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Bryan Labissière (Epinal) : « Je reviens de loin ! »

L’ancien international U16 et champion de France U19 avec le PSG a soigné ses statistiques cette saison (17 buts) et contribué à l’accession en National du club vosgien. Un nouveau départ ?

Photo Justine Touvenot – SAS Epinal

Ce n’est pas faire injure à Epinal que de dire que, en National 2, l’on attendait plutôt Fleury cette saison, ou même le FC 93 (Bobigny – Bagnolet – Gagny) pour l’unique accessit en National.

Seulement voilà, les deux équipes franciliennes ont craqué dans le sprint final. Bobigny, leader à la 24e journée, a perdu 5 de ses 6 derniers matchs dont 2 face à ses concurrents directs, tandis que Fleury, encore leader à trois journées de la fin, s’est incliné au pire moment, à Créteil (2-0, J28), laissant les Vosgiens s’emparer de la première place pour ne plus la quitter.

Voilà ce qui s’appelle coiffer tout le monde sur le poteau !

Et voilà ce qui s’appelle rater le coche pour le Fleury, déjà 2e en 2022, devancé d’un petit point seulement par Paris 13 Atlético, et encore 2e cette année, devancé cette fois au… goal-average particulier par le SAS Epinal. Dur.

Epinal repêché deux fois !

Pour Epinal, c’est un retour en National, six ans après sa descente. Un retour qui ne sera pas simple, surtout quand on sait que lors de ses trois précédentes campagnes dans l’antichambre de la Ligue 2, le club de la préfecture des Vosges a terminé… 18e et bon dernier (2014), 17e (avant-dernier 2015) puis 15e. Et est donc descendu… trois fois de suite ! Sauf que le Stade Athlétique Spinalien a été repêché deux fois, en 2015 et en 2016 ! Ne cherchez pas, c’est unique dans les annales. Et cela ne se reproduira plus, les règlements ayant évolué depuis.

Si Epinal retrouve le National, il le doit bien sûr à son effectif et à son staff, emmené par un ancien de la maison, le coach Fabien Tissot. L’ancien attaquant du temps de la Division 2 (9 buts lors de la saison 1995-1996) était revenu s’asseoir sur le banc du stade de la Colombière en 2022, lui qui avait déjà coaché les Boutons d’or de 2009 à 2015, en CFA et aussi en National (deux accessions à son actif en 2011 et 2014). Avec la cuvée 2022-2023, voilà qui fait trois accessions ! Ne cherchez pas, là encore, le spécialiste, c’est Fabien Tissot !

« Je suis un électron libre sur le terrain »

Photo Justine Touvenot – SAS Epinal

Bon, si Epinal retrouve le National, il le doit aussi à un garçon pétri de talent et de qualités, mais qui, ces dernières saisons, n’avait pas encore exploité tout son potentiel. Et ce garçon, c’est Bryan Labissière, ancien international U16 (6 sélections).

Depuis qu’il est à Epinal, le Parisien de 26 ans est transformé. Epanoui. Mature. Cela ne s’est pas vu immédiatement, mais depuis qu’il a changé de poste, délaissant le milieu de terrain et le côté pour se porter aux avants postes, ou tout au moins dans un rôle d’électron libre, une sorte de deuxième attaquant, il empile les buts : 17 cette saison, en 25 titularisations, et tous inscrits dans le jeu (aucun penalty). Des statistiques qui forcent le respect. Et comme il est un joueur altruiste, il a aussi délivré 6 passes décisives.

C’est simple, cette saison, la paire qu’il forme avec l’ancien joueur de Nancy, Karim Coulibaly, c’est 24 buts à eux deux ! Et si l’on y ajoute les 6 buts d’Ismaël Camara, ça donne une triplette à 30 buts ! « Cette année, le coach m’a laissé jouer mon jeu, m’a laissé libre de dribbler, de percuter, et ça s’est bien passé, j’ai pris du plaisir. J’ai été efficace, raconte sobrement l’ancien joueur du Paris-Saint-Germain, où il a effectué toutes ses classes au centre (2010 à 2018). »

« Sur le côté, j’étais timoré »

Photo Justine Touvenot – SAS Epinal

Pourtant, la partie n’était pas gagnée d’avance. Surtout que Bryan n’est pas un attaquant de formation.

