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Jérôme Bouchacourt : “Le Covid nous a permis de développer footamateur.fr”

Huit ans après le lancement du site consacré au monde amateur, Jérôme Bouchacourt, le fondateur, et son équipe viennent de lancer un magazine mensuel et un site dédié au championnat National. Le Nantais évoque dans un entretien ses méthodes de travail, ses projets et le succès grandissant de sa marque.

Jérôme Bouchacourt, le fondateur du site FootAmateur

« Ça ne te dérange pas de décaler à demain, stp ? Avec la reprise du N2, je suis un peu « chaud ». » Jérôme Bouchacourt est un homme à l’emploi du temps bien chargé. Il faut dire que le journaliste, qui a fondé le site footamateur.fr en 2014, vient de lancer, avec son nouvel associé Frédéric Sougey, deux nouveaux médias : ADN (Actu du national), un site dédié au championnat du National, et “FootAmateur Le Mag”, dont ils bouclent le 5e numéro.

Le rendez-vous est décalé au lendemain, en visioconférence. Il est 10 h 06. L’entretien “ON” peut commencer. « Je suis disponible jusqu’à midi car je dois appeler un président de club ». Comprendre la méthode de travail et le fonctionnement de footamateur.fr , le site référence qui s’est imposé dans le paysage footballistique amateur sur la toile, voilà ce que l’on va découvrir pendant cette parenthèse d’un peu moins de deux heures. C’est parti ! Entretien.

Trois ans après, FootAmateur vient de relancer ADN Foot, un site dédié au National. Pourquoi ?

Avec la réforme de Ligue 1 et Ligue 2, on aura quatre clubs qui vont descendre de L2 en National et, dans deux ans, on pourra se retrouver avec 12 ou 13 clubs professionnels sur 18. L’information qu’on a eue de la LFP, c’est que le jour où il y aura plus de clubs professionnels que de clubs amateurs en National, il y aura la création d’une Ligue 3. Donc d’ici 2 ans. Le National est un championnat porteur avec des clubs comme Le Mans ou Nancy qui a attiré pratiquement 8 000 spectateurs lors du premier match, Concarneau, c’est 2 000 ou 2 500 à tous les matchs, il y a aussi Saint-Brieuc, Dunkerque, Avranches, etc. On s’est dit qu’on allait anticiper, relancer le site ADN Foot en prévision. On a déjà déposé d’autres noms de domaines. Voilà pourquoi on a enlevé le National de footamateur.fr. Cela va nous permettre de privilégier d’autres niveaux : régionaux ou départementaux.

D’autres projets ?

On va relancer le site PDLFoot (Pays de la Loire Football, Ndlr). J’attends de savoir comment la Ligue veut travailler avec nous. Des annonceurs locaux devraient arriver. Il y a beaucoup de photos et de contenus sur le sujet que l’on n’utilise pas sur footamateur.fr. Je suis par ailleurs correspondant “foot régional” pour Ouest-France dans les Pays de la Loire et plusieurs correspondants y sont bien implantés. On pourrait poster 30 articles par semaine ! Donc est venue l’idée de revenir à la base, sur notre région. Et puis, avec Fred (Frédéric Sougey, Ndlr), un de mes deux associés, qui gère aussi ses sites locaux (metro-sports.fr et monfoot69.fr), l’idée est de créer un autre site pour la Ligue Auvergne-Rhône-Alpes. Mais on ne fera pas d’autres sites locaux.

L’idée, c’est donc de revenir au régional, au local, comme au début de l’aventure footamateur.fr, quand vous aviez commencé avec quatre Ligues (Atlantique, Maine, Bretagne et Centre-Ouest) ?

