Propulsé sur le banc en mars dernier pour « sauver » le club provençal de la relégation en Régional 1, l’ancien milieu de terrain (Strasbourg, Orléans, Beauvais, Cannes, Martigues, Béziers) entend redonner ses lettres de noblesse à Istres, où il a connu très jeune la Ligue 1 et la Ligue 2, et s’extirper du National 3.
Paru le 3 octobre 2023 / par Anthony BOYER
Le retour au bercail. Dix ans après avoir laissé Istres en National, en 2009, Anthony Sichi (37 ans) est revenu dans le club où il a connu – un peu – la Ligue 1, où il a évolué en pro en Ligue 2. Pas suffisamment à son goût. Des choix de carrière, des conseillers pas toujours de bon conseil, et un parcours qui l’a ensuite conduit à Orléans, Beauvais, Strasbourg, où il a participé au renouveau du club, Cannes (avec un quart-de-finale de coupe de France contre Guingamp), Martigues puis Béziers, souvent en National, parfois en CFA (N2). Mais plus jamais en Ligue 2.
Pour son retour à Istres, en 2019, il a revêtu un autre costume : celui d’entraîneur. D’abord en U17 nationaux, pour sa première expérience en foot à 11 après avoir effectué ses armes dans le club de son village, au Rove, où il a été formé, puis des seniors National 3.
Mars 2023. Istres est, pour la deuxième saison de suite, mal en point dans son championnat : le président Laurent Thomas fait une nouvelle fois appel à « Antho » pour prendre les rênes de l’équipe et tenter l’opération maintien en N3, à la place de Fabrice Huart, comme il l’avait déjà fait un an plus tôt. Le club grappille des places et se sauve cette fois sur le terrain. En 2022, après avoir remplacé Frédéric Cravero, le désengagement de l’AS Monaco avait profité au Istres FC, relégué sur le terrain en R1 mais finalement repêché !
Revoilà donc le Istres Football-club en N3, un niveau bien loin de ce qu’il a connu, mais on ne se relève pas toujours facilement d’une rétrogradation administrative : tombé de National en CFA en 2015, le club, qui sortait de 30 ans de professionnalisme, a dû repartir en Division d’Honneur Régionale (R2).
Avec le natif de Marignane aux commandes, Istres espère déjà ne plus revivre le scénario compliqué des deux derniers exercices. Celui qui a ensuite grandi au Rove, un petit village niché entre Marseille et l’étang de Berre, n’a qu’une idée en tête : faire grandir son club et s’inspirer de l’AS Cannes, l’équipe qui avait survolé le National 3 la saison passée.
Pour l’heure, la saison est bien partie : en championnat, Istres a remporté ses trois premier matchs et s’est qualifié pour le 5e tour de la coupe de France en éliminant Ardziv (N3) sur le score de 6 à 2.
Sa méthode de travail, sa vision du foot, ses expériences, ses ambitions, son club : Anthony Sichi s’est longuement confié pour 13heuresfoot !
« On doit donner une meilleure image »
Anthony, revenons sur la fin de ta carrière pro, et ton retour dans le milieu amateur…
En 2016, après une saison à Béziers en National, avec Xavier Collin tout d’abord puis Mathieu Chabert ensuite, je suis venu à Fos-sur-Mer, en Régional 2, pour donner un coup de main et on est monté en Régional 1. Ensuite, j’ai pris le parti de basculer sur mon projet de reconversion, c’est pour ça que j’étais d’abord entraîneur-joueur au Rove, chez moi, dans le club où j’avais grandi. Le deal, c’était que je m’occupe des équipes de jeunes et que je donne un coup de main à l’équipe première. Je suis resté quatre saisons.
Comment s’est passé ce retour au Rove ?
En fait, j’emmenais mon fils Andrea au club (13 ans aujourd’hui, et il est aussi papa d’une petite Valentina, 10 ans), et un jour, Christian Rouzault, le président, m’a demandé de donner un coup de main chez les jeunes. La première année, j’avais l’équipe de mon fils, les touts petits, puis j’ai pris la catégorie U11 : on a gagné le tournoi de la Champion’s cup, le tournoi de Jean-Christophe Marquet et Sébastien Piocelle, avec la phase finale au Vélodrome. En finale, on a battu l’OM ! Pour le club, ça a été une génération dorée, on a presque tout gagné, et derrière, beaucoup ont été sollicités par des clubs pros. Ensuite, j’ai continué, on s’est fait « dépouiller » mais bon, on a labellisé le club, on a fait des partenariats comme avec l’OM « next generation », cela a été formateur. L’Olympique Rovenain, c’est le club qui m’a formé, qui m’a vu grandir, où j ai commencé à entraîner, qui m’a permis de monter d’un échelon.
