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National : Versailles, un promu aux moyens XXL qui font jaser

Vainqueur du Mans (2-1) mercredi lors de la 9e journée de National, Versailles occupe la 3e place à trois points du duo Concarneau-Dunkerque. Le club des Yvelines n’est pas un promu comme les autres. Il se signale par un train de vie fastueux matérialisé par le recrutement d’une dizaine d’anciens joueurs de L1 et L2.

Le staff technique du FC Versailles avec, à droite, le coach Youssef Chibhi. Photo Philippe Le Brech

Mercredi, le stade Jean-Bouin qui jouxte le Parc Des Princes, l’antre des rugbyman du Stade Français où Versailles dispute ses matchs de championnat (son stade Montbauron n’est pas homologué), sonnait creux.

Seulement 350 spectateurs environ dont de nombreux invités avaient pris place dans les tribunes. Une poignée de supporters du FC Versailles a bien tenté de donner de la voix durant le match. Mais on entendait un peu plus la cinquantaine de supporters manceaux, derrière l’un des deux buts. Le club des Yvelines souhaiterait dans les prochaines semaines créer un kop.

Promu en National cette saison après une saison 2021-22 parfaite (demi-finaliste de la Coupe de France, champion de son groupe en N2), Versailles connaît une croissance vertigineuse sur le plan sportif depuis quelques mois. Mais en termes de popularité du club, de structures (marketing, commercial…), le club a encore besoin de grandir.

Un budget qui dépasse les 6 millions d’euros

Romain Armand, l’une des recrues à avoir connu la Ligue 1 et la Ligue 2. Photo Philippe Le Brech.

Mais Versailles n’est pas un promu comme les autres. Son recrutement étonne et fait jaser. « Ils ont une équipe qui ne serait pas ridicule en L2 », estime un observateur de ce championnat.

Le groupe immobilier City qui a repris le club il y a une quinzaine de mois, a mis les moyens et ne regarde pas à la dépense. Selon les informations du journal Le Parisien, pour attirer des joueurs qui pour le plupart évoluaient encore en L1 et L2 la saison dernière, les dirigeants ont proposé des salaires confortables pour le niveau (entre 12 000 et 15 000 euros avec des primes de logement). Pour Jeremain Lens, l’ancien international néerlandais, ce serait même 30 000 euros… L’exemple d’un joueur qui a effectué une saison pleine la saison dernière dans son club de L2 est frappant. Alors qu’il avait entre les mains une offre de prolongation, les conditions contractuelles (montant, durée) proposées par Versailles étaient supérieures. Dans ces conditions, le budget dépasserait allègrement les 6 millions d’euros.

Déjà renforcé avant le début du championnat par de nombreux joueurs passés par la L1 et la L2 (Sébastien Renot, Thibaut Jaques, Pierre Gibaud, Romain Armand, Pierre-Yves Polomat, Gregoire Lefevre, Emeric Dudoit, Jordan Leborgne, Florian Lapis, Loic Damour) et l’international néerlandais Jeremain Lens (4 matchs à la Coupe du Monde au Brésil en 2014), Versailles a encore frappé fort ces dernières semaines avec les signatures de Fabien Lemoine (ex-Lorient), Rachid Alioui (ex-Angers) et encore Mathieu Dossevi (Metz, Toulouse, Amiens) qui s’est engagé lundi.

Très courtisés par les agents, les actionnaires de Versailles n’ont pas hésité, non plus, à payer un transfert à Rouen (National 2) pour l’attaquant international haïtien Mondy Prunier qui s’élèverait, avec bonus, à environ 150 000 euros. Du jamais vu à ce niveau.

Forcément, tout ça fait jaser du côté des adversaires. Lors de la reprise de l’entrainement, l’entraineur Youssef Chibhi s’était vivement emporté à l’évocation de « Versailles, le PSG du National », étiquette que beaucoup d’adversaires avaient collé à son équipe.

13 points sur 15 à domicile

Le 11 du FC Versailles aligné lors de la 2e journée de championnat au Puy-en-Velay. Photo Sébastien Ricou.

Avec son effectif XXL, Versailles n’a pourtant pas raté ses débuts. Le club est invaincu dans son stade Jean Bouin (4 victoires, 1 nul) et n’est passé au travers, qu’une fois le 19 septembre à Concarneau (4-1). Et il s’est aussi incliné au Puy-en-Velay (2-0) en début d’exercice.

Malgré autant de joueurs provenant d’horizons différents, la mayonnaise a pris sur le terrain.

