Incontournable dans le monde amateur qui lui a collé l’étiquette de spécialiste du National et du National 2, niveau où il pense avoir fait ses preuves, le manager général du Puy-en-Velay aspire, un jour, à retrouver un club pro et pourquoi pas la Ligue 1, qu’il a déjà connue à Dijon.
Scène de ménage au Puy-en-Velay, où le manager général du club, Olivier Miannay, n’est pas d’accord avec Sandrine, sa compagne. La raison ? Le temps passé quotidiennement au téléphone par le natif des Lilas, en Seine-Saint-Denis.
Lui répond 10 heures. Elle n’est pas convaincue : « Sachant qu’une journée dure 24 heures et qu’Olivier dort en moyenne 8 heures par nuit, ça fait 24 moins 8 = 16 ! 16 heures par jour ! » Olivier : « Tu exagères chérie, je passe, allez, peut-être 12 heures au téléphone ! »
Si Miannay garde constamment son kit dans l’oreille, c’est parce que son métier veut ça. C’est parce qu’en football, ça ne s’arrête jamais, tout va très vite, et il faut être… à l’écoute, évidemment. A l’affût, aussi.
Deux accessions en National avec Le Puy !
Vingt ans maintenant qu’il écume les stades, qu’il entretient et développe ses réseaux, qu’il déniche des joueurs, qu’il accumule les expériences. Souvent avec bonheur et réussite.
Son aventure au Puy Foot 43, club phare du département de Haute-Loire, entre Saint-Etienne et Clermont, est en tout cas couronnée de succès.
Depuis son arrivée, en 2018, à chaque fois que l’exercice est allé à son terme (ce qui ne fut pas le cas des saisons 2019-20 et 2020-21 stoppées en raison de la Covid), le club est monté en National (2019 et 2022) ! Un exploit rare, que Roland Vieira, le coach du Puy Foot 43 et artisan de ces accessions (trois en neuf ans si l’on y ajoute celle de CFA2 en CFA pour l’ancien vainqueur de la Gambardella avec l’OL), et Olivier Miannay aiment bien mettre en avant.
Ce touche à tout, qui a tâté du banc à Beauvais comme adjoint en National et porté différentes casquettes (directeur général, responsable du recrutement, manager, etc.), s’est forgé une sacrée réputation dans les plus hautes divisions amateurs du championnat de France, en National 2 et surtout en National, « son » championnat, qu’il connaît mieux que quiconque. Au point d’être incontournable, respecté, écouté, consulté et régulièrement sollicité.
Contacté par Angers l’an passé
Cette image de « spécialiste » du foot amateur, il n’en tire pas de gloriole particulière. Simplement, il aimerait prouver qu’il connaît aussi le foot professionnel, en L1 – un niveau qu’il a connu une saison à Dijon – ou en L2 : « C’est juste une étiquette que je prends volontiers car aujourd’hui, en L1 et en L2, je ne pense pas qu’il y ait beaucoup de gens qui ont la même connaissance des championnats amateurs que la mienne, dit-il sans prétention. C’est selon moi un « plus », un atout, au contraire. Le foot pro, français ou étranger, je le connais aussi, j’ai des réseaux partout. »
Le garçon hyperactif de 43 ans, fan du PSG (bizarre quand on porte les initiales OM, non ?!), qui n’a jamais passé autant de temps dans un club, et qui ne s’est jamais fait virer, – » Pas encore ! » – savoure chaque instant au Puy-en-Velay, où il vient d’entamer sa cinquième saison. Et attend son heure.
A deux reprises, l’an passé, celle-ci a failli arriver : « Mon club le sait, j’ai été sollicité par Angers en Ligue 1 et aussi par Le Havre, mais pour un poste dans le secteur féminin. C’est vrai que j’aimerais un jour que l’on me fasse autant confiance dans un club pro, avec les moyens qui vont avec. J’aspire à retrouver ce monde-là, pour montrer que j’en suis capable. En amateur, j’estime avoir fait mes preuves. Mais je me prends pas du tout la tête avec ça. »
S’il a beaucoup bougé avant de se poser en Auvergne, il affirme que ses choix n’ont jamais été guidés par l’argent. Simplement, c’est parce que les opportunités se sont présentées : « Je ne suis pas instable, mais c’est le foot ! A Beauvais j’étais super bien mais je ne pouvais pas refuser Cannes, un club historique. Dans mon cursus et pour ma progression, j’étais obligé d’y aller. Dijon et la Ligue 1, je ne pouvais pas refuser non plus. Sedan, j’y serais bien resté, mais… Et à Boulogne aussi mais là ce n’était pas le bon timing. »
Dans son parcours, qu’il retrace pour 13heuresfoot, il reconnaît cependant une erreur : Créteil. « Ce n’est pas le club où j’aurais dû aller, mais l’expérience m’a beaucoup apporté ».
