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Grégory Ursule : « A Rodez, les valeurs humaines sont au coeur du projet »

Le manager général du RAF (Ligue 2) passe en revue les grandes lignes d’une saison 2022-23 marquée par les travaux du stade, le changement de coach et la course au maintien, bien engagée. Il évoque aussi l’avenir de son club, très ancré dans son territoire, et l’esprit qui y règne.

Grégory Ursule, manager général du RAF.

L’on ne sait pas si c’est l’effet de la « pub » (« Un Mars et ça repart ! ») ou l’arrivée des beaux jours, mais si la Ligue 2 avait ouvert le 1er mars 2023, et bien c’est l’équipe de Rodez qui serait, aujourd’hui, en tête du championnat !

C’est très sérieux : depuis la 26e journée, le RAF est sur un rythme de champion, devant Metz, Bordeaux et Le Havre (19 points engrangés en 8 matchs, contre respectivement 18, 17 et 16).

Voilà qui donne une idée du niveau actuel des Ruthénois, eux qui n’en menaient pourtant pas large après deux mois de janvier et février où la maigre récolte (4 points en 8 matchs) a fait dégringoler le club du président Pierre-Olivier Murat jusqu’à la dernière place, occupée de la journée 23 à la journée 25. Paradoxalement, durant cette période, le RAF a trouvé le moyen de se hisser en 1/4 de finale de la coupe de France, après des qualifications notamment à Saint-Etienne (L2), à Monaco (L1) et à Auxerre (L1). C’est donc bien qu’il y avait de la qualité.

Depuis cette journée 25, quelle remontada ! En huit journées de championnat, le RAF a, accrochez-vous, repris 16 points sur Laval, 15 sur Niort, 14 sur Annecy, 13 sur Valenciennes et aussi 10 sur Nîmes, bref, sur tous ses concurrents directs ! C’est énorme ! Au point qu’à cinq matchs de la fin de saison, les joueurs de Didier Santini, appelé sur le banc le 8 novembre dernier en remplacement de Laurent Peyrelade, juste avant un déplacement à Saint-Etienne (J15) – qui s’est d’ailleurs soldé par un succès 2 à 0 -, sont (presque) assurés de se maintenir.

Vers une 5e saison de suite en L2

Contre Saint-Etienne (2-2), le 30 avril dernier.

Avec 41 points et 7 longueurs d’avance sur le premier relégable, Laval, ainsi qu’un goal-average intéressant (-4), on voit mal en effet comment les Aveyronnais pourraient laisser échapper leur billet pour une 5e saison de suite en Ligue 2, record du club !

Record car dans son histoire, Rodez a certes évolué pendant 4 ans en Division 2 dans les années 80 et 90, mais dans une période entrecoupée d’une descente en D3 (saison 1988-89 puis de 1990 à 1993).

Ces années « vintage », Grégory Ursule les a connues. Il avait 14 ans lorsque, durant la saison 1990-91, le Stade Ruthénois (le club est devenu le RAF en 1993) a affronté l’Olympique de Marseille en demi-finale de la coupe de France, au Vélodrome (élimination 4-1) après des qualifications contre Metz (D1) et Sochaux (D1). Il était d’ailleurs dans les tribunes !

Il avait 14 ans, donc, et était sur le point de signer sa licence au club de la « grande ville » voisine, après des débuts à Onet-le-Château, la commune limitrophe. C’est dire si celui que l’on appelle « Greg » a les couleurs « sang et or » dans les veines.

« J’ai effectué mes débuts à l’Eveil Sportif des quatre saisons, du nom du quartier d’Onet, où j’ai grandi. Je suis parti à 15 ans à Rodez, où j’ai un peu tout vécu, tout connu. Ce club a marqué mon adolescence : j’ai vu la Division 2, j’étais au match en demi-finale de coupe de France en 1991 contre l’OM, puis j’ai vécu la descente aux enfer alors que j’étais encore licencié, le centre de formation a été déclassé. J’ai grandi dans ce club en crise, mais cela ne m’a pas empêché de prendre du plaisir, et cela m’a permis de « sortir » aussi, comme d’autres, Sylvain N’Diaye notamment. »

Avec Rodez, en 15 ans Nationaux, ses coéquipiers s’appellent Sylvain N’diaye et Olivier Monterrubio. Le début d’un joli parcours qui le conduira ensuite aux centre de formation des Girondins de Bordeaux à l’âge de 18 ans, puis au Stade Rennais (une saison), à l’AC Ajaccio (Ligue 2), Gueugnon (Ligue 2) avant de boucler la boucle, comme il dit, en 2005, à Rodez, en CFA (National 2).

