L’ancien buteur de Saint-Etienne, Caen et Montpellier ne fait plus partie du projet N2 du Hyères 83 FC : il vient d’être licencié de la SASP. Avant de se remettre sur le marché, il revient sur sa carrière sur et en dehors des terrains, durant laquelle il a « mis les mains dans le cambouis ! » Entretien.
Pour connaître et comprendre Lilian Compan, rien de plus simple : tapez « Lilian Compan, que la fête commence » sur YouTube, et vous verrez ! Vous verrez que, dans cette vidéo de près de 4 minutes qui compile quelques-uns de ses buts (il n’y sont pas tous, il en a inscrits plus d’une centaine entre la L1 et la L2 !), il existe un style Compan. Une touche. Une marque de fabrique. Tellement révélatrice de son caractère.
« Je n’ai jamais rien lâché »
C’est simple, tous ses buts se ressemblent plus ou moins. Aucun n’est facile. Et à chaque fois, on voit Lilian tomber, se relever, plonger, accélérer, sauter, courir, trébucher. En un mot, on le voit S’arracher. Et ça, c’est tellement révélateur ! « C’est tout moi, oui (rires), concède l’ancien attaquant des Verts; Mais c’est toute ma carrière qui est « à l’arrache », depuis le début ! Mes buts reflètent vraiment ma personnalité. Je n’ai jamais rien lâché ! »
Lilian Compan ne lâche jamais. Ce sont les autres qui le lâchent ! Ou plutôt plutôt la SASP du Hyères 83 FC. Vendredi dernier, l’ancien avant-centre de Saint-Etienne, Caen et Montpellier, clubs avec lesquels il a eu le bonheur de connaître trois accessions de Ligue 2 en Ligue 1, a reçu un courrier recommandé de son président, Mourad Boudjellal, qui lui a signifié son licenciement du poste de directeur sportif du National 2.
L’aventure hyéroise du Hyérois de naissance, commencée à l’été 2018, lorsque l’ancienne direction lui a donné les rênes de l’équipe de N2, est donc terminée. Ou presque. S’il n’a plus aucune fonction au sein de la SASP constituée et présidée par l’ancien boss du Rugby-club Toulonnais, Lilian conserve son poste de directeur technique de l’association, qu’il occupait déjà en parallèle.
Au club, les relations étaient inexistantes entre lui et Karim Masmoudi, le nouvel entraîneur arrivé cet été en remplacement de Hakim Malek, son successeur en septembre 2021. Vous suivez ? Non ? Rassurez-vous, vous n’êtes pas les seuls.
Cannes, Cannes-la-Bocca, Saint-Etienne…
Aujourd’hui, Lilian est apaisé. Il va se consacrer à l’asso, attendre quelque temps avant, peut-être, de rebondir ailleurs. Dans quel rôle ? L’intéressé lui-même ne le sait pas. Il faut dire que depuis qu’il a mis un terme à sa carrière de joueur à l’AS Cannes en février 2012, dans le club qui l’a vu débuter en Division 1 la même que sa victoire en Gambardella, en 1995, il a multiplié les expériences : c’est bien simple, il a déjà touché à (presque) tout !
Son premier poste ? Entraîneur des U17 Nationaux de l’AS Cannes. Puis, en 2014, il dirige sa première équipe seniors, en DHR (Régional 2), à l’US Cannes-la-Bocca. « En fait, il fallait que je patiente avant de retourner à Saint-Etienne, alors j’ai accepté ce poste. Je voulais vivre quelque chose, une aventure. Attention, c’était dur mais ça m’a apporté plein de choses, c’était enrichissant. Je suis tombé dans l’affection avec certains même. C’était mieux de faire ça plutôt que de ne rien faire. A La Bocca, j’ai mis les mains dans le cambouis ! »
En 2015, c’est le début d’une nouvelle aventure à Saint-Etienne, « son » club, celui où il a vécu ses plus belles heures. D’abord dans un rôle de recruteur PACA pour le centre de formation, où il rédige des rapports pour Bernard David, le directeur, avant de devenir l’entraîneur des attaquants. « Au début, j’allais à Sainté’ trois jours par semaine, et puis je me suis à nouveau installé là-bas ».
