En 32e de finale de la coupe de France, le club promu en National s’est offert le scalp d’un « gros » de Ligue 1, l’OGC Nice (1-0), moins de 2 ans après avoir éliminé Lorient (L1). Mais en championnat, alors que six équipes descendront en fin de saison, il a pris du retard dans son projet de maintien.
La joie. Mesurée. Contenue. Mais une joie immense tout de même. Samedi, peu avant 20 heures, au coup de sifflet final, les joueurs du Puy Foot 43 n’ont pas exulté. Ils n’ont pas célébré de manière exagérée ou exubérante leur victoire logique et méritée 1 à 0 face à l’OGC Nice (but de Mohamed Ben Fredj dès la 4e minute), qui les propulse en 16e de finale de la coupe de France pour la deuxième fois en trois ans, après avoir atteint les 8es de finale en avril 2021, record historique du club.
Peut-être parce qu’inconsciemment, ils savent que leur travail, leur pain quotidien, c’est le championnat National, où ils n’ont pas eu les résultats escomptés pendant les cinq premiers mois de la compétition (seulement 3 victoires en 16 matchs).
En faire des tonnes après avoir éliminé une formation de Ligue 1 ? Pas le style de la maison. Pas forcément le moment de jouer au malin non plus quand on est 16e sur 18 en championnat, à 4 points du premier non-relégable, Nancy, 12e… prochain visiteur à Massot vendredi ! L’histoire dira si elle fait bien les choses.
Un petit claping et au vestiaire !
Contre Nice, les Ponots ont eu le triomphe modeste dans un stade Charles-Massot rempli (près de 4000 spectateurs) et ne se sont pas attardés sur la pelouse : tout juste se sont-ils fendus d’un bref claping devant la tribune Honneur avant de se lâcher un peu plus, dans l’intimité du vestiaire.
Mais on était loin, très loin des scènes de liesse qui avaient accompagné la victoire au bout du temps additionnel de la dernière journée de National 2, en mai 2022, face à Colomiers, quand un penalty inscrit par Mamadou N’Diaye à la 90’+7 avait propulsé le club du président Christophe Gauthier en National. Du moins, à nouveau propulsé en National, trois ans après une première accession qui s’était terminée en eau de boudin avec l’arrêt des championnats à 9 journées du terme.
En fin de saison 2019-2020, Le Puy Foot, alors 15e (sur 18) et premier relégable, à seulement un point du maintien en National (quatre descentes à ce moment-là), avait été rétrogradé sans pouvoir défendre ses chances jusqu’au bout. Un épisode vécu comme une terrible injustice dans le chef lieu de Haute-Loire.
Bouriaud, Guyot et N’Diaye, les rescapés
Pour expliquer cette sobriété dans la victoire face à Nice, l’argument de dire que le club l’a déjà fait – victoire 1 à 0 contre Lorient (L1) en 16e de finale de la coupe en mars 2021, lors d’une deuxième saison d’affilée à nouveau écourtée par la Covid ! – pourrait tenir la route.
Sauf qu’à l’époque, Le Puy Foot n’avait que la coupe de France pour s’exprimer après un nouvel arrêt des les championnats nationaux décrété par la FFF, après seulement neuf journées de championnat (huit pour les Ponots, qui comptaient un match en moins).
Sauf qu’aussi, le visage de l’équipe était bien différent avec les Oberhauser, Camara, Bosetti, Dufau, Perrot, Boujedra, Fadiga, Trabelsi, Taïpa, Pellegrini, Labissière, pour ne citer qu’eux.
Samedi, face à Nice, Teddy Bouriaud et Baptiste Guyot étaient les seuls titulaires rescapés de ce premier exploit historique 22 mois auparavant face aux Merlus de Christophe Pelissier (Mamadou Ndiaye, le héros de Colomiers, était là lui aussi, mais n’avait pas disputé le 16e de finale face aux Bretons, et Tim Jabol était blessé).
Peut-être pas un hasard si, justement, Bouriaud, l’ancien capitaine de la réserve du FC Nantes, et Guyot, le « roc » infranchissable de la défense, furent les deux meilleurs joueurs sur le terrain face aux Aiglons d’un Lucien Favre touchant de tristesse et de désolation, complètement dépité et désemparé en conférence de presse d’après match (l’entraîneur niçois a finalement été débarqué ce lundi soir).
