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Les bons conseils de Tony Patrao

L’attaquant passé notamment par Sète, Aubagne, Le Puy, Jura Sud, Hyères et Martigues, a fondé « PS Soccer Agency » avec son ami Baïdy Sall,  une agence de conseils et d’accompagnement pour des joueurs des championnats amateurs. Les débuts sont prometteurs. En ligne de mire : la création de la Ligue 3 en 2024 et un marché qu’il espère conquérir.

Tony Do Pilar Patrao a trois métiers et deux passions ! C’est dire si le garçon de 36 ans, bien connu dans le foot amateur tant il a « bourlingué », est très occupé. Un véritable homme d’affaires ! L’an passé, alors qu’il évoluait sous le maillot d’Aubagne, en National 2, juste après une demi-saison à Sète en National, Tony a fait le choix de préparer son après-carrière.
Le matin ou l’après-midi, c’est selon, le Franco-portugais, fan du FC Porto et de Deco, suit une formation d’opérateur chez Esso Raffinage à Fos-sur-Mer, tout près de l’étang de Berre, dans les Bouches-du-Rhône : « C’est un site pétrochimique. Je suis opérateur « sécurité et maintenance » du site, des appareils ». Mais alors, du coup, il ne paie pas l’essence, si ? « Et si, je la paie, mais j’aimerais bien ne pas la payer, hein (rires! ) ».

« Je passe un temps fou au téléphone ! »

En 2019, Tony Patrao a reçu le trophée de meilleur buteur de National 2. Il jouait alors au Puy Foot 43. (Photo Sébastien Ricou)

Puis, l’après-midi ou le matin, c’est selon, il consacre du temps à PS Soccer Agency, l’agence de conseils aux joueurs amateurs, qu’il a fondée il y a un an avec un de ses anciens coéquipiers, Baïdy Sall, côtoyé au Puy Foot 43 entre 2016 et 2020, en N2 et en National. « Je passe un temps fou au téléphone ! Tenez, là j’étais avec un directeur sportif d’un club du Sud de N2, pour parler d’un joueur, de son contrat, pour le faire libérer, c’est un « massacre » (rires). Y’a pas un jour où je ne suis pas au téléphone en train de proposer un joueur ou envoyer des messages à Baïdy. Je suis sans cesse relancé par des coachs, c’est un travail de fou, ça n’arrête jamais ! J’y consacre plusieurs heures par jour. »

Le soir, après ses deux premiers jobs, ça continue ! Il pourrait se poser un peu, mais non, direction l’entraînement, avec son club, l’ES Fos-sur-Mer (Régional 1). Et la reprise approche. Le 28 août en coupe de France, le 4 septembre en championnat.

Ah ! On allait oublier ses deux passions : la première, c’est la musculation ! Sur Instagram, ses followers ne manquent aucune miette de ses séances : il faut dire que le natif de Marseille alimente ses stories en photos de mollets, prises « à la salle » ! Son autre passion, c’est bien évidemment sa famille et sa petite princesse de 4 ans et demi, Elya. Son soleil.

La parole, le respect, l’éducation

« Tonygoal », ou « Patragoal », comme on le surnommait durant sa carrière, le répète souvent : le football, c’est (aussi) sa passion ! L’avant-centre, véritable joueur de surface et réputé pour ses qualités de finisseur, a marqué près de 150 buts (!) en douze saisons de National 2 avec des exercices parfois très prolifiques, comme en 2015-2016 (17 buts en 30 matchs avec Jura Sud), 2018-2019 (18 buts en 30 matchs avec Le Puy Foot), ou encore en 2010-2011 et 2012-2013 (36 buts en 67 matchs avec Hyères). Et le reste n’est pas mal non plus !

Baïdy Sall, ici sous le maillot du Puy, en National, en 2019. (Photo Sébastien Ricou)

Revenu chez lui, à Vitrolles, près de Marseille, le voilà engagé dans une nouvelle aventure, avec PS Soccer Agency. « PS », vous l’avez compris, pour Patrao-Sall. « Avec Baïdy, on est à 50-50. On a aussi deux collaborateurs : Djibi Banor, qui joue en N2 à Poissy (ex-Dunkerque, Lyon-Duchère et Rodez), et Cherif Djema, un joueur de Lormont, en Régional 1, près de Bordeaux. Cela nous permet de toucher des secteurs géographiques où l’on a moins de réseau, comme le Sud-Ouest par exemple, où on s’appuie sur Cherif. Et puis, depuis quelques mois, on a développé la communication via l’application Instagram, dont le compte est géré par Marcel Sambou, basé au Puy-en-Velay. »

