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David Faderne : « Corte, c’est une vraie famille ! »

Après avoir fait vibrer le stade François-Coty avec l’AC Ajaccio, où il a ensuite démarré sa carrière d’entraîneur chez les jeunes, le Messin a poursuivi sa carrière sur l’île de Beauté. Cet été, il a entamé sa 8e saison consécutive sur le banc du stade Santos Manfredi, à l’US Corte, en National 3.

L’AC Ajaccio, lors de la saison 1999-2000, année de l’accession en Ligue 1. David Faderne est 4e en haut en partant de la gauche.

Le culte de la gagne. Voilà ce qui anime David Faderne. Le natif de Metz (52 ans) fait partie du cercle très fermé des joueurs ayant connu quatre montées au sein d’un même club. De N3 en N2, de N2 en National, puis en Ligue 2 (67 matchs et 28 buts en deux saisons !) et enfin en Ligue 1, l’ex-attaquant de l’ACA a souvent fait exploser le stade François-Coty.
L’actuel coach Cortenais a démarré sa carrière de joueur dans sa ville natale, à Metz. Non pas chez les Grenats mais du côté de l’ASPTT Metz, qui a formé un certain Sylvain Kastendeuch ou encore Eric Bertrand, qui ont par la suite tous les deux évolué au FC Metz.
Si le corse d’adoption n’a pas foulé la pelouse du stade Saint-Symphorien, chez lui, dans sa ville, avec les pros, l’attaquant fan des « Papinades » a trouvé un autre club, Blénod, en Division 4, à 30 kilomètres de chez lui, pour voir sa carrière décoller en 1989. Aujourd’hui, il parle ce passage comme « le meilleur choix » de sa carrière. Dans le club qui a connu une saison en Division (1982-83) et disputé deux 8es de finale de coupe de France en 1996 (alors en N3, le club fut éliminé par l’Olympique de Marseille) et en 1986, David Faderne dispute deux saisons pleines et inscrit la bagatelle de 33 buts ! Des « stats » qui lui permettent de tomber dans la marmite du monde professionnel, d’abord à Gueugnon en D2 en 1992, puis à Amiens en 1993. La suite, on la connaît !

« Je suis arrivé en Division 1 trop tard, à 30 ans »

Pourquoi n’as-tu jamais joué en pro au FC Metz, dans ta ville ?
J’ai y ai joué lorsque j’étais jeune, en cadets Nationaux. Je n’y suis pas resté car je voulais entrer au centre de formation mais toutes les places étaient prises par des joueurs de l’extérieur. La politique de l’époque m’a beaucoup déplu. J’étais attaquant, je marquais pas mal de buts et j’estimais que je devais intégrer le centre pour progresser. Le problème, c’était vraiment cette politique de Metz à l’époque, qui était de faire venir des joueurs d’un peu partout, ce qui change d’aujourd’hui.

Tu as fait un passage au SC Bastia pendant une saison avec très peu de temps de jeu. Que s’est-il passé ?
Quand je suis arrivé à Bastia, je n’ai pas pu effectuer la préparation. Je sortais de deux saisons pleines avec l’ACA où j’avais mis 13 puis 15 buts. Pas mal de clubs me voulaient et je ne voulais pas me tromper. Je suis parti faire des essais en Angleterre, en Italie et en Ecosse et j’ai choisi Bastia fin septembre alors que le championnat avait déjà démarré et que l’équipe marchait super bien. En plus de ça, j’étais en concurrence avec des attaquants comme Pierre-Yves André ou Pierre Laurent, ce n’était pas n’importe qui.

Tu as une grosse expérience en D2, assez peu en D1. Qu’est-ce qui t’a manqué selon toi pour t’installer au plus haut niveau ?
Il aurait fallu que j’y joue plus tôt. Je suis arrivé en première division avec Bastia lorsque j’avais 30 ans. J’ai débarqué dans une équipe qui tournait super bien, avec de grands attaquants, c’était compliqué de jouer. Après, quand je suis retourné à l’AC Ajaccio, le club était certes en première division, mais j’avais 32 ans et j’étais plutôt sur la fin. Ce qu’il m’a manqué, c’est vraiment de jouer plus jeune, peut-être entre mes 22 et 28 ans où j’étais nettement mieux physiquement. Pour un attaquant, c’est plus difficile que pour un défenseur ou un milieu de terrain car le championnat était très relevé, il y avait très peu d’espaces.

