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Arthur Léonard : « J’ai façonné Foot Multiple à mon image ! »

À 28 ans, ce jeune créateur de contenus, qui anime une communauté de près de 250 000 followers, va quitter son métier de criminologue pour son autre passion, le foot. Son réseau social a pris une telle ampleur qu’il a décidé de pleinement s’y consacrer. Et d’en vivre !

« Sur tous les terrains, pour donner la parole à tous les acteurs ». Voilà ce que l’on peut lire sur la page d’accueil Facebook de « Foot Multiple », le réseau social qui prend une ampleur folle dans le milieu du foot amateur et pro. Ce slogan, 13heuresfoot pourrait le revendiquer tant il résume également sa philosophie.

Avec près de 210 000 followers sur Facebook, 15 000 sur X (ex-twitter) et 13 000 sur Instagram, Foot multiple jouit d’une communauté sans cesse grandissante qui suit les pérégrinations d’Arthur Léonard, un globe trotter qui partage sa vie entre son travail – et oui, il a un métier – et sa passion pour le football : « mon truc, c’est de faire vivre mon aventure, qui tourne autour du football de tous les niveaux, et de partager au maximum des émotions, des ressentis. L’idée c’est d’offrir autre chose, une approche différente, avec ma sensibilité ».

Plus qu’un nom, une marque

A 28 ans, Arthur est devenu, en l’espace de 4 ans, une référence des réseaux sociaux avec son concept, spécialisé dans la création de contenus, et exclusivement consacré au ballon rond, ou plutôt à tous les ballons ronds, aussi bien ceux du niveau départemental que national, aussi bien ceux de District que de Ligue 1 ! Un concept mûrement réfléchi, né d’une réflexion simple : « J’en avais marre que les médias ne parlent que de l’OM, du PSG et de Lyon, raconte le natif de Rouen, en Seine-Maritime, qui n’hésite pas à faire le lien avec 13heuresfoot, et pour qui, à l’instar de notre site, « la passion n’a pas (non plus) de division ! »; clairement, de ce point de vue là, on se rejoint avec 13heuresfoot ! Ma page, elle, parle plus de Sochaux que du PSG. J’avais en tête de lancer un projet sur le foot amateur parce que, hormis deux ou trois médias, personne n’en parle, ça manque de visibilité. Surtout, je voulais parler de tout, aborder les multiples facettes du foot, d’où le nom « Foot Multiple ».

Un nom devenu une marque puisque, récemment, Arthur a signé un partenariat avec l’équipementier « Esprit d’équipe 76 », une jeune entreprise lancée par Clément Bassin et Valentin Sanson, deux joueurs emblématiques du FC Rouen. Dorénavant, Arthur a également sa gamme de vêtement, avec son logo « FM » ! Encore une nouvelle étape dans le développement de son activité, qu’il mène toujours en parallèle avec son métier de criminologue, mais plus pour longtemps.

En prison la semaine, au foot le week-end !

En résumé, du lundi au vendredi, Arthur bosse, et le week-end, Arthur… bosse ! C’est juste le terrain de jeu qui diffère : il passe des prisons aux prés verts. Parce que son boulot, qu’il assure aimer, adorer, il va pourtant le quitter et se lancer à fond dans « Foot Multiple ». « Je bosse pour une boîte qui, elle même, bosse pour le Tribunal de Paris. Je mène des enquêtes de personnalité pour des affaires criminelles. Je dis souvent, « la semaine je fais le tour des prisons et le week-end je fais le tour des stades ! » Un métier qui allie une autre de ses passions : l’écriture. « Il y a beaucoup de rédaction, poursuit-il; on se rend en prison, on retrace le parcours de vie d’une personne en rétention ou accusée d’un meurtre ou d’un viol, par exemple, et cela participe à l’enquête criminelle. On retrace vraiment le parcours de vie, l’enfance, la scolarité, la vie familiale, sociale, sentimentale, professionnelle, amicale, etc. Ensuite, on vérifie ce qu’elle nous a dit. Et après, on passe aux assises. Le criminologue est là pour individualiser la peine mais il est neutre. J’adore mon métier. C’est très intéressant intellectuellement. On est dans l’humain, même si ça touche au juridique. On est là pour servir la personne, on parle de tout avec elle, sauf des raisons pour lesquelles elle est poursuivie. On est là pour individualiser la peine aussi, mais on est neutre. »

