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National 2 / Patrick Koffi (Saint-Maur Lusitanos) : « Je n’ai pas fait tout ça pour abandonner! »

Après des débuts prometteurs au Paris FC, l’attaquant américano-ivoirien de 21 ans, qui n’avait joué qu’au Futsal à Dallas avant son arrivée en France en 2016, a connu plusieurs désillusions. Si son club des Lusitanos Saint-Maur est relégable, il s’est bien relancé et regarde toujours vers le haut. Et espère retrouver le niveau pro.

Ce matin (vendredi 19 mai 2023) à l’entraînement ! Photo Philippe Le Brech

Installé dans un café du XVe arrondissement de Paris, Patrick Koffi affiche un regard qui trahit sa grande détermination. A 21 ans, l’attaquant Américano-Ivoirien a déjà connu beaucoup de péripéties dans sa jeune carrière qui avait pourtant commencé très fort.

Alors qu’il n’avait jamais joué au foot à onze avant son arrivée en France en 2016 en provenance de Dallas (Texas), il n’a eu besoin que de 3 ans pour débuter en Ligue 2 et décrocher un contrat professionnel au Paris FC.
Mais la suite a été très compliquée pour lui avec un carton rouge en L2, un prêt très vite cassé à Créteil (National) et des soucis administratifs. A sa place, beaucoup de joueurs auraient stoppé leur carrière ou sombré. « Mais je n’ai pas fait tout ça pour abandonner ou rentrer aux Etats-Unis », lance-t-il.

Cette saison, il s’est relancé aux Lusitanos Saint-Maur (National 2) où il a inscrit 7 buts dont 5 lors des dernières semaines. Mais son club, 12e du groupe B avant d’affronter Furiani (le 27 mai) et Epinal (3 juin), est fortement menacé de relégation.
C’est un joueur revanchard, toujours décidé à jouer plus haut, beaucoup plus professionnel dans son travail quotidien, qui a longuement raconté son parcours étonnant pour 13HeuresFoot.

De Dallas au Paris FC

Sous le maillot du PFC. Photo Philippe Le Brech

Au FC Dallas, Patrick Koffi, dont le père est ivoirien et la mère américaine, ne jouait qu’au Futsal. « J’y ai développé ma technique, mon jeu dans les petites espaces. Mais pour moi, il y avait davantage d’avenir dans le foot à 11 ».

Grâce à ses performances en Futsal, il est remarqué par des clubs anglais. « Avec ma famille, on a tous déménagé en Angleterre. Pour moi, pour que je réussisse dans le foot, mes parents ont fait des sacrifices en quittant Dallas. »

L’aventure anglaise ne se passe pourtant pas comme prévu. « J’ai effectué des essais, ça c’était plutôt bien passé sur le terrain mais j’ai eu des soucis de papiers. On est donc tous repartis, cette fois pour la France. »

La famille Koffi s’installe à Ablon, dans le Val-de-Marne. Patrick, âgé de 15 ans, qui ne parle pas français, s’inscrit pour des cours en ligne. « J’ai appris la langue et j’ai pu aller jusqu’au bac ». Niveau foot, son père lui trouve une détection au Paris FC. « J’ai effectué un ou deux jours d’essai et j’ai été pris. J’ai fini la saison avec les U17 mais je ne pouvais pas jouer en match à cause de ma licence. »

Premier match en pro à Troyes

Sous le maillot du PFC. Photo Philippe Le Brech

Lors de sa première saison complète avec le Paris FC en 2018-2019, il inscrit 10 buts en U19 Nationaux. Le 25 mai 2019, il effectue son premier match avec la réserve (National 3) et marque un doublé face au Racing (2-2). Au sein du club parisien, on parle de plus en plus de cet attaquant américain, travailleur, aux grosses qualités de finisseur. Ses performances, 7 buts en N3 et 7 aussi avec les U19, lui permettent d’être appelé aux entrainements dans le groupe Ligue 2 par René Girard lors de son arrivée en janvier 2020. Le Paris FC est alors relégable, ce qui n’est pas une période propice pour lancer un jeune de 18 ans. D’autant que Girard possède un effectif plutôt pléthorique. Koffi n’est donc pas là pour faire le nombre mais ses entraîneurs croient vraiment en lui.

