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Kevin Lefaix, des terrains de foot aux parcours de footgolf !

Le recordman du nombre de buts marqués en National (87) vit aujourd’hui près de Cannes, sur la Côte d’Azur, et s’épanouit dans son nouveau métier de responsable d’un magasin. Et il s’est trouvé une nouvelle passion : le footgolf.

Sous le maillot du Red Star. Photo Philippe Le Brech.

Et le meilleur buteur de l’histoire du championnat National s’appelle … Kevin Lefaix ! Pas de trophée du peuple pour lui, juste une reconnaissance dont le natif de Rennes ne semble d’ailleurs pas tirer de fierté particulière, du moins, pas plus que cela.

Et pourtant, c’est bien lui, l’avant-centre qui n’est jamais passé par un centre de formation, qui a connu la Promotion d’Honneur au début de sa carrière en seniors, à Bréquigny, qui a fait trembler les filets à 87 reprises en 174 matchs de National (Orléans, Le Poiré-sur-Vie, Red Star et Chambly).

On vous laisse calculer le ratio, c’est impressionnant ! Surtout que le Breton a découvert ce championnat à 28 ans, c’est à dire sur le tard, et qu’il n’y a passé que six saisons et demi. C’est simple, en National, Kevin, c’est un but tous les deux matchs. Alors pourquoi ce joueur, cette gâchette, n’a quasiment jamais pu exprimer ces qualités de buteur plus haut et surtout plus longtemps ? L’intéressé a quelques explications, il les livre d’ailleurs dans l’interview « Du tac au tac » (lire plus bas).

Aujourd’hui, celui qui a tapé ses premiers ballons à Janzé, près de Rennes – « J’avais eu une dérogation pour y jouer à l’âge de 4 ans, j’y suis resté jusqu’à mes 12 ans avant de partir au Stade Rennais » -, a mis le ballon de côté, après que sa carrière s’est arrêtée net à l’AS Cannes en National 3, en mars 2020 (28 matchs, 12 buts), avec la Covid-19.

Depuis, Kevin n’a plus bougé de la Côte d’Azur. Il est installé au Cannet et travaille juste à côté, à Cannes. Et pour pallier le manque de ballon, il a trouvé une nouvelle passion : le foot-golf ! Entretien.

« Je suis passé complètement à autre chose »

Avec l’AS Vitré, en 2008-2009. Photo Philippe Le Brech

Kevin, tu as joué au Stade Rennais, et pourtant, tu n’y as jamais intégré le centre de formation…
Non, c’est vrai. J’y ai joué de l’âge de 12 ans jusqu’en moins de 17 ans, puis je suis parti au Cercle Paul Bert de Bréquigny, juste à côté, où, pour ma première saison en seniors, j’ai dû mettre 54 buts je crois en Promotion d’Honneur !

Ensuite, je suis revenu en Division d’Honneur au Stade Rennais après une coupure d’un an.

Pourquoi cette coupure d’un an, à 19 ans, à un âge où c’est souvent là que ça se joue ?
En fait, quand j’étais à Bréquigny, j’avais déjà commencé à travailler en intérim, dans plein de domaines.

Sous le maillot d’Orléans, en 2009-2010. Photo Philippe Le Brech

Je ne pouvais plus jouer au Stade Rennais alors je suis parti en PH avec des potes, malheureusement, on n’est pas monté. J’ai eu un peu de lassitude, je n’avais plus trop d’ambition…

Et j’ai coupé un an. Après, je suis allé à Saint-Malo, en CFA, mais j’ai eu beaucoup de blessures et puis Franck Portier, le coach de l’AS Vitré, m’a appelé, d’abord pour jouer en réserve, en DSR, avec la possibilité ensuite de jouer en CFA. Cela a bien fonctionné avec l’équipe B et j’ai pu intégrer l’équipe A.