Au tout début, en 2011, j’ai créé Atlantique Football club, Maine Football Club et Bretagne Football Club. On a ensuite dû déposer le bilan. La boite avait été reprise par deux personnes qui ne m’ont pas gardé six mois après. C’est là que j’ai lancé Foot Ouest mais j’ai dû changer le nom : le nom de domaine “footamateur.fr” était libre et je me suis lancé. Le développement s’est fait naturellement et simplement. Avec la N2, quand tu couvres Nantes – Les Herbiers, Nantes – Bergerac ou Nantes – Andrézieux, petit à petit, tu crées un réseau moins “local”, tu fais la connaissance d’autres coachs, d’autres dirigeants, d’autres joueurs, etc. Là, tu vois que c’est intéressant d’aller sur du national, ce qu’on a fait un an après.

C’est le même processus qu’au départ, dans les Pays de la Loire, quand tu as commencé en tant que correspondant sportif, dans la région Nantaise ?

Oui. Quand je suis arrivé dans la région en 2002, j’étais correspondant pour Ouest-France à Ancenis et Châteaubriant. Je couvrais tous les sports mais le sport majeur, c’était le foot. Lorsque tu couvres un match de CFA2 du coin, tu rencontres aussi les adversaires donc tu étends ton réseau. C’est tout un cheminement.

Tu es encore correspondant “foot régional” pour Ouest-France. Comment gères-tu ces deux activités ? Y a-t-il une concurrence avec tes sites ?

Pour Ouest-France, je vais plus m’occuper du foot local. C’est sûr qu’avec PDLFoot, il y aura peut-être une petite concurrence mais quand je fais une interview de 45 minutes d’un entraîneur par exemple, ça me permet d’avoir de la matière pour un papier de présentation pour le site, et d’en garder pour un autre papier sur le journal.

« En mars 2020, on a quadruplé la fréquentation d’un coup ! »

En créant, fin 2020, la société Sports media, qui édite tous ces sites et le magazine mensuel, tu t’es associé à Frédéric Sougey : c’était une volonté de ne plus travailler seul ?

Cela faisait un moment qu’on travaillait ensemble, qu’on se filait des photos, des infos. On le faisait aussi avec d’autres, dans d’autres régions. On avait un petit réseau. On s’est dit avec Fred qu’il fallait améliorer la synergie. On s’est aussi rendu compte que footamateur.fr générait pas mal de visites et donc plus d’argent car on a bénéficié de l’effet Covid avec l’arrêt des championnats en mars 2020. On a quadruplé la fréquentation d’un coup. On a eu un mois de folie : on a fait des journées à plus de 100 000 visiteurs uniques et 400 000 pages vues ! Quand on arrive à faire 3 000 ou 3 500 euros par mois, qu’on nous appelle pour devenir partenaire, on se demande forcément ce qu’on fait. On s’est dit qu’on allait monter une société. Le développement de footamateur.fr, c’est grâce à la période covid : ça a permis de lancer la nouvelle structure et de créer la nouvelle SAS Sports media.

L’arrêt des championnats a vraiment été l’élément déclencheur, car vous l’avez annoncé en exclu…

On a été très bons, je pense, car on a eu des infos via des contacts à la Fédération et au Ministère que les autres n’avaient pas, donc on a beaucoup été repris pendant cette période où, d’un autre côté, on s’est fait “allumer” par d’autres médias qui pensaient qu’on racontait n’importe quoi. Un média a même écrit un papier expliquant que le « blog » footamateur.fr n’était pas très sérieux en annonçant ce genre de choses. On m’a aussi dit que je n’étais pas un journaliste.

A contrario, tu as été sollicité par les médias nationaux à propos de la licence d’Emmanuel Macron. Quelle relation entretiens-tu avec les médias plus généralistes ?

Je pense que les médias traditionnels se rendent compte qu’on a des infos, qu’elles sont bonnes et qu’on fait un travail de recherche avec nos dossiers dans lesquels on apporte une vraie plus-value. On ne fait pas que reprendre des infos du Courrier Picard ou de La Voix du Nord ! Quand on a parlé pour la première fois de la réforme des championnats, on a pratiquement été cités par tout le monde, même par L’Équipe.

« Les médias nous prennent beaucoup plus au sérieux maintenant »

Mais footamateur.fr n’est pas toujours cité lorsque vos informations sont reprises…

Non, mais c’est un classique. On a aussi le problème des médias qui se servent de nos photos et de nos infos, sans les sourcer. Mais on commence aussi à avoir un petit réseau dans la presse. Les médias nous prennent beaucoup plus au sérieux qu’avant. C’est ce qui a beaucoup changé depuis deux ans et demi.