Après deux matchs sur le banc (Clermont, Lens), René Girard le lance en L2 en le faisant rentrer lors des dernières minutes de Troyes – Paris FC (1-1) le 6 mars 2020. « Le club n’était pas bien classé (alors 17e), ce n’était pas les conditions idéales, il y avait de la pression car on avait besoin de points. Au départ, j’étais un peu nerveux. Mais après, je me suis bien senti sur le terrain. »

Après ce match, la saison s’arrête à cause de la Covid : « ça m’a coupé dans mon élan. Je n’ai pas pu enchaîner », regrette-t-il. Mais il va très vite être récompensé par un contrat pro de 3 ans qu’il signe à la fin du confinement. « J’étais heureux. Mon premier objectif était atteint. Ce contrat était aussi une récompense pour ma famille et moi, du long chemin qui nous a mené de Dallas au Paris FC. Je n’ai mis que 3 ans pour y arriver, c’est vraiment parti très vite. »

Une occasion manquée et un carton rouge contre Chambly en L2

Sous le maillot du PFC. Photo Philippe Le Brech

Patrick Koffi va pourtant rapidement déchanter. René Girard continue de l’utiliser lors de la préparation de la saison 2020-2021 aux côtés des autres attaquants de l’équipe, Gaëtan Laura, Morgan Guilavogui ou Julien Lopez.

Lors de la première journée de L2, le 22 août 2020, le Paris FC se déplace à Chambly où il déroule (3-0). Ce match a certainement constitué un tournant dans la jeune carrière, alors ascensionnelle, du natif de Dallas. Rentré à la 71e minute, il rate un grosse occasion avant de prendre un carton rouge pour un excès d’engagement. « Le but n’était pas immanquable, il y avait le gardien, c’était un peu difficile quand même (sic). Pour mon rouge, j’ai mis trop d’intensité, j’y suis allé trop à fond. C’est dommage, car je faisais une bonne entrée. Après, je sais que j’ai raté une belle opportunité de marquer mon premier en L2. Pour un avant-centre, ça fait mal. Mais je ne me fais pas expulser car j’étais frustré d’avoir raté. Ce n’est pas ça du tout. »

Après sa suspension, il n’a plus été appelé par René Girard pendant plusieurs semaines. « On ne saura jamais ce qui ce serait passé si j’avais marqué contre Chambly. Mais dans la vie, on ne peut pas retourner dans le passé. Je ne vais pas ressasser ça tout le temps. Il faut avancer. »

Départ en prêt à Créteil en National

Sous le maillot du PFC. Photo Philippe Le Brech

S’il se refait une petite santé avec la réserve (3 buts en 3 matchs), les championnats amateurs s’arrêtent en octobre. Son retour avec la L2 s’effectue dans des conditions particulières. Alors que le Paris FC caracole en tête de la L2 (7 points d’avance), il est mené 0-3 par Auxerre le 22 novembre 2020. René Girard le fait rentrer après la pause. « C’était un match compliqué. J’aurais pu faire mieux. Mais je manquais un peu de confiance. »

Après cette entrée, il n’effectuera plus aucune apparition en L2. « Le club jouait la montée, j’étais jeune et je savais que les places étaient chères et que ce ne serait pas facile. Mais j’ai continué à donner le maximum à l’entraînement. Nicolas Girard (entraîneur adjoint et fils de René Girard) avait toujours un discours positif avec moi. Il me remotivait. Il me disait d’être patient »

Sans championnat, il doit se contenter de matchs amicaux avec la réserve : « ça ne remplaçait pas la compétition mais ça m’a permis de garder le rythme. J’ai marqué 9 buts en 12 matchs. »

En juin 2021, le Paris FC décide de la prêter à Créteil avec son accord. « C’était une bonne option, un bon club de National, Parisien et près de chez moi », reconnaît-il.

Mais son prêt va se transformer en cauchemar. Lors d’un match de préparation en juillet 2021, Créteil affronte justement le Paris FC au centre d’entrainement d’Orly. En échangeant avec l’entraîneur Manu Da Costa, on évoque Patrick Koffi. « Il est comment depuis qu’il est là ? » « Il a eu des retards à l’entraînement », nous répond Da Costa.