« A Sedan, j’ai fait une dépression… »
Tu n’as jamais joué à l’OM…
Non… A la base, j’étais au FC Martigues, sous contrat aspirant stagiaire, quand le club était pro à l’époque, au début des années 2000. J’ai joué en 15 ans Nationaux pendant 2 ans puis le club a été rétrogradé administrativement en CFA (2003). Les joueurs ont été libérés. Je devais signer à Sedan comme stagiaire mais là-haut, j’ai fait une petite dépression, je suis rentré chez moi. Là, un ami de mon père, Jacques Rémy (ancien avant centre d’Istres, Grenoble, Strasbourg, Pau) lui dit « met ton fils à Istres chez les jeunes » et me voilà en U17 Nationaux à Istres. En fait, ici, j’étais tranquille, j’étais épanoui, et derrière, je suis monté avec les pros.
En 2009, tu quittes Istres et tu reviens en 2019 dans un autre rôle…
Le président, Laurent Thomas, m’a appelé. On se connaissait de l’époque, il jouait en réserve. Il m’a demandé si le poste d’entraîneur en U17 ans Nationaux m’intéressait, si je souhaitais prendre la suite de Didier Zanetti, qui partait à Montpellier (il entraîne aujourd’hui la réserve de l’AC Ajaccio). J’ai réfléchi et j’ai dit oui. Les 17 ans Nationaux, c’était un beau challenge, ça a duré 4 ans : la première saison on fait 8e, la 2e saison y’a la Covid, la 3e saison on fait 4e et l’an passé, on était 2e début mars quand je suis passé chez les seniors pour l’opération maintien avec l’équipe Une en National 3, à la place de Fabrice Huart.
Avec les 17 ans Nationaux, on se fixait chaque saison l’objectif d’être le premier club amateur de la poule au minimum, mais ce n’était pas facile au début car d’une part je n’avais jamais entraîné en foot à 11, d’autre part je ne connaissais pas ce niveau, parce que les « Nationaux », c’est relevé quand même… Et puis passer derrière Didier (Zanetti) qui avait fait du très bon boulot et avait placé la barre très haut, ce n’était pas simple. Mais ça s’est bien passé. Je me suis servi de mon expérience avec tous les coachs que j’ai eus pendant ma carrière de joueurs. Je remercie encore mon président pour la confiance qu’il ma donnée.
« On aurait dû descendre en R1… »
Istres est-il attractif chez les jeunes ?
Oui, on arrive à l’être grâce à nos structures, on a un centre d’hébergement, des horaires aménagés pour les gamins qui s’entraînent à 16h, on a des salles de cours pour les études le soir, ça aide, et ça fait la différence par rapport à d’autres clubs amateurs. On a vraiment des bons jeunes.
Début mars 2023, donc, tu reprends l’équipe Une, relégable en N3…
Oui. On est avant-dernier et pour mon premier match, on va à Cannes, chez le leader. On fait match nul 0-0 et derrière, on arrive à faire une petite série. Finalement, on se sauve, un an après avoir déjà failli descendre en Régional 1 : à l’époque, la réserve de l’AS Monaco n’avait pas souhaité engager son équipe en N3, du coup, on a été repêché et on s’est maintenu comme ça.
Istres en Régional 1, cela aurait constitué un sacré frein au projet…
Cela faisait deux ans que l’équipe de N3 était dans le dur. Maintenant, il faut que ça s’arrête. La situation a été compliquée à un moment donné, là, il fallait qu’on change notre fusil d’épaule, qu’on change notre méthodologie de travail. Même au niveau du club, il fallait changer des choses.
« C’est peut-être l’année ou jamais »
Le projet du Istres FC aujourd’hui, c’est quoi ?
Istres FC, c’est un club qui vit beaucoup grâce à la subvention de la commune d’Istres. On a la chance d’avoir le soutien de la Ville et de son maire, François Bernardini, qui aimerait que le club remonte à un niveau plus en rapport avec son passé. Le président, Laurent Thomas, ne fait pas n’importe quoi, ne fait pas de promesses qu’il ne peut pas tenir. Il fait avec les moyens qu’il a et il gère bien son club sur le plan financier.
