Supporter bordelais depuis son plus jeune âge, l’attaquant formé à Niort et passé par une dizaine de clubs de National et N2, était sur le point de signer en R1 quand le projet Marine et blanc s’est présenté. Il mesure la chance et le bonheur d’avoir rejoint cette institution du football français.
Par Anthony BOYER / Photos Girondins de Bordeaux (sauf mentions spéciales)
C’est à la fois le flop et le tube de l’été. Le flop, parce que les Girondins de Bordeaux, club historique du football français, six fois champion de France, quatre fois vainqueur de la coupe de France, trois fois vainqueur de la coupe de la Ligue, viennent de subir une double rétrogradation, de Ligue 2 en National puis de National en National 2. La faute à un déficit abyssal. Le tube de l’été parce que les médias se sont emparés du « phénomène », surfant sur une immense vague de sympathie autour de ces Girondins « new look », dont la plupart des joueurs, repartis en championnat samedi dernier avec quinze jours de retard sur tout le monde, sont des inconnus du grand public ! Pour eux, c’est la belle histoire, racontée chaque jour dans les journaux et sur les réseaux sociaux, comme un feuilleton !
« Je te propose de t’ouvrir les portes des Girondins »
C’est la belle histoire aussi pour tous les joueurs qui ont rejoint le groupe N2/N3, puisque les deux sont, pour l’heure, indissociables, en attendant de nouvelles arrivées. En attendant d’y voir plus clair sur ce que souhaitent le nouveau coach, Bruno Irles, et son fidèle adjoint, Dado Prso. Une situation profitable à Jérémy Grain, contacté pour le groupe N3 mais titularisé samedi pour le premier match de N2, historique celui-là, des Girondins face à Poitiers (1-1).
Quelques jours avant de s’engager, le natif de Villeneuve-sur-Lot, dans le Lot-et-Garonne, était sur le point de rejoindre un club de Régional 1, l’Etoile Sportive de Boulazac, dans la proche banlieue de Périgueux (Dordogne) juste à côté de Trélissac, où il vient de passer deux saisons en N2. « Je n’avais rien, juste quelques touches comme ça, mais rien de concret, et puis…. »
Et puis il y a eu cette discussion avec Erwan Lannuzel, le coach de la réserve des Girondins en N3, passé par le banc de Bergerac en N2. « Je l’avais eu au téléphone et mon agent est entré en contact avec lui, raconte Jérémy, qui fêtera ses 30 ans le 21 octobre prochain; à l’époque, quand on s’est parlé, je ne savais même pas que l’équipe fanion allait être rétrogradé de Ligue 2 ! Je l’avais contacté pour la réserve, je me demandais s’il avait besoin de « cadres » pour son équipe en N3. Il cherchait des joueurs comme moi, sauf qu’avec la situation du club, il ne savait pas trop où il allait. Du coup, je n’ai pas eu de délai, il m’a dit de ne pas me bloquer, que si j’avais quelque chose, que j’y aille, mais je n’avais rien de concret. Et il m’a rappelé, il m’ a dit, « Ce que je te propose, c’est de t’ouvrir la porte des Girondins de Bordeaux, de rentrer dans l’institution, tu seras destiné à la National 3, après tu sais comment ça se passe, on ne sait pas ce qui peut arriver, si t’es bon, tu monteras avec la N2 ou si ça se trouve, tu resteras avec moi… »
« Je suis comme un enfant ! »
Pour « Jérem », qui a beaucoup bourlingué (et parfois galéré) entre National et National 2 depuis 10 ans, et grand supporter des Girondins depuis son plus jeune âge, c’est une chance unique. « Je lui ai répondu que c’était une super opportunité qu’il m’offrait… Que j’allais la saisir à 200 %, sachant que les Girondins, c’est mon club de coeur ! Tout petit, j’allais voir les matchs à Bordeaux. Entrer dans l’institution, porter le maillot, c’est quelque chose de « ouf » ! Il m’a aussi dit, « Financièrement, on ne peut t’offrir « que ça » mais tu sais pourquoi tu viens ».