Football et études en parallèle

Il n’a que 28 ans à son retour chez lui, en Aveyron (il est né à Rodez), mais ses blessures à répétition l’ont freiné et, surtout, il sait que son cursus universitaire peut l’aider dans sa reconversion, lui qui a toujours poursuivi des études en parallèle. « Poursuivre les études parallèlement avec le foot, c’était une volonté de mes parents, de ne jamais lâcher les deux. Il y a toujours eu ce double projet, foot et études, c’est pour ça que j’avais choisi Bordeaux au départ, parce que le club était organisé pour mener les deux projets à la fois. J’ai d’abord fait un cursus STAPS à Bordeaux puis à Rennes. Ensuite, j’ai fait un Master – ça s’appelait « maîtrise » à l’époque – et quand je suis rentré à Rodez, à 2005, j’ai fait un Master 2 à l’IAE de Toulouse (l’IAE est devenu le « Toulouse school of management ») en « Ingénierie et management des organisations sportives ». Enfin, j’ai passé un DU (diplôme universitaire) de manager général à l’université de Limoges. »

Le stade Paul-Lignon fait peau neuve.

Limoges, où, il fait connaissance d’un certain Zinedine Zidane, étudiant comme lui ! On ne va pas refaire l’histoire ! Tout le monde la connaît déjà ! Véronique, l’épouse de Zizou, est originaire … d’Onet-le-Château, comme Gregory ! Puis le ballon d’Or 1998 devient actionnaire du RAF en 2012, quand le club était en CFA, et le fils, Enzo, portera plus tard le maillot du club en Ligue 2, saison 2021-2022.

Dans un emploi du temps hyper-chargé – « Le football est très chronophage » -, où il essaie de garder des moments en famille, « Mais ce n’est jamais assez, dit-il, heureusement, ils sont compréhensifs », Grégory (46 ans aujourd’hui) a tout de même trouvé le temps de nous consacrer un entretien. Presque un double exploit quand on sait que l’intéressé, discret mais aussi réfléchi, posé et un brin réservé, n’aime pas se mettre en avant : « Donner des interviews, ce n’est pas mon rôle, explique-t-il; le président est là pour ça, le coach est là pour parler de la partie technique. » Et ce matin, à l’heure du café plutôt qu’à l’heure du « 13 heures », Grégory est là pour parler de la partie « structuration » du RAF !

Interview : « A Rodez, on n’est jamais tranquille ! »

Avec 7 points d’avance sur le premier relégable le club est enfin plus tranquille aujourd’hui ?
On n’est jamais tranquille à Rodez, et c’est ce qui fait la beauté de ce projet. On a vécu des années tellement compliquées vers 2010, suite à notre descente en CFA (National 2). On a remonté un projet. Les gens se sont investis à fond. On a gardé notre identité. On est très attentifs aux gens qui sont venus partager cette aventure avec nous. On sait que cela deviendra de plus en plus compliqué, mais ce qu’il faudra, c’est laisser un héritage, quoi qu’il arrive, pour que ce passage en Ligue 2 puisse bénéficier au club dans les années futures.

En évoluant en Ligue 2, Rodez a-t-il atteint son plafond de verre ?
On est conscient de notre position de club. C’est pour ça que l’on arrive à s’en sortir justement. Car à Rodez, on a l’humilité de savoir qui on est, et c’est ce qui nous fait progresser. Maintenant, si on se maintient cette saison, et pour cela je pense qu’il nous faut encore 3 points, on sera dans un championnat de L2 encore plus difficile l’an prochain (avec les quatre descentes de Ligue 1 notamment). Ce sera comme une Ligue 1 bis. Sans être trop péjoratif, pour l’instant, je nous considère comme un club de National qui évolue en Ligue 2, et on joue contre des clubs de Ligue 1 : c’est pour cela qu’il faut relativiser certaines choses et rappeler aux gens de notre territoire, rappeler à nos supporters, à nos joueurs aussi, quelle est notre place. Il faut continuer à bosser.