« Corte n’a pas les épaules pour jouer la montée »

Devenir entraîneur, c’était une suite logique pour toi ?
A la fin de ma carrière professionnelle à l’AC Ajaccio, Michel Moretti, président à l’époque, m’a proposé de donner un coup de main au centre de formation et j’ai commencé par faire des entraînements spécifiques pour les attaquants. Par la suite, un éducateur chez les débutants est parti et j’ai pris la relève. L’année suivante, j’ai pris en charge les U15, puis les U19 Nationaux et, de fil en aiguille, je me suis rendu compte que c’était quelque chose qui me plaisait ! Je suis resté 10 ans à l’ACA, avec la formation. J’avais envie de transmettre, de voir si mes idées pouvaient coller, de faire progresser des joueurs. Finalement, ce sont les événements qui ont fait que je suis devenu entraîneur. Je n’avais pas envie de tourner le dos à mon sport non plus, je suis un passionné et avant d’être pro, j’étais un gamin acharné de football. Cette passion reste intacte et on n’a pas envie de faire autre chose lorsqu’on a vécu dans ce milieu-là toute sa vie.

Tu es inscrit dans le projet de l’US Corte depuis un moment maintenant. On en est où ?
C’est ma 8e saison à Corte. On a construit un projet qui s’est mis en place tout doucement. On était en Régional 1 avec une équipe moyenne la première année. Cette équipe est devenue meilleure en travaillant chaque jour sur des principes de jeu. Néanmoins, on savait que l’un des axes les plus importants était le recrutement. On savait que si on voulait monter dans un championnat national (N3), il fallait passer d’une équipe moyenne de R1 à une équipe forte, ce qui a pris quelques saisons. Tout ce travail fait qu’on a été champion de Corse deux années d’affilée. Après les années Covid, on a de nouveau attaqué ce championnat de N3 l’année dernière avec le même groupe. On avait fait un bon début de championnat avant de souffrir d’une succession de blessures, ce qui a eu des conséquences sur l’effectif, décimé. A ce moment-là, on avait seulement dix joueurs de champ à notre disposition. A la trêve, on était relégable, tout le monde nous voyait condamnés. Lors de la deuxième partie de saison, on s’est maintenu à trois journées de la fin, en réalisant notamment une série de 6 victoires en 7 matchs.

L’objectif de Corte, cette saison ?
L’objectif reste le maintien. On est à Corte, on n’a pas les moyens dont disposent certains clubs et il y a des grosses écuries dans notre championnat. Il y a encore Cannes, le GFC Ajaccio ou Istres et tant qu’il y aura des clubs comme ça, il sera compliqué de voir nos ambitions à la hausse. Néanmoins, Furiani a prouvé l’année dernière qu’il était possible de finir en tête du championnat et monter en National 2, avec des moyens bien moins importants. L’objectif est d’être de plus en plus costauds, pour peut-être avoir des ambitions dans les prochaines années. A l’heure actuelle, on n’a pas les épaules pour jouer la montée.

« On s’est fait voler un titre et une accession en N3 »

En 2019, Corte avait gagné son billet pour le National 3 avant que la FFF n’annule votre accession. Après coup, quel sentiment t’anime ?
On s’est fait voler un titre. Fin de saison 2018-2019, nous sommes champions de R1. Trois jours après la fin du championnat, la FFF nous retire notre titre et l’attribue au second, le FC Balagne (Île Rousse), qui avait fait porté des réclamations sur des joueurs, sur un match qu’ils avaient perdu. La Ligue Corse confirme leur défaite par deux fois mais la Fédération donne victoire à la Balagne. On nous a donc volés le titre. On a choisi d’aller devant le tribunal administratif et il s’avère qu’il nous a donnés raison. On est réintégré en N3 mais trois jours avant le début du championnat, la Fédé nous a ressortis du groupe N3 pour remettre la Balagne ! La FFF est allée à l’encontre d’une décision du tribunal administratif. On n’a pas lâché, on a refait appel, le tribunal administratif nous a encore une fois donnés raison. Malheureusement, le championnat avait déjà commencé et il a été estimé qu’il n’y avait pas d’urgence. Nous voilà repartis en Régional 1. C’était très dur pour nous psychologiquement en sachant qu’on devait recevoir Mandelieu le samedi en National 3 et que le président vient nous voir à l’entraînement le mercredi pour nous dire qu’on va rester en R1. Après tout ça, on est quand même resté debout en finissant la saison invaincue et en montant en National 3. La morale de l’histoire, c’est que l’on est montés l’année ou le FC Balagne est redescendu en Régional 1.