Ni une ni deux, l’ex-attaquant de, tenez-vous, la liste est longue, Niort, Fréjus, Boulogne-sur-Mer, Sedan, Virton (Belgique), Lyon-Duchère, Rouen, Bastia-Borgo, Le Puy et donc Trélissac, se rend lundi dernier à la plaine des sports du Haillan. « Je suis arrivé il y a une semaine (entretien réalisé mardi 3 septembre), sur la pointe des pieds. Le coach Erwan (Lannuzel) est là, il t’accueille à l’entrée, il te fait visiter un peu, et t’arrives dans la salle de soins, tu as un docteur, un kiné, un intendant, etc… Tout le monde se présente… Franchement, je suis comme un enfant. Je n’ai pas l’habitude de tout ça, et encore, le staff a diminué par rapport à l’an passé, quand ils étaient en Ligue 2. J’arrive de ma petite campagne, je trouvais ça limite démesuré, ce grand vestiaire… Des écrans partout, la salle de kiné est immense. Je n’étais pas à l’aise ! En fait, j’étais impressionné mais content à la fois, parce que ce que je vis depuis que je suis là, j’en rêvais depuis tout petit, c’est magnifique. »
« Irles-Prso, c’est ultra-pro »
Le lendemain, le mardi, le nouveau staff est arrivé. Bruno Irles et Dado Prso. On ne les présente pas. Ils puent le professionnalisme et transpirent la compétence. « C’est ultra-pro, poursuit Jérémy Grain; tu sens qu’ils veulent vite apporter leur patte, qu’ils veulent mettre leurs principes en place. Ils demandent beaucoup d’intensité, c’est là où je vois la différence par rapport aux saisons précédentes. Ils sont très exigeants, sur la vidéo, sur des petits détails, sur le placement, mais ça t’aide vachement sur le terrain : en fait, tout est très clair, ils te montrent ce qu’ils attendent en vidéo et toi tu l’appliques. Quand on a préparé le match de Poitiers, le coach a montré les points faibles, mais vraiment dans le détail : il est très fort là-dessus. Et puis dans sa communication, il est bon. C’est un meneur d’hommes, il est bien avec le groupe. Et puis il y a Dado (Prso), et pour nous, les attaquants, d’être avec lui, on se régale… Les positionnements, les courses qu’on doit faire, les appels, il est toujours derrière nous. C’est top d’avoir un staff de avec cette expérience. J’avais eu Lilian Laslandes à Niort pour le spécifique attaquant. Ces mecs-là, on les écoute. Pour l’instant, on s’entraîne tous ensemble, groupe N2 et N3. Ensuite, la réserve est destinée à aller sur le terrain d’à côté. Mais là, comme on est mélangé, on s’entraîne sur le camp de base des pros, à La Plaine. C’est exceptionnel, les terrains sont au millimètre, la pelouse est magnifique, tu ne peux pas rater un contrôle. »
« Je n’avais pas l’habitude de recevoir autant de messages »
Jérémy, qui habite encore dans son petit village de Dordogne, à deux heures de route de Bordeaux, a dû laisser son épouse Ophélie et ses deux enfants, Lyam (9 ans) et Ilyan (5 ans), en attendant de trouver un nouveau pied à terre et de pouvoir les emmener avec lui. « Je ne compte plus les déménagements ! Là, je suis à Bordeaux la semaine, je cherche un logement, mais la conjoncture est compliqué ici. »
Médiatiquement, « Jerem », qui a tapé ses premiers ballons à l’école de foot à Fumel (Lot-et-Garonne) jusqu’en benjamins, avant de rejoindre Agen jusqu’en moins de 17 ans et de passer 5 ans à Niort (centre de formation et pro), est passé dans une autre dimension, même s’il avoue ne pas trop faire attention à ça : « En fait, ce qui me fait bizarre, c’est que tous les gens m’ont vu, parce le match face à Poitiers a été télévisé et je suis passé en photo sur les réseaux sociaux, mais moi, pendant le match, les caméras, je ne les calcule pas. Je suis là pour jouer, me donner, mouiller le maillot. Ce qui me bizarre aussi, ce