Aujourd’hui, tu as choisi une voie différente. Rester dans le foot, ou dans le sport, ça ne te tentait pas ?
Pas forcément. J’adore le foot mais j’adore surtout jouer au foot. A la rigueur, transmettre aux jeunes, ça m’aurait bien dit, mais je n’ai pas eu trop l’occasion de le faire. A l’AS Cannes, Ludovic Pollet, l’entraîneur des U19 Nationaux, m’a proposé de passer des formations et de m’occuper des spécifiques attaquants avec les U17 Nationaux, mais je travaille, il fallait dégager du temps, j’ai une fille, j’ai dit non.

Du coup, tu as coupé avec le foot…
Oui. Mes week-ends sont consacrés à la famille et au footgolf, une discipline que j’ai découvert, et ça me plaît beaucoup. Je participe à des compétitions régionales et même des étapes du championnat de France avec le club que l’on a créé l’an passé avec des anciens potes du Stade Rennais, le Rennes Footgolf Club.

Sous le maillot de Chambly, en 2016-17. Photo Philippe Le Brech

Y’a des anciens pros qui pratiquent cette discipline, comme Camel Meriem et aussi Florent Sinama Pongolle ou Anthony Le Tallec. Ludovic Obraniak aussi s’y est mis. Le foot ? Je le regarde à la télé, la Ligue des Champions, le Stade Rennais, mais je ne vais pas voir de match.

Qu’est ce qui te plaît au foot-golf  ?
Déjà, ça me permet de continuer à jouer au foot sans traumatisme. On peut jouer en individuel et aussi en double, c’est très sympa, ça change de rythme, le mental et la patience sont importants.

Et puis il y a les cadres magnifiques dans lesquels on joue, on est en plein air. J’avais un peu joué au golf avant, d’ailleurs, j’ai toujours les clubs que « Romu » Marie m’avait donnés quand j’étais au Red Star, ils appartenaient au président Patrice Haddad avant !

Et la semaine, c’est boulot…
Oui, je suis responsable d’un magasin alimentaire à Cannes. Je suis passé à complètement autre chose. J’ai fait du service de conciergerie avec un pote, en multi-services, notamment comme paysagiste, mais je voulais passer en CDI et faire quelque chose de plus stable. L’objectif, ce sera de devenir mon propre patron.

Kevin Lefaix, du tac au tac
« Au Red Star, je suis passé du paradis à l’enfer »

Avec Chambly en 2017. Photo Philippe Le Brech

Meilleur souvenir sportif ?
L’accession avec le Red Star en Ligue 2, en 2015, parce que c’était un rêve de gamin, et je l’ai réalisé, sur le tard, à l’âge de 32 ans, non 33 ans !

Malheureusement, je n’ai joué que six matchs (1 but) en L2.

Il y a eu pas mal de changements au club, beaucoup de recrues, et tous les cadres de la saison précédente se sont retrouvés sur la touche, moi y compris, sans compter le changement d’entraîneur aussi, avec l’arrivée de Rui Almeida.

Je ne rentrais pas dans ses plans, c’est comme ça. J’ai eu une proposition pour partir à Tubize, en D2 belge, et comme j’ai toujours voulu jouer à l’étranger, j’y suis allé, j’ai passé une très belle saison, avec une mentalité un peu à l’anglaise. J’ai eu Colbert Marlot et Régis Brouard comme coach.

Au Poiré-sur-Vie, en 2012. Photo Philippe Le Brech

Pire souvenir sportif ?
De ne pas avoir avoir assez joué en Ligue 2 et d’avoir été mis sur la touche sans explication, ça a été dur à vivre car je me suis toujours battu pour arriver à cet objectif, j’ai gravi tous les échelons. En fait, au Red Star, je suis passé du paradis à l’enfer. On m’a mis à la cave.

Tu as gardé de la rancoeur envers le Red Star ?
Aucune ! C’est juste qu’il y a eu un changement de staff, je ne suis plus rentré dans les plans. C’est la manière avec laquelle ça s’est passée, surtout que l’année où j’avais été recruté, j’étais la première recrue. Mais je ne garde que des bons souvenirs de mon passage là bas.

Ton plus beau but ?
A Avranches, avec le Red Star. Il y avait toute ma famille ce soir-là. Il a été élu plus beau but de l’année en National ! Et en plus, dans ce match, j’en ai mis trois (victoire 4 à 2).

