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Anthony Beuve, l’autre monument d’Avranches

(entretien réalisé en octobre 2019) En août dernier, le portier de l’US Avranches Mont-Saint-Michel a entamé sa 9e saison consécutive en National, sa 13e depuis ses débuts à Rodez. A 34 ans, il n’a pas l’intention de s’arrêter là. Et n’a pas tiré un trait sur ses ambitions. Portrait.

A Avranches, il y a le Mont-Saint-Michel pas loin. Il y a aussi Notre-Dame-des-Champs, le mémorial du Général Patton, le château avec son célèbre donjon. Et puis, dans les cages du stade René-Fenouillère, il y a Anthony Beuve !

Le gardien de l’US Avranches-Mont-Saint-Michel fait partie des meubles. Il est là depuis 2014. Ce n’est pas le record du club, qui appartient à Charles Boateng, arrivé dans la Manche en 2011, mais pas loin ! « Avec Charles, on est les deux survivants ! » commente Anthony Beuve qui, avec ses huit saisons de rang en National – il a entamé sa neuvième saison en août dernier – est en quelque sorte … un autre monument de la ville !

« Lancé à Rodez en 2008 en National ! »

Avec Rodez, en National. Photo Philippe Le Brech

En matière de longévité dans les cages, et à cet échelon, personne ne fait mieux.

Et si l’on en croit les statistiques, quelque chose dont il n’est pas forcément friand, le natif d’Eaubonne, dans les Hauts-de-Seine, disputera vendredi, au Puy-en-Velay, son 213e match de championnat sous les couleurs avranchinaises. Son 272e en National, où il a effectué ses premiers pas avec Rodez, à la fin de la saison 2007-2008, lorsque Franck Rizzetto l’avait lancé dans le grand bain lors de la 37e et avant-dernière journée de championnat à Paul Lignon (succès 3-0 contre Romorantin). Un bail !

Un bail aussi qu’il est à Avranches ! En août dernier, il a battu son record de longévité dans un club, qui datait de son passage dans l’Aveyron (8 saisons, de 2004 à 2012). C’est que le fan du PSG, son club de coeur, où il a d’ailleurs évolué pendant 5 saisons jusqu’à l’âge de 14 ans aux côtés de Steven Nzonzi, n’a pas joué dans trente-six équipes depuis ses débuts !

Avec Rodez, en 2011, en National. Photo Philippe Le Brech

En seniors, il n’a d’ailleurs porté que trois tuniques : celles d’Avranches et Rodez, donc, et celle de Cannes (2012-2014) : « C’est vrai que je suis resté beaucoup moins longtemps à Cannes, seulement deux saisons, et pourtant, c’est comme si j’y avais passé autant de temps qu’à Rodez ou Avranches. »

Ses premiers ballons « Anto » les touche à Osny (Val d’Oise), là où son papa entraînait : « Comme j’ai pu mettre mes enfants au foot, je pense que mon père en a fait de même avec moi, et c’est sans doute lui qui m’a mis aussi dans les cages alors que je pousse mes enfants à ne pas jouer dans les buts » raconte le double quart-de-finaliste de la coupe de France (avec Cannes en 2014 et Avranches en 2017).

Le plus âgé de ses deux enfants, Lyam, 6 ans et demi, joue dans le champ mais « il commence à vouloir aller dans les buts parce que, forcément, il me regarde… Il va falloir que je lui mette plus souvent des petits ponts dans les matchs pour que l’envie lui passe ! ».

« Je me vois jouer le plus longtemps possible »

Photo Bernard Morvan

Après Osny, direction le PSG en compagnie de quelques coéquipiers, puis Franconville (Val d’Oise) pendant un an et enfin Rodez, après un nouveau déménagement.

« Rodez, c’était un club vraiment très familial. Les gens y sont très accueillants et puis c’est un club qui se souvient de ses anciens joueurs. A chaque fois que j’y vais, je suis toujours très bien reçu. J’y ai encore ma famille et mon épouse est de là-bas aussi. J’ai eu l’opportunité d’y retourner comme joueur y’a quelques années mais c’était trop tôt, j’aurais eu l’impression de boucler la boucle. »

Avec Avranches, Anthony Beuve espère continuer de grandir, en accédant à cette fameuse Ligue 3 professionnelle en 2024 (si sa création est confirmée). C’est que, à 34 ans il nourrit toujours la même ambition : celle de jouer en pro.