« En coupe de France, il y a un problème d’inégalité sportive pour les clubs corses »

Entraîner sur le continent, ça fait partie de tes projets ?
Je suis arrivé en Corse en 1995 en signant à l’AC Ajaccio. Je pensais que ça n’allait durer qu’un an et je suis encore sur l’île de beauté 27 ans plus tard ! J’ai acheté un appartement à Ajaccio, ma femme est ajaccienne, mon frère a fait sa vie ici aussi. Je ne peux pas vous dire que je n’irai jamais entraîner sur le continent mais je serais étonné si je devais quitter la Corse et encore plus Corte. J’ai trouvé un club et des gens qui m’ont accueilli comme si j’étais des leurs, c’est une famille et je le vis réellement, ce ne sont pas que des paroles. Beaucoup de clubs s’identifient comme « club familial » mais assez peu le sont vraiment finalement.

Récemment, tu as fustigé le règlement de la coupe de France qui, selon toi, défavorise les clubs corses…
En Corse, on est désavantagé. Là, à ce stade, au 5e tour, on a une demi-finale régionale avec Furiani, qui est en National 2, et qui affronte Borgo, qui évolue en National. Par exemple, j’ai comparé avec la Ligue du Grand-Est, où il y a des R3, des R4, des clubs de district alors que chez nous, on n’a que des équipes du championnat de France amateurs (National, N2 et N3) et de Régional 1. Les équipes corses « basculent » sur le continent au 6e tour or je pense que l’on devrait être « rebasculé » plus tôt avec la Méditerranée pour une meilleure équité sportive. Le FC Balagne (N3) est déjà éliminée, nous aussi, et là, avec le choc Furiani-Borgo, il va encore y avoir un « gros » qui va être éliminé. Si on regarde au niveau sportif, on est désavantagé. Il y a deux ans, pour passer, on avait le GFCA, Furiani, Bastia Borgo et le SC Bastia. Ce qui veut dire que si vous tombez contre Bastia Borgo en demi-finale régionale et que vous faites un exploit en l’emportant, vous pouvez prendre le SC Bastia au tour d’après et il faudra refaire un exploit avant d’aller au 6e tour sur le continent pour jouer contre des R2, des R3, etc. Si on récapitule, seulement 4 clubs peuvent représenter la Corse sur le continent : deux clubs à partir du niveau National et 2 clubs pro, le SC Bastia (qui rentre au 7e tour) et l’AC Ajaccio (qui rentre au 8e tour). Le problème c’est qu’on ne peut pas en avoir plus, c’est 4 maximum. C’est forcément frustrant. Pour ma part, la Coupe de France ne m’intéresse pas du tout, c’est un support de travail, rien de plus. Je sais pertinemment qu’il faut faire deux voire trois exploits pour passer, c’est pratiquement mission impossible. C’est un débat qui mérite d’être posé. Pour avoir vécu la Coupe de France sur le continent, on a envie de flamber et on se dit que c’est possible sans être obligé de multiplier les exploits. En Corse, des clubs ne s’inscrivent pas alors qu’ils sont en Régional 1, car ils savent que c’est impossible. Il y a un vrai problème de fond qui n’est pas soulevé.

David Faderne, du tac au tac

Meilleur souvenir sportif ?
La montée en Ligue 2 avec l’AC Ajaccio

Ton plus beau but ?
Un ciseau retourné avec Blénod dans un derby

Le club où tu as failli signer, où tu aurais pu signer ?
A l’AS Nancy Lorraine, par deux fois.

Le meilleur joueur avec lequel tu as évolué ?
Xavier Gravelaine, mais il y en a beaucoup d’autres.

Une causerie de coach marquante ?
Celle de Rolland Courbis, à Lucciana, à l’hôtel « Chez Walter », avant un derby à Bastia !

Une anecdote de vestiaire que tu n’as jamais racontée ?
Ce qu’il se passe au vestiaire reste au vestiaire !

Texte : Melvin Brun / Mail : mbrun@13heuresfoot.fr / Twitter : @melv1br1