sont tous les messages que je reçois, je n’avais pas l’habitude de ça. Là, j’ai mis les pieds dans un club où, dès que tu postes quelque chose sur les réseaux, c’est vu par des milliers de personnes. À Trélissac, évidemment, tu n’avais pas cette ferveur. Quand on est arrivé au match contre Poitiers, il y avait un millier de supporters qui nous attendait ! J’ai eu des frissons, même quand un groupe de 150 supporters est venu à l’entraînement… Ils nous ont parlé, j’avais envie « d’arracher » tout le monde, c’est exceptionnel ! Moi, c’est ça qui m’anime ! C’est de jouer dans des stades où il y a de la ferveur, un peu comme à Virton ou à Sedan, où on sentait l’engouement. Ce qui m’arrive, c’est une chance exceptionnelle. Là, j’ai hâte de jouer devant les supporters bordelais (le match face à Poitiers était à huis-clos).«
Déjà passeur décisif contre Poitiers
Pour leur premier match officiel de la saison en National 2, trois jours seulement après la première séance dirigée par le nouveau staff, les Girondins ont arraché le match nul – à huis-clos – au bout du temps additionnel, sur un but de la tête du gardien Lassana Diabaté (!), après un coup franc de … Jérémy (1-1) ! « On n’a pas pu faire de miracle. On a quand même plus travaillé le secteur défensif, pour que l’on soit bien en bloc, compact, et qu’on puisse « exploser ». On savait que, offensivement, on risquait d’être cuits. Et puis le coach nous a rassurés, il nous avait dit qu’il nous jugerait surtout sur l’état d’esprit et l’envie de mouiller le maillot et là, on a tous répondu présents parce qu’on était cuit à la fin du match ! Je pense que les supporters sont contents de voir des mecs investis et de se battre pour ce club, même en National 2. »
Et puis, quelque part, Jérémy est entré dans la légende du club : « Ce onze de départ-là, contre Poitiers, il va rester dans les annales, parce que c’est la première équipe alignée à la reconstruction du club. Elle restera dans l’histoire et elle est d’autant plus historique que c’est le gardien qui égalise à la fin ! Faire partie du 11, pour moi, c’était déjà exceptionnel, et en plus faire la passe décisive sur le coup franc de l’égalisation, alors là ! C’est encore plus gratifiant, mais maintenant, il faut confirmer chaque week-end. »
- Vidéo : le but de l’égalisation bordelaise sur un coup franc de Jérémy Grain :
« Je suis obligé d’être à fond aux séances »
Et l’avenir, maintenant qu’il a goûté à l’équipe Une ? « J’étais prédestiné à jouer en N3. J’ai joué avec la N2, c’est une belle surprise. Bruno Irles me connaît, il sait que je n’ai jamais joué en N3, j’ai joué contre lui avec La Duchère quand il était à Pau, j’étais aussi au FC Rouen quand il était entraîneur à Quevilly Rouen, je le croisais, on se saluait, j’avais joué aussi contre lui en coupe de France. Là, j’avais fait une bonne semaine avant Poitiers, j’ai été décisif au match, même si physiquement cela a été compliqué, mais j’ai montré un état d’esprit. »
Jérémy le sait, le groupe N2 est encore amené à évoluer : « Ce qui est délicat, c’est qu’il y a le groupe qui est destiné à la National 2, où ils sont 7 ou 8 joueurs, et le groupe de National 3, où on est 25. Normalement, ça devrait être l’inverse. Du coup, on ne sait pas si on est destiné à aller en N2 ou en N3, même si on fait partie du groupe, parce qu’on sait que des joueurs vont encore arriver pour jouer en N2. Il y a un peu d’incertitude. C’est pour ça aussi que je ne peux pas m’entraîner à 20 % ou gérer mes séances, je suis obligé d’être à fond aux entraînements pour prouver, parce que je me dis que si je ne suis pas à 100 % la semaine, le coach ne va pas me prendre. » Parole de soldat !