Et aujourd’hui , c’est Le Puy qui en profite !
« Je ne savais pas où était situé Le Puy sur la carte ! »
Viry-Châtillon (2002-2003, National) : « C’est de là que tout est parti ! »
J’étais éducateur à Draveil et avec les U15, on va en finale de la coupe de l’Essonne, on gagne notre championnat. J’avais pris contact avec Jean-Marc Pilorget qui était alors manager/entraîneur de Viry-Châtillon en CFA, parce que je voulais lui présenter un joueur, Kenny Vigier. Comme j’ai eu des résultats avec Draveil, je lui ai tapé dans l’oeil. Jean-Marc vient me débaucher et me donne les U15 de Viry. La saison d’après, il me prend dans son staff, me demande d’aller superviser des matchs, puis après j’ai fait son recrutement. C’est de là que tout est parti. Malgré la descente, on est resté, mais Jean-Marc s’est ensuite fait limoger plus tard pour être remplacé par Jean-Pierre Orts. J’ai été solidaire, je suis parti aussi.
Marmande (2004, N2) : « Je voulais me lancer »
Je suis allé donner un coup de main à David Giguel à Marmande en National 2, pendant six mois. Je ne le connaissais pas, on s’était juste appelé pour des joueurs, et il m’a demandé de le rejoindre. J’étais jeune, je voulais me lancer.
Sète (2004 – Déc. 2005, National, L2) : « Ma première réussite sportive »
Claude Calabuig, le coach de Sète, m’a contacté : j’ai fait le recrutement, et on est monté de National en Ligue 2. Et quand il s’est fait virer en décembre 2005 (remplacé par Ludovic Batelli), pareil, je suis parti, par solidarité. Sète, j’en garde un excellent souvenir, parce que c’est ma première réussite sportive. Le groupe étaot exceptionnel, on était sans cesse les uns avec les autres, on allait souvent au resto ensemble. Je suis toujours en contact avec le président Anfosso, Calabuig, Dufresnnes, Kharbouchi, Kharrazi, etc. Mais il n’y a plus personne au club de cette époque, sauf Christophe Rouve, qui vient de revenir comme éducateur chez les jeunes.
Pau (2006-janvier 2008, National) : « Je n’ai pas trop trouvé ma place »
Je suis nommé coordinateur sportif, on fait venir des joueurs incroyables comme Tino Costa ou André-Pierre Gignac, prêté par Lorient, on a eu de la réussite sportive là encore, mais je ne reste qu’un an, car je décide de rentrer chez moi, sur Paris. Je n’arrive pas trop à trouver ma place, mais bon, j’en garde un bon souvenir, ça s’est bien passé avec Joël Lopez, le président délégué, et aussi Bernard Laporte-Frey, qu était déjà au club comme actionnaire, mais je n’étais pas au top (sic). Je retourne dans ma région, où je deviens éducateur sportif à Montgeron (Essonne), et en parallèle je travaille dans les ambulances.
Beauvais (2008-2010, National) : « Là où ma carrière décolle »
Je connaissais Laurent Strzelczak qui était adjoint à Beauvais. Il savait que je connaissais beaucoup de joueurs et me demande si je peux organiser une détection avec des joueurs que j’ai vus sur Paris, et les emmener à Beauvais. Je rencontre Bruno Roux, le coach à l’époque, et Alexandre Clément, avec qui ça matche. Ensuite, Hubert Velud remplace Bruno Roux et Alex me demande de développer une cellule de recrutement pour eux, en continuant à travailler comme ambulancier. Je m’occupe donc du recrutement pour Hubert Velud puis Alex Clément est nommé entraîneur-général et manager, et me demande d’arrêter les ambulances, de devenir coordinateur sportif et d’être sur le banc avec lui et Christophe Raymond aussi, l’actuel coach de Boulogne. C’est là que je reviens dans le foot à plein temps. La saison d’après, on fait une bonne année, on sort pas mal de joueurs, Brice Jovial, Joffrey Cuffaut, que l’on vend, Parfait Mandanda, et d’autres. Beauvais est un club qui compte beaucoup pour moi car on m’a laissé travailler, et c’est là que ma carrière a décollé. Alexandre Clément me faisait confiance. Et puis l’AS Cannes vient me débaucher.