On s’est fixé des objectifs à court terme, à moyen terme et à long terme. Le premier objectif, c’est de se maintenir rapidement en N3 pour ne pas revivre les scénarios des précédentes saisons, quand on transpirait jusqu’au bout. Ensuite, c’est la restructuration de la méthodologie de travail : on a rebasculé sur des séances d’entraînement le matin, comme chez les pros. Je me suis rendu compte la saison passée que l’AS Cannes était l’équipe la mieux structurée du championnat, celle qui avait aussi le plus de joueurs à disposition. Je veux m’inspirer un peu de ça. Cannes et Istres, ce sont des clubs un peu similaires, avec un passé, une structure, qui sont attractifs, qui jouent dans un « vrai » stade, même si nous on n’a pas de supporter. Donc il fallait penser à se professionnaliser un peu dans ce championnat amateur, et c’est ce qu’on a réussi à faire.
Je me suis entouré aussi de personnes, notamment au niveau du recrutement, on a pris quelques joueurs du niveau au-dessus, comme Yohan Mollo, qui était à Hyères la saison passée en N2 (il était pro avant à Monaco, Caen, Nancy, Saint-Etienne, Sochaux notamment), l’attaquant Julien Bègue (ex-Bourg-en-Bresse et Le Mans en L2) et le défenseur Baba Touré (ex-Toulon) qui a joué en National. On a ajouté des bons jeunes, qu’on avait ciblés, des joueurs « régionaux » que l’on connaissait, en y intégrant nos meilleurs jeunes. Le président a validé le projet que je lui ai présenté en amont de la saison. Je voulais un cadre plus pro : en s’entraînant le matin, j’ai des garçons qui sont plus attentifs et pas fatigués d’une journée de boulot, qui ne traînent pas des pieds. J’ai voulu avoir des garçons à disposition, uniquement pour le foot, qui pensent à leur récupération, leur alimentation, leurs soins, leur séance de musculation, etc. Dans le groupe, je dois avoir deux ou trois joueurs qui travaillent, et ils arrivent à s’arranger dans leur planning. On travaille sereinement, dans de bonnes conditions. On a mis en place un partenariat avec la structure « Skillfit Révolution » à Istres, une salle de sport complète. Là, on se rapproche vraiment du professionnalisme. Pour l’instant, ça se passe bien.
J’espère qu’on va pouvoir faire comme nos amis cannois la saison dernière (le club azuréen est monté en N2), on verra, mais déjà, il faut un maintien rapide. On est le « Istres FC », on doit donner une meilleure image. On s’est dit aussi que c’était peut-être l’année ou jamais, qu’il fallait faire un effort : avant, dans notre poule de N3, il y avait six clubs corses, c’était hyper-compliqué. Là, on a basculé avec des clubs de la région Occitanie, il n y a plus de cadors comme Cannes ou le Gazelec Ajaccio les années précédentes. C’est pour ça aussi que je me suis entouré d’Olivier Miannay, le manager général du Puy-en-Velay, que je connais depuis ma saison à Beauvais, où il m’avait fait venir comme joueur en National, puis un peu plus tard à Cannes aussi. C’est quelqu’un que je respecte beaucoup, qui a fait beaucoup d’accessions de N2 en National, et que j’ai présenté à mon président : il nous a aidés sur notre projet administratif et diplômant de formation et nous a donnés un coup de main sur le recrutement.
« Le National dans quelques années »
Istres a connu la Ligue 1 une saison mais surtout la Ligue 2 : c’est quoi sa place aujourd’hui sur l’échiquier du foot français ?
Aujourd’hui, on ne peut pas parler de retrouver le professionnalisme, il y a trop de paramètres qui entrent en ligne de compte. Mais on a un stade à Fos (Parsemain, 12 000 places), on a des structures d’entraînement avec cinq terrains en gazon au complexe Audibert, un terrain en gazon synthétique et bientôt un second, un centre d’hébergement pour les jeunes qui n’est peut-être pas tout neuf, mais qui est là…
Alors, quand je vois des clubs voisins comme le FC Martigues par exemple, qui fait du très bon boulot en équipe première, je me dis que Istres peut le faire aussi. Quand je retourne à Turcan (Martigues), ça fait plaisir de revoir du monde au stade. S’il y a des résultats et si tu produis du spectacle, à un moment donné, les gens vont revenir; à court terme, on peut remonter en National, mais il va falloir faire entrer des partenaires au club, il faudra d’autres mannes financières. On est un club attractif, où des investisseurs peuvent injecter de l’argent parce qu’il y a déjà une structure en place, des bases, et on a un passé. Maintenant, on ne peut pas parler de Ligue 2 aujourd’hui, parce que là c’est vraiment un palier au-dessus. Déjà, il faut viser le National dans quelques années, qui sera peut-être une Ligue 3 professionnelle. C’est un niveau plus en rapport avec les capacités actuelles du club.