L’équipe n’est pas un assemblage d’individualités comme aurait pu le faire craindre un tel recrutement mais forme déjà un collectif performant et solide. « On a pris nos repères au stade Jean Bouin, constate l’entraineur Youssef Chibhi. Cette enceinte est magnifique. On s’est acclimaté rapidement à la surface synthétique donc c’est peut-être une complication pour nos adversaires et on en profite. C’est important d’être performant à la maison pour réussir son championnat. Il faut aussi qu’on soit performant à l’extérieur. »

Contre Le Mans, Fabien Lemoine (35 ans) s’est avéré très précieux. « Il apporte sur le terrain et en dehors, reprend Chibhi. C’est un garçon calme et pondéré. Il ne parle pas pour ne rien dire. Il inspire certains joueurs et sa présence rassure sur le terrain. C’est positif et bénéfique. On est content de l’avoir chez nous et on espère que le National est content d’avoir un joueur comme cela. »

Malgré les arrivées d’autant de joueurs expérimentés, certains qui étaient là la saison dernière, arrivent quand même à se frayer une petite place. C’est le cas de l’attaquant Kapit Djoco qui n’avait jusque-là connu que le N2 (Rouen, Chartres) et le N3 (Aubervilliers), qui a inscrit son 3e but de la saison contre Le Mans. Arrivé en surpoids et blessé dès son premier match, Jeremain Lens n’a, lui, pu jouer qu’une vingtaine de minutes jusque-là.

Un entraineur dans la tourmente judiciaire…

Photo Philippe Le Brech

En plus du regard de ses adversaires, Versailles a dû faire face à une grosse tempête cet été. Le 14 août dernier, le journal Le Parisien révélait le mise en cause dans une enquête judiciaire de l’entraineur Youssef Chibhi pour « atteinte à l’intimité de la vie privée de majeur ».

Pilotée par la sureté départementale des Hauts-de-Seine, elle suit son cours. Au départ, ces révélations avaient provoqué un certain émoi en interne. Les actionnaires ont décidé de faire confiance à Youssef Chibhi même si plusieurs entraineurs de renom leur ont été proposés.

Deux mois après, plus personne n’évoque cette affaire. Pourtant, au départ, la plupart des joueurs versaillais n’avaient pourtant pas caché leur malaise à l’idée de continuer à travailler avec leur entraîneur. Entre les pro-Chibhi et les autres, le vestiaire était divisé et alors au bord de l’implosion. Sur le terrain, les joueurs ont su se montrer solidaires. Les bons résultats se sont enchaînés.

« On a mis ça de côté, racontait un joueur de l’effectif dans le Parisien. Dans les vestiaires, comme les résultats sont là, les gens ont fait abstraction. Pour l’instant, c’est aux oubliettes. Personne ne relance le sujet. On ne se dit pas : Oh les gars, on fait quoi ? On laisse l’entraîneur coacher ? La concurrence est rude. Le premier qui parlerait aurait de gros problèmes si on trouvait son identité. Au début, on se posait des questions, on se demandait si c’était vrai ou pas. Mais, les actionnaires ont dit : Le coach a notre entière confiance à partir du moment où on n’a plus d’informations sur cette affaire. On s’est alors dit : OK, on n’a plus trop le choix, on joue, on ferme sa gueule et on attend. »

… et un directeur général écarté du sportif

Sébastien Rénot, le gardien du FC Versailles. Photo Philippe Le Brech.

Il faut dire que dans un autre club, certains joueurs n’auraient certainement pas retrouvé le même contrat avantageux…
En interne, le club a aussi connu quelques tiraillements. Arrivé dans un costume de directeur général, l’ancien pro, consultant pour Canal +, Jean-Luc Arribart, tête de gondole du projet, a été mis à l’écart du secteur sportif par Youssef Chibhi. Il n’a plus le droit de se rendre dans les vestiaires et de discuter avec les joueurs. Forcément, il se pose des questions sur son avenir au club.

Malgré tout ça, Versailles a montré qu’il serait un candidat crédible à la montée en Ligue 2. « C’est une victoire qui nous rapproche de nos valeurs et qui soude l’équipe, estimait Chibhi mercredi après le match contre Le Mans. Notre formation est expérimentée. L’apport des joueurs qui nous ont rejoint nous permet de bien lire les situations de match. Nous avons fait preuve de maturité. On a une équipe nouvelle qui se découvre avec un effectif largement renouvelé. Il n’y pas de pression, on se la met tout seul. Je ne regarde pas le classement, mais la bonne tenue de l’équipe. Et je m’efforce de trouver une alchimie entre les joueurs. La championnat est serré. On y verra plus clair lors de la 2e partie de saison. »

Le résumé vidéo du match face au Mans mercredi (2-1)

Texte : Laurent Pruneta / Mail : lpruneta@13heuresfoot.fr / Twitter : @PrunetaLaurent

Photos : Philippe Le Brech (sauf mention spéciale Sébastien Ricou)