Photo Bernard Morvan.

« Ici, je fais partie du projet, et je me vois jouer le plus longtemps possible, tant que les blessures me laissent de côté et que je suis compétitif. En 2020 et 2021, j’ai été blessé, mais là, je sens que c’est derrière moi. Je suis revenu un peu comme un joueur neuf. Si j’ai l’opportunité d’aller à un plus haut niveau, et bien on ira (sic) ! J’espère que ce sera avec Avranches. Mais je ne changerai pas de club juste pour changer de club. »

Hier matin, avant d’aller à l’entraînement, Anthony Beuve avait la pêche. Dimanche soir, son club de toujours, le PSG, avait remporté le clasico face à l’OM. Avec Richard Déziré, son ancien coach à Avranches, croisé au café, ils ont pu refaire le match. Et ça, c’était juste avant de répondre à nos questions !

Anthony Beuve, du tac au tac

« J’aimerais bien revoir Steven Nzonzi »

Avec Avranches, en 1/4 de finale de la coupe de France, en 2017, face au PSG, à Caen. Photo Philippe Le Brech

Meilleur souvenir sportif à ce jour ?
Le 1/4 de finale de coupe de France avec Avranches face au PSG, à Caen, en 2017.

Pire souvenir sportif ?
Quand je me suis fait les croisés, y’a 2 ans, à Borgo. Et je m’étais déjà blessé à l’épaule contre eux la saison d’avant, ce qui m’avait valu 8 mois d’indisponibilité. Et je suis revenu à la compétition, chez eux donc, et là, c’est les croisés…

As-tu déjà marqué un but dans ta carrière ?
Non. Mais ça ne va pas tarder.

Vendredi soir au Puy ?
Non, parce que ça voudrait dire qu’on perd 1-0 en fin de match, c’est pas bon ça (rires)

Pourquoi as-tu choisi d’être gardien ?
Je n’ai aucune explication et en plus, je le regrette un peu. Je pense que j’aurais pris plus de plaisir en étant joueur de champ.

C’est vrai qu’en scrutant de vieilles photos de toi à l’entraînement à Cannes, tu étais toujours dans le champ…
Ouaip… C’est exactement ça.

Ton plus bel arrêt ?
Avranches – Tours en 2018. Pas le plus compliqué mais c’est le plus beau à regarder. Je vais capter un ballon en lucarne.

Avec l’AS Cannes, en coupe de France, Anthony Beuve avait stoppé deux tirs au but face à Saint-Etienne en 2014. Photo S. H.

L’arrêt le plus important de ta carrière ?
Le penalty arrêté sur Mevlut Erding avec l’AS Cannes en 32es de finale de la coupe de France contre Saint-Etienne. Il a fait beaucoup parler et ça a permis de faire ce beau parcours après.

Un geste technique préféré ?
Le petit pont.

Tu évites de le faire en match quand même…
Ah je l’ai tenté y a 10 jours au Mans mais ça n’a pas fonctionné ! Bon, y’avait 3 à 0 pour Le Mans. ça m’arrive de temps en temps.

Qualités et défauts sur un terrain ?
Tonique et trop joueur.

Le club ou l’équipe où tu as pris le plus de plaisir ?
La première saison avec Frédéric Reculeau, en 2018-19, dans le jeu, c’était vraiment sympa et beau à voir et à jouer. Et aussi à Cannes, l’année de notre 1/4 de finale de coupe de France, avec un super groupe.

Photo S. H.

Le club où tu n’aurais pas dû signer ?
C’est paradoxal mais c’est Avranches. Alors que c’est ici où j’ai mes meilleurs souvenirs… Si je n’avais pas choisi de signer à Avranches en 2014, j’aurais eu l’opportunité, deux jours après, de signer à Lens. Je ne le regrette pas mais voilà… J’ai été trop impatient. Pour être honnête, à l’époque, Avranches fut un choix par défaut, et 8 ans après, je suis encore là. C’est ici que j’ai construit ma vie, comme quoi ! On a investi dans une maison. Mes enfants sont nés à Avranches.

Le club où tu aurais rêvé de jouer ?
PSG, même si j’y ai joué en jeunes.

Anthony Beuve a porté les couleurs du PSG dans les catégories de jeunes (on reconnaît Steven Nzonzi en haut, 2e en partant de la gauche).

