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Didier Santini, bien plus qu’un entraîneur…

L’ex-coach de Saint-Brieuc, Béziers et Dunkerque se démarque par son côté bienveillant et ce rôle de conseil auprès de ses joueurs, qu’il aime accompagner dans leur projet de carrière. Au point, parfois, d’en oublier la sienne !

Didier Santini est né à Marseille en 1968 mais il n’a pas joué tout de suite à l’OM. Il est d’abord passé par la case… PSG ! Et oui ! La « faute » à son papa banquier qui, au fil de ses nominations, oblige la famille à déménager. D’abord à Béziers, où il signe sa première licence à l’AS Béziers, puis à Paris, où il joue dans les Yvelines à Plaisir.

C’est là que le club de la capitale vient le chercher : « Un jour, j’étais minimes première année, on joue contre le PSG en amical, on prend une bonne rouste, et un monsieur vient nous voir. C’était le recruteur du PSG. Il dit à mon père, qui ne m’a jamais mis aucune pression, « J’aimerais recruter votre fils » ! Il lui a répondu « Demandez lui ! »

Et voilà comment le Marseillais se retrouve au PSG, de 1982 à janvier 1986, avant de « péter les plombs » : « En fait, c’était ma troisième saison avec le même coach, les deux premières s’étaient bien passées et là, je ne sais pas pourquoi, il n’arrêtait pas de me « défoncer ». Il me disait que tout ce que je faisais, c’était de la merde, et un jour, j’ai pété un câble, et je suis parti ! »

Il arrive à l’OM en 1986, en même temps que Tapie !

Didier Santini rejoint alors son grand frère à Feucherolles et s’entraîne avec son équipe de Promotion d’Honneur. Il en profite pour envoyer des courriers dans les centres de formation. L’OM le met à l’essai au tournoi de Sainte-Marguerite à Marseille. Gérard Gili, le coach de l’OM à l’époque, est satisfait. Et il signe ! « C’était en 1986, l’année où Bernard Tapie est arrivé ! Pas besoin d’avoir son aval, m’avait dit Gérard Gili, car Tapie ne s’intéressait pas trop au centre. Et moi, un mois et demi après, je m’entraînais avec les pros, ça fait drôle ! J’ai recroisé mon coach du PSG et je ne lui ai pas serré la main, c’est la seule fois que ça m’est arrivé, je l’ai regretté, même si ça me faisait plaisir sur le moment. Mais c’était une connerie de ma part. Ce n’est pas l’éducation que j’ai reçue. »

Aujourd’hui, Didier Santini se sert beaucoup de cette expérience pour communiquer avec ses joueurs quand ça va moins bien : « Si ça ne va pas, si ça ne va plus, je préfère lui dire « On arrête ensemble, je n’ai pas la science infuse, ça ne fonctionne pas avec moi, mais cela ne veut pas dire que cela ne peut pas fonctionner avec un autre entraîneur », et je lui donne mon exemple du PSG. Après, le joueur est réceptif ou non. » Entre les lignes lisez, le joueur est intelligent ou non.

7e avec Saint-Brieuc et le plus petit budget de National

Bienveillant avec ses joueurs, Didier Santini est aussi droit et honnête. L’argent, les contrats, ce n’est pas son moteur. Et si cela ne va pas non plus avec son président, ou son club, il ne va pas s’accrocher à son contrat. La séparation est forcément un moment douloureux, mais elle se passe généralement en bons termes, comme avec Saint-Brieuc, tout récemment, le club qu’il a conduit à une jolie 7e place la saison passée (2e sur la phase retour) avec le plus petit budget du championnat National. Un exploit. Un miracle même.