Casier vidé à Créteil, problèmes de papiers

Photo USCL

L’aventure de Koffi à Créteil était déjà mal partie au départ. « Je ne vais pas mentir, oui cela m’est arrivé d’être en retard, reconnaît Koffi. Mais comme ça peut arriver à tout le monde. J’assume ça. C’était normal que je paye une amende ou que je sois sanctionné. Mais après, certains ont colporté des choses fausses sur moi. Ca, c’est plus dur à accepter. Mais si ça n’a pas fonctionné à Créteil, ce n’est pas que de ma faute. Je pense que les torts sont partagés. C’est une relation qui n’a pas marché. »

Sur le terrain, il n’effectue que trois petites apparitions, rentrant 5, 20 puis 15 minutes lors des cinq premiers matchs de la saison. A partir du 3 septembre, il ne sera plus jamais appelé dans le groupe. Il effectue deux matchs avec la réserve (N3) puis les choses se gâtent. Un matin, il retrouve son casier vidé dans les vestiaires. Il est exclu du groupe National. « La méthode a été très violente, je n’ai pas trop compris. Je n’ai pas eu d’explication, non plus. Je n’avais plus rien et plus le droit de m’entraîner avec le groupe National. »

Photo USCL

Avec l’accord du Paris FC, son entourage et lui décident de casser son prêt à Créteil et de rentrer dans son club au mois de décembre. Malgré son statut de joueur professionnel, il ne rejoint pas le groupe de Thierry Laurey en L2. C’est avec la réserve du Paris FC (N3) qu’il s’entraîne tous les matins. « C’était le choix du club », soupire-t-il. Une situation compliquée à vivre.

Mais le pire reste à venir. Des soucis administratifs avec sa carte de séjour vont l’empêcher de jouer pendant plusieurs mois. « J’avais des clubs au mercato de janvier mais j’étais bloqué à cause de mes papiers. »

Il doit attendre le 30 avril 2022 pour enfin disputer son premier match avec la réserve du Paris FC à Linas-Montlhéry (3-3). Il dispute 5 matchs au total en N3, et marque 4 buts. « Ca a été une période difficile entre Créteil et mes problèmes administratifs. Mais j’ai essayé de rester confiant. J’ai vécu une saison presque blanche mais heureusement que j’ai pu un peu jouer à la fin. »

« Aux Lusitanos, j’ai retrouvé le plaisir ! »

Photo Saint-Maur Lusitanos

A la reprise, Patrick Koffi, qui a encore un an de contrat professionnel avec le Paris FC, n’est pourtant toujours pas convoqué avec la L2. Pendant plusieurs semaines, il s’entraîne à part, en compagnie d’un autre indésirable (Saïd Arab) ou avec la réserve. La séparation devient inéluctable. Son contrat est résilié au mois d’août. « On a trouvé un accord, explique-t-il. C’était la meilleure solution pour tout le monde. Je comprends la position du Paris FC. Ils veulent monter en L1 donc ils doivent assurer avec des joueurs confirmés. Moi, je voulais du temps de jeu. Mais il faut être lucide : je n’ai jamais confirmé chez les pros. J’avais besoin de faire une saison complète et prouver à un niveau inférieur. Je n’en veux pas du tout au Paris FC. C’est le club qui m’a formé et qui m’a tout appris alors que je n’avais jamais joué au foot à 11 avant d’arriver à Paris. J’ai essayé de toujours tout donner. C’est dans ma mentalité. Les gens qui me connaissent savent que je suis un mec travailleur qui bosse tout le temps.»

Photo Saint-Maur Lusitanos

Aux Lusitanos Saint-Maur, en National 2, il a trouvé un environnement familial, idéal pour rebondir. « J’avais d’autres contacts mais je savais que je serais bien aux Lusitanos. Le souci, c’est que je n’ai pas pu faire la préparation avec l’équipe et ma licence est arrivée tard. »

Avec 7 buts et 2 passes décisives jusqu’à présent, son bilan est positif sur le plan personnel. « J’ai réussi à marquer des buts. Je ne suis pas déçu de ma saison. Elle m’a forgé encore plus. Je pense avoir progressé, notamment au niveau de ma participation au jeu. Au quotidien, je fais désormais plus attention, comme sur la récupération ou la nutrition. Aux Lusitanos, j’ai retrouvé le plaisir. Ça fait du bien. » » Seul bémol, la situation de son club, relégable dans le groupe B de N2. « On a deux matchs pour forcer notre destin, il faut y croire ».