Concours d’avocat et Covid…

Arthur, qui a joué au foot « à pas mal de postes ! » au niveau départemental de l’âge de 5 à 17 ans (principalement à Bois-Guillaume et Mont-Saint-Aignan), avant de pratiquer le tennis de table pendant 8 ans à l’échelle régionale (Franqueville-Saint-Pierre, Bois-Guillaume, Saint-Maur-des-Fossés), rêvait d’être avocat.

Étudiant en Droit à Rouen, il s’est spécialisé dans le pénal en Master avant d’échouer, de peu, au concours d’avocat en septembre 2019, puis de renoncer à repasser le concours un an plus tard, « au grand dam de mes parents ! Parce que c’est à ce moment-là que j’ai lancé Foot Multiple ».

Mars 2020. C’est la période Covid. La France est confinée. Arthur a du temps. Il en profite pour mûrir puis lancer son projet : « J’ai toujours été attiré par le football et l’écriture, et là, avec le confinement, alors que je prépare pour la deuxième fois le concours d’avocat pour septembre, j’ai tout le loisir de lancer un truc, et je décide de prendre une année blanche pour lancer Foot multiple. Ma mère est tombée de 20 étages quand je lui ai annoncé ça ! Avec le recul, je comprends. Mes parents, qui me voyaient avocat, ont vraiment été complaisants. Quand je me suis lancé, je me suis dit, « s’il faut, dans deux mois, c’est fini mon truc » ! Mais j avais vraiment une idée en tête. »

Premier reportage en campagne

La première étape, c’est la création d’un site internet, mais, rapidement, Arthur le ferme, car il s’aperçoit que Foot Multiple fonctionne beaucoup mieux sur Twitter et Facebook où, un an et demi après le lancement, il compte rapidement des dizaines de milliers de followers. « Je ne fais pas beaucoup de montages or sur « Insta », il faudrait que les vidéos soient plus travaillées pour que cela prenne un peu plus, mais pour ce que je fais, je pense que Facebook est mieux adapté. »

Son premier reportage ? « J’étais allé à Saint-Martin-de-Boscherville, dans la campagne rouennaise, suivre un club de district, quand j’avais 100 abonnés. Ils m’avaient ouvert les portes de leur vestiaire pour un match de coupe de France. J’y suis retourné l’été dernier, trois ans après, pour faire le même reportage, mais cette fois avec ma grosse communauté ! Ils avaient été surpris de me revoir ! C’est typiquement le genre de reportage qui marche beaucoup mieux que si je vais au Parc des Princes. C’est cette idée de « multiple » que je défend, il n’y a pas de hiérarchie, on en revient toujours à ça. Il faut dire aussi que sur les rencontres pros, il y a plein de problématiques : en novembre dernier, à Nantes, ma page Facebook avait été suspendue parce j’avais filmé les joueurs avec le public et un prestataire de la LFP (Ligue de football professionnel) s’était plaint du contenu. L’histoire a pris une ampleur folle sur Twitter ! C’est là aussi que j’ai vu à quel point les gens aimaient ce que je faisais, avaient accroché, et aussi le pouvoir de Twitter, dont les nombreux messages ont permis que je récupère ma page Facebook. Bon, ça s’est arrangé, même si cela a pris 10 jours… »

Fan de l’AJ Auxerre

Présent sur les réseaux, Arthur l’est aussi sur les stades, dans les vestiaires pour des causeries de coachs ou des moments intimes, en tribunes avec les supporters, histoire de faire découvrir d’autres facettes du milieu. « Généralement, les clubs sont fermés et n’aiment pas divulguer ce genre d’images. Chez les pros, ce n’est même pas possible du tout en raison de la télé et des droits. C’est dommage. »