Quid des travaux du stade Paul-Lignon ?
Il y aura quatre tribunes fin 2024 ! On est en train de faire un véritable petit stade à l’anglaise, qui ressemblera beaucoup à ce que sont les Aveyronnais, avec de la proximité, de l’humilité et un confort supérieur à notre ancien stade des années 80 ! La première phase, avec les trois tribunes, s’achève en juin 2024 et pour la quatrième tribune, celle derrière les buts, la terminaison est prévue fin 2024 : ça arrive vite ! On est actuellement à une jauge de 3263 places, en capacité : contre Saint-Etienne, samedi dernier, on était à guichets fermés ! C’est juste dommage que l’on n’ait pas pu placer les caméras dans l’autre sens, face à la tribune, mais ça, c’est à cause du chantier, et ce n’était pas possible. C’est quand même une fierté de pouvoir amener des équipes comme celles-ci, comme Saint-Etienne dans notre région, et des publics comme le leur aussi : on a pu voir la ferveur des supporters des Verts, tout le peuple vert et sa dimension.

Avec 7 points d’avance, le maintien en L2 est quasiment acquis, non ?
On s’est fixé une barre de 43 points à aller chercher, on en a 41. On a donc encore quelques points, sans doute 3, à prendre. Maintenant, c’est certain qu’on est mieux là qu’il y a quelques journées, mais on reste « très très » vigilant sur notre situation. Surtout que l’on doit encore se déplacer chez les deux premiers, au Havre (samedi) et aussi à Bordeaux.

Qu’est ce qui fait que Rodez a su remonter la pente en mars et en avril et inverser la tendance ?
Deux choses : tout d’abord, on a pris conscience de la difficulté dans laquelle on était. Ensuite, on a, malheureusement, une certaine expérience de jouer dans ce type de situation, de jouer le maintien, de lutter : ça nous a un peu aidé. Et Didier (Santini) le coach, malgré son inexpérience de la Ligue 2, a amené toute sa fraîcheur. Les joueurs ont adhéré et ont été récompensés finalement, même si la saison n’est pas terminée. Depuis qu’on est en Ligue 2, on fait de tout, on fait des départs canons et des arrivées faméliques, on fait des départs compliqués et des finaux « de fou » comme l’an passé … Cette saison, on aurait aimé vivre une saison plus tranquille, pour notre stratégie de club, mais cela n’a pas été possible.

Le coach Didier Santini.

A propos de Didier Santini, le choix de l’enrôler pour remplacer Laurent Peyrelade a pu surprendre, mais finalement, c’est une réussite…
Le pari sera réussi en cas de maintien. Ce choix a étonné le monde du football, peut-être, mais on cherchait un entraîneur avec de la fraîcheur et de l’envie, et Didier en avait, malgré son inexpérience du niveau Ligue 2. On sortait d’une très belle aventure avec Laurent (Peyrelade) qui reste un très grand technicien et un très grand entraîneur, et à qui on doit beaucoup, mais il arrivait à la fin d’un cycle et n’avait pas forcément l’énergie nécessaire pour cette saison. On s’est d’ailleurs longuement posé la question à la mi-saison… En fait, s’il n’y avait pas eu cette trêve internationale en novembre, on n’aurait pas fait ce changement, mais ce calendrier nous a permis de changer quelque chose. Peut-être qu’on aurait réussi avec Laurent, mais il fallait prendre une décision, et on l’a prise juste avant la trêve, d’ailleurs. J’espère qu’on réussira avec Didier.

Se séparer de Laurent Peyrelade a dû être un crève-coeur…
Oui, quand tu as vécu 7 ans avec quelqu’un, et passé autant de bons moments, humainement, on s’attache. Je lui souhaite de retrouver un beau projet, il a en tout cas toutes les qualités pour entraîneur au haut niveau, il le mérite. Mais au bout d’un moment, une certaine lassitude s’est installée au niveau du groupe, le discours passait plus ou moins bien, et quand tu es dans la difficulté, tu n’as pas forcément l’énergie nécessaire pour le faire passer. On a choisi de changer et cela a été extrêmement douloureux comme décision, contrairement à l’impression que cela a donné de l’extérieur, et après ça, il a fallu vite se remobiliser, et on y est parvenu.