Jérémy Grain, du tac au tac
Meilleur souvenir sportif ?
La montée en D2 belge avec Virton.
Pire souvenir sportif ?
Ma dernière saison à Trélissac, avec la descente en National 3.
Combien de buts marqués ?
Je ne sais pas. En championnat, une vingtaine (près d’une trentaine, Ndlr), mais je ne les compte pas. Je compte plutôt mes passes décisives.
Combien de passes dé ?
Euh….. J’ai le chiffre sur mon CV….
Plus beau but ?
C’est mon premier but en National avec Fréjus, le jour de la naissance de mon premier fils, Lyam, et c’était mon premier match avec le club, parce que je venais juste d’arriver en prêt de Niort.
As-tu déjà marqué contre ton camp ?
Non.
Combien de cartons rouges ?
Un avec Bastia-Borgo, un avec Lyon Duchère, j’avais mis un tacle par derrière. Deux je crois, des rouges directs.
Pourquoi as-tu choisi d’être footballeur ?
Le foot, c’est de famille. C’est ma passion. J’ai ça dans le sang depuis tout petit. C’est mon grand-père puis mon père qui m’ont transmis ça. Je voyais souvent mon grand frère jouer au foot, et voilà. J’ai grandi avec un ballon dans les mains. Mon père n’a pas eu une grosse carrière, il jouait dans le Lot, à Montcabrier, une petite bourgade. Mon frère n’a pas percé non plus, il avait des qualités, il jouait dans le coin, vers Fumel.
Ton geste technique préféré ?
C’est donner des passes décisives.
Qualités et défauts sur un terrain, selon toi ?
Mes qualités, c’est la qualité de passe, la vision du jeu, la vista, mes défauts, c’est un peu la capacité athlétique, je fais les efforts, mais courir très longtemps parfois je pêche, et mon jeu de tête aussi, c’est compliqué. Mais je suis un soldat, un vaillant, un guerrier.
Que t’a-t-il manqué pour être un joueur de Ligue 2 ?
Le bon coach au bon moment.
La saison où tu as pris le plus de plaisir sur le terrain ?
Virton. Sans hésitation.
Le club où tu as failli signer (tu peux le dire maintenant, il y a prescription) ?
Laval. C’était quand j’étais à Lyon Duchère, en 2018. Je m’étais dit d’accord avec le club, j’avais eu le président au téléphone, ils m’ont dit « On t’envoie le contrat » et après ça, plus de son plus d’image… Ils ont pris Moussa Sao à ma place, parce que j’étais le deuxième choix. Au final, ils m’ont mis une carotte. Je n’ai jamais su pourquoi.
Le club où tu aurais rêvé de jouer, dans tes rêves les plus fous ?
Les Girondins de Bordeaux !
L’erreur de casting de ta carrière ?
À Boulogne, j’avais signé deux ans de contrat, mais au bout d’un an, je suis parti, parce qu’on me dit « Voilà, le nouveau coach qui arrive, il ne souhaite pas te conserver » et je n’ai même pas eu de discussion avec lui, donc au final, le choix de ne pas avoir échanger avec lui, de ne pas connaître la situation, et de partir comme ça, sur un coup de tête, je le regrette, parce que j’aurais dû rester et montrer ce que je savais faire, que j’allais inverser la tendance. J’ai choisi la solution de faciliter. Si ça se trouve, il n’a donné aucun avis sur mon, parce que moi, je n’ai eu affaire qu’au directeur sportif de l’époque (Aurélien Capoue), et il m’as dit « le coach ne compte pas sur toi ». C’est pour ça, quand j’ai eu le coach Frapolli à Laval, je lui ai parlé de cette histoire, et il m’a dit qu’il n’était pas au courant. Après voilà… J’aurais pu faire une année de plus à Boulogne.
Le meilleur match de ta carrière ?
C’est quand j’ai mis un quintuplé avec la réserve de Niort, contre Royan. La semaine suivante, j’étais monté en Ligue 2.