« Je reviens de loin »

Photo Saint-Maur Lusitanos

Patrick Koffi espère, lui, retrouver le monde pro. « Je suis descendu aussi vite que j’étais monté. Donc je vais prendre mon temps. Je reviens de loin. Ma famille a fait beaucoup de sacrifices. Je dois tout à mes parents. J’ai envie de leur rendre la pareille. Ce n’est jamais facile de quitter son pays et d’arriver dans un endroit où on ne connait personne et où on ne parle pas la langue. Ils ont sacrifié beaucoup de choses pour que je puisse vivre mon rêve et réussir. Bien sûr que ça fait mal de ne plus avoir de contrat pro. Tout paraissait simple pour moi au début au Paris FC, mais peut-être que j’avais besoin de passer par cette étape. Ça m’a donné plus de caractère. Je vais me donner les moyens d’y arriver. La solution de facilité aurait été que je rentre aux Etats-Unis et que je retourne dans un certain confort. Mais je n’ai pas fait tout ça, pour abandonner. C’est impossible… Je veux porter haut le nom de Koffi, pour ma famille et moi. Ce n’est pas la fin de mon histoire. Elle reste à écrire. »

PATRICK KOFFI DU TAC AU TAC

Photo Philippe Le Brech

Votre meilleur souvenir ?
Mon premier match en pro, Troyes – Paris FC en L2, le 6 mars 2020. J’avais remplacé Romain Armand à la 84e minute.

Votre pire souvenir ?
Mon carton rouge à Chambly lors de la première journée de L2 de la saison 2020-2021.

Le geste technique préféré ?
Le double contact et le passement de jambes.

Une manie, une superstition ?
J’essaye de rentrer le dernier sur le terrain. Puis je rentre avec mon pied droit en premier.

Qualités et défauts sur un terrain ?
Ma qualité c’est de marquer des buts. Mais je dois travailler ma défense en un contre un.

Votre plus beau but ?
C’est tout récent, contre Bobigny le 24 avril (4-1). Un but de la tête en coupant le coup-franc d’Abel Rodrigues.

Photo Philippe Le Brech

Le joueur le plus fort avec qui vous avez joué ?
Jérémy Menez au Paris FC. Il a une facilité technique vraiment étonnante. A côté du foot, c’est un bon gars, sympa.

L’ entraîneur ou les entraîneurs qui vont ont marqué ?
Mathieu Lacan, en U19 et en N3 au Paris FC. Il sait former les jeunes et les emmener chez les pros. On est beaucoup à avoir joué en pros au Paris FC grâce à lui. Chez les pros, René Girard au Paris FC. Il m’a beaucoup appris, comment être efficace, marquer des buts. Aux Lusitanos, Yann Lachuer (remercié il y 3 semaines) qui m’a fait confiance.

Un président qui vous a marqué ?
Mapril Baptista, mon président aux Lusitanos Saint-Maur. Il est proche de nous, il nous donne de la force et de la confiance. Son soutien est très important.

Le club où vous vous êtes senti le mieux ?
Les Lusitanos Saint-Maur. C’est là que j’ai retrouvé la forme. J’y ai aussi retrouvé mon football après une saison quasi-blanche.

Le club où vous avez regretté de signer ?
Aucun. Même Créteil, alors que ça s’est mal passé pour moi. Mais j’y ai beaucoup appris.

Photo Philippe Le Brech

Vos modèles de joueurs ?
Forcément des avant-centres, Benzema et Haaland. Je m’inspire de leur façon de jouer, leur déplacement sur le terrain. Chez les plus anciens, Didier Drogba.

Le club qui vous fait rêver ?
Chelsea… depuis Didier Drogba !

Un stade mythique ?
Forcément Stamford Bridge, le stade de Chelsea. Je l’ai visité mais je n’ai pas encore eu l’occasion d’y voir un match.

Vos amis dans le foot ?
Ousmane Kanté du Paris FC. C’est comme mon grand-frère. On habite dans la même ville dans le Val-de-Marne. Il m’a beaucoup aidé et soutenu. Aux Lusitanos Saint-Maur, Bruno Gonçalves avec qui j’avais déjà joué au Paris FC et Abel Rodrigues.

Vos occupations en dehors du foot ?
Je reste beaucoup chez moi. Je fais beaucoup de séances d’entraînement individuel.

Les Etats Unis, la Côte-d’Ivoire ou la France ?
Je suis fier d’avoir la double culture, américaine et ivoirienne. J’aime les deux. Les gens sont toujours un peu interloqués mais pour moi, c’est un beau mélange. J’ai encore une sœur et un demi-frère aux Etats-Unis. J’y suis retourné mais ça me manque un peu. Je suis aussi allé en Côte-d’Ivoire. Quant à la France, ça va, je m’y suis bien intégré. J’aime bien.

Texte : Laurent Pruneta / Twitter @PrunetaLaurent et @13heuresfoot / Mail : lpruneta@13heuresfoot.fr et contact@13heuresfoot.fr

Photos : Philippe Le Brech (sauf mentions spéciales)

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