« Mon poste de prédilection, c’est 8 ou 10 ! Là, à Epinal, je suis plutôt 2e attaquant. Je suis libre de décrocher, de prendre la profondeur, de jouer entre les lignes, comme un 9 et demi plutôt. Je suis un électron libre dans l’équipe. J’avais déjà commencé à jouer comme ça l’an passé. Mais cette année, on a changé de système : parfois je joue 9 et demi, parfois je joue 10 avec deux pointes, en 3-5-2. Franchement, je le répète, j’ai pris plus de plaisir à ce poste, car je suis plus axe au jeu, alors que sur le côté, j’étais plus timoré, parce que certains coachs me demandaient de prendre la profondeur ou d’aller en un contre un ou de centrer ou de ressortir… alors que moi, j’aime bien « rentrer » dans l’axe. C’est vrai que cette saison, j’ai des bonnes « stats », mais je suis encore plus satisfait du contenu de mes matchs. Il faut dire aussi qu’on était porté vers l’attaque. « 

Cela se voit : cette saison, Epinal, c’est 55 buts inscrits, 4e meilleure attaque de N2 derrière le Racing (66 buts), Bobigny (59) et Rouen (58). Epinal, c’est aussi des milieux qui marquent, à l’image de Doumbia (4), M’Madi (4) et Viallon (3).

« Le téléphone sonne beaucoup… »

La partie n’était pas gagnée non plus pour le Stade Athlétique Spinalien, qui fut un temps décrochée au classement : « Si on a douté ? C’est à dire que, à un moment, cet hiver, on s’est retrouvé loin des premiers, à 11 points je crois, car on avait des matchs en retard à disputer. Et ces matchs-là, on les tous a gagnés. Ce qui nous a permis de recoller au peloton. Et on a fait une série de qui nous a donnés la force. Et puis, ce qu’il s’est passé aussi, c’est que comme tout le monde pouvait descendre à cause des 5 ou 6 relégations, on ne pouvait pas prendre les matchs à la légère. »

Forcément, après une telle saison, les sollicitations affluent. « Le téléphone sonne beaucoup, c’est très bien ! » L’ancien champion de France U19 (avec PSG) n’en dira pas plus. Pas le genre de joueur à fanfaronner. Et puis, Bryan sait d’où il vient : « Quand j’ai quitté PSG, quand j’ai refusé leur contrat pro, je n’ai pas fait les bons choix… Mais je ne veux plus trop parler de cette période. Aujourd’hui, j’ai grandi, j’ai pris en maturité, je vais être papa, y’a beaucoup de choses qui ont changé » raconte celui qui avait commencé le ballon à Romainville en Seine-Saint-Denis à l’âge de 6 ans avant de rejoindre le club voisin, Les Lilas, deux ans plus tard. « Je reviens de loin. C’est vrai. Vivre une montée, c’est exceptionnel, surtout quand tu as été acteur. »

  • Son CV

– Bryan Labissière, né le 11 février 1997, à Paris. Milieu/attaquant. International U16.

Parcours : Romainville (2003-2005) ; Les Lilas (2005-2010) ; Paris Saint-Germain (2010-2018) ; Romorantin (N2, 2018) ; Saint-Malo (N, 2018-2019) ; Guingamp B (N2, 2019-2020) ; Le Puy (N2, 2020-2021) ; Epinal (N2, depuis juillet 2021).

Palmarès : champion de France U19 en 2016 avec PSG et finaliste de la Youth League.
1 sélection internationale (29 mai 2018) avec Haïti : défaite 4 à 0 contre l’Argentine au stade de La Bombonera (Messi 3 nuts, Aguero 1 but).

Bryan Labissiere, du tac au tac

« Je pense collectif ! »

Photo Justine Touvenot – SAS Epinal

Meilleur souvenir sportif ?
J’hésite entre deux… Mais je vais dire les deux : la Youth League avec le Paris Saint-Germain (en 2016), même si on a perdu en finale contre Chelsea, et cette saison, avec Epinal, avec la montée au bout. C’est un délire la montée !

Pire souvenir sportif ?
C’est de ne pas avoir accepté le contrat pro que me proposais Paris SG.

Plus beau but ?
J’en ai mis des pas mal quand même !! Mais je n’en ai pas un qui me vient comme ça, en tête !