Entraîneur puis directeur sportif à Hyères
En 2016, il devient l’adjoint de Laurent Batlles avec l’équipe réserve de l’ASSE en N2 (2016) puis coach principal des U19 Nationaux en 2017. Et ce n’est pas tout : il anime même des « spécifiques » pour les attaquants avec la Ligue 1 sous l’ère Christophe Galtier. Formateur.
Mais l’appel du Var est plus fort que tout ! En juin 2018, il est nommé entraîneur de Hyères : « J’ai fini 7e, 9e puis à nouveau 7e en 2021. Honnêtement, avec peu de moyens, on a réussi trois maintiens, c’est une performance. Mais le club n’était pas attractif. Il n’avait pas d’autre ambition que le maintien. Je me suis mis à la recherche de partenaires et la piste Mourad Boudjellal est arrivée, indirectement, par mon biais. »
L’ex patron du RCT lui fait dans un premier temps confiance, avant de lui retirer la responsabilité de l’équipe après cinq matchs de championnat et une défaite à domicile contre Martigues (0-1), pour un bilan de 5 points sur 15 possibles. « J’ai proposé au président de devenir directeur sportif. Avec Hakim Malek, mon successeur, on a appris à se connaître, ça s’est bien passé, on remonte au classement, on a fait du bon boulot je pense. Je voulais rester dans la continuité avec lui. Mais l’été dernier, le président a décidé de tout changer. »
Treize mois plus tard, donc, c’est le licenciement : « Je suis très déçu de la la façon dont ça se termine, comme ça, par lettre recommandée, sans me l’annoncer directement. Mais je suis soulagé. Le coach, Karim Masmoudi, ne voulait pas travailler avec moi, que vouliez-vous que je fasse ? Pour l’heure, je reste à mon poste de directeur technique à l’association. J’y suis très bien et ça se passe bien. Mais je me donne jusqu’à janvier et après on verra si je me remets sur le marché. Je veux me laisser un peu de temps. »
Lilian Compan, du tac au tac
« J’aimerais bien revoir Guy Lacombe »
Meilleur souvenir sportif ?
La montée avec Saint-Etienne de Ligue 2 en Ligue 1.
Pire souvenir sportif ?
Ma fracture du tibia pendant le derby Lyon – Saint-Etienne. Avec Cris… Je l’ai retrouvé quand j’étais à la tête de Hyères en N2 et on a affronté son équipe, GOAL FC à l’époque, et ça s’est très bien passé, on en a parlé, c’est un super mec. On en avait déjà parlé au téléphone. C’est le foot.
Ton plus beau but ?
Euh… Mon plus beau but ? A L’arrache (rires) ? Saint-Etienne – Sochaux en demi-finale de la coupe de la Ligue. Celui-là je suis allé le chercher très très haut ! On avait 3-2 aux prolongations.
Ton plus beau loupé ?
C’est contre Saint-Etienne en plus, avec Caen, et on m’a déjà demandé si je n’avais pas fait exprès ! Centre d’Anthony Deroin, je suis à 50 cm devant la ligne, je la mets au-dessus. Voilà !
Ton geste technique préféré ?
J’adore la bicyclette pied gauche, et je suis droitier !
Le club ou l’équipe où tu as pris le plus de plaisir ?!
J’ai vraiment pris un pied énorme à Caen, ça attaquait tout le temps, cette saison-là, on a battu ou on n’a pas été loin d’égaler le record du nombre de buts marqués je crois. Dans les 70 buts. Avec Franck Dumas, on ne faisait qu’attaquer.
Le poste d’entraîneur où tu as pris le plus de plaisir à ce jour ?
C’est différent, forcément, du poste de joueur, en plus, j’ai fait les jeunes, des équipes premières, des réserves… Tout est très différent mais où j’ai pris le plus mon pied c’était quand même quand j’étais à la tête de Hyères en National 2, même si c’était très difficile et très stressant. La compétition m’a rappelé certains souvenirs.
