Échaudé par le dossier Bobigny et une deuxième saison de suite à 17 clubs au lieu de 18, le président de la FFF donne sa vision de la future Ligue 3 professionnelle, prévue le 1er juillet 2026. Il évoque la fameuse date butoir du 17 juillet ainsi que les contrats des joueurs. L’assemblée fédérale du 13 décembre devrait apporter un éclairage, une fois les recommandations, attendues pour mi-octobre, établies.
Par Anthony BOYER – mail : aboyer@13heuresfoot.fr
Photos 13HF
Territoire. Le mot revient souvent quand on parle de foot amateur. Il est même galvaudé. L’on entend parler de plus en plus, par exemple, de « football de territoire ». Le président de la Fédération Française de football, en visite le week-end dernier à Mandelieu, à côté de Cannes, à l’occasion du congrès des présidents de district, l’a souvent employé dans un entretien qu’il a donné à l’issue de l’assemblée générale de l’ANDPF (Association nationale des présidents de district).
Venu à la rencontre des présidents de districts – « nos élus de proximité, ceux-là même qui sont au plus près de nos 12 000 clubs » – pour les écouter et présenter les orientations majeures que la FFF propose pour le foot amateur, Philippe Diallo s’est ensuite confié pendant un gros quart-d’heure aux médias présents et a rappelé « le soutien économique d’aide au football amateur. Cette saison, la FFF a battu un record d’aide : nous avons distribué de diverses manières près de 106 millions d’euros et une loi de programmation financière vise à faire passer ces aides à 150 millions d’euros ».
Accompagné notamment du directeur général de la FFF, Jean-François Vilotte, et entouré de Marc Touchet, président de l’ANDPF, et d’Alain Broche, président du district de Côte d’Azur, Philippe Diallo est, sans entrer de manière spécifique dans les détails, revenu sur la création de la Ligue 3 professionnelle (en remplacement du National), qui suscite toujours autant de commentaires et, légitimement, d’interrogations. En mai dernier, nous avions consacré un large dossier sur le sujet, à relire ici : « La Ligue 3 tiendra-t-elle toutes ses promesses ? »
Philippe Diallo : « On ne va pas refaire le dossier Bobigny »
Président, la Ligue 3 pro est dans les cartons : mais où en est-on de sa mise en place ?
La Ligue 3, c’est un engagement. Elle sera lancée, je l’espère, en 2026-2027, parce que, mécaniquement, le National accueille de plus en plus en de clubs professionnels. Au début, ils étaient au nombre de 3 ou 4, maintenant, il y en a une majorité, ils sont beaucoup plus nombreux. On a tiré des conséquences de cela. Le championnat National se professionnalise et les clubs qui sont sous statut fédéral fonctionne plus ou moins comme des clubs professionnels. On a donc décidé de réparer ça avec un groupe de travail mené par Marc Keller (président de Strasbourg) et Baptiste Malherbe (président et directeur général de l’AJ Auxerre), qui sont membres du ComEx (Comité Exécutif de la FFF), et qui travaillent sur ce projet. Une première étape a été franchie avec le format de cette compétition. Là, on est dans la deuxième phase, celle de régulation.
Dans ce championnat professionnel placé sous l’égide de la FFF, on ne veut pas qu’il y ait des clubs au tapis en raisons de dérives (financières). C’est pour cela que je souhaite un championnat très encadré, avec des règles que je partage avec les présidents de clubs, les joueurs, les entraîneurs, sur un certain nombre de pistes comme l’encadrement de la masse salariale, la limitation des effectifs, l’obligation d’avoir des joueurs formés localement… autant de dispositifs destinés à mieux réguler le championnat, afin de le rendre professionnel et pérenne.
J’attends dans les deux prochains mois les recommandations pour que, à l’assemblée fédérale du 13 décembre 2025, nous puissions présenter un certain nombre d’orientations et être en capacité de lancer ce championnat de Ligue 3 en 2026. La FFF, elle, travaille sur la diffusion et le « namer », un mot que je n’aime pas beaucoup, du championnat, que nous accompagnerons financièrement.
Vous parlez souvent de « maillage », de territoire…
Dans cette future L3, on a beaucoup de villes françaises de catégories moyennes mais suffisamment importantes en termes de démographie, de bassin économique, pour faire un football de qualité, partout en France, parce que c’est une richesse du foot français. Quand je parle de 12 000 clubs sur le territoire, je parle de ce maillage territorial, qui est la force du football. Tous les Français ont accès à quelques kilomètres de chez eux à des matches de football. Cette Ligue 3, c’est un élément supplémentaire de proximité pour les fans de foot, avec du foot de très haut niveau.
Pour les joueurs en formation, cela peut aussi être un moyen de s’aguerrir…
Pour les clubs pros de L1 et de L2 c’est aussi, au travers d’un système de prêt par exemple, un moyen de faire jouer des jeunes joueurs qu’ils ont commencé à former, dans des équipes de haut niveau, afin qu’ils s’aguerrissent avant de pouvoir revenir dans leur club. Cette Ligue 3 sera pour la première fois un championnat professionnel directement géré par la FFF (la Ligue 1 et la Ligue 2 sont gérés par la LFP, Ndlr). C’est un élément qui contribue au rayonnement des territoires et qui favorise l’émergence de futurs talents; ceux-ci trouveront d’abord en Ligue 3 l’occasion de s’exprimer. Tout cela est bon pour le foot français.
On connaît son format, mais quid de son exposition médiatique ?