Le pire match de ta carrière ?
C’est récemment, avec Trélissac, toute la saison, je n’ai pas pris de plaisir. Une saison galère.
Un stade et un club mythique pour toi ?
Le stade Bauer, au Red Star.
Un coéquipier marquant (si tu devais n’en citer qu’un, mais tu as droit à deux ou trois) ?
Bayal Sall, à Lyon Duchère, et John Utaka à Sedan.
Le coéquipier avec lequel tu avais ou tu as le meilleur feeling dans le jeu ?
Waouh ! Y’en a tellement ! Je dirais Quentin Daubin, à Niort (ex-Pau et Caen, aujourd’hui à Gaziantep, en Turquie).
Combien d’amis dans le football ?
Vraiment ? Dix-douze. J’ai fait pas mal de clubs donc j’en ai gardé un dans chaque club, avec qui on échangé régulièrement.
Le joueur adverse qui t’a le plus impressionné dans ta carrière ?
Ernest Seka, quand il jouait en National, à Strasbourg, je l’avais affronté avec Fréjus. Après, en coupe de France, contre des équipes de niveau supérieur, j’ai affronté des bons joueurs.
Le joueur qui t’a posé le plus de problèmes ?
C’était en jeunes, Léo Dubois.
Un coéquipier perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?
Non, parce que dans tous les clubs où je suis passé, j’ai toujours gardé au moins un contact.
Un coach perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?
Je ne l’ai pas perdu de vue, car je suis toujours en contact avec lui, c’est Jean-Philippe Faure, à Niort.
Un coach que tu n’as pas forcément envie de revoir ?
(sans hésiter) David Giguel.
Un président ou un dirigeant marquant ?
Flavio Becca à Virton.
Une causerie de coach marquante ?
Celles de Nicolas Usai, à Sedan, donnaient des frissons, il sait trouver la motivation. Un vrai meneur d’hommes.
Une appli mobile ?
Snapchat.
Une ville, un pays ?
Bordeaux et l’Espagne.
Le joueur le plus connu de ton répertoire, c’est qui ?
Aymeric Laporte.
Un plat, une boisson ?
Les lasagnes et de l’eau pétillante.
Dernier match que tu as regardé à la télé ?
C’est Toulouse-Marseille dimanche dernier (1-4).
Dernier match auquel tu as assisté dans les tribunes ?
C’est Bordeaux-Caen, en Ligue 2, la saison passée… sans me douter que, quelques mois plus tard, je porterais le maillot des Girondins…
Des rituels, des tocs, des manies ?
Le même caleçon.
Termine la phrase en un adjectif ou deux : tu es un joueur plutôt …
Altruiste !
Un attaquant de légende ?
Karim Benzema. Il fait le jeu, il est toujours disponible, il se met au service du collectif.
Une idole de jeunesse ?
Zidane.
Un modèle de joueur ?
Dimitri Payet. J’aime ce style de joueur, qui donne des bonnes passes, qui fait la différence, bon dans les petits espaces, qui ne va pas forcément très vite. Valbuena aussi. Je me reconnais un peu dans ces profils de joueurs.
Ta plus grande fierté ?
C’est de porter le maillot de mon club de coeur, les Girondins de Bordeaux. Cela ne peut pas être mieux pour moi à l’heure actuelle.
Le milieu du foot, en deux mots ?
Le foot, c’est à la fois très collectif et très individuel. Les gens ne pensent qu’à soi, et moi, je ne suis pas comme ça, je suis plus quelqu’un qui donne, et malheureusement, dans le foot, il n’y a pas trop de place pour des gens comme ça. C’est peut-être aussi ce qui m’a fait défaut à un moment donné, je n’ai pas pensé à moi. C’est un mon de requins, un monde égoïste.