Le but de Kevin Lefaix à Avranches avec le Red Star… un bijou !

Ton plus beau loupé ?
Avec Chambly, je crois que c’était à Créteil. Il y a un centre rasant qui passe devant tout le monde, je suis au 2e poteau, seul, je reprends le ballon et ça passe au-dessus alors qu’il n’y avait plus qu’à la mettre au fond !

Avec le Red Star. Photo Philippe Le Brech

Un geste technique préféré ?
C’est à l’image de mon but à Avranches : amorti de la poitrine et reprise de volée, et du gauche, alors que j’étais droitier !

Qualités et défauts sur un terrain ?
J’étais un battant, je ne lâchais jamais rien, je croyais toujours en la possibilité de marquer. Mes défauts étaient liées à mes qualités : j’étais tellement volontaire et combatif que j’en devenais trop hargneux, j’en venais à oublier mes copains, j’étais dans ma bulle.

L’équipe où tu as pris le plus de plaisir ?
C’est avec le Red Star, l’année de la montée, on avait une équipe de fous, avec des joueurs d’expérience comme Bellion, Planté, Marie, on s’entendait à merveille, on était des chiens.

Je pensais que tu allais dire Vitré…
J’ai hésité ! C’est vrai que je parle peu de Vitré dans les interviews, mais avec Le Red Star, ça se vaut !

Le club où tu n’aurais pas dû signer ?
Ce n’est pas une erreur de casting puisque j’y ai effectué une belle saison mais c’est vrai que ce n’était pas prévu que j’aille au Poiré-sur-Vie, en National. J’y ai fait une grosse année et j’ai beaucoup appris avec Oslwald (Tanchot, le coach). En fait, j’étais à Orléans, et je ce n’était pas prévu que je parte. Avec mon agent, on a cherché un club, on avait Carquefou et donc Le Poiré : je suis allé visité la ville… bon… finalement, j’ai signé mais j’ai habité à La Roche-sur-Yon. Et au final, cela a été un bon tremplin (17 buts en 36 matchs). La saison a été enrichissante et aussi très fatigante, avec beaucoup de déplacements.

« J’aurais bien voulu jouer en Angleterre »

Avec Orléans en 2010-2011. Photo Philippe Le Brech

Le club où tu as failli signer ?
A côté de chez moi, où ma mère et née, à Vannes, en Ligue 2, pour un contrat pro, mais à l’époque, Orléans n’a pas voulu me laisser partir. J’ai mis du temps à m’en remettre après ça et à me relancer avec Orléans.

Le club où tu aurais rêvé de jouer ?
Ce serait en Angleterre, où j ai toujours voulu jouer. D’ailleurs, mon père m’a appelé Kevin à cause de Kevin Keegan ! J’ai effectué des démarches pour essayer d’y aller quand j’avais 18 ans. Cela ne s’est pas pas fait. J’aurais bien voulu jouer dans un club anglais. A choisir, Arsenal, j’aime beaucoup ce club.

Un stade et un club mythique ?
Le RC Lens et le stade Bollaert : j’y ai joué en Ligue 2 lors de la 2e journée de championnat avec le Red Star en 2015 (1-1).

Un coéquipier marquant ?
C’est Naïm Sliti au Red Star.

Sous le maillot du Rennes Footgolf-club.

Le joueur adverse qui t’a le plus impressionné ?
Laurent Koscielny, que j’ai affronté quand je jouais à Vitré, en CFA, et lui était en réserve à Guingamp : je me souviens d’une action, où je suis lancé en profondeur, il est battu, j’arrive aux 18 mètres, pour moi il était largué et je là, je le vois, il me prend le ballon en taclant, je suis surpris, il se relève et relance propre, ça m a marqué !

Le joueur avec lequel tu t’entendais le mieux sur le terrain ?
David Bellion, au Red Star. On avait des automatismes naturels, il avait une vision du jeu incroyable. Avec lui, ça fonctionnait bien.