L’annonce de son départ le mois dernier, après trois nuls et trois défaites, a surpris tout autant que le nom de celui qui a assuré l’intérim, Guillaume Allanou, son président au Stade Briochin ! « Mais Guillaume est un passionné et un bon entraîneur (Guillaume Allanou a entraîné la réserve en N3 et est un ancien joueur du club, Ndlr), assure Didier Santini. Je me suis régalé avec lui à Saint-Brieuc, où j’ai rencontré des gens extraordinaires. Je ne connaissais pas du tout la Bretagne, j’y étais juste venu avec le foot, pour des matchs. Avec Guillaume, on s’est séparé en bons termes. Là, le club vient de recruter Karim (Mokeddem), je suis content pour lui, il m’a envoyé un message, je lui ai répondu. »

« La gestion du Covid par la Fédération a été catastrophique »

Avant son expérience dans les Côtes d’Armor, Didier Santini a passé deux saisons tronquées par la Covid-19 à l’AS Béziers, en National tout d’abord – il a remplacé Mathieu Chabert en novembre 2019 -, puis en N2 la saison suivante. Sur la gestion de la Covid par la Fédération, l’ancien professionnel de Lille, Bastia et Toulouse (et de l’OM, donc !), pourrait faire une émission complète. Dire qu’il n’a pas digéré ces deux épisodes est un euphémisme.

Mars 2020 : l’AS Béziers, qui n’a quasiment jamais été relégable de la saison en National, est 16e sur 18, à un point du 14e, mais descend après l’arrêt des championnats.
Octobre 2020 : l’AS Béziers est en tête et invaincue de sa poule en National 2 avec six victoires et 3 nuls, mais, là encore, le championnat est arrêté et ne reprendra pas.

« Cela a été un sketch monumental ! En National, sur nos neuf derniers matchs à disputer, on devait jouer les équipes de deuxième partie de tableau, sauf Boulogne, qui était en haut. C’était immérité de descendre. Comment peut-on décider du sort des clubs à pile ou face ? La gestion du Covid a été catastrophique et nous, clubs amateurs, on était de la merde, on ne servait à rien. Et la saison d’après, toujours en National, la Fédération n’a fait descendre qu’une seule équipe (Lyon-Duchère) au lieu de quatre, alors que le championnat est allé à son terme ! En National 2, la saison suivante, on est invaincu, mais on doit s’arrêter, on n’a plus le droit de jouer, pendant qu’en National ils jouent. Puis on n’a plus le droit de s’entraîner alors que les centres de formation peuvent le faire et peuvent jouer entre eux. C’était du n’importe quoi. Et pour les jeunes, de 18 à 22 ans, cela a été dur, ils ont perdu du temps, ils n’ont pas pu se montrer. Non, vraiment, pendant deux ans, cela a été extrêmement compliqué pour l’AS Béziers qui, en plus, venait de descendre de Ligue 2 quand je suis arrivé. Mais j’ai passé des moments extraordinaires là-bas, avec le président Gérard Roquet et sa famille. »

« Le National est fait d’aberrations ! »

Si Didier Santini critique la gestion de la crise sanitaire, il fustige également le championnat National qui, selon lui, est fait d’aberrations : « La plus grosse d’entre elles, c’est qu’une équipe qui a le statut professionnel peut prendre un joueur à 1500 ou 1800 euros par mois, par exemple, mais pas le club amateur qui doit lui faire signer un contrat fédéral à 2500 euros ou 3000 euros, tout simplement parce que les règles ne sont pas les mêmes et qu’un club amateur ne peut faire signer que des contrats fédéraux. Autre aberration, les reclassements des joueurs amateurs. »

Malgré tout, l’ancien coach de Calvi et de Borgo pense que le National « est un super championnat pour les jeunes qui veulent jouer un jour en L2 ou en L1. Avec Saint-Brieuc, lors des six premiers matchs que j’ai disputés cette saison, je n’ai pas trouvé que l’on avait été dominé, j’ai surtout trouvé que les équipes étaient encore plus homogènes qu’avant. Mais cette saison, tu as six descentes et y’a plein d ‘équipes qui veulent monter en Ligue 2. Balancer six équipes de National en N2, c’est chaud, ça fait un tiers du championnat. Tout ça parce qu’il y a des gens au-dessus qui ont décidé qu’il fallait un championnat pro à 18 parce qu’ils jouaient trop, alors que l’on a déjà supprimé la coupe de la Ligue ! C’est toujours le monde pro qui décide alors que c’est le foot amateur qui fait les choses. C’est bien de vouloir faire du pognon mais ces clubs, là-haut, ils pourraient en filer un peu aux clubs de National, pour les aider à se structurer par exemple, mais le problème, c’est que dès qu’on leur enlève 500 000 euros ou 1 million, ils pleurent. Je trouve aussi dommage qu’aucun club pro n’ait pris des parts dans un club de National. »

