terminé, je peux discuter avec un coach adverse, j’arrive à switcher, je retrouve le calme, je passe très vite à autre chose. Mais quand même, c’est sûr, il ne faudrait pas faire ça, on est de la même corporation. Quand on se voit dans les formations, ça se passe très bien en plus, on va boire des coups ensemble. Avec Stef’ Dief et Stef’ Masala (entraîneur de Chambly), qui sont à la formation du BEPF avec moi, on s’est « traité » pendant nos matchs, alors que j’échange avec eux en dehors du cadre du match où il y a de la tension; ce sont de supers gars, donc quand quelque part, c’est stupide. J’avais lu l’entretien que vous aviez réalisé avec Stef’ (Dief), parce que je m’étais embrouillé avec lui, et il en parle. Je sais qu’il consulte.

Et vous ? Vous consultez ?
(Rires) Non, non, ni préparateur mental, ni psy, mais je ne dis pas que ce n’est pas bien de le faire, au contraire. Je pense que c’est utile. J’ai eu des entretiens avec Chloé Leprince, elle m’a amené des choses, donc ce serait peut-être une solution. J’essaie déjà de me contrôler, de mettre des mécanismes en place avant les matchs notamment, et même aux entraînements, parce qu’il m’est arrivé d’être volcanique aux séances aussi alors que cela ne servait à rien non plus, il y a d’autres moyens pour résoudre les problèmes. Donc ces outils, j’essaie de les mettre en place. Peut-être qu’un jour, j’irai consulter. Je sais que ça fait partie des méthodes.

« L’image fait partie de la panoplie de l’entraîneur »

Indépendamment de votre caractère, vous êtes quelqu’un qui parle facilement, et sur le terrain, vous parlez aussi beaucoup…
Exactement (rires) ! Je parle beaucoup sur un banc, dès fois ça sort tout seul, alors que ça ne devrait pas !

Mais de trop parler, est-ce qu’il n’y a pas le risque d’énerver aussi vos joueurs ?
Les joueurs disent rarement quoi que ce soit ou ce qu’ils pensent de vous. Il y a toujours cette frontière. Je vous dis, j’essaie vraiment de mettre en place des choses pour m’améliorer, parce que je sais que cela fait partie de la panoplie de l’entraîneur, parce qu’aujourd’hui, l’image est importante. D’ailleurs, pour moi, elle est même devenue trop importante. La communication, l’image, ce que vous renvoyez en dehors de ce que vous mettez en place dans les séances de travail et dans les matchs, c’est vraiment devenu un domaine que l’on ne peut pas négliger; je vois bien qu’il y en a certains qui se vendent plus avec leur image qu’avec leurs compétences.

On a l’impression qu’avec vous sur le banc, affronter Angoulême, c’est un peu comme monter sur un ring de boxe… Et puis, vous l’avez dit vous-même : joueur, vous étiez hargneux; votre équipe est à votre image, non ?
(Rires) Je crois que la boxe, on l’appelle le notre art, non ? Donc les deux sont conciliables ! Je peux avoir une équipe qui met beaucoup d’agressivité dans le bon sens du terme quand elle n’a pas le ballon. Regardez le PSG, dont on parle beaucoup aujourd’hui, c’est une équipe qui instaure un pressing de tous les instants, qui fait beaucoup de « un contre un » dans la moitié adverse du terrain, ce qui fait que si vous n’êtes pas dans le duel, dans le combat, eh bien le ballon, vous ne le récupérez jamais, surtout dans ce type de système. Je peux demander beaucoup de choses dans le duel à mon équipe mais aussi d’être capable de bien utiliser le ballon. Nous, à Angoulême, c’est ce qu’on essaie de faire depuis au moins 3 ans : améliorer nos attaques placées, notre capacité technique d’utilisation du ballon et être capable de déséquilibrer nos adversaires.