Comment décrirais-tu le RAF de l’extérieur ?
C’est un club atypique, avec des valeurs humaines au centre du projet. Tous les gens qui sont passés par notre club, qui l’ont côtoyé, ont senti cette humanité chez nous, à l’image de notre territoire. A Rodez, on est des laborieux, on a une grande passion pour le travail, et c’est grâce à ce travail que, du coup, on est récompensés.

Et sur un plan personnel, qu’est-ce qui te plaît au RAF ?
A Rodez, on n’a jamais trop su où se situer, on est enclavé, on se bat toujours pour savoir si on est au nord de l’Occitanie ou au sud du massif central. Ces deux dernières saisons ont permis de situer Rodez et l’Aveyron sur la carte de France ! On est un club territorial et on a une grande fierté à défendre ce territoire, c’est notre force au quotidien.

L’avenir du club, c’est de l’installer en Ligue 2 ou, pourquoi, de rêver un jour à la Ligue 1 ?
La Ligue 1, c’est mon président qui en rêve tous les jours, et j’ai beau être un doux rêveur, je suis aussi un cartésien. S’il y a la Ligue 1 un jour, cela passera forcément par le travail. Là, pour l’instant, on va avoir un bel outil, qui va nous aider dans notre développement. Et on a aussi d’autres chantiers, comme le centre d’entraînement et de formation : pour l’heure, on est dans la phase du foncier. Ce projet est en genèse. On voit bien que l’on n’est pas encore au bout du projet. Notre passage en Ligue 2 nous donne quelques années d’avance sur notre plan de marche, et j’espère que l’on en tirera un plein usage. Après, pour la Ligue 1, rien n’est impossible dans le football. Le modèle de Guingamp et d’Auxerre l’ont prouvé. C’est pour ça que dans un coin de notre tête, on peut toujours y penser.

Tu es manager du club depuis 2011 : qu’est-ce qui te plaît dans cette fonction ?
C’est le management de projet, en l’occurrence celui d’un projet territorial, où on touche à tout, pas seulement au domaine sportif. Souvent, on m’appelle « directeur sportif » plutôt que « manager », surtout depuis que l’on joue en pro, mais ma construction de carrière est quand même celle d’un   manager général. Il y a beaucoup de travail administratif et de développement de club, des projets, de la gestion des ressources humaines, c’est passionnant. Cela demande beaucoup d’énergie, et j’en ai encore beaucoup à revendre, mais parfois, c’est compliqué comme job !

Sur ton CV, on constate que tu as aussi été entraîneur de Rodez…
Oui ! J’ai mon DES, je peux entraîner jusqu’en N2. J’ai fait deux fois le pompier de service à Rodez, en CFA, pour le bien du club ! D’ailleurs, j’ai un bilan plutôt flatteur (11 matchs, 6 victoires, 2 nuls et 3 défaites) (rires) ! C’était après Franck (Plenecassagne, aujourd’hui directeur du football du RAF) je crois et après Rui Pataca.

Entraîner est donc une corde de plus à ton arc : cela ne te convient pas , ce job ?
J’ai toujours aimé l’entraînement, la compétition, le management de la compétition, c’est super intéressant. Je regarde beaucoup les entraîneurs de haut niveau, leur comportement, leur attitudes, ça me plaît énormément. J’aime les entraîneurs précis et distants. J’aime quand, dans leur discours, y’a jamais d’euphorie ou de panique. J’aime ces entraîneurs qui restent « stables », j’aime aussi ceux qui sont chauds sur le bord du terrain, qui sont passionnés. J’écoute aussi leurs conférences de presse et j’aime cette vision qu’ils ont de rester très cartésiens quant à la possibilité de gagner ou de perdre un match. J’aime quand ils ont du recul, en fait. Quant à moi, après ma carrière de joueur, je ne voulais pas reprendre mon baluchon, et l’aspect terrain au quotidien ne m’a pas attiré.

Gregory Ursule, du tac au tac

Sous le maillot de l’AC Ajaccio, en Ligue 2.

Ton meilleur souvenir sportif de joueur ?

J’en ai deux : la montée en Ligue 1 avec l’AC Ajaccio et le 8e de finale de coupe de France, remporté face au PSG, en 2009.