Et le monde du football amateur, il vous prend au sérieux ?

C’est marrant parce des mecs m’appellent pour me demander des renseignements. Un coach d’un club de N2 m’a demandé s’il pouvait aligner sa dernière recrue ou encore, au mois de juin, un entraîneur de N3 m’a demandé si la réserve de La Duchère pouvait rester en N3 car la première était en N2. On a même des présidents de District qui demandent des infos ou qui donnent des sujets. Après, le fait d’avoir assisté, avec le photographe Philippe Le Brech, à l’assemblée générale de la Fédération à Nice, en juin, nous a permis de développer le réseau. On a rencontré une vingtaine de présidents de District et Ligue.

N’est-ce pas frustrant de parler du football amateur sans pouvoir se déplacer en dehors de la région Nantaise ?

Non car je ne peux pas partir, je n’ai pas le temps. Mais on a des ambassadeurs comme Philippe Le Brech : lui, c’est 95 % des photos du site. Dans le premier numéro du mag’, il est parti en immersion dans cinq clubs toulousains. Puis il est allé à Limoges, à Brive, à Guéret. On a toujours cet ancrage qui nous permet de connaître les clubs. Et le but, à terme, est d’avoir un correspondant dans chaque Ligue.

Aujourd’hui, quels sont les effectifs de Sports media ?

On est deux journalistes salariés, Frédéric Sougey, qui est très implanté dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, et moi, en Pays de la Loire. On a aussi un journaliste en alternance et des correspondants. On a des régions qu’on couvre moins, comme peut-être les Hauts-de-France même si on a un correspondant là-bas. Mais on doit faire avec nos moyens. On connaît notre budget mensuel pour la correspondance donc on doit faire des choix. Si on n’a pas les moyens de confier un sujet à un correspondant, on le fera nous-même.

Vous avez lancé le site footamateur.fr le 1er mai 2014. Vous en vivez ? Et si oui, depuis quand ?

On en vit depuis la création de Sports media, en décembre 2020. Quelques chiffres pour montrer à quel point le site a décollé en un an : + 80 % en utilisateurs, + 150 % sessions, + 200 % pages vues.

« On tourne à 400 ou 450 000 visiteurs par mois »

Le foot international est-il une piste de développement ?

Franchement, non. Il y a trop à faire aujourd’hui en France. On tourne à 400 000, 450 000 visiteurs par mois. Si on a un correspondant par Ligue, qu’on sort quatre ou cinq fois plus de contenus, avec des papiers sur les championnats régionaux, de district, on va forcément toucher plus de public et augmenter notre fréquentation. On a un levier de développement en France qui est encore hyper important. Avec le mag’, qui a dû dépasser les 200 abonnés, on a là aussi un levier de développement énorme. Demain, on doit monter à 4000 ou 5 000 abonnés, j’en suis persuadé. Il y a plus de deux millions de licenciés en France. Et si on arrive à ces chiffres-là, on va attirer des annonceurs que l’on n’a pas aujourd’hui.

La publicité ?

Ce qui a beaucoup changé, ce sont les partenariats directs. SportEasy est un très gros partenaire avec qui on a lancé la rubrique infos pratiques. Umbro aussi. On a fait six mois avec eux et on va renouveler en octobre pour six mois. On arrive désormais à faire plus de la moitié de notre chiffre d’affaires avec ces partenariats directs et plus la pub display (les affichages). On n’est plus dépendants de cette pub display et pour faire de la qualité, c’est mieux.

Est-ce que vous vous sentez libres avec ces partenariats directs ?

On l’a toujours été, libres.

La vérification des sources est-elle compliquée dans le football amateur ?

Je me suis “pris la tête” avec un club il y a quelques jours. Je connaissais l’identité de leur nouvel entraîneur. J’ai contacté le club plusieurs fois mais sans aucun retour. Un peu énervant car on avait un scoop et on n’a pas pu le sortir. Parfois, on hésite à publier une info même si on en est sûrs.