Jérémy Grain, club par club
Niort (2010-15, formation, réserve, L2). « C’est un de mes meilleurs souvenirs. J’y ai passé cinq merveilleuses années, j’ai rencontré Ophélie, mon épouse, j’ai eu mon premier petit, Lyam, qui est né à Niort, et sportivement, j’ai découvert un peu le monde pro avec d’autre joueurs du centre; je suis toujours en contact avec eux. On était un socle, une famille. Je sais que je les reverrai dans quelques années. Et puis c’est à Niort que j’ai signé mon premier contrat pro et en termes de stats’, j’étais exceptionnel en réserve. C’est juste le choix du coach : je n’entrais pas dans les plans de Régis Brouard, ni dans ceux de Karim Fradin. Récemment, je voulais revenir au club, avant de signer à Bordeaux, pour aider, mais ils ne savaient pas trop où ils allaient sportivement, mais même en Régional 1, j’y serais allé, ma belle-famille est installée à Niort, mais Bordeaux m’a appelé… »
Fréjus/St-Raphaël (déc. 2015 – 16, National). « Je suis prêté six mois en National, c’était du kiff ! J’arrive et au bout d’une semaine, je suis propulsé sur le devant de la scène, je suis obligé de jouer « entre guillemets » parce que le club est relégable, il y avait des attentes autour de moi, je marque pour mon premier match contre Chambly, le jour de la naissance de mon petit, le 18 décembre 2015, et après, je fais une bonne saison, ça s’est bien passé, même si on n’a pas réussi à se maintenir. Mais en termes de stats et de temps de jeu, pour moi, c’était bien. »
Boulogne (2016-17, National). « Au début ça se passait bien, puis je me suis blessé et quand je suis revenu, Antoine Leautey avait pris ma place, c’est le foot. Il a performé. Cela a été compliqué de revenir. J’ai quand même joué près de 25 matchs, c’est juste que j’ai eu beaucoup de pépins physiques là-bas. »
Sedan (2017-18, N2). « Je descends d’un échelon, en N2. Un souvenir exceptionnel. La ferveur. Un club mythique, avec une identité forte. On s’entraîne devant des supporters nombreux et puis un super coach, Nicolas Usaï, qui me fait confiance et me donne les clés du camion. J’ai fait une belle saison, j’ai donné 10 ou 11 passés décisives, je finis 3e meilleurs joueur élu par les supporters derrière Demba Thiam et Axel Maraval. C’était une saison aboutie. Mon deuxième enfant est né à côté, à Charleville. »
Virton (2018-19, D3 Belge). « J’avais signé un an à Sedan et j’ai cette opportunité, en D3 Belge, parce que l’adjoint à Sedan est allé là-bas, il m’a emmené avec lui. J’ai découvert un nouveau championnat, une nouvelle culture, un nouveau football. Je ne savais pas trop où je mettais les pieds. Ce fut une belle surprise. C’était exceptionnel. On avait une grosse équipe, on a fait une grosse saison, on est monté en D2. En fait, cela me rappelle un peu ce que je vis là avec Bordeaux, où on est nombreux, parce qu’à Virton, on était 40 joueurs, et sur 40, et donc plein de joueurs restaient sur le carreau le soir des matchs, et moi, j’ai fait 33 matchs sur 35, un truc comme ça. Dont 29 titulaires. J’ai fini meilleur passeur du championnat. Le président voulait racheter Kaiserslautern en Allemagne, il m’en parle, il veut m’emmener avec lui, je me dis que j’ai tout gagné, mais un nouveau coach arrive et il prend son 11 de départ de Dudelange, et change tout. Du coup, je suis viré. Encore une nouvelle désillusion. »
Lyon-Duchère (2019-20, National). « Je retrouve le National, dans un club à part; ça manquait de professionnalisme et, surtout, ce qui m’a frappé, c’est qu’il n’y avait pas de cadre, alors que j’avais connu des clubs avec un cadre. Mais il y avait un côté très familial et une bonne ambiance, on avait une grosse équipe. Le coach Laurent Roussey me faisait confiance, son adjoint, Ghislain Anselmini, m’a appris beaucoup de choses aussi, d’ailleurs, je suis toujours en contact avec lui, il ne m’a jamais lâché, on a une belle relation. On a fini 5e, il y a eu la Covid, c’est la saison où Pau, avec Bruno Irles, est monté en Ligue 2, avec Dunkerque. Et puis à partir de là, ma carrière à basculé… »