« La descente en N3, l’an passé, on y a tous pensé ! »

La saison passée, Angoulême a, à la surprise générale, évolué dans la poule Sud de N2 : c’est quoi la différence avec la poule ouest, que vous avez retrouvée cette saison ?
L’an passée, la chose la plus importante, c’était les déplacements, qui ont vraiment impacté notre fin de saison. Je pense que si l’on avait eu moins de déplacements lointains, on aurait mieux terminé, on aurait attrapé une meilleure place que la 6e. Sinon, le N2 du sud est composé d’individualités que l’on ne retrouve pas dans l’ouest, même s’il y a de très bons joueurs aussi, mais dans le sud, ils en ont plein quoi (rires). Dans tous les clubs, il y a des gars qui peuvent faire des différences, notamment devant. C’est impressionnant. Mais c’est plus équilibré et mieux organisé dans l’ouest, parce que dans le sud, on a vu parfois des équipes au niveau de l’organisation défensive notamment, qui étaient moins bien structurées que chez nous. Après, c’est très dur, très physique, très agressif, sans parler parfois des contextes (rires), c’est du combat, de l’intimidation, c’est le sud quoi (rires) ! J’ai quand même apprécié découvrir d’autres terrains, rencontrer d’autres entraîneurs, d’autres clubs, ça nous a a enrichi.

Votre équipe avait très mal commencé la saison passée, au point d’inquiéter vos dirigeants quant au maintien…
Honnêtement, la descente en National 3, on y a tous pensé. Déjà, lorsque l’on a appris que nous étions reversé dans la poule sud, on a tous accusé le coup. On ne s’y attendait pas du tout, et quand on a vu les matchs s’enchaîner… Quand on a commencé le championnat, on n’a pas gagné pendant nos six premiers matchs, parce qu’on se faisait marcher dessus, dans les duels, dans les attaques rapides, on se faisait « tuer ». On a malgré tout réussi à se mettre au niveau sans modifier l’effectif, cela nous a poussé à activer d’autres leviers, à nous remettre en questions. Il a fallu mettre des choses en place pour que l’on puisse s’en sortir. C’est là que l’on voit la stabilité du club, qui est entouré de personnes bienveillantes, qui ont envie d’avancer ensemble, qui sont alignées. Je pense que si la même situation sportive se produit dans un club un peu « déstructuré », avec des dirigeants pas aussi patients, on peut vite prendre des décisions hâtives, qui ne font pas forcément mieux avancer.

« Il nous manque un petit peu de moyens financiers »

Avec son président Patrick Triaud.

Cette saison de N2, vous la voyez comment ?
Notre démarrage est bon même si on sort d’une contre-performance à Saumur (défaite 2-1), et là, on a ce match contre Saint-Malo (vendredi 31 octobre) qui peut nous permettre d’être dans la bonne partie du tableau, ou bien de tomber dans la mauvaise. On est un club stable, sain, avec des gens authentiques. On est aligné avec le directeur sportif (Pierre-Emmanuel Allard) et le président (Patrick Triaud), avec mon staff aussi. C’est essentiel pour obtenir des résultats.

Après on est conscient que pour être sur la même grille de départ que les trois ou quatre grosses écuries du championnat, il nous manque un petit peu de moyens financiers. On sait aussi que ce ne sont pas forcément les gros budgets qui réussissent, mais ceux qui ont de bonnes idées, qui ont envie d’avancer ensemble, qui sont sain. Le club a mis beaucoup de choses en place déjà dans le secteur administratif, au niveau de la formation, au niveau commercial, pour que, si un jour on monte en National, on puisse y rester. Mais il faudrait que les planètes s’alignent.

Les soirs de matchs de N2, le stade Lebon attire entre 700 et 1000 spectateurs.

La Ligue 3 n’est donc pas une utopie, à moyens termes ?
Il y a un projet de stade qui existe aussi à Lebon et qui a été lancé, donc si tout fonctionne bien, il devrait permettre d’avoir des rentrées financières plus conséquentes. A partir de là, bien sûr, l’idée sera de retourner un jour en National ou en Ligue 3 pro, parce qu’Angoulême a déjà connu ce niveau. Cela doit être l’ambition de tout le monde. On aime bien notre stade Lebon, même s’il est un peu vieillissant, parce qu’il a une âme, les gens sont proches. Si le projet aboutit, cela permettra d’avoir plus de rentrées financières et de boxer dans la même catégorie que d’autres clubs en matière de recrutement, en tout cas au départ.