Tu as cité l’exemple de Martigues, où tu as joué, mais pas Marignane-Gignac-Côte Bleue, où tu es né, et qui évolue en National aussi, comme Martigues…
Marignane, c’est un club qui est en train de se développer, qui fait avec ses moyens. C’est un des plus gros clubs en termes de licenciés, mais ça manque d’infrastructures. Nous, je l’ai dit, on a la chance d’avoir tout sur place, à Audibert, où toutes les équipes du club s’entraînent; à Marignane, ils vont s’entraîner un coup à gauche, un coup à droite, un coup à Carry, un autre à Sausset et puis il y a le stade d’honneur Saint-Exupéry, qui est compliqué pour eux, mais je respecte beaucoup leur travail, ça bosse très bien chez les jeunes. Je connais du monde là-bas. Mais, concrètement, ce n’est pas un club qui nous fait de l’ombre.
Combien pouvez-vous accueillir de jeunes au centre d’hébergement ?
On a une douzaine de chambres, donc on peut accueillir entre 20 et 25 joueurs, ça dépend des saisons. Il faut savoir qu’au Istres FC, on a toutes nos équipes au plus haut niveau régional, 18 R1, 16 R1, 15 R1 et 14 R1. On a aussi les U17 Nationaux et malheureusement on a perdu les U19 nationaux l’an passé.
On est une référence en termes de formation chez les jeunes. On est devenu un club tremplin pour les pros, qui viennent se servir chez nous. On ne peut plus conserver nos meilleurs éléments. Mais quand je vois Lucas Mincarelli qui fait ses premiers matchs en L1 avec Montpellier, quand je vois Zakaria Aris dans le groupe à Dijon ou Tony Strata à l’AC Ajaccio, des joueurs qui étaient chez nous ces dernières saisons, c’est une fierté et cela veut dire que l’on fait du bon boulot. Et des gamins comme ça, y’en a d’autres aux centres de formation à Nice ou à Monaco. C’est simple, ces dernières saisons, les gens disaient du FC Istres que c’était très bon chez les jeunes mais très compliqué pour l’équipe fanion seniors. Ils n’ont pas tort. Ces dernières années, sur la Ligue, on était le seul club à avoir toutes les catégories au plus haut niveau, à part l’OM. On est une référence. Martigues, par exemple, a une équipe seniors très performante mais est en difficulté sur les jeunes, et je sais qu’ils veulent restructurer ce secteur. Mais la formation, c’est un travail de longue haleine, sur plusieurs années.
Aujourd’hui, le club fonctionne toujours en association ?
Oui. Mais on pense à créer une SASP en cas de montée. Aujourd’hui, au niveau de l’association, le budget est coupé en deux, avec une partie pour les jeunes et une autre pour l’équipe première.
Il y a beaucoup de clubs au bord de l’étang de Berre : un rapprochement avec les voisins pour avoir une équipe pro, c’est envisageable ?
Alors, ce que j’en pense, de loin, parce que je ne suis pas dans ces discussions- là, c’est que, déjà, c’est politique. Les municipalités ne sont pas toutes du même bord. Après, pourquoi ne pas réunir, un jour, Istres et Martigues ? C’est sur que ça ferait le deuxième club sur le bassin marseillais, mais ce n’est pas d’actualité. Si un jour il doit y avoir une fusion, la seule qui puisse être à mon sens, c’est entre Istres et Martigues. Mais pas Fos. Ni Marignane, Ni Berre. On joue à Fos, c’est vrai, mais le stade Parsemain appartient à la Métropole.
