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Adama Sidibé (Paris 13 Atletico) : « J’aurais gagné plus d’argent en restant en N2 »

A 31 ans, Adama Sidibé découvre le National pour la première fois sous les couleurs du Paris 13 Atletico. Un défi personnel qu’il a abordé sans complexe. Attaquant au profil atypique avec ses 95 kilos, il a marqué ses deux premiers buts au mois de décembre et est prêt à relever le challenge du maintien.

Photo Paris 13 Atletico

Comme beaucoup de ses coéquipiers du Paris 13 Atletico qui reprendra le championnat le vendredi 13 janvier face à Cholet, l’avant-centre Adama Sidibé, 31 ans, découvre le National pour la première fois de sa carrière.

Avec Eu, Oissel, Grand-Quevilly (N3), Beauvais et Rouen (N3 puis N2) ou Chartres (N2), il s’est construit une jolie réputation de buteur.

Attaquant puissant au physique imposant (1,91 mètres, 95 kg), il flirte avec la centaine de buts inscrits dans sa carrière. Après une belle saison à Chartres (8 buts), il a choisi de « se mettre en danger » en signant au mois de juin dernier avec le promu en National, le Paris 13 Atletico.

Depuis l’arrivée de Vincent Bordot sur le banc, il a enchaîné les titularisations et inscrit ses premiers buts avant la trêve face à Borgo (4-0) le 9 décembre. Aussi généreux sur le terrain que dans la vie, Adama Sidibé, qui a grandi en Normandie et écumé plusieurs clubs de sa région, évoque son parcours et sa fierté d’avoir relancé le FC Canteleu, le club de son enfance, dont il a été président pendant deux ans. Entretien avec un homme attachant et de conviction.

« Je n’ai jamais fait de complexe d’infériorité »

Photo Bernard Morvan

A 31 ans, c’était inespéré pour vous de jouer en National…
Il y a quelques années, j’avais eu une proposition d’Avranches mais on n’avait pas pu trouver d’accord financier. J’étais bien à Chartres, le coach Jean-Pierre Papin m’a appris des choses dans le placement et la finition. Mais en quittant Chartres, le N2 où ça marchait bien pour moi, j’ai voulu me mettre en danger. Honnêtement, j’aurais certainement gagné plus d’argent en restant en N2 qu’en signant au Paris 13 Atletico. Mais j’ai voulu relever ce challenge. C’est un défi personnel. Je ne dis pas que c’était inespéré pour moi de jouer en National mais à 31 ans, c’était ma dernière chance. Il y a un gros palier entre la N2 et le National, mais je n’ai pas pris ça comme un truc inaccessible. Je savais que cela ne serait pas simple, que je devrais prouver des choses pour répondre aux interrogations à mon sujet. Mais je suis un bosseur, j’ai confiance en moi et je n’ai jamais fait de complexe d’infériorité.

Avec le Paris 13 Atletico, vous avez disputé 12 matchs sur 16 et vous avez été titulaire lors des cinq derniers. Cela veut dire que votre apprentissage s’est bien passé ?
J’ai quand même dû faire ma place. Je savais que je n’étais pas l’attaquant numéro 1. J’ai aussi eu un carton rouge contre Le Puy (le 12 octobre lors de la 9e journée). Mais je me suis accroché. J’avais vraiment hâte de pouvoir enchaîner les matchs et de débloquer enfin mon compteur. C’est arrivé avant la trêve contre Borgo (4-0, le 9 décembre) avec un doublé et une passe décisive. Je suis content mais je ne suis pas du genre à m’endormir sur ça. L’objectif du Paris 13 Atletico, c’est le maintien et je vais tout faire pour y apporter ma contribution. J’ai un profil un peu atypique, je dois être présent dans l’impact et le jeu aérien.

« En France, on aime bien mettre les gens dans des cases »

Photo Grégoire Placca

Depuis les tribunes, votre silhouette, un peu enveloppée en apparence, interpelle souvent…
(éclats de rires).. Les gens pensent toujours que je suis en surpoids, c’est comme ça depuis que je joue au foot. Je fais 95 kg, je n’ai pas un profil qu’on voit souvent. Mais dans le foot français, on aime bien mettre les gens dans des cases. J’entends ce qu’on dit de moi dans les tribunes. Ceux qui ne me connaissent pas pensent que je ne peux pas courir, ni me déplacer à cause de mon poids. Les défenseurs, c’est pareil. Mais je leur mets d’entrée une accélération et ils comprennent à qui ils ont affaire… Toutes proportions gardées car je n’ai pas son talent, je joue un peu comme Lukaku (rires) !

Photo Bernard Morvan

Vous avez été formé à Cannes et même effectué un essai à West Ham quand vous étiez plus jeune…
Je suis resté trois ans à Cannes. J’ai eu David Bettoni, l’adjoint de Zidane, comme coach en U19, puis des coachs très expérimentés, Albert Emon et Victor Zvunka quand je suis monté avec le groupe National. Mais à mon poste, il y avait le Tchèque Jan Koller, un monstre (2,02 m). Je n’ai pu faire que quelques bancs en National sans jamais rentrer en jeu. Il y a eu des soucis financiers à Cannes. Je suis donc rentré chez moi en Normandie, j’ai signé à Eu-Le Tréport, puis Oissel. J’ai ensuite rejoint Beauvais, toujours en N3. Après un premier passage à Rouen, je suis retourné à Beauvais où j’ai joué pour la première fois en National 2 à 26 ans. Je n’ai pas brûlé les étapes. J’ai pris mon temps : N2 à 26 ans, National à 31 ans…

Avez-vous des regrets sur votre parcours ?
Aucun. Je suis content de mon parcours. J’ai pu marquer des buts dans tous les clubs où je suis passé. Je pense avoir laissé une belle image partout car je ne triche jamais. Sur un terrain, je donne tout. Quand j’étais jeune, on me prédisait un avenir au mieux en DH (R1) et à d’autres une carrière au-dessus. Mais au final, c’est moi qui aie le mieux réussi. J’ai la satisfaction d’avoir presque toujours vécu du foot. Ce n’est pas donné à tout le monde.