Pour terminer, vous allez au rugby parfois ?
Non. Mais à mon initiative, j’ai appelé l’entraîneur de Soyaux-Angoulême en Pro D2, parce que je voulais voir comment il travaillait, comment il fonctionnait, et s’il y avait des choses à prendre pour nous, c’est important. Du coup, mon staff et moi sommes allés les rencontrer, mais je ne suis pas encore allé voir de match au stade Chanzy.

David Giguel, du tac au tac

Au stade Atlantique, à Bordeaux, cette saison.

Meilleur souvenir sportif de joueur ?
Quand on a affronté l’Olympique de Marseille en coupe de France avec le FC Rouen (en 1993, en 8e de finale, 0-1). On avait perdu sur une erreur d’arbitrage on va dire…

Pire souvenir de joueur ?
Quand on est descendu avec le FCR de ligue 2 en National, en 1994, on n’était pas programmé pour ça mais on avait perdu notre fer de lance à l’inter-saison, Jean-Pierre Orts, et en plus, on est descendu à la dernière journée, alors qu’on n’avait jamais été relégables… Pas top. L’année suivante, en National, En National, on n’avait clairement pas fait ce qu’il fallait pour remonter, il y avait je pense trop de traumatismes liés à la descente, même si cette saison-là Dominique Corroyer avait inscrit 30 buts. Il faut dire qu’on ne le servait pas trop mal, avec Yann Soloy notamment. On avait une belle équipe, mais on n’a pas optimisé le potentiel.

Meilleur souvenir d’entraîneur ?
J’en ai deux. Quand on est monté de National 3 en National 2 avec le FC Rouen (en 2019) et aussi quand on a éliminé Metz (Ligue 1, le 6 janvier 2020) en 32e de finale de coupe de France avec le FC Rouen, 3 à 0. Éliminer un club de Ligue 1, c’est bien, mais en plus, quand il y a ce score… Je le rappelais récemment à mes joueurs, à Angoulême, avant d’aller chez un club de Régional 1 en coupe de France, parce que, cette année-là, avec le FC Rouen, avant de jouer contre Metz, on avait affronté une R1 chez elle et on était passé par la petite porte, et encore, quand je vous dis la petite porte, on l’avait imaginée (rires), on aurait dû se faire éliminer et on s’est qualifié aux prolongations, qui existaient encore. Et après on colle 3-0 à Metz ! La coupe c’est ça !

Puisque l’on parle de la coupe, votre club a rappelé que, depuis que vous êtes à la tête du club, Angoulême a toujours passé au moins trois tours et atteint le 7e tour « fédéral »… C’est une petite fierté, non ?
On essaie de préparer au mieux les matchs, de la façon la plus professionnelle possible, après, OK, on a atteint le 7e tour à chaque fois, mais je me souviens que lors de ma première saison, au 8e tour, on s’est fait taper contre une R2, Panazol, aux penaltys (rires), donc voilà… Personne n’est à l’abri de se faire éliminer par des équipes qui, normalement, sont de niveau hiérarchique inférieur mais qui élèvent leur niveau de jeu (4).

Combien de buts avez-vous marqué dans votre carrière ?
(Rires) Pas beaucoup ! Il faudrait compter ceux que j’ai marqués à l’entraînement pour embellir le tableau (rires) ! J’ai dû en marquer une vingtaine peut-être, ce n’est pas énorme. Je jouais ailier, plutôt excentré droit. J’étais quelqu’un qui bossait beaucoup, qui courait beaucoup, qui faisait beaucoup d’appels, pour épuiser les défenses, qui amenait beaucoup de ballons de but, de centres, mais c’est aussi ce qui m’a freiné. Je n’étais pas capable de tout faire.

Votre plus beau but ?
Contre Laval en Ligue 2, sur un ballon qui arrivait très haut, que j’ai repris de volée du pied gauche, pas en lucarne mais pas loin quand même. Je n’étais pas gaucher pourtant. J’étais remplaçant et je crois qu’on avait égalisé mais on avait quand même perdu 2-1

Pourquoi avez-vous choisi d’évoluer à ce poste ?
Honnêtement, je ne me souviens pas, j’ai dû être positionné là. Mais dans les petites catégories, en foot à 7, je jouais plutôt défenseur central. Au fur et à mesure, j’ai évolué plus haut. Comme j’allais assez vite, on m’a mis sur un côté. A l’époque, il n’y avait pas encore trop de défense à 3, peut-être que le poste de piston m’aurait mieux convenu, parce que j’étais capable de répéter les efforts, assez vite, à haute intensité, mais je ne marquais pas de but (rires), j’étais un peu loin des cages !