On partage le stade avec l’ES Fos, on joue un week-end sur deux et chaque équipe se partage un vestiaire. Avec Fos, on est dans la bienveillance. Je connais bien Fred (Frédéric) Cravero, le coach : son but, et notre but, c’est de jouer nos matchs de championnat sur un bon terrain, donc c’est dans l’intérêt des deux clubs de s’entendre là-dessus. La veille de match, que cela soit Fos ou nous, on a droit à une séance à Parsemain, et pour les semaines avec nos matchs à domicile, on a droit à une séance en plus, mais c’est la séance en trop, finalement… Allez, si on a un match important, OK, mais on n’utilise pas toujours ce créneau, parce que sinon on va « massacrer » ce terrain et ce ne sera pas bénéfique pour nous le week-end. Franchement, il n’y a aucune mauvaise entente avec Fos. J’y ai joué et j’y ai des amis aussi dans ce club, et je suis content qu’il soit monté en N3. Après, si demain on a un stade de 5000 places à Istres, ça suffira largement, et on laissera Parsemain à Fos. Mais chaque chose en son temps.
Anthony Sichi, du tac au tac
« Je n’arrive pas à faire semblant »
Meilleur souvenir sportif ?
Mes années au Racing-club de Strasbourg avec les deux montées successives de N3 en N2 puis de N2 en National.
Pire souvenir sportif ?
A l’US Orléans, en National, j’ai eu beaucoup de blessures et puis c’était une une saison catastrophique dans tous les sens du terme, que cela soit sur un plan personnel et professionnel.
Plus beau but marqué ?
J’en ai deux en tête : un avec Istres au stade Parsemain contre l’AS Cannes, en National, l’année où on remonte en Ligue 2 (saison 2008-2009) : une reprise de volée en lucarne opposée, en dehors de la surface ! Et l’autre, quasiment du centre du terrain, avec l’AS Beauvais Oise, toujours en National, contre Moulins il me semble.
Combien de buts marqués ?
J’étais plutôt un passeur, un milieu relayeur et à Istres, j’ai même joué milieu défensif !
Pourquoi as-tu choisi d’être footballeur ?
Mon père est un fan de l’OM, il m’a emmené au stade Vélodrome très jeune, donc j’ai connu la grande époque de l’OM avec Papin, Waddle, la coupe d’Europe en 93 ! J’ai baigné là-dedans, ça m’a fait rêver et surtout, ça m’a donné envie de jouer. Parfois, je demande même à mon père ce qu’il m’a fait quand j’étais petit, s’il m’a piqué ou quoi (rires) ! Parce que le ballon, c’est toute ma vie ! Sans le football, je serais malheureux aujourd’hui.
Ton geste technique préféré ?
Je n’avais pas un geste en particulier, j’étais juste technique. J’aimais bien percuter balle au pieds, partir de loin.
Qualités et défauts sur un terrain, selon toi ?
Qualités, ma technique, ma vision du jeu, mon sens de l’organisation, mon volume de course, mais c’est vrai que je n’étais pas le plus rapide de l’équipe. En fait, ça dépendait du poste où je jouais : dans l’axe, je n’avais pas forcément besoin d’aller très vite. J’avais plus un rôle d’organisateur.
Et dans ta vie de tous les jours ?
Je n’arrive pas à faire semblant. Je suis entier, donc quand ça ne va pas avec quelqu’un ou quand je sens qu’une personne m’a trahi, que je n’ai plus sa confiance, alors je vais aller de front, et ça peut me porter préjudice. Après, dans mon travail, je suis impliqué à 200 % dans ce que je fais, je suis déterminé. Quand j’ai décidé quelque chose, je me donne les moyens d’y arriver. Je dirais aussi l’humilité.
Tu es un entraîneur plutôt…
Rigoureux.
C’est quoi la patte Anthony Sichi ?
J’essaie de prendre ce que j’aime de chaque entraîneur, je n’ai pas de style particulier. J’aime l’intensité du football anglais par exemple, alors je vais aller piocher des choses qui m’intéressent, j’aime la rigueur tactique du football italien, comme celle de l’entraîneur Antonio Conte, ou alors l’intensité que Jurgen Klopp mettait à Liverpool, mais je n’ai pas un coach en particulier qui me fasse rêver, je ne suis pas comme ça. Je prends et ensuite je mets avec mes idées football à moi.
L’équipe où tu as pris le plus de plaisir sur le terrain ?
(Il réfléchit longuement) Peut-être cette équipe d’Istres l’année où on remonte en Ligue 2. on était pourtant plus fort la saison d’avant, avec Olivier Giroud devant, Stéphane N’Guéma, Walid Mesloub, comme quoi, ça ne veut rien dire d’avoir une grosse équipe…
Le club où tu n’aurais pas dû signer ? L’erreur de casting de ta carrière ?