Meilleur souvenir de dirigeant ?

Le match de la montée en Ligue 2 avec Rodez contre Boulogne-sur-Mer, c’était l’aboutissement d’un projet. C’était incroyable. Surtout qu’au début de saison, on ne pensait pas en arriver là !

Pire souvenir de joueur ?

Joueur, c’est l’année où j’arrête ma carrière, en 2011, on descend de National en CFA. C’était une saison compliquée, avec un championnat à 21 équipes, on a sombré.

Pire souvenir de dirigeant ?

Notre descente sportive en CFA en 2015, on perd à Marignane à l’avant-dernière journée, et derrière, il y avait une autre journée, mais on était exempt… Mais on s’est maintenu administrativement car on a été repêché.

As-tu déjà marqué des buts ?

Très peu ! Mais j’en ai mis un notamment avec Rodez contre Fréjus, on me le ressort à chaque fois que c’est mon anniversaire (rires) ! Je pense que c’est mon plus beau but !

Ci-dessous, le but de Grégory Ursule contre Fréjus.

Pourquoi as-tu choisi d’être footballeur ?

Petit, à l’école, j’avais répondu « footballeur » à la question « quel métier voulez-vous exercer ? » et l’institutrice m’a dit que ce n’était pas un métier, qu’il fallait que je mette autre chose, alors j’ai copié sur mon voisin qui a mis « polytechnicien », je ne savais pas ce que ça voulait dire, alors bon… J’ai toujours voulu être footballeur, c’était ma passion, et j’ai rencontré à Font-Romeu Jean Tigana, en 1986 je crois, lors d’un stage de préparation au Mondial de l’équipe de France. Tigana m’avait touché les cheveux, je ne me les suis pas lavés pendant 15 jours ! J’ai porté le numéro 14 ensuite, dès que j’ai pu, pendant ma carrière.

Ton geste technique préféré ?

Une transversale à une touche. J’aimais bien casser les lignes, jouer à une touche. Comme je n’avais pas de qualité athlétique ou d’explosivité, il fallait que je vois plus vite que les autres.

Qualités et défauts selon toi sur un terrain ?

Mes qualités, c’était mon volume de jeu, je récupérais beaucoup de ballons, j’étais un leader, dans l’engagement notamment. Mes défauts, techniquement, je n’ai jamais été un as, je n’étais pas très rapide non plus, je manquais d’explosivité.

La saison sportive durant laquelle tu as pris le plus de plaisir ?

C’était pendant ma formation aux Girondins de Bordeaux, c’était des années d’insouciance, on avait gagné la coupe d’Aquitaine et on avait eu le privilège de partir à La Réunion et à l’Île Maurice. Il y avait des joueurs comme Bruno Da Rocha, Kaba Diawara, Kodjo Afanou, Cédric Ancelin, Sylvain Ndiaye, avec moi.

Sur ton CV, figurent deux saisons comme joueur à Gueugnon en Ligue 2…

Oui, j’ai été prêté deux fois à Gueugnon, par Ajaccio, je revenais de blessure à chaque fois. A Gueugnon, j’ai vécu des aventures humaines incroyables. Je ne savais pas si je pourrais rejouer au foot à l’époque. J’ai eu Albert Cartier la première année, il y avait aussi avec Xavier Becas et Fabrice Levrat avec moi, nous venions d’Ajaccio. La 2e année, c’était Thierry Froger le coach. On a rempli deux fois le défi de se sauver ! Quand je regarde mon parcours, je ne suis pas étonné d’être passé dans ce club, familial, qui ressemble à ce qu’est Rodez aujourd’hui, enclavé dans la campagne, dans un milieu rural, avec des gens qui tiennent le club à bout de bras. Gueugnon, c’était exceptionnel. J’y ai retrouvé le football dans lequel j’avais grandi. Je me retrouvais énormément dans ce club.

Une erreur de casting dans ta carrière ?

Sous le maillot du Stade Rennais.