Aux côtés d’Anthony Castera, l’attaquant de l’ACFC.

Vos débuts au foot ?
J’ai commencé le football à Val-de-Reuil, dans l’Eure, à côté d’Évreux. C’était une cité nouvelle, construite pour désengorger les cités parisiennes à l’époque. Quand j’y étais, ça s’appelait « Le Vaudreuil ville nouvelle ». J’ai été repéré, j’ai fait équipe de Normandie minimes, on est allé en finale de la coupe des régions, c’était pendant les championnats d’Europe 1984 en France, donc ça nous a permis de jouer un match en lever de rideau à Saint-Etienne, et aussi à Lyon en lever de rideau de la demi-finale Danemark-Espagne, ça m’a permis d’avoir différents contacts. Mais je suis resté au FC Rouen, parce que c’était à côté de chez moi, et parce que c’est là que j’allais voir les matchs de première division. C’est Yves Martin (recruteur au centre de formation du FC Rouen, décédé en novembre 2024), qui m’a repéré. Je suis arrivé au club en U14, en minimes DH, et j’y suis resté onze ans, jusqu’à mes 24 ans.

Qualités et défauts sur un terrain ?
J’allais vite, j’étais compétiteur, avec toujours l’envie de gagner, de me dépasser, mais j’avais un caractère compliqué (rires), un mauvais caractère. J’étais râleur, un peu beaucoup, caractériel, mais j’ai progressé ensuite avec les années. J’ai eu quelques déboires, quelques difficultés (rires). Et je manquais de qualité dans la finition.

Que vous a-t-il manqué pour toucher la Division 1 ?
De la justesse technique dans les derniers gestes, j’avais des qualités physiques, j’étais capable d’enchaîner les courses, j’étais bagarreur, mais pour aller en Ligue 1, il aurait fallu que je finisse mieux les actions que je commençais bien. Après, je pars du principe que l’on a toujours ce que l’on mérite. J’ai quand même joué pendant 10 ans, alors si j’avais eu des qualités pour jouer en Ligue 1, on serait venu me chercher ! Cela n’a pas été le cas, mais c’est déjà pas mal.

Si vous n’aviez pas été footballeur, vous auriez fait quoi ?
Bonne question (rires) ! Je ne sais pas, parce que tout est allé très vite, dès l’âge de 12 ou 13 ans, j’étais dans le circuit, je n’ai pas trop eu le temps de me poser cette question. En tout cas, cette passion du foot m’a vite emporté, dès le plus jeune âge. Et j’ai pu en vivre, ce qui n’est pas courant.

La saison où, joueur, vous avez pris le plus de plaisir ?
On a fait une belle saison à Istres, en National, avec une belle bande de potes, on a loupé la montée en National de pas grand-chose. On jouait plutôt bien, avec René Le Lamer. Les regrets, justement, c’est que j’ai souvent loupé les montées de pas grand-chose (rires).

La saison où, entraîneur, vous avez pris le plus de plaisir ?
J’ai vécu de belles choses à Doha, même si j’ai souvent alterné le poste de directeur de l’académie et entraîneur de différentes équipes, et puis il y avait mon fils avec moi aussi, il avait une petite dizaine d’années. Il y a aussi la montée de N3 en N2 avec le FCR. Quand j’arrive à Rouen, le club avait fini juste au-dessus de la relégation la saison précédente, on est parti un peu dans l’inconnu, le président avait mis un peu moins de moyens, on avait effectué un recrutement un peu plus « régional », mais la mayonnaise avait pris, on avait fait une belle saison, et je monte avec mon club formateur, l’année de ses 100 ans, c’était top.