Un stade et un club mythique pour toi ?
PSG, le Parc des Princes.

Un public qui t’a marqué ?
Strasbourg, quand on a joué là-bas en National, c’était impressionnant.

Un coéquipier marquant ?
Ronny Rodelin, on a grandi ensemble. J’étais proche de lui quand on était au collège.

Le coéquipier avec lequel tu avais ou tu as le meilleur feeling sur le terrain ?
Bradley Danger. C’est en partie grâce à lui si j’ai pris autant de plaisir lors de cette saison dont je parlais, en 2018-2019.

Sous le maillot de Rodez, en 2011. Photo Philippe Le Brech

Le joueur adverse qui t’a le plus impressionné ?
En National, c’est Nicolas Pépé, quand il jouait à Orléans, je l’avais trouvé impressionnant.

L’adversaire qui t’a le plus impressionné ?
Pas impressionné, mais je ne sais pas pourquoi, j’ai toujours eu du mal contre Amiens. J’ai rarement été performant contre eux.

Un coéquipier perdu de vue que tu aimerais revoir ?
Steven Nzonzi.

Un coach perdu de vue que tu aimerais revoir ?
Jean-Marc Pilorget.

Un coach que tu n’as pas forcément envie de revoir ?
Il n’y en a pas un en particulier même si ça s’est souvent mal passé avec mes coachs alors qu’au final, on s’est toujours apprécié ! Ce matin encore, je prenais le café avec Richard Déziré, avec qui la relation n’était pas extraordinaire quand je l’ai eu comme coach, mais finalement, ça se passe très bien. Allez, je dirais peut-être Régis Brouard, qui m’a fait monter de jeunes en seniors à Rodez, que j’ai recroisé deux ou trois fois sur les terrains, quand il était au Red Star notamment, mais il ne m’a ni reconnu ni calculé. Après, je ne le connais pas très bien. Je ne lui en veux pas. C’est peut-être le fait de ne pas avoir eu de reconnaissance.

Avec Brice Cognard, à Avranches. Photo Philippe Le Brech.

Un président marquant ?
Gilbert Guérin (Avranches).

Une causerie de coach marquante ?
Une causerie de Jean-Marc Pilorget, quand il nous parlait, le jour anniversaire du décès de sa fille malheureusement… C’était poignant.

Une causerie de coach que tu n’as jamais comprise ?
J’ai eu Rui Pataca à Rodez et parfois c’était un mélange de français et de portugais. On ne comprenait pas toujours très bien.

Le joueur le plus connu de ton répertoire téléphonique ?
Je ne sais pas s’il a changé de numéro, je pense que oui, Jonathan Clauss.

En coupe de France, face au PSG de Blaise Matuidi. Photo Philippe Le Brech.

Une anecdote de vestiaire que tu n’as jamais racontée ?
En Coupe de France avec Cannes, je crois que c’était contre Saint-Etienne. Il y avait le président Ziad Fakhri et son papa dans les vestiaires, et tous les deux avaient ramené des choses étranges du Sénégal, des grigris qu’on s’était mis sur les mains, il y avait aussi un truc, un liquide, de la potion, je ne sais pas, mais il faut croire que ça a marché car on est passé !

Des rituels, des tocs ?
Pendant un match, je suis tout le temps en train de remonter mes chaussettes. Elles glissent tout le temps ! Peut-être parce que je n’ai pas de mollet !

Une devise ?
Non, je laisse ça aux intellectuels (rires).

Que t-a-t-il manqué pour jouer en Ligue 2 ?
Un peu de tout, chance, taille, caractère, entourage. Un peu de talent aussi forcément. Si je dois sortir un critère, ce serait la taille.

Photo Bernard Morvan

Tu es un gardien plutôt …
Joueur !

Un gardien de légende ?
Bernard Lama.

Une idole ?
J’étais fan de Pastore. J’aimais son élégance.

Ta plus grande fierté ?
Mes deux enfants. Livio va avoir 3 ans dimanche et Lyam a 6 ans et demi. Ils sont fans du PSG. Ils sont obligés !

Le milieu du foot, en deux mots ?
Intense et enrichissant.

Texte : Anthony BOYER / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @boyeranthony06

Photos Philippe Le Brech, Bernard Morvan et DR