Bien malgré moi, quand je suis parti au Stade Rennais en 1998-99 : ce club m’aurait correspondu s’il était resté ce qu’il était à mon arrivée, à une époque où il faisait souvent l’ascenseur entre la D1 et la D2, sauf que j’ai été recruté avant que François Pinault ne rachète le club qui a pris tout de site une autre dimension avec un gros recrutement international, dont Shabani Nonda, y’avait des super-joueurs. Je suis arrivé dans un club où je n’étais pas forcément désiré, mais je ne leur en veux absolument pas. Du coup, je n’ai pas joué. Seulement en réserve. J’ai quand même passé une super année, et j’ai mêlée cette saison avec mes études, que j’ai pu poursuivre.

Le club où tu aurais rêvé de jouer dans tes rêves les plus fous ?

Le Bayern de Munich, de par ma formation, car j’étais germanophone dans mes études. J’adorais partir en Allemagne. J’adore la culture de ce pays, et celle du Bayern.

Du coup, cette culture allemande, tu t’en sers au quotidien au RAF ?

Je m’en sers, oui, car je suis un besogneux, un laborieux, et j’ai la culture du travail. Quand tu n’as pas de talent, tu es obligé de compenser par le travail, et c’est justement ce qui correspond à l’ADN du club.

Grégory Ursule, à 21 ans, au Stade Rennais.

Une idole de jeunesse ?

Jeannot Tigana. Même type de poste, même type de profil physiologique… J’adorais son jeu et puis il y a le afit aussi qu’il soit métissé : son époque était celle de l’arrivée de joueurs de couleur dans le football. Je me suis beaucoup identifié à lui.

Un coéquipier marquant ?

A l’AC Ajaccio, Samba Ndiaye. Il faisait des gestes en compétition que je n’aurais jamais imaginé que l’on puisse faire ! Il avait des qualités au-dessus des autres. Sinon, j’ai eu la chance pendant mon passage à Bordeaux de côtoyer des grands joueurs, Dugarry, Zizou, Lizarazu, avec parcimonie.

Le coéquipier avec qui tu avais le meilleur feeling sur le terrain ?

Cyril Granon à Ajaccio. Je m’entendais bien également avec « Toto » Squillaci, mais là c’était plus sur les coups de pied arrêtés. Dans ma 2e vie de footballeur, puisque c’est comme ça que j’appelle ma carrière à mon retour Rodez, je m’entendais bien avec Freddy Castanier.

Un coéquipier perdu de vue que vous aimeriez revoir ?

David Jaureguiberry, à Ajaccio.

Un coach perdu de vue que tu aimerais bien revoir ?

Gernot Rohr (Bordeaux).

Un président qui t’a marqué ?

Michel Moretti à l’AC Ajaccio.

Un coach que tu n’as pas forcément envie de revoir ?

Aucun en particulier. Ils m’ont tous appris quelque chose. Même dans l’échec. Par exemple, je pourrais avoir de l’amertume envers Paul Le Guen et Yves Colleu, à Rennes, car je n’ai pas joué, mais avec le recul, je me dis que si je n’ai pas joué, justement, c’est parce que je n’avais pas le niveau. Je n’ai joué qu’en réserve cette saison-là.

Le stade qui t’a procuré le plus d’émotion ?

Geoffroy-Guichard à Saint-Etienne.

Des rituels, des tocs ?

Oui, j aimais bien faire un échauffement particulier avant les matchs. Je m’échauffais seul. Je faisais mes longueurs, j’aimais bien prendre le pouls du stade, le volume, l’environnement, et je mettais aussi des « sous-shorts » fétiches.

Une devise ?

Carpe diem.

Ce qui t’a manqué pour jouer en Ligue 1 ?

Un peu de talent, et moins de blessures. J’ai été beaucoup freiné par les blessures, j’ai eu deux fois les croisés, une double fracture tibia-péroné, une rupture du talon d’Achille… J’aurais pu faire une carrière en Ligue 1 dans des clubs de milieux de tableau si j’avais été épargné, j’avais quand même ce côté leadership sur le terrain.

Un match de légende selon toi ?

Bayen-Manchester, en finale de la Ligue des Champions en 1999 (2-1), avec les deux buts dans le temps additionnel de Manchester, dont celui de Solskjaer à la dernière minute !

Tu étais un joueur plutôt…

Rugueux.

Tu es un dirigeant plutôt…

Cartésien.

Le milieu du foot en deux mots ?

Passionnant et chronophage.

Texte : Anthony BOYER / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr et contact@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06 et @13heuresfoot

Photos : Rodez Aveyron Football – Cédric Méravilles