Vierzon en 16e, « remember » Rumilly
Bien sûr, le succès du Puy Foot 43 Auvergne ne saurait se résumer à ces deux garçons. C’est bien la victoire de tout un groupe, qui s’est dépouillé pendant 90 minutes pour tenir ce 1 à 0. Une victoire qui devra impérativement servir en championnat, la priorité des priorités.
Le coach Roland Vieira, arrivé comme joueur en 2012, puis propulsé sur le banc en 2013 (dixième saison d’affilée), l’a d’ailleurs répété. Savourer la qualification, oui, mais pas trop longtemps.
L’adversaire du prochain tour, en 16e de finale, on en parle ? OK, oui, mais : « Moi, ce qui m’intéresse, c’est de gagner notre prochain match de championnat contre Nancy vendredi, prévient Vieira; Alors, comme on ne sera pas européen en fin de saison, le tirage, on verra bien… Maintenant, si j’avais un souhait, ce serait de vivre un nouveau match à Massot, afin de partager l’événement avec notre public, nos partenaires, nos salariés et nos 80 bénévoles qui ont été mobilisés pour ce match face à Nice et qui ont fait un boulot remarquable, parce que contre Lorient, en 2021, on avait gagné, oui, mais à huis-clos. »
Bon, pour le 16e de finale, ce sera bien à Massot, et face à Vierzon, un club promu en National 2. « Remember Rumilly » : après l’exploit face à Lorient, les Auvergnats étaient tombés de très haut un mois plus tard à Rumilly, en 8e de finale, où ils étaient complètement passés au travers (4-0). Une leçon à retenir.
Nancy vendredi à Massot
Mais avant Vierzon, il y a Nancy, un club qui frôle la catastrophe industrielle. Et avant Nancy, il y a donc eu cet indiscutable succès face à Nice, un moment rare pour un club amateur du 3e échelon (Le Puy Foot n’a pas le statu pro, contrairement à d’autres clubs de la poule).
On n’élimine pas tous les jours une équipe européenne ! Alors il faut savourer. Mais pas trop longtemps quand même, donc ! Au Puy, la joie ne dure pas plus de 24 heures. Le temps d’un dimanche. Car vendredi, c’est déjà Nancy qui vient à Massot, et le contexte sera complètement différent : retour au championnat face à un adversaire devenu un concurrent direct pour le maintien, l’objectif avoué des Ponots.
Et nouvelle équation à résoudre pour le coach Roland Vieira, suspendu face à Nice et perché en face de la tribune, sur l’échafaudage réservé aux caméras du diffuseur. Un Vieira pour qui la joie » ne dure que 20 minutes », et qui sait bien que les espaces seront moins larges que lors de ce 32e de finale face à Nice, typiquement le genre de match plus « facile », entre guillemets, à préparer, à aborder.
En National, dans un championnat aussi homogène, avec des blocs très resserrés, où les espaces sont plus rares, ce n’est vraiment pas la même limonade. « Il n’y a pas d ‘euphorie, parce que je le répète, on a des enjeux beaucoup plus importants, poursuit Vieira, rejoint cette saison sur le banc par un de ses anciens coéquipiers en jeunes à Lyon, Florent Balmont (tous deux ont gagné, ensemble, la coupe Gambardella en 1997, en lever de rideau de Montpellier-Nice au Parc des Princes; on doit juste de servir de ce match pour avancer, progresser. »
Mise en lumière
Voilà, la coupe de France est repassée en Haute-Loire, et elle a encore accouché d’un exploit retentissant comme seule cette épreuve est capable d’en offrir (on a encore vu une Régional 1, le FCO Strasbourg, « taper » une Ligue 1, Clermont !).
Un exploit qui fera date, bien sûr, et trouvera une jolie place dans le livre d’or de ce club familial encore méconnu et que l’on confond souvent avec le site touristique du Puy du fou, en Vendée !
Non, le Puy Foot 43 n’a rien à voir avec les spectacles médiévaux chers à Philippe de Villiers, mais est capable d’assurer le spectacle 90 minutes durant comme cela a été le cas face aux Azuréens. Cela va servir sa promotion et, bien entendu, celle du staff et des joueurs. Car tout le monde le sait, la coupe de France est un tremplin pour moult coachs et joueurs.