On vous reproche parfois vos prises de position…

On a une ligne éditoriale qui a toujours été très claire. On fait notre boulot, tout simplement. Mais oui, souvent, on a des prises de position. Comme le dossier qu’on a fait sur la FFF. Certaines personnes n’ont pas du tout apprécié ! Mais tout ce qu’on a écrit dans le papier est vrai.

Les clubs de football “amateurs” sont-ils toujours accessibles ?

Oui et non. En ce moment, en National, il y a un club, qui ne parle plus à personne. Ça doit être l’effet Roi Soleil. Mais concernant la communication des clubs, ils sont souvent contents qu’on les appelle. On a rarement eu de problèmes de ce côté-là.

« Il faut avoir des infos confirmées, vérifier ses sources »

Est-ce facile de s’intéresser à ce qui se passe vraiment à l’intérieur des clubs ?

Ça prend du temps mais on sait que ces sujets vont être lus. Le problème, c’est qu’il faut avoir des informations confirmées. Un journaliste m’avait proposé un papier sur la FFF, mais j’avais besoin d’avoir les sources pour vérifier parce qu’on prend des risques juridiques. Autre exemple, j’ai eu des infos sur un club : on m’a dit des choses que je ne peux actuellement pas vérifier. Si on le sort, c’est une bombe.

Vous abordez aussi le sujet de l’arbitrage, à travers les violences…

Les violences, tout le monde en parle. Parfois, c’est même monté en épingle par des médias nationaux. Avec FootAmateur, on essaie de ne pas se limiter aux violences, en abordant par exemple le nouveau statut sur l’arbitrage. Il y a plein de sujets à faire sur l’arbitrage. On veut d’ailleurs y consacrer une page dans le mensuel.

A quoi ressemble une semaine type de footamateur.fr ?

Déjà, c’est sept jours sur sept. Le dimanche et le lundi, c’est le recap’ du N2 et cette année on va aussi le faire pour le N3. Le mardi, c’est plutôt de l’information pratique donc des sujets globaux qui vont intéresser les clubs de tous niveaux. Le mercredi, on veut parler des jeunes, des U17, des U19, de l’école de foot. Le jeudi et le vendredi, ce sont les annonces des journées de championnats. Le samedi, on va relancer le grand format du samedi matin. On va essayer d’être plus récurrent pour que le lecteur s’y retrouve davantage dans notre programme, tout en traitant l’actualité : le coach viré, l’arbitre agressé, le match interrompu, etc.

Est-ce difficile de se renouveler dans ce milieu ou on a l’impression d’entendre toujours un peu les mêmes discours ?

C’est l’avantage d’être plusieurs maintenant. Philippe Le Brech, par exemple, est plus impliqué dans le contenu qu’avant, même s’il continue la photo. Le but, c’est d’aller chercher des sujets « normaux », pas d’aller chercher les sujets récurrents. Des sujets, on en aura toujours.

Quels types de sujets sélectionnez-vous pour FootAmateur ?

Tout type. Le club de D4 de District. Le joueur qui est plombier et qui va réparer les douches à la mi-temps parce qu’il n’y a pas d’eau. Tous les sujets nous intéressent.

Quand vous réalisez un sujet, qu’est-ce que vous cherchez, qu’est-ce qui vous attire ?
Généralement, c’est l’actualité qui nous guide. Mais j’aime aussi tout ce qui touche à l’aspect règlementaire. Ce sont des sujets qui tournent bien car ils intéressent tous les clubs. Les exploits en Coupe de France, c’est aussi génial à faire car on est toujours bien accueillis par les « petits » clubs étant donné qu’on ne parle pas très souvent d’eux.

Texte : Gilles Augereau – Photos : 13 heures foot

Mail : gaugereau@13heuresfoot.fr

Twitter : @GillesxAugereau

La couverture du n°5 de FootAmateur Le Mag, avec un dossier sur la sécheresse, à paraître prochainement !