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Racing Besançon (N2) : Oumar Sissoko a reculé pour mieux rebondir !

Le gardien international malien, formé à Metz, n’a pas hésité à quitter le monde pro pour filer en N3 à Besançon il y a 2 ans. Un choix sportif payant puisque le club du Doubs a accédé en N2 cette saison.  Rencontre.

Oumar Sissoko n’a pas de limite. A 35 ans, le portier formé au FC Metz, passé notamment à l’AC Ajaccio, Orléans ou encore Le Havre, poursuit aujourd’hui sa route aujourd’hui Racing Besançon, club tout juste promu en National 2. Après une carrière riche qui l’a conduit en Ligue 1, en Ligue 2 et en sélection nationale avec le Mali, le natif de Montreuil (Seine-Saint-Denis) a pris, par la force des choses, la décision d’évoluer au niveau inférieur. Rien de déshonorant selon l’international malien. C’est juste que, parfois, il faut se rendre à l’évidence et ne pas hésiter à descendre d’un cran. Pour mieux rebondir ?

Rencontre pleine de franchise avec le gardien au CV bien garni, qui s’est résolu à quitter le monde professionnel il y a désormais 4 ans pour (re)découvrir le milieu amateur, d’abord à Fréjus/Saint-Raphaël, en National 2, et donc à Besançon depuis deux ans, en National 3 tout d’abord, et enfin en National 2 puisque le club de la préfecture du Doubs est monté en mai dernier, avant de décrocher son premier succès de la saison 2022-2023 samedi dernier, face à Sainte-Genviève-des-Bois (3-2). Il le fallait, car le départ des joueurs de David Le Frapper avait été poussif (trois défaites pour commencer puis deux nuls) !

Oumar, après deux saisons au Havre (Ligue 2), tu prends la décision, en 2019, de partir en National 2. Pourquoi ce choix ?
Après un passage difficile au Havre, avec ces deux années ou je n’ai pas joué, je devais trouver un nouveau projet, retrouver les terrains et surtout le plaisir. Olivier Frapolli, l’entraineur de Boulogne-sur-Mer, m’appelle à ce moment-là, on a discuté, mais sur le plan financier ce n’était pas possible à cause de mon expérience professionnelle, et ça ne s’est pas fait. Puis après deux ou trois mois sans club, Fréjus/Saint-Raphaël (N2) me contacte et me propose un projet de montée en National. On était déjà en contact la saison précédente, et j’ai signé.

Finalement, tu subis la première vague Covid-19 là-bas ?
Oui, c’est bien ça. Le plus important pour moi était de retrouver un club avec des ambitions et reprendre confiance après ces deux années sans jouer au Havre, hormis les quelques matchs avec la réserve. Je voulais juste retrouver mon niveau. Malheureusement, à Fréjus, la saison a été arrêtée à cause de la situation sanitaire, ça n’a pas été facile. Durant cette période, Jeremy Guyen, le directeur sportif de Besançon, m’a contacté, il m’a clairement dit qu’il tentait sa chance (rires). Il m’a dit aussi que j’étais sur ses tablettes, m’a présenté le projet sportif du club, qui évoluait alors en National 3. Je partais dans l’optique de retrouver les terrains, préparer aussi ma reconversion. Besançon avait tous les aspects positifs pour moi.

« Je voudrais me spécialiser dans la formation de gardiens de but »

Passer du monde pro au monde semi-pro/amateur, ça implique aussi des sacrifices financiers ?
Financièrement, tu es obligé de faire un sacrifice, c’est sûr. Le plus important pour moi était le côté sportif, de jouer la montée également avec le Racing. Le club a fait un sacré effort financier, moi aussi, mais on s’est entendu. Le but était de travailler sereinement aux entraînements, de jouer, sans me dire « comment je vais payer mon loyer ? » Je ne suis pas un dépensier, ça va (rires). Le sportif avant tout.

Quel est le projet du club actuellement ?
L’objectif de l’accession en National 2 a été atteint, maintenant le plus important sera le maintien. On vient de monter, on va construire petit à petit, on ne va pas avoir la prétention de dire qu’on peut monter en National, tout en sachant qu’il y a la nouvelle réforme des championnats, avec les nombreuses descentes. Il faudra être très prudent.