J’ai écouté les mauvaises personnes quand j’avais 18 ou 19 ans… A 19 ans, j’étais pro et je faisais mes débuts en Ligue 1 avec Istres, et après ça, j’ai fait confiance à des gens qui me conseillaient à l’époque, mais j’aurais dû prendre un peu plus de recul, je n’ai pas fait les bons choix. Si c’était à refaire, je referais différemment.
Un stade mythique pour toi ?
La Meinau (Strasbourg).
Parsemain (stade de Fos, où joue Istres), St-Exupéry (Marignane), Bardin (ancien stade d’Istres) ou Turcan (Martigues) ?
Parsemain, parce que c’est là-bas que j’ai vécu mes premiers grands moments, en L1 puis en L2, j’ai vu le stade plein, mais attention, j’ai un truc aussi pour Turcan, j’ai connu le club en Division 1, j’allais voir les Tholot, les Benarbia !
Un coéquipier marquant (si tu devais n’en citer qu’un), mais tu as droit à deux ou trois ?
David Lédy à Strasbourg, Olivier Giroud et Romain Ciaravino à Istres.
Le coéquipier avec lequel tu avais ou tu as le meilleur feeling sur le terrain ?
David Lédy.
Combien d’amis dans le foot ?
J’ai plein de potes dans le foot, mais mes vrais amis c’est Olivier (Giroud), Dav (Lédy) et Romain (Ciaravino). On est tout le temps en contact.
Le coéquipier qui t’a le plus impressionné ?
Olivier (Giroud) est très fort psychologiquement, c’est ce qui a fait la différence dans sa carrière; sa première saison, il met 14 buts en National avec Istres (en 2007-2008), ils nous a sortis de la panade quelques fois ! On avait Walid Mesloub, il était vraiment fort, et j’avais été impressionné aussi par un joueur au milieu qui avait signé à Bolton après, il arrivait de Lens, je ne me souviens plus de son nom.
Un coéquipier perdu de vue que tu aimerais revoir ?
A Strasbourg, on a l’association des anciens joueurs, qui nous réunit une ou deux fois par an, et on se revoit avec certains et ça fait toujours plaisir !
Un coach perdu de vue que tu aimerais revoir ?
Je l’ai revu il y a 2 ou 3 ans, quand je m’occupais des 17 ans Nationaux d’Istres et qu’on avait joué à Bordeaux, c’est Jean-Louis Gasset. C’est lui qui m’avait fait signer pro à Istres. C’est quelqu’un d’important pour moi. J’aimerais un jour que l’on puisse se poser autour d’un café, même si on a pu un peu le faire, mais j’ai plein de questions à lui poser, maintenant que je suis passé de l’autre côté de la barrière !
Un coach que tu n’as pas forcément envie de revoir ?
Je ne vais pas dire son nom, il doit être encore en activité, mais pas en France. Il est passé par pas mal de clubs pros, pas mal de centres de formation.
Un président ou un dirigeant marquant ?
J’en ai deux. « Mon » président de l’époque à Istres, Bertrand Benoît, qui est malheureusement décédé : il a emmené le club jusqu’en Ligue 1 ! Je le respectais énormément. Et aussi Marc Keller pour tout ce qu’il a fait à Strasbourg, c’est énorme, il a pérennisé le club, il a redonné une identité à ce club qui fait la fierté des Alsaciens.
Une causerie de coach marquante ?
Une causerie de François Keller à Strasbourg, juste avant la montée en National : on n’avait plus le droit à l’erreur sur les quatre derniers matchs je crois, et on affrontait les équipes de tête, comme La Duchère, Grenoble, la réserve du PSG et aussi Raon, le leader, pour le dernier match. Je crois qu’on venait de perdre 4 à 0 à domicile contre Moulins, un truc comme ça. C’était la crise. Le coach et les dirigeants ont eu des mots forts, on a pris conscience des choses et on a remis la machine en route.
Une anecdote de vestiaire que tu n’as jamais racontée ?
J’en ai un paquet ! Avec Istres, on s’entraînait le matin et Olivier (Giroud) lui, arrivait super tôt, une heure avant, alors qu’il venait déjà de se taper une heure de natation à la piscine, c’était un truc de fou ! On se moquait un peu de lui par rapport à ça, mais c’était une machine de guerre !
