Mario-Jason Kikonda (Paris 13 Atletico) : « Ma force, c’est que je suis solide dans ma tête »

Après trois saisons en Ligue 2 au Paris FC et à Dunkerque, le milieu de terrain de 27 ans a connu le chômage pendant six mois, avant de finir la saison au Paris 13 Atletico, 17e de National et relégué N2. Il espère rebondir en L2 ou à l’étranger.

Au Paris 13 Atletico. Photo Philippe Le Brech

« Personne ne m’a jamais fait de cadeau, mais je suis le genre de personne qui, lorsqu’elle prend un coup, n’abandonne jamais, se relève et repart au combat. » La carrière de Mario-Jason Kikonda, milieu de terrain du Paris 13 Atletico (National) a été jalonné d’embûches.

Après avoir quitté la Seine-Saint-Denis et sa famille à 16 ans pour aller jouer dans des clubs amateurs en province (Montceau, Vannes), il a explosé en 2019 à Concarneau en National.

Cette demi-saison lui a permis de signer, à 23 ans, un premier contrat professionnel au Paris FC. Mais après trois bonnes saisons en L2 (PFC puis Dunkerque), le natif du Mans a connu le chômage pendant six mois. En janvier dernier, il a rejoint le Paris 13 Atletico (National) pour se relancer. Un club qu’il va quitter après sa relégation en National 2 et qui ne jouera plus rien vendredi soir, lors de la 34e et dernière journée de championnat, contrairement à son adversaire, Châteauroux, à la lutte pour le maintien. Il espère retrouver le monde professionnel en France ou à l’étranger. Pour 13HeuresFoot, il s’est longuement confié sur son parcours, plutôt inspirant.

« Je suis parti à 16 ans du 93 pour aller à Montceau, un club amateur »

Au Paris 13 Atletico. Photo Philippe Le Brech

Mario-Jason Kikonda a grandi dans une famille nombreuse congolaise-angolaise en Seine-Saint-Denis. Il a effectué ses débuts au Blanc-Mesnil puis a signé au Bourget en U14. Mais sans attirer des clubs professionnels. « À un moment, j’avais complètement décroché du foot, avoue-t-il. Je voyais mes amis avec qui je jouais partir dans des clubs pros mais moi, je n’avais rien. Avec le recul, j’ai compris que dans la vie, on avait chacun son propre chemin à tracer. Finalement, si j’étais moi aussi parti en centre de formation à 15 ans, est-ce que j’aurais été le même homme aujourd’hui ? Je ne le pense pas. J’ai transformé tout le négatif qui m’est arrivé en force positive. »

A 16 ans, Kikonda n’avait pas hésité à quitter la Seine-Saint-Denis pour un club amateur, à Montceau-les-Mines, en Saône-et-Loire. « Montceau, ça m’est tombé dessus un peu par hasard. J’avais la volonté de quitter la région parisienne mais je ne pensais plus trop au monde pro. Montceau, c’était dur mais je n’avais pas le choix. Ça m’a fait quand même un choc par rapport à la région parisienne. Je jouais en U17 nationaux, c’était bien, mais le club n’était pas structuré pour accueillir un jeune comme moi de 16 ans. C’était bancal. Je dormais chez des joueurs en attendant d’être logé par rapport à l’école. »

« A Vannes et Concarneau, je me suis senti comme chez moi en Bretagne »

Avec le Martégal Mohamed Mara. Photo Philippe Le Brech

Après à peine deux mois à Montceau, il décide donc de quitter le club. Il rejoint Vannes où vit l’un de ses frères. Le club breton, ancien pensionnaire de Ligue 2 et finaliste de la Coupe de la Ligue en 2009 face à Bordeaux, vient de déposer le bilan et est reparti en DSE (en dessous de la DH).