« Le National, c’est plus dur que la Ligue 1 ! »

Son rôle de coach, Didier Santini le voit aussi comme une mission de conseil, d’éducation. Sa plus grande fierté ? Accompagner des joueurs vers le plus haut niveau. Les faire progresser. Leur données des idées. Leur proposer un plan de carrière. Sans jamais oublier le principe de base : le respect. « J’essaie d’éduquer mes joueurs comme ça. Par exemple, je veux que les anciens respectent les jeunes. Quand tu arrives dans un vestiaire, que tu es jeune, que tu es bon et que tu as le bon comportement, que tu es respectueux, et bien c’est le vestiaire qui t’adoptera, pas le coach. C’est Gérard Gili qui disait ça à l’OM et il avait raison. Malheureusement, aujourd’hui, on voit des joueurs qui arrivent de centre de formation de Ligue 1 et ils croient qu’en National, c’est plus facile, mais non. Le National, c’est plus dur que la Ligue 1. En National, tu n’as pas des joueurs de Ligue 1 qui te font des passes, tu n’as pas trois ou quatre appels quand tu as le ballon dans les pieds, et si tu en as deux, c’est déjà très bien. C’est ça le National. »

Parfois, il lui arrive de dire des choses qui font mal, mais « Je leur dis la vérité. Je suis là pour aider les joueurs. Je leur dis souvent « ne regardez pas l’argent. Jamais. Surtout si vous êtes jeune. Celui qui veut en gagner beaucoup, tout de suite, il n’existe pas, sauf à s’appeler Mbappé. Ou alors si, vas-y, mais sors blindé tout de suite. Moi je leur dis, « jouez pour vous faire plaisir » ! A Calvi, en CFA2, quand j’ai pris Malik Tchokounté à Nice, il bossait à côté du foot. Il touchait 600 euros. Travailler à côté, ça donne une force exceptionnelle. On a mis en place un projet ensemble. Celui de le voir jouer un jour en Ligue 1. Et il y est arrivé. Il a écouté. Il est intelligent. »

« Je ne pense jamais à moi »

A force de s’occuper des autres, d’être toujours tournés vers eux, Santini a-t-il le temps de penser à lui ? La réponse fuse : « Non, je ne pense jamais à moi, à ma carrière, je vis les choses et je prends les choses comme elles viennent, ça va, ça vient. Il faut juste que je sois bien dans l’endroit où je vais, que ce soit passionnant. Il m’est arrivé d’avoir des propos financières top mais, waouh… le président… non ! Quand je signe quelque part, quand je vais quelque part, je ne pense pas être viré, je ne pense pas au pognon, je viens pour donner des idées, m’éclater, essayer de faire progresser un club, ce que je ne suis malheureusement pas arrivé à faire à Saint-Brieuc où c’est difficile en termes d’infrastructures. Avec mes joueurs, je suis le conseil, mais je ne prends pas d’argent. Je ne serai jamais agent. Moi, je leur donne la vérité que j’ai apprise depuis que je suis dans le foot, depuis 38 ans (j’en ai 54), j’essaie d’aider. Je suis bienveillant, gentil, intransigeant et franc. Je serai juste plus riche intérieurement si je vois un joueur qui réussit, comme ça a été le cas pour Wahbi Khazri par exemple. On a vu son potentiel à Bastia, on a su que ce serait dur mais il y est arrivé. Tenez, à Saint-Brieuc, l’année du Covid, en 2020, on a un jeune qui arrive de Régional et qui vient s’entraîner pour faire le nombre, car on avait beaucoup de malade. Le gamin, tous les jours, tu lui donnais un truc, tu lui apportais quelque chose. Il a fait deux matchs en N3 avec la réserve, puis une trentaine en National la saison passée avec moi, on lui a donné des idées, Guillaume (Allanou) en réserve, moi, il a écouté et son intelligence fait que, aujourd’hui, il est en Ligue 2 (ndlr, Walid Nassi, à Dijon). C’est le pied ! »

Didier Santini, du tac au tac – Le joueur

« Quand Tapie entrait dans le vestiaire, ça filait droit ! »

Sous le maillot du Sporting-club de Bastia, face à Cannes. Photo DR

Meilleur souvenir sportif ?
J’ai eu tellement de bons moments… C’est dur comme question… Je dirais peut-être mes premières années à l’OM au centre de formation, j’ai eu la chance de m’entraîner avec des internationaux, tous les jours, même si je ne jouais pas en match (il a disputé 5 matchs en pro à l’OM, Ndlr), c’était extraordinaire.