Forcément, pour se lancer à fond dans une telle aventure, il faut être mordu : et là, son rapport passionnel avec le foot ressort ! Il date même de ses 5 ans : « Tout est parti d’Auxerre, rembobine Arthur; mes grands-parents maternels sont installés là-bas. J’y allais aux vacances scolaires et, forcément, à Auxerre, bah, on t’emmène au foot, qui tient une place importante dans la ville et dans son économie. J’assiste à un entraînement avec eux puis je vais à mon premier match, c’était AJA-Sedan, à l’été 2001, quand Auxerre était dans le top 3 des clubs français. C’était facile de tomber amoureux du club. »

Arthur, amoureux de l’AJA et du … FC Rouen, sa ville natale ? « L’AJ Auxerre, c’est mon club de coeur, Rouen, c’est ma ville, et là, pareil, j’allais voir les matchs à Diochon avec mon père ! Et depuis que j’ai lancé Foot Multiple, je me suis rapproché du FCR, qui m’a ouvert plein de portes. Mais si demain il y a un match Auxerre-Rouen, je serai pour Auxerre, et ça, les supporters du FCR le savent ! »

« Je fais le choix du rêve ! »

Quatre ans pile après s’être lancé, Arthur va passer un cap. C’est décidé, il va consacrer tout son temps à Foot Multiple et abandonner son travail. « C’est une question de semaines. J’ai prévenu mon employeur et ma famille. Ce que j’ai créé, je souhaite que ça devienne un vrai truc, le faire sérieusement. Oui, j’aime mon job mais là, je vis mon rêve, alors à choisir, je fais le choix du rêve ! J’aurai enfin du temps pour faire tout ce que je n’ai pas le temps de faire, parce c’est la course tout le temps, et puis j’ai étoffé mes contacts. »

Forcément, à partir du moment où Foot Multiple sera bien plus qu’un simple réseau social mais une entreprise à part entière, la pression dépassera peut-être la passion : « En fait, là, avec mon boulot et ce que génère déjà Foot multiple d’un point de vue financier, je suis dans un confort qui me permet d’aller à gauche et à droite, mais quand je vais passer à temps plein, il faudra faire attention, poursuit celui qui, voilà quelques années encore, faisait des baby-sittings à Rouen pour payer le loyer lorsqu’il décida de repasser le concours d’avocat. Ce n’est pas kamikaze. C’est un peu stressant car je serai obligé d’avoir des résultats, mais en même temps, j’ai eu des ouvertures que je n’ai pas approfondies par manque de temps. Je me suis fixé fin mars / début avril pour poser ma démission. Ma mère ? Elle est en mode « vis ton truc » ! »

Un tour de France des stades de L1

Grâce à des partenariats d’influence marketing, il a pu, l’an passé, lancer son projet de « Tour de France des clubs de Ligue 1 », une étape importante dans le développement de FM. « Je fais de la publicité pour des partenaires et en échange, ils m’aident financièrement. J’ai pu me rendre sur tous les stades de L1 et la plupart de L2 même si je ne suis pas encore allé à Annecy, Grenoble ou Dunkerque. »

L’auto-entrepreneur, qui était au Stadium de Toulouse dimanche pour faire vivre à sa communauté la rencontre de L1 entre le Téfécé et l’OGC Nice, avant de repartir au boulot en TGV au Tribunal de Grande Instance de Bobigny lundi matin, a bien pensé s’associer : « Mais j’ai façonné Foot Multiple à mon image et aujourd’hui, ce serait compliqué de dire « On est deux » ou « on est trois », car les gens suivent mes aventures. En fait, sans m’en rendre compte au départ, j’ai créé une sorte de storytelling et les gens ont aimé ma manière d’amener les choses, de raconter mes histoires, de mettre en avant tout ça. C’est ce qui a participé au fait que ça marche bien. »

Tellement bien qu’il envisage de s’entourer d’une équipe, ne serait-ce que pour améliorer techniquement la forme et les contenus et explorer d’autres pistes. Et puis il y a la partie business : « Ce n’est pas mon domaine. Là aussi, il faut que je sois entouré pour ça, ne serait-ce que pour mieux négocier des contrats de partenariat. »