« Oui, la coupe permet de se mettre en lumière individuellement et même si cela ne fait pas partie de ma philosophie, c’est tout de même une réalité, acquiesce Roland Vieira. On l’avait vu contre Lorient y’a deux ans où j’avais titularisé Lenny (Joseph) en attaque, qui n’avait disputé que 3 matchs de N2 avec nous cette saison-là, et qui dans la foulée de l’exploit et de son but, a signé à Metz en Ligue 1. Par exemple, pour nos joueurs prêtés cette saison, je pense à Yanis (Mbemba, FC Nantes), Momo (Mohamed Ben Fredj, Auxerre) ou Max (Maxence Rivera, Saint-Etienne), ce sont des matchs importants, mais ils le sont aussi pour tous les autres de mon équipe dont le National est le gagne-pain. Donc bien, sûr en Coupe de France, y’a vraiment une mise en lumière et un aspect individuel. »
Maintenant, avec cette performance de haute volée dans l’épreuve reine du football français, qui raconte chaque année de belles histoires et met en avant le travail des clubs amateurs et de ses acteurs, les Ponots ne doivent plus se cacher.
Christophe Gauthier, un président confiant
Croisé dans les allées du stade Massot dont la vue imprenable sur les monuments de la ville confère au lieu un charme dingue, et ce malgré la présence d’une piste d’athlétisme, le président Christophe Gauthier, chef d’entreprise apprécié et reconnu dans la région, réputé pour laisser travailler son staff, avait le sourire. Pas mécontent non plus de voir la manne financière représentée par une participation en 16e de finale (le club, qui dispose d’un budget d’environ 2,5 millions d’euros, est déjà assuré de toucher 102 500 euros de la FFF au titre de la dotation), il se voulait résolument optimiste quant au maintien en National.
D’abord parce que cette inter-saison a permis de procéder à quelques réajustements : le manager du club, Olivier Miannay, présent au club depuis 2018 et présenté comme un spécialiste de la division, s’active pour améliorer et retoucher son effectif. D’ailleurs, quelques jours avant son 32e de finale, le club a enrôlé le milieu de terrain d’Annecy, Ligue 2, Alexandre Fillon. Et ce n’est peut-être pas fini.
Ensuite parce que, hormis une claque reçue au Mans (5-1), l’équipe tourne mieux et reste sur des résultats intéressants et prometteurs, notamment à l’extérieur, où lors des six derniers matchs, elle a signé deux nuls à Concarneau et Martigues, et engrangé un succès à Orléans.
Invaincue à domicile tout au long de la saison passée en National 2, l’équipe de Roland Vieira pèche cette fois chez elle. Pourtant, hormis face au Red Star, elle a toujours rivalisé avec l’adversaire mais a manqué d’efficacité pour concrétiser ses occasions. Si bien qu’elle traîne ce boulet qui lui vaut aujourd’hui de figurer dans le wagon des relégables. Avec 11 buts inscrits, plus mauvaise attaque du National, c’est clairement insuffisant. Mais elle est aussi l’équipe qui a pris le plus de points (5 sur 9) face aux trois premiers du classement, Concarneau (0-0 à Guy-Piriou), Martigues (1-1 à Francis-Turcan) et Versailles (2-0 à Massot).
Maintenant, si elle réédite ce type de prestation en championnat, il est évident qu’elle prendra des points et se rapprochera de son objectif : « J’ai aimé nos sorties de balles, notamment lors de notre première mi-temps très aboutie, analysait le coach après Nice; j’ai aimé aussi la débauche d’énergie, la solidarité, l’envie de ne pas prendre de but. »
Enchaîner en championnat, voilà ce qui importe à l’entraîneur et à son staff – qui a également enregistré le retour à Noël de son préparateur physique Bertrand Dupuis -, conscients que le chemin non pas de Compostelle, mais celui qui conduit au maintien, est encore très long.
Texte : Anthony BOYER / Mail : aboyer@13heuresfoot.fr / Twitter : @BOYERANTHONY06
Photos : Sébastien Ricou / Le Puy Foot 43