Pire souvenir sportif ?
La réponse n’est pas difficile : la catastrophe de Furiani à Bastia en 1992…

J’ai lu que tu avais refusé d’aller commenter le match avec des journalistes dans la fameuse tribune qui s’est ensuite effondrée…
J’ai du mal en parler… Je pleure chaque fois que j’en parle… Le matin du match, mon frère est venu de Paris alors que je devais commenter le match avec un ami en tribune, parce que je m’étais péter le genou à Bordeaux en février 2012, et puis je ne suis pas monté…

Le souvenir d’un but marqué ?
(rires) Je me souviens d’un but à Strasbourg en D1 … mais le plus beau but, c’était contre Nice à Furiani en D2, un bon derby ! Un genre de ciseau ou une sorte de bicyclette ! C’était Fabien Piveteau dans les cages et la saison d’après il est venu à Bastia, donc je l’ai beaucoup chambré ! Pendant des années, j’ai pensé que j’avais marqué ce but sur un ciseau retourné et un jour, quelqu’un me l’a montré, il était pas mal mais pas comme je le pensais !!

Le but de Didier Santini contre Nice avec Bastia (à la fin de la vidéo, avancez à 1 minute 50) :


Un geste technique préféré ?
Le tacle. J’aimais bien le tacle glissé et repartir avec le ballon.

Qualités et défauts sur un terrain ?
J’étais généreux, parfois trop généreux. Dès fois c’était même un peu trop.

Le club ou l’équipe où tu as pris le plus de plaisir ?
A Bastia. J’y ai joué 9 ans donc forcément… Dans les autres clubs, j’y suis resté 3 ans.

Le club où tu n’aurais pas dû signer ?
Toulouse. J’ai signé pour Alain Giresse avec qui j’avais eu la chance de jouer quand j’étais à l’OM. Mais le Directoire, c’était catastrophique.

Le club où tu as failli signer ?
Y’a eu des rumeurs avec Metz mais j’aurais voulu signer à Montpellier pour le président Nicollin. A Metz aussi, avec Carlo Molinari. Ces gens-là… Pas comme le président de Toulouse à mon époque (André Labatut, Ndlr). Quand tu vas dans leur club, tu signes pour des hommes. Pour des coachs aussi bien sûr, comme Alain Giresse, une personne extraordinaire.

Un stade et un club mythique ?
Bastia… non… L’OM, le Vélodrome. T’as des frissons quand tu rentres dans ce stade.

Un public qui t’a marqué ?
Lens. J’ai trouvé le public et les gens assez extraordinaires.

Un coéquipier marquant ?
Bruno Valencony. Je l’ai encore eu au téléphone tout à l’heure (hier).

Le joueur qui t’a le plus impressionné ?
Karl-Heinz Förster, à l’OM. C’est lui qui m’a tout appris. Chaque entraînement était une découverte. Une discussion.

Le joueur avec lequel tu t’entendais le mieux sur le terrain ?
J’ai toujours eu des affinités avec les gardiens. Bruno Valencony, c’était ça. On avait une belle complicité sur le terrain. Mais aussi Eric Allibert ou Grégory Wimbée à Lille.

L’adversaire qui t’a le plus impressionné ?
Le PSG. On les avait joués avec Bastia en finale de la coupe de la Ligue (en 1995). Avec Rai, Ricardo, Ginola, Valdo, Weah, ça valait presque autant que ceux qui sont là aujourd’hui.

Un coéquipier perdu de vue que tu aimerais revoir ?
Patrice Eyraud. On aurait dû se croiser plein de fois, mais à chaque fois, on s’est manqué. Quand il était à Marignane en National, je n’étais plus à Dunkerque… Que de souvenirs au centre de formation de l’OM avec lui. On avait une génération assez exceptionnelle avec lui et aussi Joël Cantona, Frédéric Meyrieu, Benoit Cauet, André Basile, Guillaume Warmuz, Jean-Claude Durand…

Un coach perdu de vue que tu aimerais revoir ?
René Exbrayat. Il m’a mis capitaine de Bastia alors que j’étais jeune, il nous a transformés quand il est arrivé. Il avait un truc génial.