« Mais il avait gardé de bonnes structures et aussi des U17 et des U19 nationaux », explique Kikonda qui va ensuite participer à la remontée du club. « J’étais capitaine en U19 puis j’ai vite intégré l’équipe première. Tout s’est passé merveilleusement bien. Il y avait beaucoup d’anciens qui avaient connu la L2 ou le National avec Vannes et qui étaient restés comme Franck Dufrennes, Erwan Quintin, Pierre Talmont, Jean-François Bédénik ou Florent Besnard. Ils nous ont vraiment bien encadrés, nous les jeunes. Grâce à eux, j’ai beaucoup appris et grandi. Je reste un Parisien mais au fil des années, je me suis senti comme chez moi en Bretagne. »

Au Paris FC. Photo Philippe Le Brech

Après plusieurs montées, il quitte Vannes, alors en National 2, pour Concarneau, en National en décembre 2018 : « Je l’ai remarqué lors d’un PSG – Vannes en National 2. Je n’étais pas venu pour lui mais pour voir Diego Michel dont je m’occupais. Mais je l’ai vite remarqué. Il avait la maturité, la vision du jeu, la qualité technique. Pour moi, il était bien meilleur que certains qui jouent en Ligue 2. Il n’avait rien à faire en N2 », nous expliquait Jean-Charles Parot son ancien agent.

Kikonda n’a eu besoin que de quelques matchs pour totalement éclater en National. « Mon objectif était de tout cartonner pendant 6 mois à Concarneau puis de partir, avoue-t-il. Le National est davantage regardé et ça m’a donné plus de visibilité. »

« Une fierté de revenir chez moi à Paris pour un contrat professionnel »

Au Paris 13 Atletico. Photo Philippe Le Brech

A la fin de la saison 2018-2019, les sollicitations affluent : Ligue 2, Angleterre, Belgique, etc. Mais il est freiné par une blessure. « Ca a fait fuir plusieurs clubs. J’ai commencé la saison en National en jouant les deux premiers matchs puis je me suis encore blessé. J’étais assez nerveux car je voulais partir. Concarneau a aussi repoussé plusieurs offres de clubs. »

C’est le Paris FC qui parvient à arracher la décision à la fin du mois d’août pour un transfert de 120 000 € (plus bonus) et un contrat de 3 ans. Après six ans en Province, Mario-Jason rentre chez lui en région parisienne.

« J’avais bien aimé le parcours du Paris FC la saison précédente (barragiste), je ne voulais pas aller trop vite dans un club plus huppé et c’était Paris. C’était le meilleur choix car ça m’a rapproché de ma famille même si j’ai toujours eu l’habitude de me débrouiller seul. Je suis revenu à Paris pour un contrat pro. C’était aussi une fierté. Après, pouvoir jouer devant sa famille, ses proches, ce n’était que du bonheur. Mes parents pouvaient enfin venir me voir jouer au stade alors que c’était forcément plus compliqué quand j’étais en Bretagne. »

A Dunkerque la saison passée. Photo USLD.

Au Paris FC, Kikonda va disputer 39 matchs de L2 lors de ses deux premières saisons. Mais sans pouvoir s’imposer comme un titulaire indiscutable et sans passer le cap attendu malgré plusieurs prestations convaincantes. « Je suis un joueur qui a besoin d’enchainer les matchs pour garder le rythme, plaide-t-il. Au Paris FC, j’étais à chaque fois dans le groupe mais je ne débutais pas toujours. Ça m’a un peu freiné. J’ai des regrets de ne pas avoir joué plus. Il m’a manqué ce petit déclic. Mais je ne rejette la faute sur personne. Certainement que j’aurais pu faire mieux. »

tAu Paris FC, Thierry Laurey a remplacé René Girard au début de la saison 2021-2022. Mais lors des deux premiers matchs à Grenoble, puis face à Dunkerque, il ne rentre que pour 16 puis 5 minutes. « Là, j’ai compris que ça allait être compliqué pour moi. La saison ne partait pas très bien. Je me suis dit qu’il valait mieux partir. »

« Le chômage, c’est comme si tu prenais une balle… »

Avec Paris 13 Atletico. Photo Philippe Le Brech

Le 30 août 2021, dans les derniers jours du mercato, il signe un contrat d’un an (plus une autre année en option) à Dunkerque (L2). Il dispute 28 matchs dont 20 comme titulaire. « Sur le plan personnel, je pense avoir rendu une copie correcte. J’étais bien à Dunkerque. Malheureusement, on est descendu en National. Mon option d’un an ne marchait qu’en cas de maintien. »

Au mercato, son entourage et lui étaient davantage focalisés sur un départ à l’étranger. Il est tout près de signer au Manisa FK (Division 2 Turque) où évolue son ancien coéquipier du PFC, Marvin Gakpa. Mais le dossier capote au dernier moment.