Tu es désormais en N2, gardien titulaire, comment vois-tu la suite de ta carrière ?
Je viens de souffler ma 35e bougie. Au poste de gardien, la carrière peut être un peu plus longue qu’un joueur de champ, je n’ai pas envie d’arrêter, je le ferai quand je ne serai plus performant ou sans club (rires). Je suis dans un club semi-pro, j’optimise mon temps libre en passant mes diplômes. J’ai obtenu mon BEF la saison dernière, je vise le CEGB (Certificat d’entraîneur des gardiens de but) car je voudrais me spécialiser dans la formation du gardien de but. Je n’ai pas pu être inscrit cette année mais je compte le passer la saison prochaine. Quand j’aurai pris la décision d’arrêter ma carrière, je pourrai transiter sans m’arrêter. J’ai aussi ma propre gamme de gants désormais.

Justement, parle nous de ta gamme. Comment est venue cette idée ?
Il y a quelques années, j’ai été contacté sur les réseaux sociaux afin que je puisse lancer ma gamme. J’étais réticent au début puis j’ai réfléchi à un concept. D’abord, j’ai commandé 20 paires de gants pour un usage personnel puis j’ai contacté quelques amis gardiens et coachs afin qu’ils puissent les tester. J’ai eu un super retour de leur part. Je voulais juste proposer de la qualité à un prix plus raisonnable car il faut savoir qu’une bonne paire de gants coûte plus de 100 €. Aujourd’hui, je suis plus que satisfait du produit, je joue avec depuis deux ans et c’est parfait.

Tu as une belle carrière professionnelle : quels sont tes plus beaux souvenirs ?
Quand je passe mes tests à Clairefontaine et que je suis pris, clairement, c’est là que tout commence pour moi. J’ai en tête ma première signature à Metz comme stagiaire professionnel puis dans la foulée, mon premier contrat lors de la saison 2006/2007, l’année où on monte en Ligue 1, c’était fou. Evidemment, il y a mes premières sélections en équipe de France de moins de 17 ans, puis avec l’équipe première du Mali lors de la Coupe d’Afrique des Nations en 2008. Il y a la montée en Ligue 2 avec Orléans aussi en 2016 et celle de Besançon dernièrement, tout ça, ce sont de très bons moments.

Comment as-tu vécu ces premières sélections nationales ?
C’est forcément un honneur. Je suis de la génération 1987, on a été champions d’Europe avec l’équipe de France U17, j’y ai croisé de belles personnes comme Rémi Riou, Benoit Costil, Atem Ben Arfa, Samir Nasri, Karim Benzema. Certains ont réussi, d’autres moins, c’est le jeu. Avec le Mali, j’ai connu la CAN, j’ai pu visiter à nouveau le pays que j’avais connu plus jeune, visiter d’autres terres africaines, c’est important et plaisant.

« On m’a déjà appelé « Pépito », j’ai pris ça au 4e degré ! »

Au cours de ta carrière, tu as dû croiser des joueurs avec un palmarès important. Ce sont de simples collègues ou il y a tout de suite une cohésion d’équipe ?
Dans toute carrière, on joue contre de grands joueurs, que ce soit en club ou en sélection nationale. J’ai eu la chance de côtoyer Seydou Keita, Mamadou Diarra, Mohamed Sissoko, Sadio Mané, Bouna Saar, Samir Nasri entre autres. Forcément, j’ai joué avec des grands noms, mais quand on est plus jeune, on est insouciant. Au début ce sont des collègues, et puis d’autres deviennent des frères même si on est amené à se quitter. On se voit, on passe du temps ensemble, ce sont des vrais amis. On garde contact, sur les réseaux ou par téléphone.

Le rôle de gardien est spécifique, au-delà du poste, tu es à quelques pas des supporters. Comment vis-tu les remarques que tu peux subir ?
C’est déjà arrivé de devoir régler des choses avec les supporters. Parfois on reçoit des propos sur la famille, des propos racistes, en fonction du match ou de l’évolution du score, tu peux parfois bien le prendre, des fois c’est beaucoup plus dur.

As-tu souvent été victime de propos racistes ?
Ça remonte surtout au début de ma carrière. On m’a déjà dit « Pepito », je l’ai pris au quatrième degré, ça m’a plus fait rire qu’autre chose à ce moment-là. En revanche, on entend également des « sale noir » « retourne dans ton pays », si tu fais un bon match ça te passe au-dessus, si tu perds au score ça te touche différemment. Une insulte sur ma mère ou autre c’est de la provocation, une insulte raciste c’est juste là pour te blesser.

Texte : Charlotte Gruszeczka / Mail : cgru@13heuresfoot.fr / Twitter : @chagru59

Photos : Maxime Dubois, Racing Besançon et DR