Un président marquant ?
Quand tu as 17 ans et demi et que Bernard Tapie rentre dans ton vestiaire… Il n’a pas été exceptionnel ou marquant pour moi, j’étais jeune, mais putain… Il faut voir comment toutes les grandes stars du vestiaire filaient droit quand il entrait, personne ne parlait, et dès qu’il sortait, alors là… tout le monde se remettait à parler, ça m’a marqué.

Une causerie de coach marquante ?
J’en ai fait tellement perso qu’à la fin je me demande à quoi elles servent ! Je me bats pour faire des causeries de 10 à 12 minutes mais celle de Vahid Halilhodzic durait parfois 45 minutes, on écoutait tout, il disséquait tout, et on gagnait des matchs. C’était long mais quand on sortait de là, on savait tout. Guy Lacombe aussi avait des causeries exceptionnelles, c’était une pièce de théâtre. Il connaissait tout par coeur, il ne regardait pas son paperboard.

Le joueur le plus connu de ton répertoire ?
Cyril Rool… Ouaip, Canto aussi. Eric Cantona. Je ne sais pas s’il a toujours le même numéro. Avec son frère, on est ami depuis tout petit, je dormais chez eux. On se connaissait pas mal !

Des rituels, des tocs ?
J’ai eu pendant toute ma carrière la même brosse à cirer, celle de mon mère, malheureusement, je l’ai perdu l’année où j’ai joué en Ecosse, à Livingstone.

Une devise ?
Ne jamais rien regretter.

Tu étais un joueur plutôt …
Moyen mais avec beaucoup d’abnégation.

Ton premier match en L1 ?
C’est à Metz avec l’OM en 1987, on avait perdu 2-1.

Un modèle de joueur ?
Förster. Waouh ! C’était une machine de guerre.

Une idole de jeunesse ?
Maldini. C’était, avec Förster, des joueurs qui jouaient le ballon avant de jouer l’homme, qui prenaient très peu de cartons.

Ta plus grande fierté ?
C’est d’avoir pu jouer encore huit ans après mes six opérations au genou, alors que trois chirurgiens m’ont dit que je ne pourrais plus plus jamais jouer au foot.

Le milieu du foot, à ton époque ?
C’était mieux !

Didier Santini, du tac au tac – L’entraîneur

« Je n’ai jamais pensé à l’argent »

Meilleur souvenir sportif ?
Mes quatre saisons à Calvi, on a gagné trois fois la coupe de Corse, on est monté en CFA, y’avait des milliers de personnes dehors pour nous, c’était impressionnant. On aurait pu aller plus haut, avec rien. J’ai pris du plaisir là-bas. C’était compliqué l’été, les joueurs étaient beaucoup en soirée, à la plage, il fallait gérer ce côté festif. Chaque week-end, y’avait 10 000 personnes qui venaient à Calvi pour sortir.

Pire souvenir ?
En 2017, la dernière journée de National avec Dunkerque contre Boulogne, on fait 3-3 alors qu’un succès nous aurait permis de monter en Ligue 2 (Ndlr, à l’issue de la dernière journée, Dunkerque a perdu la 3e place synonyme de barrage d’accession au profit du Paris FC qui, bien que battu aux barrages, a été repêché après le dépôt de bilan de Bastia).

Le club que tu rêverais d’entraîner ?
Dans mes rêves les plus fous ? Bastia ? Mais c’est compliqué, je connais beaucoup de monde ! J’y ai joué. J’ai toujours beaucoup respecté Frédéric Antonetti, par rapport à tout ce qu’il a pu faire à Bastia. Il s’est souvent pris le bec avec des gens dans les tribunes, je ne sais pas comment je ferais, moi, parce que je me connais…

Un modèle de coach ?
Non mais j’ai un mix de tous les coachs que j’ai eus, Vahid Halilhodzic, Frédéric Antonetti, René Exbrayat, Guy Lacombe, Roland Gransart, et avec ça, garder sa propre personnalité.

Meilleur joueur entraîné ?
Wahbi Khazri.