Rouen (2020-21, N2). « Une saison blanche en N2 à cause de la Covid. Mentalement, ça m’a épuisé, et le coach, David Giguel, m’a lessivé. Il était trop derrière nous, comme des enfants, et ça, je l’ai mal supporté. Ils ne nous lâchaient pas. C’était une gestion particulière, j’ai l’impression qu’avec lui, c’était « marche ou crève », mais moi, j’ai besoin d’avoir une relation de proximité avec un coach, et avec lui, je n’avais pas ça. »
Bastia-Borgo (2021 – Janv. 22, National). « Je suis content, parce que je retrouve le National, alors que je sortais d’une saison blanche à Rouen. Il est 19h, je suis aux toilettes, je vois le téléphone qui sonne, je ne décroche pas; j’écoute le message, « Bonjour c’est Antoine Emmanuelli, le président de Bastia-Borgo… » et là, je suis comme un fou. « Il me dit qu’Albert Cartier, le coach, va m’appeler… » Moi, Albert Cartier, je le voyais en 3D ! J’échange avec Cartier, ça s’est super bien passé, je me dis « Je vais faire mes valises » alors que j’avais encore deux ans de contrat à Rouen, mais c’était l’opportunité de me relancer en National, je n’avais rien à perdre. Mais bon… J’étais installé dans un logement de vacances, j’avais mes affaires personnelles dans un box, mes enfants ont mis trois mois avant de me rejoindre, c’était long. En fait, c’est compliqué d’être performant sur le terrain si tu n’as pas ton équilibre de vie, ton équilibre familial. J’ai bien commencé mais j’ai pris carton rouge, puis je me suis blessé, et le coach s’est fait virer en décembre. Quand Stéphane Rossi est arrivé, je ne faisais pas partie de ses plans. Et je pars au Puy. »
Le Puy (Janv 2022 – Janv. 23, N2 puis National). « Je me dis, « encore National, National 2, National, National 2″, je n’arrête pas de faire le yoyo. J’arrive, le club est 8e en N2, j’ai du mal à me faire à l’idée que je vais quitter le soleil pour habiter au Puy, c’était compliqué, et j’ai eu du mal au début, c’était beaucoup mieux vers la fin, et en plus, on monte en National à la dernière seconde contre Colomiers : un de mes meilleurs souvenirs. On avait un groupe exceptionnel. Les joueurs de Bergerac sont sur leur terrain avec leur téléphone, ils attendent notre résultat, c’est eux qui montent en National… et puis on marque à la dernière seconde sur penalty ! Et on monte. Sur le plan émotionnel, c’était exceptionnel. Et la saison d’après, je ne rentre plus dans les plans de Roland Vieira, le coach. Et je pars à Trélissac. »
Trélissac (Janv 2023 – 2024, N2). « Là aussi, j’arrive, j’ai mis du temps à me mettre en route, je ne jouais pas depuis 6 mois, en fait, moi, ça a toujours été ça : partout, quand je suis arrivé, j’étais obligé de prouver, je fais beaucoup d’efforts et physiquement, je craque, je me blesse, le corps lâche, et c’est dur de devenir : à la fin de la première saison, j’avais fini en boulet de canon à Trélissac mais la saison dernière fut la saison de trop. Mentalement, j’ai pensé arrêter. Et là, Bordeaux qui t’appelle… »
- Championnat National 2 (journée 4) – Samedi 7 septembre 2024 : Dinan-Léhon – FC Girondins de Bordeaux, à 18h
- Le match est suivre en direct sur TV7 Sud-Ouest : https://www.sudouest.fr/lachainetv7/
Texte : Anthony BOYER / Twitter : @BOYERANTHONY06 / mail : aboyer@13heuresfoot.fr
Photo de couverture : 13HF
Photos : GDB (sauf mentions spéciales)
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