Un succès qui suscite des jalousies

La naissance de PS Soccer Agency est apparue comme une évidence pour Tony qui, tout au long de sa carrière, répondait déjà aux sollicitations des clubs, des coachs, donnait des avis sur tel ou tel joueur. Il faut dire qu’il a le sens du contact et est très ouvert de caractère : il n’est pas Marseillais pour rien ! Mais attention, pas dans le sens péjoratif : la parole, le respect, l’éducation, sont autant de valeurs auxquelles il reste très attaché : « J’ai quand même joué dans pas mal de clubs, j’ai côtoyé et croisé beaucoup de dirigeants, de joueurs, de coachs. Baïdy et moi, on connaît beaucoup de monde dans les championnats amateurs. Sincèrement, ce n’est pas pour me lancer des fleurs, mais je pense avoir toujours été « carré ». C’est pour ça que le rapport de confiance qui s’installe plus facilement. »

Ce que veut dire Tony, du bout des lèvres, c’est que cela peut faire la différence par rapport à des agents sportifs : « Je ne vous le cache pas, on n’est pas bien vu par les agents. Y’en a trois ou quatre qui m’ont appelé. Ils m’ont dit « Vous êtes en train de tuer le marché ». On a même été menacé. Mais moi, je ne comprends pas : nous, on s’occupe du monde amateur. C’est un marché que l’on connaît par coeur. Les agents, eux, sont plus tournés vers la Ligue 2 et le National, mais comme PS Soccer Agency fonctionne bien depuis le début, forcément, ça fait jaser. Alors, bien sûr, on n’a pas la licence d’agents sportifs, mais c’est juste un contretemps, une question de temps. On va la passer, on va l’avoir. Un agent m’ a dit récemment : « Comment avez-vous fait pour, en moins d un an, faire 20 signatures, alors que moi, qui suis dans le métier depuis 5 ans, j’en fais 2 ou 3 par mercato ? ».

Dénicher des pépites et les accompagner

Conseiller, aider, accompagner, négocier, c’est la vocation de Tony, qui préfère parler de « plan de carrière » plutôt que de contrat pour un joueur, même si, forcément, à l’arrivée, il faut bien parapher un document ! « On essaie de dénicher des pépites dans les championnats amateurs, parce qu’on sait très bien qu’il y en a beaucoup, en National 3, en National 2, même en Régional. Pour eux, on a des plans de carrière. On ne présentera pas le même projet à un joueur de 21 ou 22 ans qu’à un joueur de 29 ans. On essaie de les aider à gravir les échelons progressivement, de N3 en N2 puis en National, par exemple. Avec l’arrivée de la Ligue 3, en 2024, qui remplacera le National, je ne vous cache qu’il faudra que l’on soit présent, il faut qu’on l’anticipe. C’est notre objectif. »

Tony Patrao, ici sous le maillot du Puy Foot 43, en National, lors de la saison 2019-2020. (Photo Sébastien Ricou)

PS Soccer Agency doit aussi gérer une difficulté supplémentaire : la mentalité du joueur. Et parfois, là, c’est compliqué : « En fait, on n’est sûr de rien quand on ne connaît pas trop les joueurs ! J’ai beaucoup d’exemples de joueurs que l’on a envoyés dans des clubs, qui étaient prêts à signer, et qui ne donnent plus de nouvelles, et là, on apprend quelques jours après qu’ils ont signé ailleurs ! Des joueurs qui signent leur protocole d’accord avant de le déchirer, c’est monnaie courante. »

Quant aux clubs, là encore, il faut distinguer deux catégories : « Il y a deux marchés. Les clubs qui ont des ressources financières, et ceux où l’on négocie à 50 euros près, où l’on parle souvent de contrat d’apprentissage, de BPJEPS. Certains clubs aussi se « servent » du Covid aussi pour dire qu’ils ont moins d’argent. En fait, un contrat, ça peut aller de 1100 à 1200 eux comme ça peut aller à 3000 euros. »

« Le joueur ne doit pas être motivé par l’argent »

Pour l’heure, Tony se contente du marché amateur, déjà très vaste, ce qui ne l’empêche pas d’avoir des contacts avec certains clubs pros. Mais aucun joueur n’y a pour l’heure signé un contrat. Sauf quatre dans des clubs de National, mais toujours au sein de clubs amateurs. « On essaie d’aider tout le monde. On a aussi des joueurs que l’on ne connaît pas, mais c est vrai qu’on aime bien prendre un joueur, en National 3 par exemple, lui présenter un plan de carrière, faire en sorte qu’il fasse les bons choix, et nous, on peut l’aiguiller. »

Quand il aura terminé sa formation chez Esso Raffinage, Tony pourra profiter du temps de libre que lui octroiera son emploi du temps professionnel pour se consacrer encore plus à son agence. Avec, pourquoi pas, si ça marche très bien, la possibilité d’en vivre un jour. Pour l’heure, il continue de faire ce qu’il aime, dénicher et accompagner des joueurs. Le meilleur conseil ? « Nous, on leur parle clairement, franchement. Je pense qu’il ne faut pas être motivé par l’argent, sinon tu n y arrives pas. « 

Texte : Anthony Boyer / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr
Photos : Sébastien Ricou