Avec Vannes. Photo Philippe Le Brech

« Ca m’a desservi de regarder davantage vers l’étranger. J’ai perdu du temps, ça m’a fermé des portes en France. J’ai eu des discussions mais les effectifs étaient déjà complets presque partout. J’ai compris que j’allais entrer dans une grosse galère. »

Pour la première fois de sa carrière, il connaît donc le chômage. « C’est un peu chaud. Tu te prends une balle dans la tête (sic)… Ce n’est pas que j’avais un très grand train de vie avant, mais tout change… Sur le plan financier, on est obligé de faire davantage attention. Tu réalises mieux la valeur des choses. C’était une période assez difficile. Mais comme souvent, j’ai réussi à transformer cette période sombre en positif. Je me suis marié en décembre, mon frère aussi s’est marié. Les préparatifs, ça m’a permis de penser à autre chose. »

« Je suis déjà content d’avoir pu jouer avec le Paris 13 Atletico »

Au Paris FC. Photo Philippe Le Brech

Niveau football, il est approché par le Paris 13 Atletico. « Au départ, ils voulaient me faire signer. Je n’étais pas trop pour. Mais ils m’ont dit, viens t’entraîner avec nous, pour connaître le club et le groupe. J’ai apprécié leur proposition. Ils m’ont tendu la main. Au final, j’ai signé au mois de janvier. J’ai fait des sacrifices financiers. Mais c’était la meilleure option pour me relancer cinq mois. L’étranger, c’était encore le bazar (sic) et c’était compliqué de m’organiser pour un départ. Il valait mieux que je reste sur Paris. »

Au Paris 13 Atletico, l’impossible pari du maintien n’a pas été atteint. Mais lui a pu enchainer les matchs, marquant même deux buts. « J’ai eu du mal au début car je n’avais pas fait de préparation. Je me sens de mieux en mieux, j’ai retrouvé les jambes. Mais je suis déjà content d’avoir pu rejouer. Au Paris 13, les conditions sont un peu spéciales mais il faut savoir s’adapter. Avec une vraie préparation, cela aurait été un autre Kikonda ! Mais j’ai pris conscience que, sans préparation, je ne pourrais pas réaliser de grosses performances sur le terrain. »

« Ce qui m’a permis d’avancer, c’est mon caractère »

Avec Vannes. Photo Philippe Le Brech

Les prochaines semaines seront cruciales pour lui. « Le mercato de l’an dernier va me servir de leçon. Je veux rester dans une certaine logique. Certains coachs me connaissent déjà après mes trois saisons en L2 avec le Paris FC et Dunkerque. Le fait d’avoir rejoué avec le Paris 13 Atletico à un certain niveau peut les conforter dans l’idée que je suis toujours là et pas fini… Il y a déjà quelques discussions. On verra bien. Mais j’espère pouvoir être fixé rapidement pour ne pas connaitre encore ce que j’ai vécu l’an dernier. »

Comme à son habitude, il ne lâchera rien. « Quand je me retourne sur mon parcours, je suis assez content. Je suis parti de très loin mais j’ai réussi à faire ma carrière. Le foot, c’est un milieu spécial. Il y a des hauts et des bas. Il faut savoir profiter des bons moments et toujours se battre. Je ne regrette rien. Ce qui m’a toujours permis d’avancer, c’est mon caractère. Je suis solide dans ma tête et je me suis toujours accroché. »

Mario-Jason Kikonda, du tac au tac

Avec Vannes. Photo Philippe Le Brech

Votre meilleur souvenir ?
Les montées avec Vannes. C’était exceptionnel. Après, mes meilleurs souvenirs sont aussi liés à des ambiances, des stades pleins. C’est ça qui rend le foot magnifique. J’ai bien aimé l’ambiance à Guy Piriou quand je jouais à Concarneau. En Ligue 2, je me souviens que lors de certains déplacements, à l’échauffement, il m’arrivait juste de regarder les tribunes et de sourire bêtement en voyant les gens chanter. Jouer à Bollaert par exemple, c’est quelque chose…

Votre pire souvenir ?
Pas de match en particulier. Mais forcément la situation que j’ai vécue lors des six premiers mois de cette saison. Quand tu es au chômage, ça fait quand même réfléchir.