Le regard des médias

Mais le revers de la médaille existe. C’est la perception des médias. Plus ou moins positive. Arthur n’est pas toujours le bienvenu ni même bien vu par la corporation des journalistes. « Mais pour qui il se prend celui-là ? Il n’a pas de carte de presse », « Comment il a pu obtenir une accréditation ? », telles sont les remarques que l’on entend régulièrement. « Il y a même eu des débats qui se sont organisés sur Twitter autour de l’utilité qu’avait Foot Multiple ! J’ai mal vécu certains événements, avec des « haters », mais on va dire que c’est le jeu des réseaux. Un gars a écrit « Je suis journaliste, j’ai une carte de presse, je n’ai pas pu être accrédité… et je trouve ça « ouf » que Arthur de Foot multiple soit allé dans les vestiaires de Dieppe, alors que moi, on m’a refusé l’accès au stade ». Ce tweet a crée un immense débat. Les journalistes se sont immiscés dans la conversation et s’en sont pris à Stadito (Stadito Football est un youtubeur) et à moi. Mais Dieppe, je les suivais depuis plusieurs tours et j’étais là quand il n’y avait personne, au 5e tour de la coupe, sous la pluie. Et y’a 10 jours, je suis allé voir des féminines et des U18, donc bon… Et puis avant d’avoir les vestiaires ouverts, j’ai « douillé ». J’ai « bouffé » beaucoup de refus ! Je n’avais le droit d’aller nulle part. Alors bien sûr, je comprends le débat, mais les gens ne voient pas le travail en amont. »

« J’aime écrire »

Heureusement pour Arthur, de plus en plus de clubs « s’ouvrent » et permettent à des créateurs de contenus comme lui de partager leur activité sur les réseaux sociaux : « Globalement, je suis très bien accueilli. Les chargés de communication gardent un oeil sur ce que je fais. En fait, mon activité peut s’ajouter à leur travail, dans la mesure où cela donne une autre visibilité, où cela touche d’autres personnes et élargit leur champ de communication. C’est un peu par intérêt. »

Les médias, pour en revenir à eux, restent partagés, et sont plus ou moins réceptifs à ce qui se fait de plus en plus sur les réseaux : « Certains trouvent que ça apporte un vent de fraîcheur, d’autres sont plus « ancienne école » et pour eux, le journalisme, c’est comme ça, et ça ne doit pas être autrement. Du coup, ils sont en mode « qu’est-ce qu’il fout là lui ? » et j’ai déjà ressenti ça en tribune de presse, je le comprends. Je trouve que c’est dommage, parce que ce que font les journalistes, c’est très important. Leur travail et le mien peuvent continuer à avancer ensemble. »

Du coup, l’ambition d’Arthur serait-elle de devenir un média à part entière ? « J’aime écrire, parce que c’est 80 % de mon métier actuel. C’est ce qui fait la différence avec d’autres créateurs de contenus qui sont plus axés vidéos ou photos. Je suis un peu entre les deux, parce que sur Facebook, où je suis très présent, j’écris énormément, je fais des grands débriefs, du coup, certains font l’amalgame. Mais je ne suis pas journaliste, parce qu’il y a beaucoup de codes. Par exemple, quand il y a eu le problème du prix des places au stade Diochon pour Rouen – Toulouse en coupe de France, j’ai écrit fait un texte pour dénoncer les tarifs aberrants et ça a pris une ampleur considérable, qui m’a même dépassé. J’ai dit « Je n’irai pas au match » par respect pour les supporters. Je suis allé à l’entraînement du FCR, j’ai filmé le discours du capitaine Clément Bassin qui a été repris partout… Je ne suis pas journaliste, j’ai cette liberté là, même si je ne me suis pas fait que des amis au club de Rouen. »

A 18 ans, Arthur s’était fait tatouer sur son avant bras gauche la phrase suivante : « Rien n’est jamais hors de portée ». Dix ans plus tard, sa devise résonne comme une évidence. « J’ai toujours eu envie de faire un métier passion ».

Texte : Anthony BOYER

Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter :  @BOYERANTHONY06

Photos : DR

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