Un stade et un club mythique ?
Geoffroy-Guichard, Saint-Etienne. Après, y’a d’autres stades qui résonnent énormément, Lens, le Parc des Princes, mais Marseille à mon époque ça ne résonnait pas trop.
Le club où tu as failli signer ?
Y’en au eu, notamment à l’étranger ! J’aurais bien voulu jouer à l’étranger ! A 17 ans, j’ai failli signer à la Juventus de Turin, quand j’étais à Cannes. J’ai failli signer à la Sampdoria de Gênes quand j’étais à Auxerre et quand j’étais à Caen, j’ai failli aller aux Queens Park Rangers.
Le club où tu aurais rêvé de jouer ?
Barcelone ! Mais je n’avais pas le niveau.
L’erreur de casting ?
Auxerre. J’étais jeune, international espoirs, on en a reparlé après avec Guy Roux, je ne lui en veux pas, même lui, il était content de voir la carrière que j’avais pu faire ensuite. J’ai su rebondir après Auxerre même s’il m’a mis des bâtons dans les roues mais je ne suis pas rancunier, je respecte l’homme.
Un coéquipier ?
C’est difficile. Celui que je connais depuis très très longtemps, avec qui on a fait nos gammes ensemble, à Cannes, c’est Romain Ferrier. On est toujours en contact. Je citerais aussi Benoît Costil.
Le joueur avec lequel le feeling est le mieux passé sur le terrain ?
Sans se regarder, avec Mickaël Marsiglia, on était capable de faire des choses très faciles, à Cannes, chez les jeunes. J’ai retrouvé ça ensuite avec Benjamin Nivet : j’ai eu la chance de jouer avec lui à Auxerre, Châteauroux et Caen. Pareil. Sans se regarder, on se trouvait !
Le joueur qui t’a le plus impressionné ?
Ronaldinho au PSG et sinon Patrick Vieira, dont j’ai été le coéquipier. Et beaucoup d’autres !
Le défenseur que tu n’aimais pas croiser ?
Cris en faisait partie, très agressif et très chiant sur l’homme. Mais je dirais Emir Spahic, de Montpellier, et je suis content de ne pas avoir joué contre lui puisque nous étions coéquipiers !! C’est un animal. Il ne te lâchait pas ! Je n’aurais pas aimé l’avoir sur le dos.
Un coéquipier perdu de vue que tu aimerais revoir ?
Yohan Eudeline, qui est à Caen aujourd’hui (il occupe le poste de directeur sportif).
Un coach perdu de vue que tu aimerais revoir ?
Antonetti, Courbis, même si je suis en contact de temps en temps, Dumas, aussi. Mais celui que j’aimerais bien revoir, c’est Guy Lacombe. C’est lui qui m’a lancé en D1.
Le coach que tu n’as pas envie de revoir ?
Jean-Marc Pilorget. C’était à la toute fin de ma carrière. Le club venait d’être rétrogradé en N2 et il était arrivé à Noël, en remplacement de David Guion. On n’a pas eu de relation. En fait, je me blessais souvent. J’allais sur mes 36 ans. Je lui avais demandé de gérer un peu ma semaine, pour répondre présent le week-end, mais il m’a dit qu’il voulait des mecs à fond toute la semaine. Bon. J’ai dit OK, sachant que je pouvais me blesser, et je me suis blessé… C’est juste ça en fait. ça n’a pas matché.
Le président qui t’a marqué ?
J’ai eu des présidents exceptionnels mais y’en a un qui est au-dessus, quand même, c’est Louis Nicollin.
Une causerie de coach marquante ?
Courbis. Dans l’envie, dans la motivation. Dans la prévision des événements, on aurait dit qu’il anticipait les choses. C’était pas forcément dans les choix tactiques mais plutôt dans la motivation et la détermination. C’était exceptionnel.
Une devise ?
Lâche rien. Comme on l’a déjà évoqué, ma vie ça a toujours été ça, ça a toujours été à l’arrache, je suis quelqu’un qui n’a jamais lâché. J’essaie de rester moi-même, humble. Il faut toujours croire en soi et aller au bout de ses idées.