Ton but le plus important ?
Même si ce n’est pas le plus beau, c’est celui que j’ai marqué lors de la dernière journée, cette saison, contre Saint-Maur Lusitanos (1-1), car c’est celui qui nous permet de monter en National avec Epinal.

Plus beau loupé ?
J’étais en dehors de la surface, le gardien fait une passe latérale à son défenseur, j’anticipe parce que je sais qu’il va jouer comme ça, je récupère le ballon et là, je suis en angle fermé, côté gauche, y’a plus de gardien, y’a plus personne, mais mon enroulé passe juste au-dessus et sort en 6 mètres. Je crois que c’était contre Schiltigheim la saison passée.

Avec le PSG. Photo FFF

Pourquoi as-tu choisi d’être footballeur ?
C’est ma passion, c’est ce que j’aime le plus. Ma mère m’a inscrit à Romainville, je jouais avec des plus grands que moi. J’ai toujours joué contre des plus grands que moi !

Ta première fois dans un grand stade ?
C’était au Vélodrome, à Marseille. Je faisais la coupe Nationale avec l’équipe d’Ile de France, c’est une compétition qui réunissait les meilleurs jeunes, et c’était à Marseille. On avait été invité au Vélodrome du coup.

Ton geste technique préféré ?
La prise de balle.

Combien de cartons rouges dans ta carrière ?
Un seul, à Guingamp, comme par hasard, c’était lors du dernier match avant la Covid, en réserve, et cela m’a valu six matchs de suspension la saison suivante; c’est pour ça que quand je suis arrivé au Puy, je n’ai pas pu jouer tout de suite.

Si tu n’avais pas été footballeur, tu aurais fait quoi ? Franchement ? Je n’en sais rien.

Qualités et défauts sur un terrain, selon toi ? Je suis quelqu’un de technique et d’intelligent sur le terrain je pense, je vais vite, j’ai les deux pieds. Mes défauts ? Le jeu de tête; mais pas la tête, non, pas le mental ! Car je reviens de loin. Et aussi j’arrive pas à « switcher » quand il y a une situation injuste, et c’est le pire, car je ne supporte pas l’injustice, et je vais ronchonner pendant un moment par rapport à ça. Je sais que ce n’est pas bien mais je suis comme ça.

Photo Justine Touvenot – SAS Epinal

Tu n’as pas un côté nonchalant, aussi ?
Non ! J’ai gommé ça, franchement. Peut-être plus à l’entraînement, mais en match, je ne suis pas du tout comme ça. En match, je suis un guerrier.

Le club ou l’équipe où tu as pris le plus de plaisir sur le terrain ?
Mes années de formation au PSG avec les équipes de jeunes, et cette saison aussi, j’ai vraiment pris du plaisir à Epinal.

Le club où tu n’aurais pas dû signer, l’erreur de casting de ta carrière ?
Guingamp.

Le club où tu as failli signer (tu peux le dire maintenant, il y a prescription) ?
Troyes et Valenciennes, quand j’étais au PSG.

Le club où tu aurais rêvé de jouer, dans tes rêves les plus fous ?
Manchester City.

Avec la sélection haïtienne, face à l’Argentine, au stade de La Bombonera.

Un club où tu ne pourrais pas jouer ?
Je ne peux pas te le dire… Sinon ça va me causer des soucis (rires) !

Un stade mythique ?
La Bombonera. En Argentine. C’est quelque chose ! J’y suis allé, avec la sélection haïtienne. C’était en 2018. C’était ma première et ma dernière sélection car j’ai annoncé que je n’irais plus. Ce jour-là, Messi était en feu, il a mis 3 buts ! L’Argentine nous avait battus 4 à 0.

Un coéquipier marquant (si tu devais n’en citer qu’un), mais tu as droit à deux ou trois !?
Felix (Eboa Eboa) et Chris (Nkunku) parce que ce sont aussi mes meilleurs amis.

Photo Justine Touvenot – SAS Epinal

Le coéquipier avec lequel tu avais ou tu as le meilleur feeling, avec lequel tu t’entendais le mieux sur le terrain ?
Y’en a beaucoup avec qui le feeling est passé ! C’est dur comme question. J’aime bien avoir la possession du ballon, faire courir l’adversaire, jouer en une touche de balle ou deux, j’aime bien tous les joueurs qui sont dans ce registre.