Cannes (2010 – oct 2011, National) : « J’ai des regrets »
Le premier contact, je l’ai avec Xavier Nielsen, le directeur du club. En fait, Cannes vient jouer à Beauvais la saison d’avant, et après le match, l’adjoint d’Albert Emon à Cannes, Philippe Cuervo, que je considère comme un frère et que je connais depuis son époque de joueur à Laval, me parle du club. Et me dit que les dirigeants aimeraient que je vienne les rencontrer à leur hôtel. J’y vais après le match. On peut le dire maintenant, il y a prescription ! C’est là que je rencontre le président, Ziad Fakhri. Et voilà ! Cannes, je ne pouvais pas refuser, même si j’étais très bien à Beauvais. Sportivement, malheureusement, on finit au pied du podium, alors qu’on est en tête jusqu’à Noël. J’ai des regrets car il y avait la place pour monter en Ligue 2. Et puis il y a eu cette rétrogradation en CFA, que le club n’avait pas prévu. On recrute un coach, David Guion, et en octobre 2011 , j’ai l’opportunité de partir à Dijon, en Ligue 1, où Patrice Carteron, avec qui j’étais proche, me sollicite. Je leur avais déjà donné un coup de main sur le recrutement, et puis Patrice me demande d’être le responsable du recrutement. Cannes, ça reste une expérience exceptionnelle.
Dijon (oct 2011 – 2012, Ligue 1) : « Un autre monde »
Une bonne expérience en Ligue 1 ! C’est vraiment un autre monde. Je me suis régalé mais un grain de sable est venu enrailler la machine, entre Patrice Carteron et le président Bernard Gnecchi, et je me suis retrouvé au milieu de ça. Quand ils ont limogé Patrice, je me suis séparé du club d’un commun accord.
Cannes II (2012-2014, CFA) : « 2014, une année très spéciale… »
Après Dijon, je suis retourné à Cannes en CFA (National 2), et je retrouve Jean-Marc Pilorget. Ils m’ont demandé de leur donner un coup de main car ils voulaient remonter en National. On fait 1/4 de finale de la Coupe de France en éliminant Troyes, Saint-Etienne et Montpellier, mais ça s’est mal fini avec le décès de Saïd Fakhri, le papa de Ziad, et je perds mon père deux jours après. 2014, ça reste une saison très spéciale. Et le club dépose le bilan. C’est dommage que l’histoire se soit mal terminée.
Sedan (2014-2015, CFA) : « Je voulais rester mais… »
Farid Fouzari, l’entraîneur, me contacte, et me dit que Jean-Claude Medot, le responsable du recrutement, a besoin de quelqu’un pour l’épauler. Je rencontre le président Marc Dubois à Fréjus, car il habite à Saint-Raphaël et je suis encore installé à Cannes à ce moment-là. Et me voilà directeur sportif adjoint à Sedan. On fait une saison exceptionnelle. Je recrute Bakaye Dibassy, Rudy Camacho, Romain Armand et d’autres. On ne perd que deux matchs de toute la saison et on accède en National. Après l’épisode cannois, il fallait que je montre mes compétences. L’idée, c’était que, la deuxième année, je prenne la suite de Jean-Claude Medot, mais les discussions traînent, je voulais rester, et en fait, j’ai senti que rien n’allait changer.
Boulogne-sur-Mer (2015-2016, National) : « Une saison riche en émotion »
Je suis encore à Sedan et je reçois LE coup de fil de Jacques Wattez, le président de Boulogne, et là, c’est LA vraie belle rencontre. Il me demande si je veux devenir directeur sportif. Il me donne les pleins pouvoirs. Je ne fais qu’une année à l’USBCO mais elle est riche en émotion. Il a des qualités humaines exceptionnelles. Il a une grande gueule certes mais c’est un mec comme j’en ai peu connus. On me laisse travailler et je fais la découverte de jeunes joueurs comme Mercier, Teuma, Mauricio ou Leautey. On ne récolte pas les fruits tout de suite, on fait une saison moyenne, mais ces joueurs vont faire carrière après. Et puis arrive l’opportunité cristolienne.
Créteil (2016-2018, National) : « Je n’ai jamais eu le contrôle »
C’est un coup d’arrêt dans ma carrière mais j’y vais parce que le club descend de Ligue 2, que c’est pas loin de chez moi, et je me rapproche de mes filles, alors que je suis en plein divorce. Et puis je tente le pari de prendre le poste de directeur général, que je n’avais jamais occupé, même si j’avais des notions administratives. Je rencontre le coach Laurent Fournier, un super mec, mais il est limogé assez vite. On se maintient de justesse et lors de la deuxième saison, c’est catastrophique. Je perds le contrôle mais en gros, je ne l’ai jamais eu. Je n’ai pas pu mettre en place mes idées, ma manière de travailler, parce qu’il y avait un comité directeur omniprésent, avec des personnes très interventionnistes, et je n’ai pas trouvé ma place, y’a trop de dysfonctionnements. C’est dommage parce que le président, Armand Lopez, est un homme attachant, intelligent, mais je pense qu’il était coincé entre le comité et moi. Je n’avais pas vraiment les pleins pouvoirs.
