William Avognan : « Je suis devenu gardien malgré moi. »

Après avoir jonglé entre le foot amateur et son métier de garagiste, William Avognan est désormais un gardien de but professionnel au Red Star (National). A 28 ans, le joueur d’origine ivoirienne espère s’imposer dans le club francilien et prétendre à la sélection nationale.

Photo Philippe Le Brech

Vendredi 11 août à Epinal, le Red Star FC attaque sa 5e saison consécutive au troisième échelon national avec – toujours – l’ambition de retrouver la Ligue 2.

Le club de Seine-Saint-Denis pourra compter sur la motivation de son gardien William Avognan (28 ans). Après un début de carrière chez les amateurs où il travaillait comme mécanicien dans un garage, le portier au parcours atypique est désormais professionnel depuis cinq saisons. « Je suis devenu gardien malgré moi ! J’ai commencé le foot avec l’idée en tête de vouloir aller marquer. Il nous manquait un gardien, j’ai proposé d’y aller et depuis je suis resté à ce poste. »

« Mon passage à l’académie Diomède m’a beaucoup apporté. »

Photo Philippe Le Brech

William Avognan a grandi à la Ferté-sous-Jouarre en Seine-et-Marne. A l’âge de 15 ans, il intègre l’Académie Bernard Diomède. Créé en 2008 par l’ancien champion du monde, ce sport-études forme les citoyens et footballeurs de demain.

« J’ai intégré l’Académie Bernard Diomède grâce à mon grand-père. Il était entraîneur à ce moment-là et par le biais de ses relations, j’ai entendu parler de cette Académie. Comme je cherchais une structure qui faisait sport-études, il m’a proposé de participer à la détection et de voir ce que ça allait donner. J’ai donc été pris. »

En plus d’un suivi scolaire approfondi et d’entraînements quotidiens, la structure propose aux jeunes de nombreuses activités sociales et culturelles. « Notre voyage au Brésil lors de la Coupe du Monde 2014, c’était vraiment quelque chose. Mon passage à l’Académie m’a beaucoup apporté en termes de responsabilités. Je ne suis pas une « tête » donc je misais énormément sur le foot, tout en essayant de rester connecté sur les études. On a eu la chance d’être bien encadré avec l’Académie, ce qui m’a permis de m’en sortir un minimum. »

« Dans l’excitation, j’ai juste couru comme un grand con pour me replacer »

Photo Philippe Le Brech

Une fois le Bac en poche, William veut poursuivre le football. Cependant, décrocher un contrat professionnel est compliqué. Après avoir effectué ses gammes au FC Issy en Division d’Honneur (Régional 1), il s’engage en 2017 en faveur de l’AF Bobigny qui évolue alors en National 3.

Le dernier rempart du club est titularisé à 24 reprises sur cette saison-là. A l’époque, William se lève à 5 h 30 tous les matins. Le gardien d’1,98m quitte alors son domicile de La Ferté-sous-Jouarre et part travailler comme mécanicien dans un garage du XIIIe arrondissement de Paris puis enchaîne par sa séance d’entraînement à Bobigny (N2) pour un retour chez lui vers 23h30. « Je travaillais chez un concessionnaire automobile la journée et le soir j’allais à l’entraînement. J’habitais quand même assez loin de Paris et les embouteillages ne m’aidaient pas du tout donc ça se jouait énormément au mental. »

Son choix s’avère concluant. Avec Bobigny, il monte en National 2 et réalise même le rêve de nombreux gardiens : marquer un but ! « J’étais à Bobigny et on jouait contre le Blanc-Mesnil. On perdait 1-0 et je suis monté pour le dernier corner. On peut dire que je me trouvais au bon endroit au bon moment ! J’ai voulu gêner le gardien dans sa sortie et il a repoussé la balle des poings sur mon dos. Sur le moment, j’ai couru pour féliciter le joueur ! Je pensais qu’il avait marqué mais je me suis rendu compte que tout le monde courait sur moi en me disant que c’est moi qui avais marqué ! Donc au final, dans l’excitation, j’ai juste couru comme un grand con dans mes cages pour me replacer. »

« Je me suis vite rendu compte que j’avais énormément de boulot »

Photo Philippe Le Brech

Après cette montée pleine de souvenirs, William réalise une saison complète en National 2 avec 28 matchs à son compteur. Bobigny obtient son maintien à la dernière journée. Sa régularité et ses performances lui ouvrent les portes du monde professionnel dans un autre club d’Ile-de-France : le mythique Red Star où il signe comme 3e gardien. Un nouveau rythme de vie qu’il a dû encaisser. « Au début quand je suis arrivé au Red Star, c’était un peu difficile. Ce n’était pas du tout le même rythme d’entraînement, mon corps n’était pas prêt et je l’ai payé par plusieurs petites blessures. Moi qui pensais avoir un bon niveau, je me suis vite rendu compte que j’avais énormément de boulot. Je devais rapidement me mettre au niveau en demandant des programmes de renforcement. »

Malgré un changement drastique de mode de vie, l’Ivoirien peut compter sur son entraîneur des gardiens. Depuis son passage à l’Académie, William connaît Faouzi Amzal. Ce dernier a toujours été d’un grand soutien envers le portier.

« C’était mon entraîneur des gardiens à l’époque. Il m’a envoyé énormément de force et de confiance. C’est toujours le cas actuellement et j’essaye de faire de mon mieux pour que tous ses conseils nous amènent à un très beau parcours avec le club. Je garde cette envie de le rendre fier car il me soutient énormément à sa manière, je veux lui rendre la pareille ».