Le joueur que tu aimerais entraîner ?
Ah… euh… (Il réfléchit) Tu veux parler de mon fils, non ? (Jérémi Santini évolue à Toulon en N2). Je sais ce que c’est, je l’ai entraîné à Béziers. J’ai eu la chance de l’entraîner. C’est un plaisir tous les jours. Faut le ralentir, le freiner, il est à 100 % pendant une heure et demi, à l’entraînement, en match. Yann Marillat, qui était le gardien à Béziers (aujourd’hui au Puy Foot 43) me disait « Coach, si on ne sait pas que c’est votre fils, on ne peut pas le deviner ». Parfois, il disait « quel enc… ce coach ! » (Rires) Après, des joueurs comme ça, qui ne lâchent rien, qui se mettent minable, qui ne trichent jamais, j’en ai eus beaucoup. Quand j’étais joueur, les supporters à Bastia pouvait me dire que j’étais nul après un match mais que je n’avais rien lâché.

Un président ?
Jean-Pierre Scouarnec à Dunkerque. On a eu une relation extraordinaire, on est hyper potes, même si ça a été chaud quand on s’est quittés, très chaud même, mais ce n’est pas pour cela que l’on s’en veut. On en rigole aujourd’hui. On se parle souvent au téléphone.

Ta philosophie de jeu ? Ton style ?
J’aime les transitions, j’aime le jeu direct, j’aime le jeu très rapide, l’intensité, je n’aime pas la possession dans mon camp. J’aime le foot de Jurgen Klopp. Avec Saint-Brieuc l’an passé on avait trouvé cette vitesse.

Ton match référence avec toi sur le banc ?
Avec Saint-Brieuc, l’an passé, quand on a gagné 4 à 2 à Annecy.

Ton pire match avec toi sur le banc ?
L’année où Pau monte en Ligue 2, chez eux, on en prend 7 avec Béziers. On avait pris un rouge d’entrée. J’avais fait trois changements à la pause, je m’étais fait reprendre de volée par le président mais ils étaient en train de disjoncter et je savais que j’allais avoir besoin de ces joueurs-là pour les matchs suivants.

Tu es un entraîneur plutôt…
Casse-couilles (rires) ! Bienveillant. J’ai pris un peu de tous les entraîneurs que j’ai eus, qui étaient un peu fous. J’essaie de rester ce que je suis, honnête, droit, et si ça ne marche pas, ce n’est pas grave.

Tes passions, en dehors du foot ?
J’aime bien le golf, même si j’y joue rarement, et j’aime bien regarder le sport à la télé. Tous les sports. J’essaie de trouver des choses qui peuvent m’apporter pour le foot. Je me souviens de Malik Tchokounté, que j’ai eu à 19 ans à Calvi, un jour je lui avais dit « ton jeu de jambes, ce n’est pas bon, regarde Roland-Garros », et il a appris.

Le milieu du foot, en deux mots ?
Je n’ai pas envie de le dire mais je le dis quand même, plein d’argent, mais… Je n’ai jamais pensé à l’argent, juste à mon métier de footballeur, d’entraîneur. Aujourd’hui, l’argent a bouffé 99 % de jeunes joueurs à cause de leurs parents qui veulent gagner plus en se mettant à leur place. Je ne vais presque plus dans les stades. J’allais rarement voir mon fils jouer. Il n’y a plus le « On perd ensemble, on gagne ensemble », c’est devenu « C’est de sa faute à lui, il n’a pas fait la passe à mon fils, c’est de la faute du gardien… » Chez les jeunes, ça a tellement changé, c’est beaucoup de la faute des parents et des agents aussi. Le foot, c’est le plaisir, c’est l’amusement, bien sûr que plus on monte, plus il y a de la pression, par rapport à l’argent, mais il faut prendre son pied. J’ai commencé à jouer en jeunes au PSG, je m’éclatais, il n’y avait pas de remarque désobligeante, on ne disait pas « c’est de ta faute si on a pris un but ». Tout ça, ça a changé. Quand j’ai commencé à entraîner les jeunes à Bastia, les 13 ou 14 ans, ce n’était pas comme ça. Aujourd’hui , je ne sais pas comment je réagirais.

Texte : Anthony Boyer / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06
Photos : Philippe Le Brech