Le joueur adverse qui t’a le plus impressionné ?
Kingsley (Coman) à l’époque, à Paris, c’était un truc de fou.

Un coéquipier que tu as perdu de vue et que tu aimerais bien revoir ?
Jean-Kévin Augustin. C’était mon fréro, on était vraiment proche, nos familles se connaissaient, on était toujours en chambre ensemble, que ce soit en déplacement ou au centre. On a fait nos carrières jeunes ensemble, on a le même âge.

Un coach ?
François Rodriguez. Mon coach au PSG. Et aussi Cédric Cattenoy, que j’ai eu aussi au PSG.

Sous le maillot du Puy.

Un coach que tu n’as pas envie de revoir ?
Non, aucun !

Une causerie d’avant match ?
Les causeries de François Rodriguez, c’était quelque chose.

Une consigne que tu n’as pas comprise ?
Oui mais je ne peux pas le dire !

Le joueur le plus connu de ton répertoire téléphonique ?
Je crois que c’est Chris (Nkunku).

Combien de véritables amis dans le foot ?
J’en ai vraiment trois avec Fodé (Ballo-Touré), Chris (Nkunku) et Félix (Eboa Eboa), mes trois vrais amis dans le foot, et aussi Samuel Essendé, et tous les autres, c’est mes gars !

L’équipe et l’adversaire qui t’a le plus impressionné ?
L’Argentine, avec Haïti, et Messi était injouable ce jour-là.

Tu est un attaquant plutôt…

A Saint-Malo. Photo Joël Galiot

Altruiste. Je pense collectif.

Des rituels, des tocs, des manies ?
J’ai en un : un de mes meilleurs amis est décédé, y’a 4 ans, et quand je rentre sur le terrain, je fais une petite prière pour lui, et avant, je mets une musique l’on écoutait ensemble.

Une devise, un dicton ?
Non, mais pour moi, le plus important, c’est de prendre du plaisir. On a la chance de faire un beau métier. On ne prend pas toujours du plaisir, c’est vrai, mais le but, c’est d’en prendre au maximum. Après, le foot, ça reste le foot, tu gagnes, tu perds…

Que t-a-t-il manqué pour jouer en Ligue 1 ou en Ligue 2 ?
Ce qu’il m’a manqué ? Attend, si il faut, ça va arriver là !! On ne sait pas (rires) ! Ce qu’il m’a manqué jusqu’ici, on ne va pas se mentir, ce sont les statistiques, et aussi, après mon départ de Paris, je n’ai pas mis tout en oeuvre pour retrouver le haut niveau. Mais depuis que je suis à Epinal, je ne pense qu’à une seule chose : retrouver le monde pro. Je me dis que ça va venir.

Une idole de jeunesse ?
David Silva.

Un modèle de joueur ?
Je n’étais pas attaquant au départ, j’étais numéro 8, c’est pour ça que David Silva est mon modèle !

Plus grande fierté ?
De ne pas avoir lâché quand je me suis retrouvé sans club pendant 6 mois… J’aurais pu flancher, vriller… Alors aujourd’hui, tout va pour le mieux, après la saison que j’ai faite, je vois tout le travail que j’ai accompli.

Passions ?
J’aime bien jouer aux jeux en ligne, par exemple, on joue à Ludo King avec Hass (Hassim Fadiga, Le Mans), Saad (Trabelsi, Fleury) et Raf’ (Boujedra, Valence), le soir !

Le match de légende, c’est lequel pour toi ?
C’est la remontada du Barça contre le PSG.

Un sport autre que le foot ?
J’aime bien le tennis, je regarde, d’ailleurs, j’ai regardé la finale de Roland-Garros. J’aime bien Alcaraz, Tsitsipas, Ruune, et le petit américain qui arrive, Shelton.

Un plat, une boisson ?
Le plat de Haïti, le « Pikliz banane peze ».

Le SAS Epinal, c’est un club plutôt…
Familial et ambitieux.

Le milieu du foot, en deux mots ?
Passion et ingrat.

Texte : Anthony Boyer / Mails : aboyer@13heuresfoot.fr et contact@13heuresfoot.fr / Twitter : @13heuresfoot et @BOYERANTHONY06

Photos : Justine Touvenot – SAS Epinal , FFF et DR