Il faut pouvoir exposer ce championnat. C’est un des sujet sur lequel on planche, pour trouver le bon diffuseur, afin que la Ligue 3 puisse être accessible, dans les meilleures conditions, à tout le monde. Je rappelle qu’il est à l’heure actuelle directement pris en charge par la FFF qui assure la diffusion des matchs de National (via la plateforme FFFTV et la chaîne Youtube du National), mais on voudrait aller plus loin et trouver, si le marché répond, un partenaire qui accompagne ce championnat de L3.
« Définir le statut du joueur pro de Ligue 3 »
L’un des sujets majeurs, ce sont les contrats des joueurs, qui sont différents selon que l’on soit amateur ou professionnel : se dirige-t-on vers un contrat unique ?
Nous sommes aujourd’hui dans un championnat mixte, avec des clubs à statuts professionnels d’un côté et des clubs à statut amateurs amateurs de l’autre. Avec la Ligue 3 pro, cela veut dire que tout le monde aura un statut pro : une des missions que devront mener à bien dans les semaines qui viennent Baptiste Malherbe et Marc Keller sera de définir le statut du joueur pro de ligue 3. Cela nécessite un dialogue entre les représentants des clubs et les représentants des joueurs, et certainement aussi des entraîneurs, afin de définir les contrats de travail, les minimas salariaux, en s’ inspirant de la charte du foot professionnel, qui existe déjà, mais qui est sous l’égide la Ligue de football professionnel. Je pense qu’il serait intéressant de la dupliquer en partie pour l’adapter au niveau de la Ligue 3 pro, afin qu’il y ait un statut et un contrat professionnel adapté à cette division, qui pour le coup sera unique pour les joueurs.
Ces deux dernières saisons, le National se joue à 17 au lieu de 18 : pour son image, et pour celle de la FFF, ce n’est vraiment pas bon…
Ce que nous devons faire dans les mois qui viennent, c’est vraiment de mettre des règles de régulation en place fin d’avoir un championnat pérenne. Je ne veux pas de catastrophes économiques, humaines et sportives comme on en a connues avec des clubs qui déposent le bilan. On l’a encore vu récemment, cet été, à l’AC Ajaccio, auparavant c’était Bordeaux, cela s’est produit aussi à Sedan, etc. En terme de lien social, ce n’est pas bon pour les territoires dans certaines villes qui connaissent des difficultés. C’est pour cela que l’on doit être extrêmement vigilant sur la pérennité de ce championnat.
Oui mais ce National à 17 est aussi la conséquence de décisions administratives tardives et de la fameuse date butoir du 17 juillet, qui empêche tout repêchage…
Je partage votre avis. Vous ne croyez pas que la Fédération Française de Football préférerait avoir un championnat National qui se joue à 18 plutôt qu’à 17 ? Mais vous savez bien que l’on est dans un pays de droit. Chaque club a donc la possibilité de faire valoir ses droits… C’est vrai que les procédures sont longues, mais la FFF ne peut pas, entre guillemets, raccourcir ces délais de recours ni empêcher les clubs de faire valoir leurs droits. Donc nous sommes aussi tributaires de règles qui, je pense, ne sont pas totalement adaptées à la période de l’intersaison, on l’a directement vécu cet été avec la liquidation de l’AC Ajaccio et la frustration du FC 93 Bobigny, qui aurait aimé être repêché, mais qui s’est heurté aux règles que nous avons fixées. C’est pour cela que la FFF travaille, à travers sa secrétaire générale, aux recommandations qui doivent être soumises, dans un délai court – J’ai proposé à la mi-octobre -, pour voir comment éviter ces effets pervers de cette fameuses date du 17 juillet.

Je veux quand même rappeler que cette date est avant tout une règle de protection des clubs. On en voit parfois durant l’été les effets pervers, mais la première réalité de cette date, c’est de dire qu’à partir d’un moment, il faut bien constituer les groupes, il faut bien aussi que les clubs puissent constituer leurs effectifs et qu’ils sachent dans quel championnat ils vont jouer. Voilà pourquoi il y a cette date du 17 juillet. Aujourd’hui, on va essayer de gommer ces effets pervers. Une des pistes, je ne sais pas si elle sera retenue, au sujet de cette règle qui n’est pas appliquée en Ligue 1 et en Ligue 2, c’est de savoir si la future Ligue 3 devra avoir une date aussi fixe qui conduirait à peut-être perpétuer ces effets pervers. C’est une interrogation. On verra si elle est tranchée à la mi-octobre, avec les recommandations. Mais cela pourrait être une évolution de dire que, l’an prochain, en Ligue 3, il n’y ait plus de date butoir pour les clubs « repêchables ». En tout cas c’est sur la table. Nous déciderons à la mi-octobre.
Mais pourquoi, au moment de l’établissement de la poule le 17 juillet, ne pas inscrire des « ou » : par exemple, cet été, pourquoi ne pas avoir inscrit « Ajaccio ou Bobigny », sachant qu’il y avait ces fameux recours ?
Je ne veux pas rentrer dans le fond du dossier. Il a été traité. Une solution a été trouvée. J’ai eu une heure par jour les gens du club du FC 93 Bobigny tout l’été, je les ai encore par message… Nous avons identifié la difficulté, c’est pour cela que l’on essaie d’y répondre. On ne va pas refaire le dossier.
Lire aussi : La Ligue 3 tiendra-t-elle toutes ses promesses
- Texte : Anthony BOYER / X @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
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