Un coéquipier perdu de vue que tu aimerais revoir ?
Les anciens coéquipiers de Vitré et justement, dernièrement, ils ont fait une journée avec les anciens du club et je n’ai pas pu y être. A Vitré, toute l’équipe m’a aidé à m’intégrer. J’ai beaucoup de souvenirs avec eux, comme en coupe de France aussi. Je n’oublie pas non plus mes anciens coéquipiers du Stade Rennais quand j’étais jeune, même si j’arrive un peu plus à les voir quand je rentre à Rennes.

Sous le maillot du Rennes Footgolf-club.

Le joueur le plus connu de ton répertoire ?
Yann Lachuer je pense, ou Johan Micoud, mon président à Cannes, et Moussa Marega (ex-Porto et Guimaraes) aussi.

Combien d’amis dans le football ?
Pas beaucoup. Comme on dit, on les compte sur les doigts de la main, donc 5 à peu près !

Un coach perdu de vue que tu aimerais revoir ?
Bernard Lebreton, je l’ai eu longtemps au Stade Rennais, et aussi Bernard Moreau et Jacques Chilou en moins de 15 ans et moins de 17 ans, même si je les ai en amis sur facebook.

Un coach que tu n’as pas forcément envie de revoir ?
Celui-là il est facile à trouver ! Rui Almeida, qui est à Niort aujourd’hui. Bon, je lui souhaite quand même bonne chance, mais il n a quand même jamais trop réussi…

Un président marquant ?
Le président Patrice Haddad, au Red Star.

Sous le maillot du Rennes Footgolf-club.

Une causerie de coach marquante ?
Pas une causerie en particulier mais celles de Régis Brouard étaient motivantes. Il insistait beaucoup sur les détails et les points essentiels d’un match. Il avait une faculté de bien nous préparer. Il ciblait bien les joueurs.

Une anecdote de vestiaire que tu n’as jamais racontée ?
Oui (rires) mais si je la raconte il va m’en vouloir ! C’était à Chambly, avant un match, mais c’est un peu… pas gore… mais trash… Anthony Soubervie est sorti des toilettes avec une feuille de papier coincée à l’arrière de son short, je ne rentrerais pas dans les détails, il va m’en vouloir sinon ! Et il m’a dit qu’il l’avait fait exprès ! J’ai ça en vidéo !

Des rituels, des tocs ?
Le caleçon fétiche; dès que je marquais, je le gardais, et même quand je ne marquais pas, je le gardais quand même. J’avais des trucs avec les chiffres aussi, le 8 et le 2 (il est né en 1982) et quand je rentrais sur le terrain, je pensais à ma tante, Geneviève, qui est decédée très jeune. Je pensais toujours à elle.

Une devise ?
Oui, elles est inscrite sur mon bras (il la montre), c’est de l’anglais : « We all have two lives, the second one starts when we realize that we only have one ». C’est de Confucius.

Sous le maillot d’Orléans en 2011. Photo Philippe Le Brech

Que t’a-t-il manqué pour jouer plus longtemps en Ligue 2 ?
Déjà, d’arriver plus tôt à ce niveau-là, et peut-être la confiance du coach aussi. Mais je suis persuadé que j’avais ma place dans cette équipe du Red Star en Ligue 2 pour jouer, beaucoup me l’ont dit. En même, est-ce que j’avais la mentalité pour jouer en Ligue 2 ? Je ne sais pas, car j’ai vraiment senti une grosse différence entre les deux, entre le National et la Ligue 2. Peut-être que je n’avais ni l’état d’esprit ni la mentalité pour y être.

Tu étais un joueur plutôt …
Réaliste.

Au Poiré-sur-Vie, en 2012. Photo Philippe Le Brech

Un modèle de joueur ?
Jean-Pierre Papin.

Une idole de jeunesse ?
Ronaldinho.

Ta plus grande fierté ?
Ma fille.

Le milieu du foot, en deux mots ?
Passionnant et intransigeant. Tout peut basculer très vite, ça ne tient à rien, un choix, une blessure…

Texte : Anthony Boyer / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06

Photos Philippe Le Brech (et Rennes Footgolf-club)