« J’ai enfin eu des résultats sur le travail fourni »

Photo Philippe Le Brech

Après quatre saisons au club, William ne s’est toujours pas imposé en tant que titulaire. Sur les dernières saisons, il était numéro 3 dans la hiérarchie ou doublure de gardiens plus expérimentés que lui comme David Oberhauser, Raphaël Adiceam, Paul Charruau ou Ludovic Butelle. « C’est un peu compliqué car quand on travaille beaucoup à l’entraînement, on attend forcément de pouvoir prouver sur plusieurs matchs pour pouvoir se faire sa propre expérience. Donc je prends mon mal en patience et je continue de me perfectionner pour rester prêt quand le coach aura besoin de moi. »

Le 19 décembre 2021, il avait été titularisé en 32e de finale de la Coupe de France contre Monaco (0-2). Il avait réussi plusieurs beaux arrêts. « On m’a dit que j’ai fait un bon match mais je ne peux pas m’en contenter. Je voulais faire et montrer encore plus… Même si c’était des joueurs internationaux en face, j’aurais toujours des regrets sur les deux buts que je prends de Ben Yedder », racontait-il après le match.

Photo Philippe Le Brech

La saison dernière, le gardien a progressé dans la hiérarchie des gardiens au Red Star en devenant la doublure de Ludovic Butelle. Il a été titularisé à cinq reprises dans le championnat National, ses premiers matchs à ce niveau. Avec de bonnes performances, c’est une étape de plus franchie dans sa carrière de footballeur. « C’était énorme ! J’ai enfin eu des résultats sur le travail fourni de mes entraînements. Grâce à ces matchs, j’ai pu voir les autres points que je devais travailler. »

« La sélection ivoirienne, c’est un objectif à long terme que je me suis fixé »

Si le Red Star a recruté Quentin Beunardeau, qui possède un gros CV après le départ de Ludovic Butelle à Reims (L1), William Avognan entame cette nouvelle saison avec pour objectif de jouer le plus de matchs possibles. « Je pense qu’il ne me manque pas grand-chose : réussir à appliquer la volonté du coach dans le jeu de l’équipe et être plus rassurant dans mon jeu au pied. »

Avec du temps de jeu il pourra également prétendre à la sélection ivoirienne. « Ma famille m’encourage énormément pour pouvoir y arriver donc c’est un objectif à long terme que je me suis fixé. Il y a des contacts mais ce qu’il me manque, c’est du temps de jeu. Je ne veux pas y aller pour y aller. Si j’y vais, c’est parce que je le mérite et pas parce que je suis le fils de l’ami de je ne sais qui. »

William Avognan du tac au tac

Photo Philippe Le Brech

Meilleur souvenir sportif ?
La montée en National 2 en 2018 avec Bobigny.

Combien de cleansheet ?
8.

Plus belle boulette ?
Faire un simple plongeon avant sur une balle au sol pour qu’elle me passe entre les jambes.

Plus bel arrêt ?
Plusieurs ! Mais un arrêt main opposée en pleine lucarne sur une frappe enroulée c’est toujours satisfaisant !

Au Red Star, à Avranches, en septembre 2022. Photo Philippe Le Brech

Pourquoi avoir choisi d’être footballeur ?
J’ai suivi mes potes.

Votre geste technique préféré ?
Un bon passement de jambes bien exécuté et la feinte de corps qui va avec.

Qualités/défauts sur un terrain selon vous ?
Qualités : jeu aérien, communication, bon sur la ligne; Défauts : encore un petit peu le jeu au pied.

Le club ou l’équipe où vous avez pris le plus de plaisir ?
Mon premier club d’enfance, ASM Fertois.

Photo Philippe Le Brech

Le club où vous rêveriez de jouer dans vos rêves les plus fous ?
Chelsea ou Arsenal.

Un match qui vous a marqué ?
La Finale de Ligue des Champions, Bayern Munich contre Chelsea.

Un coéquipier qui vous a marqué ?
Beaucoup qui ne sont plus dans le foot aujourd’hui.

Un joueur adverse qui vous a le plus impressionné ?
Kinsley Coman en jeunes au PSG.

Un coach que vous aimeriez revoir ?
Mes coachs de Bobigny.

Une consigne de coach que tu vous n’avez jamais comprise ?
Mon problème de tous les jours ! On attend la première démonstration et on essaye de passer en troisième.

Le joueur le plus connu de votre répertoire ?
Beaucoup d’anciens joueurs professionnels africains.

Une devise un dicton ?
Je me reconnais dans toutes celles de la Bible.

Terminez la phrase : vous êtes un gardien plutôt…
Trop calme !

Un modèle de joueur ?
Didier Drogba.

Une idole de jeunesse ?
Will Smith.

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Un plat une boisson ?
Sauce arachide (mafé), beaucoup d’alocos et un bon bissap ou jus de gingembre.

Vos loisirs ?
Manger, Jeux vidéo, Sorties.

Un film culte ?
« Je suis une légende ».

Dernier match que vous avez vu ?
Match amical Standard de Liège contre Hertha Berlin.

Le club du Red Star en deux mots ?
Famille, Ferveur.

Le milieu du foot en deux mots ?
Business et contact.

Texte : Olesya Arsenieva / Twitter : @ArseneviaO

Photos : Philippe Le Brech (sauf mentions spéciales)

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