Cela veut dire que n’avez donc jamais travaillé en dehors du foot ?
Si, juste quelques mois à l’époque de Oissel en N3. C’était une courte expérience. J’ai le permis D donc j’ai été conducteur de bus et chauffeur-livreur. Je suis toujours resté connecté avec la vraie vie.

« Le National demande beaucoup plus d’exigences »

Photo Grégoire Placca

Chose rare pour un footballeur en activité, vous êtes en effet devenu en 2020 président d’un club, le FC Canteleu, dans la banlieue rouennaise…
C’est le club de mon enfance, j’y ai grandi et c’est là-bas que j’ai commencé le foot. Quand j’étais à Rouen, je venais le mercredi sur des séances de jeunes. Malheureusement, il y a eu des soucis au niveau de l’équipe première qui a été suspendue plusieurs années et est repartie du plus bas niveau départemental. On m’a sollicité pour prendre la présidence, j’ai hésité car je ne voyais pas président à 30 ans. Mais j’ai cédé et j’y suis allé car j’étais accompagné d’amis dans cette aventure. J’ai été bien entouré. On a essayé de structurer le club au niveau des jeunes. Il y avait du potentiel, cela me faisait mal de les voir galérer. Le bilan est positif, on a passé deux belles saisons. On a fait remonter l’équipe première en D3, on a fait monter les jeunes et on est arrivé en quarts de finale de la Coupe de Normandie. On a bien relancé le FC Canteleu, ce qui me tenait vraiment à cœur. Je suis encore très proche du club. Mais j’ai dû démissionner de mon poste de président cet été.

Pour quelles raisons ?
Quand tu es président, tu es sans cesse sollicité pour X ou Y… C’est un poste qui demande beaucoup de temps. Je devais aussi penser à moi. J’ai donc décidé de démissionner pour me consacrer à 100 % au challenge du Paris 13 Atletico. J’habite désormais à Créteil (Val-de-Marne), je n’avais pas envie de m’éparpiller et causer du tort au final à Canteleu et à moi-même. Le National demande beaucoup plus d’exigences donc je devais mettre tous les atouts de mon côté pour être performant face à des équipes qui ont pour certaines des anciens joueurs de L 1. Les Lemoine, Dossevi que j’ai affronté lors du match contre Versailles, ou des stades comme à Nancy et Jean Bouin, avant je ne les voyais qu’à la télé. Maintenant, je joue sur ces terrains et je peux regarder de tels joueurs droit dans les yeux. C’est vraiment kiffant ! Je ne fais aucun complexe mais je donne tout pour être à la hauteur de tout ça.

Adama Sidibé, du Tac au Tac

Photo Bernard Morvan

Première fois dans un stade ?
L’ancien stade du Havre, le stade Jules-Deschaseaux lors d’un match de L1 contre Auxerre. J’avais 11 ans.

Meilleur souvenir de joueur ?
Le premier triplé de ma carrière avec le FC Rouen en National 3.

Pire souvenir de joueur ?
Un carton rouge qui me suspend 7 matchs lorsque que j’étais au CMS Oissel en National 3.

Une manie, une superstition ?
Non, aucune.

Le geste technique préféré ?
La feinte de frappe. C’est magique quand elle passe.

Qualités et défauts sur un terrain ?
Pour mes qualités, je ne lâche rien et je ne triche jamais. Je donne tout quoi qu’il arrive. Mais je suis un peu grincheux avec mes partenaires par moment. C’est mon défaut. Je devrais plus encourager, j’y travaille au quotidien.

Photo Grégoire Placca

Votre plus beau but ?
Avec le FC Rouen en N3. Je suis dos au but, je contrôle de la poitrine et j’enchaîne une volée sans qu’elle touche le sol à l’extérieur de la surface. Un but zlatanesque !

Le joueur le plus fort que vous avez affronté ?
Le dernier en date : Amine Boutrah de Concarneau. C’est très fort.

Le joueur le plus fort avec qui vous avez joué ?
Aziz Kebbal qui a été formé avec moi à l’AS Cannes. Un numéro 10 très très fort techniquement. Il était incroyable.

L’entraineur qui vous a marqué ?
David Bettoni, en U19 à Cannes. Un très bon coach devenu l’entraîneur adjoint de Zidane.

Le président qui vous a marqué ?
Mr Fabrice Tardy, l’ancien président du FC Rouen.

Photo Bernard Morvan

Le club où vous vous êtes senti le mieux ?
L’AS Beauvais.

Le club que vous avez refusé et que vous avez regretté ?
Je n’ai aucun regret.

Le club où vous n’auriez jamais dû signer ?
Aucun. Toutes mes expériences ont été différentes et enrichissantes au final.

Un joueur préféré ou un modèle ?
Ronaldo le Brésilien. Incontestablement le meilleur attaquant de tous les temps.

Photo Bernard Morvan

Un stade mythique ?
Santiago Bernabeau.

Vos amis dans le foot ?
J’en ai pas mal… Je ne pourrais pas tous les citer.

Vos occupations en dehors du foot ?
Ma famille et la lecture.

 

Propos recueillis par Laurent Pruneta / Twitter : @PrunetaLaurent / Mail : lpruneta@13heuresfoot.fr

Photo de couverture : Grégoire Placca

Photos : Bernard Morvan – Grégoire Placca  – Paris 13 Atletico