Le Puy Foot 43 (depuis 2018, N2, Nat., N2 puis re-Nat.) : « J’ai repris goût au foot ! »
J’étais prêt, après Créteil, à rester sans club, à faire une année de chômage, et puis j’ai le coup de téléphone de Julien Converso, qui est directeur sportif à Romorantin et qui connaît bien Roland Vieira, le coach du Puy. Moi, Roland, je ne le connaissais pas, mais je sais qu’il sollicite ses dirigeants pour prendre un manager général, parce qu’il pense que, tout seul, il n’arrivera pas à tout gérer, à accompagner la progression du club. Du coup, Julien nous met en relation et Roland m’appelle. Moi, je ne savais même pas où c’était Le Puy sur la carte (rires) ! Je viens le rencontrer, puis je fais la connaissance du président Christophe Gauthier et du directeur financier Philippe Thiebault. Le président me demande « Pourquoi vous venez au Puy ? » et je lui réponds « Pourquoi pas Le Puy ? ». Et voilà ! Après, sportivement, c’est l’apothéose ! On monte en National, la réserve accède en N3, les jeunes montent U19 en Nationaux. Ma carrière redémarre après un petit creux. Je me refais une santé. Je reprends goût au foot. On essaie de structurer le club, je me régale, je tombe dans un club très familial, on me fait confiance. Malheureusement, arrive cette année COVID… et on descend, on essaie de repartir la tête à l’endroit, en N2, et la saison s’arrête encore… Mais là, j’ai vraiment très mal vécu l’injustice de la montée de Sedan en National à l’été 2021, même sur ma santé cela a eu des effets. J’ai eu du mal à m’en remettre. Mais on est reparti au combat, et puis pour ma deuxième saison pleine avec Le Puy, on monte encore ! On a relancé des joueurs, on en a découverts, on en a vendus, on se régale.
Olivier Miannay du tac au tac
Ta plus belle trouvaille ?
Tino Costa à Pau
Le joueur que tu as raté ?
Umut Bozok
Le club le plus familial ?
Le Puy
Le club le plus compliqué ?
Créteil
Le challenge le plus difficile ?
Le Puy la saison passée : redémarrer après deux ans de Covid et deux saisons tronquées, arrêtées, et après les injustices… C’était vraiment un challenge difficile mais on l’a réussi !
Ton meilleur souvenir ?
Y’en a beaucoup ! Je dirais la montée en mai dernier avec Le Puy, car c’est une revanche sur plein de choses.
Ton pire souvenir ?
C’est l’annonce de l’arrêt du championnat National, en mars 2020, la veille de recevoir Quevilly Rouen, alors qu’on est à 1 point d’eux et du maintien, et qu’on s’était relancé depuis décembre.
Combien de contacts téléphoniques « football » as-tu dans ton répertoire ?
(Il vérifie) J’en ai 997 !
Un regret ?
Mon départ de Boulogne.
Une fierté ?
Mes enfants.
La ville où tu as préféré travailler ?
Ah… J’ai bien aimé Cannes quand même !
Ton club préféré ?
Paris Saint-Germain (Ndlr, on l’a écrit plus haut, bizarre quand on porte les initiales OM !!!)
Un match de légende ?
PSG – Real Madrid en 1993 (1/4 de finale de la coupe UEFA).
Un match de légende avec un de tes clubs ?
L’élimination de Lorient en 16e de finale de la Coupe de France l’an passé avec Le Puy (1-0), elle est belle celle-là !
Un modèle de directeur sportif ?
J’aime beaucoup Loïc Désiré à Strasbourg, parce qu’on a un peu le même parcours, on vient tous les deux du monde amateur. J’aimerais bien avoir la même trajectoire que la sienne.
Un président ?
C’est trop dur… J’en ai vraiment deux… Jacques Wattez (Boulogne) et Christophe Gauthier (Le Puy). Je les aime beaucoup tous les deux.
Un coach ?
Jean-Marc Pilorget. Tout ce qui m’est arrivé et qui m’arrive, c’est grâce à lui. C’est un monsieur exceptionnel, comme un père pour moi. Je rajouterais René Marsiglia que j’ai connu à 17 ans au centre de formation à Amiens, il a beaucoup compté pour moi aussi.
Texte : Anthony BOYER / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06
Photos : Sébastien Ricou