Avec Frank Haise, il y a 6 ans, quand l’un entraînait Rouen, le club où il se sont connus gamins, et l’autre le RC Lens. Photo FCR 1899

Un coéquipier marquant ?
Franck Haise évidemment. Parce que c’est un ami. Il était en avance à l’époque sur nous au niveau de la maturité et sur beaucoup de choses. C’est devenu non seulement un bon coach mais aussi quelqu’un dont la personnalité fait l’unanimité ; quand on parle de lui, c’est sa bonté, sa gentillesse qui ressortent. Il était déjà « spécial ». Il m’a fait la surprise de venir nous voir à l’hôtel l’an passé le matin de notre match à Cannes, il est resté avec le staff et moi, à discuter, de manière très ouverte, très libre, c’était sympa. Il n’était pas obligé de le faire. On a fait équipe de Normandie minimes et cadets ensemble, il était déjà au FC Rouen quand j’y suis arrivé. On est témoin de nos mariages respectifs.

Du coup, vous regardez ses matchs ?
Oui, oui, tout le temps. De toute façon, je regarde beaucoup de matchs, que cela soit ceux de notre poule en N2 ou au niveau national et international. Ce qu’il met en place en matière de contenu, de jeu, c’est top, et puis « Francky », c’est mon pote, je veux qu’il gagne, qu’il réussisse.

Le joueur le plus fort avec lequel vous avez joué ?
Jean-Pierre Orts, un « phéno », et s’il avait, au niveau de son caractère, été un peu moins « con », comme moi, il aurait joué plus haut, c’est sûr, et puis Karel Jarolim, un international tchécoslovaque.

Le meilleur joueur que vous avez entraîné ?
Jean-Karim Guébé (rires) ! Non, je déconne (rires), c’est mon adjoint, analyste vidéo, il est là, je l’ai lancé en coupe de France de France dans les premiers tours ! Plus sérieusement, ce n’est pas simple. Je dirais Fred Dembi, c’est un joueur que j’ai relancé, à Déville-Maromme en R1, à côté de Rouen, il voulait arrêter le foot. Il a explosé après (Cholet et Orléans en National, Red Star en L2), aujourd’hui il joue en D1 au Maroc, à Agadir. Il nous a beaucoup apporté sur le terrain avec ses qualités de récupération, de percussion.

Un coéquipier perdu de vue que vous aimeriez bien revoir ?
Manu Hutteau. J’ai joué avec lui à Créteil. Je m’entendais bien avec lui.

Un coach perdu de vue ?
Daniel Zorzetto, notre mentor à Rouen. Il était précurseur. En avance sur son époque. Il aurait dû entraîner en Ligue 1. Sa conception du management, ses séances, sa vision du foot, c’était top.

Vous êtes un entraîneur plutôt comment ?
Passionné, exigeant et travailleur.

Angoulême, c’est un club comment ?
Humain, ambitieux malgré tout et authentique. Authentique, c’est vraiment ce qui était ressorti des entretiens que j’avais eus quand j’avais été reçu.

National 2 / Vendredi 31 octobre 2025 (J9) : Angoulême CFC – US Saint-Malo, à 19h30, au stade Lebon.

  • (1) David Giguel a joué à : FC Rouen (D2, National), GFC Ajaccio (National) Istres (National) Créteil (National), Le Mans (D2), Royan, Dieppe (CFA). Il a entraîné : Marmande (CFA), Eu (DH), Qatar (directeur technique), Dieppe (CFA), Déville-Maromme (DH), FC Rouen (N3, N2), Angoulême (N2).
  • (2) Le staff est composé de Matteo Cathalot (entraîneur adjoint spécialiste préparation athlétique), Mathieu Couvidat (entraîneur adjoint spécialiste animation du jeu), Jean Karim Guébé (adjoint spécialiste vidéo), Julien Logeais (adjoint spécialiste gardien de but), Alexandre Limousin (entraîneur de la réserve en R1) et Stéphane Roumagne (intendant).
  • (3) La promotion 2025-2026 : Guillaume Allanou, Thierry Debès, Stéphane Dief, Gueïda Fofana, Jordan Galtier, David Giguel, Stéphane Masala, Sylvain Monsoreau, Vincent Nogueira, Damien Perrinelle.
  • (4) Angoulême se déplacera à L’Union Saint-Jean (R1) au 7e tour de la coupe de France (15 et 16 novembre)
  • Texte : Anthony BOYER / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
  • Photos : Angoulême CFC
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