Vos qualités et défauts ?
Ma qualité, c’est mon énorme mental. Dans ma tête, je suis solide. C’est ce qui m’a permis de surmonter ce que j’ai traversé lors de mon parcours qui n’a pas toujours été facile. Quant à mes défauts, ce n’est pas à moi de les juger.

Avec Vannes. Photo Philippe Le Brech

Votre geste préféré ?
La passe cachée. Celle qui casse bien les lignes. Je trouve ça trop magnifique.

Votre plus beau but ?
Je ne marque pas beaucoup mais l’un est resté dans ma tête. C’était avec Vannes, le lendemain de mon 22e anniversaire, le 21 avril 2018. Si on gagnait, on était champion et on montait en N2. Je suis à 30 mètres Je reçois une passe en retrait de Franck Dufrennes . Je crochète un défenseur, puis je trébuche sur la balle. Mais j’arrive à me redresser et j’envoie une frappe de loin en lucarne. J’avais ouvert le score et on gagne 5-0 face à Dinan-Léon.

Votre geste défensif le plus mémorable ?
C’était lors d’un Lens – Paris FC à Bollaert le 28 septembre 2019. C’est mon 4e match avec le Paris FC. On n’est pas très bien classé. J’ai récupéré le ballon in-extremis face à un Lensois. Je tacle, je mets mon corps en opposition puis je récupère le ballon. Ça se finit en jeu long pour mon attaquant Romain Armand qui réduit le score. Mais on perd 2-1.

A Concarneau. Photo Philippe Le Brech

Le joueur le plus fort avec qui vous avez joué ?
A mon échelle à l’époque, c’est Franck Dufrennes à Vannes. C’était un ancien pro (Dunkerque, Raon, Colmar, PSG). Tout ce qu’il faisait sur le terrain, ça paraissait trop facile, il avait des gestes incroyables. Moi, j’étais jeune, je ne connaissais pas grand-chose au milieu du foot, il m’a tout expliqué.

L’entraîneur qui vous a marqué ?
Laurent Hervé à Vannes. Je l’ai eu en U19 puis en équipe première. Il a fait énormément pour moi.

L’entraîneur que vous ne voulez pas recroiser ?
Moi je suis quelqu’un de tranquille et pas prise de tête. J’ai toujours accepté ce que me disaient mes entraîneurs et respecté leur choix. Je n’ai jamais eu de souci avec eux.

Le président qui vous a marqué ?
Ceux que j’ai connu à Vannes et Concarneau. Ils ont toujours été là pour moi.

Au Concarneau. Photo Philippe Le Brech

Vos amis dans le football ?
J’en ai énormément. J’ai gardé beaucoup de contacts avec mes anciens coéquipiers. Notamment ceux du Paris FC. On était une vraie famille.

Le joueur le plus connu de votre répertoire ?
Il y en a quelques-uns de très connus…

Mais par rapport à la Coupe du monde et à sa saison en Allemagne, je dirais Randal Kolo Muani. On vient tous les deux de la région parisienne et on avait même joué l’un contre l’autre en N2 lors d’un Vannes – Nantes.

Vos occupations en dehors de foot ?
Je suis quelqu’un de très casanier et posé. J’aime bien rester tranquillement à la maison pour me reposer.

J’aime bien les lendemain de match où il n’y a pas d’obligation. Priorité à la récupération ! Je regarde la TV, du foot mais pas seulement.

Avec Vannes. Photo Philippe Le Brech

Si vous n’aviez pas été footballeur pro ?
J’aurais continué dans la branche de mes études, électricien. J’ai gardé quelques bases. Mais je ne suis pas apte pour faire un chantier.

La région parisienne, la Bretagne ou le Nord ?
Paris, c’est chez moi. Le Nord, Dunkerque, ça a été rapide, moins d’une saison. J’ai bien aimé la Bretagne. J’étais bien là-bas. Ils ont l’accueil dans le sang. Ils m’ont vraiment mis bien.

Texte : Laurent Pruneta

Mail : lpruneta@13heuresfoot.fr et contact@13heuresfoot.fr

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Photos : Philippe Le Brech

Avec Vannes. Photo Philippe Le Brech