Le joueur le plus connu de ton répertoire ?
Forcément, des internationaux de l’époque, Vieira, Zidane, Henry, Trézéguet… J’en ai côtoyé certains en équipe de France jeunes et espoirs.
Des rituels, des tocs ?
Oui, un attaquant recherche toujours quelque chose pour se mettre en confiance, moi je faisais des trucs bizarres, je touchais quelque chose, je mettais un truc dans la chaussure, et dès que ça marchait, je recommençais.
Qualités et défauts sur un terrain ?
Je n’avais pas les plus grosses qualités physiques et techniques sur le terrain par contre j’étais régulier dans tout. Je dirais ma grosse qualité de jeu de tête et mon timing. J’avais aussi une bonne finition, j’avais le feeling, je sentais le but, et j’ai réussi, tout seul, à développer cette envie de marquer, cette sensation de marquer un but qui est un grand manque aujourd’hui. J’étais impulsif aussi, avec le recul je me dis que j’étais gaga (!), mais mon principal défaut, c’était le manque de vitesse.
Tu étais un joueur plutôt …
C’est compliqué ton truc ! Euh.. finisseur.
Tu es un conseiller gestion en patrimoine plutôt…
Proche des joueurs.
Ta philosophie de jeu, c’est quoi ?
J’aime le jeu. Par contre, je veux bien attaquer, mais tactiquement, j’aime avoir des équipes en place sur le plan défensif. C’est dans les valeurs du club. Il faut garder cela. Je voulais apporter une touche offensive en arrivant mais je me suis aperçu qu’on n’avait pas les moyens de le faire alors je m’en suis remis à ce que l’on faisait avant, je pense que j’ai bien fait, sinon je me serais peut-être « viandé ». Par le jeu, on a quand même essayé de faire des belles choses, de créer, tout en gardant un gros bloc.
Ta plus grosse prime de match, tu t’en souviens ?
Montpellier, quand on est monté. Nicollin nous a gâtés.
Ton premier match en Division 1 ?
A Coubertin, avec Cannes, contre Bastia. J’ai dû rentrer dans le dernier quart-d’heure. En février 1995. On gagne 2 à 1. C’est Guy Lacombe qui me lance.
Mon dernier match en L1 ?
PSG-Montpellier au Parc, et je marque, et je pars après à Cannes en National (NDLR, le 15 mai 2010, 38e et dernière journée de Ligue 1, victoire 3-1 de Montpellier).
Ton premier but en Ligue 1 ?
Je ne m’en souviens pas. (NDLR : Martigues – Cannes, en décembre 1995).
Un match de légende ?
OM-Milan en 1991, en 1/4 de finale retour de la Ligue des Champions, avec le but de Waddle.
Un modèle de joueur quand tu étais gamin ?
Quand j’étais petit, Michel Platini, j’avais d’ailleurs effectué des stages à Saint-Cyprien, près de Perpignan, puis un peu plus tard, j’adorais Christian Vieri, à l’Inter Milan. Il lâchait rien, il me stimulait.
Une idole de jeunesse ?
Une idole non, mais j’admire Messi. J’allais souvent voir le Barça jouer. Je pense que c’est le meilleur joueur de l’histoire du football.
Ta plus grande fierté ?
D’être resté la personne que j’étais quand j’étais enfant. Quant à ma carrière, je suis fier de ce que j’ai fait, bien sûr j’aurais pu faire mieux, mais je suis resté moi-même, je suis droit et j’ai des valeurs.
Le milieu du foot…
Fermé et très compliqué.
Joueur, Lilian Compan a porté les maillots de l’ASPTT Hyères, Hyères FC, AS Cannes, AJ Auxerre, La Berrichonne de Châteauroux, US Créteil, AS Saint-Etienne, Stade Malherbe de Caen et Montpellier HSC.
Texte : Anthony BOYER / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06
Photos : Hyères 83 FC, HDS, SH et DR