Le joueur le plus connu de ton répertoire ?
Le plus connu c’est Oliv (Giroud).
Que t-a-t-il manqué pour être un bon joueur de Ligue 2 ?
Le club d’Istres m’a fait confiance quand on est descendu de Ligue 1 en Ligue 2, j’étais un jeune joueur, j’étais sous contrat, j’ai re-prolongé, j’étais bien parti, mais à un moment donné… Quand je sors de deux saisons en Ligue 2, je joue quasiment titulaire à tous les matchs, j’avais des clubs qui étaient sur moi, j’aurais dû partir. Seulement j’ai voulu rester près de ma famille, avec mes amis à côté. Il aurait fallu que je vole de mes propres ailes : si j’avais fait ça, je pense que j’aurais eu une autre carrière. Et puis, lors de ma dernière saison à Istres, j’ai eu une pubalgie qui m’a perturbé pendant 6 mois, et j’ai eu du mal à revenir. Elle m’a freiné dans ma progression. J’ai dû rebondir en National et derrière, je n’ai pas réussi à retrouver la Ligue 2. Je n’ai pas non plus joué dans des clubs qui sont montés en L2, donc voilà, c’est comme ça.
Des idoles de jeunesse ?
Papin, Waddle, Zizou, Ronaldo le Brésilien.
Un modèle de milieu de terrain ?
Iniesta, Xavi. J’aime bien le jeu combiné, le jeu réduit, avec les redoublements de passe.
Un match de légende, pour toi ?
C’est à la coupe du monde 2006, le 1/4 de finale France-Brésil, Zizou avait été incroyable.
Le métier de coach ?
Un métier où on est impliqué 24 heures sur 24. Cela n’a rien à voir avec la carrière de joueur. Quand on passe de l’autre côté, on se rend compte à quel point c’est prenant, fatigant sur le plan psychologique, alors que l’on n’est pourtant qu’en National 3. Mais quand tu es joueur, tu viens, tu poses ton sac, tu t’entraînes, tu repars, tu fais tes soins, alors que là, tu penses à tout, à la séance, à l’équipe, à la récupération, à la partie athlétique, à la DATA, surtout maintenant, on a de plus en plus d’outils pour travailler, les staffs sont de plus en plus étoffés, on a de plus en plus de choses à penser et quand on va en formation, c’est de plus en plus dur aussi, parce qu’on nous met plein de trucs en tête, mais c’est intéressant. Aujourd’hui, je peux entraîner jusqu’en National 2. Passer le BEPF ? Bien sûr, c’est un objectif, mais il faut prendre le temps, ne pas brûler les étapes. Le plus important, c’est la mise en place professionnel et puis ça va dépendre aussi des résultats de l’équipe et du club dans lequel j’évolue; à partir de là, il y aura peut-être des ouvertures pour se présenter, mais chaque chose en son temps.
Le milieu du foot ?
Je suis inquiet pour le milieu du foot, notamment chez les jeunes : j ai évolué pendant 4 ans en U17 Nationaux et… Aujourd’hui, les parents prennent trop de place et ne sont pas conscients du mal qu’ils font à leur enfant. Tout le monde pense que, si un gamin a un peu de qualités, tout de suite il va réussir à devenir pro. Et avec les réseaux sociaux, ce phénomène s’amplifie. On voit même, parfois, que la scolarité passe au second plan. Mais nous, à Istres, ces jeunes, on essaie d’abord d’en faire des bons citoyens avant d’être des bons footballeurs. On vise le 100 % au bac, parce qu’on a des horaires aménagés pour eux, on a un centre d’hébergement, en fait, on a le même fonctionnement qu’un centre de formation labellisé. On se rend compte que les parents deviennent fous. On le voit autour des terrains, c’est de pire en pire. L’humilité des jeunes aussi, ça a changé… Je me souviens que, quand je suis arrivé dans le milieu pro à 18 ans, avec Jean-Louis Gasset, on devait arriver une demi-heure avant tout le monde à l’entraînement; il nous disait de prendre les plots, de déplacer les cages, mais c’était normal, c’était l’apprentissage. Aujourd’hui, tout ça, ça c’est perdu : tu demandes ça à un jeune, il te dit « je porte pas les buts moi ». Les jeunes générations changent. Les coachs aussi changent.
Texte : Anthony BOYER / aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06
Photos : Romain Hugues, DR et Istres FC
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